Rochefort c. Top modèles à quatre pattes | 2025 QCCS 3785 | ||||||
COUR SUPÉRIEURE | |||||||
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CANADA | |||||||
PROVINCE DE QUÉBEC | |||||||
DISTRICT DE | ST-HYACINTHE | ||||||
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N° : | |||||||
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DATE : | 21 octobre 2025 | ||||||
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE | L’HONORABLE | JÉRÔME FRAPPIER, J.C.S. | |||||
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DANIEL ROCHEFORT | |||||||
Demandeur | |||||||
c.
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LES TOPS MODÈLES À QUATRE PATTES et TOP CABO et CAROLYN LEBLANC | |||||||
Défenderesses | |||||||
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JUGEMENT | |||||||
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LE DEMANDEUR SATISFAIT-IL AUX CRITÈRES POUR L’ÉMISSION D’UNE ORDONNANCE D’INJONCTION INTERLOCUTOIRE PROVISOIRE?
2.1 Les principes juridiques[6]
2.2 Discussion
2.2.1 La forte apparence de droit
51. Le demandeur a un droit clair et indiscutable au respect des obligations par la Défenderesse des obligations prévues au bail et des engagements souscrits par cette dernière en faveur du Locateur.
[…]
54. Considérant ce qui précède, le demandeur soumet respectueusement qu’il y a non seulement apparence de droit, mais également l’existence d’un droit clair.
9.10.02 Occupation continue
De plus, le LOCATAIRE doit occuper de façon continue les Lieux Loués pendant toute la durée du bail.
[…]
9.22 Recours en injonction
Le LOCATAIRE convient que le BAILLEUR a droit au recours en injonction pour empêcher ou arrêter la violation de toute obligation assumée par le LOCATAIRE en vertu du Bail, ou pour forcer le LOCATAIRE à exécuter ladite obligation. Le LOCATAIRE reconnaît que toute violation de sa part de l’une quelconque des obligations ainsi assumées est, à toute fin légale, présumée causer au BAILLEUR un préjudice sérieux et irréparable, ou est présumée être une violation à laquelle un jugement en dommages ne peut pas remédier.
Nous nous expliquons mal cette situation. Il semble qu’une intervention était nécessaire auprès de la municipalité afin de régulariser la situation du local et que malgré plusieurs demandes de sa part, rien n’ait été fait.
Nous sommes d’avis que cette régularisation récente est tardive et insuffisante au regard du préjudice grave et continu subi par notre cliente pendant toutes ces années.
En effet :
- Le local dans lequel vous avez placé notre cliente en 2021 n’était pas identifié officiellement par une adresse civique reconnue;
- En raison de ce qui précède, aucun permis d’exploitation valide ne pouvait être émis;
- Le local était dépourvu d’enseigne, en contravention avec la clause 31 du bail;
- Le local semblait être situé dans l’arrière-boutique d’un commerce voisin;
- Le commerce de notre cliente était introuvable pour la clientèle;
- L’alimentation électrique provenait d’un autre commerce (Bijouterie Chekchak inc.);
Cette situation a placé notre cliente dans une position précaire face aux assureurs, en plus de lui faire perdre une importante partie de sa clientèle et de lui causer des problèmes de santé.
En l’absence de régularisation, le local ne pouvait servir à l’usage auquel il était destiné et notre cliente n’a pas pu en jouir paisiblement. Il s’agit là de manquements clairs aux obligations prévues à l’article
1854. Le locateur est tenu de délivrer au locataire le bien loué en bon état de réparation de toute espèce et de lui en procureur la jouissance paisible pendant toute la durée du bail.
Il est aussi tenu de garantir au locataire que le bien peut servir à l’usage pour lequel il est loué, et de l’entretenir à cette fin pendant toute la durée du bail.
Ces obligations essentielles qui sont à la base même de votre lien contractuel n’ont manifestement pas été respectées.
Bien que la Ville ait récemment reconnu une nouvelle adresse civique (398), ce correctif arrive trop tard. Les conséquences pour notre cliente sont irréversibles.
[Le Tribunal souligne]
2.2.2 Le préjudice sérieux ou irréparable
55. Compte tenu de ce qui précède, il est évident que le Demandeur subit un préjudice sérieux et irréparable causé par la conduite illégale et intempestive de la Défenderesse qui tente de se faire justice à elle-même de manière abusive et sans droit, et que l’émission des ordonnances d’injonction et de sauvegarde recherchées sont nécessaires afin d’empêcher que ne soit créé un état de fait de nature à rendre le jugement final inefficace et non exécutoire.
56. Tel que plus amplement décrit auparavant, le Demandeur est privé de sommes substantielles provenant d’un locataire qui occupait l’immeuble et qui versait régulièrement son loyer jusqu’en septembre 2025.
