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ORDRE DES TRAVAILLEURS SOCIAUX ET DES THÉRAPEUTES CONJUGAUX ET FAMILIAUX DU QUÉBEC |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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N° : |
37-10-006 |
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DATE : |
Le 21 juin 2012. |
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LE CONSEIL : |
Me Diane Larose |
Présidente |
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Madame Marie Sénécal-Émond |
Membre |
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Madame Brigitte Côté |
Membre |
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ÉTIENNE CALOMNE, ès qualités de syndic de l’Ordre des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec, ayant son siège social au 255, boulevard Crémazie Est, bureau 520, Montréal, province de Québec, H2M 1M2 |
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Partie plaignante |
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c.
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PATRICE BARON, travailleur social, (permis # [...]), résidant et domicilié au [...], Port-Cartier, province de Québec, [...] |
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Partie intimée |
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DÉCISION SUR CULPABILITÉ (Article
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Conformément à l’article
Le Conseil de discipline émet également une ordonnance de non-accessibilité relativement au document P-8 déposé en preuve.
[1] Le Conseil de discipline de l’Ordre des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec a siégé à Montréal pour entendre et disposer d’une plainte ainsi libellée :
« Je, soussigné, ÉTIENNE CALOMNE, ès qualité de syndic de l’Ordre professionnel des travailleurs sociaux du Québec, affirme solennellement que je suis croyablement (sic) informé et que j’ai raison de croire que :
Monsieur Patrice Baron, alors qu’il était régulièrement inscrit au Tableau des membres de l’Ordre des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec, a commis des actes dérogatoires à l’honneur et à la dignité de la profession, soit :
1. Le ou vers le 18 septembre 2009, l’intimé a fait l’objet d’une décision d’un tribunal canadien le déclarant coupable d’une infraction criminelle, dans un jugement de l’Honorable juge Jean-Pierre Gervais, de la Cour du Québec, chambre criminelle et pénale, laquelle, de notre avis, a un lien avec l’exercice de la profession de travailleur social. L’intimé a, dans les faits, été reconnu coupable, des deux chefs d’accusation suivants :
a) entre le 1er
mars 2008 et le 28 mai 2008, à Matagami, district de l’Abitibi, l’intimé a
commis une action indécente dans un endroit public, en présence de X (1996-[...]),
Y (1996-[...]), Z (1995-[...]), A (1996-[...]), B (1996-[...]) et C (1996-[...]),
commettant ainsi l’infraction punissable sur déclaration sommaire de
culpabilité prévue à l’article
b) entre le 1er
mars 2008 et le 28 mai 2008, à Matagami, district de l’Abitibi, a, à des fins
d’ordre sexuel, exhibé ses organes génitaux devant X (1996-[...]), Y (1996-[...]),
Z (1995-[...]), A (1996-[...]), B (1996-[...]) et C (1996-[...]), enfants âgés
de moins de seize (16) ans, commettant ainsi l’infraction punissable sur
déclaration sommaire de culpabilité prévue à l’article
commettant par
là une infraction aux dispositions de l’article
[2] Lors de l’audition, le plaignant est présent et représenté par son procureur, Me Pierre Sicotte. L’intimé est absent, mais représenté par sa procureure, Me Carolyne Mathieu.
[3]
La procureure de l’intimé a expliqué au Conseil de discipline qu'en
dépit de la présomption prévue à l’article
[4]
Le procureur du plaignant, compte tenu de l’obligation d’un conseil de
discipline de se prononcer préalablement sur la culpabilité de l’intimé, tel
que prévu à l’article
PREUVE DU PLAIGNANT
Témoignage de monsieur Étienne Calomne
[5] Monsieur Calomne est syndic de l’Ordre et il a procédé à l’enquête dans ce dossier. Il relate que l’intimé travaillait en milieu scolaire, auprès d’écoliers de niveau élémentaire et âgés de 11 et 12 ans. Au cours de la période du 1er mars au 1er mai 2008, il animait plus précisément des ateliers de médiation au rythme de deux (2) jours par semaine. Ces ateliers visaient à former certains élèves afin qu'ils puissent intervenir auprès des plus jeunes, dans la cour d'école par exemple, afin de les aider à gérer les conflits.
