Décision

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Racz c. Subaru Laval Rive Nord

2019 QCCQ 7637

COUR DU QUÉBEC

« Division des petites créances »

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

TROIS-RIVIÈRES

LOCALITÉ DE

TROIS-RIVIÈRES

« Chambre civile »

N° :

400-32-700912-194

 

 

 

DATE :

9 décembre 2019

______________________________________________________________________

 

SOUS LA PRÉSIDENCE DE

L’HONORABLE

ALAIN TRUDEL, J.C.Q.

 

 

 

______________________________________________________________________

 

 

CAROLINE RACZ

Demanderesse

 

c.

 

SUBARU LAVAL RIVE NORD

Défenderesse

 

 

______________________________________________________________________

 

JUGEMENT

______________________________________________________________________

 

 

[1]           Alléguant que la peinture de la voiture acquise de la défenderesse se dégrade prématurément, la demanderesse réclame 2 688 $ en diminution du prix d’acquisition et divers dommages.

 


Questions en litige

 

[2]           Le litige soulève les questions suivantes :

 

A)           Les problèmes affectant la peinture du véhicule donnent-ils ouverture à l’application des garanties de bon usage et de durabilité prévues aux articles 37 et 38 de la Loi sur la protection du consommateur?

 

B)           Dans l’affirmative, quelle est la valeur des dommages subis par la demanderesse?

 

Contexte

 

[3]           Le 18 juin 2018, la demanderesse acquiert de la défenderesse, concessionnaire automobile, un véhicule usagé de marque Subaru, modèle Impreza, de l’année 2015, au prix de 21 000 $, toutes taxes incluses.

 

[4]           À la mi-août 2018, la demanderesse constate l’apparition de taches de rouille à divers endroits sur la carrosserie du véhicule.

 

[5]           Elle contacte immédiatement la défenderesse qui la réfère au concessionnaire Subaru de la région de Trois-Rivières pour fins d’inspection.

 

[6]           La demanderesse apprend alors que la peinture de son véhicule n’est pas d’origine puisque le véhicule aurait été accidenté préalablement et qu’en conséquence, les problèmes affectant la carrosserie ne sont pas couverts par la garantie du fabricant.

 

[7]           Des discussions visant un règlement de la problématique entre les parties ne donnent aucun résultat.

 

[8]           En novembre, la demanderesse constate l’apparition d’une fissure plus importante dans la peinture du véhicule.

 

[9]           Le 19 novembre 2018, elle met la défenderesse en demeure de réparer la problématique de dégradation prématurée de la peinture.

 

[10]        Le 29 novembre 2018, en réponse à cette mise en demeure, la défenderesse présente à la demanderesse une offre de règlement que cette dernière considère insatisfaisante.

 

[11]        Au mois de mars 2019, la demanderesse fait réparer la peinture de son véhicule au coût de 2 466,99 $.

 

[12]        Le 24 janvier 2019, la demanderesse loge contre la défenderesse un recours devant la Cour du Québec, division des petites créances.

 

Analyse et décision

 

[13]        La demanderesse allègue que son véhicule acquis de la défenderesse est affecté d’un vice apparu prématurément et qui nuit à son usage et en diminue la valeur. Elle reproche à la défenderesse d’avoir omis de l’informer que le véhicule était accidenté avant la vente.

 

[14]        La défenderesse plaide que la demanderesse savait que le véhicule avait été accidenté puisqu’elle a bénéficié d’un rapport « Car Proof » qui relatait qu’un incident impliquant le véhicule a été rapporté à la police le 3 mars 2016, sans plus. La demanderesse a d’ailleurs ratifié un document intitulé « Reconnaissance et décharge de responsabilité » par lequel elle dégage la défenderesse de toute obligation de divulgation à l’égard de l’information obtenue dans le rapport « Car Proof ». Enfin, elle ajoute que les dommages à la carrosserie n’affectent en rien le bon usage du véhicule.

 

[15]        Les parties sont liées par un contrat de consommation au sens de l’article 2 de la Loi sur la protection du consommateur « LPC ».

