Décision

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Gosselin et CSSS Québec-Nord

2011 QCCLP 2772

 

 

COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES

 

 

Québec

15 avril 2011

 

Région :

Québec

 

Dossier :

425555-31-1011

 

Dossier CSST :

134741966

 

Commissaire :

Jean-Luc Rivard, juge administratif

 

Membres :

Alexandre Beaulieu, associations d’employeurs

 

Nicole Deschênes, associations syndicales

 

 

______________________________________________________________________

 

 

 

Yvan Gosselin

 

Partie requérante

 

 

 

et

 

 

 

C.S.S.S. Québec-Nord

 

Partie intéressée

 

 

 

 

 

______________________________________________________________________

 

DÉCISION

______________________________________________________________________

 

 

[1]           Le 24 novembre 2010, monsieur Yvan Gosselin (le travailleur) dépose à la Commission des lésions professionnelles une requête par laquelle il conteste une décision de la Commission de la santé et de la sécurité du travail (la CSST) rendue le 26 octobre 2010 à la suite d’une révision administrative.

[2]           Par cette décision, la CSST confirme deux décisions qu’elle a rendues initialement le 31 août 2010 et le 7 septembre 2010.

 

[3]           Par sa décision du 31 août 2010, la CSST entérinait un avis rendu par un membre du Bureau d’évaluation médicale le 22 juillet 2010 sous la plume du docteur Réjean Cloutier, orthopédiste, portant sur les questions du diagnostic, la date de consolidation, l’atteinte permanente et les limitations fonctionnelles découlant de la lésion survenue initialement le 10 février 2009. Ainsi, la CSST entérinait les diagnostics retenus par le Bureau d’évaluation médicale, soit une déchirure du ménisque interne au genou droit et une nécrose avasculaire à la hanche droite. La CSST déclare que le diagnostic de déchirure du ménisque interne au genou droit donne droit à des indemnités de remplacement du revenu mais déclare qu’il n’y a pas de relation entre la lésion survenue le 10 février 2009 et le diagnostic de nécrose avasculaire à la hanche droite. La CSST déclare donc que le travailleur n’a pas droit à des indemnités en regard de ce dernier diagnostic.

[4]           La CSST déclare que la lésion subie par le travailleur a entraîné une atteinte permanente et aucune limitation fonctionnelle.

[5]           Enfin, la CSST conclut qu’en l’absence de limitations fonctionnelles, le travailleur est capable d’exercer à nouveau son emploi et en conséquence, elle met fin au versement des indemnités de remplacement du revenu.

[6]           Par sa décision du 7 septembre 2010, la CSST donne suite à l’avis émis par le Bureau d’évaluation médicale le 22 juillet 2010 en déclarant que le travailleur conserve une atteinte permanente totale de 1,10 %, donnant droit à une indemnité pour préjudice corporel de 945 $ en raison des séquelles subies au ménisque interne de son genou droit.

[7]           À l’audience tenue à Québec le 8 avril 2011, le travailleur était présent et représenté par monsieur Denis St-Hilaire. C.S.S.S. Québec-Nord (l’employeur), bien que dûment convoqué, était absent. Son représentant, Me Raymond Gouge, a transmis au tribunal une lettre datée du 7 avril 2011 soulignant qu’il comprenait que le travailleur désirait faire établir l’atteinte permanente à 2 % et informait le tribunal que l’employeur n’avait aucune représentation à faire sur cet aspect de la décision contestée par le travailleur.

L’OBJET DE LA CONTESTATION

[8]           Le travailleur demande de reconnaître qu’il conserve une atteinte permanente de 2 % conformément à l’avis émis par son médecin dans le cadre d’une évaluation médicale datée du 28 octobre 2009, sous la plume du docteur Gaston Paradis. D’ailleurs, cet avis avait donné suite à une décision de la CSST du 13 novembre 2009 reconnaissant que le travailleur avait subi une atteinte permanente totale de 2,20 %, donnant droit à une indemnité de 1 549,33 $. Le travailleur souligne que la CSST ne pouvait utiliser la procédure d’évaluation médicale pour contredire et infirmer une décision antérieure rendue sur le pourcentage d’atteinte permanente et non contestée par les parties.

[9]           À tout événement, le travailleur souligne que l’évaluation de son médecin, le docteur Gaston Paradis, chirurgien orthopédiste, dans le cadre du rapport rédigé le 28 octobre 2009, doit être retenue puisque c’est celui qui donne la meilleure évaluation des séquelles subies à son genou droit.

L’AVIS DES MEMBRES

[10]        La membre issue des associations syndicales de même que le membre issu des associations d’employeurs sont tous deux d’avis qu’il y a lieu de retenir l’opinion du docteur Gaston Paradis, chirurgien orthopédiste, dans son rapport daté du 28 octobre 2009 concluant que le travailleur conserve une atteinte permanente de 2 % en raison d’une méniscectomie interne avec séquelles internes au genou droit et en raison d’une perte de 10 degrés d’amplitude au niveau de la flexion du même genou. Le travailleur conserve donc une atteinte permanente totale de 2,20 %, donnant droit à une indemnité de 1 549,33 $, le tout portant intérêt selon la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles[1] (la loi).

