Cardinal c. Air Canada | 2025 QCCQ 3055 |
COUR DU QUÉBEC |
« Division des petites créances » |
CANADA |
PROVINCE DE QUÉBEC |
DISTRICT DE | MONTRÉAL |
« Chambre civile » |
N° : | 500-32-723006-245 |
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DATE : | 10 juillet 2025 |
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE L’HONORABLE ELIANA MARENGO, J.C.Q. |
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JULIEN CARDINAL |
et |
ANNE-CATHERINE HAMEL |
et |
MARIE-LAURENCE CARDINAL |
et |
LOUIS-THOMAS CARDINAL |
Demandeurs |
c. |
AIR CANADA |
Défenderesse ______________________________________________________________________ |
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JUGEMENT RENDU PAR DÉFAUT
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- La partie demanderesse poursuit Air Canada en dommages suite à l’annulation d’un vol.
- Le Tribunal a procédé par défaut vu l’absence du représentant de la partie défenderesse, bien que dûment convoqué par écrit (avis de convocation et courriel le jour du procès) et par téléphone (le jour du procès).
LES FAITS
- Le 4 mars 2023, alors que le demandeur, son épouse et ses 2 enfants sont à Vancouver et s’apprêtent à quitter pour l’aéroport pour prendre l’avion vers Montréal, il reçoit un courriel de la défenderesse l’avisant que les vols AC234 et AC336 ont été annulés. On cite « mauvaises conditions météorologiques », sans spécifier lesquelles, ni quels endroits seraient affectés (courriel, pièce P-2).
- Sans consultation, la défenderesse reprotège les demandeurs sur le vol AC2104 de Vancouver à Montreal avec un départ le 5 mars à 23h30, arrivant ainsi à Montreal 2 jours plus tard que prévu, soit le 6 mars à 07h20.
- Avec d’énormes difficultés, le demandeur tente de rejoindre le transporteur, car le nouveau vol et le délai proposés sont inacceptables, entre autres, parce que le demandeur et la demanderesse, qui est dentiste, doivent travailler le lundi matin et les enfants doivent aller à l’école.
- Ce n’est que 4 heures plus tard que le demandeur réussit à parler à une préposée de la défenderesse.
- Il lui demande d’être reprotégé avec sa famille sur d’autres vols, qui sont disponibles, selon ses recherches, le jour même ou le lendemain en matinée (listes, pièces P-4 à P-6), ce que la préposée refuse prétextant l’existence de certaines « politiques », mais sans plus.
- Qui plus est, le demandeur apprendra plus tard que le vol annulé est parti en soirée, sans qu’il ne soit avisé.
- Après avoir dépensé plus de 1 100 $ pendant leur séjour de 2 jours à Vancouver (hébergement, repas etc.), le demandeur et sa famille arrivent finalement à Montréal le 6 mars.
- La demanderesse doit annuler ses patients le lundi matin, et les enfants manquent l’école.
- Afin de minimiser les dommages, le demandeur soumet une réclamation à son assureur et reçoit l’indemnité maximale permise dans les circonstances, soit 640 $ (détails de chèque, pièce P-9).
- Les demandeurs réclament la somme de 4 602,70 $ au transporteur :
L’attitude, le manque de soutien et de considération et la prétendue politique de Air Canada ont définitivement gâché la fin de nos vacances de relâche. Cette mauvaise expérience nous a couté plus de 1000 $ simplement en dépenses.
(mise en demeure du 6 janvier 2024)
ANALYSE ET DÉCISION
- Dans l’affaire Masson c. Air Transat[1], le Tribunal énonçait ce qui suit :
[26] S’agissant d’un contrat de service, qui est également un contrat de consommation, la jurisprudence a retenu que le grossiste peut être tenu responsable du retard imputable au transport aérien si celui-ci n’a pas été en mesure d’exécuter son obligation de résultat et si son manque ne résulte pas d’une force majeure. Ne constituent pas une force majeure les bris mécaniques et ce, de façon générale selon la jurisprudence.
[27] Dans une autre affaire, la Cour considéra qu’un retard de 10 heures était inacceptable.
[28] En l’espèce, le retard a empêché les parties de retourner au travail aux dates convenues. Certaines de celles-ci devaient participer à des activités auxquelles elles ont dû renoncer. Toutes ont subi des attentes interminables avec des ressources limitées. Elles ont été privées d’une information soutenue et ont été laissées à elles-mêmes. De jeunes enfants ont vécu cette situation avec douleur, entraînant celle de leurs parents.
- De plus, le Règlement sur la protection des passagers aériens (RPPA)[2] prévoit un régime d’indemnisation statutaire pour les vols en provenance ou à destination d’un aéroport au Canada en cas de retard, annulation et refus d’embarquement.
- Dans le cas présent, le transporteur n’a pas prouvé que l’annulation des vols AC234 et AC336 était attribuable à une situation indépendante de sa volonté (art. 10 RPPA), ni rendu nécessaire par souci de sécurité (art. 11 RPPA).
- Il y a donc lieu de conclure que l’annulation était attribuable à la défenderesse et d’appliquer les articles 12, 14 et 19 du RPPA.
- Par conséquent, les demandeurs ont droit aux sommes réclamées de 602.07 $, à titre de dommages pécuniaires (art. 14 RPPA; dommages dûment mitigés conformément à l’art. 1479 C.c.Q), et 4000 $ à titre de dommages non pécuniaires (art. 19 a) iii RPPA).
PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
ACCUEILLE la demande;
CONDAMNE la défenderesse à payer aux demandeurs la somme de 4602. 07 $, plus les intérêts au taux légal et l’indemnité additionnelle prévue à l’article 1619 C.c.Q. depuis le 9 janvier 2024 et les frais de justice de 115 $.
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ELIANA MARENGO J.C.Q.
Date d’audience : 16 juin 2025
[2] DORS/2019-150, adopté en vertu de la Loi sur les transports, L.C 1996, ch.10.