Décision

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Plomberie DL inc. c. Toporek

2024 QCCQ 768

COUR DU QUÉBEC

« Division des petites créances »

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

JOLIETTE

« Chambre civile »

 :

705-32-017187-219

 

 

 

DATE :

30 janvier 2024

 

______________________________________________________________________

 

SOUS LA PRÉSIDENCE DE

L’HONORABLE

PATRICK CHOQUETTE J.C.Q.

______________________________________________________________________

 

PLOMBERIE D.L. INC.

Demanderesse/défenderesse reconventionnelle

c.

ZBIGNIEW TOPOREK

Défendeur/demandeur reconventionnel

 

______________________________________________________________________

 

JUGEMENT

______________________________________________________________________

 

[1]                 Plomberie D.L. inc. (Plomberie) réclame à Zbigniew Toporek 6 870,75 $, soit le solde contractuel pour le forage d’un puits artésien desservant la résidence de ce dernier.

[2]                 Zbigniew Toporek conteste la demande aux motifs que la facture n’est pas conforme à l’entente voulant que le puisatier creuse à une profondeur maximale de 100 pieds alors qu’il a continué le forage jusqu’à 300 pieds de profondeur.

[3]                 Il ajoute que ce forage est inutile, son ancien puits situé à 30 pieds à proximité est alimenté par une veine d’eau à moins de 100 pieds de profondeur.

[4]                 M. Toporek se porte demandeur reconventionnel en demandant l’annulation du contrat de forage et la restitution de l’acompte de 3 500 $. Il réclame également 3 462,48 $ pour le coût des équipements desservant le nouveau puits alors qu’il avait projeté d’utiliser ceux desservant son ancien puits.

[5]                 M. Toporek réclame 2 000 $ à titre de dommages punitifs en raison de la mauvaise foi et l’exploitation par Plomberie.

LES QUESTIONS EN LITIGE

[6]                 Plomberie a-t-elle droit au solde contractuel réclamé ?

[7]                 Plomberie a-t-elle exploité M. Toporek en forant inutilement à 300 pieds pour en réclamer le coût ?

[8]                 M. Toporek peut-il obtenir l’annulation du contrat ?

[9]                 M. Toporek peut-il obtenir de Plomberie le remboursement des équipements desservant le puits ?

[10]           M. Toporek peut-il obtenir des dommages punitifs en vertu de la Loi sur la protection du consommateur ?

EN LIMINAIRE

[11]           M. Toporek déclare qu’il a de la difficulté à s’exprimer en français ou en anglais, étant d’origine polonaise. Le Tribunal lui permet d’être assisté par son ami Tomasz Pazdersi. Normand Larocque n’a aucune objection, puisque M. Paderski accompagnait M. Toporek lors de discussions qu’ils ont eues à l’établissement de Plomberie afin d’estimer le coût des travaux envisagés.

[12]           Durant l’instruction, le Tribunal constate que M. Toporek est en mesure de comprendre les interventions et qu’il peut s’exprimer dans un français élémentaire, mais intelligible. Nous y reviendrons.

LE CONTEXTE

[13]           M. Toporek réside à Saint-Michel-des-Saints. Sa résidence est desservie par un puits artésien d’une profondeur de 100 pieds qui a été contaminé vers 2015 à l’occasion de travaux entrepris par la municipalité. L’eau du puits n’est plus potable bien qu’elle puisse être utilisée pour les autres besoins.

[14]           Il obtient à cette époque une estimation par Plomberie[1] pour trois nouveaux puits artésiens, deux voisins participant à la démarche. Le forage envisagé est de 100 pieds à 14 $ du pied.

[15]           En 2020 et 2021, M. Toporek retourne à l’établissement de Plomberie pour discuter le forage d’un nouveau puits artésien. Il est accompagné de M. Paderski à au moins une ou deux occasions. Selon M. Toporek, il est toujours question d’un forage de 100 pieds au maximum puisque le nouveau puits artésien serait à 30 pieds de l’actuel, desservi par une veine d’eau à moins de 100 pieds de profondeur.