 

[16]        Il a été établi qu’au moment de la vente, le représentant de la défenderesse a mentionné à la demanderesse que le véhicule n’avait jamais été accidenté et que l’incident rapporté au rapport « Car Proof » était mineur et sans conséquence.

 

[17]        La défenderesse a ainsi vendu à la demanderesse un véhicule en lui cachant le fait qu’il s’agissait d’un véhicule accidenté. Il s’agit de fausses représentations dont la défenderesse doit supporter la responsabilité.

 

[18]        L’article 42 de la LPC prévoit qu’une déclaration faite par le représentant d’un commerçant à propos d’un bien lie ce dernier envers le consommateur. La défenderesse doit ainsi assumer la déclaration du vendeur de la défenderesse à l’effet qu’elle a vendu un véhicule qui n’avait jamais été accidenté.

 

[19]        Par ailleurs, l’article 10 de la LPC prévoit qu’est interdite toute stipulation par laquelle un commerçant se dégage des conséquences de son fait personnel ou de celui de son représentant. La défenderesse ne peut donc se reposer sur la ratification par la demanderesse du formulaire de « Reconnaissance et décharge de responsabilité » et nier sa responsabilité envers elle.

 

[20]        Le recours de la demanderesse en diminution du prix d’acquisition afin de tenir compte de l’état véritable du véhicule au moment de l’achat est bien fondé.

 

[21]        Mais il y a plus.

 

[22]        Les articles 37 et 38 de la LPC énoncent les garanties de bon fonctionnement et de durabilité du bien de la manière suivante :

 

37. Un bien qui fait l’objet d’un contrat doit être tel qu’il puisse servir à l’usage auquel il est normalement destiné.

 

38. Un bien qui fait l’objet d’un contrat doit être tel qu’il puisse servir à un usage normal pendant une durée raisonnable, eu égard à son prix, aux dispositions du contrat et aux conditions d’utilisation du bien.

 

[23]        La preuve probante démontre que la carrosserie et la peinture du véhicule se sont détériorées après seulement deux mois de la prise de possession alors que la demanderesse a fait de ce véhicule un usage normal et en assure un bon entretien.

 

[24]        Comme l’exprime le juge Pierre Labbé dans l’affaire Montembeault c. Honda Canada[1] :

 

« La peinture est une composante importante d’un véhicule automobile puisqu’elle protège la carrosserie des éléments extérieurs qui pourraient l’endommager. Des signes de vieillissement de la peinture peuvent apparaitre au fil du temps, ce qui est normal et acceptable. Ce n’est pas le cas du véhicule de la demanderesse. »

 

[25]        L’écaillement et la présence de fissures dans la peinture sont les signes probants d’une détérioration prématurée d’une composante importante du véhicule de la demanderesse qui affecte le bon usage et le bon fonctionnement du bien acquis de la défenderesse.

 

[26]        La garantie légale de l’article 38 de la LPC s’applique en l’espèce puisque la peinture n’a pas eu une durée de vie raisonnable vu le prix payé pour le véhicule et l’utilisation normale qu’en a fait la demanderesse.

 

[27]        Le Tribunal octroie à la demanderesse, en diminution du prix d’acquisition et divers dommages, la somme de 2 488,00 $ qui est juste est raisonnable et qui est composée des montants de 2 466,00 $ (réfection de la peinture selon la facture de Carrosserie Marc Pilon) et 22,00 $ (frais d’envoi de la mise en demeure).

 

[28]        La réclamation pour la location de la voiture de remplacement pendant la durée des travaux est rejetée faute de preuve probante.

 

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

 

[29]        ACCUEILLE en partie la demande;

[30]        CONDAMNE la défenderesse à payer à la demanderesse la somme de 2 488,00 $ avec intérêts au taux légal et l'indemnité additionnelle prévue à l'article 1619 du Code civil du Québec, et ce, à compter du 19 novembre 2018;

 

[31]        CONDAMNE la défenderesse à payer à la demanderesse la somme de 103,00 $ à titre de frais de justice.

 

 

 

__________________________________

ALAIN TRUDEL, J.C.Q.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Date d’audience :

3 septembre 2019

 



[1]     2019 QCCQ 5950.

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