Décision

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Barassin c. Duclos Mercier Chrysler Jeep Dodge Ram Fiat

2023 QCCQ 10923

COUR DU QUÉBEC

« Division des petites créances »

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

BEAUHARNOIS

LOCALITÉ DE

SALABERRY-DE-VALLEYFIELD

« Chambre civile »

 :

760-32-702206-212

 

 

 

DATE :

Le 23 novembre 2023

______________________________________________________________________

 

SOUS LA PRÉSIDENCE DE

L’HONORABLE

CLAUDE MONTPETIT, J.C.Q.

______________________________________________________________________

 

 

ELISABETH BARASSIN

 

Demanderesse

 

c.

 

DUCLOS MERCIER CHRYSLER JEEP DODGE RAM FIAT

 

Défenderesse

______________________________________________________________________

 

JUGEMENT

______________________________________________________________________

 

[1]                Suite à l’achat d’un véhicule usagé de la défenderesse en août 2019 (Ford Escape Titanium 2015), la demanderesse réclame une réduction du prix de vente de 9 873,35$ en raison de la découverte en juin 2021 qu’il s’agissait d’un véhicule accidenté.

[2]                La défenderesse, représentée par son directeur général, Mourad Meghar, admet l’erreur commise par son vendeur de l’époque qui a omis de divulguer les informations contenues au rapport Carfax qui était au dossier, soit les dommages subis par le véhicule accidenté en juin 2016.

[3]                Séance tenante, la défenderesse offre une compensation monétaire de 500$ pour pallier aux ennuis et inconvénients causés par la faute de son vendeur lors de la vente du véhicule à la demanderesse en août 2019.

[4]                Pour le reste de la réclamation, la défenderesse soulève que le véhicule a toujours bien fonctionné et que la demanderesse n’a subi aucune perte lors de la revente du véhicule à l’été 2021.

QUESTIONS EN LITIGE

[5]                La défenderesse a-t-elle contrevenu à une disposition de la Loi sur la protection du consommateur (RLRQ, c. P-40.1) lors de la vente du 14 août 2019 en omettant de déclarer que le véhicule avait été accidenté?

[6]                La demanderesse a-t-elle prouvé avoir subi une perte financière en raison de cette omission?

[7]                La demanderesse a-t-elle droit à des dommages punitifs?

LE CONTEXTE

[8]                À l’été 2019, la demanderesse est à la recherche d’un véhicule de type VUS pour elle-même et sa famille afin de se sentir mieux protégée en cas d’accident de la route.

[9]                Sur internet, elle voit l’annonce de la défenderesse concernant plusieurs véhicules usagés dont un Ford Escape Titanium de l’année 2015 dont le kilométrage et le prix demandé lui paraissent intéressants.

[10]           Après un test routier effectué avec le vendeur Mathieu Turber, elle décide de faire l’achat du véhicule pour le prix demandé, soit 16 994$ et fait également l’achat d’une garantie prolongée de trois ans au prix de 3 300$ pour un total de 24 067,72$ taxes et préparation incluses (pièces P-1F) et P-1G).

[11]           Elle prend livraison du véhicule le 9 août 2019 et utilise celui-ci sans aucun problème autre que l’entretien normal jusqu’au mois de juin 2021.

[12]           En juin 2021, elle est à la recherche d’un plus grand véhicule suite à l’arrivée prochaine d’un troisième enfant qui nécessitera plus d’espace pour les sièges de sécurité adaptés.

[13]           Lors d’une visite chez un concessionnaire Chrysler de la Rive-Sud, elle s’intéresse à un véhicule de type Chrysler Grand Caravan et offre de donner son Ford Escape Titanium en échange.

[14]           Madame Barassin est alors informée pour la toute première fois que son véhicule a été accidenté en 2016 lors d’une collision à l’arrière et a subi des dommages de 3 327$, ce qu’elle ignorait totalement, aucune mention de cet accident n’ayant été faite lors de son achat chez la défenderesse en juin 2019.

