Décision

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Amec Usinage inc. c. Lima

2024 QCCQ 7166

 COUR DU QUÉBEC

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

QUÉBEC

LOCALITÉ DE

QUÉBEC

« Chambre civile »

No :

200-22-089736-219

350-22-000014-210

 

 

DATE :

1er novembre 2024

 

 

SOUS LA PRÉSIDENCE DE L'HONORABLE JUGE CHRISTIAN BRUNELLE, J.C.Q.

 

 

 

200-22-089736-219

 

AMEC USINAGE INC.

Demanderesse-Défenderesse reconventionnelle

c.

CLEVERSON ELISEU RIBEIRO DE LIMA

Défendeur-Demandeur reconventionnel

 

 

350-22-000014-210

 

AMEC USINAGE INC.

Demanderesse- Défenderesse reconventionnelle

c.

IVAN GOULART DE ARAUJO

Défendeur-Demandeur reconventionnel

 

 

 

JUGEMENT DE RECTIFICATION

 

 

  1.                CONSIDÉRANT le jugement prononcé le 18 octobre 2024 dans la présente cause;
  2.                CONSIDÉRANT qu’une erreur s’est glissée, par inadvertance, au paragraphe 247 du jugement;
  3.                CONSIDÉRANT qu’il y a lieu de corriger ce jugement (art. 338 C.p.c.);

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

  1.                CORRIGE le jugement prononcé le 18 octobre 2024;
  2.                RECTIFIE le paragraphe 247 de ce jugement pour qu’il se lise ainsi :

[247]   CONDAMNE Amec usinage inc. à payer à Ivan Goulart de Araujo la somme de 22 652,16 $, avec intérêts calculés au taux légal annuel de 5 %, majoré de l’indemnité additionnelle visée par l’article 1619 du Code civil du Québec, à compter du 12 novembre 2021;

[6] LE TOUT sans frais.

 

 

 

__________________________________

CHRISTIAN BRUNELLE, J.C.Q.

 

 

 

Me Maxime Savard

BCF s.e.n.c.r.l., casier no 12

Pour la demanderesse

 

Me François Lepage

Bernier Beaudry, casier no 127

Pour les défendeurs / demandeurs reconventionnels

 

 

 

 

 


Amec Usinage inc. c. Lima

2024 QCCQ 7166

 COUR DU QUÉBEC

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

QUÉBEC

LOCALITÉ DE

QUÉBEC

« Chambre civile »

No :

200-22-089736-219

350-22-000014-210

 

 

DATE :

18 octobre 2024

 

 

SOUS LA PRÉSIDENCE DE L'HONORABLE JUGE CHRISTIAN BRUNELLE, J.C.Q.

 

 

 

200-22-089736-219

 

AMEC USINAGE INC.

Demanderesse-Défenderesse reconventionnelle

c.

CLEVERSON ELISEU RIBEIRO DE LIMA

Défendeur-Demandeur reconventionnel

 

 

350-22-000014-210

 

AMEC USINAGE INC.

Demanderesse- Défenderesse reconventionnelle

c.

IVAN GOULART DE ARAUJO

Défendeur-Demandeur reconventionnel

 

 

 

JUGEMENT

 

 

  1.                La demanderesse, Amec usinage inc.  AMEC »)[1], exploite une entreprise spécialisée dans la fabrication de pièces de haute précision dans les domaines de l’aéronautique, de l’énergie, de l’optique et de la santé.
  1.                Les défendeurs, Cleverson Eliseu Ribeiro de Lima (« Cleverson ») et Ivan Goulart de Araujo (« Ivan »)[2], sont des travailleurs migrants d’origine brésilienne.
  2.                AMEC les a recrutés comme machinistes pour son atelier. Elle leur reproche d’avoir démissionné sans préavis. Elle réclame à Cleverson la somme de 49 600 $ et à Ivan la somme de 52 604,80 $ pour tenir lieu de délai de congé.
  3.                Jugeant ces demandes non fondées, Cleverson et Ivan se portent demandeurs reconventionnels. Chacun réclame à leur ex-employeur une somme de 20 000 $ en dommages-intérêts « pour ennuis, troubles et inconvénients ».
  4.                Tous deux revendiquent qu’AMEC soit également condamnée au paiement des honoraires extrajudiciaires qu’ils ont engagés pour assurer leur défense, alléguant une « conduite abusive et vexatoire » de leur ex-employeur.
  1. CONTEXTE
  1.                Mme Geneviève Paré est l’une des dirigeantes d’AMEC. Elle y est notamment responsable du développement des affaires, des ventes et des ressources humaines. L’entreprise compte près d’une soixantaine d’employés dont la plupart occupent des postes de machinistes, programmeurs ou électromécaniciens.
  2.                À compter de 2013, AMEC est de plus en plus confrontée à la difficulté de recruter des machinistes d’expérience et entrevoit une pénurie de cette main-d’œuvre qualifiée.
  3.                Elle entreprend donc un processus de recrutement de travailleurs étrangers provenant tantôt de l’Amérique du Sud, tantôt de la Tunisie et qui soient aptes à exercer le métier de machiniste niveau II que Mme Paré décrit en ces termes :

Un machiniste niveau II, c’est un machiniste qui va faire des pièces qui vont commencer à être quand même complexes, donc avec vraiment une complexité de compréhension, de… de vision mécanique et tout ça. Donc, des pièces qu’il y a beaucoup de tolérancements géométriques, des pièces très très précises avec une esthétique sévère, sur des machines très très complexes, plus complexes.[3]

Le recrutement des travailleurs brésiliens

  1.                En novembre 2017, AMEC lance un processus de recrutement au Brésil. Après affichage des postes, une douzaine de candidatures sont reçues.
  2.            Une première entrevue est faite à distance, en mode virtuel sur la plateforme Skype, avec l’assistance d’une personne qui facilite la communication en langue portuguaise ou espagnole avec les candidats.
  3.            Si ce premier contact s’avère positif, une seconde entrevue, celle-là de nature plus technique, est effectuée également à distance. Le candidat est alors appelé à répondre à diverses questions à partir d’un dessin technique qu’il doit maîtriser. 
  4.            Mme Paré indique que quatre personnes ont réussi les deux entrevues d’embauche. Elles devaient entreprendre ensuite les démarches, au Brésil, en vue d’obtenir un permis de travail pour le Canada, ce qui peut prendre plusieurs mois.
  5.            Ce permis de travail, généralement valable pour une période de 2 ou 3 ans, est rattaché à un employeur unique – AMEC en l’occurrence – d’où sa désignation de « permis fermé ».
  6.            Dans l’intervalle, Mme Paré s’adressait aux autorités gouvernementales provinciale[4] et fédérale[5] en vue d’accueillir les travailleurs dès qu’ils seraient en possession de ce permis.
  7.            En décembre 2017, elle témoigne avoir reçu un courriel en provenance d’Immigration Canada et avoir eu un échange avec une agente le 5 janvier 2018. Il est alors question que le taux horaire de 16 $ proposé aux candidats par AMEC est inférieur à la norme fédérale prescrite de 22 $, laquelle tient compte de l’indice des prix à la consommation.
  8.            Ainsi, le 16 janvier 2018, Mme Paré est informée que les offres d’emploi destinées à Cleverson et Ivan pour occuper le poste de Machiniste CNC niveau II sont confirmées « pour une période de 36 mois », soit du 1er mars 2018 au 28 février 2021, à un salaire horaire de « $ 22.00 / CAD », « 8.00 heure(s) par jour », « 40.00 heure(s) par semaine »[6].
  9.            Malgré ces informations non équivoques, AMEC va maintenir sa proposition initiale d’un taux horaire à 16 $ de l’heure.
  10.            C’est M. Marcos Lopes, un ingénieur mécanique d’origine brésilienne, embauché chez AMEC en 2016, qui assurait la traduction pour le bénéfice des candidats.
  11.            Il témoigne avoir fait une présentation visuelle Powerpoint, traduite en Portuguais, qui contient un tableau comparatif entre l’exigence fédérale d’un taux horaire de 22 $ et le taux horaire de 16 $ offert par AMEC[7].
  12.            Afin d’assurer aux candidats un salaire hebdomadaire équivalent à celui qu’ils toucheraient si leur taux horaire était de 22 $, AMEC leur propose de payer 40 heures de travail à 16 $ de l’heure et 10 heures en temps supplémentaire au taux de 24 $ de l’heure.
  13.            Mme Paré mentionne avoir informé les candidats qu’AMEC garantissait 40 heures par semaine. Elle et M. Lopes affirment que Cleverson et Ivan acceptaient ces conditions.
  14.            Or, les contrats de travail apparemment signés par Cleverson et Ivan, le 20 novembre 2017, comportent tous deux cette mention, au paragraphe 5 : « Salaire horaire : 22.00 $ / heure, salaire annuel de 45 760 $ »[8].
  15.            Dans les faits, Mme Paré reconnaît que ces contrats ont été modifiés après sa conversation avec l’agente fédérale.
  16.            Ivan arrivera le premier au Canada, le 4 avril 2018, suivi de Cleverson une vingtaine de jours plus tard.
  17.            Ni l’un ni l’autre ne parle et comprend le français à son arrivée[9].
  18.            Mme Paré, accompagnée de M. Lopes qui agit comme son « traducteur personnel »[10], les accueille à l’aéroport. Chacun est pris en charge les premiers jours de son arrivée.
  19.            Ils sont reçus au restaurant. Un appartement meublé, partagé avec deux autres travailleurs, est mis à leur disposition pour trois[11] ou quatre mois[12]. Des bottes de sécurité et des vêtements chauds leur sont fournis. Les deux premières « épiceries » sont payées par l’employeur[13].
  20.            On les assiste pour compléter diverses formalités administratives (obtention de la carte d’assurance sociale, de la carte d’assurance-maladie et du permis de conduire, ouverture d’un compte bancaire).
  21.            Un tour de ville et différentes activités leur sont proposés afin de favoriser leur intégration dans leur nouveau milieu de vie.
  22.            Des cours de français leur sont également offerts.
  23.            Ils commencent à travailler la semaine suivant leur arrivée. Ils rencontrent leurs nouveaux collègues de travail, suivent une « micro-formation », se familiarisent avec les lieux et les outils de travail ainsi que les tâches à accomplir.
  24.            Une rencontre informelle avec le contremaître est prévue à la troisième semaine de travail.
  25.            Puis, une évaluation qui met en lumière les forces et les faiblesses des candidats, leur « savoir-être » et leur savoir-faire », est réalisée après trois mois. Elle se répète trois mois plus tard et lorsqu’elle est positive, elle marque la fin de la période de probation.
  26.            AMEC effectue une évaluation du rendement chaque année par la suite, sous la responsabilité des chefs d’équipe.
  27.            Ni Cleverson ni Ivan n’ont reçu d’évaluation négative au cours de leur passage chez AMEC.

Le départ d’Ivan

  1.            Ivan occupait la fonction de machiniste « fraiseur »[14] chez AMEC.
  2.            Au début juillet 2019, il obtient deux semaines de vacances en vue, dit-il, de déménager à Pont-Rouge avec sa jeune famille.
  3.            Le jeudi 4 juillet 2019, il sollicite un entretien avec Mme Paré. Celle-ci demande au contremaître, M. Carl Gaudreault, d’assister à la rencontre.
  4.            Ivan les informe alors qu’il est déménagé avec sa famille dans un nouveau logement, en Beauce, et qu’il commence à travailler chez un nouvel employeur, Atelier d’usinage Ray-Jean inc.[15], le lundi suivant[16].
  5.            Du coup, il appose sa signature au pied d’une lettre-type préparée par l’employeur et dont l’objet est « Démission volontaire » : 

Par la présente, c’est avec regret que je vous annonce ma démission de façon volontaire.

Mon dernier jour travaillé à votre emploi sera le 4 juillet 2019, merci de faire mon relevé d’emploi en tenant compte de cette dernière journée mentionnée ci-haut et de me le faire parvenir par la poste.

