[1] LA COUR; - Statuant sur l'appel d'un jugement rendu le 5 octobre 2000 par la Cour supérieure, district de Montréal (l'honorable Victor Melançon), qui a rejeté l'action oblique des appelants;
[2] Après avoir étudié le dossier, entendu les parties et délibéré;
[3] Pour les motifs du juge Forget, auxquels souscrivent les juges Mailhot et Rochon:
[4] ACCUEILLE le pourvoi;
[5] INFIRME le jugement de première instance;
[6] ACCUEILLE l'action;
[7] ORDONNE au Fonds d'assurance responsabilité professionnelle du Barreau du Québec d'indemniser Domenico Di Capua et Silvana Lamberti de la condamnation qui a été rendue contre Girouard le 10 janvier 1992, pour le montant de 92 155,64$, avec intérêt, indemnité additionnelle et frais à compter du 11 mars 1990;
[8] LE TOUT avec dépens tant en première instance qu'en appel.
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MOTIFS DU JUGE FORGET |
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[9] Domenico Di Capua et Silvana Lamberti ont subi un dommage de 92 155,64$ à la suite d'une faute professionnelle d'un ex-avocat, Pierre N. Girouard.
[10] Impayés par Girouard,[1] Di Capua et Lamberti ont intenté une action oblique contre son assureur, Le Fonds d'assurance responsabilité professionnelle du Barreau du Québec, (le Fonds).
[11] En première instance, le Fonds a invoqué cinq motifs pour refuser de prendre fait et cause pour Girouard et d'indemniser Di Capua et Lamberti :
· un avis tardif;
· une reconnaissance de responsabilité;
· une faute intentionnelle;
· une déclaration incomplète;
· un manque de collaboration.
[12] Le premier juge a rejeté les quatre premiers motifs, mais a retenu le cinquième.
[13] Di Capua et Lamberti se pourvoient.
[14] Le Fonds a abandonné le motif fondé sur la faute intentionnelle, mais invoque toujours les trois autres motifs qui devraient, selon son avocat, faire l'objet d'un examen si la Cour donne raison aux appelants quant au motif fondé sur le manque de collaboration. Selon l'avocate de Di Capua et Lamberti, le Fonds est forclos d'invoquer ces autres motifs.
REMARQUE PRÉLIMINAIRE
[15] Les faits qui ont donné lieu au litige sont survenus entre 1986 et 1990; il faut donc s'en remettre aux dispositions du Code civil du Bas-Canada.
LA FAUTE PROFESSIONNELLE ET LE DOMMAGE
[16] En 1986, Di Capua et Lamberti consultent Girouard à l'occasion de l'achat d'une maison. Le vendeur, l'entrepreneur en construction Joseph Borsellino Ltée (Borsellino), n'était pas en mesure de fournir aux acheteurs un titre clair de propriété. Girouard leur conseille de ne payer ni le solde du prix de vente ni les intérêts s'y rattachant.
[17] Le 22 juin 1988, Borsellino fait corriger le titre.
[18] Le 20 juillet 1988, Di Capua et Lamberti, toujours sur les conseils de Girouard, refusent néanmoins de payer les sommes dues.
[19] Le 30 septembre 1988, Borsellino fait enregistrer et signifier un préavis de 60 jours et, le 4 janvier 1989, il intente un recours en résolution de la vente au motif de non-paiement du solde. Girouard comparait au dossier au nom de Di Capua et Lamberti.
[20] Girouard ne dépose pas de défense en temps utile et est absent lors de la présentation de sa requête pour être relevé du défaut, le 10 mars 1989.
[21] La requête est toutefois remise au 23 mars 1989 alors qu'elle est accueillie aux conditions suivantes :
(1) défense à être signifiée dans les 15 jours;
(2) tenir compte de l'allégation 4 de la requête, à savoir : "la défense qu'ils entendent déposer au dossier de la Cour contiendra des offres de consignation ayant trait à une partie de la demande de la demanderesse".
[22] Girouard omet toutefois de déposer et de consigner les sommes dues, malgré les allégations en ce sens de la défense et la conclusion subsidiaire suivante :
PRENDRE acte de l'offre contenu aux présentes des défendeurs de payer le solde de 85 000$ sujet aux termes et conditions du jugement à intervenir aux présentes, sauf au cas de contestation, et dans tel cas avec frais contre la demanderesse.
[23] Vu ce défaut, Borsellino présente une requête en rejet de plaidoyer qui est accueillie le 8 mai 1989.
[24] Borsellino procède alors à obtenir un jugement ex parte et fait signifier, le 19 juillet 1989, à Di Capua et Lamberti un avis de délaissement de l'immeuble.