[16]           Selon Normand Larocque, dirigeant de Plomberie, la profondeur prévisible du forage serait de 300 pieds, selon les informations qu’il puise du registre gouvernemental Système d’information hydrogéologique (SIH) documentant les forages environnants.

[17]           Il aurait remis une estimation pour le coût d’un forage à une profondeur de 300 pieds[2], ce que nie M. Toporek.  

[18]           Le 25 mai 2021, Normand Larocque, son fils Alex Larocque et un autre employé se présentent chez M. Toporek au petit matin pour procéder au forage. Normand Larocque présente un contrat à M. Toporek. Les prix unitaires sont inscrits tout comme la mention du forage jusqu’à concurrence d’une profondeur de 100 pieds pour la somme de 2 300 $ et un taux de 23 $ le pied additionnel[3]. M. Toporek signe le contrat avant que les travaux ne débutent.

[19]           Normand Larocque explique que le forage s’effectue normalement. Arrivé à la profondeur de 100 pieds le forage est interrompu. Il ne constate pas la présence d’eau. Après une pause de 30 minutes, il sollicite l’accord de M. Toporek avant de continuer. M. Toporek lui aurait répondu que « son puits est contaminé et que ça lui prend de l’eau ». Alex Larocque témoigne au même effet.

[20]           M. Toporek nie que son accord ait été sollicité, encore moins donné. Il nie également qu’il y eut une pause de 30 minutes et un essai de pompage. Il manifeste lors de l’audience. Il est choqué, s’exclame-t-il en français. Verbalement et en gestes; il est choqué qu’une personne ayant prêté serment puisse rapporter de telles choses. Nous y reviendrons.

[21]           Le forage reprend jusqu’à 200 pieds. Même scénario selon Normand Laroque et son fils. Une pause de 30 minutes et reprise du forage après avoir obtenu l’accord de M. Toporek. Même négation de sa part.

[22]           Vers 285 pieds Normand Larocque témoigne frapper de la roche friable et une veine d’eau. Le forage se termine vers 14 heures[4] à une profondeur de 300 pieds.

[23]           Selon Normand Larocque, M. Toporek est satisfait. Il installera lui-même ses équipements de pompage et le raccordement à la résidence.

[24]           M. Toporek témoigne que Normand Larocque lui donne une facture préimprimée avec mention d’un forage à 300 pieds. M. Toporek la refuse, mais lui remet 3 500 $ en espèces, en paiement partiel des travaux.

[25]           Le 9 juin 2021, M. Toporek écrit à Normand Larocque, en réaction à ce qu’il relate être un message texte par lequel ce dernier lui demande 5 200 $ comptant en balance de paiement du contrat[5].

[26]           M. Toporek soutient qu’il s’en tient au contrat qui stipule une profondeur maximale de 100 pieds et qu’après avoir mesuré, de l’eau est présente à une profondeur de 27 pieds. Il mentionne qu’il n’y a jamais eu de pause et d’essai de pompage, mais que Plomberie a décidé de forer jusqu’à 300 pieds de sa propre initiative et sans son accord.

[27]           Il relate également le préjudice causé par une profondeur de 300 pieds alors qu’il doit acheter plus de tuyau et de fil électrique en plus d’une pompe plus puissante pour alimenter la résidence.

[28]           En reprenant le calcul au contrat selon un forage de 100 pieds, il conclut que la valeur totale est de 5 254,36 $ taxes incluses et il offre la somme de 1 754,36 $ en paiement final.

[29]           Plomberie dépose une facture datée du 15 juin 2021[6] pour un total de 10 370,75 $ moins le paiement de 3 500 $ pour un solde de 6 870,75 $ qu’elle réclame en plus des intérêts au taux annuel de 24 %.

[30]           M. Toporek signale que Plomberie n’a jamais remis le rapport de forage et qu’il n’a pas été déposé auprès de la municipalité. Plomberie n’est pas en mesure de produire le rapport de forage ni le permis de captage.

