Décision

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Côté et Ministère de la Sécurité publique

2021 QCCFP 17

 

 

COMMISSION DE LA FONCTION PUBLIQUE

 

 

CANADA

 

PROVINCE DE QUÉBEC

 

 

 

DOSSIERS Nos :

1302257 et 1302258

 

 

 

DATE :

26 juillet 2021

 

______________________________________________________________________

 

 

 

DEVANT LE JUGE ADMINISTRATIF :

Mathieu Breton

 

______________________________________________________________________

 

 

 

 

 

 

 

SYLVIE CÔTÉ

 

Partie demanderesse

 

 

et

 

 

MINISTÈRE DE LA SÉCURITÉ PUBLIQUE

 

Partie défenderesse

 

 

 

 

 

______________________________________________________________________

 

 

 

DÉCISION

 

(Articles 33 et 127, Loi sur la fonction publique, RLRQ, c. F-3.1.1)

 

______________________________________________________________________

 

 

 

[1]         Mme Sylvie Côté, chef d’unité, cadre, classe 7, à l’établissement de détention de Roberval (Établissement), dépose un recours à la Commission de la fonction publique (Commission) en vertu de l’article 33 de la Loi sur la fonction publique[1] (Loi). Elle conteste une réprimande imposée par son employeur, le ministère de la Sécurité publique.

[2]         Elle demande également à la Commission d’annuler une coupure de traitement de trois jours, soit pour les 8, 9 et 10 janvier 2020.

[3]         Selon le ministère, Mme Côté s’est absentée du travail sans autorisation durant ces journées, ce qui justifie la coupure et la réprimande. Il avait imposé à Mme Côté de fournir un certificat médical pour chacune de ses absences pour cause de maladie pendant six mois, ce qu’elle n’a pas fait pour ces trois jours.

[4]         De plus, il prétend que le recours visant à contester la coupure de traitement est prescrit puisqu’il a été déposé hors délai.

[5]         Mme Côté estime qu’elle n’a pas commis de faute et que son absence aurait dû être autorisée. La coupure de traitement et la réprimande devraient donc être annulées.

[6]         Elle considère notamment déraisonnable et abusive l’obligation imposée par son employeur de fournir systématiquement un certificat médical.

[7]          La Commission doit répondre aux questions suivantes :

1)    Le recours contestant la coupure de traitement est-il prescrit parce qu’il a été déposé hors délai?

2)    Si le recours n’est pas prescrit, le ministère pouvait-il couper le traitement de Mme Côté pour les journées d’absence des 8, 9 et 10 janvier 2020?

3)    Mme Côté a-t-elle commis une faute en omettant de transmettre un certificat médical pour ces journées d’absence?

4)    Le cas échéant, la réprimande est-elle une mesure disciplinaire proportionnelle à cette faute?

[8]         La Commission juge que le recours contestant la coupure de traitement est prescrit et que, de toute manière, cette mesure pouvait être imposée par le ministère. De plus, elle est d’avis que Mme Côté a commis une faute et qu’elle ne peut annuler ou modifier la réprimande imposée puisqu’il s’agit de la sanction la moins sévère applicable à un fonctionnaire. La Commission rejette donc les appels.

CONTEXTE ET ANALYSE

[9]          Mme Côté est chef d’unité au ministère depuis 2013. Elle travaille à l’Établissement depuis décembre 2015.

[10]       Le 10 juillet 2019, M. Christian Rioux, directeur adjoint à l’Établissement, avise Mme Côté qu’elle devra fournir à son employeur un certificat médical pour toute absence pour cause de maladie jusqu’au 10 janvier 2020. Il lui remet alors cette lettre :

[…] L’étude de votre dossier d’assiduité démontre que depuis le 5 juillet 2018, vous vous êtes absentée du travail à 13 reprises pour raison de maladie et à au moins 4 reprises pour des responsabilités parentales ou familiales.

Ainsi, nous vous informons que dorénavant, en vertu de l’article 115 de vos conditions de travail, un certificat médical (billet médical) avec un diagnostic pathologique, la durée de l’invalidité et le traitement vous sera exigé, et ce, pour toute absence en maladie jusqu’au 10 janvier 2020. De plus, jusqu’à cette même date, les absences en code 421 pour motifs familiaux devront dorénavant être accompagné d’une pièce justificative.