[25] Le 3 août 1989, Girouard prépare une requête en rétractation de jugement dans laquelle il allègue, au chapitre du rescindant, ce qui suit :
3. Le défendeur n'a jamais eu connaissance que la demanderesse avait inscrit contre lui par défaut de plaider à la suite d'une requête pour rejet de défense qui avait été logée contre elle;
4. Plus particulièrement, le protonotaire, dans la présente cause, avait requis que le demandeur refasse signifier un avis d'inscription par défaut pour les fins des présentes, formalité jugée essentielle pour les fins des présentes, lequel avis n'a jamais été signifié aux procureurs des défendeurs, lequel a toute fins pratiques était à l'extérieur du pays au moment ou tel avis a été prétendument signifié à son bureau, alors qu'aucune personne en charge de son bureau n'était alors la;
5. De plus, les défendeurs, n'ont jamais reçu avis de leur procureur que leur défense initiale avait été rejetée par voie de jugement rendu par cette Honorable Cour ne leur permettant pas, alors, de prendre les dispositions nécessaire afin d'assurer leur pleine et entière défense, d'autant plus qu'ils ont toujours renouvellé auprès de leur institution financière tout et chacun des instrument leur permettant de payer éventeuellement la demanderesse lorsque que la cour aura stautuer sur les obligations des parties aux présentes. (sic)
[26] Le 5 septembre 1989, Girouard prépare une requête pour cesser d'occuper au motif qu'il sera appelé à témoigner dans le cadre de la requête en rétractation de jugement. Cette requête est accueillie selon ses conclusions le 7 septembre 1989.
[27] La requête en rétractation de jugement est finalement rejetée, le 2 novembre 1989.
[28] Di Capua et Lamberti réussissent toutefois à convaincre Borsellino de se désister du jugement rendu en lui offrant de payer 195 000$. Les acheteurs subissent alors une perte de 92 155,64$.
RELATIONS GIROUARD ET LE FONDS
[29] Le 20 décembre 1989, les nouveaux avocats de Di Capua et Lamberti font parvenir une mise en demeure à Girouard le tenant responsable des dommages subis qu'ils évaluent alors à 95 000$.
[30] Dès le lendemain, le 21 décembre 1989, Girouard répond à ces avocats pour nier responsabilité et, le même jour, il en transmet copie au Fonds tout en faisant part de sa disponibilité :
…
Il s'agit de la première mention de quelque responsabilité que ce soit que nous pourrions avoir en regard de ladite affaire, dossier dans lequel nous avons cessé d'occuper au mois d'août ou septembre dernier.
Nous nous tenons disponibles pour tout complément d'information.
…
[31] Le 3 janvier 1990, Me O'Donnell, du bureau Lavery, O'Brien, à qui le Fonds a confié le dossier, écrit à Girouard pour fixer une rencontre. Le 10 janvier 1990, dans une lettre à Me O'Donnell, Girouard réitère sa disponibilité.
…
Nous vous remercions pour la vôtre du 3 janvier 1990. Le 5 janvier dernier, nous avons tenter de vous rejoindre, sans succès, et nous nous tenons disponibles afin de pouvoir vous rencontrer dans les meilleurs délais.
A tout événement, veuillez noter que depuis la réception de la mise-en-demeure que nous avons transmise au Fonds d'assurance responsabilité professionnelle du Barreau du Québec et dont vous avez reçu copie, nous n'avons rien d'autre à apporter de la part de la partie adverse.
…
[32] Le dossier est par la suite confié par Me O'Donnell à Me Daniel Alain Dagenais de la même étude.
[33] Me Dagenais témoigne qu'il n'a pas tenté d'entrer en contact avec Girouard avant le 12 mars 1990.
[34] Les 12 et 20 mars 1990, Me Dagenais laisse des messages au bureau de Girouard de bien vouloir le rappeler.
[35] Le 22 mars 1990, Me Dagenais transmet par télécopieur une lettre à Girouard lui faisant part qu'il désire discuter avec lui. Le même jour, Girouard le rappelle. Me Dagenais verse au dossier une copie des notes qu'il a prises lors de cette conversation téléphonique.
[36] À cette occasion, Girouard fait part à Me Dagenais qu'il sera absent du pays jusqu'au 12 avril 1990.
[37] Le lendemain, Me Dagenais confirme à Girouard la teneur de leur conversation téléphonique :
…
Faisant suite à notre conversation téléphonique du 22 mars dernier, je comprends que vous communiquerez avec moi aussitôt que possible après votre retour le 12 avril prochain pour que nous puissions fixer la date d'une rencontre qui nous permettra de revoir ensemble ce dossier.
Je tiens cependant à ce que vous fassiez le nécessaire pour vous assurer que tout développement pouvant survenir dans cette affaire avant notre rencontre nous soit immédiatement communiqué et ceci, même pendant votre absence.
Je vous rappelle que cette lettre vous est transmise sans préjudice aucun aux droits du Fonds d'assurance responsabilité du Barreau du Québec et ne saurait constituer en rien une acceptation par le Fonds de couvrir quelque réclamation que ce soit.
…
[38] Lors de son témoignage, Me Dagenais déclare qu'il n'y avait aucune urgence à ce moment :
Q. Si je comprends bien, maître Dagenais, entre le vingt et un (21) décembre ou le vingt-deux (22) décembre mil neuf cent quatre-vingt-neuf (1989), la date à laquelle madame Desrosiers nous dit avoir reçu la pièce D-10, et le début, mi-mars mil neuf cent quatre-vingt-dix (1990), personne, soit du Fonds ou de votre cabinet, a tenté de rejoindre maître Girouard, sauf la lettre de maître O'Donnell, qui est produite sous la cote D-12A ?
