Québec (Ville de) c. El Amari |
2013 QCCM 278 |
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COUR MUNICIPALE |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DISTRICT DE |
QUÉBEC |
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N° : |
80231351 |
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DATE : |
9 décembre 2013 |
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE |
L’HONORABLE |
LOUIS-MARIE VACHON |
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Ville de Québec |
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Représentée par |
Me Karine Desbiens |
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Poursuivante |
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c. |
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Saïd El Amari |
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Représenté par |
Lui-même |
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Défendeur |
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JUGEMENT |
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[1] Le défendeur est poursuivi en vertu de l'article 102 de la Loi concernant les services de transport par taxi, L.R.Q., S-6.01, pour avoir, le 4 novembre 2011, comme titulaire d'un permis de propriétaire de taxi, omis de maintenir l'automobile attachée à son permis en bon état, au […], à Québec.
[2] La preuve de la poursuivante est constituée du constat d'infraction, du rapport d'infraction abrégé, d'une copie du permis de propriétaire de taxi du défendeur et de la preuve de propriété informatisée de la SAAQ du véhicule du défendeur.
[3] Au rapport d'infraction abrégé, les policiers ont indiqué que le constable Blanchette a constaté, sur la porte avant côté passager du véhicule du défendeur, une bande protectrice noire qui « pendouille dans le vide, n'est plus solidement fixée directement sur la portière du véhicule ».
[4] Les policiers ont indiqué qu'après avoir intercepté le véhicule taxi du défendeur, ils ont constaté que le véhicule était très sale, que le pare-chocs arrière, côté passager, était cassé et que, sur le capot avant, il y avait « deux spots de rouille d'une grosseur d’une clémentine chacune ». Les policiers ont ajouté que le véhicule était « loin d'être en bon état visuellement ».
[5] La poursuivante a fait entendre le policier Mathieu Blanchette qui a témoigné que, le 4 novembre 2011, il effectuait une opération taxi et procédait à des interceptions aléatoires. Il détient une formation d'une durée d'une journée pour ce genre d'opération.
[6] Le policier a témoigné que le véhicule du défendeur était très sale, qu'une bande « pendouillait » et que le pare-chocs arrière était cassé. De plus, sur le capot, il y avait « deux plaques de rouille grosses comme des clémentines ».
[7] En contre-interrogatoire, le policier a reconnu que la bande ne traînait pas à terre. Il a précisé avoir fait une vérification de l'état général du véhicule.
[8] Le défendeur a débuté son témoignage en mentionnant le fait qu'une journée de formation pour le policier alors, que la loi contient cent articles, est insuffisante. Au sujet de la saleté du véhicule, le défendeur l'attribue aux hasards de la route. Il ajoute qu'un véhicule taxi circule un peu partout. Il donne comme exemple le Port de Québec et les chantiers de construction.
[9] Le défendeur soutient que le policier a noté des anomalies mineures et qu'il devait lui donner un avis de 48 heures pour les réparer en vertu de la loi.
[10] Le défendeur affirme que la rouille comme telle n'est pas bannie, mais seulement la rouille qui a pour effet de perforer. Le défendeur affirme que son véhicule a été vérifié par un contrôleur routier tout de suite après l'interception de son chauffeur et qu’il n'a reçu aucune « anomalie ». Le défendeur affirme, quant au pare-chocs, qu'il y avait une égratignure, mais qu'il n'a jamais vu de cassure. Il ajoute que le policier n'a pas précisé comment le pare-chocs était cassé.
[11] En contre-interrogatoire, le défendeur affirme qu'il fait le tour de son véhicule chaque matin et qu'il fait son rapport d'inspection. Il ajoute qu'il a fait une vérification le 3 novembre et qu'il n'y avait rien.
[12] Le défendeur affirme que le véhicule est lavé périodiquement, environ trois fois par semaine, selon les circonstances. Il affirme que la bande était « décollée un petit peu », mais qu'il n'y avait « pas de danger ». Il affirme que « les deux petits spots de rouille » sur le capot avaient un à deux centimètres. Il précise que l’égratignure sur le pare-chocs arrière était à droite. Il précise que la vérification par le contrôleur routier a eu lieu une semaine après l'interception de son chauffeur.
[13] Le défendeur a fait entendre monsieur Daniel Huot, chauffeur de son véhicule taxi, au moment de l’interception, le 4 novembre 2011. Celui-ci affirme que les policiers l’ont intercepté et qu’ils lui ont demandé ses papiers. Il affirme que, par la suite, les policiers lui ont dit que « tout était beau », qu'il pouvait repartir.
[14] En contre-interrogatoire, monsieur Huot déclare qu'il lui est « difficile » de dire si les policiers ont fait le tour du véhicule. Il affirme que le véhicule n'était pas neuf, mais qu'il était acceptable et respectait les normes. Selon lui, la bande n'était pas décollée et la voiture était normale et sécuritaire. Il affirme qu'il est « possible » qu'il y ait eu de la rouille. Il affirme que la saleté est normale. Il déclare avoir fait une vérification visuelle, le jour de l’interception et qu'il n'a rien remarqué.
