Dufour c. Outilleur Express inc. | 2021 QCCQ 14261 | ||||||
COUR DU QUÉBEC | |||||||
« Division des petites créances » | |||||||
CANADA | |||||||
PROVINCE DE QUEBEC | |||||||
DISTRICT DE | QUEBEC | ||||||
LOCALITÉ DE | QUÉBEC | ||||||
« Chambre civile » | |||||||
N° : | 200-32-704154-193 | ||||||
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DATE : | 22 juin 2021 | ||||||
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE | L’HONORABLE | NATHALIE VAILLANT, J.C.Q. | |||||
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HÉLÈNE DUFOUR | |||||||
[...], Fossambault-sur-le-Lac (Québec) [...] | |||||||
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Partie demanderesse | |||||||
c. | |||||||
L’OUTILLEUR EXPRESS INC. | |||||||
4272, route de Fossambault, Sainte-Catherine-de-la-Jacques-Cartier (Québec) G3N 1R9 | |||||||
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Partie défenderesse | |||||||
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JUGEMENT | |||||||
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[1] Madame Hélène Dufour reproche à l’Outilleur Express inc. (« Outilleur ») d’être responsable du bris du moteur de sa souffleuse survenu à la suite des travaux de maintenance effectués en novembre 2018. Elle lui réclame le paiement de la réparation effectuée par Adrénaline Sports (690,23 $), le remboursement des factures de maintenances antérieures qu’elle lui a payées (230,87 $) et un dédommagement pour troubles, ennuis et inconvénients encourus (500 $).
[2] Bien qu’elle ait posé un diagnostic du problème à la souffleuse et évalué le coût de la réparation à 700 $, Outilleur plaide qu’elle n’a pas eu l’opportunité d’effectuer la réparation sur la souffleuse, madame Dufour ayant plutôt décidé de transférer celle-ci chez le concessionnaire Honda. Elle espérait que la défectuosité soit couverte par la garantie du fabricant. Ce qui ne s’est pas avéré être le cas.
[3] La réparation est réalisée par Adrénaline Sports au coût de 690.23$.
[4] Outilleur nie que ses interventions de novembre 2018 soient la cause du bris de la souffleuse. Elle soumet la théorie d’une intervention d’un tiers.
[5] La réponse est oui.
[6] Le Tribunal conclut que madame Dufour a droit au remboursement du coût de réparation effectuée par Adrénaline.
[7] Voici pourquoi.
[8] Le contrat intervenu entre madame Dufour et Outilleur est un contrat de consommation tel que défini à l’article
1384. Le contrat de consommation est le contrat dont le champ d’application est délimité par les lois relatives à la protection du consommateur, par lequel l’une des parties, étant une personne physique, le consommateur, acquiert, loue, emprunte ou se procure de toute autre manière, à des fins personnelles, familiales ou domestiques, des biens ou des services auprès de l’autre partie, laquelle offre de tels biens ou services dans le cadre d’une entreprise qu’elle exploite.
[9] Outilleur est un commerçant au sens de la Loi sur la protection du consommateur (« LPC[2] ») et madame Dufour répond à la définition de consommatrice telle que définie à la même loi.
[10] En effectuant la maintenance sur la souffleuse en novembre 2018, Outilleur a rendu un service à madame Dufour.
[11] À ce titre, les articles
34. La présente section s’applique au contrat de vente ou de louage de biens et au contrat de service.
38. Un bien qui fait l’objet d’un contrat doit être tel qu’il puisse servir à un usage normal pendant une durée raisonnable, eu égard à son prix, aux dispositions du contrat et aux conditions d’utilisation du bien.
[Soulignés du Tribunal]
[12] Les règles de preuve applicables en l’instance édictent que le fardeau de prouver les faits donnant ouverture à sa réclamation appartient à madame Dufour, à titre de partie demanderesse[3]. Elle doit démontrer le bien‑fondé de son droit, de ses prétentions, des faits allégués et en convaincre le Tribunal. La preuve qu’elle présente doit être prépondérante[4]. Elle doit surpasser celle offerte par la partie défenderesse, en l’occurrence Outilleur.
[13] Le Tribunal retient de la preuve non contredite que la souffleuse est neuve à son achat en décembre 2016, que madame Dufour confie, chaque automne, le mandat à Outilleur d’effectuer l’inspection préhivernale de la souffleuse. La dernière a été effectuée en novembre 2018.
[14] Les parties sont d’accord sur le fait que le moteur de la souffleuse a sauté. Toutefois, ils ne s’entendent pas sur la cause de cette défaillance.
[15] Madame Dufour réfère, dans un premier temps, à la conclusion du fabricant indiquant qu’il ne s’agit pas d’un défaut de fabrication et au constat d’Adrénaline Sports à l’effet que le moteur a manqué d’huile.
[16] Selon l’examen de la souffleuse, mené par Adrénaline Sports, l’huile s’est écoulée par le « seal de craft » côté magnéto. Celui-ci s’est déplacé en raison d’une pression anormale exercée sur le moteur. Adrénaline identifie deux causes pouvant expliquer cette pression, soit la présence d’une trop grande quantité d’huile à moteur dans le réservoir ou par un mauvais positionnement de la soupape du reniflard (« le breather »). Étant mal raccordé, il aurait gelé, provoquant la surpression au moteur.