[6] C’est à cette époque qu’il aurait fait preuve d’exhibitionnisme dans la salle de toilettes réservée aux jeunes écoliers.
[7] Monsieur Calomne dépose la preuve documentaire recueillie au soutien de la plainte disciplinaire logée contre l’intimé qui est constituée des documents suivants :
- La preuve d’inscription de l’intimé au Tableau de l’Ordre au cours de la période visée par la plainte (P-1);
- Un signalement reçu par courriel le 17 février 2010 suite à la publication, sur Internet, d’un article décrivant la condamnation de l’intimé pour des gestes à caractère sexuel et la sentence imposée par la Cour du Québec, Chambre criminelle et pénale (P-2);
- Une lettre datée du 30 mars 2010 informant l’intimé de l’enquête entreprise à son sujet (P-3);
- Les notes manuscrites prises lors d’un entretien téléphonique avec l’intimé (P-4);
- Une copie du jugement rendu le 18 décembre 2009 par l’Honorable Jean-Pierre Gervais, J.C.Q., déclarant l’intimé coupable d’avoir commis des actions indécentes dans un endroit public et d’exhibitionnisme devant des enfants âgés de moins de 16 ans (P-5);
- La lettre datée du 13 avril 2010 confiant un mandat à un sexologue de préparer un avis professionnel sur le potentiel de récidive de l’intimé (P-6);
- Le curriculum vitae de l’expert mandaté (P-7); et
- L’opinion clinique de l’expert sur les risques de récidive de l’intimé (P-8).
PREUVE DE L’INTIMÉ
[8] La procureure de l’intimé déclare n’avoir aucune preuve à offrir.
REPRÉSENTATIONS DU PLAIGNANT
[9] Le procureur du plaignant réserve ses représentations au moment de l'audition sur sanction.
REPRÉSENTATIONS DE L’INTIMÉ
[10] Me Mathieu présentera également ses représentations à l'issue de l'audition sur sanction.
ANALYSE
[11] Le 18 décembre 2009, l'Honorable Jean-Pierre Gervais de la Cour du Québec (Chambre criminelle et pénale) a trouvé l'intimé coupable de deux chefs d'accusation relatifs à la commission de gestes de nature sexuelle devant des enfants âgés de moins de 16 ans.
[12] Le
plaignant soutient qu’il s’agit de gestes compromettant l’honneur et la dignité de la profession et réfère le Conseil à l’article
« 149.1 Un syndic peut saisir le conseil de discipline, par voie de plainte, de toute décision d’un tribunal canadien déclarant un professionnel coupable d’une infraction criminelle qui, de son avis, a un lien avec l’exercice de la profession. Une copie dûment certifiée de la décision judiciaire fait preuve devant le conseil de discipline de la perpétration de l’infraction et, le cas échéant, des faits qui y sont rapportés. Le conseil de discipline prononce alors contre le professionnel, s’il le juge à propos, l’une ou l’autre des sanctions prévues à l’article 156. »
[13]
Tel que le prévoit l’article
[14]
En effet, si le Conseil de discipline en venait à la conclusion que les
infractions criminelles pour lesquelles l’intimé a été déclaré coupable et reçu
une sanction ne comportent aucun lien avec l’exercice de la profession, il ne
pourrait alors se pencher sur l’analyse de l’opportunité de lui imposer l’une
des sanctions prévues à l’article
[15] Le Conseil croit opportun de souligner l'exigence de la preuve ou de la détermination d'un lien avec l'exercice de la profession à la lumière des commentaires formulés par le Tribunal des professions dans l’affaire Bélanger c. Infirmières et infirmiers[2], à l’effet qu’il lui apparaissait loin d’être évident que la conduite avec un taux d’alcool supérieur à la limite légale avait un lien avec l’exercice de la profession d’infirmier.