Cette expérience à votre emploi m’a permis d’accroître mon expérience et je tiens à vous en remercier.

[…].[17]

  1.            « J’ai essayé de comprendre », affirme Mme Paré.
  2.            Se disant à la fois surprise et déçue du départ d’un employé pour lequel AMEC nourrissait « des espoirs à long terme », dit-elle, elle explique que cette démission entraîne des conséquences sur la production de l’entreprise.
  3.            Les deux machines qu’opérait Ivan sont temporairement mises à l’arrêt, faute de machinistes qualifiés pour le remplacer. Il y a eu « réaffectation de gens dans l’usine », précise le contremaître Gaudreault.
  4.            AMEC entreprend la recherche de candidats[18] et doit recourir aux services de Lynx RH Québec, une agence de recrutement spécialisée dans le domaine industriel. Le responsable de cette agence écrit à ce propos : 

Depuis juillet 2019; Lunx RH Québec a le mandat de pourvoir le poste de Machiniste CNC miling de jour avec Amec Usinage. Des candidats ont été présenté à la compagnie, mais ces derniers n’ont pu répondre aux attentes d’Amec Usinage et d’autres candidats ont de leur côté refusé les conditions offertes par Amec Usinage. Le poste de Machiniste CNC milling de jour a été finalement comblé par Amec Usinage au mois d’Aout 2020.[19]

(Reproduction fidèle à l’original)

  1.            Dans l’intervalle, AMEC doit retenir les services de sous-traitants pour la réalisation de certaines étapes de production, tout en dissimulant certains aspects de ses dessins techniques afin de préserver ses secrets industriels.
  2.            « On a livré les clients en retard », se désole Mme Paré.
  3.            Elle se résout à doubler ses « primes au référencement » (qui passent de 1 000 $ à 2 000 $) afin d’inciter les employés d’AMEC à dénicher un remplaçant parmi leurs contacts ou leurs connaissances.
  4.            Un employé parviendra ainsi à lui référer un machiniste qualifié : « Ça’ été vraiment long » et « pénible », aux dires de Mme Paré.
  5.            Après son départ, Ivan entreprend des démarches auprès de la Commission des normes, de l’équité, de la santé et de la sécurité du travail (CNESST) afin de récupérer des sommes qu’il estime lui être dues.
  6.            Le 16 décembre 2019, après enquête, la CNESST dépose une demande introductive d’instance aux termes de laquelle elle réclame à AMEC, au nom d’Ivan, une indemnité de 16 516,39 $, soit 15 861,67 $ pour salaire impayé et 654,72 $ pour « Congé annuel (Vacances) »[20].
  7.            Le 15 juillet 2020, la CNESST obtient la suspension de l’instance du fait qu’AMEC est l’objet d’une vérification par le ministère de l’Immigration, de la Diversité et de l’Inclusion du Québec « pour une problématique similaire alléguée en regard de la conformité du salaire versé face au contrat d’embauche »[21].
  8.            Un règlement hors Cour intervient plus tard à l’automne entre AMEC et la CNESST.
  9.            Le 15 octobre 2020, AMEC émet un chèque de 9 291,17 $ à l’ordre d’Ivan. Le bordereau qui accompagne ce chèque porte les mentions « Rétro $ » et « CONFIDENTIEL »[22].
  10.            Le vendredi 18 décembre 2020, à 16 h 50, AMEC fait signifier par l’huissier une mise en demeure à Ivan. Elle lui réclame une somme de 49 600 $ à payer « d’ici le 23 décembre 2020 », estimant qu’il avait l’obligation de lui offrir un préavis de huit semaines avant de quitter son emploi :

Pendant cette période de huit (8) semaines, notre cliente estime ses pertes de revenus, causées exclusivement en raison de votre démission en contravention de vos obligations légales, à un montant de 58 560,00 $, moins 8 960,00 $, soit le salaire qui vous aurait été normalement versé pendant cette période, incluant les charges sociales et les bénéfices marginaux applicables.[23]

  1.            Ivan consulte alors l’avocate Me Catherine Leblanc, qui demande à obtenir un délai supplémentaire jusqu’au 15 janvier 2020, le temps qu’elle puisse « rencontrer et conseiller adéquatement [son] client ».[24]
  2.            Par l’entremise de ses avocats, AMEC « consent à accorder un délai supplémentaire […] jusqu’au 8 janvier prochain ».[25]
  3.            Le 8 janvier 2021, Me Leblanc fait connaître la position d’Ivan. D’une part, elle affirme qu’il avait un motif sérieux pour résilier unilatéralement son contrat de travail du fait qu’il ne touchait pas la rémunération à laquelle il avait droit. D’autre part, elle considère que le montant réclamé « est nettement exagéré, notamment puisqu’il va bien au-delà du salaire annuel de notre client »[26].

Le départ de Cleverson

  1.            Cleverson était principalement affecté au quart de nuit[27] comme machiniste « tourneur »[28] :

[…] mon quart de travail, c’était malade, je travaillais toute la semaine, la fin de semaine, des fois je travaillais le jour, des fois je travaillais de soir… je bougeais beaucoup.[29]

  1.            Il sollicite une rencontre avec la direction le mercredi 12 août 2020.
  2.            Il informe d’abord M. Gaudreault, le contremaître de jour[30], puis Mme Paré qu’il va quitter AMEC à la fin de la semaine pour occuper désormais une fonction de chef d’équipe chez un compétiteur.
  3.            Il est aussitôt appelé à signer la lettre-type de « Démission volontaire » rédigée par l’employeur[31], laquelle indique que son dernier jour de travail sera le 14 août 2020[32].
  4.            À cette période, tout le pays fait face à la pandémie de la Covid-19 et la société CAE confie à AMEC la production de 14 pièces différentes qui font partie des composantes de simulateurs utilisés dans des établissements de santé.
  5.            Ce contrat d’une valeur de $ 6 000 000 – « le plus gros contrat à vie » de l’entreprise, selon le contrôleur Vincent Petitclerc – mobilise toute l’équipe d’AMEC.
  6.            Le départ de Cleverson entraîne un ralentissement dans la production : « Je n’ai plus personne la nuit », déplore Mme Paré.
  7.            « Mes gars ont fait de l’over », dit-elle, tandis qu’AMEC doit confier en sous-traitance la réalisation de certaines pièces. Malgré cela, la livraison connaîtra un retard d’un mois et demi par rapport à l’échéance convenue.
  8.            Puisque le poste à combler doit l’être sur un quart de nuit, la difficulté de trouver un remplaçant s’en trouve accrue.
  9.            Comme dans le cas du départ d’Ivan, AMEC estime que le départ de Cleverson lui cause un préjudice financier substantiel.
  10.            Le 18 décembre 2020, à 19 h 35, il reçoit la visite de l’huissier et il est lui aussi mis en demeure d’indemniser AMEC.
  11.            Le 8 janvier 2021, Me Leblanc, qui représente également Cleverson, répond à cette mise en demeure et maintient qu’il « était en droit de mettre fin unilatéralement et sans préavis au contrat de travail » du fait qu’il ne touchait pas la rémunération convenue « eu égard aux heures travaillées »[33].

La judiciarisation du litige

  1.            Le 9 février 2021, AMEC fait signifier une demande introductive d’instance à Ivan et lui réclame la somme de 52 604,80 $ en dommages-intérêts pour cause de « démission précipitée » et « intempestive ».
  2.            Mme Paré relate que le montant réclamé correspond à « la perte de… de… le vendant pour les deux (2) machines, pendant huit (8) semaines, que monsieur Ivan s’occupait »[34].
  3.            Ce même jour, AMEC fait signifier à Cleverson une demande introductive d’instance et lui réclame la somme de 49 600 $, lui reprochant également d’avoir fait défaut de lui offrir un préavis suffisant, ce qui aurait fortement affecté les opérations et la productivité de l’entreprise.
  4.            Le 12 novembre 2021, Cleverson et Ivan forment chacun une demande reconventionnelle et soutiennent que le comportement abusif d’AMEC à leur endroit justifie notamment ces conclusions :

CONDAMNER la demanderesse/défenderesse reconventionnelle à payer au défendeur/demandeur reconventionnel la somme de 20 000 $ pour ennuis, troubles et inconvénients avec l’indemnité additionnelle prévue à l’article 1619 du Code civil du Québec;

CONDAMNER la demanderesse/défenderesse reconventionnelle aux honoraires extrajudiciaires résultant de leur conduite abusive et vexatoire, somme à parfaire;

  1.            Le 16 juin 2023, l’honorable Louise Lévesque, J.C.Q., ordonne la jonction des instances dans les dossiers no 200-22-089736-219 (Cleverson) et no 350-22-000014-210 (Ivan) « afin qu’elles soient instruites en même temps dans le district de Québec »[35].
  1. QUESTIONS EN LITIGE
  1.            Les questions suivantes se posent en l’espèce :
  1.     Ivan et Cleverson étaient-ils tenus de donner à AMEC un délai de congé équivalent à préavis du fait de leur démission? Le cas échéant, quelle est la durée du délai de congé auquel AMEC avait droit?
  2.     AMEC a-t-elle abusé de ses droits envers Ivan et Cleverson dans les circonstances? Le cas échéant, quelle est la réparation qui s’impose en leur faveur?
  1.             ANALYSE
  1.            Malgré que les permis de travail émis en faveur des salariés étaient d’une durée de 36 mois, il n’est pas contesté que les parties étaient liées par des contrats de travail à durée indéterminée.
  2.            Ceci dit, les dispositions suivantes du Code civil du Québec[36] (C.c.Q.) sont au cœur du litige :

2087.  L’employeur, outre qu’il est tenu de permettre l’exécution de la prestation de travail convenue et de payer la rémunération fixée, doit prendre les mesures appropriées à la nature du travail, en vue de protéger la santé, la sécurité et la dignité du salarié.

[…]

2091.  Chacune des parties à un contrat à durée indéterminée peut y mettre fin en donnant à l’autre un délai de congé.

Le délai de congé doit être raisonnable et tenir compte, notamment, de la nature de l’emploi, des circonstances particulières dans lesquelles il s’exerce et de la durée de la prestation de travail.

[…]

2094.  Une partie peut, pour un motif sérieux, résilier unilatéralement et sans préavis le contrat de travail.

  1.            D’emblée, il importe de rappeler que ces dispositions visent à régir une relation juridique « fondamentalement asymétrique »[37] où l’une des parties est subordonnée à l’autre, le salarié devant effectuer son travail « sous la direction ou le contrôle » de l’employeur[38].
  2.            Ce « rapport de subordination » est « le propre de toute relation employeuremployé »[39] et constitue « [l]a caractéristique la plus importante du contrat de travail »[40].
  3.            Ceci dit, il y a longtemps que les tribunaux ont fait le constat de « l’inégalité des forces qui existe normalement entre l’employeur et l’employé »[41] :

Cette inégalité de pouvoir n’est pas limitée au contrat de travail luimême. Elle soustend plutôt presque toutes les facettes de la relation entre l’employeur et son employé.[42]

  1.            Cette « réalité maintes fois reconnue »[43] permet de « mettre en lumière la vulnérabilité unique des employés dans le contexte de leur travail »[44], lesquels forment « un groupe vulnérable dans la société canadienne »[45].
  2.            Cette « vulnérabilité individuelle des employés » du fait de « l’inégalité intrinsèque de leurs rapports avec la direction de leur entreprise »[46] est encore plus grande quand les employés dont il s’agit sont, comme en l’espèce, des travailleurs migrants[47].
  3.            À cet égard, bien que le Canada n’ait pas encore ratifié la Convention internationale sur la protection des droits de tous les travailleurs migrants et des membres de leur famille[48] – ce qui en fait une « source non contraignante » sur le plan juridique – cela ne sape pas complètement sa « valeur persuasive »[49].
  4.            Or, le préambule de cette Convention comporte ces énoncés :

Considérant la situation de vulnérabilité dans laquelle se trouvent fréquemment les travailleurs migrants et les membres de leur famille du fait, entre autres, de leur éloignement de l’État d’origine et d’éventuelles difficultés tenant à leur présence dans l’État d’emploi,

[…]

Tenant compte du fait que, dans de nombreux cas, les migrations sont la source de graves problèmes pour les membres de la famille des travailleurs migrants ainsi que pour les travailleurs migrants eux-mêmes, en particulier du fait de la dispersion de la famille,

[…].

