Ouellette c. Ville de Mascouche | 2022 QCCS 4190 | |||||
COUR SUPÉRIEURE | ||||||
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CANADA | ||||||
PROVINCE DE QUÉBEC | ||||||
DISTRICT DE | JOLIETTE | |||||
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No : | 705-17-006770-166 | |||||
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DATE : | 11 novembre 2022 | |||||
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE | L’HONORABLE | CHARLES BIENVENU, J.C.S. | ||||
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JEAN-GUY OUELLETTE et LES FERMES JEAN-GUY OUELLETTE INC. Demandeurs | ||||||
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c. | ||||||
VILLE DE MASCOUCHE | ||||||
Défenderesse et
LE PROCUREUR GÉNÉRAL DU QUÉBEC agissant pour le ministère des Forêts, de la Faune et des Parcs Mis en cause
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JUGEMENT | ||||||
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2. LE CONTEXTE DE LA DISCUSSION
4. LES PRÉTENTIONS DES PARTIES
La sécurité et le bien-être général
Le délai d’inaction judiciaire
Les pouvoirs délégués aux municipalités
Le contenu d’un règlement municipal
La prohibition absolue Vs partielle
L’(in)opérabilité d’un règlement municipal
Le conflit avec la norme fédérale
Le conflit avec la norme provinciale
Le délai d’inaction judiciaire
8.1 LES ARGUMENTS CONSTITUTIONNELS
8.2 LA TENEUR DU RÈGLEMENT 1153
8.3 LE CARACTÈRE DÉRAISONNABLE DU RÈGLEMENT 1153
8.4 LES CONFLITS D’APPLICATION ET D’OBJET
Le conflit avec la norme fédérale
Le conflit avec la norme provinciale
Le conflit avec la norme fédérale
Le conflit avec la norme provinciale
8.5 LE DÉLAI D’INACTION JUDICIAIRE
[1] Le Règlement 1153 sur l’utilisation d’armes[1] de la Ville de Mascouche[2] balise la possession d’armes[3] et délimite les endroits où la chasse est permise[4]. Il a cependant pour effet de prohiber l’utilisation d’armes[5] en tous lieux sur le territoire de la Ville[6].
[2] Ces restrictions interdisent la chasse à Mascouche, ce qui entraîne plusieurs problèmes juridiques. Ce règlement est déraisonnable et ne peut coexister avec la législation en vigueur relativement à la chasse et le transport des armes à feu.
[3] Le Tribunal invalide les articles 2, 3 et 6 du Règlement 1153 et suspend l'exécution de sa décision pour une période de six (6) mois.
2. LE CONTEXTE DE LA DISCUSSION
[4] La nature du Règlement 1153 est sujette à débat. La Ville soutient que son règlement cherche à rehausser la sécurité du public alors que les demandeurs et le Procureur général du Québec[7] sont plutôt d’avis qu’il vise à interdire la chasse à Mascouche. Cette discussion sur la teneur du règlement a lieu afin de déterminer si le pouvoir d’interdire totalement la chasse se classe dans l'un des pouvoirs délégués par la Loi sur les compétences municipales[8].
[5] Les demandeurs et le PGQ considèrent que la Ville n’a pas ce pouvoir de prohibition absolu et demandent la nullité des articles 3 et 6 du règlement.[9] Le PGQ avance que ces dispositions sont ultra vires puisque le législateur ne délègue pas aux municipalités le pouvoir de règlementer la chasse. Il ajoute que seule la province peut légiférer ce domaine, qui relève du ministre responsable de l’application de la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune[10].
[6] Ils soutiennent également que le Règlement 1153 ne peut coexister avec la législation provinciale relativement à la conservation de la faune, la chasse et le transport des armes à feu. Pour eux, le règlement se heurte directement avec cette législation provinciale, qui a préséance sur les articles 2, 3 et 6 du règlement. De plus, les demandeurs invoquent la doctrine constitutionnelle de la prépondérance fédérale au motif qu'il y aurait conflit avec des lois et règlements fédéraux dans les domaines du transport des armes à feu et des oiseaux migrateurs.
[7] Il est finalement soumis que le contenu du Règlement 1153 ne satisfait pas à la norme de la décision raisonnable. Les demandeurs soulèvent que le règlement est déraisonnablement restrictif alors que le PGQ avance essentiellement qu’il constitue un empiétement abusif sur les prérogatives du ministre.
[8] La Ville répond avoir le droit de prohiber totalement l’utilisation d’Arme et la chasse sur son territoire. Elle assure que le Règlement 1153 respecte le cadre des pouvoirs qui lui sont conférés par la LCM. Elle ajoute que le domaine de la sécurité est une compétence concurrente avec la province et que son règlement coexiste sans conflit avec la législation fédérale et provinciale.
[9] Le Tribunal considère que la Ville peut adopter un règlement qui a une incidence raisonnable sur la chasse, ce qui atténue l’argument voulant que la Ville n'a pas la compétence[11] pour adopter le Règlement 1153. C'est pourquoi le Tribunal propose de centrer la solution de ce pourvoi sur la manière dont la Ville exerce son pouvoir plutôt que sur l’appréciation des pouvoirs délégués par la province. Cette analyse mène à conclure que les articles 3 et 6 sont déraisonnables.
[10] Au surcroit, les articles 2, 3 et 6 du règlement sont inopérants puisqu’ils se heurtent directement à la législation provinciale sur la chasse et le transport des armes à feu. L'article 2 entre aussi en conflit avec les normes fédérales relatives au transport des armes à feu.
[11] Finalement, la période d’inaction judiciaire des demandeurs est justifiée en droit, ce qui autorise le Tribunal à examiner l’ensemble de l’affaire.
[12] Le Règlement 1153 entre en vigueur le 18 septembre 2010.[12] Il est modifié le 5 juillet 2021 par le Règlement 1153-1 qui le rend plus compréhensible.[13]
[13] Les articles 2, 3 et 6 du Règlement 1153 se lisent comme suit :
2. Il est interdit d’avoir en sa possession ou d’utiliser une arme ou une arme blanche dans une place publique ou dans un véhicule de transport public.
La possession d’une arme ou d’une arme blanche est cependant autorisée dans une place publique si celle-ci est empruntée pour se rendre à un poste d’affût de chasse durant les périodes de chasse.
3. Il est interdit d’utiliser une arme à l’intérieur d’un périmètre d’un kilomètre de toute place publique, bâtiment, terrain privé, poste de transformation électrique, de ligne électrique, chemin de fer et de toute ville limitrophe à la Ville.
6. La chasse est permise sur un terrain privé d’une superficie d’au moins 40 000 mètres carrés et zoné agricole conformément au règlement de zonage avec la permission du propriétaire de ce terrain et si les dispositions du présent règlement et les dispositions législatives provinciales et fédérales relatives à la chasse, entre autres celles concernant les périodes de chasse et les permis, sont respectées.
(Soulignement du Tribunal)
[14] Le Règlement No 1153-1 précise :[14]
3. Il est interdit d’utiliser une arme à moins d’un kilomètre de toute place publique, bâtiment, terrain privé, poste de transformation électrique, de ligne électrique, chemin de fer et de toute ville limitrophe à la Ville. »
(Soulignement du Tribunal)
[15] Le Règlement 1153 définit les mots et expressions suivants :
Arme: Arme à feu de toute catégorie ou imitation d’arme à feu, arc, arbalète, fronde, piège ou toute arme qui permet de tirer un projectile, d’infliger des lésions corporelles ou la mort à une personne ou à un animal;
Arme blanche: Arme dont l’action résulte d’une partie en métal, elle est perforante et ou tranchante et n’emploie pas la force d’une explosion, mais celle d’une personne ou d’un mécanisme quelconque;
Bâtiment: Construction destinée à abriter des personnes, des animaux ou des choses et occupée de façon permanente ou saisonnière;
Place publique: Endroit où des personnes s’assemblent ou se réunissent pour des fins civiques, militaires, politiques, syndicales, religieuses, sociales, éducatives, récréatives, sportives, de voyage ou autres, y compris d’une façon non limitative les endroits suivants : théâtre, magasin, garage, église, école, restaurant, boutique, édifices municipal et gouvernemental, hôtel, motel, auberge, bar, discothèque ou tout autre établissement du genre CLSC, clinique, hôpital et collège ainsi qu’une rue, une ruelle, un trottoir, un chemin public, une promenade, un passage piétonnier, un quai, un parc, un jardin, un sentier et tout autre endroit accessible au public;
Terrain privé: Propriété privée ou terrain occupé par des activités agricoles, d’arboriculture ou d’horticulture, de récoltes ou d’élevage de bétail à des fins commerciales ou non;
[16] Dans ces conditions, l’utilisation d’une Arme est permise uniquement si elle se trouve à une distance supérieure à un kilomètre de toute place publique, bâtiment, terrain privé, poste de transformation électrique, de ligne électrique, chemin de fer et de toute ville limitrophe à la Ville. Cela n’est pas possible puisque la mise en carte de ces lieux démontre qu'il est interdit d'utiliser une Arme sur tout le territoire de Mascouche.[15]
4. LES PRÉTENTIONS DES PARTIES
[17] Les Fermes Jean-Guy Ouellette Inc.[16] est propriétaire[17] et loue[18] des terres qui se trouvent sur le territoire de Mascouche pour la production céréalière. Elle est aussi propriétaire de plusieurs terres à Terrebonne.
[18] Les terres des demandeurs procurent un environnement accueillant aux bernaches, cerfs de Virginie, rats musqués, marmottes, castors, ratons laveurs, dindons sauvages et autres gibiers.
[19] Cette faune crée des dommages importants aux terres et cultures.
[20] Jean-Guy Ouellette témoigne relativement aux bernaches :
[21] Les demandeurs obtiennent du gouvernement fédéral des permis relatifs aux oiseaux migrateurs nuisibles ou dangereux pour effaroucher les bernaches au moyen d’armes à feu ou d’un avion depuis 2015. Leur permis actuel est valide jusqu’au 31 décembre 2022.[19]
[22] Certains permis émis en 2015 mentionnent que « le détenteur devra se conformer aux règlements afférents à la Loi sur la convention des oiseaux migrateurs ainsi qu’à tout autre règlement, fédéral, provincial ou municipal qui s’applique »[20]. Il y est également mentionné que l’arme à feu doit être chargée à blanc uniquement. Ces exigences ne se retrouvent pas dans les permis émis ultérieurement.
[23] Il témoigne aussi relativement aux autres animaux nuisibles :
[24] Quant au contrôle des cerfs de Virginie, il ajoute :
[25] Les castors, les rats musqués, les ratons laveurs, les marmottes ne peuvent être effarouchés et doivent être tués pour préserver les champs.
[26] Sans arme à feu, ils sont impuissants devant cette faune nuisible.
[27] Jean-Guy Ouellette a complété les cours exigés par le gouvernement du Québec et détient les permis nécessaires pour chasser. Ses armes sont immatriculées.
[28] Le 10 novembre 2013, il va rejoindre son fils pour l’aider à éviscérer un cerf fraîchement abattu. Des policiers arrivent sur les lieux et leur remettent un constat d’infraction en vertu du Règlement 1153.[21] Père et fils plaident non coupables.
[29] Jean-Guy Ouellette revendique son droit de chasser sur ses terres.
[30] Les demandeurs sont d’opinion que la Ville outrepasse ses pouvoirs et que le contenu des articles 3 et 6 est déraisonnable. Ils ajoutent que les articles 2, 3 et 6 entrent en conflit véritable d’application avec plusieurs normes provinciales et fédérales. Ainsi, ces articles doivent être invalidés pour les raisons suivantes :[22]
Article 2
Article 3
Article 6
[31] Ils ajoutent que la nature de ces questions fait en sorte que la Cour supérieure n’a aucune discrétion pour rejeter leur pourvoi en raison du délai d’inaction judiciaire.
[32] Le PGQ représente le ministre responsable de l’application de la LCMVF et de ses règlements. Les fonctions du ministre, relativement à la faune, sont prévues à Loi sur le Ministère des Ressources naturelles et de la Faune[36].
[33] La LCMVF promulgue à sa disposition préliminaire :
La présente loi a pour objet la conservation de la faune et de son habitat, leur mise en valeur dans une perspective de développement durable et la reconnaissance à toute personne du droit de chasser, de pêcher et de piéger, conformément à la loi. À cet effet, elle établit diverses interdictions relatives à la conservation des ressources fauniques ainsi que diverses normes en matière de sécurité et elle énonce les droits et obligations des chasseurs, pêcheurs et piégeurs.
(Soulignements du Tribunal)
[34] À cet égard, la Loi sur le Ministère des Ressources naturelles et de la Faune mentionne : [37]
SECTION II
FONCTIONS ET POUVOIRS DU MINISTRE
11.1 Le ministre a pour mission d’assurer, dans une perspective de développement durable et de gestion intégrée, la conservation et la mise en valeur des ressources naturelles, dont la faune et son habitat, ainsi que des terres du domaine de l’État.
[…]
12.1 En outre, dans le domaine de la faune, les fonctions et pouvoirs du ministre consistent:
1° à assurer la gestion des activités d’exploitation de la faune, dans le cadre de la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune (chapitre C-61.1) et de la Loi sur les droits de chasse et de pêche dans les territoires de la Baie-James et du Nouveau-Québec (chapitre D-13.1), notamment en ce qui a trait à l’élaboration et à l’application des normes qui s’y rattachent et en ce qui a trait aux autorisations, certificats, permis et baux de droits exclusifs;
2° à assurer une surveillance adéquate et le contrôle de l’utilisation de la ressource faunique, et à assurer l’intégrité de la biodiversité faunique et des milieux de vie faunique;
3° à assumer un rôle de concertation et de coordination en matière de gestion de la faune et de son habitat, avec les partenaires des milieux intéressés;
4° à élaborer des politiques concernant la faune et son habitat, à en assurer la mise en oeuvre et à en coordonner l’exécution;
5° à favoriser la mise en valeur de la faune sur les terres privées;
6° à favoriser la pratique de la chasse, de la pêche et du piégeage, notamment par la formation de la relève.
(Soulignements du Tribunal)
[35] Monsieur Gaétan Roy, agent de recherche et de planification socio-économique pour le ministère, témoigne à l’audience :[38]
[36] Il mentionne, relativement au Règlement 1153 :
[37] Il nomme les principales responsabilités du ministère relativement au contrôle de la faune :
[38] Il explique relativement à l’effarouchement du gibier nuisible :
[39] En ce qui concerne l’activité de la chasse, il mentionne :
[40] Puis, il explique que la Ville de Mascouche se situe dans la zone 8 Nord[44] du découpage territorial des zones de chasse au Québec. Il ajoute :
[41] Finalement, il témoigne que dans tous les cas, les chasses sont autorisées avec des armes précisées par règlement.
[42] Monsieur Gaétan Roy explique que la faune peut occasionner des problèmes pour la sécurité du public. À titre d’exemple, le ministère est appelé à intervenir lorsque le ministère des Transports du Québec constate qu’il y a une augmentation d’accident d’auto avec les orignaux ou lorsque la population d’ours menace la sécurité d’une communauté.
[43] Le PGQ est d’opinion que la Ville ne peut empêcher le ministre d’exercer ses prérogatives à Mascouche relativement au contrôle de la faune et à l’émission des droits de chasse conférés par la LCMVF et ses règlements. Aucune loi ne délègue spécifiquement ce pouvoir aux municipalités.
[44] Le PGQ défend la compétence de la province dans le domaine de la chasse et invite le Tribunal à déclarer ultra vires les articles 3 et 6 du Règlement 1153.[45]
[45] Le PGQ reconnaît que les municipalités ont le pouvoir de réglementer l’utilisation d’armes sur leur territoire, mais qu’une telle mesure doit impérativement être justifiée par un objectif de sécurité publique ou lié à la santé et au bien-être de ses résidents.[46]
[46] À ce sujet, le PGQ avance :
[47] Le PGQ ajoute que l’interdiction totale de chasser à Mascouche est déraisonnable puisqu’il s’agit d’une activité licite et autorisée par la province. Il croit également que le Règlement 1153 entre en conflit véritable d’application et d’objet avec plusieurs normes provinciales.
[48] Le PGQ avance que les articles 3 et 6 sont ultra vires des pouvoirs de la Ville.[52]
[49] Il est d’avis que le « caractère véritable » de ce règlement est d’interdire la chasse à Mascouche ce qui outrepasse les pouvoirs de la Ville.[53]
[50] De son point de vue, les articles 3 et 6 du Règlement 1153 doivent être invalidés pour ces raisons :[54]
Article 3
Règlement sur la chasse[56] et le Règlement sur les zones de pêche et de chasse[57] ;
Article 6
[51] Les demandeurs et le PGQ se liguent pour invalider le Règlement 1153 et endossent mutuellement leurs arguments juridiques. Par ailleurs, le PGQ ne se prononce pas sur la validité de l’article 2 du Règlement 1153 parce que cette disposition ne se heurte pas aux prérogatives du ministre responsable de l’application de la LCMVF.
[52] Le PGQ plaide également que la notion du délai raisonnable pour initier ce pourvoi ne s’applique pas en raison de la nature de ses demandes.[61]
[53] Mascouche est une corporation de droit public qui est régie, entre autres, par la LCM et la Loi sur les cités et villes[62].
La sécurité et le bien-être général
[54] La Ville avance que l’objectif du Règlement 1153 est d’améliorer la sécurité du public et le bien-être général de la population. Le règlement est ainsi adapté aux réalités de son territoire.
[55] Pour la Ville, l’usage d’Armes sur son territoire pose problème :
[56] Le Règlement 1153 autorise le service de la sécurité publique à agir et faire respecter l’ordre :[66]
[57] La Ville avance que le Règlement 1153 permet d’établir une norme claire relativement à l’usage d’Armes sur son territoire.
[58] La Ville considère avoir la compétence pour adopter des règlements en matière de sécurité[70] et pour assurer la paix, l’ordre, le bon gouvernement et le bien-être général de sa population[71]. Elle est convaincue d'agir à l’intérieur de son cadre législatif en adoptant le Règlement 1153 parce que le domaine de la sécurité est une compétence déléguée par la province.
[59] Ainsi, elle soutient que la LCM l’autorise à adopter le Règlement 1153 même s’il a comme effet d’interdire la chasse sur l’ensemble de son territoire, puisque cette loi :
[60] À cela s’ajoute un argument voulant que la LCV prévoyait le pouvoir spécifique d’empêcher ou réglementer le tir au fusil. La Ville plaide que ce pouvoir ─ par extension ─ existe toujours[75] malgré l’abrogation de l’article 412 (16o) LCV lors de l’entrée en vigueur de la LCM en 2006[76].
[61] De plus, la Ville plaide :
[62] Pour la Ville, ces constats suffisent pour clore le débat puisqu’elle croit être pleinement investie du pouvoir d’interdire totalement l’usage d’Armes sur son territoire malgré l’impact de la mesure sur le droit de chasser à Mascouche.
Le délai d’inaction judiciaire
[63] La Ville considère que les demandeurs devaient introduire leur demande dans un délai raisonnable d’environ 30 jours après l’adoption du Règlement 1153.[87] Ainsi, il est soumis que le pourvoi doit être rejeté en raison du délai ─ 5 ans et 3 mois ─ entre l’adoption du règlement et l’introduction du pourvoi en contrôle judiciaire.
[64] La Ville demande le rejet du pourvoi en contrôle judiciaire, puisque non fondé et tardif.
[65] Les principes juridiques qui permettent de situer le présent pourvoi sont abordés par thème afin de répondre aux questions en litige en commençant par la détermination de la norme de contrôle.
[66] La Cour suprême mentionne dans l’arrêt Catalyst : « Un tribunal procédant à la révision sur le fond de l’exercice de pouvoirs délégués doit d’abord déterminer la norme de contrôle qu’il convient d’appliquer. […] Il existe deux normes de contrôle : celle de la décision raisonnable et celle de la décision correcte. […] » [88]. L’arrêt Vavilov le confirme, mais modifie la manière dont les tribunaux déterminent et appliquent ces normes de contrôles.
[67] Une décision raisonnable est le résultat d’un « raisonnement intrinsèquement cohérent » et « justifiée au regard de l’ensemble du droit et des faits pertinents ».[89] Autrement dit : « […] Le caractère raisonnable tient principalement à la justification de la décision, à la transparence et à l’intelligibilité du processus décisionnel, ainsi qu’à l’appartenance de la décision aux issues possibles acceptables pouvant se justifier au regard des faits et du droit »[90].