[16] Dans le cas sous étude, il ne fait aucun doute, dans l’esprit du Conseil, que les gestes posés par l’intimé sont très graves et inacceptables de la part d’un professionnel soumis à l'obligation déontologique de se comporter d'une façon digne et irréprochable sur tous les plans.[3]
[17] Les gestes immoraux dont l'intimé s'est rendu coupable sont manifestement incompatibles avec les valeurs morales que l'intimé était appelé à transmettre aux jeunes étudiants qui participaient à ses ateliers de médiation. Par ses actes répréhensibles, l'intimé a trahi la confiance des jeunes étudiants qui lui étaient confiés et il a gravement porté atteinte aux valeurs intrinsèques de sa profession. L'existence du lien entre les actes criminels qui sont reprochés à l'intimé et l'exercice de la profession de travailleur social est manifeste et le plaignant n'avait certainement pas besoin d'en faire une longue démonstration.
[18] Sur la question de la détermination de l’opportunité d’imposer ou non une sanction à l’intimé, le Conseil se réfère aux critères énoncés par l’auteure Sylvie CHAMPAGNE et qui se résument comme suit :
« L’exercice de la discrétion sur « […] l’à-propos d’une sanction […] » doit se faire dans le cadre du droit disciplinaire. Les critères d’intervention doivent donc être :
1. Est-ce que l’acte criminel est un acte qui est prévu ou s’il porte atteinte à la protection du public?
2. Est-ce que l’acte criminel est un acte qui, par ailleurs, pourrait être l’objet d’une plainte en vertu des dispositions du Code de déontologie?
3. Est-ce un acte qui est en relation directe avec l’exercice de la profession?
4. Globalement, est-ce un acte qui exige l’intervention du Comité de discipline dans son rôle de protecteur du public?
Sans que ces éléments ne soient considérés comme étant exhaustifs, voilà de l’avis du tribunal, le cadre à l’intérieur duquel doit être exercée la discrétion prévue à l’article 111 quant à l’opportunité d’imposer une sanction. [4] »
[19] Le Conseil de discipline constate que tous les critères énumérés par Me Champagne sont ici réunis et il est convaincu qu'il doit ici intervenir au nom de la protection du public et imposer une sanction appropriée après avoir donné aux parties l'occasion de se faire entendre sur la nature de cette sanction.
[20] Il reste maintenant à disposer de l'argument de l'intimé relativement à l'obligation pour le Conseil de discipline de le déclarer coupable des actes décrits dans les deux chefs d'accusation dont il a déjà été déclaré coupable le 18 décembre 2009 par l'Honorable Jean-Pierre Gervais de la Cour du Québec, Chambre criminelle et pénale (P-5) avant de procéder à l'audition sur sanction.
[21]
La Cour du Québec s'est brièvement et accessoirement prononcée sur le
mécanisme procédural relatif à la plainte disciplinaire logée par le syndic en
vertu de l'article
« [61] Faut-il le rappeler, le Conseil n’a pas à décider s’il y a faute déontologique, mais doit analyser si, à la lumière de la preuve faite, il est opportun d’imposer une sanction. »
[22]
Par ailleurs, dans une affaire encore plus récente, le Tribunal des
professions rappelle, à l'aide des débats parlementaires relatifs à l'adoption
de l'article
« [133] Lors des débats parlementaires se rapportant à l’adoption du principe énoncé à l’article 149.1 du Code, le ministre de la Justice s’exprime ainsi [62] :
Quant au deuxième objectif du projet de loi, M. le Président, que cherche à solutionner le projet de loi et lié aux infractions criminelles commises par un professionnel, notons qu’une première étape avait été franchie en 1994. Il avait alors été permis au bureau d’un ordre de radier un membre, de le suspendre ou de limiter son droit d’exercice lorsqu’un tribunal l’avait déclaré coupable d’une infraction criminelle ou disciplinaire. En pratique cependant, ce processus est apparu difficile d’application. De plus, la Cour d’appel est venue limiter à un rôle provisoire l’intervention du bureau et a renvoyé au syndic de l’ordre le soin de faire cheminer une affaire vers une décision finale du comité de discipline. Le syndic avaitalors le fardeau d’établir devant le comité de discipline la preuve des actes criminels concernés.