Afin de respecter la confidentialité des renseignements médicaux, le certificat médical devra être transmis à la Direction des ressources humaines à l’adresse courriel […] ou par courrier au : […]

Nous tenons à vous préciser qu’advenant le cas où vous ne fournissiez pas de certificat médical comprenant les informations susmentionnées, votre absence sera considérée comme non autorisée et non justifiée pouvant entraîner des mesures administratives ou disciplinaires à votre égard. […]

[Transcription textuelle]

[11]       M. Rioux décide d’imposer cette exigence particulière à Mme Côté après avoir constaté un écart entre son nombre de jours d’absence et celui de ses collègues.

[12]       Les 8, 9 et 10 janvier 2020, Mme Côté s’absente du travail. Chaque jour, elle avise M. Rioux par message texte qu’elle ne sera pas présente à son quart de soir. Les deux premiers jours, elle précise que la raison de son absence est liée à son cou.

[13]       Mme Côté ne consulte pas de médecin lors de ces trois journées ou durant les jours suivants.

[14]       Sa demande d’autorisation d’absence datée du 17 janvier 2020 est refusée le 20 janvier 2020 puisqu’elle ne soumet aucun document médical à son appui. Il s’agit du seul refus d’absence pour cause de maladie concernant la période du 10 juillet 2019 au 10 janvier 2020 puisque Mme Côté a fourni des pièces justificatives avec ses autres demandes d’autorisation d’absence.

[15]       Le 6 février 2020, M. Rioux convoque Mme Côté à une rencontre d’équité procédurale devant se tenir le 21 février 2020 puisqu’elle n’a pas respecté l’obligation imposée le 10 juillet 2019.

[16]       Le 7 février 2020, Mme Côté transmet à M. Rioux par courriel, à titre de pièce justificative pour son absence de trois jours, une facture d’une clinique de physiothérapie datée du 8 janvier 2020 pour un massage thérapeutique. Elle questionne M. Rioux pour savoir si la rencontre d’équité procédurale aura toujours lieu et, le cas échéant, elle demande son report.

[17]       Le 18 février 2020, une employée du ministère avise Mme Côté par courriel de la coupure de traitement en raison de son absence non autorisée : « J’ai saisi ton absence du 8 janvier au 10 janvier en coupure de traitement car cette maladie a été refusée. » Le 19 février 2020, Mme Côté transfère ce courriel à son procureur.

[18]       Le 27 février 2020, la rencontre d’équité procédurale a lieu.

[19]       Le 29 avril 2020, la directrice adjointe aux opérations remet une lettre de réprimande à Mme Côté :

[…] Par la présente, je vous avise de ma décision de vous réprimander formellement en raison de ce qui suit.

Les ou vers les 8, 9 et 10 janvier 2020, vous vous êtes absentée du travail pour motif de maladie et avez omis de produire un certificat médical conforme indiquant le diagnostic pathologique, la durée de l’invalidité et le traitement, et ce, tel que requis dans la lettre d’avertissement datée du 10 juillet 2019.

En agissant de la sorte, vous avez manqué à vos obligations prévues au Règlement sur l’éthique et la discipline dans la fonction publique, notamment celles d’assiduité et d’obéissance hiérarchique. L’obligation d’assiduité précise que vous devez être présente au travail, y accomplir vos tâches, respecter les heures de travail et ne pas vous absenter sans autorisation et sans justification.

L’un des besoins fonctionnels les plus importants pour l’employeur et son personnel cadre est d’assurer des services adéquats et pour ce faire, il est nécessaire que les employés soient assidus. Le personnel absent affectant considérablement la capacité de l’organisation de fonctionner de façon efficace, nous comptons sur la collaboration de tous pour diminuer l’absentéisme, notamment chez le personnel cadre.

J’espère que vous saurez tirer profit de cette mesure pour modifier votre conduite et je vous rappelle qu’en cas de récidive, des sanctions plus sévères pourront être prises. […]

[Transcription textuelle]

[20]       Le 22 mai 2020, Mme Côté transmet une lettre à la Commission pour contester la réprimande et la coupure de traitement.