(Nos soulignements)

  1.            L’on ne saurait sous-estimer l’ampleur des difficultés – voire du déchirement – qu’exige, pour le travailleur qualifié soucieux d’améliorer sa condition (et celle de sa famille), de quitter sa terre natale et son foyer, de surseoir ainsi au plein épanouissement de ses liens affectifs et amicaux, et ce, à la faveur d’une entreprise établie dans un pays éloigné où la culture, la langue, le climat, l’environnement et le système juridique lui sont complètement étrangers.
  2.            C’est ainsi que cet isolement géographique, à des fins de subsistance, s’accompagne d’une vulnérabilité souvent aggravée par des barrières culturelle et linguistique et une méconnaissance de ses droits[50] :

[…] l’inégalité structurelle caractérisant le rapport salarial est accentuée par l’extrême précarité dans laquelle se trouve la personne salariée, ainsi que par des facteurs d’ordre social et culturel inhérents à la condition d’étranger.[51]

  1.            Cette vulnérabilité est encore plus grande quand le permis de travail « fermé » accordé par le pays d’accueil l’autorise à travailler seulement pour l’employeur désigné[52], sans égard à la « liberté de travail »[53] pourtant reconnue à tout être humain[54].
  2.            C’est en gardant cette toile de fond à l’esprit qu’il faut maintenant disposer des questions en litige. 

A) Le délai de congé

  1.            Selon la Loi sur les normes du travail[55], seul l’employeur est tenu de donner un préavis au salarié avant de mettre fin à son contrat de travail[56].
  2.            Par contraste, l’article 2091 C.c.Q. prévoit qu’une telle obligation est bilatérale et s’impose donc également au salarié[57].
  3.            Cette disposition prévoit que la durée du délai de congé raisonnable s’établit « notamment » en fonction « de la nature de l’emploi, des circonstances particulières dans lesquelles il s’exerce et de la durée de la prestation de travail ».
  1. La nature de l’emploi
  1.            Pour ce qui est de « la nature de l’emploi », Mme Paré avance que les postes de machinistes chez AMEC sont des « postes stratégiques »[58] en raison de la haute précision que commande la fabrication des pièces.
  2.            Interrogée sur la proportion d’employés qui occupent une fonction de machiniste par rapport aux 55 ou 60 employés que compte l’atelier d’usinage d’AMEC, Mme Paré offre cette réponse :

Précisément, je ne pourrais pas être très très précise, là, il y en a de différents niveaux, puis il y en a qui sont machinistes, mais qui n’occupent plus le poste de machiniste, là; exemple, les programmeurs. Je dirais peut-être une quinzaine, vingtaine.[59]

  1.            Parmi cette « quinzaine » ou « vingtaine » d’employés, il y a trois niveaux de machinistes. Le niveau I comprend « les machinistes qui sortent de l’école, donc qui commencent graduellement »[60]. Le niveau II compte deux sous-groupes :

[…] c’est certain qu’on a différents niveaux de machiniste niveau II, donc il y a niveau II junior et sénior, à chaque niveau.

[…]

Donc, un machiniste niveau II, tout dépendant où est-ce qu’il se situe, s’il est junior ou sénior, il va opérer des machines avec des pièces plus complexes que les niveaux I, par exemple, mais moins complexes que les niveaux III. Et il va faire aussi des set-ups […][61]

  1.            Quant aux machinistes niveau III, « c’est des gens qui vont faire uniquement des set-ups de pièces très complexes puis, souvent, de nouvelles pièces », en plus d’être autorisés à « modifier les gammes d’usinage » et à proposer de nouvelles méthodes que « les autres machinistes de niveaux inférieurs vont devoir suivre »[62]. 
  2.            Or, Ivan et Cleverson étaient des machinistes « Niveau II junior »[63].
  3.            Sans minimiser la nature de leur travail, il paraît nettement exagéré de soutenir qu’ils occupaient un « poste stratégique » ou « critique » dans l’entreprise, eu égard à leur niveau et au nombre de machinistes employés par AMEC.
  1. Les circonstances particulières
  1.            Ce facteur relatif aux « circonstances particulières » dans lesquelles s’exerce l’emploi vise principalement « les circonstances de l’engagement »[64] et les « circonstances particulières de l’événement »[65] qui a mis fin au contrat de travail, incluant « les données qui visent plus directement la personne même du salarié (âge, famille, état de santé, handicap, etc.) »[66].
  2.            Tant Ivan que Cleverson ont été recrutés à distance par AMEC, alors qu’ils étaient domiciliés au Brésil.
  3.       L’un et l’autre ne pouvant comprendre le français à l’époque, c’est par l’intermédiaire de M. Lopes, un chef d’équipe chez AMEC qui parle le Portuguais, que les conditions de travail leur sont sommairement communiquées.
  4.       Cette communication prévoyait initialement un taux horaire de 16 $.
  5.       Toutefois, compte tenu de la nature de l’emploi à pourvoir, AMEC est contrainte de hausser ce taux à 22 $ l’heure, suivant les exigences communiquées à Mme Paré par une agente fédérale à la mi-janvier 2018.
  6.       Selon AMEC, « [l]e salaire horaire de 22,00 $ rend l’embauche impossible » et ce, « [e]n raison d’une autre règle, l’équivalence salariale »[67]. 
  7.       C’est dans ce contexte qu’AMEC en vient à proposer à Ivan et Cleverson de maintenir le salaire horaire à 16 $ pour les 40 premières heures travaillées, tout en leur offrant un taux de 24 $ l’heure pour dix heures de travail additionnelles par semaine, portant leur semaine de travail à 50 heures plutôt que 40.
  8.       Ce faisant, AMEC contrevient aux normes fédérales puisque « [l]’employeur qui a présenté une offre d’emploi à un étranger » est tenu de lui « verse[r] un salaire et de lui ménage[r] des conditions de travail qui sont essentiellement les mêmes — mais non moins avantageux — que ceux précisés dans l’offre »[68].
  9.       Ceci dit, M. Lopes traduit la proposition d’AMEC en portugais et mentionne en avoir fait la présentation aux deux travailleurs au moyen du logiciel Powerpoint[69].
  10.       Les paragraphes 5 des contrats de travail initiaux rédigés en français et signés par Ivan et Cleverson, le 20 novembre 2017[70], seront ainsi modifiés (sans que la date de signature de ces contrats le soit cependant) :

Salaire horaire : 16,00 $ / heure, 40 heures / semaine. Salaire pour les 40 premières heures travaillées (par semaine) ensuite (heures supplémentaires (à partir de la 41e heure pour la même semaine) le taux horaire est à temps et demi (x 1.5) donc 24,00 $ / heure.

  1.       Il paraît évident que ni Ivan, ni Cleverson n’était en mesure de bien comprendre la portée de cette disposition contractuelle rédigée dans une langue qu’ils ne maîtrisaient pas vraiment au moment d’apposer leurs signatures.
  2.       Contre-interrogé au sujet de savoir s’il a traduit les contrats au bénéfice de ces collègues, M. Lopes déclare : « Je ne me souviens pas de l’expliquer ».
  3.       Selon Ivan, le tarif horaire de 16 $ n’allait être appliqué que trois ou quatre mois, pas plus[71]. Telle était sa compréhension des représentations verbales faites « pendant l’entrevue […] avec madame Geneviève Paré et Marcos Lopes »[72] : « C’est toute parlé à la bouche de la conversation qu’on fait »[73], dit-il, « C’est ça qu’ils ont discuté dans l’entrevue. Il n’y a pas de document qui dit ça »[74] :

Mais sur l’entrevue, avant de “sorti” du Brésil, j’ai exigé ça à Marcos et à madame Geneviève.[75]

  1.       Du reste, il ne se rappelle pas d’avoir signé le contrat de travail renfermant le paragraphe 5, tel que modifié :

Je me souviens pas de ça, à cause que, quand on arrivait, on a signé plusieurs, plusieurs des documents.

Euh… pas de temps de lire et on ne savait pas vraiment lire en français.[76]

(Notre soulignement)

  1.       Quant à la présentation Powerpoint traduite en Portuguais, elle ne semble avoir laissé aucun souvenir dans la mémoire de Cleverson[77].
  2.       AMEC insiste sur le fait qu’Ivan et Cleverson ont clairement accepté les conditions de travail qui leur étaient proposées.
  3.       L’employeur doit cependant s’assurer que « les conditions de travail qui sont offertes à l’étranger satisfont aux normes canadiennes généralement acceptées »[78].
  4.       Saisie d’une affaire où l’employeur était notamment en défaut d’avoir des ententes écrites avec les travailleurs afin de faire passer leur horaire de travail de six jours par semaine à sept jours par semaine, la Cour fédérale écrit :

[49]  […] Il est impossible de supposer qu’un horaire de travail sans interruption au Canada soit dans l’intérêt supérieur ou souhaité de tous les travailleurs, même s’ils devaient y consentir. Les lois canadiennes sur l’emploi et le travail ne peuvent pas cautionner une telle pratique.

[50]  En outre, la Cour voit avec un certain cynisme le « caractère volontaire » de ces ententes lorsque tous les employés consentent à travailler sans arrêt pendant une période prolongée, comme en l’espèce. En gardant à l’esprit le déséquilibre important du pouvoir en faveur de l’employeur, on peut supposer avec raison que le travailleur qui rejette la demande de l’employeur le fait avec une certaine anxiété raisonnable, soit qu’il se trouvera en désavantage au moment d’obtenir un emploi futur auprès de l’employeur ou au Canada, soit qu’il subira un autre préjudice.[79]

* * *

  1.       Au moment où Ivan annonce qu’il quitte AMEC, le jeudi 4 juillet 2019, il jouit d’une période de vacances de deux semaines[80]. Sa dernière journée de travail avant de quitter pour ses vacances était le jeudi 27 juin 2019[81].
  2.       Selon son horaire usuel de travail, il avait congé les vendredis et samedis[82]. Son retour prévisible au travail était donc le dimanche 14 juillet 2019.
  3.       C’est dire qu’AMEC a bénéficié d’un délai de 9 jours pour se réorganiser et tenter de lui trouver un remplaçant.
  4.       Si Mme Paré considérait ce préavis insuffisant, elle s’est bien gardée de le dire à Ivan :

Pour moi, c’est vraiment surprenant, parce que j’ai pensé « wow! », elle demandait rien.

Elle me disait aucune chose.

Même elle disait… justement, elle disait : « Comme on “découvri” que tu vas déménager à Beauce, à Saint-Georges-de-Beauce, donc, j’ai imaginé que tu vas quitter l’entreprise.

-            J’ai dit : « O.K. »

C’est tout.

J’ai sorti de là-bas et j’ai signé les papiers.

Elle disait : «“Un” période d’une (1) semaine, deux (2) semaines, environ, tu vas “reçu” les… les heures des vacances, “toute” ça.

J’ai dit : « O.K. »

C’est tout, la conversation.[83]

  1.       À l’audience, Mme Paré confirme : « J’ai pas essayé de le retenir ».
  2.       Elle n’évoque pas non plus avec lui la possibilité qu’AMEC puisse lui réclamer un préavis et des dommages-intérêts[84].
  3.       Cela fait dire à Ivan :

Par rapport à “sa” démission-là, volontaire, AMEC Usinage a jamais demandé à moi à rester deux (2) semaines.

C’est pour ça qu’elle a actionné moi, mais elle dit jamais demandé pour moi rester deux (2) semaines de travail.[85]

* * *

  1.       Une situation similaire s’est produite dans le cas de Cleverson.
  2.       Le mercredi 12 août 2020, il sollicite un entretien avec le contremaître Carl Gaudreault, responsable de la production, et il lui explique qu’il entend « quitter le travail » parce qu’il a reçu « une autre offre d’emploi »[86].
  3.       Il s’enquiert alors des formalités à suivre auprès de ce représentant de l’employeur :

[…] je lui ai demandé s’il faut que je fasse de… d’avis… des préavis.