[68] Puis, l’arrêt Catalyst précise: « Dans le cas où la norme applicable est plutôt celle de la décision raisonnable, il exige que la décision soit raisonnable en considérant les processus suivis et si le résultat s’inscrit dans un éventail raisonnable d’issues possibles, compte tenu du régime législatif et des facteurs contextuels pertinents quant à l’exercice du pouvoir (Dunsmuir, par. 47). »
[69] Une décision correcte est celle qui correspond à « la seule bonne réponse » en fonction du droit et des faits.[91] Elle ne fait appel à aucune déférence.[92] Les tribunaux sont ainsi amenés à répondre d’une façon cohérente, décisive et définitive aux questions qui exigent une réponse uniforme.[93]
[70] À ce sujet, l’arrêt Vavilov, mentionne : [94]
[53] À notre avis, le respect de la primauté du droit exige que les cours de justice appliquent la norme de la décision correcte à l’égard de certains types de questions de droit : les questions constitutionnelles, les questions de droit générales d’une importance capitale pour le système juridique dans son ensemble, et les questions liées aux délimitations des compétences respectives d’organismes administratifs. L’application de la norme de la décision correcte à l’égard de ces questions s’accorde avec le rôle unique du pouvoir judiciaire dans l’interprétation de la Constitution, et fait en sorte que les cours de justice ont le dernier mot sur des questions à l’égard desquelles la primauté du droit exige une cohérence et une réponse décisive et définitive s’impose : Dunsmuir, par. 58.
[71] La norme de contrôle par défaut est dorénavant celle de la décision raisonnable à moins que le contrôle judiciaire vise l’une de ces situations :[95]
Fondée sur l’intention du législateur :[96] lorsque le législateur prévoit expressément (1) une norme de contrôle différente[97]; (2) un droit d’appel, avec ou sans permission, expressément prévu par la loi qui précise la norme de contrôle de l’appel ;[98]
Fondée sur la primauté du droit :[99] lorsque le contrôle judiciaire vise des questions (1) constitutionnelles[100]; (2) de droits généraux, d’importance capitale pour le système juridique dans son ensemble[101]; (3) liées aux délimitations des compétences respectives d’organismes administratifs[102] ;
Compétence concurrente : lorsque les cours de justice et les organismes administratifs ont une compétence concurrente en première instance sur une question de droit dans une loi.[103]
[72] Ainsi, lorsque le contrôle judiciaire n’entre pas dans l’une de ces exceptions, la norme de la décision raisonnable s’applique.[104] Par ailleurs, de l’avis du Tribunal, l’application de la doctrine de la prépondérance fédérale de même que la question de la raisonnabilité du délai d’inaction judiciaire ne mettent pas en cause une norme de contrôle.
[73] L’arrêt Catalyst conserve sa prédominance en droit municipal notamment lorsqu’une municipalité commet des illégalités graves ou substantielles. Cette décision de la Cour suprême est pertinente dans les situations où la notion de l’ultra vires est en cause non seulement en regard de l’existence de la compétence municipale[105], mais aussi lorsque les modalités de son exercice sont invoquées.[106]
[74] Dans cet arrêt, la Cour suprême mentionne ce qui suit relativement à la norme applicable lors du contrôle judiciaire des règlements municipaux :[107]
[23] […] comme je l'ai déjà mentionné, Dunsmuir affirme que la norme de la décision raisonnable est une norme de déférence souple qui varie selon le contexte et la nature de la mesure administrative contestée. Ainsi, Dunsmuir déclare expressément que les approches de révision judiciaire élaborées précédemment par les tribunaux dans des contextes particuliers demeurent pertinentes : Dunsmuir, aux par. 54 et 57. En l'espèce, le contexte est celui de l'adoption de règlements municipaux. Les causes relatives à la révision de tels règlements que le juge de première instance a invoquées et qui ont été analysées ci-dessus restent donc pertinentes et applicables. Bref, ces causes indiquent ce qui est raisonnable dans le contexte particulier de règlements adoptés par des conseils municipaux élus démocratiquement.
[24] Il est donc clair que les tribunaux appelés à réviser le caractère raisonnable de règlements municipaux doivent le faire au regard de la grande variété de facteurs dont les conseillers municipaux élus peuvent légitimement tenir compte lorsqu'ils adoptent des règlements. Le critère applicable est le suivant: le règlement ne sera annulé que s'il s'agit d'un règlement qui n'aurait pu être adopté par un organisme raisonnable tenant compte de ces facteurs. Le fait qu'il faille faire preuve d'une grande retenue envers les conseils municipaux ne signifie pas qu'ils ont carte blanche.
[25] La norme de la décision raisonnable restreint les conseils municipaux en ce sens que la teneur de leurs règlements doit être conforme à la raison d'être du régime mis sur pied par la législature. L'éventail des issues raisonnables est donc circonscrit par la portée du schème législatif qui confère à la municipalité le pouvoir de prendre des règlements.
(Soulignements du Tribunal)
[75] La Cour d’appel, dans l’arrêt Restaurants Canada c. Ville de Montréal se prononce de façon convaincante relativement à la norme de contrôle qui s’applique lorsqu’il s’agit de déterminer si une municipalité outrepasse ses pouvoirs de même que pour contrôler la teneur d’un règlement.[108] Elle mentionne, entre autres : [109]
[25] Ainsi, il y a lieu de conclure, comme l’ont fait d’autres cours d’appel canadiennes ainsi que certains commentateurs particulièrement autorisés en la matière, que la norme de la décision raisonnable est généralement applicable lorsqu’il s’agit de déterminer si, en adoptant un règlement donné, un conseil municipal a outrepassé le pouvoir que lui a délégué l’assemblée législative. La norme de la décision correcte ne sera applicable que si la loi l’exige ou encore si cela s’avère nécessaire afin d’assurer la primauté du droit.
[…]
[29] À la lumière de l'arrêt Vavilov, il y a lieu de conclure que la norme de la décision raisonnable est généralement applicable lorsque les tribunaux sont appelés à contrôler la teneur de règlements municipaux, et que la norme de la décision correcte ne sera applicable que si la loi l'exige ou encore si cela s'avère nécessaire afin d'assurer la primauté du droit. Aucune de ces exceptions n'étant applicable en l'espèce, les questions soulevées par les moyens subsidiaires des appelantes sont assujetties à la norme de la décision raisonnable.
[30] En outre — et comme la Cour l'a souligné récemment —, les enseignements de l'arrêt Catalyst Paper relatifs à la manière d'effectuer ce contrôle en fonction de la norme de la décision raisonnable sont toujours d'actualité.
(Soulignements et références omises par le Tribunal)
[76] La Cour d’appel ajoute, dans ce même arrêt, relativement à la norme de contrôle pour évaluer la teneur d’un règlement municipal :
[27] Dans l'arrêt Catalyst Paper, la Cour suprême a souligné que le pouvoir dont disposent les cours supérieures de contrôler la teneur de règlements municipaux était fondé sur une « présomption fondamentale, découlant de la primauté du droit, selon laquelle le législateur ne peut avoir voulu que le pouvoir qu'il a délégué soit exercé de façon déraisonnable, ou, dans certains cas, incorrecte ». Elle en a déduit que, selon les circonstances, la norme de contrôle applicable devait être soit celle de la décision raisonnable, soit celle de la décision correcte.
[28] Précisant ensuite comment devait être effectué le contrôle en vertu de la norme de la décision raisonnable, la Cour suprême a fait un certain nombre de constats que l'on peut résumer comme suit:
- pour statuer sur le caractère raisonnable d'un règlement, il faut apprécier non seulement son contenu, mais également le processus ayant conduit à son adoption;
- puisque les administrations municipales forment des institutions démocratiques, les tribunaux doivent faire preuve d'une grande retenue et « respecter le devoir qui incombe aux représentants élus de servir leurs concitoyens, qui les ont élus et devant qui ils sont ultimement responsables »;
- les tribunaux doivent également tenir compte du « large pouvoir discrétionnaire que les législateurs provinciaux ont traditionnellement conféré aux municipalités en matière de législation déléguée », tout comme du fait que les règlements municipaux « font […] intervenir toute une gamme de considérations non juridiques, notamment sur les plans social, économique et politique »;
- au final, la question est de savoir si les dispositions réglementaires attaquées n'auraient pu être adoptées par un organisme raisonnable tenant compte de « la grande variété de facteurs dont les conseillers municipaux élus peuvent légitimement tenir compte lorsqu'ils adoptent des règlements ».
(Soulignements par le Tribunal et références omises)
[77] La Cour d'appel avance également que la norme de la décision raisonnable s'applique pour établir si un règlement municipal est inconciliable avec une loi provinciale dans l'arrêt Courses automobiles Mont-Tremblant c. Iredale :[110]
[51] […] La contestation de M. Iredale soulève aussi la question de savoir si, en adoptant les règlements contestés, la Ville a édicté des normes inconciliables avec une loi québécoise, en l’occurrence la Loi sur la qualité de l’environnement, ce qui le rendrait inopérant au sens de l’article 3 L.c.m.
[52] Les parties, comme le juge de première instance, sont d’avis que l’on doit répondre à cette question en fonction de la norme de la raisonnabilité. J’estime qu’elles ont raison.
[78] Ainsi, l’appréciation de la teneur d’un règlement municipal permet au Tribunal d’évaluer si la municipalité l’adopte dans les limites des pouvoirs délégués par la province. Dans l’affirmative, il convient ensuite de déterminer si ce pouvoir a été exercé raisonnablement ou correctement.
Les pouvoirs délégués aux municipalités
[79] Les villes sont des corporations de droit public[111] qui n’ont aucun pouvoir en vertu de la Constitution. Elles ne peuvent exercer que les pouvoirs qui leur sont conférés expressément par la loi ou qui découlent directement de pouvoirs délégués.[112]
[80] À cet égard, la province ne peut déléguer aux municipalités des pouvoirs ou une compétence qu’elle ne peut elle-même exercer aux termes du partage des compétences consacré dans la Loi constitutionnelle de 1867.[113] Puis, les municipalités ne possèdent aucun pouvoir résiduaire général qui leur permet d'exercer des pouvoirs provinciaux non attribués.[114]
[81] Cela signifie que le juge qui décide si un règlement municipal est adopté dans les limites des pouvoirs délégués par la province n’a pas à s’engager dans une analyse pour déterminer si cet acte a été adopté à l’intérieur d’un champ de compétence reconnue par la Constitution aux paliers fédéral ou provincial. Il doit seulement décider si le législateur provincial a délégué le pouvoir de réglementer le contenu de l’acte municipal.[115]
[82] Cette démarche s’intéresse particulièrement à la loi habilitante. À cet égard, la Cour d’appel dans sa décision Restaurants Canada c. Ville de Montréal[116] cite l’arrêt de la Cour suprême Katz Group Canada Inc. c. Ontario (Santé et Soins de longue durée)[117] où il est question d’un règlement provincial. À cet égard, la Cour d’appel mentionne:
[24] Pour contester avec succès la validité d’un règlement, il faut démontrer qu’il est incompatible avec l’objectif de sa loi habilitante ou encore qu’il déborde le cadre du mandat prévu par la Loi […]. Ainsi que le juge Lysyk l’a expliqué de manière succincte :
[TRADUCTION] Pour déterminer si le texte législatif subordonné contesté est conforme aux exigences de la loi habilitante, il est essentiel de cerner la portée du mandat conféré par le législateur en ce qui a trait à l’intention ou à l’objet de la loi dans son ensemble. Le simple fait de démontrer que le délégataire a respecté littéralement le libellé (souvent vague) de la loi habilitante lorsqu’il a pris le texte législatif subordonné n’est pas suffisant pour satisfaire au critère de la conformité à la loi. Le libellé de la disposition habilitante doit être interprété comme comportant l’exigence primordiale selon laquelle le texte législatif subordonné doit respecter l’intention et l’objet de la loi habilitante prise dans son ensemble.
[…]
[26] Il convient de donner au règlement contesté et à sa loi habilitante une « interprétation téléologique large […] compatible avec l’approche générale adoptée par la Cour en matière d’interprétation législative » […].
[27] Cette analyse ne comporte pas l’examen du bien-fondé du règlement pour déterminer s’il est « nécessaire, sage et efficace dans la pratique » […].
[28] L’analyse ne s’attache pas aux considérations sous-jacentes « d’ordre politique, économique ou social [ni à la recherche, par les gouvernements, de] leur propre intérêt » […]. La validité d’un règlement ne dépend pas non plus de la question de savoir si, de l’avis du tribunal, il permettra effectivement d’atteindre les objectifs visés par la loi […]. Pour qu’il puisse être déclaré ultra vires pour cause d’incompatibilité avec l’objet de la loi, le règlement doit reposer sur des considérations « sans importance », doit être « non pertinent » ou être « complètement étranger » à l’objet de la loi […]. En réalité, bien qu’il soit possible de déclarer un règlement ultra vires pour cette raison, comme le juge Dickson l’a fait observer, « seul un cas flagrant pourrait justifier une pareille mesure ».
(Soulignements par le Tribunal)
[83] À cet égard, les dispositions habilitantes de la LCM sont formulées en termes généraux, ce qui est conforme à la méthode moderne de rédaction des lois sur les municipalités.[118] Le Tribunal doit donc respecter l’intention du législateur provincial d’accorder une certaine latitude à la Ville sur l’interprétation qu’il donne à la LCM.[119]
[84] Le contrôle judiciaire d’un règlement municipal doit également tenir compte des larges pouvoirs discrétionnaires que les législateurs provinciaux ont traditionnellement conférés aux municipalités en matière de législations déléguées.[120] La Cour d’appel dans Restaurants Canada c. Ville de Montréal, en faisant référence à Vavilov, mentionne que cette discrétion a toutefois des limites :[121]
[23] Cela étant, la Cour suprême a pris soin de préciser que le contrôle selon la norme de la décision raisonnable « ne permet pas aux décideurs administratifs d'interpréter leur loi habilitante à leur gré et […] [d'] élargir la portée de leurs pouvoirs au-delà de ce que souhaitait le législateur ». Elle a également expliqué que la marge de manœuvre du décideur dépendra notamment de la formulation des dispositions pertinentes de la loi habilitante:
Même dans les cas où l'interprétation que le décideur donne de ses pouvoirs fait l'objet d'un contrôle selon la norme de la décision raisonnable, un texte législatif formulé en termes précis ou étroits aura forcément pour effet de restreindre les interprétations raisonnables que le décideur peut retenir — en les limitant peut-être à une seule. À l'inverse, lorsque le législateur confère au décideur de vastes pouvoirs au moyen d'un texte législatif rédigé en termes généraux, et ne prévoit aucun droit d'appel devant une cour de justice, il y a lieu de donner effet à son intention d'accorder une plus grande latitude au décideur sur l'interprétation de sa loi habilitante.
(Références omises par le Tribunal)
[85] Les municipalités ne peuvent non plus invoquer un pouvoir implicite conféré par une disposition de « bien-être général » pour adopter un règlement aux objectifs dissimulés.[122] À cet égard, la Cour suprême mentionne dans l’arrêt Spraytech :
[18] Dans l’arrêt R. c. Sharma, [1993] 1 R.C.S. 650, p. 668, notre Cour reconnaît que le « principe selon lequel, en tant qu’organismes créés par la loi, les municipalités [traduction] “peuvent exercer seulement les pouvoirs qui leur sont conférés expressément par la loi, les pouvoirs qui découlent nécessairement ou vraiment du pouvoir explicite conféré dans la loi, et les pouvoirs indispensables qui sont essentiels et non pas seulement commodes pour réaliser les fins de l’organisme” […].
[20] Bien que les dispositions habilitantes permettant aux municipalités de réglementer pour le « bien-être général » sur leur territoire autorisent l’adoption de règlements visant véritablement à faciliter la réalisation d’objectifs telles la santé et la sécurité publiques, il importe de garder à l’esprit le fait que ces dispositions non limitatives ne confèrent pas un pouvoir illimité. Les tribunaux saisis d’un règlement contesté adopté en vertu d’une disposition « omnibus » comme l’art. 410 L.C.V. doivent plutôt être vigilants lorsqu’ils cherchent à déterminer le but véritable du règlement. Ainsi, une municipalité ne pourra pas invoquer le pouvoir implicite conféré par une disposition de « bien-être général » pour adopter des règlements qui sont en fait liés à des objectifs inavoués, que ceux‑ci soient ou non malicieux. […]
[86] Aussi, un règlement municipal peut être déclaré ultra vires (au sens du droit administratif et non constitutionnel) parce qu’il poursuit des fins illégitimes. À cet égard, la Cour d’appel mentionne dans l’arrêt Restaurants Canada c. Ville de Montréal[123]:
[37] L’analyse ne s’arrête cependant pas là, car il y a également lieu de se demander si ces dispositions ne sont pas invalides au motif qu’elles poursuivent des fins illégitimes. Comme le rappellent les auteurs Brown et Evans, « if it can be said that the purposes of the subordinate legislation are contrary to, or “extraneous” to, or unrelated logically to, or inconsistent with, the purposes of the statute, the delegated legislation will be invalid ». […]
(Références omises et soulignement par le Tribunal)
Le contenu d’un règlement municipal
[87] Les municipalités doivent appliquer les pouvoirs qui leur sont délégués par la législature provinciale de façon raisonnable.[124] Ainsi, un règlement municipal est déraisonnable, entre autres, lorsqu’il est déraisonnablement restrictif, entraîne une prohibition formelle et totale, ou entraîne un empiétement abusif sur les droits des assujettis sans justification raisonnable.[125]
[88] À ce sujet, la Cour suprême mentionne dans l’arrêt Catalyst :[126]
B. Application : Le règlement est-il déraisonnable?
[32] En résumé, il faut déterminer en définitive si le règlement contesté s'inscrit dans un éventail raisonnable d'issues possibles en suivant l'approche que les tribunaux ont adoptée au fil des ans en matière de révision des règlements adoptés par des conseils municipaux. Les conseils municipaux ne sont pas tenus, dans le cadre du processus d'adoption de règlements, de s'en remettre aux seules considérations objectives ayant une incidence directe sur l'affaire; ils peuvent aussi prendre en compte des enjeux plus généraux d'ordre social, économique et politique. Pour apprécier le caractère raisonnable d'un règlement, il convient donc d'examiner le processus qui a mené à son adoption ainsi que sa teneur.
(Soulignement par le Tribunal)
[89] Le caractère raisonnable du contenu d’un règlement est évalué selon des indicateurs généraux et les contraintes législatives qui délimitent le pouvoir de réglementation du conseil municipal :[127]
Les indicateurs généraux sont essentiellement des signes apparents qu’un règlement municipal soit partial, discriminatoire ou adopté de mauvaise foi.[128] Il s’agit d’indices révélateurs qui mènent à conclure qu’un règlement municipal est déraisonnable.
Les contraintes législatives obligent les Villes à respecter les pouvoirs qui leur sont délégués lesquels ne peuvent être exercés de façon déraisonnable.[129] Bien que les pouvoirs délégués aux municipalités doivent être interprétés largement, un règlement municipal déraisonnable, condamnable, illégitime ou adopté à des fins non prévues par la loi est nul.[130]
[90] Bref, la subtile pondération de ces considérations juridiques est nécessaire pour évaluer la (dé) raisonnabilité du contenu du règlement municipal qui fait l’objet du contrôle judiciaire.
La prohibition absolue Vs partielle
[91] La prohibition absolue d’une activité licite s’avère en général être un exercice déraisonnable des pouvoirs d’une municipalité[131] à moins que la loi habilitante ne l’autorise[132]. Ainsi, une municipalité est soumise au contrôle de la raisonnabilité de son règlement lorsqu’il est purement prohibitif, même s’il porte sur une nuisance.[133]
[92] La Cour d’appel mentionne dans Courses automobiles Mont-Tremblant inc. c. Iredale qu’une municipalité ne peut utiliser son pouvoir de réglementation sur les nuisances à des fins de prohibition absolue d'usages par ailleurs licites.[134] Elle précise, dans l'affaire qui lui est soumise, que l’usage « course automobile » est permis par les règlements de zonage de sorte que le débat se situe plutôt sur la « manière » dont la Ville a exercé sa compétence.[135]
[93] À ce sujet, la Cour suprême mentionne dans 114957 Canada Ltée (Spraytech, Société d’arrosage) c. Ville de Hudson :[136]
[55] Selon deux principes fondamentaux établis depuis longtemps en matière de législation déléguée, un règlement ne peut pas être prohibitif et discriminatoire à moins que la loi habilitante ne l’autorise. […] La technique de rédaction employée en l’espèce crée un problème apparent. Le règlement établit de prime abord une prohibition générale pour ensuite permettre certaines utilisations particulières. L’interprétation globale du règlement permet de contourner cet obstacle. Lu dans son ensemble, le règlement a comme effet d’interdire l’utilisation des pesticides pour des raisons purement esthétiques tout en permettant d’autres utilisations, surtout pour des activités commerciales et agricoles. Il ne paraît pas constituer un texte juridique purement prohibitif. À ce titre, il respecte ce premier principe fondamental du droit municipal. […]
(Références omises et soulignements par le Tribunal)
[94] Puis, la Cour d’appel mentionne dans Camp Jardin (Gan) d’Israël c. La Minerve (Municipalié de) :[137]
[46] Une des limites au pouvoir réglementaire des conseils municipaux est le principe fondamental en droit municipal selon lequel un règlement ne peut être purement prohibitif[138]. Comme écrit le professeur Garant : « Le pouvoir de réglementer ne comprend pas le pouvoir de prohiber de façon absolue » et « Ce qui n'est pas permis, c'est l'interdiction complète d'une chose ou d'une activité qui fait l'objet de la réglementation », qui équivaudrait à une transformation illégale du pouvoir délégué par la province. Le juge Beetz expliquait dans l'arrêt Arcade Amusement inc. qu'un règlement ne peut prohiber totalement l'activité qu'il est censé réglementer et gouverner : « Il serait donc nul selon les principes généraux du droit administratif qui veulent que le pouvoir général de réglementer le commerce ne comporte pas celui de le prohiber; […] ». De même, un règlement sur les nuisances ne peut servir à prohiber d'une manière absolue un usage licite.
