Dam c. Ho |
2019 QCCS 4653 |
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COUR SUPÉRIEURE |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DISTRICT DE |
MONTRÉAL |
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N° : |
500-17-110182-196 |
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DATE : |
Le 5 novembre 2019 |
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE |
L’HONORABLE |
MARC ST-PIERRE, J.C.S. |
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TRAM-ANH DAM et ACUPUNCTURE YI KING |
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Demanderesses |
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c. |
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CAROLINE QUY CHAU HO et KEVIN SIDHU et SEPHER FARAHMAND |
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Défendeurs |
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et |
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GOOGLE CANADA CORPORATION |
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et |
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GOOGLE LLC |
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Mises en cause |
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JUGEMENT |
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[1] CONSIDÉRANT que les demanderesses ont présenté en preuve une démonstration convaincante voulant que la défenderesse HO ait orchestré une campagne de désinformation sur la page Google des demanderesses en y inscrivant des évaluations négatives quant à la pratique professionnelle de la demanderesse DAM (une acupuncteure) par des personnes qui n'ont pas été traitées par cette dernière;
[2] CONSIDÉRANT que les défendeurs SIDHU et FARAHMAND, des personnes qui sont en relation soit avec la défenderesse HO ou avec son conjoint ou mari, ont participé à cette campagne de désinformation;
[3] CONSIDÉRANT que le droit des demanderesses à leur réputation reconnu par l'article 4 de la Charte des droits et libertés de la personne doit prévaloir ici sur la liberté d'expression aussi reconnue par la Charte des droits et libertés de la personne des défendeurs, à l'article 3, parce que la liberté d'expression n'a pas pour effet de protéger les auteurs de propos délibérément faux et préjudiciels;
[4] CONSIDÉRANT en ce qui concerne les mises en cause[1] que la première n'est pas la gestionnaire ou l'opératrice de Google en sorte que seule la deuxième pourrait être condamnée;
[5] CONSIDÉRANT que Google LLC plaide essentiellement qu'elle n'a pas à prendre parti, laissant plutôt le soin aux tribunaux de rendre un jugement pour s'ajuster s'il y a lieu en conséquence par la suite, la mise en cause Google LLC n'étant pas toutefois en mesure de prendre d'engagements à cet égard en l'instance[2];
[6] CONSIDÉRANT qu'en tout état de cause le tribunal est d'avis que Google LLC a le devoir de réagir et de corriger la situation lorsque, comme en l'espèce, des preuves sérieuses de manipulation malhonnête du site d'un membre lui occasionnant des préjudices sérieux lui sont présentées;
[7] CONSIDÉRANT qu'à défaut d'ordonnance s'adressant à Google LLC des commentaires de personnes inconnues qui n'existent peut-être pas, comme M. Benjamin Freshwater et Mme Geneviève Deschênes, pourront continuer à placer des avis préjudiciels sur la page Google des demanderesses sans que Google LLC soit obligée d'intervenir, le tout étant de nature à rendre le jugement inefficace;
[8] CONSIDÉRANT donc sur le tout que les demanderesses ont fait la démonstration d'une apparence de droit sérieuse quant aux trois (3) défendeurs et quant à la mise en cause Google LLC;
[9] CONSIDÉRANT en ce qui concerne le préjudice irréparable que là aussi les demanderesses ont fait une démonstration convaincante en ce que les interventions des défendeurs et d'autres personnes inconnues ont déjà modifié leur profil, jusqu'alors positif, sur leur page Google, alors que selon les allégations dans la demande d'injonction appuyées par une Déclaration sous serment de la demanderesse DAM une partie importante des futurs clients prennent en compte ces indications sur Internet;
[10] CONSIDÉRANT que le préjudice en résultant ne peut pas être évalué puisqu'il est impossible de déterminer qui, parmi d'éventuels clients, a décidé de faire affaires avec quelqu'un d'autre à cause de ce qu'il aurait vu sur la page Google des demanderesses ainsi trafiqué;
[11] CONSIDÉRANT sur la balance des inconvénients que les défendeurs n'en subissent aucun, la défenderesse HO n'ayant d'ailleurs pas publié elle-même d'avis sur le site Google des demanderesses et les défendeurs SIDHU et FARAHMAND se seraient engagés à retirer leur avis ou l'auraient déjà fait, le tribunal étant d'avis que l'ordonnance doit malgré tout émaner, pour éviter des récidives;
[12] CONSIDÉRANT en ce qui concerne Google LLC qu'elle n’a soulevé aucun argument quant à un inconvénient quelconque si l’ordonnance sollicitée à son endroit émanait;
[13] CONSIDÉRANT finalement l'urgence pour éviter la détérioration de la pratique des demanderesses entre le jour du jugement et une éventuelle audience sur la demande interlocutoire qui, selon des vérifications des procureurs de la demanderesse, ne pourrait se tenir qu'en février 2020.
[14] ORDONNE aux défendeurs ou à toute personne ayant connaissance de la présente ordonnance de s'abstenir de diffuser, publier, reproduire ou faire circuler des propos diffamatoires relativement à la qualité des services professionnels des demanderesses, en tout ou en partie, sur le moteur de recherche Google ou toute autre plateforme de communication sur Internet;
[15] ORDONNE à la mise en cause Google LLC de retirer du site Google ou de toute autre plateforme sous son contrôle les avis publiés par Benjamin Freshwater, Geneviève Deschênes, Kevin Sidhu et Sepher Farahmand sur la page Google de la demanderesse Acupuncture Yi King relativement à la qualité des services professionnels de la demanderesse Tram-Anh Dam;
[16] DISPENSE les demanderesses de fournir caution;
[17] AUTORISE les demanderesses à signifier le présent jugement par courriel et en dehors des heures légales si nécessaire;
[18] À VALOIR pour dix (10) jours (jusqu'au 14 novembre 2019 à 23h59);
[19] FRAIS de justice à suivre.
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__________________________________,MARC ST-PIERRE, j.c.s. |
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Me Messica Bari |
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Donati Maisonneuve s.e.n.c.r.l. |
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Pour les demanderesses |
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La défenderesse Caroline Quy Chau Ho se représente seule |
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Me Faiz Lalani |
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Davies Ward Phillips & Vineberg s.e.n.c.r.l, s.r.l |
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Pour les mises en cause |
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Date d’audience : |
4 novembre 2019 |
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[1] Le tribunal a fait remarquer à l'audience que Google Canada Corporation et Google LLC auraient dû être désignées comme défenderesses plutôt que comme mises en cause puisque des conclusions sont prises dans la procédure des demanderesses contre elles; cependant, le procureur qui les représentait à l'audience a convenu de ne pas soulever ce vice de forme en tant que moyen de défense.
[2] Le tribunal a posé la question au procureur de Google LLC à l'audience qui a répondu qu'il n'avait pas de mandat.
AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans appel; la consultation du plumitif s'avère une précaution utile.