Décision

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Bélanger c. 9107-4203 Québec inc. (Automobiles Del Sol 2002)

2015 QCCQ 11666

 

 COUR DU QUÉBEC

« Division des petites créances »

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE QUÉBEC

« Chambre civile »

N° :

200-32-061531-140

 

DATE :

26 novembre 2015

 

 

 

SOUS LA PRÉSIDENCE DE L'HONORABLE  DOMINIQUE LANGIS, J.C.Q. (JL 4155)

 

 

 

MANON BÉLANGER

[…], Scott (Québec) […]

 

Demanderesse

c.

 

9107-4203 QUÉBEC INC., faisant affaire sous le nom de AUTOMOBILES DEL SOL 2002

1212, boul. Raymond, Québec (Québec) G1B 2P3

 

Défenderesse

 

 

 

JUGEMENT

 

 

 

[1]       Manon Bélanger réclame l’annulation de la vente d’un véhicule automobile acheté de 9107-4203 Québec inc., faisant affaire sous la dénomination sociale de Automobiles Del Sol 2002 (Del Sol), le remboursement du prix de vente de 1 506 $, des frais de 150 $ en raison de cet achat et 500 $ pour troubles et inconvénients.

[2]       Del Sol conteste cette réclamation. Elle soutient que les réparations ont été faites afin que le véhicule fonctionne pour un délai raisonnable eu égard au prix payé.

LES FAITS

[3]       Le 11 avril 2014, Mme Bélanger achète de Del Sol un véhicule Hyundai Accent 2002, pour un montant de 1 506 $.

[4]       Elle considère cet achat très intéressant puisque l’odomètre indique 87 000 kilomètres, certifié par Del Sol, qui lui souligne qu’une femme en avait été la propriétaire.

[5]       Elle ne fait pas d’essai routier à cette date car le véhicule est encore sous la neige. Au moment de l’achat, Sylvain Lévesque, conseiller aux ventes chez Del Sol, lui représente que des travaux seront faits sur le véhicule, notamment quant aux freins et à la carrosserie, pour le lui remettre en bonne condition.

[6]       Le 18 avril 2014, Mme Bélanger prend possession du véhicule. Préalablement, elle fait un essai routier. Elle constate un problème avec le tuyau d’échappement et les freins. On lui demande de revenir la semaine suivante pour vérifier l’état de ces pièces et les réparer.

[7]       Le 22 avril 2014, Del Sol dirige Mme Bélanger vers un autre garage pour la réparation. Il faut en plus changer une pièce de la suspension («ball joint»).

[8]       Le 1er mai 2014, elle fait remorquer le véhicule chez Del Sol. Il y a une fuite d’huile de la direction assistée («power steering»). L’huile s’est complètement vidée. Del Sol effectue la réparation.

[9]       Le 8 mai 2014, elle fait remorquer à nouveau le véhicule chez Del Sol. Cette fois, il y a une fuite d’essence. Un tuyau sous le véhicule est perforé. Del Sol fait aussi la réparation.

[10]    Le 29 mai 2014, elle connaît des problèmes avec la transmission. Elle communique l’information à Del Sol, qui doit reprendre contact avec elle mais elle reste sans nouvelle.

[11]    Le 12 juin 2014, la courroie de distribution («timing belt») cède et Mme Bélanger ne peut plus se servir du véhicule. Le même jour, elle transmet une mise en demeure à Del Sol, qui n’y donne pas suite.

[12]    Le véhicule est depuis remisé au Garage Steve Noonan, à Sainte-Marie de Beauce.

L’ANALYSE ET LA DÉCISION

[13]    La vente par un commerçant d’un véhicule d’occasion à une personne physique comme Mme Bélanger, qui est une consommatrice, est un contrat de consommation régi par la Loi sur la protection du consommateur[1](L.P.C.).

[14]    Vu son âge et son kilométrage, le véhicule acheté n’est pas couvert par la garantie de bon fonctionnement stipulée à l’article 159 L.P.C., en raison de la classification prévue à l’article 160 L.P.C.. Il s’agit d’un véhicule de catégorie D.

[15]    Toutefois, les garanties légales prévues aux articles 37, 38 et 53 L.P.C. s’appliquent et valent pour les véhicules d’occasion. Ces garanties légales sont d’ordre public et ne peuvent pas être écartées par le fait que l’article 159 L.P.C. ne s’applique pas :

37.  Un bien qui fait l'objet d'un contrat doit être tel qu'il puisse servir à l'usage auquel il est normalement destiné.