[15]           Surprise et choquée par cette découverte, elle contacte la défenderesse et discute avec le directeur général, Mourad Meghar.

[16]           Celui-ci propose deux solutions à la demanderesse par courriel daté du 23 avril 2021 (pièce P-4) :

« Nous comprenons toutefois votre désappointement et c’est pourquoi nous sommes prêts à vous donner 2 choix soit :

  1. L’opportunité d’acheter le Grand Caravan que nous vous avions proposé pour un paiement de 113.91$ / semaines incluant vos pneu et rim d’hiver

-Grand Caravan Premium Plus 33 295$

-Ford Escape 15000 tx inc

Ou

  1. verser un montant de 500 $ à titre de dédommagement et afin de conserver une bonne relation avec nos clients.
  2. Si vous êtes d’accord, nous verrons à faire préparer le véhicule ou le chèque ainsi qu’un document à signer. »

[Reproduction intégrale]

[17]           Ayant perdu confiance en la défenderesse, madame Barassin refuse cette offre et réussi à obtenir de l’autre concessionnaire Chrysler un montant de 16 816$ pour son Ford Escape Titanium 2015 accidenté qu’elle donne en échange.

[18]           La défenderesse, par son directeur général Meghar, soumet que la demanderesse ayant payé 16 994$ pour son véhicule Ford Escape en août 2019 ne subit pas de perte significative en raison de l’accident non déclaré, l’ayant revendu 16 816$ en juin 2021, soit un an et dix mois plus tard.

[19]           Madame Barassin insiste qu’elle a été victime d’une manœuvre disgracieuse et illégale de son vendeur qui a volontairement omis de lui déclarer la véritable condition de son véhicule afin de s’assurer de conclure la vente.

LE DROIT

[20]           Les articles suivants de la Loi sur la protection du consommateur (RLRQ, c. 40.1) sont pertinents à l’analyse du présent litige :

« 40. Un bien ou un service fourni doit être conforme à la description qui en est faite dans le contrat.

41. Un bien ou un service fourni doit être conforme à une déclaration ou à un message publicitaire faits à son sujet par le commerçant ou le fabricant. Une déclaration ou un message publicitaire lie ce commerçant ou ce fabricant.

42. Une déclaration écrite ou verbale faite par le représentant d’un commerçant ou d’un fabricant à propos d’un bien ou d’un service lie ce commerçant ou ce fabricant.

228. Aucun commerçant, fabricant ou publicitaire ne peut, dans une représentation qu’il fait à un consommateur, passer sous silence un fait important.

272. Si le commerçant ou le fabricant manque à une obligation que lui impose la présente loi, un règlement ou un engagement volontaire souscrit en vertu de l’article 314 ou dont l’application a été étendue par un décret pris en vertu de l’article 315.1, le consommateur, sous réserve des autres recours prévus par la présente loi, peut demander, selon le cas:

a)  l’exécution de l’obligation;

b)  l’autorisation de la faire exécuter aux frais du commerçant ou du fabricant;

c)  la réduction de son obligation;

d)  la résiliation du contrat;

e)  la résolution du contrat; ou

f)  la nullité du contrat,

sans préjudice de sa demande en dommages-intérêts dans tous les cas. Il peut également demander des dommages-intérêts punitifs. »

ANALYSE

[21]           Selon le témoignage du directeur général Mourad Meghar, tous les véhicules usagés en vente depuis qu’il est en poste chez Duclos en 2016, font l’objet dune recherche sur le site Carfax dont le rapport est imprimé et versé au dossier de chaque véhicule.

[22]           Il faut donc conclure que le vendeur Mathieu Turber avait connaissance de ce rapport qui était au dossier lors de la vente du Ford Escape Titanium 2015 à la demanderesse en août 2019.

[23]           Le Tribunal retient la seule version disponible concernant les circonstances de la vente, soit celle de madame Barassin quen aucun temps ledit vendeur a mentionné l’existence de cet accident et des dommages de 3 327$ survenus en 2016 (pièce D-1B, rapport Carfax).

