Décision

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Fitzpatrick c. Pavcan Construction inc.

2023 QCCQ 6369

COUR DU QUÉBEC

« Division des petites créances »

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

BEAUHARNOIS

LOCALITÉ DE

SALABERRY-DE-VALLEYFIELD

« Chambre civile »

 :

760-32-702116-213

 

 

 

DATE :

Le 17 août 2023

______________________________________________________________________

 

SOUS LA PRÉSIDENCE DE

L’HONORABLE

CLAUDE MONTPETIT, J.C.Q.

______________________________________________________________________

 

 

CLAYTON FITZPATRICK

 

Demandeur

 

c.

 

PAVCAN CONSTRUCTION INC.

 

Défenderesse

______________________________________________________________________

 

JUGEMENT

______________________________________________________________________

 

[1]                Le litige concerne des travaux d’asphaltage réalisés par la défenderesse et dont le demandeur soulève la non-conformité pour laquelle il demande une compensation monétaire limitée à 15 000$ afin de s’adresser à la présente division des petites créances.

[2]                La défenderesse nie que les travaux réalisés comportent des malfaçons et ajoute qu’elle a proposé des travaux correctifs afin de satisfaire le demandeur qui a rejeté toutes ses propositions.

QUESTIONS EN LITIGE

[3]                Le demandeur a-t-il démontré que les travaux d’asphaltage de son entrée réalisés par la défenderesse à la fin octobre 2019 ne sont pas conformes à ses demandes spécifiques et aux règles de l’art?

[4]                Si oui, le demandeur a-t-il démontré son droit à une compensation monétaire et pour quel montant?

LE CONTEXTE

[5]                À l’été 2019, le demandeur qui exploite une entreprise de réparation mécanique est à la recherche d’un entrepreneur en pavage afin de refaire son entrée commerciale.

[6]                Il accepte de recevoir une soumission de la défenderesse (ci-après appelée « Pavcan ») qui est cliente chez lui depuis quelques années pour l’entretien des véhicules de son entreprise de pavage.

[7]                Pavcan accepte de réduire son prix afin d’égaler la meilleure soumission reçue par le demandeur pour un asphalte d’une épaisseur de 2,5 pouces, car le demandeur reçoit souvent des véhicules lourds à réparer (pièce P-1, facture de 25 294,50$).

[8]                Au début octobre 2019, la défenderesse Pavcan procède aux travaux préparatoires de nivellement et d’épandage de poussière de roche en prévision du pavage.

[9]                Les travaux de pavage sont effectués le 23 octobre 2019 à la toute fin de la saison puisque la température froide rend difficile, voire impossible, de paver plus tard en automne. Le prix convenu est payé par le demandeur, soit 25 294,50$.

[10]           Durant l’hiver, le demandeur voit des particules d’asphalte qui se détachent et sont facilement visibles dans la neige blanche.

[11]           Au printemps, Pavcan se présente sur place à la demande du client Fitzpatrick afin de prendre connaissance de la situation.

[12]           Le représentant de Pavcan, monsieur Naderpour, mentionne alors qu’il y a un problème avec la qualité de l’asphalte dont il va informer son fournisseur afin de corriger la situation.

[13]           S’ensuit alors une longue série d’échanges de courriel et de lettres par lesquels les parties se confrontent et échangent leurs points de vue.

[14]           Une expertise par carottage est effectuée par la firme Meloche, un fournisseur d’asphalte, qui conclut à une compaction insuffisante et à un manque d’épaisseur de bitume à certains endroits (pièce P-7, rapport).

[15]           Le 4 janvier 2021, après des échanges infructueux durant toute l’année 2020, le demandeur fait parvenir une lettre de mise en demeure et de dénonciation formelle à Pavcan accordant à celle-ci un délai de dix jours pour s’engager formellement à reprendre les travaux dès que la température printanière le permettra (pièce P-4, lettre).

[16]           En réponse à cette lettre, Pavcan propose d’épandre un scellant sur l’asphalte (pièce P-5, lettre), ce qui est refusé par le demandeur qui insiste pour que l’asphalte soit enlevé et refait (pièce P-6, lettre).

[17]           Les parties étant incapables d’en venir à une entente, le demandeur s’adresse à la Cour du Québec, division des petites créances, en date du 25 juin 2021.

LE DROIT

[18]           Les articles suivants du Code civil du Québec sont pertinents à l’analyse du présent litige :

« 2098. Le contrat d’entreprise ou de service est celui par lequel une personne, selon le cas l’entrepreneur ou le prestataire de services, s’engage envers une autre personne, le client, à réaliser un ouvrage matériel ou intellectuel ou à fournir un service moyennant un prix que le client s’oblige à lui payer.

2100. L’entrepreneur et le prestataire de services sont tenus d’agir au mieux des intérêts de leur client, avec prudence et diligence. Ils sont aussi tenus, suivant la nature de l’ouvrage à réaliser ou du service à fournir, d’agir conformément aux usages et règles de leur art, et de s’assurer, le cas échéant, que l’ouvrage réalisé ou le service fourni est conforme au contrat.

