Décision

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Antilus c. Auto Legendre inc.

2018 QCCQ 9440

COUR DU QUÉBEC

« Division des petites créances »

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

MONTRÉAL

LOCALITÉ DE

MONTRÉAL

« Chambre civile »

N° :

500-32-701106-173

 

 

 

DATE :

18 décembre 2018

______________________________________________________________________

 

SOUS LA PRÉSIDENCE DE

L’HONORABLE

SYLVIE LACHAPELLE, J.C.Q.

______________________________________________________________________

 

JASON-KENOLD ANTILUS

Partie demanderesse

c.

AUTO LEGENDRE INC.

Partie défenderesse

______________________________________________________________________

 

JUGEMENT

______________________________________________________________________

 

[1]           Le 11 novembre 2016, le demandeur M. Jason-Kenold Antilus « M. Antilus » achète un véhicule automobile de marque Infinity 2003 de 145 000 km qu’il paie 4 100 $ comptant.

[2]           Selon le demandeur, 18 jours après la livraison, soit le 29 novembre 2016, la roue avant droite du véhicule s’est détachée alors qu’il conduisait.

[3]           Le demandeur allègue qu’en plus de ce problème il aurait découvert le 29 novembre 2016 que le véhicule est affecté d’importants défauts cachés qui empêchent l’usage normal du véhicule et que la défenderesse doit l’indemniser en vertu de la garantie légale du vendeur.

[4]           Le demandeur réclame 1 380 $ pour les travaux d’urgence causés par le détachement soudain de la roue ainsi que 9 297,50 $ de dommages pour ennuis et inconvénients ainsi que perte de salaire pour un total de 15 000 $.

[5]           La défenderesse conteste cette réclamation aux motifs :

1)    qu’il ne s’agit pas de vices cachés;

2)    que le demandeur connaissait le problème puisqu’il a fait inspecter le véhicule automobile avant l’achat;

3)    que la défenderesse a réduit le prix de vente à 1 800 $ pour tenir compte des réparations identifiées avant l’achat.

[6]           La défenderesse se porte demanderesse reconventionnelle et réclame 1 000 $ pour atteinte à sa réputation et perte de temps. Elle offre de verser cette somme à une œuvre de charité.

Le droit

[7]           Il s’agit d’un contrat d’achat encadré par des articles de la Loi sur la protection du consommateur « la Loi », l’article 38 prévoit que :

                          
38.
 Un bien qui fait l’objet d’un contrat doit être tel qu’il puisse servir à un usage normal pendant une durée raisonnable, eu égard à son prix, aux dispositions du contrat et aux conditions d’utilisation du bien.

ANALYSE ET JUGEMENT

[8]           Il s’agit d’un contrat d’achat d’un véhicule usagé de catégorie D[1], lequel est donc garanti par la garantie légale de l’article 38 de la Loi sur la protection du consommateur, soit la garantie d’usage normale dans les conditions normales.

[9]           La défenderesse a vendu le véhicule avec une garantie conventionnelle d’un an pour le moteur et la transmission, mais les défauts mécaniques allégués ne sont pas de cette nature.

[10]        La Loi indique une présomption absolue de connaissance des défauts cachés à l’encontre du fabricant et du vendeur. Ceux-ci ne peuvent invoquer l’ignorance du défaut qu’ils sont légalement présumés connaître.

[11]        Par ailleurs pour que la présomption s’applique, le défaut doit empêcher l’usage normal d’un véhicule, lequel doit procurer un usage normal dans des conditions normales, cette période varie dépendant de l’âge et du prix payé pour le véhicule.

a)    Le prix payé pour le véhicule

[12]        Les témoignages concernant le prix payé sont contradictoires. Selon M. Antilus il est de 4 100 $ alors que M. Essam Abdulghani « M. Abdulghani », pour la défenderesse, le situe à 1 860 $.

[13]        La preuve révèle qu’il existe deux contrats écrits. Selon le contrat[2] produit par le demandeur, le prix du véhicule est de 4 100 $.

[14]        L’étiquette du véhicule d’occasion[3] indique également 4 300 $.

[15]        La défenderesse produit sous D-1 une copie carbone du contrat P-4 sur laquelle est écrit « cancelled JA ».

[16]        M. Abdulghani témoigne que c’est le demandeur Jason-Kenold Antilus qui a apposé ses initiales. Il argumente que l’annulation de P-4 corrobore son témoignage que la vente a été conclu à 1 860 $.

[17]        Il aurait réduit le prix pour tenir compte de réparations à faire.