ANALYSE

[31]           Le contrat intervenu entre Plomberie et M. Toporek est un contrat d’entreprise au sens des articles 2098 et suivants du Code civil du Québec (C.c.Q.). Il s’agit aussi d’un contrat de consommation visé par la Loi sur la protection du consommateur[7](LPC.) :

2098.  Le contrat d'entreprise ou de service est celui par lequel une personne, selon le cas l'entrepreneur ou le prestataire de services, s'engage envers une autre personne, le client, à réaliser un ouvrage matériel ou intellectuel ou à fournir un service moyennant un prix que le client s'oblige à lui payer.

[32]           L'article 2100 du C.c.Q. énonce les obligations de l'entrepreneur qui doit agir selon les règles de l'art avec prudence, diligence et dans le meilleur intérêt de son client:

2100.  L'entrepreneur et le prestataire de services sont tenus d'agir au mieux des intérêts de leur client, avec prudence et diligence. Ils sont aussi tenus, suivant la nature de l'ouvrage à réaliser ou du service à fournir, d'agir conformément aux usages et règles de leur art, et de s'assurer, le cas échéant, que l'ouvrage réalisé ou le service fourni est conforme au contrat. Lorsqu'ils sont tenus au résultat, ils ne peuvent se dégager de leur responsabilité qu'en prouvant la force majeure.

[29]  À ce sujet, Vincent Karim dans son ouvrage KARIM Vincent, « Les contrats d'entreprise, de prestation de services et l'hypothèque légale », explique que le débiteur d’une obligation de résultat est tenu non seulement d’accomplir un fait, mais aussi de fournir un résultat précis. L’absence de ce résultat fait présumer la faute de l’entrepreneur ou du prestataire de services[8].

[33]           L’entrepreneur est le seul responsable des méthodes et de la séquence des travaux qu’il choisit dans l’exécution du contrat[9].

[34]           L’entrepreneur est également tenu à une obligation de renseignement. L’article 2102 du C.c.Q. énonce ce qui suit :

2102.  L'entrepreneur ou le prestataire de services est tenu, avant la conclusion du contrat, de fournir au client, dans la mesure où les circonstances le permettent, toute information utile relativement à la nature de la tâche qu'il s'engage à effectuer ainsi qu'aux biens et au temps nécessaire à cette fin.

[35]           Par ailleurs, le contrat a été précédé d’une estimation en 2015 et d’estimations verbales par la suite. Le contrat P-2 doit également être qualifié de contrat d’entreprise par estimation. Les deux dispositions suivantes du contrat sont éloquentes :
 

  1. DESCRIPTION DES TRAVAUX

L’entrepreneur s’engage à exécuter les travaux décrits aux présentes sur l’immeuble du client. L’entrepreneur exécutera les travaux de forage d’un puits de la profondeur maximale prévue ci-dessous et effectuera un essai de pompage de 30 minutes, afin d’évaluer le débit du puits. L’entrepreneur exécutera les travaux de forage du puits concerné en endroits spécifiquement indiqués sur le permis de captage émis par la municipalité, permis que le client s’engage à se procurer avant le début des travaux.

(…)

3.1 FORAGE DU PUITS ARTÉSIEN

L’entrepreneur s’oblige envers le client à forer un puits artésien jusqu’à concurrence d’une profondeur de 100 pieds, excluant les matériaux de forage pour la somme de 2300 $

(…)

(Soulignements ajoutés par le Tribunal)

[36]            

  1. Plomberie a-t-elle droit au solde contractuel réclamé ?

[37]           Précisons d’emblée que le Tribunal ne retient pas en preuve ce que Plomberie présente comme une estimation pour des travaux de forage à 300 pieds de profondeur[10]. Elle apparaît en réponse à la demande reconventionnelle et n’appuie pas le contrat signé par les parties. Il est illogique de signer un contrat faisant état d’un forage d’une profondeur maximale de 100 pieds si les parties envisageaient de se rendre à 300 pieds.

[38]           Par ailleurs, ce document est inopposable à M. Toporek et ne contient aucune information qui permet de l’y relier. Aucun nom, adresse ou numéro de téléphone.

