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Commission municipale du Québec

 

 

 

 

Date : le 9 juillet 2024

 

 

Dossier : CMQ-70564-001   (33827-24)

 

 

Juge administratif : Philippe Asselin

 

 

 

 

 

Le Club de Ski de Fond Amiski

de St-Antonin inc.

 

Demanderesse

 

et

 

Ville de Saint-Antonin

 

Mise en cause

 

 

 

 

DEMANDE DE RECONNAISSANCE AUX FINS

D’EXEMPTION DES TAXES FONCIÈRES

 

 

 

D écision

APERÇU

[1]               Ayant comme mission de promouvoir le ski de fond, la raquette et la pratique de sports de plein air en général, Le Club de Ski de Fond Amiski de St-Antonin inc. (la demanderesse) s’adresse à la Commission municipale du Québec (la Commission) afin que des immeubles lui appartenant fassent l’objet d’une exemption aux fins des taxes foncières.

[2]               Ces immeubles sont situés sur le territoire de la mise en cause VILLE DE SAINTANTONIN (la Ville).

[3]               Comme nous le verrons, la Commission est d’avis que la demanderesse n’est pas en droit d’obtenir la reconnaissance demandée.

QUESTIONS SUR LESQUELLES LA COMMISSION DOIT STATUER

[4]               Afin d’accorder la reconnaissance demandée, la Commission doit déterminer si les conditions prévues aux articles 243.1 et suivants de Loi sur la fiscalité municipale[1] (la LFM ou la Loi) sont satisfaites.

[5]               Pour y parvenir, la Commission doit se prononcer sur les questions suivantes :

  1. Les conditions d’admissibilité à une reconnaissance dont découle une exemption aux fins des taxes foncières pour les immeubles visés sont-elles remplies?
  2. Le cas échéant, quelle est la date d’entrée en vigueur de la reconnaissance?

[6]               Avant de procéder à l’analyse de ces questions en fonction du cadre juridique applicable, il importe de présenter une vue d’ensemble de la situation soumise à la Commission dans la présente affaire.


CONTEXTE

Circonstances de la demande

[7]               Au mois de janvier 2024, la demanderesse s’adresse à la Ville afin de demander une exemption des taxes foncières pour différents immeubles qui lui appartiennent.

[8]               Le 12 février 2024, la Ville adopte la résolution numéro 2024-02-50. Dans cette résolution, la Ville indique qu’une telle demande doit être déposée à la Commission et en profite pour informer cette dernière qu’elle accepte cette demande et qu’elle lui recommande d’accorder celle-ci.

[9]               Le 22 février 2024, la Commission reçoit de la demanderesse une demande de reconnaissance aux fins d'exemption des taxes foncières pour les immeubles en question.

[10]           Le 5 mars 2024, afin de s’assurer que la procédure de consultation prévue par la Loi[2] soit tout de même respectée, la Commission transmet à la Ville un avis à cette fin.

[11]           Le 11 mars 2024, la Ville informe la Commission qu’elle accepte toujours la demande et qu’elle maintient sa recommandation[3].

Les immeubles visés par la demande

[12]           Les immeubles faisant l’objet de la demande de reconnaissance sont les suivants :

 

NUMÉRO DE LOT (CADASTRE DU QUÉBEC)

NUMÉRO MATRICULE

DESCRIPTION

6 494 329

8589 48 0729

Situé au 746, chemin Lavoie. Terrain sur lequel se trouve un bâtiment (chalet principal) utilisé pour l’accueil des fondeurs et la location d’équipements (skis, raquettes, traineaux). Le bâtiment comporte un niveau, lequel comprend un espace d’accueil, un local de rangement et un espace d’entreposage.

4 901 048

8488 16 2028 0 010 001

Situé sur le 4e rang. Terrain sur lequel se trouve un refuge (Patte d’Ours). Le bâtiment comporte un seul niveau à aire ouverte.

5 808 033

8487 88 0995 0 010 001

Situé sur le rang Nord du Vieux Chemin. Terrain sur lequel se trouve un refuge (refuge Rouge). Le bâtiment comporte un seul niveau à aire ouverte avec mezzanine.

