Décision

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Forgues c. R.

2020 QCCS 1891

COUR SUPÉRIEURE

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

 QUÉBEC

 

 

 

N° :

200-36-002862-191

 

 

 

DATE :

22 juin 2020

______________________________________________________________________

 

SOUS LA PRÉSIDENCE DE

L’HONORABLE

louis dionne, J.C.S.

______________________________________________________________________

 

 

LINDA FORGUES

Appelante

 

c.

 

SA MAJESTÉ LA REINE

Intimée

 

______________________________________________________________________

 

JUGEMENT

______________________________________________________________________

 

L’APERÇU

[1]           Linda Forgues en appelle d’une décision rendue par le juge Jacques Ouellet, j.c.m., le 27 mai 2019 l’ayant trouvée coupable d’avoir eu en sa possession une arme dans un dessein dangereux pour la paix publique[1] alors qu’elle a été arrêtée suite à une manifestation tenue à Québec pendant la période où se déroulait le G7.

LE CONTEXTE

[2]           Les 8 et 9 juin 2018, la région de Charlevoix a accueilli le G7 à l’Hôtel Fairmont le manoir Richelieu situé à La Malbaie.

[3]           Le 8 juin, entre huit heures (8 h) et dix heures (10 h), une première manifestation s’est déroulée sur le boulevard Sainte-Anne, à Québec.

[4]           Vers onze heures (11 h), une autre manifestation a lieu sur l’avenue Honoré-Mercier, entre les rues des Sœurs de la Charité et la Côte de la Potasse. La rue Honoré-Mercier est une artère importante pour la circulation automobile.

[5]           Entre trente (30) et quarante (40) personnes participent à la manifestation, certains se lançant un ballon, d’autres discutent et l’un d’eux joue de la guitare. Les manifestants portent des masques et des sacs à dos et crient leur mépris du règlement municipal[2]. Plusieurs touristes sont présents et circulent à travers les manifestants et la police.

[6]           Sur la ligne, à la hauteur de la rue des Sœurs de la Charité, des manifestants tiennent des banderoles et chantent des slogans, les mêmes banderoles que lors de la manifestation de huit heures (8 h) sur le boulevard Sainte-Anne.

[7]           Quelques dizaines de mètres derrière la ligne, à la hauteur de la Côte de la Potasse, deux (2) divans et cinq (5) chaises sont disposés là ou environ une douzaine de personnes sont réunies.

[8]           À partir de onze heures vingt-huit (11 h 28), des avis de dispersion sont donnés et la manifestation est déclarée illégale.

[9]           Vers onze heures trente (11 h 30), l’appelante rejoint la manifestation sur l’avenue Honoré-Mercier, près de l’intersection Côte de la Potasse.

[10]        Vers onze heures trente-six (11 h 36), elle marche en retrait sur le côté ouest de l’avenue Honoré-Mercier jusqu’à la ligne avant, revient sur la ligne arrière et discute avec quelques personnes.

[11]        Vers onze heures trente-neuf (11 h 39), un manifestant non identifié enflamme les divans. La plupart des personnes présentes quittent alors les lieux.

[12]        L’appelante emprunte l’escalier donnant accès à l’ancien terrain du Patro St-Vincent de Paul situé sur la Côte d’Abraham.

[13]        Elle marche ensuite en compagnie d’un groupe de manifestants jusqu’à la rue Turnbull, puis dans la ruelle près de la rue Crémazie.

[14]        Tout au long de ce trajet, des pelotons de policiers suivent les individus. Aucun incident n’est constaté.

[15]        Vers midi quinze (12 h 15), quatre (4) personnes dont l’appelante sont arrêtées dans une ruelle au nord de la rue Crémazie pour avoir participé à un attroupement illégal lors de la manifestation qui s’est déroulée plus tôt sur l’avenue Honoré-Mercier.

[16]        Les policiers Simon Auclair et Raphaël Paquet procèdent à l’arrestation de l’appelante.

[17]        Lors de la fouille incidente à l’arrestation de l’appelante, les policiers découvrent, notamment dans son sac à dos, une petite bobonne de répulsif canin de marque Bodyguard, identifiée comme étant « Stream Dog Repellent »[3] ainsi que des foulards de couleurs différentes, un masque à gaz et deux (2) masques de protection.

[18]        Le 8 juin 2018, en soirée, l’appelante comparaît à la cour municipale de Québec sous les accusations suivantes :

1)    Le ou vers le 8 juin 2018, à Québec, district de Québec, a participé à un attroupement illégal, commettant ainsi l’infraction punissable sur déclaration sommaire de culpabilité contrairement à l’article 66 (1) du Code criminel.

