Décision

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Bouchard c. Société des loteries du Québec

2014 QCCS 3229

 

JB4255

 
 COUR SUPÉRIEURE

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

 DISTRICT DE TROIS-RIVIÈRES

 

N° :

400-17-002809-123

 

DATE :

 4 juillet 2014

______________________________________________________________________

 

SOUS LA PRÉSIDENCE DE L’HONORABLE ALAIN BOLDUC, J.C.S.

______________________________________________________________________

 

VALÉRIE BOUCHARD                            

Et

SÉBASTIEN CAMPEAU

Demandeurs

c.

SOCIÉTÉ DES LOTERIES DU QUÉBEC

Défenderesse

______________________________________________________________________

 

JUGEMENT

______________________________________________________________________

 

INTRODUCTION 

[1]           Invoquant qu’ils ont gagné à la loterie instantanée « Blé d’or » et que la Société des loteries du Québec (Loto-Québec) refuse abusivement de payer leurs réclamations, Valérie Bouchard et son conjoint Sébastien Campeau, les demandeurs, réclament la somme de 320 919,40 $ à cette dernière.

LES FAITS

[2]           Le 9 juillet 2011, un samedi, Loto-Québec commence à mettre en marché la nouvelle loterie instantanée appelée « Blé d’or ».

[3]           La journée même, alors qu’ils doivent passer la fin de semaine à leur chalet situé au réservoir Gouin, les demandeurs auraient acheté des billets « Blé d’or » au dépanneur « Chez mon chum » à Parent, suivant leurs témoignages. Ce commerce, qui appartient aux parents de Mme Bouchard, est un détaillant autorisé de Loto-Québec.

[4]           Le 11 juillet 2011, au début de la matinée, Loto-Québec est avisée de l’existence d’un problème majeur. Certains billets de loterie « Blé d’or » donnent droit à des lots lorsque les symboles sont grattés, mais le terminal de Loto-Québec indique qu’ils sont non-gagnants ou que les lots gagnés sont inférieurs.

[5]           Dès lors, entre 10 h et 10 h 30 le même jour, Loto-Québec transmet deux avis à tous ses détaillants par l’entremise de son système informatique, afin de les informer qu’ils doivent cesser immédiatement de vendre des billets « Blé d’or » et les retirer du présentoir.

[6]           Au cours de la matinée, Mme Bouchard communique avec Mme Manon Ladouceur, une employée de Loto-Québec. À ce moment-là, elle déclare qu’elle-même et son conjoint ont acheté des billets « Blé d’or » qui donnent droit à des lots gagnants, mais qu’ils sont incapables de les faire vérifier au dépanneur où ils se trouvent. Après avoir informé Mme Bouchard qu’il existe un problème technique que Loto-Québec tente de résoudre, Mme Ladouceur lui demande de transmettre une copie des billets gagnants par télécopieur. Mme Bouchard lui transmet ces billets peu de temps après.

[7]           Quelques heures plus tard, Loto-Québec est informée que le problème découle d’une erreur d’impression des billets de loterie dont son fournisseur est responsable.

[8]           Le 12 juillet 2011, Loto-Québec transmet alors le communiqué suivant aux médias, sur la chaîne de presse, afin de déclarer publiquement qu’elle s’engage à assurer le paiement des demandes de réclamation émanant des joueurs ayant acheté des billets de loterie « Blé d’or », à moins d’irrégularités :

Loto-Québec a retiré

la loterie instantanée « Blé d’or »

Montréal, le 12 juillet 2011 - Loto-Québec a retiré du marché en matinée hier, en raison d’un problème d’impression dû à son fournisseur, tous les billets de l’instantanée « Blé d’or » dont elle avait amorcé la distribution la journée même dans son réseau de détaillants.

Une faute dans l’impression de ces billets, commise par la compagnie Scientific Games International, a obligé Loto-Québec à mettre fin incessamment à la vente de ce produit imprimé dans une usine montréalaise.