[13]           La demande de reconnaissance vise l’ensemble des immeubles et la demanderesse en est la seule utilisatrice.

ANALYSE

[14]           Le portrait général du dossier étant maintenant brossé, il convient maintenant de statuer sur les questions requises, et ce, afin de déterminer si la demanderesse peut obtenir la reconnaissance demandée.

  1. Les conditions d’admissibilité à une reconnaissance dont découle une exemption aux fins des taxes foncières pour les immeubles visés sont-elles remplies?

[15]           Pour accorder une reconnaissance en présence d’un seul utilisateur, la Commission doit s’assurer que toutes[4] les conditions suivantes sont remplies :

-            La demanderesse a la qualité requise pour faire l’objet de la reconnaissance[5];

-            Des activités exercées dans ou sur les immeubles par l’utilisateur sont admissibles[6];

-            Les activités admissibles sont exercées dans un but non lucratif[7];

-            L’exercice d’activités admissibles constitue l’utilisation principale des immeubles[8].

[16]           La Commission est d’avis que ces conditions ne sont pas totalement remplies. Voyons ce qu’il en est.

1.1  La qualité de la demanderesse pour faire l’objet de la reconnaissance

[17]           Les articles 243.3, 243.5 et 243.6 LFM prévoient que la personne qui peut faire l’objet d’une reconnaissance doit être une personne morale à but non lucratif et que l’immeuble visé par la demande doit être inscrit à son nom au rôle d’évaluation foncière.

[18]           En l’espèce, la demanderesse est une personne morale à but non lucratif[9] constituée en vertu de la Partie III de la Loi sur les compagnies[10].

[19]           Par ailleurs, les immeubles sont inscrits à son nom au rôle d’évaluation foncière en tant que propriétaire[11].

[20]           La demanderesse a donc la qualité requise pour présenter la demande et pour faire l’objet de la reconnaissance.

1.2  Les activités exercées dans ou sur les immeubles par l’utilisateur

[21]           En vertu de l’article 243.2 LFM, le propriétaire de l’immeuble dont l’utilisation remplit les conditions prévues à l’article 243.8 peut être considéré comme un « utilisateur ».

[22]           Mentionnons également que l’article 243.7 LFM prévoit que seul un immeuble dont l’utilisation remplit les conditions prévues à l’article 243.8 peut être visé par une reconnaissance.

[23]           Les activités exercées dans ou sur les immeubles par la demanderesse consistent essentiellement à offrir 22 kilomètres de pistes de ski de fond et 15 kilomètres de pistes de raquettes aux amateurs de ces sports d’hiver[12].

[24]           Ainsi, la demanderesse offre plus particulièrement les activités et services suivants :

-            Pratique du ski de fond et de la raquette en formule libre;

-            Tenue de compétitions provinciales et régionales;

-            Journées portes ouvertes pour les citoyens et les nouveaux arrivants de la Ville;

-            Activités découvertes des pistes de ski de fond et de raquettes, comme les randonnées au clair de lune et les randonnées avec accompagnateurs lors de la Fête des neiges organisée par la Ville;

-            Activités d’initiation au ski de fond et à la raquette pour les groupes scolaires, auxquelles les participants peuvent partager entre eux les techniques inhérentes à ces sports tout en étant accompagnés;

-            Entrainement des cadets de l’air;

-            Formations pour adultes offertes par des moniteurs certifiés;

-            Formations pour les instructeurs de ski de fond de l’organisme;

-            Location d'équipements de ski de fond, de raquettes et de traineaux;

-            École de ski « Jack Rabbit » pour les jeunes âgés de cinq ans et plus;

-            Partenariat avec la Ville de Rivière-du-Loup dans le cadre de la tenue des Jeux du Québec.

[25]           Annuellement, la demanderesse livre environ 350 cartes de membres et accueille environ 2 000 personnes dans ses sentiers.

[26]           Ces activités sont-elles admissibles à l’obtention d’une reconnaissance? Pour répondre à cette question, il faut vérifier si ces activités entrent dans celles prévues à l’article 243.8 LFM :

 

« 243.8. L’utilisateur doit, dans un but non lucratif, exercer une ou plusieurs des activités admissibles de façon que cet exercice constitue l’utilisation principale de l’immeuble.