[39]           S’agissant d’un contrat d’entreprise par estimation, l’article 2107 du C.c.Q. encadre la relation des parties :

2107. Si, lors de la conclusion du contrat, le prix des travaux ou des services a fait l’objet d’une estimation, l’entrepreneur ou le prestataire de services doit justifier toute augmentation du prix. Le client n’est tenu de payer cette augmentation que dans la mesure où elle résulte de travaux, de services ou de dépenses qui n’étaient pas prévisibles par l’entrepreneur ou le prestataire de services au moment de la conclusion du contrat.

[40]           Il appartient à l’entrepreneur Plomberie de satisfaire le Tribunal que les travaux exorbitants du seuil de 100 pieds de profondeur n’étaient pas prévisibles. Cette preuve n’a pas été faite d’autant que plusieurs éléments étaient pourtant disponibles.

[41]           Martin Larocque énonce que le SIH indique que les forages environnants sont à 300 pieds. Aucun extrait de ce registre public n’est produit pour appuyer son affirmation.

[42]           Le permis de captage de la municipalité, pourtant une condition essentielle au contrat n’est pas produite, pas plus que le rapport de forage qu’il se devait de remettre à M. Toporek et à la municipalité et qui sert notamment à alimenter les données du SIH.

[43]           Plomberie n’a documenté aucun des soi-disant essais de pompages. M. Toporek affirme qu’il n’y en a pas eu. Une procédure requérant la signature des résultats de tests de pompage surtout si le client est présent n’a pourtant rien d’une démarche exorbitante.

[44]           Martin Larocque et son fils témoignent que M. Toporek exprimait son accord au forage additionnel par tranche de 100 pieds. M. Toporek a nié avec véhémence lorsqu’il a compris la nature des affirmations faites par les représentants de Plomberie.

[45]           S’il faut se méfier des expressions et du langage non verbal, il est des occasions où comme en l’espèce, de telles manifestations sont criantes de sincérité. Le Tribunal préfère sa version à celles des Messieurs Laroque, père et fils. Plomberie ne rencontre pas son fardeau de prouver que M. Toporek a consenti aux forages additionnels.

[46]           Le Tribunal juge probante la preuve que l’ancien puits de M. Toporek 30 pieds plus loin donne de l’eau à 100 pieds de profondeur. Il a toujours été question de 100 pieds depuis l’estimation initiale en 2015 jusqu’au contrat P-2 et M. Toporek a fait les achats d’équipement en conséquence.

[47]           Le Tribunal préfère également la version de M. Toporek de la présence d’eau à moins de 100 pieds dans le nouveau puits.

[48]           Plomberie, qui a la charge de la preuve, ne satisfait pas son fardeau de démontrer l’imprévisibilité d’un forage à une profondeur excédant 100 pieds. Le contrat prévoit un forage à cette profondeur maximale. Le contrat émane de Plomberie et Normand Larocque complète les mentions manuscrites. Si le forage envisagé était de 300 pieds, c’est ce qu’il aurait dû écrire.

[49]           La valeur des travaux selon un forage maximal de 100 pieds est de 5 254,36 $ taxes incluses tel qu’énoncé par M. Toporek[11]. Il reste donc une balance due de 1 754,36 $.

  1. Plomberie a-t-elle exploité M. Toporek en forant inutilement à 300 pieds pour en réclamer le coût ?

[50]           Le fardeau de prouver la mauvaise foi de Plomberie appartient à M. Toporek cette fois. Or, rappelons-le, la bonne foi se présume toujours[12].

[51]           Il contextualise que Plomberie cherche à tirer avantage de sa méconnaissance de la langue française et que ses voisins ont eu droit au même traitement. Les voisins n’ont pas été entendus et la règle de l’interdiction du ouï-dire ne permet pas au Tribunal de donner quelque valeur probante à cette affirmation.

[52]           Par ailleurs, M. Toporek n’est pas une personne vulnérable. Il sait se faire comprendre à l’écrit et verbalement.