Peu après le début de la mise en vente, des consommateurs qui gagnaient apparemment des lots ont signalé à Loto-Québec qu’un message « non gagnant » était obtenu lors de la validation de leur billet au terminal.

Au cours des prochains jours, Loto-Québec assurera le paiement des demandes de réclamation émanant de joueurs qui ont acheté « Blé d’or » durant sa courte période de vente, à moins d’irrégularités.

[9]           C’est ainsi que le 14 juillet 2011 (Mme Bouchard) et le 18 juillet 2011               (M. Campeau), les demandeurs soumettent des réclamations à Loto-Québec au regard des billets « Blé d’or ». La réclamation de Mme Bouchard s’élève à 186 499 $ pour 22 billets alors que celle de M. Campeau s’élève à 87 215 $ pour 8 billets.

[10]        Le 27 juillet 2011 (M. Campeau) et le 30 août 2011 (Mme Bouchard), les demandeurs sont interrogés par M. Gaétan Villeneuve, l’un des enquêteurs de         Loto-Québec.

[11]        Le 14 octobre 2011, après avoir déterminé que leurs déclarations contiennent des contradictions, Loto-Québec transmet des lettres aux demandeurs afin de les informer qu’elle refuse de payer leurs réclamations au motif qu’il y a une irrégularité : ils n’ont pas acheté des billets de loterie avec l’espérance de gagner un lot par l’effet du hasard.

[12]        Par la suite, les demandeurs poursuivent plusieurs démarches auprès de      Loto-Québec afin qu’elle fasse droit à leurs réclamations. Cependant, la décision de les rejeter est maintenue.

[13]        Partant, le 25 mai 2012, les demandeurs font signifier une requête introductive d’instance à Loto-Québec.

POSITIONS DES PARTIES

Position des demandeurs 

[14]        D’entrée de jeu, les demandeurs soutiennent qu’ils ont le droit de réclamer les sommes de 186 499 $ et 87 215 $ à Loto-Québec au regard des billets de loterie          « Blé d’or » qu’ils ont achetés.

[15]        Même si leurs billets étaient nuls en raison des irrégularités qui s’étaient produites lors de leur impression, ils font valoir que Loto-Québec a ratifié rétroactivement les contrats de jeu qui s’étaient formés entre les parties lors de leur achat, qui étaient nuls de nullité relative, lorsqu’elle s’est engagée publiquement, le      12 juillet 2011, à assurer le paiement des demandes de réclamation des joueurs ayant acheté des billets de loterie « Blé d’or ».

[16]        Puisqu’ils ne pouvaient soupçonner que des irrégularités s’étaient produites lors de l’impression des billets, les demandeurs ajoutent que Loto-Québec n’a aucun motif valable pour refuser de payer leurs réclamations. Car ils ont acheté leurs billets dans l’intention de gagner un lot par l’effet du hasard. De toute manière, en ratifiant rétroactivement les contrats de jeu intervenus lors de l’achat des billets, Loto-Québec ne pouvait assujettir le paiement des réclamations à la condition qu’il n’y ait aucune irrégularité.

[17]        Cela dit, les demandeurs avancent qu’ils sont justifiés de réclamer à              Loto-Québec les honoraires extrajudiciaires de 47 205,40 $ qu’ils doivent payer à leur avocat pour faire valoir leurs droits. Selon eux, elle a commis un abus de droit suivant l’article 7 C.c.Q. en refusant d’assurer le paiement de leurs billets.

Position de la défenderesse 

[18]        Loto-Québec soutient que la requête des demandeurs doit échouer.

[19]        D’abord, elle fait valoir que les demandeurs n’ont pas réussi à démontrer, de façon prépondérante, qu’ils ont acheté des billets de loterie « Blé d’or ». Lors de l’audience, ils n’ont produit aucun reçu, ils ont admis qu’ils ont menti à l’enquêteur de Loto-Québec lorsqu’il les a appelés au cours de l’été 2011 et ils ont rendu des témoignages contradictoires.