 

Sont admissibles:

 

  la création, l’exposition ou la présentation d’une œuvre dans le domaine de l’art, pourvu, dans le cas de l’exposition ou de la présentation, que la possibilité d’y assister soit offerte, sans conditions préférentielles, au public;

 

  toute activité d’ordre informatif ou pédagogique destinée à des personnes qui, à titre de loisir, veulent améliorer leurs connaissances ou habiletés dans l’un ou l’autre des domaines de l’art, de l’histoire, de la science et du sport ou dans tout autre domaine propre aux loisirs, pourvu que la possibilité de profiter de l’activité soit offerte, sans conditions préférentielles, au public;

 

2.1°  la conservation d’objets destinés à être exposés ou présentés dans le cadre d’une activité, autre que la création d’une œuvre dans le domaine de l’art, visée au paragraphe 1° ou 2°;

 

  toute activité exercée en vue de:

 

a)  promouvoir ou défendre les intérêts ou droits de personnes qui, en raison de leur âge, de leur langue, de leur sexe, de leur orientation sexuelle, de leur race, de leur couleur ou de leur origine ethnique ou nationale ou en raison du fait qu’elles ont une maladie ou un handicap, forment un groupe;

 

b)  lutter contre une forme de discrimination illégale;

 

c)  assister des personnes opprimées, socialement ou économiquement défavorisées ou autrement en difficulté;

 

d)  empêcher que des personnes ne deviennent en difficulté. »

 

[27]           Manifestement, seules les activités d’ordre informatif ou pédagogique destinées à des personnes qui, à titre de loisir, veulent améliorer leurs connaissances ou habiletés dans l’un ou l’autre des domaines du sport ou dans tout autre domaine propre aux loisirs apparaissent pertinentes en l’espèce.

[28]           Encore faut-il que toutes les exigences prévues au paragraphe 2° du deuxième alinéa de l’article 243.8 LFM soient respectées. Celles-ci sont les suivantes[13] :

1)       L’activité doit être d’ordre informatif ou pédagogique;

2)       L’activité doit être destinée à des personnes qui, à titre de loisir, veulent améliorer leurs connaissances ou habiletés;

3)       Les connaissances ou les habiletés en question doivent se situer dans un domaine propre aux loisirs;

4)       La possibilité de profiter de l’activité doit être offerte, sans conditions préférentielles, au public.

[29]           Dans l’affaire Club récréatif des 4-Cantons[14], la Commission rappelle que les activités doivent, en premier lieu, être fondamentalement d’ordre informatif ou pédagogique : 

 

« [19]   L’immeuble est utilisé pour la pratique de sports, d’activités physiques ou de loisirs. Cela ne le rend pas admissible pour autant, puisque les activités doivent d’abord et avant tout être d’ordre informatif ou pédagogique. Les activités exercées ici se situent dans le domaine du sport ou des loisirs en général, mais elles ne revêtent aucun élément informatif ou pédagogique, sauf pour les quelques panneaux de sensibilisation qui y sont installés. Mais cet élément informatif a très peu d’importance par rapport à l’utilisation principale de l’immeuble qui est essentiellement dédiée à des activités strictement récréatives. 

 

[…] 

 

[22]      À plusieurs reprises, la Commission a souligné que les activités récréatives ne sont pas admissibles, à moins que ces activités comportent un élément éducatif ou informatif significatif et qu’elles soient destinées à des personnes qui veulent améliorer leurs connaissances ou leurs habiletés dans un domaine propre aux loisirs. Ce n’est manifestement pas le cas ici. »

 

[30]           Par ailleurs, dans l’affaire Complexe sportif intérieur de Granby et Ville de Granby[15], la Commission précise que « pour être d’ordre informatif ou pédagogique, l’activité doit donner de l’information, être éducative ou apporter une formation intellectuelle ou manuelle ».

[31]           En appliquant tous ces principes dans le présent dossier, la Commission considère que les activités de la demanderesse qui sont admissibles sont les activités découvertes, les activités d’initiation éducatives avec les groupes scolaires, les formations pour adultes, l’école de ski pour jeunes et l’entrainement des cadets de l’air[16].