Coupure de traitement

[21]       Le ministère prétend que le recours visant la coupure de traitement serait prescrit. Pour sa part, Mme Côté estime qu’il n’a pas été déposé hors délai puisqu’elle devait attendre la tenue de la rencontre d’équité procédurale et la décision du ministère de lui imposer ou non une mesure disciplinaire pour savoir si l’employeur considérait toujours comme non autorisée son absence du 8 au 10 janvier 2020.

[22]       L’article 32 de la Directive concernant l’ensemble des conditions de travail des cadres œuvrant en établissement de détention à titre d’agents de la paix à l’exclusion des directeurs des établissements de détention[2] (Directive) prévoit que « le cadre qui se présente en retard ou s’absente se voit appliquer une coupure de traitement, pour un montant équivalant à la durée du retard ou de l’absence ».

[23]       Mme Côté peut contester la coupure de traitement imposée en vertu de l’article 127 de la Loi. Cette disposition énonce que le gouvernement prévoit par règlement les matières qui peuvent faire l’objet d’un recours à la Commission par un fonctionnaire non syndiqué et les règles de procédure applicables.

[24]       L’article 2 du Règlement sur un recours en appel pour les fonctionnaires non régis par une convention collective[3] (Règlement) mentionne qu’un fonctionnaire peut contester une décision prise en vertu de la Directive.

[25]       L’article 3 du Règlement prévoit que le délai pour déposer un appel en vertu de l’article 127 de la Loi est de 30 jours.

[26]       Mme Côté est avisée par courriel le 18 février 2020 de la coupure de traitement. En effet, l’article 31 de la Loi concernant le cadre juridique des technologies de l’information[4] énonce :

31. Un document technologique est présumé transmis, envoyé ou expédié lorsque le geste qui marque le début de son parcours vers l’adresse active du destinataire est accompli par l’expéditeur ou sur son ordre et que ce parcours ne peut être contremandé ou, s’il peut l’être, n’a pas été contremandé par lui ou sur son ordre.

Le document technologique est présumé reçu ou remis lorsqu’il devient accessible à l’adresse que le destinataire indique à quelqu’un être l’emplacement où il accepte de recevoir de lui un document ou celle qu’il représente publiquement être un emplacement où il accepte de recevoir les documents qui lui sont destinés, dans la mesure où cette adresse est active au moment de l’envoi. Le document reçu est présumé intelligible, à moins d’un avis contraire envoyé à l’expéditeur dès l’ouverture du document. […]

[27]       L’avis est donc présumé avoir été transmis par l’employée du ministère et reçu par Mme Côté le 18 février 2020. La preuve ne permet pas de repousser cette présomption.

[28]       Dans la décision Bertrand[5], la Commission mentionne :

[35]     La Commission traite d’abord du point de départ du calcul du délai de 30 jours de Mme Bertrand pour introduire son appel devant la Commission. Selon le libellé de l’article 3 du Règlement qui fixe ce délai, celui-ci débute avec l’événement qui donne ouverture au recours.

[36]     Pour Mme Bertrand, l’événement se situerait au 8 mars 2012, moment où elle reçoit des informations supplémentaires au sujet de la décision qui lui avait été communiquée dans la note précédente du 6 février 2012. Elle soutient que l’événement ne doit pas nécessairement correspondre à la décision, mais plutôt au moment où elle a suffisamment d’informations sur les raisons qui motivent la décision du MSP.

[37]     Bien que l’article 3 du Règlement utilise l’expression événement qui donne ouverture à un recours, l’article 2 de ce même Règlement qui accorde ce droit de recours indique qu’un fonctionnaire qui se croit lésé peut en appeler d’une décision rendue à son égard. Selon toute vraisemblance, l’événement réfère généralement à la décision prise à l’endroit du fonctionnaire.

[38]     Pour la Commission, il est manifeste que dès que Mme Bertrand prend connaissance de la note datée du 6 février 2012, soit au plus tard le 13 février 2012, selon la preuve administrée, elle est informée de la décision. La note subséquente du 8 mars 2012 ne lui apporte que quelques renseignements supplémentaires sur les codes d’absence inscrits à son dossier qui ne sont pas compilés dans le calcul de ses absences pour déterminer les deux journées de congé pour la prime d’ambiance. Selon l’auteur Pierre Martineau[[6]], cité récemment par la Cour d’appel[[7]], le point de départ de la prescription est le premier jour où le titulaire du droit aurait pu agir, le jour où il aurait pu pour la première fois prendre des mesures pour faire valoir son droit. Dans la situation de Mme Bertrand, rien ne l’empêchait, à partir du moment où elle a pris connaissance de la note du 6 février 2012, d’introduire son appel devant la Commission.