2)    Le ou vers le 8 juin 2018, à Québec, district de Québec, a commis un méfait à l’égard d’un bien d’une valeur ne dépassant pas 5 000$, soit un divan, commettant ainsi l’infraction punissable sur déclaration sommaire de culpabilité prévue à l’article 430 (1) a) (4) b) du Code criminel.

3)    Le ou vers le 8 juin 2018, à Québec, district de Québec, a interrompu ou gêné l’emploi, la jouissance ou l’exploitation légitime d’un bien d’une valeur ne dépassant pas 5 000$, soit : la chaussée de l’artère Honoré-Mercier, commettant ainsi l’infraction punissable sur déclaration sommaire de culpabilité prévue à l’article 430 (1) c) (4) b) du Code criminel.

4)    Le ou vers le 8 juin 2018, à Québec, district de Québec, a porté ou a eu en sa possession une arme, dans un dessein dangereux pour la paix publique, commettant ainsi l’infraction punissable sur déclaration sommaire de culpabilité prévue à l’article 88 (2) b) du Code criminel.

[19]        Le 11 juin 2018, à la date fixée pour l’enquête sur remise en liberté, l’appelante est remise en liberté moyennant un dépôt de cinq cents dollars (500 $) et est astreinte aux conditions suivantes : garder la paix et avoir une bonne conduite, ne pas communiquer avec les autres accusés ni avec les membres du Réseau de résistance anti-G7 (sauf le comité légal) et ne pas pénétrer dans un certain quadrilatère de la Ville de Québec.

[20]        Le 19 décembre 2018, sur demande du ministère public, le Tribunal retire le chef de méfait et celui d’avoir gêné l’emploi d’un bien.

[21]        Le 8 février 2018, le procureur de l’appelante dépose une requête fondée sur les articles 8, 9, 24 (1) et (2) de la Charte canadienne des droits et libertés.

[22]        L’appelante demande l’arrêt des procédures en vertu de l’article 24(1) de la Charte pour le chef d’attroupement illégal[4] et l’exclusion de la preuve en vertu de l’article 24(2) de la Charte pour le chef de port d’arme dans un dessein dangereux pour la paix publique[5].

[23]        Les 11 et 12 mars 2019, l’appelante subit son procès, conjointement avec une autre personne devant le juge d’instance relativement aux chefs 1 et 4. Lors de son procès, elle ne témoigne pas.

[24]        Le 27 mai 2019, le juge d’instance conclut à l’arrestation illégale de l’appelante. Il exclut les éléments de preuve relatifs à l’attroupement illégal en application de l’article 24(1) de la Charte et l’acquitte du chef 1.

[25]        Quant au port d’arme dans un dessein dangereux pour la paix publique, il conclut que l’arrestation et la fouille étaient illégales, mais il décide de ne pas exclure la preuve sous l’article 24(2) de la Charte. Il déclare l’appelante coupable de port d’arme dans un dessein dangereux pour la paix publique, d’où le présent appel.

Le jugement attaqué

[26]        Le juge d’instance résume la preuve de la poursuite aux pages deux (2) à sept (7) de son jugement sur la requête en arrêt des procédures et en exclusion de la preuve du 27 mai 2019.

[27]        Il retient que le 8 juin 2018, le lieutenant Steve Picard du Service de police de la Ville de Québec, qui est alors sergent, est le chef de peloton pour le groupe « Echo », une unité de maintien de l’ordre.

[28]        À compter de six heures trente (6 h 30), il est mobilisé dans le secteur du boulevard Ste-Anne pour une manifestation devant s’y tenir.

[29]        Cette manifestation débute vers huit heures (8 h) pour se terminer aux alentours de dix heures (10 h). Elle a été déclarée illégale et les manifestants se sont dispersés.

[30]        Peu avant onze heures (11 h), un groupe entrave la circulation sur la rue Honoré-Mercier à l’intersection de la Côte de la Potasse.

[31]        Le lieutenant Picard et son peloton se rendent sur les lieux. À son arrivée, il valide la situation avec le sergent qui commande la force mobile déjà sur place.

[32]        Les manifestants ne veulent pas bouger malgré l’ordre de se déplacer. Ils portent des sacs à dos et des masques.

[33]        Le lieutenant Picard déploie son peloton sur la rue Honoré-Mercier et utilise un porte-voix pour diffuser un message, en anglais et en français, que la manifestation est illégale.

[34]        Une carte des lieux ainsi que des images de la manifestation captées par des caméras sont déposées[6].

[35]        Entre onze heures quinze (11 h 15) et onze heures trente (11 h 30), deux (2) avis verbaux sont donnés relativement à l’illégalité de la manifestation ainsi qu’un ordre de se disperser sur le trottoir. Un autre avis est donné et c’est alors que l’on peut voir une fumée noire apparaître et provenant d’un fauteuil et d’une chaise laissés sur place pour bloquer la circulation.