Lorsqu’ils sont tenus au résultat, ils ne peuvent se dégager de leur responsabilité qu’en prouvant la force majeure.

1458. Toute personne a le devoir d’honorer les engagements qu’elle a contractés.

Elle est, lorsqu’elle manque à ce devoir, responsable du préjudice, corporel, moral ou matériel, qu’elle cause à son cocontractant et tenue de réparer ce préjudice; ni elle ni le cocontractant ne peuvent alors se soustraire à l’application des règles du régime contractuel de responsabilité pour opter en faveur de règles qui leur seraient plus profitables. »

L’EXPERTISE

[19]           Le seul témoin expert dont le témoignage a été entendu par le Tribunal est le chef de laboratoire de la firme Meloche, monsieur Frédéric Durand.

[20]           Celui-ci a fait procéder à l’analyse des échantillons d’asphalte recueillis chez monsieur Fitzpatrick et conclut que celui-ci n’est pas acceptable, a été mal compacté et comporte des « vides » bien au-delà de la marge acceptable de 4%.

[21]           Pour l’expert Durand, cet asphalte aura une durée de vie utile en deçà des standards de l’industrie et va se détériorer rapidement faisant en sorte que pour lui la seule solution durable et acceptable est de remplacer l’asphalte.

[22]           Questionné par le représentant de la défenderesse à savoir si une couche additionnelle d’asphalte serait acceptable afin de remédier à la situation, il répond par la négative.

ANALYSE

[23]           Le contrat conclu entre les parties est de nature forfaitaire et l’obligation de la défenderesse Pavcan est de la nature d’une obligation de résultat.

[24]           Il avait l’obligation de livrer un produit de qualité, ce qu’il n’a pas fait selon la preuve soumise au Tribunal.

[25]           Dans son témoignage, monsieur Naderpour de Pavcan mentionne qu’au moment de la réalisation des travaux le 29 octobre 2019 la température était devenue trop froide.

[26]           Or, le Tribunal est d’avis que si tel était le cas, ce qui n’a pas été prouvé, Pavcan devait en tant qu’entrepreneur prudent et responsable refuser de faire les travaux puisqu’il ne pouvait en garantir la qualité.

[27]           Malgré l’insistance de son client, le Tribunal est d’avis qu’il aurait dû reporter les travaux au printemps suivant.

[28]           Le Tribunal retient les témoignages crédibles du demandeur et de l’expert François Durand et conclu qu’il y a eu exécution fautive des travaux en raison du manque de compaction et du non-respect des demandes du client qui exigeait une épaisseur de 2,5 pouces d’asphalte sur toute la superficie de l’entrée.

[29]           La défenderesse Pavcan n’a pas prouvé les allégations de sa contestation ni qu’elle a proposé une solution valable pour remédier à la situation.

[30]           Quant au montant réclamé de 15 000$, le Tribunal estime que le demandeur Fitzpatrick a prouvé avoir droit à ce montant par la production des factures qu’il a assumées pour remédier à la situation :

P-21 : Facture du 5 juillet 2021 (Les Pavages Pascal Inc.) : 13 797,00$

P-22 : Facture du 11 mai 2021 (Excavation Nobelsi Inc.) :   1 724,63$

P-23 : Facture du 17 juillet 2023 (Route SF)     1 141,13$

         Total : 16 662,76$

[31]           Le demandeur a rempli son obligation de minimiser ses dommages en corrigeant la situation pour un montant moindre que le contrat original de 25 294,50$ (pièce P-1).

[32]           En conclusion, le Tribunal ajoute qu’un contrat mal exécuté équivaut à un contrat non exécuté donnant ouverture à un recours en résiliation de contrat ou en diminution de prix tel qu’intenté par le demandeur Fitzpatrick.

PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

ACCUEILLE la demande;

CONDAMNE la défenderesse Pavcan Construction Inc. à payer au demandeur la somme de 15 000$ avec intérêts au taux légal et l’indemnité additionnelle de l’article 1619 du Code civil du Québec à compter de la réception de la mise en demeure du 4 janvier 2021 et les frais de justice de 211$.

 

 

 

 

 

__________________________________

CLAUDE MONTPETIT, J.C.Q.

 

 

Date d’audience : 16 juin 2023

 

AVIS AUX PARTIES

 

SECTION III

 

EXTRAIT DU CODE DE PROCÉDURE CIVILE DU QUÉBEC

 

LE DÉPÔT DES ACTES DE PROCÉDURE ET LA PRODUCTION DE DOCUMENTS.

 

108 (2) Tout document ou élément matériel de preuve produit au dossier à titre de pièce doit y demeurer jusqu’à la fin de l’instance, à moins que toutes les parties ne consentent à son retrait. Les parties doivent, une fois l’instance terminée, reprendre possession des pièces qu’elles ont produites; à défaut, le greffier, un an après la date du jugement passé en force de chose jugée ou de l’acte qui met fin à l’instance, peut les détruire. Dans l’un et l’autre cas, le juge en chef du tribunal concerné peut surseoir à la destruction des pièces s’il considère qu’elles peuvent encore être utiles.

AVIS :
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