Il me disait que… que oui.

Je lui disais que s’il veut, je peux rester toute la semaine, là, même – je peux même aller “aux” fins de semaine s’il a besoin.

Mais il m’a dit que non, que c’est juste que je reste la semaine, c’est correct.[87] 

  1.       Cleverson témoigne qu’à ce moment, il n’avait pas encore « donner une date » à son nouvel employeur, conscient qu’il devait d’abord régulariser sa situation avec AMEC[88].
  2.       La réponse obtenue de M. Gaudreault allait lui permettre de commencer son nouvel emploi dès le lundi suivant, ce qu’il a fait.
  1. La durée du service
  1.       Bien que Ivan et Cleverson aient tous deux consacré à AMEC un nombre d’heures de travail très considérable, la durée de leur service fut plutôt de courte durée.
  2.       Arrivé au Québec en avril 2018, Ivan quitte AMEC en juillet 2019. Sa prestation de travail s’étale donc sur moins de 15 mois.
  3.       Quant à Cleverson, il travaille environ 27 mois pour AMEC avant d’offrir sa démission.

* * *

  1.       En 2021, dans l’affaire 9345-4569 Québec inc. (Chez Jim Pizza) c. Martel[89], le Tribunal passe en revue certaines décisions relatives à la durée raisonnable d’un préavis quand la rupture du contrat de travail à durée indéterminée est le fait de la personne salariée :

[50]  Un bref survol de la jurisprudence laisse voir que le délai de congé jugé raisonnable à la suite d’une démission sans préavis d’une personne salariée demeure plutôt modeste :

  • Dans l’affaire Chaussures Aubin & Roy inc. (Chaussures Pop) c. Verreault, la Cour détermine qu’un délai de congé de cinq jours paraît raisonnable pour une vendeuse qui occupait un poste à temps partiel depuis quelques mois.
  • Dans l’affaire Pierre Caradonna & Associés inc. c. Roy, un préavis d’une semaine est jugé suffisant à la suite de la démission soudaine d’un préposé à la comptabilité qui comptait 13 mois de service chez l’employeur.
  • Dans l’affaire Teamco c. Daigle, le tribunal juge raisonnable d’opposer à un peintre un délai de congé de deux semaines du fait de l’importance de ses tâches et de son ancienneté de quelque 18 mois.
  • Dans l’affaire Tremblay c. Monabyobe Sango, la Cour estime qu’une préposée aux bénéficiaires qui, depuis deux ans, donne des soins à domicile adaptés aux besoins d’une personne lourdement handicapée est tenue d’offrir un préavis de deux semaines.
  • Dans l’affaire Environnement Sanivac inc. c. Lamoureux, un délai de congé de deux semaines est jugé raisonnable dans les circonstances puisque le poste de directeur occupé par le défendeur était important et qu’il a démissionné sans prévis alors qu’il était responsable du déménagement imminent du siège de l’entreprise
  • Dans l’affaire Ethica Clinical Research inc. c. Le Gall, le tribunal considère qu’un délai congé de trois semaines est raisonnable pour un cadre haut placé ayant plus de six ans de service continu auprès de l’employeur.[90]
  1.       Dans cette affaire Chez Jim Pizza qui mettait en cause la démission concertée et sans préavis de trois jeunes salariés dont la durée de service du plus ancien était légèrement inférieure à trois ans, le Tribunal leur imposait un délai de congé d’une semaine.[91]
  2.       Dans l’affaire Simard (Coiffure MaShop) c. Bernier-Sergerie[92], un préavis de deux semaines était exigé d’un coiffeur qui ne comptait pas tout à fait deux ans de service au moment de son départ soudain. La preuve révélait que le carnet de rendez-vous de l’employeur était plein et qu’une partie de sa clientèle l’avait déserté après avoir été sollicitée par le salarié démissionnaire.
  3.       Dans l’affaire R.R. Poitras inc. c. Guillemette[93], un camionneur qui travaillait depuis 14 mois pour l’employeur quittait son emploi « de façon soudaine et abrupte »[94]. Vu « la nature » et « la durée de l’emploi », le Tribunal jugeait « qu’un préavis d’une semaine est approprié »[95].

* * *

  1.       En l’espèce, AMEC réclame un préavis de huit semaines et s’appuie sur ces cinq décisions dont les faits présentent bien peu de similitude avec la présente situation factuelle.
  2.       Dans l’affaire Traffic Tech inc. c. Kennel[96], la Cour supérieure juge que « le délai de congé raisonnable quantifié en l’espèce par l’employeur à six semaines, est sans aucun doute justifié et raisonnable »[97]. Toutefois, au moment de sa démission avec prise d’effet immédiate, M. Kennell comptait douze années de service, jouissait d’un salaire annuel de 244 000 $ et « occupait un poste de cadre intermédiaire avec certaines responsabilités, ayant à gérer deux groupes d’employés », dont un trio affecté aux ventes qui l’a immédiatement suivi, à sa demande, pour joindre les rangs d’un compétiteur direct de l’employeur.  
  3.       Scénario semblable dans l’affaire J. Anctil inc. (Groupe Anctil, division environnement) c. Raymond[98], où la Cour supérieure établit la durée raisonnable du préavis à six semaines dans le cas d’un employé qui comptait deux ans et 9 mois de service continu chez l’employeur. La Cour observe cependant que le démissionnaire occupait « un poste important dans l’entreprise avec plusieurs responsabilités, ayant à sa charge cinq employés », en plus d’être « la personne de référence des fournisseurs et des clients »[99]. Elle déplore ainsi « le départ soudain et cavalier » de cet « employé clé », après qu’il eut subtilisé des « informations confidentielles » dont il a fait usage chez son nouvel employeur[100].
  4.       Dans l’arrêt Pharmacie Jean-Sébastien Blais inc. c. Pharmacie Éric Bergeron et André Vincent inc.[101], la Cour d’appel juge raisonnable un délai de congé de deux mois compte tenu du départ précipité, pour une pharmacie concurrente, d’un technicien de laboratoire qui était au service de l’entreprise depuis 32 ans, ce qui en faisait un « employé-clé vu ses liens avec la clientèle, son salaire [de 72 000 $ annuellement] et la durée de son emploi »[102]. 
  5.       Les deux autres décisions invoquées par AMEC émanent de la Division des petites créances. Dans l’affaire Teamco c. Daigle[103], un peintre qui avait sous sa responsabilité deux employés dont un plutôt inexpérimenté démissionne après un an et demi de service. Un délai de congé de deux semaines est jugé raisonnable « [v]u l’importance du poste du défendeur qui était le premier peintre et dont les tâches [sont] importantes »[104]. 
  6.       Enfin, l’affaire Industries Hydraumarc inc. c. Bouchard[105] paraît fort peu pertinente puisqu’elle porte sur un contrat de travail à durée déterminée[106], ce qui n’est pas notre cas.
  7.       Cela crève les yeux : aucune de ces cinq décisions ne permet de soutenir une quelconque comparaison avec le présent dossier.
  8.       En fait, la revendication d’un délai de congé de huit semaines par AMEC est à ce point en marge de la jurisprudence pertinente que l’exagération qui s’en dégage constitue, pour ainsi dire, une forme d’intimidation financière.
  9.       À la lumière des facteurs pertinents et des précédents, le Tribunal juge que, dans le cas d’Ivan, le délai de congé de 9 jours dont AMEC a bénéficié se situe dans les limites du raisonnable[107].
  1. Le motif sérieux
  1.       Le Tribunal est d’autant plus conforté dans sa conclusion qu’Ivan disposait, au surplus, d’un « motif sérieux » lui permettant de « résilier unilatéralement et sans préavis le contrat de travail »[108].
  2.       Nul ne saurait contester que dans la perspective de la personne salariée, la rémunération constitue l’élément fondamental du contrat de travail[109] parce qu’elle « présente un caractère alimentaire »[110] pour elle et détermine son « pouvoir d’achat […] et, de ce fait, plusieurs facettes de sa qualité de vie et de celles des siens »[111].
  3.       Ivan a témoigné qu’il s’était adressé plusieurs fois à la direction d’AMEC afin que son traitement soit régularisé en fonction d’une semaine normale de 40 heures de travail[112] :

Si je veux gagner plus, je dois faire plus de cinquante (50) heures.

[…]

[…] j’ai accepté, mais pas plus qu’“un” période d’expérience de trois (3), quatre (4) mois.

Euh… j’ai parlé quatre (4) fois à la madame Geneviève Paré : « Quand on va changer ça? »

Elle disait : « Écoute… » – deux (2) fois – « … ou c’est ça ou tu retournes au Brésil ».[113]

(Nos soulignements)

  1.       Mme Paré admet avoir eu des conversations avec Ivan concernant sa rémunération, mais se dit incapable de se « rappeler exactement » de leur objet, ni des « discussions précises », ni de leur caractère négatif ou positif[114].
  2.       Ainsi, la version d’Ivan n’est pas contredite. 
  3.       Pour le travailleur migrant qui cherche à s’établir avec sa famille dans le pays d’accueil après avoir tout laissé derrière lui, l’invitation de l’employeur à retourner dans son pays d’origine est forcément reçue comme une menace et vécue comme telle :

Et la autre fois que j’ai été parler à… à… vous autres, il disait que ou est comme ça, ou je dois retourner au Brésil.

Donc, au Brésil, j’ai vendu “toute”, j’ai venu “rien” par ici.

Et donc, après que on “sommes” fermés dans l’entreprise, simplement disait : « Écoute, retourne à ton pays.

J’ai dit : « wow, ma famille est toute ici.

Comment ça? »[115]

(Nos soulignements)

  1.       C’est en application de l’article 207.1 du Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés[116] qu’Ivan parvient à obtenir un autre permis de travail qui ne comporte pas les contraintes d’un permis « fermé » comme celui qui le liait à AMEC.
  2.       Insérée sous la rubrique « Travailleur vulnérable », cette disposition réglementaire fédérale prévoit qu’un permis de travail « ouvert » peut être délivré à un travailleur étranger déjà présent au pays « s’il y a des motifs raisonnables de croire que celui-ci est victime de violence dans le cadre de son emploi au Canada ».
  3.       Le terme « violence » s’entend dans le sens d’« abus », si l’on en juge par la version anglaise du texte. Il comprend « la violence psychologique, notamment les menaces et l’intimidation »[117], et « l’exploitation financière »[118], par exemple « [l]e fait d’omettre de payer le salaire dû au travailleur »[119] :

L’objet de l’intervention réglementaire est de permettre aux travailleurs étrangers de se plaindre de telles situations sans avoir à craindre la perte de leur emploi et de leur statut migratoire […].[120]

  1.       Certes, le recours exercé par la CNESST au nom d’Ivan, après sa démission, va mener à un règlement hors cour dont la teneur demeure confidentielle. Toutefois, la somme de 9 291,17 $ qu’il a reçue de l’employeur à cette occasion permet d’inférer que du salaire lui était bel et bien dû.
  2.       Dans ces conditions, le Tribunal juge qu’Ivan disposait de « motifs sérieux » pour provoquer la résiliation unilatérale du contrat de travail[121].
  1. La renonciation
  1.       Quant à Cleverson, tout indique qu’AMEC a consenti à ce que le préavis n’excède pas deux jours dans son cas.
  2.       Au moment d’annoncer son départ, le mercredi 12 août 2020, après son quart de nuit, il se montre disposé à continuer de travailler quelques jours de plus. Toutefois, le contremaître Gaudreault lui fait savoir qu’il n’a qu’à conclure sa semaine de travail, sans plus :

Je lui disais que s’il veut, je peux rester toute la semaine, là, même – je peux même aller “aux” fins de semaine s’il a besoin.