[20]        Subsidiairement, si le Tribunal juge que l’achat des billets a été prouvé,        Loto-Québec maintient qu’elle est justifiée de refuser de payer les réclamations des demandeurs à cet égard. Selon elle, celles-ci sont affectées d’une irrégularité au sens de son engagement unilatéral contracté le 12 juillet 2011 lors de la publication de son communiqué, car les demandeurs n’ont pas achetés leurs billets dans l’intention de gagner un lot par l’effet du hasard mais pour profiter d’une erreur.

[21]        Contrairement aux demandeurs, Loto-Québec soutient que cet engagement ne peut constituer une ratification rétroactive des contrats de jeu qui s’étaient formés entre les parties lors de l’achat des billets au mois de juillet 2011. Aucune ratification n’était possible, car les billets étaient nuls de nullité absolue suivant les 7 et 9 du Règlement sur la Mini Loto, toute loterie instantanée et toute loterie de type « poule »[1].  

[22]        En ce qui a trait à la réclamation des demandeurs au regard des honoraires extrajudiciaires, Loto-Québec maintient qu’elle est dénuée de tout fondement. Ils n’ont pas réussi à prouver qu’elle a commis un abus de droit sur le fond ou exercé son droit d’ester en justice de façon abusive.

QUESTIONS EN LITIGE

[23]        Les questions en litige sont les suivantes : 

1.    Les demandeurs ont-ils prouvé qu’ils ont acheté des billets de loterie                    « Blé d’or »?

2.    Si la réponse à la question 1 est affirmative, les demandeurs ont-ils droit de réclamer les sommes de 186 499 $ (Mme Bouchard) et 87 215 $ (M. Campeau) à Loto-Québec au motif qu’elle a ratifié les contrats de jeu intervenus entre les parties en publiant son communiqué le 12 juillet 2011?

3.    Si la réponse à la question 2 est affirmative, les demandeurs ont-ils droit de réclamer les honoraires extrajudiciaires de 47 205,40 $ qu’ils doivent payer à leur avocat au motif que Loto-Québec a commis un abus de droit en refusant de payer les sommes réclamées au regard de leurs billets de loterie               « Blé d’or »?

ANALYSE

La preuve de l’achat des billets de loterie « Blé d’or »

[24]        Lorsqu’une personne achète un billet de loterie de Loto-Québec, il se forme un contrat de jeu entre elle et cette dernière. Il peut être qualifié comme étant un contrat d’adhésion, un contrat de consommation et un contrat conclu à distance[2].

[25]        Pour avoir gain de cause, les demandeurs devaient d’abord démontrer que des contrats de jeu sont intervenus avec Loto-Québec, en prouvant qu’ils ont acheté des billets de loterie « Blé d’or ».

[26]        En l’espèce, les demandeurs ont réussi à prouver, de façon prépondérante, qu’ils ont acheté des billets de loterie « Blé d’or » par l’entremise de Mme Nicole Labrèche, la mère de Mme Bouchard, copropriétaire du dépanneur « Chez mon chum » à Parent. Quoiqu’ils n’aient déposé aucune preuve d’achat des billets de loterie, cela n’a aucune incidence. Il ne s’agissait pas d’une preuve essentielle.

La ratification des contrats de jeu intervenus entre les parties

[27]        Avant toute chose, il est pertinent d’effectuer un bref rappel du cadre juridique régissant les contrats de jeu qui se sont formés entre les parties.

[28]        Suivant l’article 2629 C.c.Q., les contrats de jeu et de pari sont valides dans les cas expressément prévus par la loi. En vertu de l’article 13 de la Loi sur la Société des loteries du Québec[3], le conseil d’administration de Loto-Québec peut, par règlement, déterminer les normes et conditions générales relatives à la nature et à la tenue des systèmes de loterie qu’elle conduit et administre. Le Règlement sur la Mini Loto, toute loterie instantanée et toute loterie de type « poule », qui s’applique ici, a été adopté en vertu de cette disposition.