[53]           Les lacunes évidentes dans la preuve présentée par Plomberie ne sont pas de l’apanage exclusif des justiciables mal intentionnés, surtout devant la Division des petites créances alors que les parties sont souvent peu ou mal préparées et non versées dans les règles de preuve.

[54]           Affirmer une chose n’est pas suffisant. M. Toporek doit aussi présenter une preuve admissible et prépondérante que Plomberie a agi par malice, dol ou subterfuge pour obtenir un gain auquel il n’aurait pas droit autrement.

[55]           Les éléments qui fondent sa théorie de la cause ne sont pas prouvés. Ce n’est pas parce que le Tribunal préfère une version que l’autre est une supercherie. Dans ce cas, le Tribunal applique le contrat signé par les parties et n’accepte pas la majoration réclamée en fonction des règles de preuve et de droit en lien avec les contrats d’entreprises par estimation.

  1. M. Toporek peut-il obtenir l’annulation du contrat ?

[56]           Pour cette même raison, M. Toporek n’a pas droit à l’annulation du contrat. La restitution des prestations est impossible et la mauvaise foi de Plomberie n’est pas établie.

[57]           Le Tribunal n’a pas le bénéfice d’une preuve complète quant à la profondeur réelle du puits, mais M. Toporek a de l’eau en quantité et en qualité, résultat des travaux de Plomberie et en fonction des paramètres monétaires fixés au contrat P-2.

[58]           Le contrat, lorsqu’appliqué comme il se doit n’a rien de lésionnaire.

D. M. Toporek peut-il obtenir de Plomberie le remboursement des équipements desservant le puits ?

[59]           M. Toporek réclame 3 462,48 $ pour le coût des tuyaux et filages additionnels ainsi que d’une pompe submersible plus puissante[13]. Il avait prévu réutiliser les composantes équipant l’autre puits.

[60]           Comme il l’énonce au paragraphe 3 de sa réponse et demande reconventionnelle, cet autre puits artésien de 100 pieds de profondeur « fonctionne depuis plus de 20 ans ».

[61]           Le filage et les tuyaux de cet autre puits sont-ils originaux ? Pouvaient-ils être réutilisés ? À quels coûts ? Cette preuve n’a pas été faite.

[62]           Quant à la pompe, Normand Larocque témoigne avoir vu celle qui dessert cet autre puits artésien est une ½ HP suffisante pour 250 pieds de profondeur.

[63]           Il n’y a pas de preuve qu’une autre pompe est nécessaire. Pas plus que de la nécessité de l’installer en profondeur alors que M. Toporek explique la présence d’eau à 27 pieds de profondeur. Le Tribunal n’est pas un expert puisatier et cette preuve aurait être administrée.

[64]           Le principe de l’indemnisation veut également éviter l’enrichissement aux dépens du débiteur de l’obligation. Par sa demande reconventionnelle, M. Toporek veut les équipements neufs qu’il n’a pas inclus à son contrat avec Plomberie.

[65]           Voilà si tant s’en faut, une illustration qu’une réclamation que M. Toporek présente appuyée de la présomption de bonne foi, s’avère mal fondée parce qu’il n’a pas satisfait son fardeau de preuve.

  1. M. Toporek peut-il obtenir des dommages punitifs en vertu de la Loi sur la protection du consommateur ?

[66]           M. Toporek réclame une compensation de 2 000 $ à titre de dommages punitifs selon la LPC.

[67]           Il invoque plusieurs violations de la LPC. Le Tribunal conclut que le comportement de Plomberie contrevient à l’article 12 :

12. Aucuns frais ne peuvent être réclamés d’un consommateur, à moins que le contrat n’en mentionne de façon précise le montant.

[68]           Comme dit la mention au contrat que « l’entrepreneur exécutera les travaux de forage d’un puits de la profondeur maximale prévue ci-dessous » ne l’autorisait pas à dépasser 100 pieds sans le consentement du consommateur, ce qu’il n’a pas obtenu.

[69]           L’article 272 de la LPC donne la possibilité pour le consommateur de demander des dommages-intérêts punitifs si le commerçant manque à une obligation que lui impose cette loi.