[36]        Une fois le feu mis au mobilier, un regroupement de manifestants quitte les lieux en courant en direction sud.

[37]        Vers onze heure trente-neuf (11 h 39) les manifestants se sont regroupés sur le terrain vacant d’une église démolie.

[38]        Des policiers interviennent pour que les gens quittent l’endroit. Ces derniers quittent alors en direction de la rue Saint-Jean-Baptiste vers le sud-ouest. Le groupe composé d’environ cinquante (50) personnes est rattrapé par les policiers au coin de la Côte Sainte-Geneviève et de la rue d’Aiguillon. Le groupe se scinde en deux (2) et une première partie continue en direction ouest sur la rue d’Aiguillon.

[39]        Le lieutenant Picard est informé par la policière Julie Papineau (chef du peloton « Bravo ») que les manifestants s’en viennent sur l’avenue Turnbull.

[40]        Il est informé par radio que l’appelante a été arrêtée dans le secteur de la rue Lockwell. Il ne connaît pas personnellement cette dernière et il ignore qui a donné l’ordre d’arrêter les manifestants pour attroupement illégal.

[41]        C’est le policier Simon Auclair qui intercepte et met en état d’arrestation l’appelante après avoir déduit que les gens se présentant dans la ruelle en direction nord vers la rue Crémazie provenaient de l’attroupement illégal sur la rue Honoré-Mercier.

 

[42]        Ce dernier n’a fait aucune constatation personnelle de la commission de l’infraction reprochée.

[43]        Après avoir analysé la preuve relative à l’arrestation, le juge d’instance conclut que l’arrestation de l’appelante est illégale au sens de l’article 495(1)b) C.cr. puisque le policier Auclair n’est pas le policier ayant trouvé l’appelante en train de commettre l’infraction criminelle de participation à un attroupement illégal[7] :

[100]     Le Tribunal conclut que l’arrestation des défenderesses était illégale par l’application de l’article 495(1)b).[8]

[44]        Le juge d’instance reprend par la suite son analyse en se penchant sur la détention arbitraire. Il mentionne :

[101]     Bien qu’illégales, l’arrestation et la détention qui s’ensuivent ne sont pas nécessairement arbitraires. R. c. Duguay.[9]

[Référence omise]

[45]        Il ajoute :

[104]     De l’avis du Tribunal, les policiers ont agi en ayant obtenu les informations permettant d’avoir des motifs objectifs et subjectifs de mettre les défenderesses en état d’arrestation. Ils ont agi de bonne foi et non de façon arbitraire.[10]

[46]        Analysant le remède approprié dans les circonstances, la juge d’instance conclut que la preuve ne permet pas d’affirmer que la violation est un de ces « cas des plus manifestes »[11]. Cependant, il estime que la tenue d’un procès serait inéquitable puisque basé sur une arrestation qui n’aurait pas dû être effectuée[12] et il exclut la preuve relative au chef d’accusation d’attroupement illégal, ce qui conduit à l’acquittement de l’appelante sur le chef 1.

[47]        Quant à la fouille de l’appelante, le juge d’instance, d’entrée de jeu, affirme :

[128]     Le Tribunal ayant déterminé que l’arrestation de la défenderesse Forgues était illégale, il s’ensuit que la fouille accessoire l’est également.[13]

[48]        Plus loin, il ajoute :

[129]     Dans le contexte, il y a donc violation de la Charte telle qu’alléguée par la défense et le Tribunal doit maintenant évaluer si l’exclusion de la preuve requise en vertu de l’article 24(2) de la Charte doit s’appliquer.[14]

[49]        Il conclut qu’il n’y a pas lieu d’exclure la preuve obtenue par la fouille estimant qu’il y a un intérêt à ce que l’affaire soit jugée au fond[15].

[50]        Après avoir revu le libellé de l’article 88 C.cr. prévoyant l’infraction de possession d’une arme dans un dessein dangereux pour la paix publique, ses éléments constitutifs et limité le litige à la seule question du dessein, le juge d’instance retient de la preuve que les objets saisis sont de toute évidence destinés à se protéger des gaz employés par la police, soit à se dissimuler le visage ou soit à résister à une arrestation éventuelle.

[51]        Il ajoute :

[155]     Les seuls intervenants présents sont les manifestants et les policiers. On peut affirmer que la défenderesse ne craint pas ses compagnons ou compagnes d’aventure; ne restent donc que les policiers.[16]

[52]        Quant au répulsif, il retient que sa possession n’est pas illégale en soi, mais considérant le contexte de manifestation en cette fin d’avant-midi de juin, il conclut :

[159]     Le Tribunal est convaincu hors de tout doute raisonnable que la seule utilisation projetée est celle d’utiliser l’objet contre les policiers. Son utilisation causerait éventuellement des lésions corporelles et nous serions alors dans le cadre d’une manifestation illégale au sens du règlement municipal.