Or, cette étape peut se révéler très difficile en raison de l’accès au dossier de preuves et elle peut entraîner des complications et des délais supplémentaires. Ces délais sont particulièrement problématiques lorsqu’il s’agit de la protection du public. Un groupe de travail de l’Office des professions sur la modernisation du système professionnel a proposé d’introduire une disposition qui modifie le fardeau de preuve dans ces cas. Le comité de discipline d’un ordre sera désormais tenu d’accepter la copie certifiée de la décision judiciaire comme preuve de la commission de l’infraction criminelle et des faits qui y sont rapportés. Le syndic n’aura pas besoin de refaire la preuve des actes déjà établis devant le tribunal criminel, ce qui permettra de raccourcir le délai dans le traitement des dossiers.
En résumé, les modifications proposées permettront à un syndic d’obtenir, s’il y a lieu, une sanction sur dépôt d’une décision d’un tribunal canadien déclarant le professionnel coupable d’un acte criminel. L’intervention du bureau, devenue provisoire par la décision de la Cour d’appel, également facilitée. En effet, la loi vient préciser que, devant le bureau, une décision d’un tribunal criminel ou disciplinaire canadien fera preuve de la commission de l’infraction et des faits qui y sont rapportés. […]
[134] Il est vrai que, de prime abord, le fait que l’article 149.1 du Code utilise les termes « peut saisir le conseil de discipline, par voie de plainte » peut laisser croire que le syndic doit indiquer une disposition de rattachement justifiant une déclaration de culpabilité.
[135] Mais le législateur ne parlant pas pour rien dire, si telle avait été son intention, il lui aurait suffi d’adopter la partie de l’article 149.1 du Code établissant que « la copie certifiée du jugement fait preuve de la perpétration de l’infraction et, le cas échéant, des faits qui y sont rapportés ».
[136] Le syndic aurait alors pu déposer une plainte invoquant la commission d’un acte dérogatoire contrairement à l’article 59.2 du Code et se décharger de son fardeau de preuve en déposant la copie certifiée du jugement. Le Comité aurait pu conclure à la présence de l’acte dérogatoire, enregistrer une déclaration de culpabilité et prononcer l’une ou l’autre des sanctions prévues à l’article 156 du Code.
[137] Le législateur a fait plus : le seul dépôt du jugement et la conclusion du Comité quant à l’existence d’un lien avec l’exercice de la profession lui confèrent juridiction pour imposer, s’il le juge à propos, l’une ou l’autre de ces sanctions.
[138] De l’avis du Tribunal, la référence à la notion de « plainte » dans le libellé de l'article 149.1 ne vise que le véhicule procédural par lequel on peut saisir le Comité de l’existence de ce jugement. »[6] (emphase ajoutée)
[23] À la lumière des commentaires du Tribunal des professions, le Conseil de discipline conclut que le seul dépôt de la décision rendue le 18 décembre 2009 par l'Honorable Jean-Pierre Gervais (P-5) et l'établissement du lien entre les actes ayant entraîné la déclaration de culpabilité de l'intimé et l'exercice de la profession de travailleur social suffit pour lui donner juridiction pour procéder directement à l'audition sur sanction sans qu'il soit nécessaire de déclarer l'intimé coupable des gestes ayant déjà fait l'objet d'une condamnation par une instance pénale.
[24] En effet, le Conseil de discipline s'interroge sur l'utilité de déclarer l'intimé coupable alors qu'il existe déjà l'autorité du jugement rendu par un autre tribunal à l'égard des mêmes gestes.