[18]        De son côté, le demandeur nie avoir négocié une telle réduction du prix. Il a négocié de 4 100 $ à 3 900 $, mais il a payé 200 $ pour la garantie conventionnelle d’un an.

[19]        D’après le relevé bancaire du demandeur ainsi que celui de son amie Mme Jade, les montants totalisant 4 100 $ sont débités.

[20]        Pour supporter son argument, M. Abdulghani produit l’attestation de transaction avec un commerçant qu’il a remis au demandeur qui s’est présenté avec ce document à la SAAQ.

[21]        Selon cette attestation, le prix de vente et la valeur indiquée pour fin de paiement des taxes est de 1 770 $.

[22]        M. Antilus témoigne qu’il n’a pas remarqué que le prix de vente indiqué sur l’attestation est de 1 770 $.

[23]        M. Antilus qui réclame pourtant 221,95 $ « pour faire inspecter le bien par Midas avant d’acheter » témoigne que c’est une erreur. Selon son témoignage, il n’a pas fait inspecter son véhicule automobile avant l’achat. Il ne comprend pas pourquoi il réclame ce montant dans sa demande.

[24]        M. Antilus produit deux documents de Midas. Le premier, du 29 novembre 2016 est une vérification de courtoisie à laquelle est attachée une facture d’entretien pour le changement d’huile et où sont décrits les problèmes suivants :

·        Perd par le muffler

·        deux ball joint extrêmement lousse

·        Tie rod int avant droit lousse

·        Courroie du power steering craquée

·        Gasket de pan à l’huile

[25]        Le 11 janvier 2017, M. Antilus avise la défenderesse que son véhicule est affecté de vices cachés et que les réparations s’avèrent coûteuses. Il demande à la défenderesse de le contacter.

[26]        Les défauts décrits à la lettre du 11 janvier 2017 sont ceux identifiés lors de la vérification de courtoisie de Midas.

[27]        Dans cette lettre du 11 janvier 2017, M. Antilus indique que ces défauts ont été identifiés 18 jours après la transaction.

[28]        M. Antilus témoigne que 18 jours après l’achat, « la roue avant droite de son véhicule s’est éjectée en pleine rue alors qu’il conduisait ».

[29]        Encore là, il semble que M. Antilus fait erreur.

[30]        En effet, selon la facture de remorquage de remorquage Boileau ce n’est pas 18 jours avant l’achat que le pneu s’est détaché, mais plutôt 2 ½ mois plus tard.

[31]        Le véhicule automobile a été remorqué le 24 janvier 2017 chez Midas moyennant 97,73 $ où l’alignement et  le bras de suspension ont été réparés, le 25 janvier 2017 (622,06 $) et le 30 janvier 2017 (495,28 $).

[32]        Le demandeur explique que la réparation s’est faite en deux temps puisqu’il n’avait pas suffisamment d’argent pour payer.

[33]        Selon les factures de Midas, le véhicule a 152 603 km le 25 janvier 2017 et 152 988 km le 30 janvier 2017.

[34]        Basé sur la preuve documentaire, le Tribunal conclut donc comme l’a d’ailleurs soulevé M. Abdulghani que le pneu ne s’est pas détaché 18 jours après l’achat, mais 2 ½ mois plus tard, soit le 24 janvier 2017, date du remorquage.

[35]        La preuve bien qu’imprécise révèle en fait qu’un mois après l’achat, le demandeur retourne au garage concernant un problème de silencieux.

[36]        M. Abdulghani témoigne que même si ce n’était pas couvert par la garantie il accepte d’inspecter le véhicule et trouve effectivement que le silencieux doit être réparé ce qu’il offre de faire moyennant le paiement de 50 $.

[37]        D’après les échanges de courriels du 21 décembre 2017, le demandeur est furieux et il refuse de contribuer d’un montant de 50 $.

« I never said i was gonna sue you at the first talk i told you that i knew what the law was about used vehicles that i bought a lot of used car this last year and that i had to sue people for this because there was hidden defect like the infinity has. For the muffler i made the inspection 3 weeks after i bought the car from you im going to have the proof from the garage which is professional and you have to stop acting like i made the hole in it because like you said before i bought the car you inspected the car.. its impossible you couldnt or your garagist see the hole. The muffler and the starting are the major problems. When i bought the car from you i ask you if you were going to repair the car if the starting still defects you said yes and my brother was there, my gilfriend was therr my other brother and his gilfriend were also there when we pick it up. Now the muffler , your ‘’’’friend’’’’ told me that he was going to cut both extremities of the muffler and just put a single pipe between and weld everything together.. are you fucking with me this is not the way he was suppose to do this or anybody and now you are asking me to pay 50$ and you are going to pay the rest ????? I dont even think this is legal… this type of reparation is worth about 20$ he would of done that in 25min. Fake advertisment.. fake price.. fake reparation »

[Reproduit tel quel]

[38]        Concernant le prix de vente du véhicule automobile, le Tribunal doute qu’il ait été réduit à 1 960 $ pour tenir compte des réparations à effectuer.