[24]           Monsieur Meghar admet qu’il s’agit d’une situation inacceptable, mais ajoute du même souffle que madame Barassin n’en a subi aucune perte puisque :

a)     Le véhicule a toujours bien fonctionné, tel qu’admis par la cliente;

b)     Celle-ci a obtenu une valeur d’échange presque identique au prix qu’elle a payé 22 mois plus tard (16 816$ versus 16 994$, soit une différence de 178$).

[25]           Bien que n’ayant pas fait la preuve d’une perte financière reliée au silence du vendeur quant à un fait important, la demanderesse a prouvé avoir subi des ennuis et inconvénients lors de la revente du véhicule en août 2021.

[26]           L’offre de la défenderesse d’une somme de 500$ pour pallier à ces inconvénients apparaît raisonnable au Tribunal qui en donne acte à la défenderesse Duclos.

LES DOMMAGES PUNITIFS

[27]           Madame Barassin mentionne qu’avoir été informée en 2019 de la véritable condition du véhicule Ford Escape Titanium par son vendeur, elle n’aurait pas fait cet achat.

[28]           Le Tribunal retient sa version crédible que le vendeur a omis volontairement ce fait très important afin de protéger sa vente et s’assurer de sa conclusion sans problème.

[29]           Il faut souligner le témoignage du directeur général Meghar que le rapport Carfax était au dossier et à la disposition du vendeur Turber.

[30]           Il y a donc eu contravention à l’article 228 de la Loi sur la protection du consommateur.

[31]           Afin de dissuader une telle pratique, tel que souligné et réclamé par la demanderesse, le Tribunal accorde une somme de 750$ à titre de dommages punitifs selon les termes de l’article 272 de la Loi sur la protection du consommateur.

[32]           Il n’y a pas lieu d’accorder le remboursement du plan de garantie additionnel de trois ans ni le remboursement des paiements bimensuels réclamés par la demanderesse, le véhicule ayant toujours bien fonctionné pendant les 22 mois où la demanderesse l’a utilisé.


PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

ACCUEILLE la demande en partie;

DÉCLARE que l’employé (vendeur) de la défenderesse a contrevenu lors de la vente à la demanderesse à l’article 228 de la Loi sur la protection du consommateur en passant sous silence un fait important;

DONNE ACTE de l’offre par la défenderesse à l’audience de verser à la demanderesse une somme de 500$ pour les ennuis et inconvénients;

CONDAMNE la défenderesse Duclos Mercier Chrysler Jeep Dodge Ram Fiat à payer à la demanderesse ladite somme de 500$ à titre de dommages-intérêts pour ennuis et inconvénients avec intérêts au taux légal et l’indemnité additionnelle prévue à l’article 1619 du Code civil du Québec à compter de la mise en demeure du 20 avril 2021;

CONDAMNE la défenderesse Duclos Mercier Chrysler Jeep Dodge Ram Fiat à payer à la demanderesse la somme de 750$ à titre de dommages punitifs sans intérêt;

LE TOUT avec les frais de justice de 211$.

 

 

__________________________________

CLAUDE MONTPETIT, J.C.Q.

 

 

Date d’audience : 13 octobre 2023

 


AVIS AUX PARTIES

 

SECTION III

 

EXTRAIT DU CODE DE PROCÉDURE CIVILE DU QUÉBEC

 

LE DÉPÔT DES ACTES DE PROCÉDURE ET LA PRODUCTION DE DOCUMENTS.

 

108 (2) Tout document ou élément matériel de preuve produit au dossier à titre de pièce doit y demeurer jusqu’à la fin de l’instance, à moins que toutes les parties ne consentent à son retrait. Les parties doivent, une fois l’instance terminée, reprendre possession des pièces qu’elles ont produites; à défaut, le greffier, un an après la date du jugement passé en force de chose jugée ou de l’acte qui met fin à l’instance, peut les détruire. Dans l’un et l’autre cas, le juge en chef du tribunal concerné peut surseoir à la destruction des pièces s’il considère qu’elles peuvent encore être utiles.

 

AVIS :
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