[160]     Selon ce qui est mentionné à la jurisprudence, il y aurait alors violation de la paix publique et la possession du répulsif est dans un dessein dangereux.[17]

LES QUESTIONS EN LITIGE

1.    Le juge de première instance a-t-il rendu des verdicts contradictoires et susceptibles de déconsidérer l’administration de la justice en n’écartant pas la preuve de l’infraction de port d’arme dans un dessein dangereux pour la paix publique alors qu’il venait de l’exclure pour celle d’attroupement illégal?

2.    Le juge de première instance a-t-il rendu un verdict déraisonnable sur le chef de port d’arme dans un dessein dangereux pour la paix publique?

 

ANALYSE

[53]        L’article 813 C.cr. prévoit que sauf disposition contraire de la loi, le défendeur dans des procédures prévues par la partie XXVII C. cr. peut appeler à la Cour d’appel d’une condamnation rendue contre lui.

[54]        L’article 822 C. cr. prévoit, entre autres, qu’en cas d’appel d’une condamnation pour une infraction, poursuivie par déclaration sommaire de culpabilité, l’article 686 C. cr. s’applique avec les adaptations nécessaires.

[55]        L’article 686 C. cr. prévoit que la Cour d’appel peut admettre l’appel si elle est d’avis que le verdict est déraisonnable ou ne peut pas s’appuyer sur la preuve, si le jugement du tribunal de première instance constitue une décision erronée sur une question de droit ou s’il y a eu erreur judiciaire.

La première question

[56]        Le juge de première instance a-t-il rendu des verdicts contradictoires et susceptibles de déconsidérer l’administration de la justice en n’écartant pas la preuve de l’infraction de port d’arme dans un dessein dangereux pour la paix publique alors qu’il venait de l’exclure pour celle d’attroupement illégal?

[57]        Considérant la conclusion à laquelle en arrive le Tribunal sur la deuxième question en litige, il n’y a pas lieu de se prononcer sur cette première question.

La deuxième question

[58]        Le juge de première instance a-t-il rendu un verdict déraisonnable sur le chef de port d’arme dans un dessein dangereux pour la paix publique?

[59]        L’article 88 C. cr. se lit comme suit :

 (1)   Commet une infraction quiconque porte ou a en sa possession une arme, une imitation d’arme, un dispositif prohibé, des munitions ou des munitions prohibées dans un dessein dangereux pour la paix publique ou en vue de commettre une infraction.

[60]        Dans Dubourg c. R.[18], la Cour d’appel précise les principes applicables à l’appel d’un verdict qualifié de déraisonnable au motif que le juge du procès aurait erré dans l’appréciation de la preuve circonstancielle.

[18]       […]  Un verdict est déraisonnable s’il ne peut s’appuyer sur une évaluation pondérée et soigneuse de l’ensemble des éléments de preuve ou s’il se fonde sur un raisonnement illogique. L’exercice requiert une importante déférence envers l’appréciation de la preuve faite en première instance par le juge des faits. Il ne s’agit pas de savoir si la Cour en serait arrivée au même verdict, mais si une évaluation raisonnable de la preuve peut y mener.  […]

[19]       […]  La Cour suprême dans Villaroman a établi qu’une preuve circonstancielle hors de tout doute raisonnable est faite lorsque la seule inférence raisonnable qu’elle peut soutenir est celle de la culpabilité de l’accusé. Si ce n’est pas le cas et qu’une inférence raisonnable est compatible avec son innocence, il subsiste forcément un doute raisonnable et il doit être acquitté. Les inférences compatibles avec l’innocence n’ont pas à être fondées sur la preuve ou sur des faits prouvés, puisque le doute raisonnable peut découler de l’absence de preuve.

[20]       […]  En résumé, les conclusions tirées de la preuve par le juge des faits et la conclusion que la seule inférence raisonnable est celle de la culpabilité sont-elles raisonnables?

[21]       Pour répondre à cette question, il faut souligner que lorsque la Cour dans Villaroman parle de « la seule inférence raisonnable», il faut être exact sur le sens de ces mots. Deux précisions s’imposent. Premièrement, comme la Cour le dit, la seule inférence raisonnable se distingue de la seule inférence rationnelle puisqu’une inférence peut être rationnelle sur un plan logique sans pour autant être raisonnable après une évaluation de tous les éléments de preuve et même l’absence de la preuve. Deuxièmement, et dans le même ordre d’idées, la seule inférence raisonnable n’implique aucunement que cette inférence soit la seule possible dans le même sens qu’une preuve hors de tout doute raisonnable n’équivaut pas à une preuve hors de tout doute possible.