R. C'est ça, le trois (3) … trois (3) janvier, nous avons écrit à maître Girouard.
Q. C'est la seule communication ou tentative de communication qui est faite, soit par le Fonds, soit par votre cabinet ?
R. Par mon cabinet, en tout cas, entre le trois (3) janvier et le douze (12) mars, maître Girouard ayant répondu à cette lettre du trois (3) janvier en date du dix (10) janvier.
Q. C'est ça. Pourquoi est-ce que vous avez attendu deux (2) mois avant de tenter de communiquer avec maître Girouard ?
R. Il ne semblait pas y avoir de… d'urgence, à ce moment-là, à agir, d'abord, parce que maître Girouard avait déjà répondu à la mise en demeure niant sa responsabilité. Ensuite, parce que le dommage, si je peux dire, que ses clients étaient susceptibles de subir avait déjà été subi, dans le cadre du règlement fait par eux; je crois que c'est en décembre quatre-vingt-neuf ('89)… au début de décembre quatre-vingt-neuf ('89), avec les gens qui les poursuivaient.
Deuxièmement, moi j'ai obtenu, du dossier de la Cour, les procédures de ce dossier-là… du dossier dans lequel ces gens-là étaient défendeurs… vos clients étaient défendeurs.
Q. Du dossier Borsalino c. Di Capua et Lamberti ?
R. Oui, je pense que c'est les noms.
Q. C'est ça.
R. Et ensuite, il ne recevait… il ne se passait rien dans le dossier, c'est-à-dire que votre cabinet, qui agissait pour monsieur Di Capua et madame Lamberti, ne communiquait pas avec maître Girouard. Alors, bon, on avait le temps de voir venir et je présume qu'on s'occupait d'autres choses.
[39] Le 4 avril 1990, les avocats de Di Capua et Lamberti font parvenir une nouvelle mise en demeure à Girouard détaillant leur réclamation.
[40] Dès le 11 avril 1990, Girouard transmet cette mise en demeure à Me Dagenais, réitérant sa disponibilité:
…
Veuillez trouver sous pli copie de l'original de la mise en demeure qui nous fut signifiée en main propre par huissier le 10 avril courant, à un retour d'un voyage d'affaires.
Veuillez, d'autre part, trouver copie de la lettre que nous adressions aux procureurs de monsieur Dominico Di Capua en relation avec cette même lettre.
Nous nous tenons entièrement à votre disposition pour plus amplement discuter des présentes.
…
[41] Le même jour, Girouard écrit aux avocats de Di Capua et Lamberti pour nier sa responsabilité.
[42] Le 12 avril 1990, Me Dagenais transmet par télécopieur une lettre à Girouard afin de fixer un rendez-vous pour le 18 avril 1990.
[43] Le matin du 18 avril, Girouard laisse un message à Me Dagenais l'avisant qu'il ne pourra se présenter. La téléphoniste de Me Dagenais a coché la case «s.v.p. rappeler».
[44] Le 30 avril 1990, Me Dagenais écrit de nouveau à Girouard pour lui faire part qu'il doit le rencontrer le plus tôt possible.
[45] Le 17 mai 1990, Girouard transmet à Me Dagenais copie d'un bref qui lui avait été signifié et réitère son désir de collaborer :
…
Veuillez trouver sou pli copie d'un Bref d'assignation ainsi que la déclaration qui nous a été signifiés dans l'affaire ci-haut mentionnée.
A raison du fait que nous n'avons pas pu vous rencontrer jusqu'à ce jour, nous apprécierions savoir si vous entendez comparaître, sous réserve de prendre les décisions dans la présente affaire ou si nous devons le faire temporairement jusqu'à ce que vous ayiez vous-même pris position pour votre cliente.
Quant à cette même procédure, nous sommes à préparer un bref mémorandum revoyant tous les faits afin de permettre une rencontre. Pour les fins de cette même rencontre, nous nous tenons à votre disposition.
…
[46] Dans une lettre non datée (elle est du 18 mai 1990), Me Dagenais fait déjà part à Girouard que le Barreau refuse d'assumer sa défense vu «son refus de collaboration» :
…
J'ai bien reçu votre lettre du 17 mai me transmettant copie du bref d'assignation qui a été émis contre vous.
Malgré mes demandes répétées, vous avez jusqu'ici négligé de me rencontrer pour faire une revision complète des faits du dossier, y compris ceux relatifs à l'assurance responsabilité professionnelle du Barreau du Québec.
Conséquemment, devant ce refus de collaboration contraire aux termes de votre police d'assurance responsabilité, le Fonds d'assurance responsabilité professionnelle du Barreau du Québec refuse, dans l'état actuel du dossier, d'assumer votre défense. Il est donc hors de question que nous comparaissions pour vous.
Vous devrez donc comparaître vous-même ou confier mandat à un autre avocat de le faire pour vous.
…
[47] Dès le 22 mai 1990, Girouard répond à la lettre de Dagenais et s'explique :
Nous recevons la vôtre non datée mais envoyée par télécopieur en date du 18 mai 1990.