Mais il m’a dit que non, que c’est juste que je reste la semaine, c’est correct.

[…]

J’ai commencé le lundi suivant, mais j’ai pas donné la réponse tout de suite, parce que je… je disais à mon… mon prochain emploi… employeur qu’il faut que je règle ma situation avec AMEC avant de donner une date.

C’est pour ça que – j’ai… j’ai… je savais pas que je commencerais lundi [suivant], mais j’ai dit à Carl que s’il veut, je peux rester pour… pour donner avis.

[…]

Mais il m’a dit que non, que juste que je finisse la semaine, c’est correct.[122]

(Nos soulignements)

  1.       Appelé à témoigner à l’audience, M. Gaudreault n’a pas contredit cette version des faits.
  2.       C’est d’ailleurs pourquoi la lettre-type de démission que lui fait signer l’employeur date du vendredi 14 août 2020.
  3.       Dans les circonstances, Cleverson était raisonnablement fondé de croire qu’Amec renonçait ainsi à recevoir un délai de congé plus long[123].
  1. Le préjudice allégué
  1.       AMEC soutient avoir subi un important préjudice financier qu’elle attribue aux départs d’Ivan et Cleverson.
  2.       Or, la preuve n’étaye pas la prétention que ce préjudice allégué soit la « suite immédiate et directe »[124] de leur démission.
  3.       D’ailleurs, Mme Paré reconnaît elle-même qu’AMEC n’a pas perdu de clients à la suite de leur démission :

On ne parle pas de perte de contrats, on parle de retards de livraison, là, avec des dates promises à des clients.[125]

  1.       Quant à la difficulté de les remplacer à court terme, l’agence de recrutement Lynx RH Québec indique que des candidats qualifiés présentés à l’employeur « ont de leur côté refusé les conditions offertes par Amec Usinage »[126]. Un tel refus n’est certainement pas imputable à Ivan et Cleverson.

B) L’abus de droit

  1.       Il est vrai qu’AMEC a consacré du temps et des ressources pour compléter les formalités administratives afin de recruter du personnel à l’étranger[127], l’accueillir ici et travailler à faciliter son intégration non seulement dans l’atelier d’usinage, mais aussi dans la vie quotidienne.
  2.       L’on peut concevoir que ces frais liés au recrutement de travailleurs étrangers nourrissent des attentes chez l’employeur, d’où la déception générée par leur départ avant l’expiration de leur permis de travail initial.
  3.       Toutefois, le Tribunal juge que cette déception s’est ici convertie en vengeance, laquelle a mené à un abus de droit qu’il faut sanctionner.
  4.       Premièrement, le salaire annuel consenti à Ivan et Cleverson était de 45 760 $. Par ses demandes introductives d’instance, AMEC leur réclame respectivement des sommes de 52 604,80 $[128] et 49 600 $.
  5.       Si « le montant d’une réclamation, à lui seul, ne peut servir de fondement pour établir le caractère abusif d’une demande en justice »[129], il demeure tout de même un élément contextuel pertinent s’il s’intègre à d’autres faits également révélateurs d’un abus.     
  6.       Deuxièmement, la démission d’Ivan remonte au 4 juillet 2019 et celle de Cleverson au 14 août 2020.
  7.       Après son départ, Ivan effectue des démarches auprès de la CNESST afin de pouvoir récupérer les sommes auxquelles il a droit.
  8.       En décembre 2019, après enquête, la CNESST fait signifier une demande introductive d’instance portée au nom d’Ivan et soutient qu’AMEC lui doit une somme de 15 861,67 $ en « salaire » et 654,72 $ pour « Congé annuel (Vacances) »[130].
  9.       L’exercice de ce recours mène à une entente hors cour.
  10.       Ainsi, le 15 octobre 2020, AMEC émet un chèque de 9 291,17 $[131] destiné à Ivan, mais ne le lui expédie pas.
  11.       Le 30 octobre 2020, ce dernier doit se rendre à l’atelier d’usinage pour le récupérer. Il rencontre à cette occasion Mme Paré et M. Éric Morin, l’un des dirigeants d’AMEC. Ivan relate en ces termes le contexte et la teneur de la discussion qu’il qualifie, à l’audience, de « pas agréable » :

Le gouvernement qui envoyait les agents à AMEC pour voir qu’est-ce qu’il y a des erreurs.

Alors, elle a trouvé des erreurs des paies pour nous qui tra… Brésiliens qui travaillaient là-bas, les quatre (4).

O.K.?

Dons, elle a commencé – le gouvernement a commencé le processus contre AMEC pour payer ça.

Alors… euh… quand on est quand j’ai été à AMEC pour “reçu” les chèques de… d’AMEC Usinage… euh… le monsieur Éric me disait : « Écoute, dépensez pas trop vite cet argent. »

Donc… euh… j’ai pas prolongé le… les paroles et j’ai quitté.

Alors – mais pour les autres, j’ai écouté aussi qu’il disait la même chose : Écou… écoute, dépensez pas trop vite cet argent, parce que, lui, il va retourner “à les” coffres de l’entreprise. »[132]

(Nos soulignements)

  1.       « Je suis sorti vite », déclare Ivan, qui constate que M. Morin est fâché.
  2.       L’avis de règlement total du dossier est déposé à la Cour le 2 décembre 2020.
  3.       Cela fait, dès le vendredi 18 décembre 2020, en toute fin d’après-midi, AMEC signifie ses mises en demeure à Ivan et Cleverson. Ce faisant, elle exige, de chacun d’eux, le paiement d’une somme qui excède leur salaire annuel, et ce, au plus tard le 23 décembre 2020, soit deux jours avant Noël.
  4.       Appelée à expliquer les raisons de cette signification par l’huissier, à cette période de l’année, alors qu’Ivan a quitté l’entreprise depuis 17 mois, Mme Paré offre cette explication :

Écoutez, je… je ne peux pas vous donner de… de… de réponse très très précise là-dessus. Je pourrais juste dire qu’on était très très occupés, donc c’est certain qu’il y a des dossiers, des fois, qui attendent et puis on… on… moins urgents, qu’on… qu’on… qu’on gère plus tard.[133]

(Notre soulignement)

  1.       Cette explication paraît bien peu convaincante. Il paraît plus plausible que la signification d’une mise en demeure comportant une réclamation aussi substantielle à quelques jours de Noël servait plutôt à faire forte impression sur ses destinataires et à assouvir une certaine vengeance[134].
  2.       Troisièmement, alors que le dossier est jugé « moins urgent », la demande de l’avocate des deux travailleurs brésiliens afin d’obtenir un délai jusqu’au 15 janvier 2021 pour faire connaître leur position sera refusée par l’avocat d’AMEC, celui-ci exigeant plutôt une réponse pour le 8 janvier 2021, sans raison apparente, si ce n’est le désir de maintenir la ligne dure.
  3.       Quatrièmement, quand AMEC fait signifier ses demandes en justice le 9 février 2021, le montant réclamé à Ivan est haussé de plus de 3 000 $ par rapport à la mise en demeure transmise moins de deux mois plus tôt.
  4.       D’autres éléments factuels doivent également être pris en compte.
  5.       AMEC a sciemment contourné l’exigence qui imposait le versement d’un taux horaire de 22 $ en feignant, auprès des autorités gouvernementales, d’offrir à Ivan et Cleverson un salaire annuel respectueux de cette norme. Dans les faits, ce salaire annuel ne pouvait être acquis que dans la mesure où ces travailleurs effectuaient des semaines de travail de 50 heures, soit 10 heures de plus que la semaine normale de travail prescrite par la Loi sur les normes du travail[135].
  6.       Nous avons vu que le refus catégorique de l’employeur de revoir à la hausse ce taux horaire l’amenait à couper court aux discussions, plaçant ces travailleurs devant le choix impossible d’accepter leur sort sous peine de risquer de devoir rentrer au Brésil[136].
  7.       Incidemment, cette menace fut également brandie au moment où la conjointe d’Ivan, qui travaillait également chez AMEC, mais qui disposait d’un permis de travail « ouvert », a quitté l’entreprise pour un autre employeur, Chocolat Favori.
  8.       À cet égard, Ivan déclare :

Quand elle a fait ça, la madame Geneviève et monsieur… Carl, qui est le chef, m’a appelé sur le bureau de madame Geneviève.

Il disait à moi : « Hélène sortie d’AMEC pour aller à Favori.

– O.K.

– Donc, vous savez que si… si toi perds le travail, alors, c’est – tu dois – si on rompt, si on coupait le… le… le contrat de travail avec toi, tu dois retourner à… au Brésil.

Tu peux pas rester ici.

[…]

Et donc, il disait – entre lignes, c’est clair qu’il disait : « Écoute, si tu travailles ici, Hélène peut continuer à travailler à Favori ou peu importe où, mais si arrêter notre contrat de travail, tu dois retourner au travail dans ton pays et Hélène pas pu travailler à l’autre place. »

C’est ça, sa menace.[137]

(Nos soulignements)

  1.       Il est acquis que, « [p]our des raisons inhérentes au contrat de travail, il est rare qu’un employeur poursuive en responsabilité un salarié qui aurait démissionné en omettant de donner le préavis requis »[138].
  2.       Non seulement AMEC a néanmoins décidé d’exercer un recours en ce sens, mais elle réclame un délai de congé d’une longueur et d’une valeur monétaire sans aucune commune mesure avec les balises pourtant bien établies par la jurisprudence.
  3.       De toute évidence, l’employeur a voulu sanctionner l’exercice, par Ivan et Cleverson, de leur liberté de travail et de leurs droits en usant de diverses menaces et représailles qui ont culminé en un abus de droit[139].

1. Les dommages-intérêts

  1.       Dans leurs demandes reconventionnelles respectives, Ivan et Cleverson réclament chacun « la somme de 20 000 $ pour ennuis, troubles et inconvénients ».
  2.       Ivan témoigne avec émotion des conséquences subies avant qu’il ne rompe sa relation contractuelle avec AMEC, puis par la suite.
  3.       Il évoque la crainte que l’employeur faisait peser sur lui en opposant à ses revendications légitimes la possibilité qu’il doive retourner au Brésil à moins qu’elles ne cessent.
  4.       L’horaire de travail qui lui était imposé et la façon dont ses heures étaient rémunérées n’étaient pas conformes aux normes gouvernementales ni comparables au traitement accordé aux autres :

J’ai “découvri” que la volonté de l’AMEC, c’est pour nous travailler en fin de semaine, pas en… pas “un” période de la semaine.

O.K.?

Parce que le boss veut que… que roule la machine “toutes” les – en fin de semaine.

Et – excuse-moi! – mais les Québécois ne veulent pas travailler en fin de semaine.[140]

  1.       « Je vois la discrimination de moi par rapport aux autres », dit-il, « Je n’ai pas le droit de faire les mêmes horaires comme les autres ».
  2.       Il déplorait cette situation : « […] je peux pas rester avec ma famille la fin de semaine parce que je dois travailler dix heures (10) dimanche, lundi, mardi, mercredi et jeudi. Alors, j’ai pas de temps »[141].
  3.       Malgré ses démarches afin que son taux horaire pour les quarante premières heures de travail soit haussé à 22 $, conformément aux engagements souscrits par l’employeur, il essuie des refus successifs :

Après… après que j’ai parlé plusieurs des fois AMEC pour changer mon… mon… mon état de travail, j’ai pris la décision que l’unique façon, c’est de moi faire quelque chose pour changer ma vie.[142]

  1.       Il prend alors la décision d’exercer les droits qui lui sont reconnus par la loi, ce qui mécontente la direction d’AMEC.
  2.       Elle lui reproche notamment d’avoir « menti » et « caché de l’information »[143] pour mieux préparer sa sortie en passant une entrevue d’embauche, en signant un bail de logement en Beauce[144], puis un contrat de travail chez Atelier d’usinage Ray-Jean inc.[145] avant de remettre sa démission à AMEC.
  3.       Sur le plan juridique, ces reproches n’ont pas le moindre fondement :

[34]  Dans un contexte comme celui de l’espèce, s’agissant d’un contrat à durée indéterminée, le salarié est donc libre de changer d’emploi ou d’activité professionnelle, et ce, à son gré, peu importe la raison qui le motive. En conséquence, il est libre aussi de faire les démarches et les préparatifs nécessaires à ce changement alors même qu’il est encore à l’emploi de celui ou celle qu’il entend quitter. […].