[25]
Par contre, comme l'ont souligné les procureurs à l'audience, l'article
« 150. Après déclaration de culpabilité, les parties peuvent se faire entendre au sujet de la sanction.
Si l'une des parties est absente lorsque le conseil déclare l'intimé coupable, le secrétaire lui signifie un avis de cette déclaration conformément au Code de procédure civile (chapitre C-25).
Le conseil impose la sanction dans les 60 jours qui suivent la déclaration de culpabilité. » (Emphase ajoutée)
[26]
Puisque le législateur a décidé de conserver le mécanisme procédural de
la plainte à l'égard des actes visés à l'article
[27]
En définitive, le Conseil est d'opinion que dans la mesure où il est
satisfait que les actes, constitutifs d'infractions criminelles pour lesquelles
un professionnel a été déclaré coupable par un tribunal canadien, comportent un
lien avec l'exercice de la profession, il a pleine juridiction pour se pencher
sur l'opportunité d'imposer une sanction à ce professionnel et le fait de le
déclarer coupable ou non de tels actes est sans conséquence sur le processus
prévu à l'article
[28]
En l'espèce, puisque l'intimé insiste sur une déclaration de culpabilité
avant de procéder à l'étape de la preuve et des représentations sur sanction,
le Conseil de discipline reconnaîtra tout simplement les effets de la
présomption de culpabilité prévue à l'article
[29] POUR CES MOTIFS, LE CONSEIL DE DISCIPLINE DE L’ORDRE DES TRAVAILLEURS SOCIAUX ET DES THÉRAPEUTES CONJUGAUX ET FAMILIAUX DU QUÉBEC :
[30]
DONNE EFFET à la présomption de culpabilité édictée à l'article
[31] DÉTERMINE que ces actes ont un lien avec l'exercice de la profession de travailleur social et qu'il y a lieu d'imposer une sanction à l’intimé;
[32] FIXE l'audition sur sanction au 21 juin 2012;
[33] ORDONNE la non-publication, la non-divulgation et la non-diffusion du nom des personnes dont il est question dans la plainte ou dans les documents déposés en preuve ainsi que de tout renseignement permettant de l’identifier;
[34] ORDONNE la non-accessibilité au document (P-8) déposé en preuve.
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__________________________________ Me Diane Larose, présidente
__________________________________ Madame Marie Sénécal-Émond, membre
__________________________________ Madame Brigitte Côté, membre |
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Me Pierre Sicotte |
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Procureur de la plaignante |
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Me Carolyne Mathieu |
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Procureure de l’intimé |
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Date d’audience : |
Le 16 avril 2012 |
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JURISPRUDENCE CITÉE ET CONSULTÉE
Code des professions, L.R.Q., c. C-26;
Bélanger c. Infirmières
et infirmiers,
Code de déontologie des membres de l'Ordre professionnel des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec, c. C-26, r. 286, art. 3.02.08;
CHAMPAGNE, Sylvie, « Les modifications au Code des professions : conséquences pour le praticien », dans Développements récents en déontologie, droit disciplinaire et professionnel, Service de la formation permanente du Barreau du Québec, Cowansville, Les Éditions Yvon Blais Inc., 2005, p. 1, pp. 45-46;
Landry c. Avocats (Ordre professionnel des)
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ORDRE DES TRAVAILLEURS SOCIAUX ET DES THÉRAPEUTES CONJUGAUX ET FAMILIAUX DU QUÉBEC |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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N° : |
37-10-006 |
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DATE : |
Le 28 juin 2012. |
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______________________________________________________________________ |
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LE CONSEIL : |
Me Diane Larose |
Présidente |
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Madame Marie Sénécal-Émond |
Membre |
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Madame Brigitte Côté |
Membre |
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ÉTIENNE CALOMNE, ès qualités de syndic de l’Ordre des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec, ayant son siège social au 255, boulevard Crémazie Est, bureau 520, Montréal, province de Québec, H2M 1M2 |
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Partie plaignante |
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c.