Veuillez noter que c'est non pas suite à la négligence de vous rencontrer mais plutôt suite à l'impossibilité de le faire dans les dernières semaines que nous n'avons pu revoir le dossier, en personne, avec vous. D'une part, il est à souligner qu'aucune procédure n'existait par le passé dans la présente affaire et que seules des mises-en-demeure adressées à deux reprises nous avaient été transmises. Aucun geste préjudiciaire n'a été posé par le soussigné dans le cadre de ce dossier.
Nous vous avons transmis la déclaration dans la présente affaire. Nous préférons, à cette date, considérer votre lettre comme étant une mise en garde plutôt qu'une position définitive dans la présente affaire. Pour les fins de préserver nos droits, nous verrons à comparaître ce même jour dans ledit dossier. Telle comparution ne devra être en aucun cas interprétée comme étant une admission ou renonciation de notre part à votre lettre non datée mais qui nous est parvenue, à nos bureaux, le 18 mai et dont nous prenons connaissance ce matin.
D'autre part, à raison de ce que certains moyens préliminaires devraient peut-être être exercés dans la présente affaire, nous vous prions de revoir votre position le ou vers le 24 mai 1990, avant 12h00, à défaut de quoi, nous devrons poser, sans préjudice à nos droits et recours contre le Fonds d'assurance responsabilité professionnelle du Barreau du Québec, les gestes qui nous apparaîtrons nécessaires dans la présente affaire. Veuillez être assuré que, sans égard au passé, nous nous tenons disponible pour revoir le tout avec vous.
Enfin, à nouveau, nonobstant la vôtre non datée, nous complèterons un exposé des faits suite à la demande logée contre nous.
…
[48] L'offre de collaboration de Girouard est accueillie assez froidement ainsi qu'on peut le constater à la lettre de Me Dagenais du 22 mai :
…
J'ai bien reçu votre lettre du 22 mai et je constate que vous avez l'intention de comparaître personnellement dans ce dossier où vous êtes défendeur.
Puisqu'il a été impossible pour vous de me rencontrer à aucun moment depuis au moins deux mois, je vous laisse le soin de communiquer avec mon bureau pour fixer une date à cette rencontre que je sollicite depuis longtemps.
D'ici là, veuillez poser "les gestes qui vous apparaîtront nécessaires dans la présente affaire", y compris les moyens préliminaires auxquels vous faites référence dans votre lettre du 22.
Ni la présente lettre, ni la rencontre que nous devrions avoir, ne sauraient être interprétées comme préjudiciant d'aucune façon aux droits du Fonds d'assurances responsabilité du Barreau du Québec.
…
[49] Le 29 mai 1990, Girouard rencontre Me Dagenais durant environ deux à trois heures.
[50] Me Dagenais dépose au dossier une copie des notes qu'il a prises au cours de cette rencontre. Les discussions portent en grande partie sur les raisons qui ont empêché Girouard de communiquer plus tôt avec lui. Girouard convient alors de lui transmettre une copie de son dossier.
[51] Par une lettre du 12 juin 1990, Me Dagenais mentionne à Girouard qu'il a maintenant appris qu'il est inhabile à exercer la profession d'avocat et qu'il n'a pas encore transmis son dossier :
…
J'apprends du Barreau que vous êtes depuis le 1er avril 1990 en état d'inhabileté à exercer la profession d'avocat puisque vos cotisations au Barreau sont impayées et ce, pour la quatrième fois depuis le 1er avril 1988.
La comparution que vous avez déposée au dossier 500-05-006036-907, en mai, est donc personnelle.
Par ailleurs, notre rencontre date du 29 mai et, malgré votre engagement ferme, vous n'y avez toujours pas donné suite.
…
[52] Le même jour Girouard transmet par télécopieur à Me Dagenais la lettre suivante:
…
Veuillez trouver ci-après copie de notre dossier ainsi que de nos notes eu égard à nos discussions passés.
…
[53] Malgré les termes de cette lettre, le dossier n'est pas inclus. Me Dagenais ne communique pas avec Girouard pour vérifier s'il s'agit d'une erreur. Il attend le 10 juillet 1990 pour lui annoncer la décision définitive du Fonds :
La lettre que vous m'avez transmise par télécopieur le 12 juin dernier constituait une lettre de couverture m'annonçant la transmission de documents qui ne me sont jamais parvenus ni par télécopieur, ni, comme vous l'annonciez, par messager.
Vous n'avez donc toujours pas donné suite à notre rencontre du 29 mai dernier.
Par ailleurs, nous avons appris que l'action de Dominico Di Capua et Sylvana Lamberti contre vous avait été inscrite ex-parte d'abord le 15 juin et ensuite le 22 juin. Vous n'avez ni donné suite à ces inscriptions ex-parte ni avisé le Fonds d'assurance responsabilité professionnelle du Barreau du Québec.
Cette attitude, et votre comportement dans son ensemble, ne peuvent amener le Fonds qu'à confirmer, ce qu'il fait par la présente, sa négation de couverture. Vous ne disposez donc d'aucune couverture d'assurance émise par le Fonds d'assurance responsabilité professionnelle du Barreau du Québec à l'égard de la réclamation logée contre vous par Dominico Di Capua et Sylvana Lamberti.
…
[54] Le même jour, Me Dagenais avise les avocats de Di Capua et Lamberti.