[32]           Ces activités sont d’ordre pédagogique ou informatif et sont destinées à des personnes qui, à titre de loisir, veulent améliorer leurs habiletés et leurs connaissances dans le domaine du sport (ski de fond et raquettes). De plus, la preuve révèle que ces activités sont offertes au public, sans conditions préférentielles.

[33]           Toutefois, la pratique du ski de fond et de la raquette en formule libre n’est pas une activité admissible. Il ne fait aucun doute que cette activité se situe dans un domaine propre aux loisirs certes, mais elle n’est pas, à la base, d’ordre pédagogique ou informatif.

[34]           La location d’équipements n’est pas non plus une activité admissible puisqu’elle n’est manifestement pas d’ordre informatif ou pédagogique. Qui plus est, la preuve telle que présentée ne permet pas d’établir que la location d’équipements est un service accessoire à des activités admissibles.

[35]           Quant aux compétitions et aux évènements d’envergure, il ne s’agit pas dans le présent dossier d’activités d’ordre informatif ou pédagogique. La preuve ne permet pas de déterminer, par exemple, que ces activités se rattachent à des cours, à des stages de formation ou à des activités d’apprentissage. La finalité de ces activités n’est donc pas la transmission de connaissances ou d’information, mais plutôt la tenue d’une épreuve purement sportive ou compétitive[17].

[36]           En outre, même si elle a pu contribuer à la renommée du site, la tenue des Jeux du Québec était une activité ponctuelle et exceptionnelle. Il ne s’agit pas d’une activité exercée habituellement ou régulièrement par la demanderesse.

[37]           En ce qui a trait à la formation des instructeurs, cette activité n’est pas admissible puisque celle-ci est exercée durant une période de temps socialement contrainte ou engagée[18]. Des activités de formation suivies dans le cadre du travail et des activités de perfectionnement pratiquées dans un cadre obligatoire ne sont pas des activités de loisir[19].

[38]           Puisque certaines activités exercées par la demanderesse dans ou sur les immeubles visés par la demande sont admissibles, cette condition est respectée. Toutefois, en plus d’être admissibles, ces activités doivent respecter d’autres conditions.

1.3 Le but non lucratif des activités admissibles

[39]           Certaines activités exercées par la demanderesse étant admissibles, celles-ci doivent de plus être exercées dans un but non lucratif, et ce, tel que prévu au premier alinéa de l’article 243.8 LFM. Tel est le cas dans le présent dossier.

[40]           L’examen des états financiers de la demanderesse au 30 avril 2023 démontre que ses revenus proviennent principalement des cartes de membres et des laissez-passer pour accéder au site, de la location d’équipements et de certaines activités.

[41]           Bien que ces revenus puissent paraître à première vue profitables financièrement, ceux-ci sont manifestement générés dans une perspective d’autofinancement. En effet, une bonne partie de ces revenus servent à payer les dépenses, lesquelles sont surtout liées à l’entretien des pistes, des bâtiments et des équipements, au carburant, aux compensations des bénévoles, aux honoraires professionnels et aux autres frais relatifs à l’exercice des activités de l’organisme.

[42]           La demanderesse ne semble donc pas motivée par une recherche de profits. Au surplus, une activité ne cesse pas automatiquement d’être admissible du seul fait que l’utilisateur en tire des revenus[20].

[43]           Mentionnons également que rien ne démontre que les membres de l’organisme retirent un gain pécuniaire ou que ceux-ci bénéficient d’un quelconque autre avantage personnel.

1.4 L’utilisation principale des immeubles visés par la demande

[44]           Le premier alinéa de larticle 243.8 LFM prévoit également que l’utilisateur doit exercer une ou plusieurs activités admissibles de façon que cet exercice constitue l’utilisation principale des immeubles visés. Cette condition mérite certains commentaires préalables afin d’en faciliter la compréhension.

[45]           Dans le cadre d’une demande de reconnaissance logée en vertu des articles 243.1 et suivants de la LFM, la Commission doit, pour vérifier si cette condition est satisfaite, adapter son approche et son évaluation en fonction de la demande formulée[21].

