Couture c. 9229-5161 Québec inc. (H Grégoire Estrie) | 2021 QCCQ 13727 | |||||
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« Division des petites créances » | ||||||
CANADA | ||||||
PROVINCE DE QUÉBEC | ||||||
DISTRICT DE | SAINT-FRANÇOIS | |||||
LOCALITÉ DE | SHERBROOKE | |||||
« Chambre civile » | ||||||
N° : | 450-32-701447-203 | |||||
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DATE : | 22 décembre 2021 | |||||
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE : | L’HONORABLE | PATRICK THÉROUX, J.C.Q. | ||||
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JOAN COUTURE | ||||||
Demanderesse | ||||||
c. | ||||||
9229-5161 QUÉBEC INC. (H GRÉGOIRE ESTRIE) | ||||||
Défenderesse | ||||||
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JUGEMENT | ||||||
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[1] La demanderesse, Mme Joan Couture, réclame à la défenderesse, 9229-5161 Québec Inc. (H Grégoire Estrie), représentée par M. Dominic Duhamel, la somme de 8 919,09 $ à la suite de l'achat d'un véhicule d'occasion, le 20 février 2019.
[2] Sa réclamation est articulée ainsi :
- Remplacement du moteur..............................7 419,09 $
- Estimation de dommages à la carrosserie............923,75 $
- Frais d'avocat et d'huissier......................... 576,25 $
Total : 8 919,09 $
[3] La défenderesse nie devoir payer les montants réclamés. Elle soulève qu'elle n'a pas été avisée en temps utile de la situation et qu'elle n'a pas eu l'occasion de réagir avant que les réparations n'aient été effectuées. N'ayant pas reçu de mise en demeure préalablement aux réparations, elle soutient avoir été placée devant le fait accompli.
[4] La défenderesse opère une entreprise commerciale spécialisée dans l'achat et la revente de véhicules usagés.
[5] Le 20 février 2019, la demanderesse achète un véhicule de marque Kia Sorento 2016, affichant 81 695 kilomètres, pour la somme de 24 746,60 $[1].
[6] Dix mois plus tard, soit le 10 décembre 2019, elle se rend chez un concessionnaire Kia pour des problèmes mécaniques. Le chauffage du véhicule ne fonctionne plus.
[7] On constate alors une fuite de la culasse. Un joint d'étanchéité est endommagé par une surchauffe du moteur. Selon la preuve, cette surchauffe est attribuable au fait que le ventilateur, servant à refroidir le moteur quand il atteint une température trop élevée, ne fonctionne pas. Il n'est pas branché.
[8] Vu le coût très élevé d'une réparation complète, la demanderesse opte pour remplacer le moteur par un moteur usagé.
[9] À l'occasion de cette réparation, le garagiste lui signale la présence de certains bris à la carrosserie, sous le véhicule. Une estimation pour le remplacement des pièces est préparée.
[10] La défenderesse est-elle redevable d'une obligation de garantie?
[11] Il est clairement établi que le bris mécanique est attribuable au fait que le ventilateur était débranché, ce qui a provoqué la surchauffe du moteur.
[12] Il s'avère que ce véhicule avait été accidenté, puis réparé peu de temps avant la vente. Selon la preuve, toute la partie avant du véhicule a été endommagée[2].
[13] Or, c'est dans cette partie avant que se situe le ventilateur, le filage et les fils de raccordement.
[14] La prépondérance de la preuve indique que le ventilateur a été débranché pour effectuer les réparations et que l'on a omis de le rebrancher.
[15] Contrairement à ce qu'avance la défenderesse, le Tribunal considère qu'il est tout à fait réaliste et fort probable que la demanderesse ait pu parcourir quelque 17 000 km avant que ne survienne une surchauffe assez importante pour endommager le moteur. À cet égard, les explications d'ordre technique de M. David Bizier lors de son témoignage sont beaucoup plus concluantes que les hypothèses de la défenderesse voulant que la demanderesse ait utilisé son véhicule pour tirer une remorque et qu'il soit impossible qu'elle ait pu le faire aussi longtemps si le ventilateur n'était pas fonctionnel.
[16] La défenderesse est un commerçant au sens de la Loi sur la protection du consommateur (L.p.c.)[3]. Elle est aussi un vendeur professionnel au sens du Code civil du Québec (C.c.Q.). À ce titre, elle est présumée connaître le vice affectant le véhicule qu'elle vend lorsque sa détérioration survient prématurément[4].
[17] Dans le cas présent, le bris mécanique est survenu moins d'un an, et après 17 000 km, suivant la vente. La demanderesse l'a utilisé pour ses déplacements personnels, plus particulièrement pour se véhiculer au travail, de Stoke à Sherbrooke.