(Références omises et soulignements par le Tribunal)
[95] De même, notre cour mentionne dans 170304 Canada inc. (Weed Man) c. Municipalité de la Paroisse de Saint-Anne-des-Lacs[139], ce qui suit :
[…]
[130] D’une part, la prohibition n’est pas interdite si la loi qui habilite la municipalité à réglementer une activité l’y autorise :
[8.154] Lorsque le législateur délègue aux municipalités un pouvoir de réglementation, ceci ne comprend pas le pouvoir de prohiber totalement l’activité que celles-ci peuvent régir […]. […] C’est une application de la doctrine de l’ultra vires : les municipalités ne peuvent exercer que les pouvoirs expressément conférés. Toutefois la prohibition n’est pas interdite si la loi habilitante l’autorise en employant des termes comme « prohiber », « défendre », « supprimer », « interdire », « empêcher ». […] La Loi sur les compétences municipales […] a octroyé un pouvoir général de prohibition dans le cadre de l’exercice de leur pouvoir réglementaire prévu par cette loi […]. […]
55 Selon deux principes fondamentaux établis depuis longtemps en matière de législation déléguée, un règlement ne peut pas être prohibitif et discriminatoire à moins que la loi habilitante ne l’autorise. […]
(Références omises; soulignement ajouté.)
[131] Comme cela a déjà été établi, la Loi sur les compétences municipales confère à la Municipalité compétence dans le domaine de l’environnement et celle-ci peut adopter des règlements en la matière, un cadre dans lequel le Règlement s’intègre. Or, cette même loi énonce ceci :
6. Dans l’exercice d’un pouvoir réglementaire prévu par la présente loi, toute municipalité locale peut notamment prévoir:
1° toute prohibition;
[…]
[132] D’ailleurs, comme le relève le professeur Patrice Garant, « dans certains domaines, comme par exemple en environnement, on admettra plus facilement que réglementer implique nécessairement le pouvoir de prohiber ».
[133] D'autre part, le principe sur lequel 170304 prend appui distingue la prohibition totale ou absolue de celle partielle ou restreinte. La règle ne vise que la première, qui seule serait ultra vires de la compétence déléguée à la Municipalité (n’eût été pouvoir de « prohibition » que la Loi sur les compétences municipales lui confère par ailleurs).
[134] Pour déterminer s’il y a prohibition totale ou partielle, il importe de considérer l’ensemble du Règlement, d’adopter l’approche de l’interprétation globale. La Cour suprême le souligne dans l’arrêt Spraytech (qui considère d’ailleurs un règlement rédigé selon une technique de rédaction semblable au Règlement) :
[24] Les appelantes prétendent que le règlement 270 impose une interdiction absolue non permise relativement à l’utilisation de pesticides. Elles mettent l’accent sur l’art. 2 du règlement : « L’épandage et l’utilisation de tout pesticide est interdit partout sur le territoire de la Ville. » Selon moi, le règlement, interprété dans son ensemble, n’impose pas une telle interdiction. Les articles 3 à 6 du règlement 270 indiquent les lieux et les cas où l’utilisation de pesticides est permise. Comme le souligne Swaigen […] : [TRADUCTION] « les règlements comme celui de Hudson visent généralement les usages non essentiels de pesticides. C’est-à-dire qu’ils ne prévoient pas une interdiction totale, mais permettent plutôt l’usage de pesticides dans certains cas où cet usage n’a pas un but purement esthétique (p. ex. pour la production de récoltes) ». […]
(Références omises par le Tribunal)
[96] La norme de la décision raisonnable s’applique pour contrôler un règlement qui prohibe de manière absolue une activité licite puisqu’il s’agit de déterminer si la municipalité a outrepassé son pouvoir de réglementation.[140]
[97] En résumé, une municipalité ne peut prohiber totalement un domaine dont le pouvoir de réglementer lui est spécifiquement délégué par la province, à moins d'une justification impérative. Toutefois, elle peut le faire d’une façon partielle dans la mesure où ces restrictions sont raisonnables.
L’(in)opérabilité d’un règlement municipal
[98] Il convient de distinguer le caractère inopérant d’un règlement municipal avec une loi fédérale de celle avec une loi ou un règlement provincial. Le conflit avec une loi fédérale est une question constitutionnelle alors que celui avec une norme provinciale relève du droit municipal.
[99] La Cour d’appel résume bien cette distinction dans Courses automobiles Mont-Tremblant c. Iredale :[141]
[110] En matière constitutionnelle, l'existence d'un conflit signifie la prépondérance de la loi fédérale. Pareillement, l'existence d'un conflit, c'est-à-dire d'une insoluble contradiction entre une norme réglementaire municipale et une norme législative ou réglementaire provinciale, entraîne la prépondérance de la seconde, la première devenant inopérante, principe que confirme l'article 3 L.c.m.
(Soulignement par le Tribunal)
[100] Ces conflits doivent être considérés séparément.
Le conflit avec la norme fédérale
[101] Le conflit entre un règlement municipal et la loi fédérale est disposé par la doctrine constitutionnelle de la prépondérance fédérale. Les normes de contrôle ne sont pas invoquées lorsqu’il s’agit d’un débat qui implique la prépondérance fédérale.[142]
[102] Selon les arrêts de principe en la matière, la doctrine de la prépondérance fédérale présuppose que « les lois fédérale et provinciale qui se chevauchent sont valides indépendamment l’une de l’autre » [143], ce qui, en théorie, oblige le Tribunal à déterminer d’abord le « caractère véritable » de la règle de droit contestée.
[103] Il convient de mentionner que cet exercice n’est pas toujours mené en pratique puisque les tribunaux s’autorisent, tout comme le fait la Cour suprême dans les arrêts Moloney et Lemare Lake Logging, de l’admission ─ ou de l’absence de contestation ─ de la validité d’une loi pour éviter la question du « caractère véritable » et passer, sans autre formalité, à l’application de la doctrine de la prépondérance fédérale.[144]
[104] La doctrine de la prépondérance fédérale ne requiert pas d’examiner si une disposition se rattache à une compétence provinciale ou si elle empiète l’une des compétences fédérales. Cette doctrine présuppose que le « caractère véritable » des lois provinciales et fédérales, apparemment en conflit, se rattache à un chef de compétence valable.
[105] À ce sujet, la Cour suprême mentionne dans l’arrêt Transport Desgagnés inc. c. Wärtsilä Canada Inc., entre autres :[145]
[99] Selon la doctrine de la prépondérance fédérale, lorsque des lois provinciales et fédérales valides sont incompatibles, la loi fédérale l’emporte et la loi provinciale est déclarée inopérante dans la mesure du conflit […].
[100] Cette doctrine a évolué avec le temps et elle englobe maintenant deux types de conflits entre les lois fédérales et provinciales : le conflit d’application et l’incompatibilité d’objet. Le conflit d’application survient lorsqu’il est impossible de respecter simultanément les deux lois, alors que l’incompatibilité d’objet se rapporte à l’effet de la loi provinciale sur les objectifs de la loi fédérale […].
(Références omises et soulignement par le Tribunal)
[106] Puis, la Cour d’appel précise dans l’arrêt Bell Canada c. Directeur des poursuites criminelles et pénales (Office de la protection du consommateur) : [146]
[91] La doctrine de la prépondérance fédérale doit donc tendre à favoriser la coexistence des lois fédérales et provinciales plutôt que de prôner une interprétation stricte et rigide des règles faite isolément, entraînant ainsi un conflit. […].
(Références omises et soulignement par le Tribunal)
[107] La Cour suprême propose une analyse en deux volets pour établir si une loi provinciale se heurte directement avec une norme fédérale.[147]
1er volet : Le conflit véritable d’application survient lorsqu’il est impossible de respecter simultanément le règlement municipal et la législation fédérale.[148] Les domaines de ces règles peuvent être similaires, mais l’une impose ce que l’autre interdit.[149] Autrement dit, dans un tel cas, il n’est pas possible de se conformer aux deux textes.[150]
2e volet : Une incompatibilité d’objet se produit lorsqu’il est possible de se conformer au règlement et à la législation applicable, mais que l’application du règlement entrave la réalisation de l’objet de cette législation.[151] L’examen du contexte législatif peut permettre de déterminer s’il y a un conflit ou une incompatibilité d’objet.[152]
[108] Cette façon de procéder est reprise récemment par notre Cour dans le cas d’une inconciliabilité entre un règlement municipal et une loi provinciale.[153] Toutefois, le deuxième volet n’est généralement pas retenu dans l’analyse de l’inconciliabilité avec la norme provinciale.[154]
Le conflit avec la norme provinciale
[109] La résolution d’un conflit entre un règlement municipal et la législation provinciale est prévue à la LCM : [155]
3. Toute disposition d’un règlement d’une municipalité adopté en vertu de la présente loi, inconciliable avec celle d’une loi ou d’un règlement du gouvernement ou d’un de ses ministres est inopérante.
[110] À cet égard, la LCM est rédigée en termes larges et généraux ce qui donne une certaine latitude à la Ville pour adopter une réglementation dans les domaines de la sécurité, des nuisances et du bien-être général de la population.
[111] La LCM mentionne :
2. Les dispositions de la présente loi accordent aux municipalités des pouvoirs leur permettant de répondre aux besoins municipaux, divers et évolutifs, dans l’intérêt de leur population. Elles ne doivent pas s’interpréter de façon littérale ou restrictive.
4. En outre des compétences qui lui sont conférées par d’autres lois, toute municipalité locale a compétence dans les domaines suivants : 1° la culture, les loisirs, les activités communautaires et les parcs ; 2° le développement économique local, dans la mesure prévue au chapitre III ; 3° la production d’énergie et les systèmes communautaires de télécommunication ; 4° l’environnement ; 5° la salubrité ; 6° les nuisances ; 7° la sécurité ; 8° le transport.
Elle peut adopter toute mesure non réglementaire dans les domaines prévus au premier alinéa ainsi qu’en matière de services de garde à l’enfance. Néanmoins, une municipalité locale ne peut déléguer un pouvoir dans ces domaines que dans la mesure prévue par la loi.
62. Une municipalité locale peut adopter des règlements en matière de sécurité.
La municipalité peut procéder à l’enlèvement d’un obstacle sur le domaine public aux frais de toute personne qui ne se conforme pas à un règlement de la municipalité à cet effet.
85. En outre des pouvoirs réglementaires prévus à la présente loi, toute municipalité locale peut adopter tout règlement pour assurer la paix, l’ordre, le bon gouvernement et le bien-être général de sa population.
(Soulignements par le Tribunal)
[112] La LCM établit, en terme large, que les municipalités ont le pouvoir de réglementer la « sécurité »[156], les « nuisances »[157] de même que pour « assurer la paix, l’ordre, le bon gouvernement et le bien-être général de sa population »[158]. Cette loi ne prévoit pas explicitement une délégation de pouvoirs relativement à la chasse, le contrôle de la faune ou le contrôle des armes à feu.
[113] La Cour suprême précise dans Spraytech que la législation provinciale a préséance sur un règlement municipal en cas de conflit d’application. Dans un tel cas, le règlement municipal est inopérant, mais seulement dans la mesure du conflit.[159]
Le délai d’inaction judiciaire
[114] L’exigence du délai raisonnable ne s’applique pas lorsque le contrôle judiciaire porte sur un motif d’absence[160] ou d’excès de compétence[161]; de conflit ou d’incompatibilité entre un règlement et les normes fédérales en raison du partage constitutionnel des compétences[162]. Il en est de même lorsque la norme sous contrôle est ultra vires et de nullité absolue.[163]
[115] À ce sujet, la Cour d’appel confirme dans Ville de Brossard c. Ville de Longueuil[164] que la règle de Lorraine (Ville de) c. 2646-8926 Québec inc.[165] continue de s’appliquer malgré Vavilov :
[110] Plus récemment, la Cour suprême, sous la plume du juge en chef Wagner, écrivait dans Lorraine (Ville de) c. 2646-8926 Québec inc. :
[25] Une demande en nullité présentée à l’encontre d’un règlement municipal pour cause d’abus de pouvoir doit être formée dans un délai raisonnable. En effet, la saisine de la Cour supérieure au moyen d’une demande en nullité repose sur son pouvoir général de contrôle ou de surveillance à l’égard des actes de l’Administration, dont ceux des conseils municipaux (Code de procédure civile, RLRQ, c. C-25, art. 33 (maintenant Code de procédure civile, RLRQ, c. C-25.01, art. 34 (« C.p.c. »))). L’exercice de ce pouvoir inhérent étant discrétionnaire, la Cour supérieure peut rejeter le recours entrepris par un justiciable qui a omis de se pourvoir dans un délai raisonnable. Toutefois, cette discrétion ne peut être exercée que dans les cas où le demandeur cherche à faire déclarer la nullité d’un règlement qu’il estime abusif, et non dans ceux où la nullité est demandée pour cause d’absence de compétence ou d’excès de compétence.
[Soulignements ajoutés]
[111] Ainsi, en cas d’absence ou d’excès de compétence, la Cour supérieure n’a pas discrétion afin de refuser de déclarer nulle la disposition attaquée.
[112] Comment doit-on alors concilier le fait que dans Vavilov la Cour suprême écarte le concept même d’absence de compétence, situation auparavant susceptible de mener à l’application de la norme de la décision correcte, et le fait que cette absence totale de compétence constitue l’exception à l’exercice de la discrétion judiciaire dans le cadre de ce même pourvoi en contrôle judiciaire?
[113] À mon avis, il ne fait, d’abord, aucun doute que la Cour suprême dans Vavilov n’a pas modifié les paramètres d’exercice de la discrétion judiciaire du juge saisi d’une demande en révision judiciaire, un des attributs fondamentaux du pouvoir constitutionnel de contrôle et de surveillance de la Cour supérieure. Il m’apparaît plutôt que l'absence totale de compétence à laquelle le juge Gonthier réfère correspond aux situations lors desquelles l’application de la norme de contrôle (que celle-ci soit la norme dite correcte ou celle de la raisonnabilité) et suivant le principe d’interprétation moderne, une seule interprétation raisonnable du pouvoir habilitant la municipalité à poser l’acte attaqué s’impose, et que cette interprétation mène à la conclusion que la municipalité, en agissant sans pouvoir législatif, ne pouvait poser l’acte en question.
(Références omises et soulignement par le Tribunal)
[116] Dans les autres cas, l’article 529 al. 3 du Code de procédure civile établit que le pourvoi en contrôle judiciaire doit être introduit dans un délai raisonnable. Le Tribunal apprécie ce délai en tenant compte, entre autres, de la nature de l’acte soumis au contrôle judiciaire, des causes du délai et du comportement des demandeurs.[166]
[117] L’appréciation de la raisonnabilité du délai pour agir en justice relève de la discrétion du juge de première instance[167] et varie selon les circonstances[168]. Chaque cas doit être analysé à son mérite et le Tribunal doit pondérer les explications fournies par les demandeurs pour justifier la période d’inaction judiciaire.[169]
[118] Le pourvoi en contrôle judiciaire d’un règlement municipal doit être exercé avec diligence, voire dans les plus brefs délais possibles[170], en raison du principe de la stabilité des lois[171] de même que celui de l’équité[172]. Toutefois, le délai de trente (30) jours, souvent invoqué en jurisprudence, ne s’applique pas aux pourvois en contrôle judiciaire qui visent un règlement municipal. À cet égard, notre Cour dans Restaurants Canada c. Villes de Montréal, mentionne:[173]
[48] Le procureur de la demanderesse et des intervenantes a fait une démonstration convaincante par la jurisprudence que le délai de trente (30) jours invoqué par la ville de Montréal comme étant le délai raisonnable à l'intérieur duquel un pourvoi en contrôle judiciaire doit être intenté ne s'applique qu'au pourvoi à l'encontre de décisions judiciaires ou quasi judiciaires et non pas à la réglementation municipale.[174]
[119] L’adoption d’un règlement municipal crée une présomption légale de sa connaissance par l’ensemble des citoyens de la municipalité.[175] Cela dit, la raisonnabilité de la période d’inaction ne s’apprécie pas nécessairement en fonction du moment où les demandeurs prennent connaissance du règlement ou sont présumés le connaître.[176]
[120] Plusieurs raisons peuvent justifier un délai d’inaction judiciaire important : la complexité des questions soulevées, en fait comme en droit, le caractère inédit ou inusité des actes examinés, la nécessité de faire enquête, la difficulté d’obtenir les informations requises de même qu’une surcharge de travail chez les procureurs chargés de l’affaire.[177]
[121] Le Tribunal doit soupeser l’ensemble de ces considérations dans son évaluation du délai raisonnable lorsque le pourvoi en contrôle judiciaire demande la nullité d’un règlement municipal, entre autres, lorsqu’il est abusif[178].
[122] La partie demanderesse a le fardeau de prouver que la période d’inaction judiciaire est raisonnable.[179]
[123] Le droit de légiférer le domaine de la chasse découle des champs de compétence distribués par la Loi constitutionnelle de 1867[180]. Ce droit est exercé par l’Assemblée nationale par l’adoption de la LCMVF qui réglemente la pratique de la chasse au Québec.
[124] La province détient la compétence relativement à la conservation de la faune ─ autre que les oiseaux migrateurs ─ la chasse et les armes autorisées pour cette activité. L’article 109 et les paragraphes 92 (5) et 92 (13) de la Loi constitutionnelle de 1867 donnent la compétence aux provinces sur la conservation du gibier et sur l’émission de permis de chasse.[181]
[125] Le pouvoir fédéral, relativement aux oiseaux migrateurs, repose sur la compétence fédérale de mettre en œuvre les traités internationaux en vertu de l’article 132 de la Loi constitutionnelle de 1867[182] et ce pouvoir s’exerce dans le respect des autres normes fédérales, provinciales, territoriales et municipales. Il s’agit d’une exception dans l’exercice de la compétence provinciale dans la gestion et la chasse de la faune qui découle normalement du pouvoir de réglementer la propriété et les droits civils[183] de même que les questions de nature locale[184].
[126] La Loi de 1994 sur la convention concernant les oiseaux migrateurs[185] a comme objet de mettre en œuvre la convention sur la protection et la conservation des oiseaux migrateurs (individus et populations) et de leurs nids.[186] Il ne s’agit pas d’une loi dont l’objectif est de légiférer la chasse des oiseaux migrateurs. Les autorisations de tuer prévues au règlement sur les oiseaux migrateurs servent plutôt à contrôler cette faune ailée.
[127] À ce sujet, la Cour suprême mentionne dans R. c. Felawka :[187]
Dans ce domaine du droit, la réglementation des armes à feu n’est pas monolithique. Un éventail de lois réglemente les armes à feu à des fins diverses. Au niveau fédéral, compte tenu du grave danger que présentent les fusils, la réglementation en matière d’armes à feu relève de la compétence en matière de droit criminel conférée par le par. 91(27) de la Loi constitutionnelle de 1867. […] Par ailleurs, les règlements provinciaux relatifs à l’utilisation d’armes à feu pour chasser relèvent de la compétence provinciale en raison de leur nature locale (par. 92(16) de la Loi constitutionnelle de 1867) ou du fait qu’ils sont relatifs à la propriété et aux droits civils (par. 92(13)) […].
(Soulignement du Tribunal)
[128] De plus, la Cour suprême précise dans La Reine c. Sutherland :[188]
[10] Le droit constitutionnel d'une province, d'édicter des lois d'application générale relatives au gibier, est incontestable, tout comme le droit de désigner raisonnablement et de bonne foi des aires de protection de la faune, afin d'assurer la continuité de l'approvisionnement en gibier. […]
[129] Puis, la Cour supérieure confirme, plus récemment, que les provinces peuvent légiférer la chasse :[189]
[36] […] there can be no doubt that provincial legislation aimed at the protection and conservation of game is valid as being a matter of a local nature (BNA Act, s. 92 (16) or as relating to property and civil rights (s. 92 (13)). (…) I am, however of the view that the province may, as a local or private matter or as a matter of property and civil rights, validly regulate hunting, including regulations directed at safeguarding persons and property from the activities of those engaged in hunting.