[35]  Le fait d’agir ainsi ou de ne pas dévoiler son intention ou ses démarches à l’employeur ne peut par ailleurs pas être tenu pour un manquement […] : il y a des limites légitimes, certainement, à la franchise et à la transparence requise par le contrat de travail et j’estime que le salarié (qui, d’ailleurs, peut changer d’idée en cours de route) a le droit de garder pour lui son intention de changer d’emploi ou les démarches qu’il entreprend à cette fin (y compris lorsqu’il s’agit de se lancer en affaires). Il y a des limites également à la notion de « conflit d’intérêts », qu’on invoque parfois : on ne peut pas considérer comme une manifestation de déloyauté le fait qu’un salarié se prépare à démissionner en planifiant pour ainsi dire sa sortie […].

[36]  À mon avis, il serait en pratique impensable – et injuste – de considérer que le salarié enfreint son devoir de loyauté dès lors qu’il exerce son droit de regarder ailleurs et de chercher un nouvel emploi ou une autre activité rémunératrice, y compris une activité concurrentielle à celle de son employeur. Il n’est pas impossible qu’un employeur, apprenant l’intention de son salarié, le remercie de ses services plutôt que de tenter de le retenir, mais l’ire ou la perte de confiance de celui qui se sentirait trahi, trompé ou peiné n’est pas la mesure du droit du salarié en la matière. […].[146]

  1.       Le mécontentement de l’employeur va également se manifester après l’enquête menée par la CNESST et l’exercice de son recours porté contre lui, au nom d’Ivan.
  2.       Alors que la lettre-type de démission préparée par l’employeur et signée par Ivan, le 4 juillet 2019, favorise clairement l’utilisation de la poste pour l’envoi de son relevé d’emploi[147], il sera paradoxalement contraint de se présenter en personne à l’atelier, le 30 octobre 2020, pour récupérer le chèque émis en sa faveur en règlement du litige[148].
  3.       À cette occasion, un haut dirigeant d’AMEC le met en garde contre le fait que la somme remise pourrait revenir bientôt dans les coffres de l’entreprise, laissant ainsi planer une menace anxiogène sur cet ex-employé.
  4.       Le 18 décembre 2020, l’ire de l’employeur se traduit par la visite de l’huissier au domicile d’Ivan et la remise d’une mise en demeure par laquelle AMEC réclame le paiement, dans les cinq jours, d’une somme de 49 600 $.
  5.       « Proche de Noël, avec un bébé sur les bras, pas de famille ici, je connais pas le système judiciaire non plus », témoigne Ivan, « je savais pas quoi faire ». « Le stress est tombé dans la maison », dit-il : « C’est vraiment un cauchemar ».
  6.       « On n’a pas d’argent, il faut payer l’avocat », ajoute-il, contraint de s’endetter et de payer de lourds intérêts sur sa carte de crédit pour subvenir à ses besoins et ceux de sa famille :

J’ai pas de puissance en ma famille. C’est ça… J’étais… C’est pour ça que je demande ça. Pour payer les dettes. C’est trois ans et demi environ qu’on vit de cette angoisse… cette chose qui… J’ai hâte – toujours – de finir ça… et vivre en paix. Je veux la paix. Seulement ça.

[…]

Mais, à cause de ce processus-là, mes nuits devient un trou immense. Je ne vois pas la lumière. Je ne vois pas comment sortir de ça.[149]

(Nos soulignements)

* * *

  1.       Quant à Cleverson, il a cherché lui aussi à être autorisé à « faire 40 heures comme tout le monde », ce qui était « toujours refusé », témoigne-t-il, jugeant ce refus d’AMEC « frustrant » et « déprimant ».
  2.       Le 2 novembre 2020, il doit se rendre en personne à l’Atelier d’usinage pour récupérer à son tour un chèque couvrant la somme de 11 734,74 $ qui lui est due pour salaire impayé[150].
  3.       Il reçoit également la mise en garde de ne pas gaspiller cet argent trop vite, décrivant la situation comme n’étant « pas la meilleure rencontre que j’ai eue dans ma vie ».
  4.        Le 18 décembre 2020, au moment où la mise en demeure d’AMEC lui est signifiée à son domicile, il craint d’ouvrir cette lettre. Déjà père de deux petites filles, sa femme est alors enceinte de plusieurs mois.
  5.       La missive d’AMEC à quelques jours de Noël et de l’accouchement à venir suscite « beaucoup d’émotions ». En pleurs, sa femme envisage même de quitter le Québec pour retourner au Brésil. Elle accouche d’un garçon le 30 décembre 2020.
  6.       « J’essayais de garder le moral », déclare Cleverson, consterné par la somme de près de 50 000 $ qui lui est réclamée alors que son compte bancaire ne contient pas même 1 000 $ à ce moment : « Je suis pas riche ».
  7.       Il doit s’endetter davantage pour payer l’hypothèque et ses factures d’avocat.
  8.       « Je me sens blessé », conclut-il.

* * *

  1.       La jurisprudence reconnaît évidemment la possibilité d’accorder des dommages-intérêts moraux en cas d’abus de droit.[151]

 

  1.       L’exercice demeure « difficile et nécessairement approximatif »[152] :

L’exercice consistant à traduire le préjudice moral en dommages, c’est-à-dire en termes monétaires, est toujours délicat. Comme l’écrit le juge Vézina dans Calego International inc. c. Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse, « [m]esurer le dommage moral et l’indemnité conséquente constitue une tâche délicate forcément discrétionnaire », presque arbitraire, serait-on tenté d’ajouter.[153]

  1.       Il est toujours épineux de compenser justement les sentiments d’impuissance et d’injustice, le découragement, le stress, l’anxiété, l’inquiétude et l’angoisse que fait naître un comportement abusif chez la personne qui les subit.
  2.       Ceci dit, il faut assurément « garder l’humain au cœur du processus »[154] et tenir dûment compte, en l’espèce, de la situation de vulnérabilité particulière qui caractérise la condition des travailleurs migrants.
  3.       Les ennuis, troubles et inconvénients causés à Ivan et Cleverson du fait qu’AMEC a exercé ses droits « d’une manière excessive et déraisonnable » à leur endroit sont de même nature et soutiennent la comparaison.
  4.       Le Tribunal évalue ainsi le préjudice moral qu’ils ont chacun subi à la somme de 7 500 $.

2.    L’abus d’ester en justice

  1.       L’article 51 du Code de procédure civile[155] énonce la règle suivante :

51.  Les tribunaux peuvent à tout moment, sur demande et même d’office, déclarer qu’une demande en justice ou un autre acte de procédure est abusif.

L’abus peut résulter, sans égard à l’intention, d’une demande en justice ou d’un autre acte de procédure manifestement mal fondé, frivole ou dilatoire, ou d’un comportement vexatoire ou quérulent. Il peut aussi résulter de l’utilisation de la procédure de manière excessive ou déraisonnable ou de manière à nuire à autrui ou encore du détournement des fins de la justice, entre autres si cela a pour effet de limiter la liberté d’expression d’autrui dans le contexte de débats publics.

(Nos soulignements)

  1.       L’abus peut donc « résulter de l’exercice déraisonnable ou excessif d’un droit qui rompt l’équilibre des droits entre les parties ou qui détourne le droit, ou ici la procédure, de sa fin sociale intrinsèque, l’administration de la justice »[156].
  2.       L’on sait que « la barre de l’abus de procédure doit demeurer haut placée »[157], d’où ce principe maintes fois réitéré en jurisprudence :

[…]  en règle générale, les honoraires extrajudiciaires déboursés pour faire valoir ses droits auprès d’un tribunal ne peuvent être remboursés à l’occasion d’un litige. Un abus sur le fond de l’affaire ne permet pas le remboursement des frais d’avocats, sauf dans des circonstances exceptionnelles, alors qu’un abus du droit d’ester en justice permet le remboursement des honoraires extrajudiciaires, puisque cet abus entraîne un « dommage à la partie adverse qui, pour combattre cet abus paie inutilement des honoraires judiciaires à son avocat ».[158]

  1.       Or, les « circonstances exceptionnelles » sont ici réunies et font en sorte que l’« abus sur le fond de l’affaire » s’est transposé en « abus du droit d’ester en justice » du fait que, de l’avis du Tribunal, AMEC a formé ses demandes en justice principalement « à des fins de vengeance ou de représailles »[159] contre Ivan et Cleverson. 
  2.       Dans l’arrêt Marcotte c. Longueuil (Ville)[160], la Cour suprême du Canada rappelle que les parties qui s’adressent au Tribunal font appel à un service public dont les ressources ne sont pas illimitées[161]. Dans ce contexte, elles doivent exercer leur droit d'ester en justice d’une façon qui permette « de sauvegarder les finalités du système juridique et non les pervertir »[162].
  3.       Considérant l’inégalité économique prévalant entre les parties, la disproportion des sommes réclamées par AMEC rendait illusoire toute possibilité d’en arriver rapidement à un règlement à l’amiable, contraignant ainsi Ivan et Cleverson à engager inutilement « des honoraires extrajudiciaires plus élevés que si les défendeurs avaient été poursuivis en fonction d’un montant mesuré »[163].
  4.       De plus, en réclamant une indemnité démesurée et parfaitement irréaliste pour défaut de préavis, AMEC privait également Ivan et Cleverson de la possibilité de demander que la cause soit entendue, à peu de frais, par la Division des petites créances de la Cour du Québec[164]. 
  5.       Le Tribunal considère que les recours exercés ici par AMEC sont empreints d’une témérité[165] révélatrice d’un « comportement blâmable »[166] « excessif ou injuste »[167].
  6.       La présente affaire n’est pas sans rappeler celle dont notre Cour dispose dans sa décision Services d'inspection BG inc. c. Duclos[168].
  7.       M. Duclos cumulait plus de onze ans de service au moment où il présente sa démission à l’employeur, le 24 mai 2007, avec prise d’effet le 8 juin suivant.
  8.       Insatisfait de ce préavis de 18 jours, l’employeur lui réclame une indemnité équivalente à six semaines de travail.
  9.       La Cour conclut qu’il y là un abus d’ester en justice et s’en explique ainsi :

[64]  Dans la présente affaire, la preuve révèle que la demanderesse, frustrée de la décision du défendeur de quitter son entreprise, a décidé de s’en prendre à ce dernier en le poursuivant en justice et en l'obligeant à défrayer des frais judiciaires, invoquant des droits qu'elle savait des plus précaires, si ce n'est lors de l'introduction de l'instance, du moins peu longtemps après. 

[…]

[72]  En lespèce, Les services dinspection BG inc. disposait de tous les éléments en cours de procédures pour modifier sa stratégie et mettre un frein à sa frustration ainsi quà son désir manifeste de se venger de son ex-employé.