[Références omises]

[61]        L’intention rattachée à l’infraction de port ou de possession d’arme dans un dessein dangereux pour la paix publique représente l’élément central. Le port ou la possession doit avoir lieu dans le but de constituer un danger pour la paix publique ou de commettre une infraction. La preuve que l’acte est effectivement dangereux pour la paix publique est insuffisante, à moins qu’il soit démontré que l’accusé visait cet objectif. Il s’agit donc d’une infraction comportant une intention spécifique[19].

[62]        C’est donc dire que l’acte prohibé doit être accompli dans l’intention d’obtenir un résultat précis.

 

 

[63]        Le juge Bastarache dans l’arrêt R. c. Kerr[20] rappelle que le ministère public doit établir que l’accusé avait l’arme en sa possession et que cette possession visait un dessein dangereux pour la paix publique. Il ajoute que selon la doctrine, la perpétration de cette infraction exige une intention spécifique comportant à la fois une composante subjective et une composante objective.

[64]        Quant au critère à appliquer pour déterminer l’intention requise, il mentionne :

            Une certaine confusion subsiste dans la jurisprudence quant au critère qu’il convient d’appliquer pour déterminer l’intention. À mon avis, dans l’arrêt Nelson, précité, la Cour d’appel d’Ontario a appliqué la démarche appropriée — un critère à la fois subjectif et objectif. Suivant cette démarche, le juge des faits doit tout d’abord déterminer le dessein de l’accusé, ce qu’il fait d’une manière subjective. Le juge des faits doit ensuite décider si, compte tenu de toutes les circonstances, ce dessein était dangereux pour la paix publique, ce qu’il fait d’une manière objective.[21]

[65]        Il doit également y avoir, à un certain moment, une concomitance ou une rencontre entre la possession et le dessein dangereux pour la paix publique[22].

[66]        Traitant plus spécifiquement de la détermination de l’intention subjective, le juge Bastarache précise :

                Il va sans dire que la détermination de l’intention subjective de l’accusé peut comporter la prise en compte d’éléments objectifs : R. c. Hundal, [1993] 1 R.C.S. 867, R. c. Théroux, [1993] 2 R.C.S. 5.  La distinction entre une norme fondamentale subjective et une analyse objective de la preuve est bien établie.  Comme la cour l’a affirmé dans Nelson, précité, p. 31 :

       [traduction] L’intention subjective de l’accusé, révélée par son témoignage, est un facteur, mais seulement un parmi d’autres, dont le juge du procès doit tenir compte pour déterminer l’« intention sous-jacente à la possession ».

     Une conclusion définitive quant à la nature de cette intention est tirée après examen de toutes les circonstances pertinentes à l’espèce, y compris la nature de l’arme, les circonstances dans lesquelles l’accusé l’a eue en sa possession, ce qu’il dit pour expliquer cette possession et l’utilisation qu’il a faite de l’arme, si cela aide à comprendre son intention en prenant initialement possession de l’arme.  [En italique dans l’original.]

Le témoignage de l’accusé n’est donc pas le seul facteur à prendre en considération pour déterminer son intention; des facteurs objectifs, comme l’utilisation effective, peuvent permettre de déduire cette intention : voir également R. c. Proverbs (1983), 9 C.C.C. (3d) 249 (C.A. Ont.).[23]

[67]        En l’espèce, le juge d’instance se devait d’appliquer cette démarche en deux (2) étapes pour retrouver chez l’appelante cette intention spécifique de posséder le répulsif canin dans un dessein dangereux pour la paix publique soit d’abord déterminer le dessein de l’appelante d’une manière subjective puis ensuite, décider objectivement, compte tenu de toutes les circonstances, si ce dessein est dangereux pour la paix publique.

[68]        La détermination du dessein comme étant ou non dangereux s’effectue, elle, de façon objective[24] :

                […]  Est utile, cependant, l’arrêt de la Chambre des lords Chandler c. Director of Public Prosecutions, [1962] 3 All E.R. 142, dans lequel était en cause le par. 1(1) de l’Official Secrets Act, 1911, dont voici le texte :

     [traduction] Est coupable d’un acte criminel grave quiconque, dans un dessein nuisible à la sécurité ou aux intérêts de l’État — a) s’approche d’un endroit prohibé au sens de la présente loi, se trouve dans son voisinage ou y pénètre . . .

La similarité entre la formulation de cette disposition et celle de la disposition en cause — [traduction] « dans un dessein nuisible » et « dans un dessein dangereux » — est évidente.  Au sujet du sens du mot « dessein » (purpose), Lord Devlin s’est exprimé ainsi à la p. 155 :

     [traduction] J’examinerai d’abord le mot « dessein », puisque les deux parties ont invoqué ce mot dans des sens différents.  Essentiellement, les appelants prétendent qu’il faut lui donner un sens subjectif et le ministère public, un sens objectif.