[130] Au Québec, le droit de chasser est intégré à la LCMVF[190] en décembre 2002 par la Loi modifiant la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune[191].
[131] La LCMVF est une loi d’ordre public.[192] Elle mentionne que la chasse et le piégeage sont interdits et que seul le ministre peut l’autoriser par règlement[193]. Il détermine, entre autres, les normes de sécurité, les périodes de chasse, de pêche ou de piégeage de même que les zones, le territoire ou les endroits où ces activités peuvent s’exercer. Les catégories d’animaux qui peuvent être chassées de même que les catégories d’armes ou de pièges sont également précisées par règlements ministériels.[194]
[132] Puis, la province adopte en vertu de la LCMVF des règlements qui balisent l’activité de la chasse, entre autres:
[133] Bref, la province exerce sa compétence relativement à la gestion et la chasse de la faune, à l’exception des oiseaux migrateurs. L’autorité de la province sur ces sujets découle de son pouvoir de réglementer la propriété et les droits civils[198] de même que les questions de nature locale[199]. Ainsi, seule la province peut décider de déléguer aux municipalités le pouvoir de réglementer ces domaines.
[134] Les questions en litige sont les suivantes :
Le Règlement 1153 outrepasse-t-il les pouvoirs délégués par la province ?
Réponse du Tribunal: OUI.
Le contenu et le processus qui ont conduit à l’adoption du Règlement 1153 sont‑ils déraisonnables ?
Réponse du Tribunal: OUI.
Les articles 2, 3 et 6 du Règlement 1153 entrent-ils en conflit avec certaines normes fédérales et provinciales ?
Réponse du Tribunal: OUI.
L'exigence du délai raisonnable s'applique-t-il ?
Réponse du Tribunal: NON.
[135] Les réponses à ces questions donnent raison à la plupart des conclusions demandées à la Demande de pourvoi en contrôle judiciaire remodifiée en date du 10 novembre 2021 (sixième modification)[200] mais pas à celles du PGQ à son Intervention de la mise en cause Procureure générale du Québec[201].
[136] La question centrale que pose ce pourvoi en contrôle judiciaire est de savoir dans quelle mesure la Ville peut réglementer l’usage et la possession d’armes sur son territoire tout en respectant les normes provinciales dans le domaine de la chasse.[202] Peu de décisions permettent de répondre à cette question.[203]
[137] La norme de contrôle de la décision raisonnable s’applique en l’instance pour déterminer si la Ville a outrepassé les pouvoirs délégués par la province[204], si ces pouvoirs ont été exercés raisonnablement[205] et si le Règlement 1153 entre en conflit avec la norme provinciale[206]. Rappelons que les normes de contrôle ne sont pas invoquées lorsqu’il s’agit d’un débat qui implique la prépondérance fédérale.[207]
[138] Le PGQ plaide que le Règlement 1153 est ultra vires des compétences de la Ville puisqu’elle n’a pas le pouvoir de prohiber totalement la chasse. Il invite le Tribunal à répondre à cette question en appliquant la norme de la décision correcte. Le Tribunal considère que la Ville peut adopter un règlement qui a une incidence raisonnable sur la chasse de sorte que le Tribunal situe le pourvoi plutôt sur la « manière » que la Ville exerce son pouvoir.
[139] L’analyse de ces questions mène le Tribunal à conclure que les articles 3 et 6 sont nuls puisque le processus qui mène à leur adoption, de même que leur contenu sont déraisonnables. Puis, les articles 2, 3 et 6 sont inopérants parce qu’ils se heurtent directement à plusieurs normes provinciales. L’article 2 entre même en conflit avec les normes fédérales relativement au transport des armes à feu.
8.1 LES ARGUMENTS CONSTITUTIONNELS
[140] Les parties n’entreprennent pas formellement de démarche pour évaluer la validité constitutionnelle du Règlement 1153.
[141] Les demandeurs cherchent néanmoins à faire déclarer les articles 3 et 6 du Règlement 1153 inopérants dans la mesure de leur incompatibilité avec les règles fédérales relatives au transport des armes à feu et aux oiseaux migrateurs. Ils invoquent la doctrine constitutionnelle de la prépondérance fédérale, mais le débat constitutionnel s’arrête là.[208]
[142] Certains commentaires s’imposent toutefois puisque les parties avancent certaines considérations sur le plan des « compétences » en entremêlant celles entendues sur le plan constitutionnel de celles comprises en droit administratif.
[143] D’abord, le PGQ demande à son acte d’intervention que les articles 3 et 6 du Règlement 1153 soient déclarés « constitutionnellement ultra vires »[209]. Il s’agit sans aucun doute d’une erreur d’écriture[210] puisque durant l’audience, le PGQ ne conteste pas la validité de ces articles devant les compétences énumérées à la Loi constitutionnelle de 1867[211]. Malgré tout, le PGQ plaide la « doctrine du caractère véritable » en invoquant des arrêts de principe de la Cour suprême dans le domaine du droit constitutionnel.[212]
[144] La Ville plaide également la « doctrine du caractère véritable » et la « théorie du double aspect ». Elle semble répondre, par extension, à la question de l’ultra vires plaidée par le PGQ.[213]
[145] La discussion entre les parties relativement au « caractère véritable » du Règlement 1153 paraît juridiquement mal dirigée puisque cette doctrine s’applique dans une démarche constitutionnelle afin d’établir, entre autres, si un règlement municipal s’inscrit dans l’une des compétences constitutionnelles du palier provincial.[214]
[146] Cette discussion émerge du débat engagé entre les parties relativement à la teneur du Règlement 1153. Bien que la notion du « caractère véritable » soit parfois utilisée, par analogie, en droit municipal[215], elle appartient en premier lieu au domaine constitutionnel[216]. Cela étant, il n'est pas nécessaire d’élaborer sur la théorie du double aspect.
[147] La Cour d’appel mentionne dans l’arrêt Beaconsfield (Ville) c. Bourbonnière, ce qui suit : « […] le débat, en l’absence de toute attaque contre la loi habilitante, donc présumée valide, ne peut se régler que sur la base de droit administratif, et non pas de droit constitutionnel. ».[217]
[148] Ainsi, en l’absence de représentations complètes par les parties relatives à une démarche constitutionnelle, le Tribunal présume que le Règlement 1153 et les dispositions provinciales soulevées par ce pourvoi s’inscrivent validement dans les champs de compétence relatifs à la propriété et aux droits civils, aux matières de nature purement locale ou à l’administration des terres publiques appartenant à la province[218].
[149] Pour l’ensemble de ces raisons, le Tribunal ne s’engage pas dans une démarche constitutionnelle à l’exception de la doctrine de la prépondérance fédérale qui s’applique à l’article 2 du Règlement 1153.[219]
8.2 LA TENEUR DU RÈGLEMENT 1153
[150] Ce pourvoi déclenche un débat animé pour déterminer la teneur ou la nature du Règlement 1153. La Ville soutient que son règlement a comme objectif d’améliorer la sécurité alors que les demandeurs et le PGQ considèrent qu’il vise plutôt à interdire totalement la chasse sur le territoire de Mascouche.
[151] Le Tribunal est convié à déterminer la teneur du Règlement 1153 afin d’évaluer si la Ville respecte les limites des pouvoirs délégués par la province et si son contenu est (dé) raisonnable. Rappelons que le contrôle de la teneur du règlement est fondé sur une « présomption fondamentale, découlant de la primauté du droit, selon laquelle le législateur ne peut avoir voulu que le pouvoir qu'il a délégué soit exercé de façon déraisonnable, ou, dans certains cas, incorrecte »[220].
[152] À cette fin, le Tribunal s‘inspire de la démarche analytique pour déterminer le « caractère véritable » d’une loi ou même d’un règlement dans une démarche constitutionnelle.[221] En résumé, il s’agit de cerner la caractéristique dominante du Règlement 1153 en interprétant son contenu et le processus dans lequel il a été adopté afin d’établir ses objectifs et ses effets. Cette appréciation permet de vérifier s’il « s'inscrit dans un éventail raisonnable d'issues possibles »[222].
[153] De prime abord, l’exercice s’avère aléatoire puisque plusieurs aspects des domaines de la chasse et de la sécurité se superposent. Leurs dénominateurs communs ─ dont l’usage d’armes à feu ─ compliquent la démarche. Pourtant, la preuve révèle plusieurs indices qui permettent de qualifier les objectifs du Règlement 1153 qui se révèlent être la délimitation de zones de chasse et la réglementation de la possession de même que l’usage d’Armes. Son effet est toutefois contraire à ces objectifs puisque le Règlement 1153 interdit totalement l’usage d’Armes et ainsi la chasse à Mascouche.
[154] Effectivement, l’objet et l’effet du Règlement 1153 détonnent puisque les articles 2 et 6 laissent croire qu’il est possible de chasser à Mascouche alors que l’article 3 interdit totalement l’usage d’Arme ─ en tous lieux ─ sur le territoire de la Ville. L’effet du Règlement 1153 ─ interdire totalement la chasse ─ caractérise fondamentalement cet acte municipal. En définitive, la teneur du Règlement 1153 est de prohiber la chasse à Mascouche.
[155] Le Règlement 1153 a été élaboré à la demande du Service de la sécurité publique de la Ville pour actualiser l’ancien Règlement 536. Une correspondance interne du Service de la sécurité publique du 11 février 2010, signé par Sylvain Goulet, coordonnateur administratif du Service de la sécurité publique, révèle les intentions de la Ville.[223] Il s’agit de la seule preuve documentaire qui permet de comprendre la démarche de la Ville. La voici reproduite avec les soulignements du Tribunal :
Correspondance interne
Le 11 février 2010
À : Madame Julie Laurin, assistante greffière
Service du greffe
De : Service de la sécurité publique
Objet : PROJET D’AMENDEMENT
RÈGLEMENT 536 CONCERNANT LES ARMES À FEU
________________________________________________________________
Madame Laurin,
Relativement au projet d’amendement du règlement 536 concernant les armes à feu, nous vous décrivons quelques points qui, nous l’espérons, motiveront l’adoption de ce projet d’amendement, et ce, dans les meilleurs délais.
Nous espérons que ces points sauront convaincre le Service du greffe et renforcer le désir d’aller de l’avant dans le projet d’amendement proposé, et ce, le plus rapidement possible.
Recevez, Madame Laurin, l’expression de nos sentiments distingués.
Sylvain Goulet
Coordonnateur administratif
Service de la sécurité publique
[156] Sylvain Goulet ne témoigne pas à l’audience malgré les tentatives du procureur de la Ville de communiquer avec lui et le mandat d’amener lancé par le Tribunal et reconduit durant l’audition.[224]
[157] Monsieur Francis Caron, directeur du service de police de Mascouche, du mois de mai 2008 à juin 2017, témoigne à l’audience.[225] Il explique le contexte dans lequel le Règlement 1153 a été adopté :[226]
[158] De plus, Francis Caron, lors de son interrogatoire au préalable du 27 novembre 2019, mentionne :
« Bon, le contexte, c’était un contexte de (…) il y a différents problèmes qui ont été portés à notre attention sur le territoire. On parlait d’interventions, là, sur le terrain auprès de chasseurs principalement.» ;
« Notre règlement à l’époque était un petit peu plus vague, puis nous, c’était difficile d’intervenir pour nos policiers terrain. C’est que, là, on avait des problèmes au niveau des limites territoriales. On pouvait retrouver un chasseur qui était posté, si vous voulez, à La Plaine, mais il chassait à Mascouche. » ;
« Autrement dit, son tir, s’il tirait, il tirait, il tirait sur notre territoire ou l’inverse, le chasseur était positionné à Mascouche, mais il tirait à La Plaine. On avait aussi des gens qui chassaient près des parcs, des parcs de soccer. On est intervenus plusieurs fois pour sortir ces chasseurs-là. »[228]
« On a eu également, vous savez, Mascouche à l’époque était…On a vécu un boom démographique (…) Alors-là, les habitations, il y en a eu de plus en plus. On avait des plaintes pour faire interdire le motocross. » ;
« Dans ce cas-ci, la Ville, bon, ils voulaient favoriser des sentiers pédestres. On avait de plus en plus de sentiers équestres, on a beaucoup de ranches, alors là, on avait des interventions à faire. »
« La personne à cheval arrivait dans un sentier, puis là, il y avait un chasseur qui était positionné dans une cache. Bon, là, il n’a pas tiré, mais là, il a eu peur, il fait peur aux chevaux. Il fallait intervenir. »
« On arrivait, il n’était pas là ou il avait quitté, bon, on ne le trouvait pas. On ne patrouillait pas ces sentiers-là parce que nous autres, on intervenait en VTT. Alors, généralement, on n’était pas sur le fait, si vous voulez. Fais que ce qui a fait en sorte que l’application du règlement, on devait être plus restrictifs, parce qu’il faut être capable de l’appliquer aussi. Puis là, bien, ça nous causait un problème. »
« On avait trop de chasseurs sur le territoire puis un peu partout en zone semi-urbaine. Fais que là a découlé le règlement en question. »[229]
« Bien, un, c’est de prendre le chasseur sur le fait. Ça, c’était la première chose. La deuxième des choses était l’arme utilisée, parce que là, on était rendus aussi il fallait faire avec celui qui chassait à l’arc ou à l’arbalète. Il faisait (…) il apeurait également autant la jeune fille qui était à cheval ou le groupe de jeunes, là, qui faisaient du cross-country, là. Bon, bien, c’est tous des éléments qui faisaient que, à un moment donné, on avait beau dire : « Oui, vous avez le droit de chasse provincial, mais sur le territoire, ça ne fonctionne pas parce que, là, il y a des gens ici, là. » Ça fait que moi, étant moi-même chasseur … On n’a pas tous la même éthique, alors il y en a qui étirent un petit peu l’élastique, qui se disent : « Bien, regarde, ce n’est pas grave. Moi, je n’ai pas (…) je vais faire attention », mais ce n’est pas toujours comme ça que ça marche. »
« Je ne peux pas vous dire s’il y en a eu. Moi, à l’époque, j’avais comme mandaté Sylvain Goulet qui était coordonnateur administratif chez nous, qui était un cadre civil. C’est lui qui était en charge de … du contrôle animal chez nous. Bon. Vous me dites, ça n’a pas rapport au règlement de la chasse, mais en même temps, bien, je lui ai dit : « Écoute, là, tu vas tasser un petit peu de choses, puis tu vas t’occuper de ça. Tu vas faire un petit peu de recherches aussi sur ce qui se fait ailleurs. » Puis alors, il a dû rencontrer des gens, mais moi, je n’étais pas présent à tous … à toutes ces rencontres-là, puis qui était présent, je ne peux pas vous dire non plus, là, mais sauf que le produit final, moi, c’est clair que je l’ai vu, puis oui, je l’ai supporté. Au moment de le présenter au conseil, c’est moi qui l’a supporté. »
(…)
« La mémoire que j’en ai de ça, là, c’est … je crois que c’est monsieur Goulet, là, qui a dû aller … à ce que je sache, là, il s’est adressé aux greffes de différentes villes pour obtenir leur réglementation. Et à partir de là, il y a eu comme un (…) il a comme été cherché des éléments dans chacun des règlements, puis il a soumis ça dans celui-là. C’est ce que je me souviens. »
« Bien, c’est une question de sécurité principalement. La police, c’est … ça se rattache à une question de sécurité, comment est-ce qu’on peut rendre le territoire sécure pour tout le monde, pour l’ensemble des usagers, autant les sentiers, bon, les jeunes, les plus vieux. C’est ça. C’était juste l’élément sécuritaire qui nous rattachait, ce n’est pas une question pécuniaire, pour dire : « Bon, bien, regarde, les amendes ne sont pas assez élevées. » Ce n’est pas ça, là. C’était plus au niveau de la sécurité des gens. »
« Une arme à feu était considérée comme une arme à feu. (…) peu importe le calibre. »
« Je vous ramène encore au recueil des différents règlements, puis je pense que la distance d’un kilomètre (1 km) a été partie (…) est partie de là. Puis aussi, c’était une distance qui était quand même raisonnable à partir de l’application, pour nous autres, là, ce qu’on avait vécu à l’intérieur de nos interventions, un kilomètre (1 km), là, c’est ça. »
« Ce n’était pas l’objectif de la Ville. (…) Non, ce n’était pas une de ses préoccupations. La préoccupation était simplement que toute personne pouvait se promener en sécurité partout. C’est ça la préoccupation, la (…) l’exception était le chasseur, c’est comme je vous dis. Moi, je vais en pourvoirie, je vais sur la Sépaq, je vais en pourvoirie. À un moment donné, il faut que tu t’adaptes aussi à l’évolution de la société. Puis bon, là, comme je vous ai dit, la démographie, on l’a vécu, un boom de démographie, c’est que ce qu’on pouvait faire v’là vingt-cinq (25) ans puis trente (30) ans … Quand je suis arrivé à Mascouche v’là trente (30) ans, là, on avait des rangs, puis je vous dirais, ce n’était la même image qu’on a là. Oui, il y avait de la chasse, puis effectivement, puis en dessous des pylônes électriques, il y avait peut-être trente (30) chevreuils, là, puis c’était régulier, puis … Bon. Mais aller là, là, il n’y en a plus trente (30) chevreuils. Aujourd’hui, il y en a un (1) de temps en temps, mais on n’en voit plus. Mais tu ne peux plus chasser parce que, effectivement, il y a des constructions, puis il y a des résidences puis des jeunes familles, puis ça s’établit. Et ils recherchent des grands espaces, puis … Fait que là, les grands espaces, ce n’est pas dans le centre-ville, c’est un peu partout. »
Q. « O.K. Est-ce que la Ville ou les instances décisionnelles se sont questionnées sur l’impact du règlement quant aux populations animales? Par exemple, est- ce qu’il y aurait trop de chevreuils si on empêche la chasse ou est-ce qu’il n’y en aurait plus assez, ou, t’sais, à l’impact du règlement sur les populations animales en général, les oiseaux?
R. Je ne me souviens pas que ça a été discuté, là.
Q. Donc, dans les réunions de travail auxquelles vous avez assisté, ce n’est pas quelque chose qui aurait été abordé?
R. La population?
Q. Les populations animales, l’impact.
R. Non, je ne me souviens pas de ça. »
Q. « Donc, par exemple, dans l’utilisation d’une arme à feu pour effaroucher des oiseaux, là; sur le territoire de la Ville de Mascouche, est-ce que c’est permis quelque part?
R. Non.
Q. Non?
R. Non.
Q. Je vais reprendre …
R. Juste pour vous dire, madame, la personne qui passe sa tondeuse le dimanche matin à sept heures (07h00), on a des téléphones, puis on devait intervenir parce que ça dérangeait, alors encore plus pour effaroucher. Non. »
[159] Puis, Francis Caron mentionne qu’il n’y a pas eu d’accident lié à l’utilisation d’une arme durant sa gouverne comme chef de police :[230]
Q. « Est-ce qu’il y a déjà eu des accidents liés à une situation d’arc ou d’arbalète, au meilleur de votre connaissance, là ?
R. Je ne crois pas qu’il… Écoutez, je n’ai pas mémoire qu’il ait eu un accident, mais qu’il y ait eu une intervention parce que le voisin appelle en disant : « Bien, écoutez, là, mon voisin, il tire de l’arc dans la cour en arrière puis il tire vers mon cabanon ou vers ma clôture, puis moi, j’ai peur», ça, c’est arrivé, mais accidents, je n’ai pas mémoire qu’il y est eu d’accident, non.
O.K. De manière plus générale, là, et on parle d’armes légales, là, utilisées pour la chasse, dans un contexte de chasse, est-ce qu’il y a déjà eu des accidents sur le territoire de la Ville de Mascouche, au meilleur de votre connaissance?
R. Ah, mon doux…Pas à ma souvenance, non. »
[160] Sylvain Caron se souvient pourtant d’accidents impliquant des chasseurs lors de son témoignage du 23 novembre 2021, mais ne s’en rappelle pas lors de son interrogatoire au préalable du 27 novembre 2019. Ces contradictions incitent le Tribunal à demander un complément de preuve pour vérifier la véracité des allégations de Sylvain Caron, sans résultat.[231]
[161] D’ailleurs, la Ville admet qu’il n’y a pas eu d’accident de chasse avec une Arme sur le territoire de la Ville lorsque Francis Caron était directeur du service de police de mai 2008, jusqu’à l’adoption du règlement en 2010.[232] À cela s’ajoute l’absence de preuve relativement aux délits commis à Mascouche en vertu du Règlement 1153 depuis son adoption, à l’exception des constats d’infractions remis à Jean-Guy Ouellette et son fils François Ouellette.[233]
[162] Monsieur Yohan Champagne, directeur du service d’aménagement du territoire depuis six (6) ans, témoigne à l’audience :
[163] Les articles 2 et 6, de même que la tentative de réforme du Règlement 1153, démontrent l’intention de la Ville à délimiter des zones de chasse sur son territoire.