[46]           Tel que mentionné précédemment, la demande dans le présent dossier a été logée par la demanderesse en tant que seule utilisatrice de l’ensemble des immeubles concernés. La Commission doit donc appliquer l’approche qui convient à ce type de demande.

[47]           En ce sens, la Commission doit rechercher la vocation globale des immeubles pour en déterminer l’utilisation principale[22]. Les activités admissibles doivent constituer l’utilisation principale de chaque immeuble dans son intégralité pour que la reconnaissance soit accordée[23].

[48]           Les activités admissibles exercées sur ou dans des immeubles ne doivent pas être que secondaires ou accessoires. Elles doivent être dominantes[24].

[49]           Dans l’affaire Chevaliers de Colomb du Conseil de Jonquière No: 2756 et Ville de Saguenay[25], la Commission mentionne ce qui suit :

 

« [33]      La réalité n’est pas toujours tranchée, noire ou blanche. Plusieurs organismes qui s’adressent à la Commission pour obtenir une reconnaissance exercent à la fois des activités admissibles et des activités qui ne le sont pas. Ce qui est alors déterminant, c’est la prédominance ou non des activités admissibles; la Commission doit procéder à l’analyse de la preuve afin de déterminer si l’exercice d’activités admissibles constitue l’utilisation principale de l’immeuble. »

[Soulignements ajoutés]

 

[50]           Ces propos sont de circonstance puisque la preuve dans le présent dossier est malheureusement lacunaire.

[51]           Avant d’analyser le tout, rappelons qu’il appartient à la demanderesse de fournir à la Commission toute la preuve disponible sur ses activités puisque le fardeau de la preuve repose toujours sur la partie qui veut se faire reconnaître un droit[26]. Bien que la Commission soit tenue d’apporter un secours équitable et impartial à l’organisme[27], elle ne peut ni alléger son fardeau de preuve, ni le dispenser de ses obligations, ni effectuer le travail à sa place[28].

[52]           Cette précision étant faite, il faut maintenant déterminer si l’exercice des activités admissibles constitue l’utilisation principale des immeubles.

[53]           Dans l’affaire Sivananda Yoga Vedanta Centre, la Commission a procédé à un exercice global de comparaison des activités admissibles avec celles qui ne l’étaient pas en analysant les revenus provenant des diverses activités[29].

[54]           Quelques années plus tard, dans la décision Sports Montréal inc., la Commission a retenu le critère du pourcentage d’heures des activités admissibles offertes par l’organisme par rapport au nombre total d’heures d’ouverture du site pour déterminer quelle activité constituait l’utilisation principale de l’immeuble[30].

[55]           Dans l’affaire Coopérative de solidarité récréotouristique de Mont Adstock, la Commission a procédé à un exercice de comparaison en se basant sur la durée des activités admissibles par rapport à celle des activités non admissibles et sur les lieux où les activités admissibles étaient exercées en fonction des endroits où se tenaient des activités non admissibles[31].

[56]           Plus récemment, dans le dossier Granby Multi-Sports, la Commission a pris en considération la durée totale des activités admissibles et celle des activités qui ne l’étaient pas[32].

[57]           Ces exemples ne sont d’aucun secours. En effet, la preuve dans le présent dossier illustre ce qui suit :

-            À la lumière des états financiers et des informations obtenues à l’audience, il n’est pas possible de comparer les revenus provenant des activités admissibles avec ceux provenant des activités non admissibles;

-            Le site est ouvert sept jours sur sept, de 9 h à 16 h, du début du mois de décembre à la mi-avril. Le site peut toutefois ouvrir en soirée lorsqu’il y a des activités prévues au calendrier;

-            Les formations pour adultes ont lieu plusieurs fois par semaine durant la saison, mais leur nombre exact et leur durée n’ont pas été établis;

-            Une à trois sessions de formation par semaine sont offertes aux jeunes de l’école de ski, mais on ne connait pas la durée de ces sessions;

-            Une seule journée porte ouverte s’est tenue pendant la saison 2023;

-            Seulement sept activités découvertes se sont tenues durant la saison 2023 (randonnées au clair de lune et Fête des neiges);

-            L’accueil des groupes scolaires s’effectue sur une base régulière, sans autre précision;

-            L’utilisation des installations par les cadets de l’air n’est pas quantifiée.