     Je n’ai aucun doute que son sens doit être subjectif. Un dessein doit exister dans l’esprit.  Il ne peut exister ailleurs. Le mot peut servir à désigner soit l’objet principal qu’un homme veut ou espère accomplir par son acte, soit les objets qui, à sa reconnaissance, seront vraisemblablement accomplis par cet acte, qu’il les veuille ou non. Je suis convaincu qu’en droit criminel en général, et dans le contexte précis de la présente loi, ce dernier sens est le sens ordinaire. Dans le premier sens, il ne peut être concrètement distingué du mobile, lequel est habituellement dénué de pertinence en droit criminel. L’employer en ce sens rendrait la présente loi inepte. Comme l’a fait remarquer mon distingué et savant collègue LORD Reid au cours des plaidoiries, un espion pourrait obtenir un acquittement en convainquant le jury que son but était de gagner sa vie, but qui, en soi, ne nuit pas à l’État, sans se soucier des autres conséquences de ses actes. Peut donc être considéré comme un « dessein » au sens de l’art. 1 tout résultat qu’une personne peut vraisemblablement prévoir en conséquence de ses actes : puisque la loi indique « un dessein », la poursuite a le droit de soulever n’importe lequel.  Se pose alors la question de savoir si le dessein choisi est « nuisible », et à mon avis, il faut répondre à cette question de façon objective. [Je souligne.]

Cette analyse de la mens rea est précisément celle qui est proposée en l’espèce : premièrement, il faut déterminer subjectivement le dessein poursuivi par la personne et, deuxièmement, il faut déterminer objectivement la dangerosité de ce dessein […].

[69]        Le juge Bastarache ajoute :

            Ainsi, la difficulté que posent l’arrêt Nelson et les décisions qui l’ont suivi, ne tient pas à ce qu’ils énoncent un critère à la fois subjectif et objectif à l’égard de l’expression « dans un dessein dangereux pour la paix publique », mais plutôt à ce qu’ils n’établissent pas clairement en quoi consiste véritablement le fait de compromettre la paix publique. […]

Cette lacune de la jurisprudence n’est guère étonnante; il ne peut y avoir un critère de dangerosité exhaustif étant donné la grande variété de situations et de circonstances dans lesquelles un danger peut survenir. Je suis disposé à admettre, comme le propose le juge Binnie, que la « paix publique » renvoie généralement à l’ordre ou à l’état normal qui règne dans une société, mais je ne suis pas disposé à conclure, comme il le propose, que la violence présente toujours, sans exception, un danger pour la paix publique. Il appartient au juge des faits de décider, à partir de tous les facteurs pertinents, si l’acte délibéré aurait dans ce cas en particulier mis en danger la paix publique.

[70]        Pour leur part, les juges Arbour et LeBel estiment, dans l’arrêt Kerr, que la détermination du dessein au sens du paragraphe 88(1) C.cr. doit s’effectuer de façon entièrement subjective[25].

[71]        En outre, le juge LeBel propose de définir la notion de dessein dangereux pour la paix publique comme étant « l’intention de causer des lésions corporelles ou des dommages matériels ou l’insouciance à cet égard ». Il précise :

                Non seulement le par. 88(1) commande-t-il une analyse purement subjective, mais encore l’application pratique des critères à la fois subjectifs et objectifs comporte des difficultés notoires.  De plus, je crains qu’une analyse à la fois subjective et objective entraîne un glissement vers un critère purement objectif.  Cette possibilité peut être évitée par l’adoption d’une définition de l’expression « dangereux pour la paix publique ».  À mon sens, un danger pour la paix publique suppose une possibilité de lésions corporelles ou de dommages matériels.  Il faut donner un contenu concret au « dessein dangereux pour la paix publique ».  Au sens du par. 88(1), il s’agit de la possession d’une arme dans l’intention de causer des lésions corporelles ou des dommages matériels ou sans se soucier de causer des lésions corporelles ou des dommages matériels.

                En termes clairs, le par. 88(1) exige que la possession d’une arme coïncide à un moment quelconque avec l’intention d’utiliser l’arme pour causer des lésions corporelles ou des dommages matériels, ou sans se soucier que de telles conséquences surviennent.  À un moment quelconque, ces deux éléments doivent se rencontrer : Cassidy, précité, p. 351.  Il ne s’agit pas d’une infraction de possession simpliciter. L’infraction exige la possession ainsi qu’une intention additionnelle, mais elle n’exige pas que l’arme soit effectivement utilisée.

[72]        De l’avis du Tribunal, le juge d’instance conclut à l’intention spécifique requise pour l’infraction de possession d’une arme dans un dessein dangereux pour la paix publique en énonçant des scénarios hypothétiques susceptibles de constituer, s’ils se réalisent, une violation de la paix publique. Ce faisant, il fait fi de l’étape de l’analyse du dessein de l’appelante.