38.  Un bien qui fait l'objet d'un contrat doit être tel qu'il puisse servir à un usage normal pendant une durée raisonnable, eu égard à son prix, aux dispositions du contrat et aux conditions d'utilisation du bien.

53. Le consommateur qui a contracté avec un commerçant a le droit d'exercer directement contre le commerçant ou contre le fabricant un recours fondé sur un vice caché du bien qui a fait l'objet du contrat, sauf si le consommateur pouvait déceler ce vice par un examen ordinaire.

[…]

Ni le commerçant, ni le fabricant ne peuvent alléguer le fait qu'ils ignoraient ce vice ou ce défaut.

[…].

(le Tribunal souligne)

[16]    Plus particulièrement au regard de l’article 38 L.P.C., le bien doit être en mesure de servir des attentes de durabilité raisonnable et normale pour le consommateur. Celui-ci a le fardeau de démontrer que l’absence de durabilité raisonnable provient d’un vice caché antérieur à la vente. Toutefois, lorsque la preuve établit que le bien n’a pu servir pendant une durée raisonnable, le consommateur bénéficie d’une présomption à l’effet que le vice est antérieur à la vente. Il s’agit toutefois d’une présomption que le commerçant peut renverser mais qu’il n’a pas repoussée dans le présent cas.

[17]    La preuve révèle que ce véhicule, lors de la vente, n’est manifestement pas en état de servir à un usage normal pendant une durée raisonnable, aux termes des articles 37 et 38 L.P.C..

[18]    Du 18 avril au 12 juin 2014, Mme Bélanger a connu différents problèmes avec le véhicule acheté. Bien qu’il y ait eu réparations par Del Sol, le véhicule ne peut plus rouler à compter du 12 juin 2014 et Del Sol n’a pas donné suite à la mise en demeure de Mme Bélanger.

[19]    Il est anormal que tous ces bris surviennent en moins de deux mois de la prise de possession du véhicule. Del Sol avait pourtant représenté à Mme Bélanger que le véhicule serait en bonne condition lors de la prise de possession.

[20]    De l’avis du Tribunal, Mme Bélanger n’a pas bénéficié d’un usage normal du véhicule pendant une durée raisonnable au sens de la loi.

[21]    Del Sol doit répondre de la garantie à laquelle elle est légalement tenue et elle n’a pas démontré que Mme Bélanger avait fait un mauvais usage du véhicule.

[22]    Le non-respect des articles 37 et 38 L.P.C. donne ouverture au recours prévu à l’article 272 L.P.C..

[23]    Cet article permet à Mme Bélanger de réclamer la résolution de la vente, le remboursement du prix d’achat et des dommages-intérêts.

[24]    Outre la résolution de la vente et le remboursement du prix payé, le Tribunal,  usant de sa discrétion judiciaire, accorde 200 $ à Mme Bélanger pour troubles et inconvénients. Mme Bélanger n’a pas fourni de preuve justifiant l’octroi de frais au montant de 150 $ en raison de cet achat.

           POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

      ACCUEILLE partiellement la demande de la demanderesse.

      RÉSOUT à toutes fins que de droit le contrat intervenu entre les parties le 7 avril 2014, pour la vente d’un véhicule de marque Hyundai Accent 2002, portant le numéro de série KMHC6356120161741.

      DÉCLARE la défenderesse seule propriétaire du véhicule décrit ci-haut.

      CONDAMNE la défenderesse à payer à la demanderesse la somme de 1 706 $, avec en plus l'intérêt au taux légal et l'indemnité additionnelle prévue à l'article 1619 du Code civil du Québec, à compter du 20 juin 2014, date de la demeure, ainsi que les frais judiciaires fixés à 106 $.

      AUTORISE la défenderesse à récupérer le véhicule sur préavis de 48 heures, au plus tard dix jours après le paiement des sommes mentionnées au présent jugement. À défaut, la demanderesse est autorisée à disposer du véhicule comme bon lui semblera.

 

 

DOMINIQUE LANGIS, J.C.Q.

 

 

Date d’audience :

23 novembre 2015

 



[1]    RLRQ c P-40.1

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