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PATRICE BARON, travailleur social, (permis # [...]), résidant et domicilié au [...], Port-Cartier, province de Québec, [...] |
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Partie intimée |
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DÉCISION SUR SANCTION (Article
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Conformément à l’article
Le Conseil de discipline émet également une ordonnance de non-accessibilité relativement aux documents P-8 et SI-1 déposés en preuve.
[1] Le Conseil de discipline de l’Ordre des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec a siégé à Montréal pour entendre les représentations sur sanction suite à sa décision sur culpabilité rendue oralement le 16 avril 2012, dont les motifs écrits ont été consignés dans une décision rendue le 21 juin suivant, par laquelle l’intimé a été trouvé coupable du seul chef d’une plainte ainsi libellée :
« Je, soussigné, ÉTIENNE CALOMNE, ès qualité de syndic de l’Ordre professionnel des travailleurs sociaux du Québec, affirme solennellement que je suis croyablement (sic) informé et que j’ai raison de croire que :
Monsieur Patrice Baron, alors qu’il était régulièrement inscrit au Tableau des membres de l’Ordre des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec, a commis des actes dérogatoires à l’honneur et à la dignité de la profession, soit :
1. Le ou vers le 18 septembre 2009, l’intimé a fait l’objet d’une décision d’un tribunal canadien le déclarant coupable d’une infraction criminelle, dans un jugement de l’Honorable juge Jean-Pierre Gervais, de la Cour du Québec, chambre criminelle et pénale, laquelle, de notre avis, a un lien avec l’exercice de la profession de travailleur social. L’intimé a, dans les faits, été reconnu coupable, des deux chefs d’accusation suivants :
a) entre
le 1er mars 2008 et le 28 mai 2008, à Matagami, district de
l’Abitibi, l’intimé a commis une action indécente dans un endroit public, en
présence de X (1996-[...]), Y (1996-[...]), Z (1995-[...]), A (1996-[...]), B
(1996-[...]) et C (1996-[...]), commettant ainsi l’infraction punissable sur
déclaration sommaire de culpabilité prévue à l’article
b) entre
le 1er mars 2008 et le 28 mai 2008, à Matagami, district de
l’Abitibi, a, à des fins d’ordre sexuel, exhibé ses organes génitaux devant X
(1996-[...]), Y (1996-[...]), Z (1995-[...]), A (1996-[...]), B (1996-[...]) et
C (1996-[...]), enfants âgés de moins de seize (16) ans, commettant ainsi
l’infraction punissable sur déclaration sommaire de culpabilité prévue à
l’article
commettant par
là une infraction aux dispositions de l’article
[2] Lors de l’audition, le plaignant est présent et représenté par son procureur, Me Pierre Sicotte. L’intimé est absent, mais représenté par sa procureure, Me Carolyne Mathieu. Me Mathieu explique que l'intimé, qui réside à Port-Cartier, présente actuellement une condition médicale qui l'empêche d'effectuer un long déplacement. Elle déposera, dans le cadre de sa preuve, un certificat médical à cet effet.
[3] Les procureurs annoncent au Conseil de discipline qu'à l'issue d'une analyse sérieuse du dossier, ils en sont venus à une entente concernant une recommandation commune de sanction qu'ils jugent appropriée aux circonstances particulières du dossier.
PREUVE ET REPRÉSENTATIONS DU PLAIGNANT
[4] Me Sicotte déclare n'avoir aucune autre preuve à offrir que celle déjà déposée lors de l'audition sur culpabilité sous réserve d'une copie de la note d'honoraires (SP-1) au montant de 637, 50 $ transmise par monsieur Normand Gérard, expert retenu par le plaignant pour évaluer le potentiel de récidive de l'intimé.