[70]           Les dommages-intérêts punitifs ou exemplaires prévus à l’article 272 de la LPC, doivent être analysés selon les enseignements de la Cour Suprême toujours dans l’arrêt Richard c. Time inc.[14] :

[178] Cependant, le simple fait d’une violation d’une disposition de la L.p.c. ne suffirait pas à justifier une condamnation à des dommages-intérêts punitifs. Par exemple, on devrait prendre en compte l’attitude du commerçant qui, constatant une erreur, aurait tenté avec diligence de régler les problèmes causés au consommateur. Ni la L.p.c., ni l’art. 1621 C.c.Q. n’exigent une attitude rigoriste et aveugle devant les efforts d’un commerçant ou d’un fabricant pour corriger le problème survenu. Ainsi, le tribunal appelé à décider s’il y a lieu d’octroyer des dommages-intérêts punitifs devrait apprécier non seulement le comportement du commerçant avant la violation, mais également le changement (s’il en est) de son attitude envers le consommateur, et les consommateurs en général, après cette violation. Seule cette analyse globale du comportement du commerçant permettra au tribunal de déterminer si les impératifs de prévention justifient une condamnation à des dommages-intérêts punitifs dans une affaire donnée.

[71]           La conduite du commerçant n’est pas celle attendue. Par négligence ou désinvolture, sa prestation que le consommateur n’a aucun moyen de contrôler in situ n’est pas documentée alors qu’elle aurait dû l’être puisqu’il veut être payé au prix unitaire.

[72]           Le Tribunal est préoccupé de l’absence de rapport de test de pompage écrit et de rapport de forage alors que Normand Laroque énonce lui-même que ce registre fiable (SIH) permet de donner une estimation de la profondeur des forages réalisés à proximité.

[73]           Le dépôt en DR-1 d’une soi-disant estimation à 300 pieds de profondeur en réponse à la demande reconventionnelle ne révèle pas un changement d’attitude en faveur du consommateur; au contraire.

[74]           Le Tribunal, par l’imposition de dommages punitifs de 700 $, veut à la fois sanctionner ce manquement de Plomberie à la LPC et dissuader de tels manquements de la part de commerçants dans ce domaine.

[75]           Enfin, sur la question des intérêts, M. Toporek a offert la somme de 1 754,36 $ dans sa lettre du 9 juin 2021. Cette offre aurait été bonne, suffisante et libératoire si elle avait été acceptée par Plomberie. Pour cette raison, la course de l’intérêt contractuel de 24 % débutera à compter de la date de l’avis de jugement.

[76]           POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[77]           ACCUEILLE en partie la demande;

[78]           DÉCLARE que Zbigniew Toporek doit 1 754,36à Plomberie D.L. inc.;

[79]           ACCUEILLE en partie la demande reconventionnelle;

[80]           DÉCLARE que Plomberie D.L. inc. doit 700 $ à Zbigniew Toporek;

[81]           ET OPÉRANT COMPENSATION ENTRE LES SOMMES DUES, LE TRIBUNAL :

[82]           CONDAMNE Zbigniew Toporek à payer à Plomberie D.L. inc. 1 054,36 $ avec intérêt au taux de 24 % l’an à compter de l’avis de jugement et les frais de justice limités à 211 $ représentant le droit de greffe quant au dépôt de la demande.

 

 

 

 

__________________________________

PATRICK CHOQUETTE, J.C.Q.

 

 

Date d’audience :

5 janvier 2024

 


[1] D-4.

[2] DR-1

[3] P-2.

[4] 15 heures selon son fils.

[5] D-8.

[6] P-3

[7] RLRQ c. P-40.1.

[8] Montréal, Wilson & Lafleur, 2004, pages 54-55.

[9] Développement Tanaka inc. c. Corporation d’hébergement du Québec, 2009 QCCS 3659, par. 463 (appel rejeté : 2011 QCCA 730).

[10] DR-1.

[11] D-8

[12] Article 2805 du C.c.Q.

[13] D-10

[14] Richard c. Time Inc., 2012 CSC 8, [2012] 1 R.C.S. 265

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