[29]       En appliquant les principes énoncés dans cette décision au présent cas, la Commission est d’avis que le point de départ du délai de prescription est la date de la transmission et de la réception du courriel qui avise Mme Côté de la coupure de traitement, soit le 18 février 2020.

[30]       À partir de cet avis, Mme Côté pouvait contester cette mesure administrative auprès de la Commission bien que la rencontre d’équité procédurale en matière disciplinaire n’ait pas encore eu lieu. Elle a d’ailleurs informé son procureur le 19 février 2020 de la décision de l’employeur de lui imposer une coupure de traitement.

[31]       Le délai de 30 jours à partir du 18 février 2020 pour déposer un recours se termine le 19 mars 2020. L’appel de Mme Côté visant la coupure de traitement est donc prescrit puisqu’il a été soumis le 22 mai 2020.

[32]       Il est à noter que le décret[8], dans le contexte de l’urgence sanitaire visant à lutter contre la pandémie de COVID-19, suspendant les délais pour déposer un recours à la Commission a été adopté par le gouvernement le 20 mars 2020. Cette suspension, qui a pris fin le 10 juin 2020[9], ne s’applique donc pas à un délai pour soumettre un appel se terminant le 19 mars 2020.

[33]       En outre, il n’y a aucune preuve que Mme Côté a été dans l’impossibilité d’agir entre le 18 février 2020 et le dépôt de son appel. La Commission ne peut donc pas prolonger le délai en vertu de l’article 120 de la Loi.

[34]       Elle rejette donc l’appel contestant la coupure de traitement puisqu’il est prescrit.

[35]       Par ailleurs, la Commission souligne que, de toute manière, la coupure de traitement est une mesure administrative qui peut être imposée en plus d’une mesure disciplinaire si l’absence du travail d’un fonctionnaire n’est pas autorisée. En effet, l’article 21 de la Loi prévoit :

21. Sans préjudice de toute mesure disciplinaire, si un fonctionnaire s’absente du service sans permission, il doit être déduit de sa rémunération une somme proportionnelle à la durée de son absence.

[36]       Comme la Commission l’expliquera dans son analyse de la réprimande, le ministère était bien fondé de refuser la demande d’autorisation d’absence de Mme Côté pour les 8, 9 et 10 janvier 2020. Il pouvait donc couper son traitement pour ces dates.

[37]       En conséquence, même s’il n’avait pas été prescrit, la Commission aurait rejeté le recours de Mme Côté contestant la coupure de traitement.

Réprimande

Faits reprochés et faute

[38]       Il revient à l’employeur de démontrer que Mme Côté a commis les faits reprochés, que ces derniers constituent une faute et que la sanction imposée est proportionnelle à ce manquement.

[39]       Le ministère reproche à Mme Côté de ne pas avoir transmis de certificat médical pour justifier son absence du 8 au 10 janvier 2020, en contravention de l’obligation qui lui a été imposée le 10 juillet 2019.

[40]       La Commission est d’accord avec la position du ministère. Il pouvait donc refuser la demande d’autorisation d’absence de Mme Côté comme le prévoit la lettre du 10 juillet 2019. En effet, elle n’a pas fourni de certificat médical. Elle n’a d’abord soumis aucun document avant de transmettre, le 7 février 2020, une facture d’une clinique de physiothérapie.

[41]       Ce dernier document ne peut pas constituer un certificat médical justifiant une absence de trois jours pour plusieurs raisons. D’abord, il ne provient pas d’un médecin. Ensuite, il mentionne seulement que Mme Côté a payé un massage thérapeutique, ce qui n’explique pas qu’elle était malade ou incapable de travailler. Finalement, cette facture est datée de la première journée d’absence, le 8 janvier 2020, et peut donc difficilement être utilisée pour expliquer une absence les 9 et 10 janvier 2020.