JUGEMENT SUR L'ABSENCE DE COLLABORATION
[55] Tel que déjà mentionné, le premier juge a retenu ce motif de non-collaboration. Je reproduis intégralement le texte de son jugement sur ce sujet :
Reste enfin le motif de non-collaboration du mis en cause, tel qu'il y est obligé et que l'assureur a explicitement invoqué pour nier couverture dans le présent cas.
Le dossier démontre que si le mis en cause a dès réception transmis la lettre de réclamation qu'il a reçue, il n'a pas répondu aux demandes des procureurs d'alors de la défense. Quelques jours après mandat reçu, ces derniers communiquaient avec le mis en cause. Le Tribunal veut bien accepter qu'il aurait réagi immédiatement sans succès de «contacts téléphoniques». Mais il n'a rien fait ensuite. Un certain délai s'est écoulé. Relancé par les procureurs de la défense d'alors, le mis en cause finit par communiquer pour visiblement «étirer» les délais par la suite. Plusieurs fois il remet des rencontres fixées et ce à la dernière minute. Il est vrai qu'il réagit à la deuxième mise en demeure qu'il transmet aussitôt. De même, il réagit sur signification de l'action qu'il transmet aussitôt. Il échange alors de la correspondance avec les procureurs du Fonds d'assurance. Cette correspondance mène à leur refus de comparaître compte tenu des circonstances. Le mis en cause n'a encore pas eu de rencontre avec eux, et les circonstances démontrent, même si par ses procureurs le Fonds a fait preuve d'une forte dose de patience, chez le mis en cause une attitude contraire à ses obligations d'assuré. Une seule rencontre eut lieu le 29 mai 1990. Elle s'ajoute à une conversation téléphonique assez longue tenue auparavant. Le mis en cause n'avait aucun document ni dossier lors de sa rencontre. Il promet de les transmettre. Deux semaines plus tard, il n'a encore rien fait, sauf de les annoncer par lettre mais sans les faire parvenir. Malgré d'autres demandes postérieures, rien ne survient et tout ceci mène à la lettre des procureurs d'alors du Fonds d'assurance niant couverture le 10 juillet 1990.
Le procureur des demandeurs conteste la portée de ces faits qui démontrerait d'une part une certaine lenteur et acceptation de facto de l'attitude du mis en cause par les procureurs d'alors de la défense et d'autre part diverses circonstances expliquant les délais survenus fin mars et au cours du mois d'avril. Le procureur plaide aussi que les démarches de ces procureurs du Fonds ont permis à l'assureur d'avoir les informations requises quant au premier dossier à la source du présent litige. Il en tire la conclusion enfin, qu'il appuie sur l'opinion du professeur Bergeron dans son ouvrage, qu'en l'absence de préjudice démontré l'assureur ne saurait invoquer ce motif pour nier couverture car ce qu'exige l'article 2573 du Code civil du Bas-Canada, c'est que l'assureur puisse apprécier le sinistre et la défense le pouvait, ayant en plus les informations reçues et notées lors d'une assez longue conversation téléphonique en mars 1990. Il signale enfin que la jurisprudence citée à ce sujet de la non-collaboration expose des cas où les assurés n'avaient soit rien fait ou pratiquement à l'endroit de leur assureur. Le dossier démontrerait ici le contraire.
Le procureur de la défense reconnaît dans sa plaidoirie les éléments signalés par le procureur des demandeurs. Mais il signale aussi d'autres points qui, quels qu'en soient les motifs personnels du mis en cause, démontrent qu'il n'a pas répondu aux exigences de l'article 2573 du Code civil du Bas-Canada d'une part, ni permis à l'assureur d'avoir les informations nécessaires et complètes pour décider. Le Tribunal se doit de constater que la «collaboration» du mis en cause est loin d'être ce qu'elle devait être, et fondait en définitive parfaitement la conclusion qu'elle équivalait à non-collaboration.
ANALYSE SUR L'OBLIGATION DE COLLABORER
[56] En vertu de l'article 2573 C.c.B.-C., l'assuré est tenu de collaborer avec l'assureur :
2573. À la demande de l'assureur, l'assuré doit lui faire connaître le plus tôt possible toutes les circonstances entourant le sinistre, y compris sa cause probable, la nature et l'étendue des dommages, l'emplacement de la chose, les droits des tiers l'affectant et les assurances concurrentes.
Nonobstant toute limitation de délai de déchéance fixée par le contrat, l'assuré a droit, s'il ne lui est pas raisonnablement possible de remplir cette obligation dans le délai spécifié, à une prorogation raisonnable.
L'assuré doit aussi, à la demande de l'assureur, lui fournir les pièces justificatives à l'appui de ces renseignements et attester sous serment ou par affirmation solennelle la véracité de ces renseignements.
À défaut par l'assuré de se conformer aux obligations du présent article, tout intéressé peut le faire à sa place.
[57] Le premier juge conclut que Girouard ne s'est pas conformé à cette obligation.
[58] Il est certain qu'une telle conclusion repose en grande partie sur une appréciation d'un ensemble de faits et notre Cour a un important devoir de réserve en pareilles circonstances.