[73]  Son défaut de modifier sa stratégie doit être considéré, dans le contexte actuel, comme la manifestation dun comportement abusif, menant à se servir du système judiciaire pour assouvir un désir ayant peu de lien avec un droit apparent.[169]

  1.       En faisant les adaptations nécessaires, ce raisonnement s’applique pleinement dans les circonstances. De toute évidence, AMEC « n'a pas initialement eu la prudence d'évaluer les répercussions du recours ultime qu'elle entreprenait »[170].
  2.       En date du 16 avril 2024, Ivan avait déboursé une somme de 9 262,74 $ en frais d’avocats. Un solde de 7 089,42 $ reste à payer en fonction d’une entente de paiement conclue avec son avocat, le 27 novembre 2023, et qui lui permet de verser une somme de 500 $ par mois jusqu’à paiement final[171]. 
  3.       Les onze notes d’honoraires professionnels déposées en preuve couvrent les services rendus pour la période s’étalant du 19 mai 2021 au 19 juin 2023[172], laquelle est contemporaine aux procédures judiciaires entreprises par AMEC et aux étapes subséquentes du cheminement du dossier.
  4.       Ces notes d’honoraires n’ont pas été contestées ni remises en cause par l’employeur, celui-ci insistant plutôt sur le fait qu’il n’a pas « agi de mauvaise foi dans le déroulement du dossier », ni « abusé de ses droits processuels »[173].
  5.       « À défaut d'une preuve démontrant le caractère déraisonnable ou la non pertinence des comptes »[174], il y a lieu d’appliquer la présomption simple[175] inférée de l’article 127 de la Loi sur le Barreau[176] voulant qu’il faille croire l’avocat qui réclame des honoraires professionnels quant à la réquisition, la nature, la durée et la valeur des services rendus à son client.
  6.       Ivan a donc droit à une somme de 16 352,16 $ pour les frais qu’il a inutilement engagés pour la défense de ses droits.
  7.       Quant à Cleverson, il ne peut être indemnisé sous ce chef, faute d’avoir mis en preuve les factures d’honoraires professionnels qu’il aurait reçues et payées, en tout ou en partie, en lien avec la présente instance.

PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL:

Dans le dossier 200-22-089736-219 :

  1.       REJETTE la demande principale d’Amec usinage inc.;
  2.       AVEC FRAIS DE JUSTICE;
  3.       ACCUEILLE en partie la demande reconventionnelle de Cleverson Eliseu Ribeiro de Lima;
  4.       CONDAMNE Amec usinage inc. à payer à Cleverson Eliseu Ribeiro de Lima la somme de 7 500 $, avec intérêts calculés au taux légal annuel de 5 %, majoré de l’indemnité additionnelle visée par l’article 1619 du Code civil du Québec, à compter du 12 novembre 2021;
  5.       AVEC FRAIS DE JUSTICE.

Dans le dossier 350-22-000014-210 :

  1.       REJETTE la demande principale d’Amec usinage inc.;
  2.       AVEC FRAIS DE JUSTICE;
  3.       ACCUEILLE en partie la demande reconventionnelle d’Ivan Goulart de Araujo;
  4.       CONDAMNE Amec usinage inc. à payer à Cleverson Eliseu Ribeiro de Lima la somme de 22 652,16 $, avec intérêts calculés au taux légal annuel de 5 %, majoré de l’indemnité additionnelle visée par l’article 1619 du Code civil du Québec, à compter du 12 novembre 2021;
  5.       AVEC FRAIS DE JUSTICE.

 

 

__________________________________

CHRISTIAN BRUNELLE, J.C.Q.

 

 

 

Me Maxime Savard

BCF s.e.n.c.r.l., casier no 12

Pour la demanderesse

 

Me François Lepage

Bernier Beaudry, casier no 127

Pour les défendeurs / demandeurs reconventionnels

 

 

Dates d’audience :

17 et 18 avril 2024

 

 

 

 

 

 


[1]  Pièces PC-1 et PI-1 : État de renseignement d’une personne morale au registre des entreprises.

[2]  Lors de l’audition, les avocats nommaient les défendeurs par leur prénom pour abréger leur désignation et les distinguer l’un de l’autre. Le Tribunal entend donc user du même procédé dans son jugement et prie les défendeurs de ne pas voir là une familiarité indue ou un manque de respect envers eux.

[4]  Ministère de l’Immigration, de la Diversité et de l’Inclusion du Québec.

[5]  Emploi et Développement social Canada.

[6]  Pièces PC-3 et PI -3.

[7]  Pièce P-13.

[8]  Pièces DC-1 et DI-1.

[10]  Id., p. 13.

[12]  Interrogatoire préalable à l’instruction de M. Ivan Goulart de Araujo, 21 décembre 2021, p. 53-54.

[13]  Id., p. 56. Pour sa part, Cleverson affirme que seule « la première épicerie était payée » : Interrogatoire préalable à l’instruction de M. Cleverson Eliseu Ribeiro de Lima, 21 décembre 2021, p. 21.

[15]  Pièce PI-9.

[17]  Pièce PI-10.

[18]  Pièce PI-5 : Capture d’écran d’une offre d’emploi communiquée sur Internet, 4 juillet 2019.

[19]  Pièce PI-4.

[20]  Pièce DI-7.

[21]  Commission des normes, de l'équité, de la santé et de la sécurité du travail c. Amec Usinage inc., 2020 QCCQ 2824, par. 2.

[22]  Pièce DI-4.

[23]  Pièce PI-6.

[24]  Pièce DI-5.

[25]  Pièce DI-6.

[26]  Pièce DI-4.

[28]  Interrogatoire préalable à l’instruction de Madame Geneviève Paré, 25 mai 2021, p. 21-22.

[29]  Interrogatoire préalable à l’instruction de M. Cleverson Eliseu Ribeiro de Lima, 21 décembre 2021, p. 24.

[30]  Interrogatoire préalable à l’instruction de Madame Geneviève Paré, 25 mai 2021, p. 15 (dossier Cleverson).

[31]  Id., p. 16.

[32]  Pièce PC-9.

[33]  Pièce DC-4.

[34]  Interrogatoire préalable à l’instruction de Madame Geneviève Paré, 25 mai 2021, p. 35.

[35]  AMEC Usinage inc. c. De Lima, 2023 QCCQ 4794, par. 12.

[36]  L.Q. 1991, c. 64.

[37]  Fernand MORIN, « Démission et congédiement : la difficile parité des règles de droit applicables à ces deux actes », (2013) 43 R.G.D. 637, p. 653.

[38]  Art. 2085 C.c.Q.

[39]  Société des casinos du Québec inc. c. Association des cadres de la Société des casinos du Québec, 2024 CSC 13, par. 188.

[40]  Modern Concept d’entretien inc. c. Comité paritaire de l’entretien d’édifices publics de la région de Québec, 2019 CSC 28, [2019] 2 R.C.S. 406, par. 83. Voir au même effet : Cabiakman c. Industrielle-Alliance Cie d’Assurance sur la Vie, 2004 CSC 55, [2004] 3 R.C.S. 195, par. 28.

[41]  Slaight Communications Inc. c. Davidson, 1989 CanLII 92 (CSC), [1989] 1 R.C.S. 1038, p. 1051 et 1082.

[42]  Wallace c. United Grain Growers Ltd., 1997 CanLII 332 (CSC), [1997] 3 R.C.S. 701, par. 92.

[43]  Québec (Commission des normes du travail) c. Asphalte Desjardins inc., 2014 CSC 51 (CanLII), [2014] 2 R.C.S. 514, par. 34, 58 et 64; Stéphanie BERNSTEIN, « Le droit à des conditions de travail justes et favorables : un retour aux fondements de la « décence » au travail », dans Pierre BOSSET et Lucie LAMARCHE (dir.), Droit de cité pour les droits économiques, sociaux et culturels, Cowansville, Éditions Yvon Blais, 2011, p. 93, aux pages 136-137 : « […] les tribunaux reconnaissent l’inégalité de pouvoir entre travailleurs et employeurs et la nécessité de leur accorder une certaine protection dans le cadre de cette relation ».

[44]  British Columbia Human Rights Tribunal c. Schrenk, 2017 CSC 62, [2017] 2 R.C.S. 795, par. 44.

[45]  Delisle c. Canada (Sous-procureur général), 1999 CanLII 649 (CSC), [1999] 2 R.C.S. 989, par. 67.

[46]  T.U.A.C., section locale 1518, c. KMart Canada Ltd., 1999 CanLII 650 (CSC), [1999] 2 R.C.S. 1083, par. 25.

[47]  Richard-Alexandre LANIEL et Guillaume LAVOIE, « La validité du contrat de travail et l’absence de permis de travail régulier : vers une protection élargie pour les travailleurs migrants? », dans BARREAU DU QUÉBEC, Développements récents en droit du travail, vol. 475, Montréal, Éditions Yvon Blais, 2020, 259, p. 262; Dominguez v. Northland Properties Corporation, 2012 BCSC 328, par. 143 et 263.

[48]  A.G. Rés. 45/158, Doc. N.U. A/Res/45/158, 18 décembre 1990 (entrée en vigueur le 1er juillet 2003).

[49]  Québec (Procureure générale) c. 9147-0732 Québec inc., 2020 CSC 32, [2020] 3 R.C.S. 426, par. 35; Société des casinos du Québec inc. c. Association des cadres de la Société des casinos du Québec, 2024 CSC 13, par. 196.

[50]  Dalia GESUALDI-FECTEAU, « Le droit comme rempart utile? L’usage par les travailleurs étrangers temporaires des ressources proposées par le droit du travail », (2015) 45 R.G.D. 531, p. 535, 541 et 572.

[51]  Franco VILLANUEVA, Daniel CRESPO-VILLAREAL, Stéphanie BERNSTEIN et al., « Les travailleurs étrangers temporaires au Québec: le paradis, un peu plus loin », (2015) Revue de droit comparé du travail et de la sécurité sociale 58-69.

[52]  GESUALDI-FECTEAU, préc., note 50, p. 540; LANIEL et LAVOIE, préc., note 47, p. 300-301; Travailleuses et travailleurs unis de l'alimentation et du commerce, section locale 501 (TUAC-FTQ) et Savoura (griefs individuels, Noe Ricardo Arteaga et un autre), 2014 QCTA 1035, 2015EXP-744 (T.A.), par. 118 et 154; K-Trail inc. et Rebai, 2023 QCTAT 1710, 2023EXPT-1035 (T.A.T.), par. 50.

[53]  Sahlaoui c. 2330-2029 Québec inc. (Médicus), 2021 QCCA 1310, 2021EXP-2313 (C.A.) (Requête pour autorisation de pourvoi à la Cour suprême rejetée (C.S. Can., 2022-03-03) 39918), par. 33, 36, 39, 41 et 42; Traffic Tech International inc. c. Milgram et Compagnie ltée, 2015 QCCA 2164, 2016EXP-284 (C.A.), par. 9; Équipements G.N. Johnston ltée c. Brideau, 2017 QCCQ 8414, 2017EXP-2360 (C.Q.), par. 46 et 47.

[54]  Dans l’affaire Farms c. Canada (Emploi et Développement social), 2017 CF 302, par. 31, la Cour fédérale décrit les travailleurs étrangers temporaires comme étant « très vulnérables, vu leur situation d’emploi fragile qui n’est pas assortie des mesures de protection habituelles empêchant les abus et qui sont offertes à la plupart des travailleurs canadiens ». 

[55]  RLRQ c N-1.1.

[56]  Id., art. 82, al. 1.

[57]  Québec (Commission des normes du travail) c. Asphalte Desjardins inc., préc., note 43, par. 31.

[58]  Interrogatoire préalable à l’instruction de Madame Geneviève Paré, 25 mai 2021, p. 20. À l’audience, elle évoque des « postes critiques ». 

[59]  Id., p. 20.

[60]  Id., p. 13.

[61]  Id.

[62]  Id., p. 14.

[63]  Id., p. 17.

[64]  Hélène OUIMET, Travail plus : le travail et vos droits, 11e éd., Montréal, Wilson et Lafleur ltée, 2022, p. 98.

[65]  Fernand MORIN, Jean-Yves BRIÈRE, Jean-Pierre VILLAGGI et Dominic ROUX, Droit de l’emploi au Québec, 4e éd., Montréal, Wilson et Lafleur ltée, 2010, p. 470 (par. II-168).

[66]  Id., p. 474 (par. II-169).

[67]  Pièce PI-13.

[68]  Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, DORS/2002-227, art. 209.3 (1) a) (iv).

[69]  Pièce PI-13.

[70]  Pièces P!-7 et PC-1.

[71]  Interrogatoire préalable à l’instruction de M. Ivan Goulart de Araujo, 21 décembre 2021, p. 16, 22, 23 et 27.

[72]  Id.

[73]  Id., p. 18.

[74]  Id., p. 23.

