Perrier c. Trévi Sherbrooke |
2020 QCCQ 3099 |
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COUR DU QUÉBEC |
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« Division des petites créances » |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DISTRICT DE |
SAINT-FRANÇOIS |
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LOCALITÉ DE |
SHERBROOKE |
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« Chambre civile » |
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N° : |
450-32-701029-191 |
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DATE : |
14 juillet 2020 |
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE |
LA JUGE |
SOPHIE LAPIERRE |
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Marie-Pascale PERRIER, domiciliée et résidant au [...], Sherbrooke (Québec) [...]
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Partie demanderesse |
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c. |
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TRÉVI SHERBROOKE, ayant un établissement au 1597, rue Galt Est, Sherbrooke (Québec) J1G 3H4
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Partie défenderesse |
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JUGEMENT
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[1] Mme Marie-Pascale Perrier réclame à Trévi Sherbrooke (Trévi) le coût du remplacement de sa piscine achetée en 2011, en plus de dommages-intérêts pour la perte de jouissance de sa piscine en raison de sa détérioration prématurée. La rouille a percé sa paroi.
[2] Trévi ne nie pas la détérioration prématurée par la rouille. Elle soutient que la paroi pouvait être remplacée sans remplacer la piscine complète, et qu’en vertu de la garantie conventionnelle du fabricant, Mme Perrier doit assumer 65 % du coût de remplacement, en plus du coût de la main-d’œuvre.
[3] Qui a raison? Aucune des parties, pour les raisons suivantes.
[4] Est-ce la garantie conventionnelle du fabricant qui dicte les obligations des parties dans ces circonstances? Si oui, que prévoit-elle?
[5] Mme Perrier a-t-elle droit au remplacement complet de sa piscine et à des dommages-intérêts?
[6] Mme Perrier achète une piscine hors terre en 2011. Elle reçoit du vendeur deux brochures publicitaires qui annoncent que la piscine à paroi métallique est compatible avec un générateur de chlore au sel et est garantie. Elle prétend ne pas avoir reçu le texte de cette garantie.
[7] Selon Trévi, la piscine est livrée avec le texte de la garantie conventionnelle du fabricant qui est inclus dans la boîte de la piscine. Cette garantie, dont le texte de 2011 n’est pas produit, prévoirait que les composantes métalliques comme la paroi de la piscine seront exemptes de corrosion pénétrante. En cas contraire, les composantes sont remplacées et le coût de remplacement est assumé en partie par le propriétaire, en fonction d’un prorata lié aux années d’utilisation. Selon le texte actuel de la garantie, après sept ans d’utilisation, le client doit assumer 65% du coût de remplacement. Les coûts de main-d’œuvre sont exclus de la garantie.
[8] Dès 2016, de la rouille apparaît sur la paroi de la piscine sous l’écumoire. À l’occasion de la fermeture de la piscine à l’automne 2017, Mme Perrier en informe Trévi. Un préposé lui recommande d’appliquer une peinture antirouille, ce qu’elle fait.
[9] Malgré l’application de la peinture, la rouille progresse et à l’ouverture de la piscine en mai 2018, le préposé de Trévi refuse d’emplir d’eau la piscine parce que la paroi est percée par la rouille.
[10] Mme Perrier ne fait ni une ni deux, et achète une nouvelle piscine le même jour chez un concurrent de Trévi, accessoires et équipements inclus. La nouvelle piscine est installée le mois suivant.
[11] Un an plus tard, le 29 mai 2019, elle met Trévi en demeure de lui payer le coût de remplacement de la piscine et des dommages-intérêts. Trévi ne donne pas suite à la mise en demeure.
Est-ce la garantie conventionnelle du fabricant qui dicte les obligations des parties dans ces circonstances? Si oui, que prévoit-elle?
[12] Les parties s’opposent sur les obligations de l’une et de l’autre qui découlent de la garantie conventionnelle du fabricant. Or, c’est la Loi sur la protection du consommateur[1] qui régit leurs obligations.
[13] La Loi sur la protection du consommateur est d’ordre public. Une garantie conventionnelle moins avantageuse doit lui céder le pas.