[59] D'ailleurs, le premier juge est sans doute justifié de conclure que Girouard n'a pas fait preuve de beaucoup d'empressement dans ses relations avec le Fonds, même s'il est inexact d'affirmer que «plusieurs fois il remet des rencontres fixées, et ce, à la dernière minute» ; cela s'est produit en une seule occasion, le 18 avril 1990.
[60] Quoi qu'il en soit, je ne remets pas en cause l'analyse factuelle du premier juge. J'estime toutefois, avec égards, qu'il a omis de donner effet à la règle de droit applicable en semblable matière.
[61] Dans l'arrêt The London Assurance Corp c. Girard et Charlebois[2], notre Cour écrit :
Quant au reproche fait à l'assuré de n'avoir pas coopéré avec la tierce-saisie dans la conduite du litige, il n'est pas non plus fondé parce qu'en vertu de la police tout ce que l'assuré était tenu de faire, c'était de n'assumer aucune responsabilité ni de régler aucune réclamation et qu'après avoir avisé la tierce-saisie de l'accident et lui avoir donné tous les détails en sa possession, il n'était obligé à rien d'autre, à moins d'en être prié par l'assureur. Il incombait en conséquence à celui-ci de prouver en quoi la coopération de son assuré lui était nécessaire, qu'il l'avait requis de coopérer, que l'assuré avait refusé et que l'assureur en avait souffert un préjudice, ce qu'il n'a pas fait. Pour réussir la tierce-saisie devait démontrer que le manque de coopération, s'il existe en fait, était tel qu'il indiquait mauvaise foi de la part de son assuré.
[62] Le premier juge ne conclut pas que Girouard était de mauvaise foi, qu'il a refusé de collaborer et que le Fonds a subi un préjudice. Tout au plus, il lui impute une certaine négligence à répondre promptement aux convocations de l'avocat du Fonds.
[63] Reprenons la séquence des événements.
[64] Girouard transmet sur réception les deux mises en demeure et le bref d'assignation. Il réitère dans chacune de ses lettres qu'il est disposé à collaborer.
[65] Jusqu'à la mi-avril, Me Dagenais convient qu'il n'y avait aucune urgence. On ne peut donc faire aucun reproche à Girouard jusqu'à ce moment.
[66] Il est vrai qu'il annule un rendez-vous le 18 avril 1990. Toutefois, il n'est sûrement pas exceptionnel de ne pouvoir se présenter à un rendez-vous.
[67] Girouard n'a pas fait pas preuve de désinvolture puisqu'il prévient - même si cela est à la dernière minute - qu'il ne pourra être présent. On ne peut donc voir là un manquement de mauvaise foi à ses obligations.
[68] Par la suite, il y a une certaine confusion : Girouard devait-il rappeler ou incombait-il à Dagenais de le rappeler ? Me Dagenais témoigne en ce sens :
Me KAREN ROGERS :
Q. …Vous témoignez à l'effet que vous n'avez pas rappelé maître Girouard, le dix-huit (18) avril mil neuf cent quatre-vingt-dix (1990), que vous étiez sous l'impression que c'était lui et que, en fait, vous lui avez écrit le trente (30) avril mil neuf cent quatre-vingt-dix (1990), qui est la pièce D-16B, parce qu'il n'avait pas rappelé pour fixer de rencontre.
R. Oui. Je constate que je vous ai effectivement mentionné que j'avais l'impression que c'est lui qui devait me rappeler. J'ai aujourd'hui une autre impression. Je n'ai pas de note d'avoir tenté de le rappeler…
[69] Pourtant, dès le 18 mai - lettre non datée -, le Fonds fait part à Girouard qu'il ne prendra pas fait et cause pour lui vu son manque de collaboration. Cette décision ne peut alors être fondée que sur la remise d'un seul rendez-vous.
[70] Il est vrai que le Fonds aurait pu modifier sa position par la suite puisque Me Dagenais accepte de rencontrer Girouard le 29 mai 1990.
[71] On constate toutefois, à la lecture de ses notes, que la plus grande partie des questions de Me Dagenais vise à justifier la décision du Fonds d'invoquer l'absence de collaboration.
[72] Avec égards pour l'opinion contraire, je ne suis pas d'avis que l'on pouvait, à cette époque invoquer un refus de collaborer de Girouard, une mauvaise foi de sa part et un préjudice pour le Fonds. Sur ce dernier point, il ne faut pas perdre de vue que la plupart des renseignements concernant la réclamation de Di Capua et Lamberti contre Girouard se retrouvaient dans le dossier de cour les opposant à Borselino et que Me Dagenais en avait déjà copie depuis quelques mois.
[73] À la suite de la rencontre du 29 mai, Girouard transmet par télécopieur une lettre, le 12 juin, afin de remettre copie de son dossier et de ses notes. Le dossier n'est pas inclus. S'agit-il d'une erreur de bonne foi ? Me Dagenais ne s'en informe pas. Un assureur peut-il dans de telles circonstances faire le mort pour invoquer ultérieurement un manque de collaboration ? Je ne le crois pas.
[74] L'avocat du Fonds attend un mois et, une fois le jugement rendu dans le dossier Di Capua et Lamberti contre Girouard, le 22 juin, confirme la «négation de couverture».
[75] Si l'assuré doit être de bonne foi, l'assureur doit également l'être et ne pas chercher un prétexte pour se dégager de ses obligations.