[164] L’article 2 al. 2 prévoit une dérogation au principe général du premier alinéa de sorte qu’il est possible d’être en « possession » d’une Arme ou d’une « Arme blanche » à « un poste d’affût de chasse durant les périodes de chasse ». Un poste d’affût constitue un lieu de chasse. Pourtant, cet article ne fait pas référence à l’interdiction de l’usage d’une Arme prévue à l’article 3.
[165] L’article 2 al. 2 insinue également qu’il est permis d’être en possession d’une Arme « dans une place publique si celle-ci est emprunté pour se rendre à un poste d’affût de chasse durant les périodes de chasse ». Il n’est toutefois pas permis de l’utiliser, si un individu se trouve « (…) à l’intérieur d’un périmètre d’un (1) kilomètre de toute place publique, bâtiment, terrain privé, poste de transformation électrique, de ligne électrique, chemin de fer et de toute ville limitrophe à la Ville », comme prévu à article 3.
[166] Puis, l’article 6 autorise la chasse, sans préciser qu’il soit possible de le faire avec une Arme, « […] sur un terrain privé d’une superficie d’au moins 40 000 mètres carrés […] si les dispositions du présent règlement et les dispositions législatives provinciales et fédérales relatives à la chasse, entre autres celles concernant les périodes de chasse et les permis, sont respectées ». A contrario, cette disposition prohibe la chasse sur les terrains qui ne satisfont pas ces critères.
[167] Ainsi, l’objectif de l’article 6 du Règlement 1153 est de prohiber directement la chasse sur tout terrain qui n’est pas zoné agricole et/ou d’une superficie inférieure à 40 000 m2. À cela s’ajoute la précision « si les dispositions du présent règlement […], sont respectées », ce qui mène à conclure que l’interdiction prévue à l’article 3 s’applique aux endroits identifiés par l’article 6. Les articles 2, 3 et 6 s’appliquent dans un désordre contradictoire, mais leur effet direct est d’interdire la chasse à Mascouche.
[168] La Ville a l’intention, en adoptant l’article 3, de délimiter des zones où il est interdit d’utiliser une Arme pour améliorer la sécurité publique. Cette interdiction est mur-à-mur[234] et Mascouche devient ainsi une seule zone. Toutefois, la preuve ne révèle pas qu’il s’agit de l’intention initiale de la Ville.
[169] Tout étant considéré, le Tribunal est d’avis que le Règlement 1153 a été adopté dans le but de délimiter les zones de chasse et réglementer la possession et l’usage d’Armes dans une perspective de sécurité publique. Son effet ─ interdiction totale de la chasse ─ se trouve toutefois en porte à faux avec ces objectifs.
[170] L’article 3 du Règlement 1153 a comme effet d’interdire l’utilisation d’Armes sur tout le territoire de la Ville. La Ville l’apprend durant l’instance lorsque les demandeurs déposent le rapport de l’arpenteure-géomètre Chantal Arguin qui révèle qu’il n’y a aucun endroit sur le territoire de la Ville où il est permis d’utiliser une Arme.[235] En conséquence, il n’est pas possible de chasser avec une Arme à Mascouche même sur un terrain privé et zoné agricole de plus de 40 000 m2, comme le permet pourtant l’article 6.
[171] Comme l’explique le rapport d’expertise géospatiale, cette prohibition est causée, entre autres, par la mise en carte des lieux énumérés à la définition de « Place publique » du règlement.
[172] L’article 1 du Règlement 1153 définit « Place publique » comme suit :
Endroit où des personnes s’assemblent ou se réunissent pour des fins civiques, militaires, politiques, syndicales, religieuses, sociales, éducatives, récréatives, sportives, de voyage ou autres, y compris d’une façon non limitative les endroits suivants : théâtre, magasin, garage, église, école, restaurant, boutique, édifices municipal et gouvernemental, hôtel, motel, auberge, bar, discothèque ou tout autre établissement du genre CLSC, clinique, hôpital et collège ainsi qu’une rue, une ruelle, un trottoir, un chemin public, une promenade, un passage piétonnier, un quai, un parc, un jardin, un sentier et tout autre endroit accessible au public;
[173] La Ville avance que l’expression « Place publique » fait référence aux endroits énumérés qui servent à des personnes pour s’assembler ou se réunir.[236] Selon cette interprétation, une personne contrevient à l’article 2 lorsqu’elle est en possession ou utilise une Arme ─ et ─ se trouve à un endroit énuméré à la définition de « Place publique » ─ et ─ qui sert à des personnes pour s’assembler ou se réunir. Le même raisonnement est avancé pour expliquer la portée de l’article 3.
[174] Pour illustrer son argument, la Ville explique qu’une personne qui va au magasin pour s’acheter une arme ou qui circule sur un chemin public avec une arme « ne s’assemble ou ne se réunit pas ».[237] Cette explication implique que le contrevenant au Règlement 1153 doit, au surcroît de la commission de l’infraction, participer à un rassemblement. La Ville avance que toutes ces conditions doivent être réunies pour trouver une personne coupable d’une infraction en vertu de l’article 2 lorsqu’il se trouve à un endroit énuméré à la définition de « Place publique ».
[175] En pratique, une interpellation des policiers en vertu de l’article 2, en appliquant la définition de « Place publique » proposée par la Ville, mènerait à la vérification des raisons pour lesquelles des personnes s’assemblent à l’endroit de l’infraction. Cet exercice serait même nécessaire lorsque l’infraction a lieu sur « une rue, une ruelle, un trottoir, un chemin public, une promenade, un passage piétonnier, un quai, un parc, un jardin, un sentier ou tout autre endroit accessible au public ». En apparence, ces nuances n’ont pas été appréciées par les policiers lorsque le demandeur Jean-Guy Ouellette et son fils François Ouellette reçoivent leur constat d’infraction en vertu de l’article 3 du Règlement 1153.[238]
[176] Les demandeurs sont plutôt d’avis que les articles 2 et 3 s’appliquent, entre autres, à tous les endroits énumérés à la définition de « Place publique » sans qu’ils ne servent nécessairement de lieux de réunion ou de rassemblement. Selon cette interprétation, la tenue d’un rassemblement ou d’une réunion de personnes pour les fins, non limitatives, prévues à cette définition ne sont pas des conditions sine qua non à l’application de l’expression « Place publique » aux articles 2 et 3.
[177] L’ensemble des explications de la Ville, relativement à la définition de « Place publique », manque de cohérence. D’ailleurs, l’arpenteure-géomètre Chantal Arguin analyse les informations géographiques énumérées à l’article 3 sans référence aux nuances plaidées par la Ville relativement à la définition de « Place publique ». Ce rapport est pourtant admis par la Ville.[239]
[178] Le Tribunal est d’avis que la définition de « Place publique » prévue au Règlement 1153 inclut tous les endroits accessibles au public sur le territoire de la Ville ─ sans condition. Il s’agit de l’interprétation la plus sensée dans le contexte du Règlement 1153 d’autant plus que toutes les parties admettent sans réserve les conclusions du rapport de l’arpenteure-géomètre Chantal Arguin.
[179] L’interprétation des autres définitions du Règlement 1153 n’est pas contestée. Ainsi, la définition de « Arme » a comme effet d’interdire l’usage de pratiquement tous les types d’armes sur le territoire de la Ville. Puis, l’application des définitions de « Bâtiment » et « Terrain privé » à l’article 3 a un effet plutôt remarquable sur la portée de l’interdiction prévue à cette disposition.
[180] Tout étant considéré, le Tribunal conclut que l’interdiction totale d’utiliser une Arme sur le territoire de la Ville a comme effet fondamental de prohiber la chasse en tous lieux à Mascouche.
[181] La portée de l’article 3 stérilise les articles 2 al. 2 et 6 de leurs effets puisqu’il n’est pas possible de chasser sans arme. Autrement dit, l’article 3 impose une interdiction mur-à-mur d’utiliser une Arme de sorte que la permission de chasser prévue à l’article 6 est inapplicable.
[182] Puis, l’article 2 al. 2 laisse sous-entendre qu’il est possible de chasser « à un poste d’affût de chasse durant les périodes de chasse ». Mais l’application stricte des articles 2 et 3 du règlement mène à conclure qu’il est possible d’être en possession d’une Arme dans un poste d’affût, mais qu’il est interdit de l’utiliser.
[183] La Ville adopte le Règlement 1153 sans en vérifier la portée. Pourtant, l’application des définitions de « Place publique », « Bâtiment », « Terrain privé » et « Arme » à l’article 3 laissent planer de sérieux doutes sur la possibilité d’utiliser une Arme sur le territoire de la Ville. Les articles 6 et 2 al.2 donnent la fausse apparence qu’il est possible de chasser à Mascouche.
[184] La Ville est d’opinion que la chasse constitue un risque pour la sécurité publique. En effet, la correspondance interne du 11 février 2010 de même que le témoignage de Francis Caron expliquent que les chasseurs représentent une menace pour la population. Dans cette perspective, la chasse est le « mal à éradiquer » ou le « motif » pour remplacer l’ancien Règlement 536.
[185] À cet égard, la Ville et le PGQ sont incapables de prouver la dangerosité de la chasse ni même documenter des incidents impliquant des chasseurs à Mascouche ou ailleurs en province.[240] Ainsi, le Tribunal ne peut retenir comme avéré le témoignage de Monsieur Francis Caron relativement à la menace que représentent les chasseurs.
[186] L’examen du « mal » visé par le règlement n’est pas concluant. La Ville et le PGQ sont incapables de le mesurer et il n’est pas possible de conclure que le Règlement 1153 cherche à corriger un problème véritable. Tout cela contribue à éroder le caractère raisonnable du Règlement 1153.
[187] Au terme de cette analyse, le Tribunal croit que les effets du Règlement 1153 contredisent son objet. Réglementer la possession et l’usage d’Armes de même que délimiter certaines zones de chasse sont des objectifs légitimes. Mais le processus ayant mené à l’adoption du règlement mène à conclure que la Ville cherche à annihiler la possibilité de chasser à Mascouche.
[188] En conséquence, la caractéristique dominante du Règlement 1153 ─ interdiction totale de chasser à Mascouche ─ ne satisfait pas à la norme de la décision raisonnable.
8.3 LE CARACTÈRE DÉRAISONNABLE DU RÈGLEMENT 1153
[189] La Ville peut exercer ses pouvoirs relativement à la « sécurité »[241], les « nuisances »[242] de mêmes que pour « assurer la paix, l’ordre, le bon gouvernement et le bien-être général de sa population »[243] dans la mesure où ces pouvoirs sont exercés raisonnablement.
[190] Un règlement municipal peut avoir une incidence sur l’activité de la chasse mais ne peut être abusif ni constituer une fin détournée ou l’interdire totalement à moins d’une justification impérative. Il s’agit d’une question de degré et d’un exercice raisonnable des pouvoirs de la Ville.
[191] La Ville exerce déraisonnablement les pouvoirs qui lui sont conférés par la LCM puisqu’elle n’a pas le pouvoir d’adopter un règlement purement prohibitif. À cet égard, la province ne délègue pas le pouvoir à la Ville d’interdire totalement la chasse. Le Règlement 1153 constitue une prohibition formelle et totale de la chasse ce qui entraîne sa nullité.
[192] La Ville peut toutefois adopter des règlements dans les domaines qui lui sont dévolus par la LCM qui peuvent, raisonnablement, avoir une incidence sur l’activité de la chasse.
[193] Peu de décision soulève ce délicat exercice du pouvoir délégué des municipalités lorsque sa réglementation impacte le domaine de la chasse. Voici ce que la Cour municipale de Dorval mentionne relativement au contenu d’un règlement municipal sur la chasse:
34 Comme il a été soumis, le critère de qualification qu'il faut retenir en l'instance est la chasse, laquelle constitue une activité encadrée par la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune précitée.
35 Avec égards pour l'opinion contraire, il appert que les articles du règlement qui ont donné lieu au présent litige se trouvent à entrer en conflit avec cette Loi, ce que prohibe le texte même de l'article 410 de la Loi sur les cités et villes.
36 C'est par ailleurs avec raison que le procureur des défendeurs a soutenu, jurisprudence à l'appui, que la chasse n'est pas une nuisance en soi et qu'une municipalité ne peut créer une nuisance de toute pièce, non plus qu'elle peut régir la chasse sur son territoire.
37 Le tribunal fait siens les propos du juge Jean Crépeau dans Cité de Pointe-Claire c. Smith sur la définition du terme nuisance à partir de celle qu'avait retenue le juge Arthur Gendreau dans Anctil c. Cour municipale de la Pocatière, [1973] C.S. 238:
"La première caractéristique "une nuisance est de produire des inconvénients sérieux ou de porter atteinte, soit à la santé publique ou soit au bien-être de la communauté, ou d'une partie importante de la communauté. Cet élément nuisible, qu'il provienne d'un état de choses ou d'un acte illégal ou de l'usage abusif d'un objet ou d'un droit, a toujours un certain caractère de continuité et est intimement lié à la chose ou à l'acte."
38 Il a également lieu de reproduire l'extrait suivant des auteurs Duplessis et Hétu :
"On s'est demandé récemment si les municipalités pouvaient régir la chasse sur leur territoire. Nous ne le pensons pas; il s'agit de fait d'une compétence provinciale. Le juge Dickson écrivait, dans La Reine c. Sutherland, [1980] 2 R.C.S. 451 :
"Le droit constitutionnel d'une province d'édicter des lois d'application générale relatives au gibier, est incontestable, tout comme le droit de désigner raisonnablement et de bonne foi des aires de protection de la faune, afin d'assurer la continuité de l'approvisionnement en gibier."
39 Il y a plus, et le représentant du Procureur général du Québec a bien identifié la difficulté en l'instance comme en étant une d'ultra vires. La municipalité, en tentant de réglementer une matière qui appartient à une autre compétence, outrepasse alors ses pouvoirs.
40 Le pouvoir provincial est l'autorité compétente sur l'activité de la chasse comme le prévoit la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune précitée, et comme cette compétence n'a pas été conférée à la municipalité par la Loi sur les cités et villes qui est la loi habilitante, il s'ensuit que les articles 3.4.1, 6.1 et 9 du règlement 910-72 sont inapplicables et inopposables aux défendeurs.
(Soulignements du Tribunal)
[194] Puis, la Commission municipale du Québec mentionne, relativement au pouvoir délégué aux municipalités et la chasse:
[55] La compétence juridictionnelle en matière de chasse relève du gouvernement fédéral quant aux oiseaux migrateurs (Loi de 1994 sur la convention concernant les oiseaux migrateurs de 2002) et du gouvernement provincial quant aux autres espèces animales (Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune)
[56] La Ville de Laval n’a aucune compétence en la matière bien qu’elle puisse adopter des règlements municipaux pour maintenir la paix et le bon ordre et pour décréter des nuisances. Celle-ci par ses règlements municipaux et les pouvoirs qui lui sont attribués depuis le 1er janvier 2006 en vertu de la Loi sur les compétences municipales, interdit l’utilisation d’armes à feu sur son territoire. Cette compétence lui fut attribuée avant l’entrée en vigueur de la Loi sur les compétences municipales en vertu de la Loi sur les cités et villes.
(Soulignements du Tribunal)
[195] Pour sa part, la Cour municipale de Boucherville mentionne :
La Ville pouvait-elle prohiber la chasse à titre de nuisance ?
Je l’ai déjà dit, la chasse est une activité à facettes multiples et elle peut être pratiquée dans des circonstances bien différentes. Elle peut impliquer des armes ou des techniques tout à fait différentes de mise à mort ou de capture. Elle peut se pratiquer à l’égard d’animaux ou d’oiseaux bien différents aussi. Les moyens de recherche et de traquage du gibier se distinguent nécessairement suivant l’espèce visée. Je pourrais poursuivre, mais ces exemples suffisent, je crois, pour illustrer ma pensée.
Si tout ce qui est relié à la chasse n’est pas nécessairement à l’abri d’un règlement sur les nuisances lorsqu’il y a danger, inconvénient réel, abus ou excès sous un rapport ou un autre, je ne puis toutefois me convaincre que la chasse est une nuisance in se. Et c’est pourtant la chasse in se qui est visée par la prohibition de l’article 10.
L’honorable juge Chamberland a bien résumé le droit dans l’affaire Ville de Laval c. Bernard Prince[245] lorsqu’il écrit :
« La municipalité, s’appuyant sur le premier paragraphe de l’article 463 de la Loi sur les cités et villes, ne peut pas décréter que quelque chose (en l’espèce, un bruit), constitue une nuisance lorsque cette chose n’a aucun caractère nuisible, ne fait du tort, du mal à personne. La municipalité outrepasse donc le pouvoir que lui confère cet article lorsqu’elle décrète qu’un bruit d’une certaine intensité est prohibé parce que constituant une nuisance quand en fait, ce bruit n’a rien de nuisible, étant d’une intensité inférieure à l’intensité du bruit ambiant. En somme, le pouvoir de la municipalité de définir une nuisance et la supprimer ne comporte pas celui d’en créer une. [références omises]
Je suis d’opinion que la ville de Varennes a artificiellement décrété que la chasse, sans nuance aucune, était une nuisance alors que tel n’est pas le cas. La ville a donc excédé son pouvoir délégué de définir des nuisances.
CONCLUSION
En conséquence je considère que la présomption de validité a été repoussée et que l’article 10 du règlement 529, pour autant seulement qu’il décrète que la pratique de la chasse est une nuisance et prohibée, est ultra vires des pouvoirs de la ville.
(Soulignements du Tribunal)
[196] En l'espèce, l’article 3 du Règlement 1153 ne satisfait pas à la norme de la décision raisonnable.[246] Plusieurs éléments mènent à cette conclusion, entre autres :
[197] À cela s’ajoute la définition de « Arme » au Règlement 1153 qui démontre l’intention de la Ville d’interdire complètement l’utilisation de tout type d’armes sur son territoire, ce qui est également déraisonnable.
[198] En effet, les frondes, les arcs, les arbalètes, les carabines et les fusils n’ont pas la même portée ni létalité. Même d’une carabine à l’autre, la portée du tir varie selon le calibre de l’arme utilisée.[247]
[199] Le rapport d’expertise de M. Gianfranco Cavallo PhD établit la distance maximale que les projectiles de différentes armes peuvent atteindre.[248] Cette expertise mentionne, entre autres :
[200] La Ville impose une norme unique à l’égard de toutes les armes peu importe la portée réelle de celles qui sont utilisées par les chasseurs. Elle n’effectue pas ces vérifications d’ordre balistique ni ne vérifie la portée de l’article 3 du Règlement 1153.[249]
[201] Tout étant considéré, le Tribunal est d’avis que la Ville exerce ses pouvoirs de façon déraisonnable et que le contenu spécifique de l’article 3 constitue un empiétement abusif sur les droits des demandeurs, sans justification raisonnable.[250]
[202] Puis, l’article 6 s’avère impraticable puisque l’effet du règlement interdit l’utilisation d’une Arme sur l’ensemble du territoire de la Ville. Il s’agit d’un autre exemple du caractère déraisonnable et incongru du Règlement 1153.
[203] En conséquence, les articles 3 et 6 du Règlement 1153 sont nuls.
8.4 LES CONFLITS D’APPLICATION ET D’OBJET
[204] Rappelons l’importance de distinguer la façon d’aborder les conflits entre le Règlement 1153 et les normes fédérales de celles avec une loi ou un règlement provincial. Le conflit avec une loi fédérale est une question constitutionnelle ─ doctrine de la prépondérance fédérale ─ alors que celui avec une norme provinciale relève du droit municipal.
[205] L’exercice mène à conclure que les articles 2, 3 et 6 sont inopérants.
[206] L’article 2 du Règlement 1153 mentionne :
2. Il est interdit d’avoir en sa possession ou d’utiliser une arme ou une arme blanche dans une place publique ou dans un véhicule de transport public.
La possession d’une arme ou d’une arme blanche est cependant autorisée dans une place publique si celle-ci est empruntée pour se rendre à un poste d’affût de chasse durant les périodes de chasse.
(Soulignements du Tribunal)
[207] L’application de cette disposition se heurte, au palier fédéral, avec la Loi sur les armes à feu[251] et le Règlement sur l’entreposage, l’exposition, le transport et le maniement des armes à feu par des particuliers[252]. Puis, au palier provincial, avec la Loi visant à favoriser la protection des personnes à l’égard d’une activité impliquant des armes à feu[253].
Le conflit avec la norme fédérale
[208] L’article 2 du Règlement 1153 est incompatible avec les articles 19 et 20 de la Loi sur les armes à feu[254] et les articles 10 à 14 du Règlement sur l’entreposage, l’exposition, le transport et le maniement des armes à feu par des particuliers[255].