[14] Cette loi oblige le commerçant à une garantie de durabilité pour une durée raisonnable[2]. Les parties s’accordent pour dire que la durée raisonnable de la paroi est de dix ans pour une telle piscine. Lorsque la détérioration du bien survient avant, sans manquement par le consommateur à ses obligations d’entretien et d’utilisation normale du bien, il y a lieu de conclure que la détérioration survient prématurément et que la garantie légale s’applique.
[15] La paroi de la piscine de Mme Perrier perce en raison de la rouille après sept ans d’utilisation, sans que la cause ne soit établie devant le Tribunal. Dans les circonstances, le Tribunal conclut que la piscine s’est détériorée prématurément et n’a pu être utilisée pour une durée raisonnable[3]. D’ailleurs, Trévi ne le conteste pas.
Mme Perrier a-t-elle droit au remplacement complet de sa piscine, en plus de dommages-intérêts?
[16]
L’article
[17] Il revenait à Mme Perrier de prouver que la rouille sur la paroi commandait le remplacement complet de la piscine, de ses équipements et de ses accessoires[4]. La seule preuve qu’elle offre repose sur les propos rapportés du préposé à l’ouverture de la piscine qui aurait dit qu’elle était « finie ».
[18] De son côté, Trévi explique que dans un tel cas, il y a lieu de remplacer la paroi et la toile seulement. Les équipements et accessoires, incluant le moteur, le filtreur, le générateur de chlore au sel, n’ont pas à être remplacés.
[19] La preuve de Mme Perrier est insuffisante pour convaincre le Tribunal. Le témoignage du représentant de Trévi, un spécialiste, est crédible et rien ne permet de l’écarter.
[20] Mme Perrier n’a toutefois pas le droit à la valeur à neuf de la paroi et de la toile. Le Tribunal doit tenir compte d’une dépréciation en fonction des années d’utilisation de la piscine. La dépréciation ne s’applique toutefois pas au coût de la main-d’œuvre[5].
[21] Il en coûte 2 400 $ pour le remplacement de la paroi et de la toile, en plus de 765 $ pour la main-d’œuvre. Mme Perrier a utilisé la piscine sans inconvénient pendant sept ans sur les dix ans de durée normalement prévisible de la paroi. Elle n’a droit qu’à 30% du coût de remplacement, soit 720 $. Le Tribunal lui accorde également le coût de la main-d’œuvre, pour un total de 1 707,38$ incluant les taxes.
[22] Mme Perrier réclame également 1 849,49 $, soit 30% du prix d’achat de la piscine initiale, pour en compenser la perte de jouissance puisqu’elle en aura été privée pendant trois ans sur dix.
[23] Ce raisonnement est erroné. Pendant ces trois années, elle a joui d’une piscine neuve. Mme Perrier n’a été privée d’une piscine que pendant un mois. Pour ce dommage, le Tribunal lui accorde 200 $[6].
[24] Finalement, il convient de disposer d’un argument soulevé par Trévi dans sa contestation. Elle oppose une fin de non-recevoir au recours de Mme Perrier parce qu’elle n’a reçu aucun avis de dénonciation avant le remplacement de la piscine. Elle prétend avoir été empêchée de constater et d’évaluer le dommage, et de le réparer.
[25] Cet argument doit être rejeté. Le préposé de Trévi a constaté le dommage et le remplacement de la piscine n’a causé aucun préjudice à Trévi, ni ne l’a empêchée de se défendre.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
[26] ACCUEILLE partiellement la demande introductive d’instance;
[27] CONDAMNE
Trévi Sherbrooke à payer à Mme Marie-Pascale Perrier, la somme de MILLE NEUF
CENT SEPT DOLLARS ET TRENTE-HUIT CENTS (1 907,38$), en plus de l’intérêt
légal et de l'indemnité additionnelle prévue à l'article
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__________________________________ SOPHIE LAPIERRE, J.C.Q. |
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Date d’audience : |
7 juillet 2020 |
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N.B. - Un an après la date du présent jugement, les pièces produites au dossier seront détruites à moins que les parties n'en reprennent possession avant cette échéance.
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