[76] À mon avis, le Fonds a invoqué prématurément le manque de collaboration de Girouard et, par la suite, a confirmé cette décision sans établir que ce dernier était de mauvaise foi, qu'il refusait de collaborer et qu'il a subi un préjudice.
[77] Avec égards, je ne crois pas que le premier juge était justifié de retenir un défaut de collaboration de la part de Girouard pour rejeter le recours intenté contre le Fonds.
LES AUTRES MOYENS DU FONDS
[78] À son plaidoyer du 21 décembre 1992, le Fonds invoque les autres motifs suivants :
Me Girouard a reconnu volontairement sa responsabilité dans des procédures faites pour les demandeurs, ce qui contrevient aux termes de la police;
Me Girouard a omis de déclarer au Fonds, dans les délais prescrits par la police, les faits ou circonstances qui pouvaient donner ouverture à la réclamation;
Certains des gestes reprochés à Me Girouard ont été posés alors qu'il n'était pas membre en règle du Barreau du Québec, et, donc, ne sont pas couverts par la police;
La police ne s'applique pas, en outre, parce que la réclamation découle de circonstances dont Me Girouard avait connaissance avant la période d'assurance pertinente et qui étaient susceptibles de donner ouverture à cette réclamation;
[79] Ces moyens sont repris au plaidoyer amendé du 27 août 1993.
[80] Tel que mentionné en introduction, le premier juge les a tous rejetés.
[81] Ces moyens étaient connus par l'avocat du Fonds dès qu'il a pris connaissance du dossier opposant Barsolini à Di Capua et Lamberti avant le mois de mars 1990.
[82] Malgré tout, l'avocat du Fonds ne les a pas invoqués dans ses lettres du 18 mai 1990, du 22 mai 1990, et du 10 juillet 1990. Ces moyens font surface deux ans et demi plus tard dans le plaidoyer original.
[83] L'avocate de Di Capua et Lamberti plaide que le Fonds est maintenant forclos de les invoquer. Elle s'appuie notamment sur l'affaire Lapointe-Boucherc. Mutuelle-viedes fonctionnaires[3]. Le juge Robert (il n'était pas encore juge en chef) s'exprime ainsi :
Malgré ces rapports, l'assureur a choisi de ne pas invoquer ce motif dans sa lettre de négation de couverture du 13 mars 1989, probablement, comme le souligne le juge de première instance, parce que l'assureur possédait très peu d'information sur la quantité d'alcool consommé par l'assuré au moment de la proposition en janvier 1988.
Dans l'affaire Tracy Plate Shop Inc. c. Continental Insurance Co., le juge Philippe Pothier était confronté à une situation semblable. Dans un premier temps, l'assureur avait refusé d'indemniser l'assuré pour le motif qu'il n'était pas responsable des dommages. La réponse fut «No liability on part of insured liability denied to claimant». Malgré cette prise de position de son assureur, l'assuré admit sa responsabilité et fit effectuer les réparations requises. Au procès, l'assureur a soulevé deux nouveaux moyens pour refuser de payer les dommages : l'existence d'une autre police d'assurance, qui devait s'appliquer en priorité, et l'admission de responsabilité de l'assuré en violation d'une des conditions de la police.
Le juge, s'appuyant sur la «doctrine of election» déclare :
La Cour est d'avis que la défenderesse n'est plus admise à invoquer la violation d'une condition de la police. Elle n'a jamais avisé l'assuré de ce prétendu manquement et, bien plus tard, elle a finalement pris position sans l'invoquer.
Cette décision fut confirmée par notre cour dans l'arrêt Continental Insurance Co. c. Tracy Plate Shop Inc. L'opinion de l'honorable L'Heureux-Dubé, à laquelle souscrivent les juges Vallerand et Rothman, confirme spécifiquement la décision du premier juge sur la tardiveté à invoquer les deux nouveaux moyens.
Je conclus en précisant qu'en l'espèce l'assureur a fait son lit en toute connaissance de cause et délibérément choisi de ne pas invoquer l'alcoolisme comme motif de refus de couverture. La situation serait différente si l'assureur avait découvert ce motif après son enquête initiale et après sa lettre du 13 mars 1989. Le comportement de l'assureur équivaut à une renonciation tacite à invoquer ce moyen. La bonne foi étant le fondement même du contrat d'assurance, l'assuré était justifié de conclure que le seul motif de refus de couverture était l'absence de mention de l'ischémie cérébrale.[4]
[84] Le juge Baudouin partage l'avis du juge Robert et écrit :
Sur le second point, il est en preuve que l'intimée savait dès le 20 décembre 1988 que Robert Boucher avait un problème probable d'alcoolisme. La chose était d'ailleurs évidente, eu égard à la façon doit il est mort. La lettre du 13 mars refusant la réclamation ne le mentionne pas. Je ne peux mieux faire, à cet égard, que de citer ce passage du professeur Jean-Guy Bergeron, qui, sur les circonstances susceptibles de montrer une volonté de renonciation, écrit:
Le fait de ne pas invoquer le moyen de défense, de le garder en réserve en cas d'échec des autres moyens soulevés est un indicateur sérieux d'une volonté de renoncer pour un assureur raisonnable. Cette attitude de l'assureur ne nous paraît pas compatible avec la bonne foi devant entourer les relations assureur-assuré.[5]
[85] Le professeur Didier Lluelles, dans Précis des assurances terrestres[6], définit ainsi ce qu'il faut entendre par la renonciation implicite :
A. Notion de «waiver»
Il s'agit d'une renonciation implicite de l'assureur à l'accomplissement ou à l'accomplissement conforme par l'assuré de ses obligations de fournir avis et preuves de perte.