[39]        L’étiquette du véhicule d’occasion[4] indique 4 300 $.

[40]        Si comme le prétend le défendeur, le prix a été réduit de 4 900 $ à 1 700 $ pour tenir compte de réparations, le Tribunal est convaincu que la défenderesse aurait indiqué sur les documents que le véhicule était vendu sans aucune garantie.

[41]        De plus, la défenderesse l’aurait rappelé au demandeur dans ses courriels lorsque ce dernier lui demandait de l’indemniser.

[42]        Aussi le Tribunal conclut que le demandeur a payé 4 100 $ pour son véhicule.

[43]        Il conclut également que le prix inscrit à l’attestation a été réduit pour d’une part faire bénéficier le demandeur d’une diminution des taxes et pour d’autre part réduire le profit de la défenderesse et donc réduire ses impôts.

[44]        Cette mise au point étant faite, le Tribunal doit maintenant décider si les vices allégués sont couverts par la garantie légale pour un véhicule de 13 ans d’âge payé 4 100 $.

[45]        La loi indique une présomption absolue de connaissance des défauts cachés à l’encontre du fabricant et du vendeur. Ceux-ci ne peuvent invoquer l’ignorance du défaut qu’ils sont légalement présumés connaître.

[46]        Par ailleurs, l’achat d’un bien usagé comporte l’acceptation de certains risques. Le bien usagé doit fournir un usage normal quoique d’une qualité moindre qu’un bien neuf.

[47]        Le demandeur réclame le remboursement des coûts de réparations d’urgence d’un « tie rod ».

[48]        S’agit-il d’un vice caché?

[49]        Le Tribunal conclut que non.

[50]        La vérification de courtoisie Midas du 29 novembre 2016 révèle dès cette date que le « tie rod » est lousse.

[51]        Aussi, la preuve révèle qu’une simple vérification visuelle avant l’achat aurait nécessairement révélé que le « tie rod » avant droit était lousse.

[52]        Il ne s’agit donc pas d’un vice caché, mais d’un vice apparent. De plus, la preuve révèle que même en ayant été informé le 29 novembre 2016 que son véhicule présentait ce problème, le demandeur a continué de rouler avec son véhicule avec le résultat que le 24 janvier soit 2 ½ mois et 7 983 km plus tard, il aurait perdu une roue.

[53]        Bien des choses ont pu survenir pendant cette période.

[54]        Le demandeur qui a acheté un véhicule de catégorie D demande une protection équivalente à celle offerte pour un véhicule de classe B, soit trois mois ou 5 000 km.

[55]        Or, un véhicule de classe B en est un de trois ans ou moins et d’au plus 60 000 km.

[56]        Aussi, le Tribunal conclut que les défauts allégués dans la présente réclamation ne sont pas couverts par la garantie d’usage normal applicable à un véhicule de 13 ans d’âge ayant 145 000 km.

[57]        Par conséquent, le Tribunal rejette la demande.

Concernant la demande reconventionnelle

[58]        La défenderesse réclame 1 000 $ pour atteinte à la réputation et trouble, ennuis et inconvénients.

[59]        Pour avoir gain de cause, la défenderesse doit prouver l’atteinte à sa réputation, le préjudice subi et le lien de causalité entre le préjudice et la faute.

[60]        Or, la défenderesse n’a pas fait cette preuve.

[61]        Quant aux dommages réclamés pour trouble, ennuis et inconvénients, le Tribunal conclut que le préjudice n’est pas significatif et ne mérite donc pas compensation.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

REJETTE la demande introductive d’instance;

AVEC FRAIS DE JUSTICE.

REJETTE la demande reconventionnelle;

AVEC FRAIS DE JUSTICE.

 

 

 

 

__________________________________

SYLVIE LACHAPELLE, J.C.Q.

 

 

Date d’audience :

28 mai 2018

 



[1]     Article 160, par. d), Loi de la protection du consommateur, RLRQ, c. P-40.1.

[2]     Pièce P-4.

[3]     Pièce P-4 en liasse.

[4]     Pièce P-4 en liasse.

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