[73]        Son verdict est fondé sur des inférences qui ne sont pas supportées par la preuve, ce qui relève davantage de l’hypothèse et qui ne saurait équivaloir à une preuve hors de tout doute raisonnable de l’élément intentionnel de l’infraction[26].

[74]        Le juge d’instance retient que la plupart des objets saisis de l’appelante sont de nature soit à se protéger, soit à dissimuler son visage, soit à résister à une arrestation[27]. Il reconnait durant le procès que le répulsif canin n’est pas, en soi, une arme, mais qu’il peut le devenir « dépendamment de l’utilisation qu’on en fait »[28].

[75]        Or, rien dans la preuve offerte par la poursuite ne laisse voir que l’appelante avait l’intention d’utiliser d’une quelconque façon le répulsif contre les policiers ou dans le but de résister à son arrestation, ce qui aurait pu permettre au juge d’instance d’inférer subjectivement le dessein dangereux.

[76]        La preuve révèle que lors de son arrestation, l’appelante n’est pas agressive, qu’elle est plutôt collaboratrice, qu’elle n’a pas le répulsif dans les mains puisqu’il est retrouvé plus tard dans son sac à dos.

[77]        Dans ces circonstances, il n’est pas raisonnable de déduire que l’appelante, prise dans une ruelle, seule devant plusieurs policiers, avait l’intention de sortir son répulsif du sac à dos pour s’en prendre aux policiers.

[78]        C’est bien peu, voire insuffisant, pour tirer une quelconque conclusion quant au dessein dangereux pour la paix publique formulée par l’appelante.

[79]        Le juge d’instance conclut que les seuls intervenants présents sont les manifestants et les policiers affirmant que l’appelante ne craint pas ses compagnons ou compagnes d’aventure, donc qu’il ne reste que les policiers[29].

[80]        Le juge d’instance laisse ici sous-entendre que l’appelante ne peut que craindre les policiers. Or, rien dans la preuve présentée ne permet de soutenir que l’appelante craignait les policiers.

[81]        Rien dans la preuve ne permet d’affirmer que l’appelante ne craignait pas ses compagnons. D’autres inférences étaient possibles, soit : ne rien craindre, craindre certaines personnes ou certains groupes de manifestants, craindre certains policiers ou certains citoyens.

[82]        En l’espèce, il n’était pas raisonnable, pour établir le dessein de l’appelante, de retenir qu’une personne qui craint les policiers va nécessairement s’en prendre à eux.

[83]        La Cour suprême rappelle dans R. c. Villaroman[30] que dans une affaire où la preuve d’un ou de plusieurs éléments d’une infraction dépend exclusivement ou largement, comme en l’espèce, d’éléments de preuve circonstancielle il est généralement utile de dire au jury qu’une inférence de culpabilité provenant d’éléments de preuve circonstancielle doit être la seule inférence raisonnable qui peut être tirée de ces éléments.

[84]        Dans cet arrêt, la Cour suprême explique les considérations alors applicables :

[35]       […]   Pour évaluer une preuve circonstancielle, des inférences compatibles avec l’innocence n’ont pas à découler de faits établis : R. c. Khela, 2009 CSC 4, [2009] 1 R.C.S. 104, par. 58; voir également R. c. Defaveri, 2014 BCCA 370, 361 B.C.A.C. 301, par. 10; R. c. Bui, 2014 ONCA 614, 14 C.R. (7th) 149, par. 28. Exiger que des faits établis appuient des explications autres que la culpabilité a pour effet d’imposer à tort à l’accusé l’obligation de prouver des faits et va à l’encontre de la règle selon laquelle l’existence ou non d’un doute raisonnable est déterminée eu égard à l’ensemble de la preuve. Pour ce qui est de la preuve circonstancielle, il s’agit de considérer l’éventail des conclusions raisonnables qui peuvent être tirées de cette preuve. S’il existe d’autres conclusions raisonnables que la culpabilité, la preuve du ministère public ne satisfait pas à la norme de la preuve hors de tout doute raisonnable.

[36]       Je suis d’accord avec l’intimé pour dire qu’un doute raisonnable, ou une autre thèse que la culpabilité, ne devient pas « conjectural » du seul fait que ce doute ou cette thèse repose sur une absence de preuve. Comme l’a fait remarquer notre Cour dans l’arrêt Lifchus, un doute raisonnable « est un doute fondé sur la raison et le bon sens, et qui doit reposer logiquement sur la preuve ou l’absence de preuve » : par. 30 (je souligne). Une lacune particulière dans la preuve peut fonder d’autres inférences que la culpabilité. Mais ces inférences doivent être raisonnables compte tenu d’une appréciation logique de la preuve ou de l’absence de preuve, et suivant l’expérience humaine et le bon sens.