[75]  Id., p. 27.

[76]  Id., p. 19.

[77]  Interrogatoire préalable à l’instruction de M. Cleverson Eliseu Ribeiro de Lima, 21 décembre 2021, p. 16 et 17.

[78]  Règlement sur l’immigration et la protection des réfugiés, préc., note 68, art. 203 (3) d).

[79]  Farms c. Canada (Emploi et Développement social), préc., note 54, par. 49 et 50 (Nos soulignements).

[80]  Interrogatoire préalable à l’instruction de M. Ivan Goulart de Araujo, 21 décembre 2021, p. 61 et 63; Plan d’argumentation de la demanderesse / Défenderesse reconventionnelle Amec Usinage inc., 17 avril 2024, p. 6 (par. 22).

[81]  Interrogatoire préalable à l’instruction de M. Ivan Goulart de Araujo, 21 décembre 2021, p. 64.

[82]  Id.

[83]  Id., p. 66-67

[84]  Interrogatoire préalable à l’instruction de Madame Geneviève Paré, 25 mai 2021, p. 30 (dossier Ivan).

[85]  Interrogatoire préalable à l’instruction de M. Ivan Goulart de Araujo, 21 décembre 2021, p. 77.

[87]  Id., p. 32.

[88]  Id.

[89]  2021 QCCQ 8609, 2021EXPT-1738 (C.Q.),

[90]  Id., par. 50 (Références omises).

[91]  Id., par. 55.

[92]  2022 QCCQ 4417, 2022EXPT-1674 (C.Q.).

[93]  2023 QCCQ 583.

[94]  Id., par. 21.

[95]  Id., par. 27.

[96]  2016 QCCS 355, 2016EXP-599 (C.S.).

[97]  Id., par. 61.

[98]  2018 QCCS 3793, 2018EXP-2514 (C.S.).

[99]  Id., par. 69.

[100]  Id., par. 1, 47 et 53.

[101]  2018 QCCA 1895, 2018EXP-3081 (C.A.).

[102]  Id., par. 78.

[103]  2011 QCCQ 5084.

[104]  Id., par. 18.

[105]  2017 QCCQ 11013. 

[106]  Id., par. 12, 28 et 37.

[107]  Art. 2091 C.c.Q.

[108]  Art. 2094 C.c.Q. Dans son Plan d’argumentation de la demanderesse / Défenderesse reconventionnelle Amec Usinage inc., 17 avril 2024, l’employeur soutient, aux paragraphes 27 et 35, que la jurisprudence l’autorise à « réclamer une indemnité pour absence de préavis raisonnable, et ce, même en présence d’une situation pouvant être qualifiée de « motif sérieux ». Une telle affirmation apparaît manifestement erronée puisqu’elle heurte de front le libellé même de l’article 2094 C.c.Q.   

[109]  Traffic Tech inc. c. Kennel, préc., note 96, par. 48.

[110]  Pierre VERGE, Gilles TRUDEAU et Guylaine VALLÉE, Le droit du travail par ses sources, Montréal, Thémis, 2006, p. 339.

[111]  MORIN, BRIÈRE, VILLAGGI et ROUX, préc., note 65, p. 414 (par. II-136).

[112]  Loi sur les normes du travail, préc., note 55, art. 52.

[114]  Interrogatoire préalable à l’instruction de Madame Geneviève Paré, 25 mai 2021, p. 22 (dossier Ivan).

[115]  Id., p. 89.

[116]  Préc., note 68.

[117]  Id., art. 196.2 (1) c).

[118]  Id., art. 196.1 (1) d).

[119]  GOUVERNEMENT DU CANADA, Permis de travail ouverts pour les travailleurs vulnérables [R207.1 – A72] – Programme de mobilité internationale (PMI) [En ligne : https://www.canada.ca/fr/immigration-refugies-citoyennete/organisation/publications-guides/bulletins-guides-operationnels/residents-temporaires/travailleurs-etrangers/travailleurs-vulnerables.html]

[120]  LANIEL et LAVOIE, préc., note 47, p. 300.

[121]  Dufault c. Savaria Experts-conseils inc., 2015 QCCS 6063, 2016EXP-518 (C.S.), par. 35 et 36;               9228-3878 Québec inc. c. Côté, 2019 QCCQ 5530, 2019EXP-2830 (C.Q.), par. 43 et 44.

[122]  Interrogatoire préalable à l’instruction de M. Cleverson Eliseu Ribeiro de Lima, 21 décembre 2021, p. 32-33.

[123]  Art. 8 C.c.Q.; Racine & Chamberland inc. c. Ouellette, 2001 CanLII 15281 (QC CS), J.E. 2001-2160 (C.S.), par. 24.

[124]  Art. 1607 et 1613 C.c.Q.; Trois-Rivières Location inc. c. Zulueta Grimaldo, 2022 QCCQ 8623, 2023EXP-131 (C.Q.).

[125]  Interrogatoire préalable à l’instruction de Madame Geneviève Paré, 25 mai 2021, p. 18 (dossier Cleverson).

[126]  Pièce PI-5.

[127]  Comme le Tribunal en convient dans l’affaire Trois-Rivières Location inc. c. Zulueta Grimaldo, préc., note 124, par. 77 : « Il est par ailleurs facilement concevable que le recrutement de travailleurs étrangers puisse, en principe, nécessiter des démarches plus complexes, plus longues et plus dispendieuses que le recrutement de travailleurs locaux ou régionaux ». 

[128]  Pièce PI-17 : ventilation de la somme réclamée.

[129]  Samuel GRONDIN, « Indemnité additionnelle, discrétion et démesure : pour une actualisation des paramètres de l’exception de la réclamation grossièrement exagérée », (2023) 54 Revue de droit d’Ottawa 63, p. 66, ainsi que la jurisprudence citée à sa note 4 (Nos italiques).

[130]  Pièce DI-7.

[131]  Pièce DI-3.

[133]  Interrogatoire préalable à l’instruction de Madame Geneviève Paré, 25 mai 2021, p. 42 (dossier Ivan).

[134]  Voir, par analogie, Droit de la famille — 21996, 2021 QCCS 2289, par. 37 et 38.

[135]  Préc., note 55, art. 52. La juriste GESUALDI-FECTEAU, préc., note 50, p. 558, fait remarquer, à juste titre, que « la loi n’envisage pas la notion d’« heures supplémentaires facultatives », laquelle permettrait au salarié, en toutes circonstances, de refuser de travailler au-delà de ses heures normales de travail ».

[136]  GÉSUALDI-FECTEAU, id., p. 542, observe que les travailleurs étrangers temporaires (TET) n’ont « généralement, pas d’autres choix que d’adhérer aux conditions qui leur sont proposées ». Voir également : VILLANUEVA, CRESPO-VILLAREAL, BERNSTEIN et al., préc., note 51 : « Les TET se retrouvent donc parfois à choisir entre le silence et la continuation de leur séjour, ou le dépôt d’une plainte et les conséquences qui en découleraient (non réembauche, renvoi immédiat au pays d’origine, etc.). ».

[137]  Interrogatoire préalable à l’instruction de M. Ivan Goulart de Araujo, 21 décembre 2021, p. 101-102.

[138]  VERGE, TRUDEAU et VALLÉE, préc., note 110, p. 281.

[139]  Art. 7 C.c.Q. Comme le reconnaît la juriste GÉSUALI-FECTEAU, préc., note 50, p. 540 : « […] les restrictions à la mobilité professionnelle des travailleurs étrangers temporaires, leur dépendance protéiforme à l’employeur et les conditions dans lesquelles se déroulent leur emploi et leur séjour les rendent plus vulnérables aux abus » (Notre soulignement).

[140]  Interrogatoire préalable à l’instruction de M. Ivan Goulart de Araujo, 21 décembre 2021, p. 104.             

[141]  Id., p. 90.

[142]  Id., p. 105.

[144]  Pièce PI-8.

[145]  Pièce PI-9.

[146]  Sahlaoui c. 2330-2029 Québec inc. (Médicus), préc., note 53, par. 34 à 36 (Références omises) (Nos soulignements). Voir également : Ateliers Présiko inc. c. Usinage ProLC inc., 2023 QCCQ 10444, par. 78 à 80 et 141.

[147]  Pièce PI-10.

[148]  Pièce DI-3.

[149]  Interrogatoire à l’audience de M. Ivan Goulart de Araujo par Me François Lepage, 17 avril 2024, entre 15h18 et 15h19.

[150]  Pièce DC-3.

[151]  Ville de Québec c. ITE Construction inc., 2021 QCCA 1628, 2021EXP-2732 (C.A.), par. 40.

[152]  Therrien c. Lemieux, 2024 QCCS 3441, par. 223.

[153]  Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse (X) c. Commission scolaire de Montréal, 2017 QCCA 286, 2017EXP-695 (C.A.) (Requête pour autorisation de pourvoi à la Cour suprême rejetée (C.S. Can., 2017-08-17) 37538), par. 63 (Référence omise).

[154]  Carignan c. Maison Carignan inc., 2020 QCCA 1042, 2020EXP-1984 (C.A.), par. 34.

[155]  RLRQ c C-25.01.

[156]  COMMENTAIRES DE LA MINISTRE DE LA JUSTICE, Code de procédure civile, chapitre C-25.01, Montréal, SOQUIJ / Wilson et Lafleur ltée, 2015, p. 63.

[157]  Biron c. 150 Marchand Holdings inc., 2020 QCCA 1537, 2020EXP-2694 (C.A.), par. 126; Sénécal c. Mayer, 2022 QCCA 225, 2022EXP-602 (C.A.), par. 4.

[158]  Ville de Sherbrooke c. Homans, 2021 QCCA 1866, 2022EXP-90 (C.A.), par. 235 (Références omises) (Notre soulignement).

[159]  Biron c. 150 Marchand Holdings inc., préc., note 157, par. 103.

[160]  2009 CSC 43, [2009] 3 R.C.S. 65.

[161]  Id., par. 43.

[162]  Gestion George Kyritsis inc. c. Balabanian, 2024 QCCS 64, 2024EXP-315 (C.S.), par. 341.

[163]  Per4ma Sports Technology Ltd. c. 172142 Canada inc., 2022 QCCS 925, 2022EXP-1240 (C.S. (Requête de bene esse pour permission d'appeler rejetée : 2023 QCCA 555) (Requête pour autorisation de pourvoi à la Cour suprême rejetée (C.S. Can., 2024-01-11) 40794), par. 169.

[164]  Code de procédure civile, préc., note 155, art. 553.

[165]  Royal Lepage commercial inc. c. 109650 Canada Ltd., 2007 QCCA 915, J.E. 2007-1325 (C.A.), par. 46.

[166]  El-Hachem c. Décary, 2012 QCCA 2071, 2012EXP-4223 (C.A.), par. 9.

[167]  Charland c. Lessard, 2015 QCCA 14, 2015EXP-278 (C.A.), par. 191.

[168]  2008 QCCQ 11665, D.T.E. 2009T-27 (C.Q.) (Requête pour permission d'appeler rejetée : 2008 QCCA 2474).

[169]  Id., par. 64, 72 et 73.

[170]  Lafond c. Riopel, 2000 CanLII 18302 (QC CQ), J.E. 2000-1948 (C.Q.) (Requête pour permission d'appeler rejetée (C.A., 2000-11-23) 500-09-010200-004), par. 59.

[171]  Pièce DI-8b.

[172]  Pièce DI-8a.

[173]  Plan d’argumentation de la demanderesse / Défenderesse reconventionnelle Amec Usinage inc., 17 avril 2024, p. 29 (par. 91).

[174]  Sawdon c. Dennis-Trudeau, 2006 QCCA 553, J.E. 2006-888 (C.A.), par. 53.

[175]  Consortium Promecan inc. (Syndic de), 2011 QCCA 1031, J.E. 2011-1049 (C.A.), par. 22; Michaud Lebel c. Miville-Dechêne, 2017 QCCQ 12671, par. 47. 

[176]  RLRQ c B-1.

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