57. Les agissements de la Défenderesse causent un préjudice sérieux et difficilement compensable en argent, puisqu’elle a contribué à mettre en défaut le Demandeur face à son créancier hypothécaire, et face aux taxes municipales dues à la Ville.
2.2.3 Le poids relatif des inconvénients
L’obligation de faire est une « obligation pour la satisfaction de laquelle le débiteur doit accomplir un acte positif ». Initialement les tribunaux étaient réticents à forcer un débiteur à exécuter lui-même une obligation de faire à laquelle il s’était engagé. La jurisprudence à cet égard a toutefois évolué au fil des années. Ce nouveau courant jurisprudentiel met de côté la tendance antérieure qui consistait à réserver l’exécution en nature presque exclusivement aux cas d’obligations de ne pas faire. Précisons toutefois que ce n’est que dans des circonstances exceptionnelles que les tribunaux rendront des ordonnances visant la continuation d’une relation d’affaires.
Nonobstant cette évolution jurisprudentielle, les tribunaux observent une grande prudence, notamment du point de vue du respect des libertés individuelles, lorsqu’il s’agit d’une obligation de faire. Ainsi, lorsque l’obligation implique la participation personnelle du débiteur (par exemple en fonction des spécificités de son art ou de sa profession) sans toutefois être une obligation intuitu personae, la pertinence de forcer le débiteur à exécuter son obligation dépendra des circonstances incluant les droits protégés par les chartes. Notons que l’exécution en nature de l’obligation intuitu personae ne pourra pas, de manière générale, être forcée vu le caractère personnel de l’obligation et vu les considérations reliées à la protection des libertés individuelles qui entrent en ligne de compte. En cas d’inexécution d’une obligation intuitu personae, le créancier devra habituellement opter pour un autre recours afin d’obtenir satisfaction.
[Le Tribunal souligne — Références omises]
Le LOCATAIRE convient que le BAILLEUR a droit au recours en injonction pour empêcher ou arrêter la violation de toute obligation assumée par le LOCATAIRE en vertu du Bail, ou pour forcer le LOCATAIRE à exécuter ladite obligation.
Le LOCATAIRE reconnaît que toute violation de sa part de l’une quelconque des obligations ainsi assumées est, à toute fin légale, présumée causer au BAILLEUR un préjudice sérieux et irréparable, ou est présumée être une violation à laquelle un jugement en dommages ne peut pas remédier.
2.2.4 L’urgence
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
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| __________________________________JÉRÔME FRAPPIER, j.c.s. | ||
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Me Daniel Rochefort Demandeur Partie non-représentée
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Carolyn Leblanc Partie non-représentée Défenderesse
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Dates d’audience : | 15 et 20 octobre 2025 | ||
JF 1208.....................................................................1
APERÇU..................................................................1
1. CONTEXTE..........................................................2
2. ANALYSE............................................................2
2.1 Les principes juridiques..............................................3
2.2 Discussion..........................................................4
2.2.1 La forte apparence de droit.........................................4
2.2.2 Le préjudice sérieux ou irréparable..................................6
2.2.3 Le poids relatif des inconvénients....................................7
2.2.4 L’urgence........................................................8
TABLE DES MATIÈRES...................................................10
[1] Portant l’adresse civique du 398 au 418.
[2] L’utilisation des seuls noms de famille dans le présent jugement a pour but d’alléger le texte et il ne faut pas y voir un manque de courtoisie à l’égard des personnes concernées.
[3] Pièce P-4.
[4] La preuve ne révèle pas qu’il s’agit d’une personne morale. Il s’agit d’une entreprise individuelle portant le numéro d’entreprise NEQ : 2 265 400 319 (pièce P-1).
[5] Pièce P-7.
[6] Le Tribunal réfère au résumé des principes énoncés par la juge Katheryne A. Desfossés dans Carrier & Al. c. Hébert, 405-17-003364-259.
[7] Groupe CRH Canada inc. c. Beauregard, supra,
[8] HRM Projet Children inc. c. Devimco Immobilier inc.,
[9] FLS Transportation Services Limited c. Fuze Logistics Services Inc.,
[10] R. c. Société Radio‑Canada,
[11]
[12]
[13] Id., note de bas de page 2.
[14] Id.
[15]
[16] Id., par. 23.
[17] Groupe CRH Canada inc. c. Beauregard,
[18] Précité, note 8, paragr. 15 et 19.
[19] Joli-Coeur c. Jolicoeur Lacasse avocats,
[20] Société minière Louvem inc. c. Aur ressources inc.,
[21] Id.
[22] Pièce 7.
[23]
[24] Pièce P-5, dans un courriel transmis par le demandeur le 15 avril 2025 à 11 h 38.
[25] Clause 2.01 du bail P-4. Plus taxes et loyer additionnel.
[26] Katheryne A. DESFOSSÉS, Commentaire sur l’article
[27] Art.
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