[42]       Mme Côté mentionne qu’une facture de la même clinique a été acceptée à une occasion pour justifier une absence. Toutefois, il s’agissait d’une seule journée d’absence et la description des services reçus était plus longue et avait été caviardée par Mme Côté. De plus, ce document avait été fourni avec la demande d’autorisation d’absence.

[43]       Ce n’est donc pas équivalent à une facture pour un massage thérapeutique fournie pour justifier une absence de trois jours. Cette facture a de surcroît été transmise uniquement après la convocation de Mme Côté à une rencontre d’équité procédurale, soit plusieurs jours après la demande d’autorisation d’absence.

[44]       Par ailleurs, Mme Côté prétend que l’obligation imposée par la lettre du 10 juillet 2019 est déraisonnable et abusive.

[45]       Dans cette lettre, le ministère indique avoir pris sa décision en vertu de l’article 115 de la Directive qui prévoit que l’employeur peut exiger un certificat médical si le cadre s’absente du travail.

[46]       Comme expliqué dans l’analyse de la coupure de traitement, l’article 2 du Règlement énonce qu’une décision prise en vertu de la Directive peut être contestée par un appel à la Commission prévu à l’article 127 de la Loi. L’article 3 du Règlement mentionne que le délai pour déposer ce recours est de 30 jours. La Commission estime donc que Mme Côté ne peut pas contester l’avis du 10 juillet 2019 en soumettant un appel le 22 mai 2020.

[47]       En plus de ne pas avoir déposé un recours visant cet avis dans les 30 jours suivant le 10 juillet 2019, la Commission souligne que Mme Côté ne l’a pas contesté lors de ses premières absences pour cause de maladie et qu’elle s’y est conformée pendant des mois.

[48]       Mme Côté a donc enfreint une exigence imposée par son employeur, qui doit être considérée comme raisonnable et valide. Ce comportement constitue une faute. En effet, en ne respectant pas cette obligation, elle contrevient à son devoir d’obéissance hiérarchique.

[49]       D’ailleurs, le ministère avise Mme Côté, dans la lettre du 10 juillet 2019, que le non-respect de cette exigence pouvait entraîner des mesures administratives ou disciplinaires.

Proportionnalité de la sanction

[50]       L’article 16 de la Loi mentionne la possibilité de sanctionner un fonctionnaire qui a commis une faute, soit une contravention aux normes d’éthique et de discipline :

16. Le fonctionnaire qui contrevient aux normes d’éthique et de discipline est passible d’une mesure disciplinaire pouvant aller jusqu’au congédiement selon la nature et la gravité de la faute.

[51]       L’article 126 de la Loi énonce :

126. Le gouvernement peut, par règlement, sur avis du Conseil du trésor : […]

2o définir les mesures disciplinaires applicables à un fonctionnaire et en déterminer les modalités d’application; […]

[52]       L’article 18 du Règlement sur l’éthique et la discipline dans la fonction publique[10] définit les mesures disciplinaires applicables à un fonctionnaire :

18. Une mesure disciplinaire peut consister en une réprimande, une suspension ou un congédiement selon la nature et la gravité de la faute qu’elle vise à réprimer.

[53]       En bref, lorsqu’un fonctionnaire commet une faute, l’employeur a la possibilité de le sanctionner. Comme la réprimande constitue la mesure disciplinaire la moins sévère qui peut être imposée par un employeur dans la fonction publique, la Commission juge qu’elle ne peut intervenir pour modifier ou annuler cette sanction.

[54]       À cet égard, dans la décision Bellavance[11] concernant un chef d’unité d’un établissement de détention du ministère qui conteste une réprimande, la Commission statue :

[65]     Aussi, dès lors qu’une faute est prouvée, l’opportunité de la sanctionner ou non appartient à l’employeur. La Commission peut apprécier la proportionnalité de la sanction au regard de la faute et la réduire, le cas échéant. Toutefois, la Commission ne peut l’annuler. C’est d’ailleurs également la conclusion de la Commission dans la décision Barnabé[[12]].

[…]

[70]     En l’espèce, le MSP a sanctionné M. Bellavance en recourant à la moindre des trois mesures disciplinaires à sa disposition, c’est-à-dire la réprimande, et ce, en respectant notamment le principe de la gradation des sanctions. La Commission ne peut donc pas réduire la sanction imposée.