[85]        Dans cet arrêt, le juge Cromwell précise que le juge des faits, lorsqu’il apprécie des éléments de preuve circonstantielle, doit considérer d’autres thèses plausibles et d’autres possibilités raisonnables qui ne sont pas compatibles avec la culpabilité, ce que le juge d’instance n’a pas fait en l’espèce[31].

[86]        Il ajoute :

[38]              Il va de soi que la ligne de démarcation entre une « thèse plausible » et une « conjecture » n’est pas toujours facile à tracer. Cependant, la question fondamentale qui se pose est celle de savoir si la preuve circonstancielle, considérée logiquement et à la lumière de l’expérience humaine et du bon sens, peut étayer une autre inférence que la culpabilité de l’accusé.

[39]          J’ai trouvé deux énoncés particulièrement utiles de ce principe.

[40]          Le premier est tiré d’un vieil arrêt australien, l’affaire Martin c. Osborne (1936), 55 C.L.R. 367 (H.C.), p. 375 :

        [TRADUCTION] Pour inculper une personne, les circonstances constituant la preuve ne doivent appuyer aucune autre explication raisonnable. Cela signifie que, dans le cours ordinaire de la vie, le degré de probabilité que les faits établis s’accompagnent du fait qui doit être établi est si élevé qu’on ne saurait raisonnablement supposer le contraire. [Je souligne.][32]

[87]        Toujours dans Villaroman, la Cour suprême enseigne qu’un verdict est raisonnable s’il fait partie de ceux qu’un jury qui a reçu des directives appropriées et qui agit de manière judiciaire aurait pu raisonnablement rendre. Pour appliquer cette norme, le tribunal d’appel doit réexaminer l’effet de la preuve et dans une certaine mesure la réévaluer[33].

CONCLUSION

[88]        Aux yeux du Tribunal, le juge d’instance a commis une erreur de droit dans son analyse de l’élément intentionnel de l’infraction d’avoir eu en sa possession une arme dans un dessein dangereux pour la paix publique. Il a rendu un verdict déraisonnable fondé sur des inférences non soutenues par la preuve.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[89]        ACCUEILLE l’appel.

[90]        ANNULE la condamnation pour port d’arme dans un dessein dangereux pour la paix publique rendu par le juge Jacques Ouellet, j.c.m., le 27 mai 2019;

[91]        ORDONNE l’inscription d’un verdict d’acquittement sur le chef de port d’arme dans un dessein dangereux pour la paix publique.

 

 

__________________________________LOUIS DIONNE, j.c.s.

 

Me Sandra Villeneuve, Casier # 58

Procureure de l’appelante

 

Giasson et associés, Casier # 13

Me Steve Marquis

Procureurs de l’intimée

 

 

Le 22 juin 2020, appel décidé sur la foi des exposés, sans audience à la suite du consentement des parties

 



[1]     Article 88(1) 2(b) c.cr.

[2]     Règlement municipal R.V.Q. 1091, article 17.2.

[3]     Pièce P-3.

[4]     Le chef 1.

[5]     Le chef 4.

[6]     Pièces P-1 et P-2.

[7]     Article 66(1) C.cr.

[8]     La Reine c. Lynda Forgues et Déliane Laflamme no 18CC010896; 18CC010898, 27 mai 2019, J. Ouellet, par. 100.

[9]     Id., par. 101.

[10]    Id., par. 104.

[11]    Id., par. 118.

[12]    Id., par. 123.

[13]    Id., par. 128.

[14]    Id., par. 129.

[15]    Id., par. 140.

[16]    Id., par. 155.

[17]    Id., par. 159 et 160.

[18]    2018 QCCA 1999.

[19]    Anne-Claude BERGERON et Catherine DUMAIS, « Chapitre II - Les infractions criminelles » dans Collection de droit 2019-2020, École du Barreau du Québec, vol. 13, Droit pénal : infractions, moyens de défense et peine, Cowansville, Éditions Yvon Blais, 2019, p. 67, à la page 90.

[20]    [2004] 2 RCS 371, p. 384.

[21]    Id., p. 385.

[22]    R. c. Cassidy, [1989] 2 RCS 345, p. 351.

[23]    Ibid., p. 386.

[24]    Précité, note 20, p. 389 et 390.

[25]    Précité, note 20, par. 77 à 85.

[26]    Pinard c. R., 2015 QCCA 1715, par. 35, 40, 41 et 45.

[27]    Précité, note 8, par. 156.

[28]    Notes sténographiques du 12 mars 2019, p. 131, l. 25, p. 139, l. 19 à 25, p. 140, l. 1 à 9.

[29]    Précité, note 8, par. 155.

[30]    2016 CSC 33 (CanLII), [2016] 1 RCS 1000, par. 30.

[31]    Id. par. 37.

[32]    Id., par. 38, 39 et 40.

[33]    Id., par. 55.

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