[209] Cette loi mentionne :[256]
Transport et usage d’armes à feu prohibées ou d’armes à feu à autorisation restreinte
19 (1) Le particulier titulaire d’un permis de possession d’armes à feu prohibées ou d’armes à feu à autorisation restreinte peut être autorisé à en transporter une en particulier entre des lieux précis pour toute raison valable, notamment :
[…]
Port d’armes à feu à autorisation restreinte et d’armes de poing
20 Le particulier titulaire d’un permis de possession d’armes à feu à autorisation restreinte ou d’armes de poing visées au paragraphe 12(6.1) (armes de poing : 1er décembre 1998) peut être autorisé à en posséder une en particulier en un lieu autre que celui où il est permis de la posséder, s’il en a besoin pour protéger sa vie ou celle d’autrui ou pour usage dans le cadre de son activité professionnelle légale.
(Soulignements du Tribunal)
[210] Ce règlement mentionne :[257]
TRANSPORT DES ARMES À FEU SANS RESTRICTION
10 (1) Le particulier ne peut transporter une arme à feu sans restriction que si les conditions suivantes sont respectées :
[…]
Transport des armes à feu à autorisation restreinte
11 Le particulier ne peut transporter une arme à feu à autorisation restreinte que si les conditions suivantes sont respectées :
[…]
Transport des armes à feu prohibées
12 Le particulier ne peut transporter une arme à feu prohibée que si les conditions suivantes sont respectées :
[…]
Transport des répliques
13 Le particulier ne peut transporter une réplique que si les conditions suivantes sont respectées :
[…]
Armes à feu historiques
14 (1) Le particulier ne peut entreposer, exposer ou transporter une arme à feu historique que si elle est non chargée.
(2) Le particulier ne peut transporter une arme à feu historique dans un véhicule non surveillé que si les conditions suivantes sont respectées :
[…]
[211] Ces normes établissent les conditions spécifiques du transport des armes à feu. Toutefois, l’article 2 du Règlement 1153 interdit la possession d’Arme dans une « Place publique ou dans un véhicule de transport public », sous réserve de l’exception prévue à l’alinéa 2. La définition de « Place publique » étend cette interdiction sur toutes les routes à Mascouche puisque la définition de « Place publique » inclut, notamment : « […] rue, ruelle, un trottoir, un chemin public, une promenade, un passage piétonnier […] ».
[212] Ainsi, le transport d’une Arme, qui implique sa possession, est formellement interdit sur les accès routiers de la Ville. Un individu peut donc, en même temps, transporter une arme à feu, en respectant ces normes fédérales, et commettre une infraction en vertu de l’article 2 du règlement.
[213] Le législateur fédéral précise les types d’armes visés par ces normes. À titre d’exemple, le Règlement sur l’entreposage, l’exposition, le transport et le maniement des armes à feu par des particuliers définit « arme de poing prohibée » comme étant celui prévu au paragraphe 84 (1) du Code criminel.[258] De façon contraire, le Règlement 1153 ne fait aucune distinction entre ces catégories d’armes à feu et vise les « Arme à feu de toute catégorie […] ou toute arme qui permet de tirer un projectile [...] ».[259]
[214] La Ville est d'avis que « […] l’objet de la Loi sur les armes à feu est de prévoir la délivrance de permis pour permettre la possession d’armes à feu en des circonstances qui ne donnent pas lieu à une infraction à certains articles du Code criminel ». Elle allègue aussi que « […] la Cour suprême du Canada a déjà réglé cette question en reconnaissant la théorie du double aspect qui permet aux différents ordres de gouvernements de réglementer les aspects relatifs à la sécurité publique en reconnaissant que la Loi sur les armes à feu, par son caractère véritable, a pour objet la sécurité publique. »[260]
[215] Le Tribunal diverge d’opinion puisque ces arguments ne s’appliquent pas au présent pourvoi pour les raisons mentionnées à la section 8.1 du présent jugement ─ Les arguments constitutionnels.
[216] En résumé, l’article 2 du Règlement 1153 interdit formellement les autorisations de transport d’armes à feu prévues à cette loi et ce règlement, ce qui entraîne un conflit véritable d’application. La coexistence de ces dispositions n’est pas possible et la prépondérance de la norme fédérale dispose de ces conflits d’application.
[217] En conséquence, l’article 2 est inopérant dans la mesure des conflits avec les articles 19 et 20 de la Loi sur les armes à feu, et les articles 10 à 14 du Règlement sur l’entreposage, l’exposition, le transport et le maniement des armes à feu par des particuliers.
Le conflit avec la norme provinciale
[218] L’article 2 du Règlement 1153 est inconciliable avec les articles 1 à 4 de la Loi visant à favoriser la protection des personnes à l’égard d’une activité impliquant des armes à feu[261].
[219] Cette loi mentionne :
1. La présente loi vise notamment à favoriser la protection des personnes qui fréquentent les lieux d’une institution désignée, lesquels comprennent l’ensemble des terrains dont elle dispose et les constructions qui y sont érigées. Sont des institutions désignées:
1° un centre de la petite enfance et une garderie, au sens de la Loi sur les services de garde éducatifs à l’enfance (chapitre S-4.1.1);
2° un jardin d’enfants au sens de l’article 153 de cette loi;
3° un service de garde en milieu scolaire, une école d’enseignement de niveau préscolaire, primaire et secondaire, un collège d’enseignement de niveau post-secondaire ou un collège d’enseignement général et professionnel, un centre de formation professionnelle, un centre d’éducation des adultes et une université.
[…]
La présente loi vise également à favoriser la protection des personnes qui utilisent un moyen de transport public, à l’exclusion du transport par taxi ou par une automobile assimilée à un taxi au sens de l’article 4 du Code de la sécurité routière (chapitre C-24.2), ou qui utilisent un moyen de transport scolaire.
Le gouvernement peut, par règlement, désigner toute autre institution que celles visées au deuxième alinéa ou soustraire de l’application de la présente loi certaines d’entre elles, certains lieux de ces institutions ou certains moyens de transport public, dans les cas et aux conditions qu’il détermine.
2. Nul ne peut être en possession d’une arme à feu au sens du Code criminel (L.R.C. 1985, c. C-46) sur les lieux d’une institution désignée. Il en est de même pour tout transport public, à l’exclusion du transport par taxi ou par une automobile assimilée à un taxi visée au quatrième alinéa de l’article 1, et pour tout transport scolaire.
3. L’article 2 ne s’applique pas aux fonctionnaires publics visés à l’article 117.07 du Code criminel (Lois révisées du Canada (1985), chapitre C-46), à la personne autorisée à porter une arme à feu pour la protection de sa vie ou celle d’autrui ou pour usage dans le cadre de son activité professionnelle légale, ni aux autres personnes désignées par règlement du gouvernement, en fonction des responsabilités qu’elles assument ou des activités qu’elles exercent et selon les conditions qu’il fixe.
4. Le ministre peut, exceptionnellement, autoriser une activité impliquant des armes à feu sur les lieux d’une institution désignée, dans les cas, pour la durée et aux conditions qu’il détermine.
(Soulignements du Tribunal)
[220] Les exceptions de cette loi sont clairement établies. Toutefois, l’article 2 du Règlement 1153 interdit la possession d’Armes, sans exception, « dans un véhicule de transport public ». La définition de « Place publique » étend cette interdiction sur toutes les routes à Mascouche.
[221] Ainsi, la possession d’une arme à feu « par taxi ou par une automobile assimilée à un taxi au sens de l’article 4 du Code de la sécurité routière » est formellement interdite par la Ville. Un individu peut donc, en même temps, être en possession d’une arme à feu sur l’une des routes situées à Mascouche, en respectant les exceptions prévues à cette loi, et commettre une infraction en vertu de l’article 2 du Règlement 1153.
[222] L’article 2 du Règlement 1153 interdit également les exceptions prévues à l’article 3 de cette loi, quoique l’article 7 du Règlement 1153 prévoit que « l’usage d’arme par les membres du corps de police de la Ville et par tout agent de la paix autorisé à ce faire par la loi dans l’exercice de ses fonctions ». Toutefois, le ministre se voit interdire l'exercice de ses prérogatives en vertu de l’article 4 de cette loi, en raison des interdictions imposées par l’article 2 et la définition de « Place publique » du règlement.
[223] La Ville considère que l’article 2 de son règlement n’entre pas en conflit avec cette loi puisqu’elle rehausse un régime législatif qui vise la protection de personnes qui fréquentent les lieux d’une institution désignée prévue à cette loi. Selon ce point de vue, le Règlement 1153 est donc complémentaire avec cette loi et il n’y a ainsi aucune incompatibilité d’objet.[262]
[224] Le Tribunal est plutôt d’avis que la Ville peut ajouter aux règles incluses à cette loi dans la mesure ou son règlement n’interdit pas les exceptions prévues par la province.
[225] En résumé, l’article 2 du Règlement 1153 interdit formellement les exceptions prévues aux articles 1 à 4 de cette loi, ce qui entraîne un conflit véritable d’application.
[226] La loi provinciale a préséance sur l’article 2 du Règlement 1153 qui est inopérant dans la mesure du conflit avec les articles 1 à 4 de la Loi visant à favoriser la protection des personnes à l’égard d’une activité impliquant des armes à feu.
[227] L’article 3 du Règlement 1153-1 mentionne:
3. Il est interdit d’utiliser une arme à moins d’un kilomètre de toute place publique, bâtiment, terrain privé, poste de transformation électrique, de ligne électrique, chemin de fer et de toute ville limitrophe à la Ville.
[228] L’adoption de l’article 3 ne satisfait pas à la norme de la décision raisonnable. Au surcroit, cette disposition est inconciliable, au provincial, avec la LCMVF[263], le Règlement sur la chasse[264] et le Règlement sur les zones de pêche et de chasse[265]. Elle n’est toutefois pas incompatible, au fédéral, avec la Loi de 1994 sur la convention concernant les oiseaux migrateurs[266] et le Règlement sur les oiseaux migrateurs.[267]
Le conflit avec la norme fédérale
[229] L’article 3 du Règlement 1153 est, dans une certaine mesure, incompatible avec la Loi de 1994 sur la convention concernant les oiseaux migrateurs[268] et le Règlement sur les oiseaux migrateurs,[269] mais leur coexistence ne donne pas lieu à un conflit véritable d’application ni d’une entrave à la réalisation de l’objet de ces normes fédérales.
[230] Pour illustrer certaines contradictions apparentes, mentionnons que la Loi de 1994 sur la convention concernant les oiseaux migrateurs spécifie que le gouverneur en conseil peut :
l’agriculture[272] ;
[231] De même, le Règlement sur les oiseaux migrateurs[274] prévoit que le ministre peut, entre autres, délivrer des permis et de les assortir de conditions relativement à l’effarouchement, la mise à mort ou toutes questions relativement à la conservation des oiseaux migrateurs.[275]
[232] Aussi, en vertu du Règlement sur les oiseaux migrateurs, il est interdit de tuer un oiseau migrateur considéré comme gibier à moins d’être le titulaire d’un permis délivré à cette fin par le ministre canadien de l’Environnement[276]. En vertu de cette réglementation, le territoire de Mascouche se trouve dans le district F.[277]
[233] Le Règlement sur les oiseaux migrateurs prévoit les conditions pour tuer les oiseaux migrateurs nuisibles[278] de même que les espèces surabondantes.[279] Le règlement précise également les armes et méthodes qui peuvent être utilisées pour chasser les oiseaux migrateurs.[280]
[234] Ainsi, pour effaroucher les oiseaux migrateurs nuisibles ou dangereux, le garde-chasse en chef d’une province peut délivrer un permis permettant l’usage d’une arme à feu pour effaroucher[281] ou abattre ces volatiles[282] qui causent ou risquent de causer des dégâts aux cultures.
[235] En résumé, la Loi de 1994 sur la convention concernant les oiseaux migrateurs et le Règlement sur les oiseaux migrateurs et ses annexes établissent un régime qui encadre, entre autres, la conservation, l’abattage (tuer) et l’effarouchement des oiseaux migrateurs. Il ne s’agit pas d’une loi dont l’objectif est de légiférer la chasse des oiseaux migrateurs de sorte qu’il ne peut y avoir de conflit d’objet entre l’article 3 et ces normes fédérales.
[236] Les demandeurs ont obtenu, du ministre canadien de l’Environnement, des permis relatifs aux oiseaux migrateurs nuisibles ou dangereux, qui les ont autorisés à utiliser une arme à feu pour effaroucher les bernaches.[283] À cet égard, les permis relatifs aux oiseaux migrateurs nuisibles ou dangereux délivrés aux demandeurs mentionnent, entre autres :
[237] Puis, ils obtiennent également, par le passé, l’autorisation d’abattre des Bernaches du Canada, dont les permis mentionnent, entre autres :[284]
[238] Les demandeurs avancent que l’article 3 du Règlement 1153 enfreint leur droit d’utiliser une arme comme autorisé aux permis émis par Environnement Canada. De même, il est soumis que le règlement entrave la réalisation de l’objet de ces normes fédérales. De ce point de vue, le ministre fédéral de l’Environnement ne peut exercer ses prérogatives dans le district F qui inclut la Ville de Mascouche.
[239] Le Tribunal reconnaît que l’article 3 du Règlement 1153 entre en conflit, dans une certaine mesure, avec la Loi de 1994 sur la convention concernant les oiseaux migrateurs et le Règlement sur les oiseaux migrateurs et ses annexes. Toutefois, ce conflit apparent n’entrave pas la réalisation de l’objet de cette législation fédérale ni ne constitue un conflit véritable d’application.[285] Ces normes peuvent coexister malgré l’imperfection de leur arrimage.
Le conflit avec la norme provinciale
[240] L’article 3 du Règlement 1153 est inconciliable avec la LCMVF[286], le Règlement sur la chasse[287] et le Règlement sur les zones de pêche et de chasse[288].
[241] Il n’est pas possible de se conformer à la fois à ces normes provinciales et à l’article 3 du Règlement 1153, ce qui entraîne un conflit véritable d’application. À cela s’ajoute le fait que l’effet de cette disposition entrave la réalisation de l’objet de la LCMVF et ses règlements.
[242] La LCMVF a pour objet, entre autres, la conservation de la faune et de son habitat, leur mise en valeur dans une perspective de développement durable et la reconnaissance à toute personne du droit de chasser et de piéger.[289] Elle autorise une vaste réglementation qui balise le contrôle de la faune de même que le droit de chasser.
[243] La LCMVF promulgue, entre autres :
[244] La LCMVF vise les animaux qui se reproduisent à l’état sauvage à l’exception des oiseaux migrateurs qui relèvent de la juridiction fédérale.[292] Il s’agit d’une loi fondamentale dans la gestion des conflits entre la faune et la société laquelle confère des prérogatives au ministre qui peut, entre autres, adopter des règlements pour les fins suivantes :
[245] Le Règlement sur les zones de pêche et de chasse[295] balise avec précision l’activité de la chasse au Québec, de même que les armes ou engins de chasse qui peuvent être utilisés pour la chasse, notamment dans la zone No 8, qui comprend le territoire de Mascouche.[296] Ce règlement permet au ministre d’établir les différentes zones de chasse et de piégeage sur le territoire de la province. D’ailleurs, le nombre de permis émis de même que les périodes de chasse en zone No 8 sont prévus aux Annexes II et III du Règlement sur la chasse.[297]
[246] Les périodes de chasse sont prévues à l’annexe III du Règlement sur la chasse à l’aide des « engins de chasse » identifiés dans cette même annexe. À cet égard, ce règlement définit avec précision les « engins de chasse » qui sont regroupés par catégorie.[298] Le législateur provincial ne laisse place à aucune interprétation lorsqu’il identifie les armes qui peuvent être utilisées lors des chasses autorisées.
[247] Puis, les dispositions relatives aux conditions d’exploitation de la faune prévues à la LCMVF permettent au ministre de réguler la gestion de la faune, entre autres :
[248] L’article 3 du Règlement 1153 rend impossible l’exercice de ces prérogatives ministérielles sur la totalité du territoire de la Ville. De même, l’effet de cette disposition est inconciliable avec la réalisation de l’objet de la LCMVF et ses règlements. Dans les faits, elle empêche le ministre de réguler la chasse, le contrôle de la faune et les armes sur le territoire de Mascouche. Bref, la Ville ne peut interdire totalement ce que la province autorise.
[249] En conséquence, l’article 3 du Règlement 1153 est inopérant, dans la mesure de ces conflits, avec les articles 26, 26.1, 28, 34, 36, 37, 56, 61.1, 67, 162 (13o, 14o et 18o), 163 (10o), 164.2 de la LCMVF, l’article 31 du Règlement sur la chasse[301] et l’article 14 et les annexes II et III du Règlement sur les zones de pêche et de chasse.
[250] De plus, l’article 3 est inopérant en raison de son conflit d’objet avec la LCMVF puisqu'il empêche le ministre d'exercer ses prérogatives relativement à la chasse sur le territoire de la Ville.
[251] L’article 6 du Règlement 1153 mentionne :
6. La chasse est permise sur un terrain privé d’une superficie d’au moins 40 000 mètres carrés et zoné agricole conformément au règlement de zonage avec la permission du propriétaire de ce terrain et si les dispositions du présent règlement et les dispositions législatives provinciales et fédérales relatives à la chasse, entre autres celles concernant les périodes de chasse et les permis, sont respectées.
(Soulignements du Tribunal)
[252] Cette disposition est inapplicable puisque l’article 3 stérilise sa portée.
[253] L’article 6 constitue la seule autorisation de chasser sur le territoire de la Ville laquelle s’avère impraticable par l’effet même du règlement. Il s’agit d’un bel exemple qui démontre que les effets du Règlement 1153 ─ interdiction totale de chasser ─ ne s’harmonisent pas avec son objet ─ délimiter les zones de chasse sur le territoire et réglementer la possession et l’usage d’armes. Autrement dit, délimiter certaines zones de chasse est une chose, mais son application en est une autre, puisque la chasse autorisée à l’article 6 s’avère totalement interdite en vertu du même règlement.
[254] Pour ces raisons, le Tribunal reprend les constats des conflits de l’article 3 avec les normes provinciales pour conclure au caractère inopérable de l’article 6.
8.5 LE DÉLAI D’INACTION JUDICIAIRE
[255] Ce pourvoi en contrôle judiciaire soulève l’absence ou l’excès de compétence[302] de la Ville pour adopter le Règlement 1153 de même que le caractère inopérant du règlement en vertu de la doctrine de la prépondérance fédérale. Les parties ajoutent des arguments de nature constitutionnelle comme celle de la « doctrine du caractère véritable » et considèrent même que la norme de la décision correcte s’impose dans la plupart des questions en litige portées à l’attention du Tribunal.
[256] L’exigence du délai raisonnable ne s’applique pas au contrôle des articles 3 et 6 du Règlement 1153, entre autres, puisque l’absence ou l’excès de compétence de la Ville est au centre des débats sur leur validité. Elle ne s’applique pas non plus à l’examen de l’article 2 étant donné que cette disposition entre en conflit avec les normes fédérales en matière de transport des armes à feu.
[257] De toute façon, même si cette exigence était applicable, le Tribunal considère que Jean-Guy Ouellette a été diligent et le délai d’inaction judiciaire est raisonnable. Les faits le démontrent :
- Ils enregistrent un plaidoyer de non-culpabilité.
- Dans l’intervalle, Jean-Guy Ouellette consulte plusieurs avocats pour obtenir un avis sur la légalité du Règlement 1153 ;
- Il donne le mandat à Me Joseph-André Roy, de la firme BCF, pour contester le Règlement 1153 de même que le règlement 4000[305] de la Ville de Terrebonne ;
- Cet avocat lui conseille d’attendre une éventuelle suspension des poursuites pénales à l’encontre de son fils avant d’entreprendre une démarche judiciaire pour contester le Règlement 1153, afin de ne pas nuire aux négociations en cours ;
- Un avis juridique est en préparation.
- BCF lui recommande de mandater un expert en balistique relativement à la portée de différentes armes de même qu’un arpenteur(e) géomètre pour déterminer la portée territoriale du Règlement 1153 ;
- Il est avancé qu’il a été difficile de trouver ces professionnels, notamment pour des raisons de conflits d’intérêts en ce qui concerne l’arpenteur(e) géomètre et de qualification pour l’expert en balistique.
- Cette expertise est préparée afin d’en partager les conclusions avec les villes de Mascouche et de Terrebonne.
- Les discussions ont porté fruit avec la ville de Terrebonne qui accepte de modifier son Règlement 4000 qui deviendra le 29 février 2016 le Règlement 4001-1[310].