LES FAITS ET LES MOTIFS

[11]        Le tribunal est saisi d’une contestation du travailleur en rapport avec des décisions de la CSST qui entérinaient les conclusions émises par un membre du Bureau d’évaluation médicale, le 22 juillet 2010, sous la plume du docteur Réjean Cloutier, orthopédiste.

[12]        Cet avis du Bureau d’évaluation médicale porte sur la question du diagnostic, la date de consolidation, l’atteinte permanente et les limitations fonctionnelles.

[13]        Le travailleur ne désire contester qu’un seul aspect, soit le pourcentage de l’atteinte permanente en rapport avec la lésion professionnelle survenue le 10 février 2009 et qui avait entraîné une déchirure à son ménisque interne du genou droit.

[14]        Dans son avis, le Bureau d’évaluation médicale conclut à une atteinte permanente de 1 % en raison d’une méniscectomie interne au genou droit sans séquelles fonctionnelles.

[15]        Le travailleur demande de retenir les conclusions découlant de l’évaluation médicale de son médecin traitant, le docteur Gaston Paradis, énoncées le 28 octobre 2009, et établissant une atteinte permanente de 2 %, soit 1 % pour une méniscectomie interne avec séquelles fonctionnelles au genou droit et 1 % pour une perte de 10 degrés d’amplitude au genou droit.

[16]        Le tribunal est d’avis, après analyse, qu’il y a lieu de reconnaître une atteinte permanente chez le travailleur de 2 % conforme à l’évaluation du docteur Gaston Paradis énoncée dans son rapport du 28 octobre 2009. Il faut y ajouter 0,20 % pour douleur et perte de jouissance de la vie, pour un total de 2,20 %, donnant droit ainsi à une indemnité de 1 549,33 $ le tout portant intérêt selon la loi.

[17]        Il y a lieu ici de souligner quelques faits pertinents en regard du présent dossier.

[18]        Rappelons que le travailleur a subi une lésion professionnelle le 10 février 2009 ayant entraîné une déchirure du ménisque interne de son genou droit.

[19]        Un premier avis du Bureau d’évaluation médicale fut demandé et obtenu du docteur René Landry, orthopédiste, le 27 octobre 2009, en rapport avec le diagnostic, la date de consolidation et la question des soins médicaux. Le médecin concluait alors à une déchirure du ménisque interne du genou droit, conformément d’ailleurs aux diagnostics retenus de façon constante au dossier.

[20]        Par la suite, le docteur Gaston Paradis, agissant à titre de médecin du travailleur, produisait un rapport d’évaluation médicale le 28 octobre 2009 notamment sur la question de l’atteinte permanente. Le médecin concluait que le travailleur conservait une atteinte permanente de 2 %, soit 1 % pour une méniscectomie interne avec séquelles fonctionnelles du genou droit et 1 % pour une perte de 10 degrés d’amplitude en flexion au genou droit.

[21]        Puis, cet avis a fait l’objet, par la CSST, d’une décision le 13 novembre 2009 reconnaissant que le travailleur conservait une atteinte permanente de 2,20 %, donnant droit à une indemnité de 1 549,33 $. Cette décision non contestée par les parties se lit comme suit :

Objet : Décision concernant le

pourcentage de votre atteinte permanente

 

Monsieur,

 

            À la suite de votre lésion professionnelle du 10 février 2009, votre atteinte permanente a été évaluée par votre médecin à 2,00 %. À ce pourcentage s’ajoute 0,20 % pour douleurs et perte de jouissance de la vie, pour un total de 2,20 %.

 

            Ce pourcentage vous donne droit à une indemnité de 1 549,33 $.

 

            À cette somme s’ajouteront les intérêts courus depuis la date de réception de votre réclamation. Si aucune des parties ne demande la révision de cette décision, le montant total (y compris les intérêts) vous sera versé dans un peu plus d’un mois.

 

 

[22]        Par la suite, dans le cadre du suivi médical, d’autres diagnostics sont apparus au dossier du travailleur, soit gonalgie, coxalgie et nécrose avasculaire. Dans ce contexte, la CSST demandait un deuxième avis du Bureau d’évaluation médicale en date du 20 mai 2010. La demande de la CSST ne portait que sur le diagnostic et la date de consolidation. Aucune demande ne portait sur la question de l’atteinte permanente.

[23]        Le membre du Bureau d’évaluation médicale a cru bon, toutefois, de se prononcer sur la question de l’atteinte permanente et limitations fonctionnelles conformément à l’article 221 de la loi qui se lit comme suit :

221.  Le membre du Bureau d'évaluation médicale, par avis écrit motivé, infirme ou confirme le diagnostic et les autres conclusions du médecin qui a charge du travailleur et du professionnel de la santé désigné par la Commission ou l'employeur, relativement aux sujets mentionnés aux paragraphes 1° à 5° du premier alinéa de l'article 212, et y substitue les siens, s'il y a lieu.