[5] Dans la détermination de la sanction élaborée de concert avec la procureure de l'intimé, le procureur du plaignant indique que ce dernier a été interpellé par la persistance de l'intimé à nier sa culpabilité même après sa condamnation par la Cour du Québec, Chambre criminelle et pénale.
[6] Il rappelle la gravité des gestes immoraux dont l'intimé s'est rendu coupable envers de jeunes élèves, lesquels ont manifestement porté atteinte à l'honneur et à la dignité de la profession.
[7] Il croit que la limitation d'exercer ses activités auprès de toute clientèle âgée de moins de 16 ans proposée et acceptée par les parties suffira à protéger adéquatement le public tout en remplissant les objectifs de dissuasion et d'exemplarité que doit comporter toute sanction.
[8]
Il ajoute qu'il appartiendra à l'intimé de demander au Conseil de
discipline, par requête basée sur l'article
PREUVE ET REPRÉSENTATIONS DE L’INTIMÉ
[9] La procureure de l’intimé déclare n’avoir aucune autre preuve à offrir que l'affidavit de l'intimé confirmant, notamment, son consentement à la présentation de la recommandation commune de sanction, le billet médical attestant de son incapacité à se déplacer pour assister à l'audition sur sanction ainsi qu'un rapport, daté du 20 avril 2012, rédigé par monsieur Yves Gendron, psychologue, constatant l'état dépressif de l'intimé et son incapacité à effectuer tout travail pour une période indéterminée (SI-1).
[10] Elle précise enfin que l'intimé n'est actuellement plus inscrit au Tableau des membres de l'Ordre.
ANALYSE
[11]
Le 16 avril 2012, le Conseil de discipline a donné effet à la
présomption légale édictée à l'article
[12]
L'article
« 149.1 Un syndic peut saisir le conseil de discipline, par voie de plainte, de toute décision d’un tribunal canadien déclarant un professionnel coupable d’une infraction criminelle qui, de son avis, a un lien avec l’exercice de la profession. Une copie dûment certifiée de la décision judiciaire fait preuve devant le conseil de discipline de la perpétration de l’infraction et, le cas échéant, des faits qui y sont rapportés. Le conseil de discipline prononce alors contre le professionnel, s’il le juge à propos, l’une ou l’autre des sanctions prévues à l’article 156. »
[13] Le Conseil s'étant déjà prononcé sur le lien entre les gestes reprochés à l'intimé et l'exercice de la profession ainsi que sur l'opportunité de prononcer une sanction contre l’intimé, il doit maintenant déterminer la nature de cette sanction.
[14] À la lumière des principes énoncés par la Cour d'appel du Québec dans l'affaire Pigeon c. Daigneault[9], le Conseil de discipline rappelle que la sanction imposée par un conseil de discipline doit refléter les faits particuliers d'un dossier, chaque cas étant un cas d'espèce et qu'elle doit permettre d'atteindre les objectifs relatifs à la protection du public, l'effet dissuasif sur le professionnel concerné, l'exemplarité à l'égard des autres membres de la profession et le droit du professionnel d'exercer sa profession.
[15] La recommandation de sanction proposée par les parties et plus amplement décrite dans l'affidavit signé par l'intimé, le 18 juin 2012, prévoit ce qui suit dans sa partie pertinente :
« 3. Par contre, je suis en accord avec des représentations communes quant à une sentence me concernant et si le Conseil de discipline accepte telles représentations en mon absence;
4. En effet, je suis disposé à accepter que des représentations communes soient formulées en mon nom par mon avocate Me Carolyne Mathieu, le 21 juin 2012, en mon absence et selon les termes qui suivent;
5. Les représentations communes seraient: Une limitation du droit de desservir une clientèle de moins de 16 ans, et ce, tant individuelle, de groupe ou de famille, peu importe la nature de l'intervention, avec les frais incluant les frais d'experts; »[10].