[29]        Dans la section II de ce règlement, l’article 7 édicte en ces termes qu’un billet de loterie est nul dans les cas suivants :

7.  Billet invalide: Est nul:

                        1°    un billet qui n'a pas été vendu par la Société ou qui a été racheté par elle;

2°    une billet dont une case marquée «NUL SI DÉCOUVERT», «N'ENLEVEZ PAS» ou d'une autre inscription au même effet est découverte de façon à laisser paraître la totalité ou une partie du numéro de contrôle dissimulé sous cette inscription;

3°    une billet illisible, mutilé, modifié, contrefait, mal découpé, mal imprimé, incomplet, produit erronément ou autrement défectueux, sauf si la Société peut déterminer au moyen d'un numéro de contrôle que le billet est réellement gagnant du lot réclamé.

                                                                                (Reproduction intégrale)

[30]        Étant donné qu’une erreur a été commise par le fournisseur de Loto-Québec lors de l’impression des billets de loterie « Blé d’or », les billets que les demandeurs ont achetés et, par le fait même, les contrats de jeu qui se sont formés entre les parties à cet égard, étaient frappés de nullité au moment de l’achat, de sorte que les demandeurs n’avaient pas droit aux lots indiqués sur leurs billets. Les demandeurs l’ont d’ailleurs admis à l’audience.

[31]         Mais puisque Loto-Québec a publié un communiqué, le 12 juillet 2011, indiquant qu’elle s’engage à assurer le paiement des demandes de réclamation émanant des joueurs ayant acheté des billets de loterie « Blé d’or », à moins d’irrégularités, faut-il conclure que les demandeurs ont le droit de réclamer les montants des lots indiqués sur leurs billets?

[32]        De l’avis du Tribunal, la réponse est non.

[33]        D’abord, comme les lois et règlements régissant le contrat de jeu sont d’ordre public[4], Loto-Québec ne pouvait ratifier les contrats de jeu qui s’étaient formés entre les parties, car ils étaient frappés de nullité absolue (1418 C.c.Q.). 

[34]        Par conséquent, le communiqué du 12 juillet 2011 constitue un engagement unilatéral de Loto-Québec d’assurer le paiement des demandes de réclamation, à  condition qu’il n’y ait pas d’irrégularité. Dans le dictionnaire Le Petit Larousse illustré 2011[5], les définitions pertinentes du mot irrégularité sont les suivantes :

·         Caractère de ce qui n’est pas régulier, réglementaire, légal.

·         Action contraire à la loi, au règlement. Commettre une irrégularité.

 

 

 

[35]        Or ici, les demandes de réclamation des demandeurs sont manifestement affectées d’une irrégularité. Les billets n’ont pas été achetés dans l’intention de gagner un lot par l’effet du hasard, l’une des conditions du contrat de jeu[6], mais pour profiter d’une erreur.

[36]        En effet, le Tribunal est convaincu que Mme Labrèche, la mère de                 Mme Bouchard, après avoir constaté qu’il y avait un problème avec les billets de loterie « Blé d’Or » lorsque certains clients du dépanneur en ont achetés, a suggéré aux demandeurs d’en acheter au cours de la matinée du 11 juillet 2011 (certains d’entre eux avaient déjà été vérifiés à la borne de vérification du dépanneur) afin de les faire profiter de la situation. Considérant que les versions des faits des demandeurs sont truffées de mensonges, de contradictions, d’incohérences et d’invraisemblances, ce qui démontre qu’ils sont de mauvaise foi, contrevenant ainsi à leur obligation d’agir de bonne foi prévue à l’article 1375 C.c.Q., c’est la seule conclusion qui peut être tirée.

[37]        Certes, Mme Labrèche ne pouvait savoir qu’une erreur avait été commise par le fournisseur de Loto-Québec lors de l’impression des billets de loterie « Blé d’or ». Toutefois, cela n’a aucune incidence. Elle savait qu’il y avait un problème.

[38]        Examinons en premier lieu les déclarations que les demandeurs ont faites lors des entrevues téléphoniques tenues avec M. Villeneuve, l’enquêteur de Loto-Québec.