[18] Le véhicule en litige a donc servi à un usage normal, mais certainement pas pour une durée raisonnable. La garantie prévue à l'article 38 L.p.c. s'applique.
[19] De plus, le véhicule était affecté d'un vice caché lors de la vente. En effet, les deux parties ignoraient à ce moment que le ventilateur était débranché. Il était impossible de s'en rendre compte par un examen sommaire vu l'emplacement du filage. Il a fallu démonter des pièces pour le constater.
[20] Selon le témoignage de M. Alexandre Tardif-Dodier, la défenderesse n'a pas inspecté le véhicule elle-même avant de le livrer à la demanderesse, car il provenait d'un autre établissement H Grégoire situé à St-Eustache et qu'il avait été inspecté à cet endroit. Rappelons que le contrat en litige est intervenu entre les parties à l'instance seulement. Le fait que la défenderesse se soit fiée à l'inspection réalisée par un tiers n'est pas opposable à la demanderesse. Ceci ne libère pas la défenderesse pour autant de ses obligations légales et contractuelles envers sa cliente. La garantie contre les vices cachés s'applique[5].
[21] Il est inexact de prétendre que la défenderesse a été placée devant le fait accompli. Elle a été informée immédiatement de la situation. Elle a demandé à la demanderesse de lui fournir des factures d'entretien et de vidanges d'huile avant de prendre position. Or, son Directeur des ventes a eu l'occasion de se rendre chez le concessionnaire Kia où il a été informé de la cause véritable du bris du moteur. Le fait que la défenderesse n'ait pas reçu de mise en demeure formelle avant que les réparations ne débutent ne peut être invoqué en l'espèce[6].
[22] Quant à la garantie du fabricant encore en vigueur, elle ne reçoit pas application considérant que le bris est attribuable à une intervention humaine. Contrairement à ce qu'avance la demanderesse, ce n'est pas parce que le véhicule était accidenté. Cet argument n'a aucune pertinence.
[23] Pour toutes ces raisons, la demanderesse a droit au remboursement du coût des réparations.
[24] Il s'agit de la valeur estimée du remplacement de certaines composantes de la carrosserie situées sous le véhicule. La demanderesse prétend qu'il s'agit de dommages résiduels de l'accident de son véhicule avant la vente.
[25] À ce chapitre, la preuve est insuffisante pour établir de façon prépondérante le lien entre les bris constatés en décembre 2019 et l'accident d'avril 2018. Le véhicule avait déjà parcouru 81 695 km lors de la vente; il avait parcouru 17 000 km de plus lors du constat de cette situation à l'occasion des réparations mécaniques.
[26] Il n'y a aucune preuve probante établissant que tout ceci était présent lors de la vente et qu'il était impossible de s'en rendre compte à ce moment.
[27] Cette partie de la réclamation n'est pas reliée à la garantie de durabilité et ne peut être considérée comme un vice caché non plus. Conséquemment, elle doit être rejetée.
[28] Il est bien établi en droit civil que les frais et honoraires défrayés pour des services professionnels d'avocat ne constituent pas un préjudice susceptible de compensation en l'absence de situation d'abus de droit ou d'abus de procédure de la part de la partie adverse. Règle générale, l'attribution des frais de justice constitue le remède approprié. C'est le cas en l'espèce.
[29] POUR CES MOTIFS, le Tribunal:
[30] ACCUEILLE partiellement la demande;
[31] CONDAMNE la défenderesse à payer à la demanderesse la somme de SEPT MILLE QUATRE CENT DIX-NEUF DOLLARS ET NEUF CENTS (7 419,09 $) plus les intérêts au taux légal et l'indemnité additionnelle prévue à l'article 1619 du Code civil du Québec à compter de la mise en demeure du 16 mars 2020;
[32] Avec les frais de justice de CENT QUATRE-VINGT-TREIZE DOLLARS (193 $) en faveur de la demanderesse.
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| __________________________________ PATRICK THÉROUX, J.C.Q. |
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[1] Pièce P-1.
[2] P-2 : Rapport d'historique Carfax daté du 16 novembre 2018 remis à la demanderesse lors de la vente; P-3 : Rapport d'historique Carfax daté du 10 décembre 2019 remis à la demanderesse lors des réparations.
[3] RLRQ c. P-40.1.
[4] Art. 53, al. 3, L.p.c. et art. 1729 C.c.Q.
[5] Art. 1726 C.c.Q.
[6] Art. 1738 C.c.Q.
AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans appel; la consultation du plumitif s'avère une précaution utile.