 

Il peut aussi, s'il l'estime approprié, donner son avis relativement à chacun de ces sujets, même si le médecin qui a charge du travailleur ou le professionnel de la santé désigné par l'employeur ou la Commission ne s'est pas prononcé relativement à ce sujet.

__________

1985, c. 6, a. 221; 1992, c. 11, a. 23.

 

 

[24]        C’est dans ce contexte que le docteur Réjean Cloutier, le 23 juillet 2010, concluait que le travailleur avait subi effectivement une déchirure du ménisque interne au genou droit et une nécrose avasculaire à la hanche droite. Toutefois, le médecin ne retenait qu’une atteinte permanente de 1 % en raison d’une méniscectomie interne au genou droit sans séquelles fonctionnelles.

[25]        Par la suite, la CSST a entériné cette conclusion, notamment en rapport avec l’atteinte permanente fixée à 1 % par les décisions contestées dans le présent dossier, soit celles émises par la CSST les 31 août et 7 septembre 2010.

[26]        Le tribunal est d’avis que la CSST ne pouvait d’aucune façon remettre en cause la question de l’atteinte permanente par le biais du deuxième avis du Bureau d’évaluation médicale émis le 23 juillet 2010 puisqu’une décision antérieure de la CSST elle-même, émise le 13 novembre 2009, reconnaissait que le travailleur conservait une atteinte permanente de 2,20 %.

[27]        Il s’agissait d’une décision finale et irrévocable que les parties au dossier n’avaient aucunement contestée.

[28]        La CSST ne pouvait, même suite à l’avis d’un Bureau d’évaluation médicale, remettre en cause une décision finale et irrévocable portant sur l’atteinte permanente fixée à 2 % et dans ce contexte cet aspect de l’avis du Bureau d’évaluation médicale est manifestement irrégulier[2].

[29]        De toute façon, saisi du fond de la question de l’existence de l’atteinte permanente, le tribunal est d’avis qu’il y a lieu de retenir l’évaluation détaillée, complète et bien motivée émise par le docteur Gaston Paradis dans le cadre de son rapport d’évaluation médicale produit le 28 octobre 2009. Dans le cadre de cet avis, le médecin constatait bien, sur le plan objectif, que le travailleur conservait une perte de 10 degrés d’amplitude en flexion au genou droit dont il faut tenir compte. En conséquence, non seulement le travailleur conserve une atteinte permanente de 1 % en raison d’une méniscectomie interne avec séquelles fonctionnelles au genou droit mais il faut y ajouter 1 % pour une perte de 10 degrés d’amplitude en flexion au genou droit. À ce pourcentage, s’ajoute 0,20 % pour douleur et perte de jouissance de la vie, pour un total de 2,20 %, donnant droit à une indemnité de 1 549,33 $ le tout portant intérêt selon la loi.

 

PAR CES MOTIFS, LA COMMISSION DES LÉSIONS PROFESSIONNELLES :

ACCUEILLE la contestation de monsieur Yvan Gosselin déposée le 24 novembre 2010;

INFIRME en partie la décision rendue par la Commission de la santé et de la sécurité du travail le 26 octobre 2010 à la suite d’une révision administrative;

 

 

DÉCLARE que monsieur Yvan Gosselin conserve une atteinte permanente de 2,20 % donnant droit à une indemnité de 1 549,33 $, le tout portant intérêt selon la Loi sur les accidents du travail et les maladies professionnelles.

 

 

__________________________________

 

 

JEAN-LUC RIVARD

 

 

 

 

 

 

Monsieur Denis St-Hilaire

Représentant de la partie requérante

 

 

Me Raymond Gouge

CAIN LAMARRE CASGRAIN WELLS

Représentant de la partie intéressée

 

 



[1]           L.R.Q., c. A-3.001.

[2]           La CSST ne peut après une décision initiale utiliser la procédure d’évaluation médicale

            Sur réception du rapport du médecin traitant, la CSST reconnaît l’existence d’une atteinte permanente et de limitations fonctionnelles. Cette décision est devenue finale. La CSST ne peut ensuite, par le biais de l’article 204, contourner cette décision en utilisant la procédure d’évaluation médicale : Brûlé et La Crémière, C.A.L.P. 72698-60-9508, 9 octobre 1997, N. Lacroix (décision accueillant la requête en révision); Tozzo et Dims Construction inc., C.A.L.P. 80788-60-9606, 26 septembre 1997, G. Perreault; Lamoureux et Les Industries Poly inc., C.A.L.P. 91058-60B-9709, 26 juin 2006, J.-M. Dubois; Thériault et Concordia Protective Covering inc., C.L.P. 93741-63-9801, 15 juin 1999, H. Thériault; (99LÉSION PROFESSIONNELLE-77); Fortier et Q-Zip inc., C.L.P. 107339-73-9811, 30 septembre 1999, P. Perron; Désilets et M.S.S.S. Programme d’insertion sociale, C.L.P. 190071-72-0208, 4 septembre 2003, D. Lévesque; Prescott et  Placement Potentiel inc., C.L.P. 310130-62-0702, 26 mars 2008, M. Auclair.

           

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