[17] Cette preuve est présentée sous forme de commentaire ajouté à la facture remise à madame Dufour et de déclaration pour valoir de témoignage de monsieur Mathieu Saint-Pierre, directeur des opérations d’Adrénaline Sports.
[18] Madame Dufour explique que l’auteur du mauvais positionnement de la soupape de reniflard ou d’avoir introduit trop d’huile au moteur ne peut être qu’Outilleur puisque celui-ci est la seule entité responsable de l’entretien de la souffleuse. Son témoignage est à l’effet que personne d’autre que les employés de celle-ci ne vérifie le niveau d’huile ou n’ouvre le capot de la souffleuse.
[19] Quant à la preuve en défense, elle se résume au témoignage de monsieur Dany Giguère, président de l’entreprise. Dans un premier temps, ayant examiné la souffleuse en février 2019, il reconnait que le « seal craft » est enduit d’huile.
[20] Il déclare au Tribunal ne pas avoir effectué de changement d’huile en novembre 2018. Il explique également que le déplacement de la soupape du reniflard (« le breather ») auquel réfère le témoignage du représentant d’Adrénaline, peut avoir été effectué par une tierce personne. Il réfère à la personne qui utilise la souffleuse pour effectuer le déneigement de la propriété de madame Dufour. Cette soupape est, selon lui, accessible par le côté de la souffleuse.
[21] En réplique, madame Dufour réfute que la soupape du reniflard (« le breather ») soit aussi facile d’accès que le prétend monsieur Giguère. Elle réfère le Tribunal aux photos de la souffleuse sur la brochure publicitaire déposée en preuve. Celles-ci permettent de constater qu’une carrosserie recouvre le devant de la souffleuse. Selon elle, pour avoir accès aux composantes du moteur de la souffleuse, il faut soulever le capot. Ce que son employé n’avait aucune raison d’effectuer.
[22] À la lumière de cette preuve contradictoire, le Tribunal estime que la preuve présentée par madame Dufour est prépondérante versus le témoignage du représentant d’Outilleur, monsieur Giguère. Celui-ci ne présente comme cause du bris qu’une simple possibilité. Sa théorie quant au déplacement de la soupape du reniflard « le breather » par un tiers n’est appuyée d’aucun témoignage. Alors qu’il aurait pu assigner l’individu à venir témoigner de ce fait lors de l’audition ou faire entendre une personne ayant une compétence en la matière pour appuyer sa théorie.
[23] Le Tribunal rappelle qu’il doit décider selon une preuve établie par probabilité et non sur une simple possibilité[5].
[24] Le Tribunal note également que monsieur Giguère témoigne, lors de l’audition, qu’Outilleur n’a pas effectué de changement d’huile en novembre 2018. Or, sa lettre du 12 mars 2019 adressée à madame Dufour le contredit sur ce point. Il y reconnait avoir effectué en novembre 2018 le changement d’huile de la souffleuse. Cette contradiction affecte sa crédibilité.
[25] Dans les circonstances, le Tribunal conclut qu’Outilleur n’a pas rempli les obligations qui lui incombent en vertu de la Loi sur la protection du consommateur (« LPC[6] ») puisque la souffleuse n’a pas servi à un usage normal durant une période raisonnable après sa maintenance, le bris survenant moins de trois mois de celle-ci.
QUESTION 2 : À quel montant madame Dufour a-t-elle droit ?
[26] Madame Dufour réclame le paiement de la réparation effectuée par Adrénaline Sports (690,23 $), le remboursement des factures des maintenances antérieures payées à Outilleur (230,87 $) et un dédommagement pour troubles, ennuis et inconvénients encourus (500 $).
[27] À la lumière de la preuve sur les dommages réclamés, le Tribunal évalue que madame Dufour a subi un dommage réel de 690,23 $, soit le cout de la réparation de la souffleuse. Ce montant lui est accordé.
[28] Le Tribunal ne lui accorde pas le montant réclamé pour les factures antérieures, d’Outilleur, dont les frais de transport et d’examen de la souffleuse, ceux-ci se qualifiant de dommage indirect. Tout comme, il ne lui accorde pas le montant réclamé pour troubles et ennuis découlant du temps consacré à la réparation de la souffleuse et celui consacré à la gestion du dossier devant le Tribunal, ceux-ci ne constituant pas davantage un dommage direct et immédiat découlant de la faute reprochée à Outilleur.
[29] Selon l’article
Pour CES MOTIFS, le tribunal :
[30] ACCUEILLE partiellement la demande;
[31] CONDAMNE la partie défenderesse, L’Outilleur Express inc. à payer à la partie demanderesse, madame Helene Dufour, 690,23 $ avec intérêts calculés au taux annuel légal de 5% l’an plus l’indemnité additionnelle prévue à l’article
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| __________________________________ NATHALIE VAILLANT, J.C.Q. |
[1] C.c.Q., art. 1384.
[2] R.L.R.Q., c. P-40.1.
[3] C.c.Q., article 2803.
[4] C.c.Q., article 2804.
[5] C.c.Q., articles 2803 et 2804.
[6] R.L.R.Q., c. P-40.1.
[7] Code de procédure civile, c. C‑25.01.
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