[39]        Le 27 juillet 2011 (M. Campeau) et le 30 août 2011 (Mme Bouchard), les demandeurs ont déclaré à M. Villeneuve qu’ils ont acheté des billets « Blé d’or » au dépanneur des parents de Mme Bouchard le 9 juillet 2011 au matin, avant de se rendre à leur chalet situé au réservoir Gouin, et qu’ils les ont vérifiés à la borne de vérification du dépanneur le 11 juillet 2011, lors de leur retour à Parent[7].

[40]        Toutefois, leurs déclarations sont invraisemblables.

[41]        D’abord, suivant le relevé informatique de Loto-Québec[8], les billets suivants déposés par Mme Bouchard au soutien de sa réclamation ont été vérifiés à la borne de vérification du dépanneur le 9 juillet 2011 en soirée, le 10 juillet 2011 en matinée et en soirée et le 11 juillet 2011 en matinée :

a)             Le 9 juillet 2011, à 20 h 21:08 et à 20 h 21:31 : le billet portant le numéro de contrôle 0-145-010499-047-1-543038-292;

b)             Le 10 juillet 2011, à 11 h 53:53 : le billet portant le numéro de contrôle 0 - 145-010499-004-6-949973-663;

c)             Le 10 juillet 2011, à 18 h 37:46 : le billet portant le numéro de contrôle 0-145-010499-020-0-875540-803;

d)             Le 10 juillet 2011, à 18 h 38:08 : le billet portant le numéro de contrôle 0-145-010499-017-7-364021-998;

e)             Le 11 juillet 2011, à 11 h 19:16, à 11 h 19:28, à 11 h 19:37 et à 11 h 19:44 : le billet portant le numéro de contrôle 0-145-010499-025-0-158523-154.

[42]        Informée de cela par M. Villeneuve lors de l’entrevue téléphonique du                31 août 2011, Mme Bouchard a affirmé, après un moment d’hésitation, qu’elle devait vérifier avec son conjoint s’il était retourné au dépanneur à Parent avec les billets, confirmant ainsi qu’elle n’y était pas retournée elle-même.

[43]        Par la suite, Mme Bouchard a modifié sa version des faits. Elle a déclaré qu’ils sont possiblement retournés au dépanneur à cause d’une crevaison, mais qu’elle devait vérifier avec son conjoint.

[44]        Or, lorsque M. Campeau a parlé à M. Villeneuve le 27 juillet 2011, il a affirmé qu’il n’avait pas vérifié ses billets « Blé d’or » avant le 11 juillet 2011. Il n’a jamais parlé de la survenance d’une crevaison ni que les demandeurs auraient fait un aller-retour à Parent.

[45]        Il est également invraisemblable que M. Campeau ait vérifié des billets le           11 juillet 2011. Suivant le relevé informatique de Loto-Québec, le seul billet qu’il a produit au soutien de sa réclamation a été vérifié le 10 juillet 2011 à 11 h 33:11. Il porte le numéro de contrôle 0-145-010499-040-5-178772-682.

[46]        Voyons maintenant ce que les demandeurs ont déclaré lors de leurs interrogatoires avant défense tenus le 28 septembre 2012, après avoir eu l’occasion de prendre connaissance des transcriptions de l’enregistrement des entrevues téléphoniques tenues avec M. Villeneuve.

[47]        Lors de ces interrogatoires, les demandeurs ont modifié leurs versions des faits données à M. Villeneuve.

 

 

 

 

[48]        Ils ont déclaré qu’ils avaient eu une crevaison le 9 juillet 2011 alors qu’ils se rendaient à leur chalet situé au réservoir Gouin et qu’ils étaient retournés ensemble au dépanneur à Parent à deux occasions pendant la fin de semaine. La première fois, le     9 juillet 2011 en soirée, M. Campeau avait réparé la crevaison. Incidemment, il avait vérifié 1 billet alors que Mme Bouchard avait vérifié entre 1 et 10 billets et en avait achetés d’autres. La deuxième fois, le 10 juillet 2011 en matinée, les demandeurs avaient été chercher leurs véhicules tout-terrain. À cette occasion, au cours de la matinée, Mme Bouchard avait vérifié 2 ou 3 billets alors que M. Campeau en avait vérifié 1 ou 2. Par la suite, les demandeurs étaient retournés à leur chalet en début d’après-midi et n’avaient effectué aucune autre démarche au regard de leurs billets pour le reste de la journée.