[15] L’article 102 de la Loi concernant les services de transport par taxi, précitée, se lit comme suit :
« Commet une infraction et est passible d'une amende de 350 $ à 1 050 $, le titulaire d'un permis de propriétaire de taxi qui :
1° omet de maintenir l'automobile attachée à son permis en bon état ou de respecter les normes, les conditions et les modalités de construction, d'identification ainsi que d'entretien mécanique prévues par un règlement visé à l'article 56;
2° tolère, permet ou accepte une réparation de l'automobile attachée à son permis qui ne respecte pas les règles de l'art ou qui est effectuée par une personne autre qu'un mécanicien certifié. » (Soulignés du Tribunal)
[16] Par ailleurs, aux fins de la présente décision, d’autres articles de cette loi doivent être cités. Il s’agit des articles suivants :
« 53. Nul ne peut conduire un taxi, une limousine ou une limousine de grand luxe qui présente une défectuosité majeure, au sens du deuxième alinéa de l'article 58, constatée au cours d'une vérification. »
[…]
« 56. Tout titulaire de permis de propriétaire de taxi doit maintenir, selon le cas, son taxi, sa limousine ou sa limousine de grand luxe en bon état et respecter les normes de construction, d'identification ainsi que d'entretien mécanique pour telles automobiles et leurs équipements obligatoires et s'assurer de sa vérification mécanique selon les conditions déterminées par règlement ou en vertu du Code de la sécurité routière (chapitre C-24.2).
Le chauffeur d'un taxi, d'une limousine ou d'une limousine de grand luxe est, par ailleurs, tenu de veiller au bon état de propreté de l'automobile, tant de la carrosserie que de l'habitacle, et au bon fonctionnement des équipements dont, le cas échéant, le taximètre et le lanternon. »
[…]
« 101. Commet une infraction et est passible d'une amende de 175 $ à 525 $, le titulaire d'un permis de propriétaire de taxi qui omet de réparer ou de faire réparer une défectuosité mineure dans un délai de 48 heures à compter du moment où elle lui est signalée par un chauffeur.
122. Lorsqu'il constate une infraction visée par le paragraphe 2° de l'article 100, par les paragraphes 1° ou 2° de l'article 104 ou par les paragraphes 1° ou 2° de l'article 105, l'agent de la paix, la personne spécialement autorisée par le ministre ou l'employé d'une autorité municipale ou supramunicipale chargé de l'application de la présente loi peut signifier au contrevenant un constat d'infraction avec un avertissement enjoignant au défendeur de remédier à cette infraction et d'en fournir la preuve dans un délai de 48 heures.
Le constat d'infraction est privé d'effet lorsque la preuve requise est fournie dans ce délai à un agent de la paix ou, le cas échéant, à la personne spécialement autorisée par le ministre ou à un employé d'une autorité municipale ou supramunicipale chargé de l'application de la présente loi.
Lorsqu'un avertissement est joint au constat d'infraction, le délai prévu à l'article 160 du Code de procédure pénale (chapitre C-25.1) ne commence à courir qu'à l'expiration du délai indiqué dans l'avertissement. » (Soulignés du Tribunal)
[17] Par ailleurs, l’article 162 du Règlement sur les normes de sécurité des véhicules routiers (chapitre C-24.2, r. 32) prévoit que :
« Sous réserve des articles 163 à 171, toute dérogation aux normes prévues à la section III du présent chapitre, à l'exception de celles des articles 82, 83 et 89, constitue également une défectuosité mineure. » (Soulignés du Tribunal)
[18] Les articles 163 à 171 du Règlement sur les normes de sécurité des véhicules routiers définissent les défectuosités majeures des différentes composantes d’un véhicule. L’article 521 du Code de la sécurité routière rend les taxis sujets à la vérification mécanique selon les exigences du Règlement sur les normes de sécurité des véhicules routiers, précité, dont entre autres, l’obligation qu’ils soient vérifiés à tous les six mois, avec production d’un certificat de vérification indiquant, notamment, les défectuosités mineures et les défectuosités majeures constatées.
[19] Il ressort de l’ensemble de ces articles que le titulaire d’un permis de propriétaire de taxi doit maintenir l'automobile attachée à son permis en bon état sous peine d’une amende de 350 $ à 1 050 $ (articles 56 et 102). Les articles 56 et 102 prévoient également l’entretien mécanique et la vérification mécanique du véhicule. Le législateur distingue donc entre le « bon état » d’un véhicule et la « vérification mécanique » d’un véhicule. Les constatations faites par les policiers, dans le présent cas, relèvent du bon état du véhicule plutôt que de la vérification mécanique.
[20] D’autre part, le législateur distingue entre les défectuosités majeures d’un véhicule et les défectuosités mineures. Ces dernières ne sont pas définies autrement que de façon résiduelle par rapport aux défectuosités majeures, lesquelles sont définies par les articles 163 à 171 du Règlement sur les normes de sécurité des véhicules routiers précité.