Cette renonciation s'infère de l'attitude de l'assureur ou de ses mandataires, laissant croire à l'assuré qu'il n'accorde pas à l'inexécution ou à la mauvaise exécution des formalités préalables l'importance qu'il aurait pu lui accorder74.
B. Exemples de cas de «waiver»
I. Attitude surprenant la bonne foi de l'assuré
Sera considérée comme une renonciation implicite à l'obligation de fournir la preuve de perte selon les formalités de la police, le fait pour l'assureur ou son représentant de faire signer à l'assuré des déclarations sans lui indiquer la nécessité de remplir d'autres formules75.
II. Certaines dénégations de responsabilité
a) Principe
On pourra conclure au «waiver» si l'assureur, au courant du manquement de l'assuré, oppose à la réclamation d'indemnité un motif étranger - l'absence d'intérêt d'assurance, par exemple76.
b) Limite
Encore faut-il, cependant - si le litige ne porte pas sur le retard de l'avis ou de la preuve de perte - que cette dénégation intervienne à l'intérieur du délai nécessaire à l'accomplissement des formalités préalables77.
C. La renonciation doit être vraisemblable
Pour que le comportement de l'assureur ou de ses représentants équivaille à une renonciation, il importe que cette renonciation soit vraisemblable dans les circonstances78.
D. «Waiver» et procédure
Le comportement de l'assureur ne pourra être prouvé et faire présumer la renonciation que s'il fut allégué dans la déclaration79.
Le preneur ne pourra logiquement invoquer le «waiver» s'il allègue avoir rempli les formalités requises80.
74. Entreprises Cotenor Ltée c. Travelers du Canada, [1976] C.S. 415 , 417; John S. EWART, «"Waiver" in Insurance Law», (1928) 6 Can. Bar Rev. 257.
75. Bédard c. Consolidated Fire & Casualty Insurance Co., [1959] C.S. 330; Angelillo c. La Prévoyance, Cie d'Assurances, [1983] C.A. 305 .
76. Entreprises Cotenor Ltée c. Travelers du Canada, [1976] C.S. 415 , 417; British Colonial Fire Ins. Co. c. Rahal, (1919) 28 B.R. 227; Cie Équitable d'assurance mutuelle contre le feu c. Boulanger, (1920) 29 B.R. 515; Compagnie d'assurance mutuelle contre le feu de Beauce et Dorchester c. Beaudoin, (1928) 45 B.R. 551, 553-554.
77. Henri Girard (Québec) Inc. c. Union Canadienne Cie d'Assurances, [1971] C.A. 446 , 452-453.
78. Viau c. Les Prévoyants du Canada, [1975] C.S. 247 : on fait remplir à l'assuré qui n'a pas fourni une preuve de perte un questionnaire; mais l'assureur avait des doutes sur l'origine de l'incendie; Marcoux c. Halifax Fire Insurance Co., [1948] R.C.S. 278 , 284: l'assureur a entrepris, malgré la tardiveté de l'avis, une enquête; mais le preneur fut informé que l'assureur agissait «sans préjudice».
79. Compagnie d'assurance mutuelle contre le feu de Beauce and Dorchester c. Beaudoin, (1928) 45 B.R. 551; Richard c. Société nationale d'assurance, [1977] C.P. 2 . Contra : Tremblay c. Cie d'assurance Guardian du Canada, [1983] C.P. 171 .
80. Henri Girard (Québec) Inc. c. Union Canadienne Cie d'Assurances, [1971] C.A. 446 , 450-451.
[86] Je suis donc d'avis que le Fonds ne peut plus invoquer ces motifs pour refuser d'indemniser des tiers alors qu'il ne les a pas opposés à son assuré à l'époque pertinente. Il paraît évident que le Fonds n'aurait pas refusé de prendre fait et cause pour l'ex-avocat Girouard si ce dernier n'avait pas remis le rendez-vous du 18 avril et avait transmis avec diligence son dossier et ses notes personnelles. On doit donc conclure que le Fonds, qui connaissait les prétendus manquements qu'il invoque présentement, avait renoncé à s'en prévaloir.
[87] Je suggère d'accueillir le pourvoi, d'infirmer le jugement de première instance, d'accueillir l'action, et d'ordonner au Fonds d'assurance responsabilité professionnelle du Barreau du Québec d'indemniser Domenico Di Capua et Silvana Lamberti de la condamnation qui a été rendue contre Girouard le 10 janvier 1992, pour le montant de 92 155,64$, avec intérêt, indemnité additionnelle et frais à compter du 11 mars 1990, le tout avec dépens tant en première instance qu'en appel.
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ANDRÉ FORGET J.C.A. |
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Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans appel; la consultation du plumitif s'avère une précaution utile.