[58]           Tenter un exercice de comparaison avec de telles informations est illusoire.

[59]           À l’audience, monsieur Talbot tente en toute bonne foi de fournir une précision à la Commission en affirmant que le pourcentage de la clientèle totale qui profite des activités d’ordre informatif ou pédagogique représenterait, selon son estimation, « un bon 50 % ».

[60]           Malheureusement, cela ne nous aide guère puisque le pourcentage de la clientèle participant à des activités admissibles n’est pas déterminant en soi quant à l’utilisation des immeubles. À titre d’exemple, 50 personnes qui pratiquent le ski de fond en formule libre pendant 5 heures lors d’une journée (pour un total de 250 heures) utiliseront davantage le site que 100 personnes qui suivent un cours pendant 2 heures la même journée (pour un total de 200 heures). Pourtant, le nombre de personnes profitant des activités admissibles dans cet exemple est le double du nombre de personnes pratiquant des activités non admissibles.

[61]           Le premier alinéa de l’article 243.8 LFM est clair : l’exercice d’une ou de plusieurs activités admissibles doit constituer l’utilisation principale de l’immeuble. Cest pourquoi le nombre de participants aux activités admissibles, dans le présent dossier, ne peut être déterminant en l’absence d’autres données probantes.

[62]           Bref, la Commission ne peut déterminer en fonction de la preuve présentée par l’organisme que les activités admissibles sont prédominantes quant à l’utilisation des immeubles visés par la demande. L’organisme n’a pas rempli le fardeau de preuve qui lui incombait à ce titre.

[63]           Au contraire, il ressort plutôt de cette preuve que la cause principale et immédiate des activités exercées sur les immeubles est la pratique du ski de fond et de la raquette à des fins récréatives, ce qui n’est pas visé par le paragraphe 3° du deuxième alinéa de l’article 243.8 LFM.[33]

1.5 Les conclusions quant aux conditions de la reconnaissance

[64]           Comme nous avons pu le constater, la demanderesse a la qualité requise pour faire l’objet d’une reconnaissance aux fins d’exemption des taxes foncières et pour présenter une demande à cet effet. L’organisme est une personne morale à but non lucratif et les immeubles visés par la demande sont inscrits à son nom au rôle d’évaluation foncière de la Ville.

[65]           En outre, la demanderesse n’exerce pas ses activités dans le but de générer des profits. Ses activités sont plutôt exercées à des fins non lucratives.

[66]           Toutefois, bien que la demanderesse exerce certaines activités admissibles d’ordre informatif ou pédagogique, celle-ci n’a pas réussi à démontrer que ces activités constituent l’utilisation principale des immeubles.

[67]           Puisque les conditions prévues par la Loi ne sont pas entièrement remplies, la Commission ne peut donc pas accorder la reconnaissance pour les immeubles visés.

  1. Le cas échéant, quelle est la date d’entrée en vigueur de la reconnaissance?

[68]           Considérant la conclusion de la Commission quant à la question précédente, il n’y a pas lieu de déterminer la date d’entrée en vigueur de la reconnaissance puisque celleci n’est pas accordée.


PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION MUNICIPALE DU QUÉBEC :

        REJETTE la demande de reconnaissance d’exemption aux fins des taxes foncières de la demanderesse, Le Club de Ski de Fond Amiski de St-Antonin inc., à l’égard des immeubles suivants :

 

NUMÉRO DE LOT

(CADASTRE DU QUÉBEC)

NUMÉRO MATRICULE

6 494 329

8589 48 0729

4 901 048

8488 16 2028 0 010 001

5 808 033

8487 88 0995 0 010 001

 

 

 

 

Philippe Asselin

Juge administratif

 

PA/aml

 

 

Audience tenue par visioconférence le 21 mai 2024

 

 

La version numérique de
ce document constitue l’original de la Commission municipale du Québec

 

 

Secrétaire

Président

 


[1]  RLRQ, c. F-2.1.

[2]  Art. 243.23 LFM.