[21] Par ailleurs, il est interdit à quiconque de conduire un taxi qui présente une défectuosité majeure constatée au cours d'une vérification (article 53). Quant à la défectuosité mineure, le titulaire d'un permis de propriétaire de taxi doit la réparer ou la faire réparer dans un délai de 48 heures après qu’elle lui a été signalée par un chauffeur (article 101).
[22] Finalement, à l’article 122, le législateur a prévu la possibilité pour un agent de la paix de signifier un constat d'infraction avec un avertissement enjoignant au défendeur de remédier à une infraction mentionnée au paragraphe 2° de l'article 100, aux paragraphes 1° ou 2° de l'article 104 ou aux paragraphes 1° ou 2° de l'article 105 et d'en fournir la preuve dans un délai de 48 heures. L’article 102, qui est l’article sur lequel est fondé le constat d’infraction émis contre le défendeur, n’est pas prévu à l’article 122, de sorte que l’infraction d’omettre de maintenir en bon état un véhicule taxi ne peut faire l’objet d’un avertissement.
[23] Dans le présent cas, la preuve de la poursuivante indique qu’une bande protectrice noire pendait dans le vide, sur la porte avant côté passager, que le véhicule était très sale, que le pare-chocs arrière était « cassé », côté passager et qu’il y avait deux taches de rouille d'une grosseur d’une clémentine sur le capot, selon les policiers, lorsque le véhicule a été intercepté le 4 novembre 2011. Le défendeur, dans son témoignage, a déclaré que la bande était « décollée un petit peu », mais qu'il n'y avait « pas de danger ». Il a déclaré qu'il y avait une égratignure sur le pare-chocs, mais qu'il n'a jamais vu de cassure. Il a déclaré qu’il y avait deux taches de rouille sur le capot de un à deux centimètres, mais que la rouille seule n’est pas interdite. Il a attribué la saleté du véhicule aux hasards de la route.
[24] Le témoin du défendeur, qui agit comme un chauffeur du véhicule, a déclaré avoir fait une vérification visuelle, le jour de l’interception, et n’avoir rien remarqué, ce qui contredit le témoignage du défendeur qui, lui, a quand même vu la bande décollée, une égratignure sur le pare-chocs et deux taches de rouille.
[25] En somme, le défendeur, dont la preuve est contradictoire, confirme en partie la preuve de la poursuivante tout en essayant d’atténuer l’importance des anomalies rapportées par les policiers. Le Tribunal est d’avis qu’il ne peut retenir le témoignage du défendeur et de son témoin sur l’état du véhicule. Le Tribunal est d’avis que l’ensemble des constatations faites par les policiers démontre que le véhicule du défendeur n’était pas en bon état le 4 novembre 2011, lorsque les policiers l’ont vérifié. De plus, même en ne considérant que les anomalies reconnues par le défendeur, il faut conclure que le véhicule n’était pas en bon état.
[26] Le défendeur a témoigné que son véhicule a été vérifié par un contrôleur routier une semaine après l’interception du 4 novembre et qu’aucune anomalie ne lui a été signalée. Ce fait ne démontre pas l’état du véhicule du défendeur en date du 4 novembre 2011. Par ailleurs, cette affirmation du défendeur n’indique pas sur quoi a porté la vérification du contrôleur routier. Était-ce sur les défectuosités majeures ou mineures ou sur le « bon état » du véhicule, lequel est différent de la vérification mécanique et des défectuosités? De plus, tel que déjà indiqué, même en retenant la version du défendeur, le véhicule de celui-ci n’était pas en bon état, le 4 novembre 2011. Le Tribunal ne peut donc retenir cet argument du défendeur.
[27] Le défendeur soutient que le policier devait lui donner un avis de 48 heures pour réparer les « anomalies mineures » constatées. Tel que déjà mentionné, la loi ne prévoit pas une telle possibilité pour le policier. L’article 122 prévoit la possibilité d’émettre un avertissement dans les cas prévus au paragraphe 2° de l'article 100, aux paragraphes 1° et 2° de l'article 104 et aux paragraphes 1° et 2° de l'article 105, mais pas à l’article 102, qui est l’article sur lequel est émis le présent constat d’infraction.
[28] Enfin, le défendeur invoque le fait qu'une journée de formation pour le policier est insuffisante, car la Loi concernant les services de transport par taxi précitée contient cent articles. Cet argument ne peut être retenu par le Tribunal. La preuve ne révèle pas que le policier n’avait pas la compétence requise pour vérifier l’état du véhicule du défendeur, le 4 novembre 2011.
[29] Pour toutes ces raisons, le défendeur doit être déclaré coupable de l’infraction reprochée.
[30] DÉCLARE le défendeur coupable de l’infraction reprochée.
[31] IMPOSE au défendeur l’amende minimum de 350 $ plus les frais, le tout payable dans un délai de 30 jours selon la loi.
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__________________________________ Louis-Marie Vachon Juge municipal |
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Date d’audience : |
26 juin 2013 et 16 septembre 2013 |
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AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans appel; la consultation du plumitif s'avère une précaution utile.