[49]        Ces nouvelles versions comportent certaines incohérences par rapport aux informations apparaissant au relevé informatique de Loto-Québec. Suivant ce relevé, aucun billet qui appartiendrait à M. Campeau n’a été vérifié le 9 juillet 2011. De plus,  deux billets qui appartiendraient à Mme Bouchard ont été vérifiés le 10 juillet 2011 au soir.

[50]        Discutons enfin des témoignages que les demandeurs ont rendus à l’audience.

[51]        Lorsqu’ils ont témoigné, les demandeurs ont encore modifié leurs versions des faits. En outre, afin que leurs témoignages soient cohérents avec les informations apparaissant au relevé informatique de Loto-Québec, ils ont affirmé pour la première fois qu’ils avaient fait un deuxième voyage de leur chalet jusqu’au dépanneur à Parent le 10 juillet 2011 en soirée pour aller chercher du bois d’œuvre, remplir des bonbonnes de propane et vérifier des billets à la borne de vérification. C’était la seule façon d’expliquer pourquoi des billets ont été vérifiés le 10 juillet 2011 au cours de la soirée. Or, cette nouvelle version contredit leurs dépositions recueillies lors des interrogatoires au préalable. Car ils avaient déclaré qu’ils étaient retournés de Parent à leur chalet en début d’après-midi et qu’ils n’avaient effectué aucune autre démarche au regard de leurs billets pour le reste de la journée.

[52]         Également, confrontés aux contradictions manifestes entre leur témoignage sous serment et les déclarations faites à M. Villeneuve lors des entrevues téléphoniques, les demandeurs ont tenté de se justifier en affirmant avoir menti à ce dernier. Mme Bouchard a déclaré qu’elle n’était pas sous serment, que M. Villeneuve n’était pas un juge, un policier ou un avocat et qu’elle croyait que ce n’était pas si important de dire la vérité. Quant à M. Campeau, qui était manifestement mal à l’aise et avait des problèmes de mémoire, il a déclaré qu’il n’a pas dit la vérité parce qu’il désirait se débarrasser de M. Villeneuve et qu’il n’aimait pas se faire questionner.

[53]        Cela étant, il n’y a pas lieu de répondre à la troisième question en litige.

 

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[54]        REJETTE la requête des demandeurs;

[55]        AVEC DÉPENS.

 

 

 

__________________________________

ALAIN BOLDUC, j.c.s.

 

Me Gaétan Chorel

Avocat des demandeurs

 

Me Caroline Deschênes

Me Olivier Kott

Norton Rose Fulbright Canada

Avocats de la défenderesse

 

Dates d’audiences :

 26, 27 et 28 mars 2014

 



[1]     RLRQ, c. S-13.1, r.6.

[2]     Ifergan c. Société des loteries du Québec, 2014 QCCA 1114.

[3]      RLRQ, c. S-13.1.

[4]    Ifergan c. Société des loteries du Québec, préc., note 2.

[5]    Pierre LAROUSSE, Le Petit Larousse illustré 2011, Paris, 2010, p. 552

[6]    Dans l’affaire Luis c. Société des loteries et courses du Québec, AZ-99021300 (C.S.), la Cour supérieure a établi ce principe en considérant que le deuxième alinéa de l’article 1 de la Loi sur la Société des loteries du Québec édicte ceci : l’expression « système de loterie » comprend un jeu de hasard ou un jeu où se mêlent le hasard et l’adresse.

[7]     M. Campeau a affirmé qu’il a vérifié les billets au dépanneur de la mère de Mme Bouchard quelques jours après leur achat « en redescendant ». Cela correspond au 11 juillet 2011, date à laquelle ils sont retournés à leur domicile.

[8]     Pièce D-8.

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