[258] Les demandeurs se sont engagés dans une démarche empreinte de bonne foi en engageant une discussion avec la Ville pour régler le différend. Ils engagent l’expert en balistique Gianfranco Cavallo, à leurs frais, dont le rapport sert aux entretiens avec la Ville. Cette approche fonctionne avec la Ville de Terrebonne qui accepte de modifier son Règlement 4000, mais échoue avec la Ville de Mascouche.
[259] La conduite des demandeurs est irréprochable.
[260] L’adoption d’un règlement municipal en matière de sécurité publique qui impacte la chasse peut être un exercice complexe.
[261] La LCM confère aux municipalités le pouvoir d'adopter des règlements relativement à l’utilisation d’armes, mais de telles mesures devraient énoncer avec clarté leurs objectifs et les moyens d’application. Ces clarifications sont nécessaires pour légitimer la coexistence de ces règlements municipaux avec la législation en vigueur.
[262] Les municipalités doivent exercer les pouvoirs délégués par la province raisonnablement et les prohibitions qu'elles décrètent par règlement ne peuvent dépasser leur cadre législatif. Tout cela sans entrer en conflit véritable d’application ou d’objet avec la législation en vigueur. Ces difficultés sont solubles, notamment, en tenant compte des différentes zones du territoire et des spécificités propres du domaine de la chasse.
[263] Les municipalités peuvent aussi ajouter aux règles de sécurité prévues aux normes provinciales. Toutefois, ces mesures additionnelles ne peuvent pas interdire toute activité de chasse sur leur territoire, lorsqu’elle est possible et autorisée par le ministre, sous réserve d’une justification impérative.
[264] La Ville de Mascouche ne répond pas aux exigences de cet exercice puisque les objectifs du Règlement 1153 sont contradictoires avec ses effets. La façon dont la Ville aborde la chasse dans son règlement constitue un exercice déraisonnable des pouvoirs délégués par la province.
[265] En effet, le Règlement 1153 laisse croire qu'il s'agit d'une mesure qui vise la possession et l’usage d’Armes ainsi que la délimitation de zones de chasse. Or, l’application de ce règlement prohibe totalement l’utilisation d’Arme de même que la chasse, ce qui est contraire aux objectifs annoncés par la Ville. À cela s’ajoute que la démarche de la Ville ne s’appuie sur aucune preuve relativement à la dangerosité des chasseurs certifiés sur son territoire.
[266] La coexistence de normes municipales, provinciales et fédérales en matière de sécurité est possible. À cet égard, la Cour suprême mentionne dans Spraytech :[314]
[267] Or, même en considérant les enseignements de la Cour d’appel dans Courses automobiles Mont-Tremblant à l'effet que « [...] la jurisprudence commande d’adopter l’interprétation qui favorise au mieux la coexistence des textes de même qu’une normativité pluraliste »[315], le Tribunal ne peut concevoir que le Règlement 1153 coexiste valablement avec la LCMVF et les normes relatives au transport des armes à feu.
[268] Tout étant considéré, le Règlement 1153 n'est pas valable.
─ ─ ─ ─ ─
[269] La Ville demande au Tribunal de suspendre les effets du jugement pour une période de six (6) mois si son règlement est jugé inopérant. Le Tribunal donne droit à cette demande afin de permettre à la Ville de revoir son règlement tout en préservant une quiétude sociale.[316]
[270] Une exemption d’assujettissement des demandeurs à cette suspension n’est pas possible puisqu’elle ne pourrait être accordée que dans le contexte d’une exemption constitutionnelle.[317]
[271] Quant aux frais de justice, l’article 339 al. 1 C.p.c. indique qu’ils comprennent, entre autres, les frais d’expertise. Le Tribunal précise que l’apport des experts Gianfranco Cavallo et de l’arpenteure-géomètre Chantal Arguin a été nécessaire pour mener à bien ce pourvoi en contrôle judiciaire. Il est ainsi précisé aux conclusions que les frais d’expertise sont inclus aux frais de justice pour faciliter l’exécution du présent jugement.[318]
[272] Toutefois, en ce qui concerne les frais d’expertise de Gianfranco Cavallo, le Tribunal précise que seuls les frais mentionnés à l’article 339 al. 2 C.p.c. peuvent être réclamés à la Ville, ce qui exclut le temps consacré aux rencontres avec les membres de la Ville de Terrebonne et de Mascouche.[319]
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
[273] DÉCLARE l’article 2 du Règlement 1153 de la Ville de Mascouche INOPÉRANT ;
[274] DÉCLARE l’article 3 du Règlement 1153 de la Ville de Mascouche NUL et INOPÉRANT ;
[275] DÉCLARE l’article 6 du Règlement 1153 de la Ville de Mascouche NUL et INOPÉRANT ;
[277] SUSPEND l’exécution des paragraphes [273], [274] et [275] pour une période de six (6) mois à compter du présent jugement ;
[278] AVEC FRAIS DE JUSTICE en faveur des demandeurs lesquels incluent les frais d’expertises.
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| __________________________________CHARLES BIENVENU j.c.s. | ||
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Me Isabelle Landry Isabelle.landry@bcf.ca BCF Me Audrey-Anne Béland Audrey-Anne.beland@bcf.ca BCF Procureures des demandeurs
Me Charles Turcot cturcot@groupetrivium.com TRIVIUM Procureur de la défenderesse
Me Gabriel S. Gervais gabriel.s.gervais@justice.gouv.qc.ca BERNARD ROY (JUSTICE QUÉBEC) Procureur du mis en cause
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TITRES
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ANNEXE A
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Règlement No 1153 (Entré en vigueur le 18 septembre 2010) |
ANNEXE B
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Règlement No 1153-1 (Entré en vigueur le 14 juillet 2021) |
ANNEXE C
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Loi sur les armes à feu, L.C. 1995, ch. 39. |
ANNEXE D
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Règlement sur l’entreposage, l’exposition, le transport et le maniement des armes à feu par des particuliers (DORS/98-209) |
ANNEXE E |
Loi visant à favoriser la protection des personnes à l’égard d’une activité impliquant des armes à feu, chapitre P-38.0001
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ANNEXE F |
Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune, chapitre C-61.1
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ANNEXE G |
Règlement sur les zones de pêche et de chasse, chapitre C-61.1, r. 34. Adopté en vertu de la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune, chapitre C-61.1, a. 84.1.
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ANNEXE H |
Règlement sur la chasse, chapitre C-61.1, r. 12 Adopté en vertu de la Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune, chapitre C-61.1, a. 40, 56, 84.1 et 163.
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ANNEXE I |
Loi de 1994 sur la convention concernant les oiseaux migrateurs, L.C. 1994, ch. 22.
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ANNEXE J |
Convention concernant la protection des oiseaux migrateurs au Canada et aux États-Unis, conclue en 1916 entre le Royaume-Uni et les États-Unis d’Amérique, annexée à la Loi de 1994 sur la convention concernant les oiseaux migrateurs.
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ANNEXE K |
Règlement sur les oiseaux migrateurs, C.R.C., ch. 1035.
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ANNEXE L
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Règlement sur les oiseaux migrateurs – Annexe I
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ANNEXE A
RÈGLEMENT NUMÉRO 1153 SUR L’UTILISATION D’ARMES
CONSIDÉRANT QUE l'avis de présentation 100412-27 a été donné pour le présent règlement;
LE CONSEIL MUNICIPAL DÉCRÈTE CE QUI SUIT:
1. Dans le présent règlement, les mots et expressions qui suivent signifient :
Arme: Arme à feu de toute catégorie ou imitation d’arme à feu, arc, arbalète, fronde, piège ou toute arme qui permet de tirer un projectile, d’infliger des lésions corporelles ou la mort à une personne ou à un animal;
Arme blanche: Arme dont l’action résulte d’une partie en métal, elle est perforante et ou tranchante et n’emploie pas la force d’une explosion, mais celle d’une personne ou d’un mécanisme quelconque;
Bâtiment: Construction destinée à abriter des personnes, des animaux ou des choses et occupée de façon permanente ou saisonnière;
Place publique: Endroit où des personnes s’assemblent ou se réunissent pour des fins civiques, militaires, politiques, syndicales, religieuses, sociales, éducatives, récréatives, sportives, de voyage ou autres, y compris d’une façon non limitative les endroits suivants : théâtre, magasin, garage, église, école, restaurant, boutique, édifices municipal et gouvernemental, hôtel, motel, auberge, bar, discothèque ou tout autre établissement du genre CLSC, clinique, hôpital et collège ainsi qu’une rue, une ruelle, un trottoir, un chemin public, une promenade, un passage piétonnier, un quai, un parc, un jardin, un sentier et tout autre endroit accessible au public;
Terrain privé: Propriété privée ou terrain occupé par des activités agricoles, d’arboriculture ou d’horticulture, de récoltes ou d’élevage de bétail à des fins commerciales ou non;
Ville: La Ville de Mascouche.
2. Il est interdit d’avoir en sa possession ou d’utiliser une arme ou une arme blanche dans une place publique ou dans un véhicule de transport public.
La possession d’une arme ou d’une arme blanche est cependant autorisée dans une place publique si celle-ci est empruntée pour se rendre à un poste d’affût de chasse durant les périodes de chasse.
3. Il est interdit d’utiliser une arme à l’intérieur d’un périmètre d’un kilomètre de toute place publique, bâtiment, terrain privé, poste de transformation électrique, de ligne électrique, chemin de fer et de toute ville limitrophe à la Ville.
4. Sous réserve des articles 2 et 3, toute personne qui désire organiser une compétition de tir à l’arc ou toute autre activité qui exige l’utilisation d’une arme ou d’une arme blanche doit, préalablement à la tenue de cette activité, avoir obtenu une autorisation du directeur du Service de la sécurité publique.
5. La personne qui fait une demande en vertu de l’article 4 doit fournir au directeur toute information qu’il jugera nécessaire à l’émission de l’autorisation, notamment :
Le directeur émet l’autorisation en précisant les mesures de sécurité qui doivent être mises en place.
6. La chasse est permise sur un terrain privé d’une superficie d’au moins 40 000 mètres carrés et zoné agricole conformément au règlement de zonage avec la permission du propriétaire de ce terrain et si les dispositions du présent règlement et les dispositions législatives provinciales et fédérales relatives à la chasse, entre autres celles concernant les périodes de chasse et les permis, sont respectées.
7. Le présent règlement n’interdit pas l’usage d’arme par les membres du corps de police de la Ville et par tout agent de la paix autorisé à ce faire par la loi dans l’exercice de ses fonctions.
Le présent règlement n’interdit pas l’usage d’arme dans les aires de pratique autorisées par la Ville.
8. Quiconque contrevient à une disposition du présent règlement commet une infraction et est passible d’une amende, en plus des frais:
1 000 $ si le contrevenant est une personne physique et d’un minimum de 1 000 $ et d’un maximum de 2 000 $ s’il est une personne morale;
Si l’infraction est continue, elle constitue, pour chaque jour, une infraction séparée et une amende peut être imposée pour chaque jour que dure l’infraction.
9. Le présent règlement remplace le règlement numéro 536 et ses amendements concernant l’utilisation des armes à feu.
10. Le Service de la sécurité publique est responsable de l’application du présent règlement.
11. Le présent règlement entre en vigueur conformément à la loi.
Richard Marcotte, maire
(Signé)
Yvan Laberge, avocat
Greffier et directeur des services juridiques
(Signé)
ADOPTION : 100913-3
ENTRÉE EN VIGUEUR : 18 septembre 2010
ANNEXE B
RÈGLEMENT NUMÉRO 1153-1 MODIFIANT LE RÈGLEMENT NUMÉRO 1153 CONCERNANT L’UTILISATION D’ARMES
CONSIDÉRANT que la Ville adoptait, le 13 septembre 2010, son règlement numéro 1153 sur l’utilisation d’armes;
CONSIDÉRANT QU’une modification est nécessaire afin d’éviter toute interprétation erronée concernant la distance d’utilisation des armes;
CONSIDÉRANT QUE l’avis de motion 210607-07 a été donné pour le présent règlement;
LE CONSEIL MUNICIPAL DÉCRÈTE CE QUI SUIT :
ARTICLE 1
L’article 3 du règlement numéro 1153 sur l’utilisation d’armes est remplacé par le suivant:
« 3. Il est interdit d’utiliser une arme à moins d’un kilomètre de toute place publique, bâtiment, terrain privé, poste de transformation électrique, de ligne électrique, chemin de fer et de toute ville limitrophe à la Ville ».
ARTICLE 2
Le présent règlement entre en vigueur conformément à la Loi.
_____________________________________
Guillaume Tremblay, maire
(Signé)
_____________________________________
Me Caroline Asselin, assistante-greffière
(Signé)
Avis de motion et dépôt du projet : 210621-07 / 21 juin 2021
Adoption : 210705-04 / 5 juillet 2021
Entrée en vigueur : 14 juillet 2021
ANNEXE C
Loi sur les armes à feu, L.C. 1995, ch 39.
OBJET
4 La présente loi a pour objet :
a) de prévoir, notamment aux articles 5 à 16 et 54 à 73, la délivrance :
(i) de permis à l’égard des armes à feu, ainsi que d’autorisations et de certificats d’enregistrement à l’égard des armes à feu prohibées et des armes à feu à autorisation restreinte, permettant la possession d’armes à feu en des circonstances qui ne donnent pas lieu à une infraction visée aux paragraphes 91(1), 92(1), 93(1) ou 95(1) du Code criminel,
(ii) de permis et d’autorisations permettant la possession d’armes prohibées, d’armes à autorisation restreinte, de dispositifs prohibés et de munitions prohibées en des circonstances qui ne donnent pas lieu à une infraction aux paragraphes 91(2), 92(2) ou 93(1) du Code criminel,
(iii) de permis autorisant la vente, l’échange ou le don d’arbalètes en des circonstances qui ne donnent pas lieu à une infraction au paragraphe 97(1) du Code criminel;
b) de permettre, notamment aux articles 5 à 12 et 54 à 73, la fabrication ou la proposition de fabrication, et aux articles 21 à 34 et 54 à 73, la cession ou la proposition de cession, d’armes à feu, d’armes prohibées, d’armes à autorisation restreinte, de dispositifs prohibés, de munitions et de munitions prohibées, en des circonstances qui ne donnent pas lieu à une infraction aux paragraphes 99(1), 100(1) ou 101(1) du Code criminel;
c) de permettre, notamment aux articles 35 à 73, l’importation et l’exportation d’armes à feu, d’armes prohibées, d’armes à autorisation restreinte, de dispositifs prohibés, de munitions ou de munitions prohibées et d’éléments ou pièces conçus exclusivement pour être utilisés dans la fabrication ou l’assemblage d’armes automatiques, sans enfreindre les paragraphes 103(1) ou 104(1) du Code criminel.
POSSESSION
Admissibilité
Règles générales
Sécurité publique
5 (1) Le permis ne peut être délivré lorsqu’il est souhaitable, pour sa sécurité ou celle d’autrui, que le demandeur n’ait pas en sa possession une arme à feu, une arbalète, une arme prohibée, une arme à autorisation restreinte, un dispositif prohibé, des munitions ou des munitions prohibées.
Critères d’admissibilité
(2) Pour l’application du paragraphe (1), le contrôleur des armes à feu ou, dans le cas d’un renvoi prévu à l’article 74, le juge de la cour provinciale tient compte des éléments suivants :
(…)
CAS PARTICULIERS : ARMES À FEU, ARMES, DISPOSITIFS ET MUNITIONS PROHIBÉS
Armes à feu, armes, dispositifs et munitions prohibés : entreprises
11 (1) L’entreprise admissible au permis ne peut devenir titulaire d’un permis de possession d’armes à feu prohibées, d’armes prohibées, de dispositifs prohibés ou de munitions prohibées qu’aux conditions énoncées au présent article.
Fins réglementaires
(2) Un tel permis peut être délivré à l’entreprise — autre qu’un transporteur — qui en a besoin aux fins réglementaires.
Transporteurs
(3) Les transporteurs peuvent être titulaires d’un permis de possession d’armes à feu prohibées, d’armes prohibées, de dispositifs prohibés ou de munitions prohibées.
Armes à feu prohibées : particuliers
12 (1) Le particulier admissible au permis ne peut devenir titulaire d’un permis de possession d’armes à feu prohibées qu’aux conditions énoncées au présent article.
TRANSPORT D’ARMES À FEU
Lieu de possession
17 Sous réserve des articles 19 et 20, une arme à feu prohibée ou une arme à feu à autorisation restreinte enregistrée au nom d’un particulier ne peut être gardée que dans la maison d’habitation notée au Registre canadien des armes à feu ou en tout lieu autorisé par le contrôleur des armes à feu.
[…]
Transport et usage d’armes à feu prohibées ou d’armes à feu à autorisation restreinte
19 (1) Le particulier titulaire d’un permis de possession d’armes à feu prohibées ou d’armes à feu à autorisation restreinte peut être autorisé à en transporter une en particulier entre des lieux précis pour toute raison valable, notamment :
a) pour le tir à la cible, la participation à une compétition de tir ou l’usage à des conditions précisées ou sous les auspices d’un club de tir ou d’un champ de tir agréé conformément à l’article 29;
a.1) pour offrir un entraînement au maniement des armes à feu dans le cadre d’un cours sur la sécurité des armes à feu à autorisation restreinte agréée par le ministre fédéral;
b) s’il :
(i) change de résidence,
(ii) désire la présenter à l’agent de la paix, au préposé aux armes à feu ou au contrôleur des armes à feu pour enregistrement ou disposition en conformité avec la présente loi ou la partie III du Code criminel,
(iii) désire la transporter aux fins de réparation, d’entreposage, de vente, d’exportation ou d’évaluation,
(iv) désire l’apporter à une exposition d’armes à feu.
Tir à la cible ou compétition de tir
(1.1) Dans le cas d’une autorisation de transport délivrée pour l’une des raisons mentionnées à l’alinéa (1)a) pour la province de résidence du titulaire de l’autorisation, les lieux qui y sont précisés comprennent tous les clubs de tir et tous les champs de tir de cette province agréés conformément à l’article 29, sauf s’il s’agit d’une autorisation de transport délivrée pour une arme à feu prohibée visée au paragraphe 12(9).
Exception : Armes à feu prohibées autres que les armes de poing prohibées
(2) Malgré le paragraphe (1), le particulier ne peut être autorisé à transporter une arme à feu prohibée — autre qu’une arme de poing visée au paragraphe 12(6.1) ou une arme à feu prohibée visée au paragraphe 12(9) — entre des lieux précis que pour les raisons visées à l’alinéa (1)b).
Autorisation automatique de transport : renouvellement
(2.1) Le particulier titulaire d’un permis de possession d’armes à feu à autorisation restreinte ou d’armes de poing visées au paragraphe 12(6.1) doit, si son permis est renouvelé, être autorisé à les transporter, dans sa province de résidence, vers tout club de tir et tout champ de tir agréés conformément à l’article 29, et à partir de celui-ci. Toutefois, l’autorisation ne s’applique pas à l’arme à feu à autorisation restreinte ou à l’arme de poing dont la cession au particulier a été autorisée, en application du sous-alinéa 28b)(ii), à des fins de collection.
Autorisation automatique de transport : cession
(2.2) Si un contrôleur des armes à feu autorise la cession d’une arme à feu prohibée ou d’une arme à feu à autorisation restreinte à un particulier titulaire d’un permis de possession d’armes à feu prohibées ou d’armes à feu à autorisation restreinte, le particulier doit, dans sa province de résidence, être autorisé à transporter cette arme à feu du lieu de son acquisition au lieu où elle peut être gardée en vertu de l’article 17.
Autorisation automatique de transport : cession
(2.3) Si un contrôleur des armes à feu autorise la cession d’une arme à feu à autorisation restreinte ou d’une arme de poing visées au paragraphe 12(6.1) à un particulier titulaire d’un permis de possession d’armes à feu à autorisation restreinte ou d’une telle arme de poing, le particulier doit, dans sa province de résidence, être autorisé à transporter cette arme à feu vers tout club de tir et tout champ de tir agréés conformément à l’article 29, et à partir de ceux-ci, sauf si la cession de l’arme à feu à autorisation restreinte ou de l’arme de poing a été autorisée, en application du sous-alinéa 28b)(ii), à des fins de collection.
Importation par un non-résident
(3) Un non-résident peut être autorisé à transporter, en conformité avec les dispositions des articles 35 et 35.1, une arme à feu à autorisation restreinte entre des lieux précisés.
Port d’armes à feu à autorisation restreinte et d’armes de poing
20. Le particulier titulaire d’un permis de possession d’armes à feu à autorisation restreinte ou d’armes de poing visées au paragraphe 12(6.1) (armes de poing : 1er décembre 1998) peut être autorisé à en posséder une en particulier en un lieu autre que celui où il est permis de la posséder, s’il en a besoin pour protéger sa vie ou celle d’autrui ou pour usage dans le cadre de son activité professionnelle légale.