[3]  Courriel du 11 mars 2024 transmis à la Commission par madame Nancy Dubé, directrice générale, greffière et trésorière adjointe de la Ville.

[4]  Ces conditions sont cumulatives. Cela signifie que les conditions doivent être entièrement remplies pour que la reconnaissance soit obtenue.

[5]  Art. 243.2, 243.3, 243.5 et 243.6 LFM.

[6]  Art. 243.7, 243.8 et 243.11 LFM.

[7]  Art. 243.8 LFM.

[8]  Ibid.

[9]  Tel qu’il appert de l’État de renseignements d’une personne morale au registre des entreprises en date du 12 mars 2024.

[10] RLRQ, c. C-38.

[11]  Tel que nous pouvons le constater sur les comptes de taxes 2024 de la Ville.

[12]  Formulaire de demande de reconnaissance complété par l’organisme, p. 5.

[13]  Complexe sportif intérieur de Granby et Ville de Granby, 2020 CanLII 32102 (QC CMNQ), par. 45.

[14]  Club récréatif des 4-Cantons et Ville de Québec, 2020 CanLII 97876 (QC CMNQ).

[15]  Complexe sportif intérieur de Granby et Ville de Granby, précité, note 13, par. 47.

[16]  Pour les cadets de l’air, voir par analogie l’affaire Maison de la famille de la MRC de Coaticook et Ville de Coaticook, 2024 CanLII 61747 (QC CMNQ), par. 45 à 53.

[17]  Club de curling de Rimouski inc. et Ville de Rimouski, 2023 CanLII 129406 (QC CMNQ), par. 64 et 65.

[18]  Club de tir au pistolet et à la carabine Osisko inc. et Ville de Rouyn-Noranda, 2024 CanLII 39508 (QC CMNQ), par. 44.

[19]  Ibid., par. 44. Voir également Club de ski de fond Évain inc. et Ville de Rouyn-Noranda, 2024 CanLII 14189 (QC CMNQ), par. 56 et 57.

[20]  Art. 243.9 LFM.

[21]  Ville de Pointe-Claire c. Commission municipale du Québec, 2017 QCCS 2442 (CanLII), par. 25 à 27.

[22]  Ibid. Voir également Fondation B'Nai B'Rith Hillel de Montréal c. Québec (Commission municipale), 2005 CanLII 15641 (QC CS), par. 63.

[23]  Ville de Pointe-Claire c. Commission municipale du Québec, précité note 21, par. 26.

[24]  Corporation de développement de Hérouxville et Municipalité de la paroisse de Hérouxville, 2018 CanLII 73651 (QC CMNQ), par. 28.

[25]  Chevaliers de Colomb du Conseil de Jonquière No: 2756 et Ville de Saguenay, 2022 CanLII 51186 (QC CMNQ).

[26]  Club de golf coopératif de Lac-Etchemin et Municipalité de Lac-Etchemin, 2017 CanLII 7825 (QC CMNQ), par. 14.

[27]  Art. 12 de la Loi sur la justice administrative (RLRQ, c. J-3).

[28]  Cinémathèque Québécoise c. Commission municipale du Québec, 2015 QCCS 5988, par. 45 et 46. Mentionnons d’ailleurs que des explications ont été communiquées à cet effet au représentant de la demanderesse au début de l’audience.

[29]  Sivananda Yoga Vedanta Centre c. Val-Morin (Municipalité de), 2013 QCCA 928 (CanLII).

[30]  Sports Montréal inc. et Ville de Montréal, 2017 CanLII 1492 (QC CMNQ), par. 41 et 42.

[31]  Coopérative de solidarité récréotouristique du Mont Adstock et Municipalité d’Adstock, 20 janvier 2023, CMQ-69204-001 (32744-23).

[32]  Granby Multi-Sports et Ville de Granby, 2024 CanLII 17942 (QC CMNQ), par. 48 et 49.

[33]  Club Quad Iroquois et Municipalité de Labelle, 2017 CanLII 83205 (QC CMNQ), par. 23 à 26. Groupe Scout de St-Jean-Chrysostome (District de Québec) inc. et Ville de Lévis, 2024 CanLII 12915 (QC CMNQ), par. 33 à 36.

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