[16] Comme le soulignait le Conseil de discipline dans sa décision sur culpabilité, il ne fait aucun doute que les gestes posés par l’intimé sont très graves et inacceptables de la part d’un professionnel soumis à l'obligation déontologique de se comporter d'une façon digne et irréprochable sur tous les plans[11].
[17] Dans le présent dossier, le Conseil de discipline est particulièrement préoccupé par le fait que l'intimé persiste, en dépit de sa condamnation par un tribunal de juridiction criminelle, à se prétendre innocent et injustement condamné[12].
[18] L'état d'esprit de l'intimé n'a rien pour rassurer le Conseil de discipline quant au risque de récidive et le convainc de la justesse et de l'opportunité d'imposer la sanction proposée par les parties afin qu'il ne soit plus en contact avec une clientèle âgée de moins de 16 ans.
[19] Ainsi, après analyse de la preuve et des représentations, le Conseil de discipline est d’avis que la recommandation soumise est juste, équitable et appropriée compte tenu des circonstances de la présente affaire et qu’il y a donc lieu d’y donner suite.
[20] POUR CES MOTIFS, LE CONSEIL DE DISCIPLINE DE L’ORDRE DES TRAVAILLEURS SOCIAUX ET DES THÉRAPEUTES CONJUGAUX ET FAMILIAUX DU QUÉBEC :
[21] IMPOSE à l’intimé :
· sur le seul chef de la plainte : une limitation du droit de desservir une clientèle de moins de 16 ans, et ce, tant individuelle, de groupe ou de famille, peu importe la nature de l'intervention.
[22] ORDONNE que cette limitation soit exécutoire à compter du moment où l’intimé redeviendra membre en règle de l’Ordre des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec, le cas échéant;
[23]
ORDONNE à la secrétaire du Conseil de discipline de l’Ordre des travailleurs
sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec, conformément à
l’article
[24] CONDAMNE l’intimé au paiement des déboursés, y compris les frais de l'expert retenu par le plaignant, et les frais de publication de la présente décision;
[25] ORDONNE la non-publication, la non-divulgation et la non-diffusion du nom des personnes dont il est question dans la plainte ou dans les documents déposés en preuve ainsi que de tout renseignement permettant de les identifier;
[26] ORDONNE la non-accessibilité aux documents P-8 et SI-1 déposés en preuve.
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__________________________________ Me Diane Larose, présidente
__________________________________ Madame Marie Sénécal-Émond, membre
__________________________________ Madame Brigitte Côté, membre |
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Me Pierre Sicotte |
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Procureur de la plaignante |
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Me Carolyne Mathieu |
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Procureure de l’intimé |
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Date d’audience : |
Le 21 juin 2012 |
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JURISPRUDENCE CITÉE ET CONSULTÉE
Code des professions, L.R.Q., c. C-26;
Pigeon c. Daigneault,
Code de déontologie des membres de l'Ordre professionnel des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec, c. C-26, r. 286, art. 3.02.08;
[1] L.R.Q., c. C-26, ci-après le « C.P. ».
[2]
[3] Code de déontologie des membres de l'Ordre professionnel des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec, c. C-26, r.286, art. 3.02.08.
[4] CHAMPAGNE, Sylvie, « Les modifications au Code des professions : conséquences pour le praticien », dans Développements récents en déontologie, droit disciplinaire et professionnel, Service de la formation permanente du Barreau du Québec, Cowansville, Les Éditions Yvon Blais Inc., 2005, p. 1, pp. 45-46.
[5] Supra note 2.
[6]
Landry c. Avocats (Ordre professionnel des)
[7] Supra, note 5.
[8] L.R.Q., c. C-26, ci-après le « C.P. ».
[9]
[10] SI-1.
[11] Code de déontologie des membres de l'Ordre professionnel des travailleurs sociaux et des thérapeutes conjugaux et familiaux du Québec, c. C-26, r. 286, art. 3.02.08.
[12] SI-1, au par. 6 et rapport de monsieur Yves Gendron.
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