[55]       Dans la décision Leclerc[13] portant également sur une réprimande, la Commission réitère ce principe :

[42]     Le CSPQ pouvait donc sanctionner Mme Leclerc puisque celle-ci a commis une faute. En effet, en présence d’une faute commise par un de ses employés, un employeur a le droit d’imposer une mesure disciplinaire. C’est d’ailleurs le sens de l’article 16 de la Loi.

[43]     En ce qui a trait à la proportionnalité d’une sanction, la Commission a le pouvoir de réduire une mesure disciplinaire si elle est trop sévère par rapport à la gravité de la faute, en vertu de l’article 34 de la Loi.

[44]     Cependant, dans le cas présent, la Commission ne peut pas se prononcer à cet égard puisque la réprimande est la mesure disciplinaire la moins sévère applicable à un fonctionnaire, selon l’article 18 du Règlement sur l’éthique et la discipline dans la fonction publique. La Commission ne peut donc pas la remplacer par une sanction moindre.

[45]     À cet égard, la Commission a déjà décidé[[14]] :

[249]         À compter du moment qu’une faute est prouvée, l’opportunité de la punir ou pas appartient à l’employeur. Un tribunal peut apprécier si la punition est exagérée et la réduire le cas échéant. Mais il ne peut l’annuler si la faute a été prouvée. Dans ce dossier, le DPCP a sanctionné Me Barnabé avec la moins lourde des trois mesures disciplinaires à sa disposition [la réprimande]. La Commission ne peut réduire cette punition et en conséquence elle ne peut que rejeter l’avis de mésentente de l’Association.

[46]     En somme, comme la preuve démontre de manière probante que les gestes reprochés se sont produits et qu’ils constituent de l’insubordination, le CSPQ pouvait imposer une réprimande à Mme Leclerc. Par conséquent, la Commission ne peut pas annuler cette mesure disciplinaire ni la remplacer par une autre puisqu’il s’agit de la sanction la moins sévère applicable à un fonctionnaire.

[56]       La Commission rejette donc l’appel de Mme Côté contestant la réprimande.

POUR CES MOTIFS, LA COMMISSION DE LA FONCTION PUBLIQUE :

REJETTE les appels de Mme Sylvie Côté.

 

 

 

 

Original signé par :

 

__________________________________

Mathieu Breton

 

 

 

Me Martin Morin

Procureur de Mme Sylvie Côté

Partie demanderesse

 

Me Jean-François Dolbec

Procureur du ministère de la Sécurité publique

Partie défenderesse

 

Audience tenue par visioconférence

 

 

Dates de l’audience : 3 mars et 28 mai 2021

 



[1]    RLRQ, c. F-3.1.1.

[2]     C.T. 170451 du 11 avril 1989 et ses modifications (R.P.G. 7 1 3 5).

[3]     RLRQ, c. F-3.1.1, r. 5.

[4]     RLRQ, c. C-1.1.

[5]     Bertrand et Ministère de la Sécurité publique, 2013 QCCFP 14.

[6]     Pierre Martineau, La prescription, Montréal, P.U.L., 1977, p. 251.

[7]     Commission administrative des régimes de retraite et d’assurances (CARRA) c. Denis Turbide et al.2010 QCCA 2367.

[8]     Décret 222-2020 concernant le renouvellement de l’état d’urgence sanitaire conformément à l’article 119 de la Loi sur la santé publique et certaines mesures pour protéger la santé de la population, (2020) 152 G.O.Q. II, 1139A.

[9]     Décret 615-2020 concernant l’ordonnance de mesures visant à protéger la santé de la population dans la situation de pandémie de la COVID-19, (2020) 152 G.O.Q. II, 2546A.

[10]    RLRQ, c. F-3.1.1, r. 3.

[11]    Bellavance et Ministère de la Sécurité publique, 2015 QCCFP 12, par. 65 et 70.

[12]    Association des procureurs aux poursuites criminelles et pénales (Donald Barnabé) et Directeur des poursuites criminelles et pénales, 2015 QCCFP 1, par. 249.

[13]    Leclerc et Centre de services partagés du Québec, 2017 QCCFP 30, par. 42 à 46.

[14]    Préc., note 12.

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