PERMIS, AUTORISATIONS ET CERTIFICATS D’ENREGISTREMENT
[…]
DÉLIVRANCE
Permis
56 (1) Les permis sont délivrés par le contrôleur des armes à feu.
Un seul permis par particulier
(2) Il ne peut être délivré qu’un seul permis à un particulier.
Permis pour chaque établissement
(3) Un permis est délivré pour chaque établissement où l’entreprise — qui n’est pas un transporteur — exerce ses activités.
Autorisations de port et de transport
57 Les autorisations de port et de transport sont délivrées par le contrôleur des armes à feu.
Conditions : permis et autorisations
58 (1) Le contrôleur des armes à feu peut assortir les permis et les autorisations de port et de transport des conditions qu’il estime souhaitables dans les circonstances et en vue de la sécurité de leur titulaire ou d’autrui.
Exception : permis ou autorisation
(1.1) Toutefois, le pouvoir du contrôleur des armes à feu d’assortir de conditions les permis et les autorisations de port et de transport est assujetti aux règlements.
Mineurs : consultation
(2) Dans le cas d’un particulier âgé de moins de dix-huit ans qui n’est pas admissible au permis prévu au paragraphe 8(2) (chasse de subsistance par les mineurs), le contrôleur des armes à feu consulte le père ou la mère du particulier ou la personne qui en a la garde avant d’assortir le permis d’une condition.
Mineurs : information des parents ou gardiens
(3) Avant de délivrer un permis au particulier visé au paragraphe (2), le contrôleur des armes à feu veille à ce que le père ou la mère ou la personne qui en a la garde ait connaissance des conditions dont est assorti le permis en exigeant leur signature sur celui-ci.
Propriétaire et possesseur
59 Il n’est pas nécessaire que le titulaire d’une autorisation de port ou de transport d’une arme à feu prohibée ou d’une arme à feu à autorisation restreinte soit le titulaire du certificat d’enregistrement y afférent.
Délivrance : certificats et numéros d’enregistrement
60 Les certificats d’enregistrement des armes à feu prohibées et des armes à feu à autorisation restreinte et les numéros d’enregistrement qui leur sont attribués, de même que les autorisations d’exportation et d’importation, sont délivrés par le directeur.
Forme : permis et certificats d’enregistrement
61 (1) Les permis et les certificats d’enregistrement sont délivrés en la forme réglementaire — écrite ou électronique — ou selon les modalités réglementaires et énoncent les renseignements réglementaires, notamment les conditions dont ils sont assortis.
Forme : autorisations
(2) Les autorisations de port, de transport, d’exportation ou d’importation peuvent être délivrées en la forme réglementaire — écrite ou électronique — ou selon les modalités réglementaires et énoncer les renseignements réglementaires, notamment les conditions dont elles sont assorties.
Condition d’un permis
(3) Les autorisations de port ou de transport peuvent aussi prendre la forme d’une condition d’un permis.
Autorisation automatique de transport
(3.1) Les autorisations de transport visées aux paragraphes 19(1.1), (2.1), (2.2) ou (2.3) prennent la forme d’une condition d’un permis.
Précisions pour les entreprises
(4) Les permis délivrés aux entreprises précisent toutes les activités particulières autorisées touchant aux armes à feu, aux arbalètes, aux armes prohibées, aux armes à autorisation restreinte, aux dispositifs prohibés, aux munitions ou aux munitions prohibées.
Incessibilité
62 Les permis, les certificats d’enregistrement, les autorisations de port, de transport, d’exportation ou d’importation sont incessibles.
Portée territoriale
63 (1) Les permis, les certificats d’enregistrement et les autorisations de transport, d’exportation ou d’importation sont valides partout au Canada.
(…)
Exceptions : autorisation de port
(3) Les autorisations de port ne sont pas valides à l’extérieur de la province de délivrance.
TRANSPORT D’ARMES À FEU
Permis de port
129 (1) Le permis autorisant une personne à posséder une arme à feu prohibée ou une arme à feu à autorisation restreinte en particulier est réputé une autorisation de port ou de transport s’il :
a) a été :
(i) soit délivré en application du paragraphe 110(1) de la loi antérieure,
(ii) soit prorogé par les paragraphes 6(2) de la Loi de 1968-69 modifiant le droit pénal, chapitre 38 des Statuts du Canada de 1968-1969, ou 48(1) de la Loi de 1977 modifiant le droit pénal, chapitre 53 des Statuts du Canada de 1976-1977;
b) n’a pas été révoqué avant la date de référence;
c) était valide à la date de référence conformément au paragraphe 110(1) de la loi antérieure.
Territoire de validité
(2) Un tel permis est valide dans la province de sa délivrance seulement, sauf s’il a été visé en application du paragraphe 110(10) de la loi antérieure pour les provinces mentionnées, auquel cas il le demeure dans celles-ci.
Durée de validité
(3) Il est valide pour la période mentionnée, qui ne peut excéder de plus de deux ans la date de référence.
Permis temporaire de port d’armes
130 Est réputé une autorisation de transport tout permis autorisant un non-résident à transporter et à porter au Canada une arme à feu prohibée ou une arme à feu à autorisation restreinte en particulier, s’il :
a) a été délivré en vertu du paragraphe 110(2.1) de la loi antérieure;
b) n’a pas été révoqué avant la date de référence;
c) était valide à la date de référence conformément à ce paragraphe.
Permis de transport
131 Est réputé une autorisation de transport tout permis autorisant une personne à présenter au directeur local de l’enregistrement des armes à feu une arme à feu prohibée ou une arme à feu à autorisation restreinte en particulier, s’il :
a) a été :
(i) soit délivré en vertu des paragraphes 110(3) ou (4) de la loi antérieure,
(ii) soit prorogé par les paragraphes 6(2) de la Loi de 1968-69 modifiant le droit pénal, chapitre 38 des Statuts du Canada de 1968-1969, ou 48(1) de la Loi de 1977 modifiant le droit pénal, chapitre 53 des Statuts du Canada de 1976-1977;
b) n’a pas été révoqué avant la date de référence;
c) était valide à la date de référence conformément aux paragraphes 110(3) ou (4) de la loi antérieure.
Durée de validité
132 Le permis réputé une autorisation de transport en application des articles 130 ou 131 est valide pour la période mentionnée.
Demandes en cours
133 Les demandes de délivrance des documents — qui seraient prévus aux articles 129 à 131 s’ils avaient été délivrés avant la date de référence — en cours à la date de référence sont traitées conformément à la loi antérieure, à différence près que :
a) le permis qui aurait été délivré devient une autorisation de port ou de transport ou une condition d’un permis;
b) seule une personne habilitée par la présente loi à délivrer l’autorisation de port et de transport peut statuer à leur égard.
Approbations des clubs de tir
134 (1) Est réputée l’agrément prévu par la présente loi toute approbation d’un club de tir accordée en application du sous-alinéa 109(3)c)(iii) ou de l’alinéa 110(2)c) de la loi antérieure et non révoquée avant la date de référence.
Durée de validité
(2) Une telle approbation est valide pour la période mentionnée, sans que celle-ci puisse excéder d’un an la date de référence.
Permis d’entreposage temporaire
135 Est valide pour la période mentionnée, sauf révocation par le contrôleur des armes à feu pour une raison valable, tout permis autorisant l’entreposage temporaire d’une arme à feu prohibée ou d’une arme à feu à autorisation restreinte en particulier, s’il :
a) a été délivré en vertu du paragraphe 110(3.1) de la loi antérieure;
b) n’a pas été révoqué avant la date de référence;
c) était valide à la date de référence conformément au paragraphe 110(3.3) de la loi antérieure.
Révocation de l’autorisation de transport
135.1 Toute autorisation de transport d’armes à feu prohibées ou d’armes à feu à autorisation restreinte est révoquée dans les cas suivants :
a) elle a été délivrée en application de l’un ou l’autre des alinéas 19(2.1)b) à e), dans leur version antérieure à la date de référence;
b) elle a été délivrée en application de l’alinéa 19(2.2)b), dans sa version antérieure à la date de référence, à l’égard du transport vers les lieux visés à l’un ou l’autre des alinéas visés à l’alinéa a) et à partir de ceux-ci.
ANNEXE D
Règlement sur l’entreposage, l’exposition, le transport et le maniement des armes à feu par des particuliers (DORS/98-209)
DÉFINITIONS
1 Les définitions qui suivent s'appliquent au présent règlement.
arme à feu à chargement par la bouche Ne vise pas les armes de poing. (muzzle-loading firearm)
arme à feu sans restrictions Arme à feu qui n'est ni une arme à feu prohibée ni une arme à feu à autorisation restreinte. (non-restricted firearm)
arme de poing prohibée Arme de poing visée à l'alinéa a) de la définition de arme à feu prohibée, au paragraphe 84(1) du Code criminel. (prohibited handgun)
TRANSPORT DES ARMES À FEU SANS RESTRICTIONS
10 (1) Le particulier ne peut transporter une arme à feu sans restrictions que si les conditions suivantes sont respectées :
a) s'il s'agit d'une arme autre qu'une arme à feu à chargement par la bouche transportée d'un lieu de chasse à un autre, elle est non chargée;
b) s'il s'agit d'une arme à feu à chargement par la bouche transportée d'un lieu de chasse à un autre, la capsule de mise à feu ou le silex a été enlevé.
(2) Sous réserve du paragraphe (3), le particulier ne peut transporter une arme à feu sans restrictions dans un véhicule non surveillé que si les conditions suivantes sont respectées :
a) dans le cas où le véhicule est muni d'un coffre ou d'un compartiment similaire pouvant être bien verrouillés, l'arme se trouve dans le coffre ou le compartiment, lequel est bien verrouillé;
b) dans le cas où le véhicule n'est pas muni d'un coffre ou d'un compartiment similaire pouvant être bien verrouillés, l'arme n'est pas visible de l'extérieur du véhicule et le véhicule — ou la partie de celui-ci contenant l'arme — est bien verrouillé.
(3) Lorsque, dans une région sauvage éloignée qui ne fait l'objet d'aucun usage apparent — ou raisonnablement identifiable — qui soit incompatible avec la chasse, le particulier transporte une arme à feu sans restrictions dans un véhicule non surveillé qui n'est pas muni d'un coffre ou d'un compartiment similaire pouvant être bien verrouillés et que le véhicule ou la partie de celui-ci contenant l'arme à feu ne peuvent être bien verrouillés, il doit veiller à ce que l'arme à feu :
a) ne soit pas visible;
b) soit rendue inopérante par un dispositif de verrouillage sécuritaire, sauf s'il en a besoin de façon raisonnable pour la lutte contre les prédateurs.
Transport des armes à feu à autorisation restreinte
11 Le particulier ne peut transporter une arme à feu à autorisation restreinte que si les conditions suivantes sont respectées :
a) elle est non chargée;
b) elle est rendue inopérante par un dispositif de verrouillage sécuritaire;
c) elle se trouve dans un contenant verrouillé qui est fait d'un matériau opaque et dont la résistance, la construction et les caractéristiques sont telles qu'on ne peut le forcer facilement et qu'il ne peut s'ouvrir accidentellement pendant le transport;
d) dans le cas où le contenant visé à l'alinéa c) se trouve dans un véhicule non surveillé :
(i) si le véhicule est muni d'un coffre ou d'un compartiment similaire pouvant être bien verrouillés, le contenant se trouve dans le coffre ou le compartiment, lequel est bien verrouillé,
(ii) si le véhicule n'est pas muni d'un coffre ou d'un compartiment similaire pouvant être bien verrouillés, le véhicule — ou la partie de celui-ci renfermant le contenant — est bien verrouillé et le contenant n'est pas visible de l'extérieur du véhicule.
Transport des armes à feu prohibées
12 Le particulier ne peut transporter une arme à feu prohibée que si les conditions suivantes sont respectées :
a) elle est non chargée;
b) elle est rendue inopérante par un dispositif de verrouillage sécuritaire;
c) s'il s'agit d'une arme automatique dont le verrou ou la glissière peut être enlevé avec une facilité raisonnable, le verrou ou la glissière est enlevé;
d) elle se trouve dans un contenant verrouillé qui est fait d'un matériau opaque et dont la résistance, la construction et les caractéristiques sont telles qu'on ne peut le forcer facilement et qu'il ne peut s'ouvrir accidentellement pendant le transport;
e) dans le cas où le contenant visé à l'alinéa d) se trouve dans un véhicule non surveillé :
(i) si le véhicule est muni d'un coffre ou d'un compartiment similaire pouvant être bien verrouillés, le contenant se trouve dans le coffre ou le compartiment, lequel est bien verrouillé,
(ii) si le véhicule n'est pas muni d'un coffre ou d'un compartiment similaire pouvant être bien verrouillés, le véhicule — ou la partie de celui-ci renfermant le contenant — est bien verrouillé et le contenant n'est pas visible de l'extérieur du véhicule.
Transport des répliques
13 Le particulier ne peut transporter une réplique que si les conditions suivantes sont respectées :
a) dans le cas où le véhicule qui transporte la réplique est muni d'un coffre ou d'un compartiment similaire pouvant être bien verrouillés, la réplique se trouve dans le coffre ou le compartiment, lequel est bien verrouillé;
b) dans le cas où le véhicule qui transporte la réplique n'est pas muni d'un coffre ou d'un compartiment similaire pouvant être bien verrouillés, la réplique n'est pas visible de l'extérieur du véhicule et le véhicule — ou la partie de celui-ci contenant la réplique — est bien verrouillé.
Armes à feu historiques
14 (1) Le particulier ne peut entreposer, exposer ou transporter une arme à feu historique que si elle est non chargée.
(2) Le particulier ne peut transporter une arme à feu historique dans un véhicule non surveillé que si les conditions suivantes sont respectées :
a) dans le cas où le véhicule est muni d'un coffre ou d'un compartiment similaire pouvant être bien verrouillés, l'arme se trouve dans le coffre ou le compartiment, lequel est bien verrouillé;
b) dans le cas où le véhicule n'est pas muni d'un coffre ou d'un compartiment similaire pouvant être bien verrouillés, l'arme n'est pas visible de l'extérieur du véhicule et le véhicule — ou la partie de celui-ci contenant l'arme — est bien verrouillé.
(3) Le particulier ne peut transporter une arme à feu historique qui est une arme de poing que si elle se trouve dans un contenant verrouillé qui est fait d'un matériau opaque et dont la résistance, la construction et les caractéristiques sont telles qu'on ne peut le forcer facilement et qu'il ne peut s'ouvrir accidentellement pendant le transport.
Maniement des armes à feu
15 Le particulier ne peut charger une arme à feu ou manier une arme à feu chargée qu'à un endroit où il est permis de tirer au moyen de l'arme à feu selon les lois et règlements fédéraux et provinciaux et les règlements municipaux applicables.
ANNEXE E
Loi visant à favoriser la protection des personnes à l’égard d’une activité impliquant des armes à feu, chapitre P-38.0001.
1. La présente loi vise notamment à favoriser la protection des personnes qui fréquentent les lieux d’une institution désignée, lesquels comprennent l’ensemble des terrains dont elle dispose et les constructions qui y sont érigées. Sont des institutions désignées:
1° un centre de la petite enfance et une garderie, au sens de la Loi sur les services de garde éducatifs à l’enfance (chapitre S-4.1.1);
2° un jardin d’enfants au sens de l’article 153 de cette loi;
3° un service de garde en milieu scolaire, une école d’enseignement de niveau préscolaire, primaire et secondaire, un collège d’enseignement de niveau post-secondaire ou un collège d’enseignement général et professionnel, un centre de formation professionnelle, un centre d’éducation des adultes et une université.
Les dispositions de la présente loi et de ses règlements s’appliquent, en faisant les adaptations nécessaires, à un service de garde en milieu familial, qu’il soit tenu par une personne reconnue ou non à titre de responsable d’un tel service en vertu de la Loi sur les services de garde éducatifs à l’enfance.
La présente loi vise également à favoriser la protection des personnes qui utilisent un moyen de transport public, à l’exclusion du transport par taxi ou par une automobile assimilée à un taxi au sens de l’article 4 du Code de la sécurité routière (chapitre C-24.2), ou qui utilisent un moyen de transport scolaire.
Le gouvernement peut, par règlement, désigner toute autre institution que celles visées au deuxième alinéa ou soustraire de l’application de la présente loi certaines d’entre elles, certains lieux de ces institutions ou certains moyens de transport public, dans les cas et aux conditions qu’il détermine.
2. Nul ne peut être en possession d’une arme à feu au sens du Code criminel (L.R.C. 1985, c. C-46) sur les lieux d’une institution désignée. Il en est de même pour tout transport public, à l’exclusion du transport par taxi ou par une automobile assimilée à un taxi visée au quatrième alinéa de l’article 1, et pour tout transport scolaire.
La personne qui contrevient aux dispositions du premier alinéa commet une infraction et est passible d’une amende de 500 $ à 5 000 $.
3. L’article 2 ne s’applique pas aux fonctionnaires publics visés à l’article 117.07 du Code criminel (Lois révisées du Canada (1985), chapitre C-46), à la personne autorisée à porter une arme à feu pour la protection de sa vie ou celle d’autrui ou pour usage dans le cadre de son activité professionnelle légale, ni aux autres personnes désignées par règlement du gouvernement, en fonction des responsabilités qu’elles assument ou des activités qu’elles exercent et selon les conditions qu’il fixe.
4. Le ministre peut, exceptionnellement, autoriser une activité impliquant des armes à feu sur les lieux d’une institution désignée, dans les cas, pour la durée et aux conditions qu’il détermine.
ANNEXE F
Loi sur la conservation et la mise en valeur de la faune, chapitre C‑61.1
DISPOSITION PRÉLIMINAIRE
La présente loi a pour objet la conservation de la faune et de son habitat, leur mise en valeur dans une perspective de développement durable et la reconnaissance à toute personne du droit de chasser, de pêcher et de piéger, conformément à la loi. À cet effet, elle établit diverses interdictions relatives à la conservation des ressources fauniques ainsi que diverses normes en matière de sécurité et elle énonce les droits et obligations des chasseurs, pêcheurs et piégeurs.
DÉFINITIONS
«animal»: tout mammifère, oiseau, amphibien ou reptile, d’un genre, d’une espèce ou d’une sous-espèce qui se reproduit à l’état sauvage au Québec ou ailleurs et qui origine d’une lignée non sélectionnée par l’homme, ou qui se distingue difficilement d’une espèce sauvage par sa taille, sa couleur ou sa forme, qu’il soit né ou gardé en captivité ou non; ce terme s’applique également à toute partie d’un tel animal ou à sa chair dans chaque cas où le contexte le permet;
«chasser»: pourchasser un animal, le poursuivre, le harceler, le traquer, le mutiler, l’appeler, le suivre, être à son affût, le localiser, ou tenter de le faire, tout en étant en possession d’une arme, ou tirer cet animal, le tuer, le capturer, ou tenter de le faire, à l’exception de le piéger;
«piéger»: capturer à l’aide d’un piège un animal à fourrure, tenter de le faire ou le fait d’installer un piège;
DROIT DE CHASSER, DE PÊCHER ET DE PIÉGER
1.3. Toute personne a le droit de chasser, de pêcher et de piéger, conformément à la loi.
Le premier alinéa n’a pas pour effet, toutefois, d’établir une prépondérance de ce droit à l’égard d’autres activités pouvant s’exercer sur le même territoire.
1.4. Nul ne peut sciemment faire obstacle à une personne effectuant légalement une activité visée au premier alinéa de l’article 1.3, y compris une activité préparatoire à celle-ci.
Pour l’application du premier alinéa, on entend par «faire obstacle» notamment le fait d’empêcher l’accès d’un chasseur, d’un pêcheur ou d’un piégeur sur les lieux de chasse, de pêche ou de piégeage auxquels il a légalement accès, d’endommager le mirador ou la cache d’un chasseur, d’incommoder ou d’effaroucher un animal ou un poisson, par une présence humaine, animale ou toute autre, par un bruit ou une odeur ou le fait de rendre inefficace un appât, un leurre, un agrès, un piège ou un engin destiné à chasser, à pêcher ou à piéger cet animal ou ce poisson.
CONDITIONS D’EXPLOITATION DE LA FAUNE
26. Nul ne peut déranger, détruire ou endommager le barrage du castor ou les oeufs, le nid ou la tanière d’un animal.
Toutefois, une personne ou celle qui lui prête main-forte peut déroger à cette interdiction si elle ne peut empêcher un animal de causer des dégâts à sa propriété ou à une propriété dont elle a la garde ou est chargée de l’entretien.
Le ministre peut, aux conditions qu’il détermine, autoriser une personne à déroger au premier alinéa.
Le ministre peut, par règlement, prévoir les cas et les conditions dans lesquels une personne qui capture ou abat un animal, conformément à l’article 67, ou celle qui lui prête main-forte peut déroger au présent article sans l’autorisation du ministre.
26.1.