Slater c. 9375-2913 Québec inc. (Automobiles Collection) | 2021 QCCQ 12691 | ||||||
COUR DU QUÉBEC | |||||||
« Division des petites créances » | |||||||
CANADA | |||||||
PROVINCE DE QUÉBEC | |||||||
DISTRICT DE | QUÉBEC | ||||||
LOCALITÉ DE | QUÉBEC | ||||||
« Chambre civile » | |||||||
N° : | 200-32-704451-193 | ||||||
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DATE : | 11 novembre 2021 | ||||||
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SOUS LA PRÉSIDENCE DE | L’HONORABLE | PIERRE SIMARD, J.C.Q. | |||||
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LAURIE SLATER | |||||||
[...], Québec (Québec) [...]
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Partie défenderesse | |||||||
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c. | |||||||
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9375-2913 QUÉBEC INC., faisant affaire sous le nom d’Automobiles Collection | |||||||
11, avenue Sainte-Brigitte, Sainte-Brigitte-de-Laval (Québec) G0A 3K0
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Partie défenderesse | |||||||
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JUGEMENT | |||||||
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[1] 9375-2913 Québec inc. (Automobiles Collection) exploite son entreprise dans l’achat et la vente d’automobiles usagées. Dans le cours de ses affaires, elle vend à Laurie Slater, le 28 mars 2019, un véhicule de marque Hyundai 2011, au prix de 3 300 $. Sur le contrat, il y est indiqué que la vente est faite sans garantie. Toutefois, selon le témoignage non contredit de la demanderesse Laurie Slater, le vendeur aurait affirmé verbalement que le véhicule bénéficierait d’une garantie d’un mois.
[2] Quelques semaines après l’acquisition, la demanderesse éprouve des difficultés avec son véhicule. Elle joint le représentant d’Automobiles Collection qui prend en charge le problème sans frais additionnels pour la demanderesse. Par la suite, le véhicule fonctionne correctement jusqu’en juin 2019.
[3] Alors qu’elle est à Montréal, Laurie Slater connaît à nouveau des problèmes avec son véhicule automobile. Elle le remet au garage Canadian Tire qui fait une réparation qui lui coûte 415,16 $. Malheureusement, dès le lendemain, le véhicule a de nouveaux problèmes qui ne peuvent se résoudre à Montréal : elle doit donc faire remorquer son véhicule vers sa résidence dans la région de Québec.
[4] Par la suite, la demanderesse tente de joindre la défenderesse par téléphone, sans succès. Elle envoie donc une mise en demeure sur un formulaire fourni par l’Office de la protection du consommateur du Québec où elle décrit les problèmes qu’elle a rencontrés avec son véhicule automobile et réclame le remboursement de ses frais de réparation, de ses frais de déplacement, bref, elle réclame des dommages de 6 000 $.
[5] Devant l’inaction de la défenderesse, elle dépose un recours à la division des petites créances le 7 octobre 2019. Elle change sa réclamation et demande plutôt la nullité de la vente et le remboursement de la transaction, de son coût de réparation de 415,16 $ et du paiement pour l’enregistrement de son véhicule automobile. Au total, elle réclame 4 065 $.
ANALYSE ET DÉCISION
[6] Les statuts de commerçant et de consommateur des parties ne sont pas en cause. Par conséquent, la Loi sur la protection du consommateur[1] (L.p.c.) s’applique.
[7] Dans le cas d’un consommateur qui achète un véhicule automobile usagé, les garanties suivantes s’appliquent :
- la garantie de bon fonctionnement des articles 159 et 160 L.p.c.;
- la garantie d’aptitude du bien à son usage de l’article 37 L.p.c.;
- la garantie de durabilité de l’article 38 L.p.c.;
- la garantie pour vice caché du Code civil du Québec[2] (C.c.Q.).
[8] La garantie de bon fonctionnement des articles 159 et 160 L.p.c. est formulée en fonction de la catégorisation du véhicule. Ainsi, quatre catégories sont créées par la loi, dont la dernière qui s’applique à un véhicule usagé ayant parcouru plus de 80 000 kilomètres. Si un véhicule vendu est de cette catégorie, la vente est faite sans garantie de bon fonctionnement.
[9] Quant à la garantie de durabilité, elle est prévue à l’article 38 L.p.c. qui se lit ainsi :
38. Un bien qui fait l’objet d’un contrat doit être tel qu’il puisse servir à un usage normal pendant une durée raisonnable, eu égard à son prix, aux dispositions du contrat et aux conditions d’utilisation du bien.
APPLICATION DES PRINCIPES AU PRÉSENT LITIGE
[10] Le véhicule Hyundai étant un véhicule de classe D, la garantie de bon fonctionnement prévue aux articles 159 et 160 L.p.c. ne peut s’appliquer.
[11] La réponse n’est pas nécessairement la même en ce qui concerne la garantie de durabilité de l’article 38 L.p.c. Il est généralement admis que la garantie de bon fonctionnement n’exclut pas les autres garanties : si une garantie de bon fonctionnement est soit expirée, soit non applicable, le consommateur peut invoquer soit la garantie d’aptitude, soit la garantie de durabilité, soit la garantie contre les vices cachés, le cas échéant.
[12] Le contrat de vente souscrit par Mme Slater comporte la mention suivante : vente sans garantie (LPC37, 38). On peut aisément comprendre que le commerçant par ce texte désire que les garanties spécifiques prévues aux articles 37 et 38 L.p.c. soient exclues.
[13] Or, la Loi sur la protection du consommateur est une loi d’ordre public : plus particulièrement à son article 261, on y indique qu’il ne peut être dérogé à la loi en vertu d’une convention particulière.
[14] Le Tribunal ne donnera donc pas suite à cette mention du contrat. Par conséquent, la garantie de durabilité prévue à l’article 38 L.p.c. s’applique à la vente du véhicule Hyundai à la demanderesse.
[15] Le bris du véhicule réparé au coût de 415,16 $ est intervenu moins de trois mois après l’achat du véhicule. La question de la durabilité s’apprécie en fonction des circonstances dont, entre autres, le prix payé. Laurie Slater était jeune au moment de l’acquisition de son véhicule, et c’était d’ailleurs son premier achat. Elle ne le faisait sûrement pas pour une durée limitée à trois mois. Dans les circonstances, il apparaît au Tribunal que la réparation effectuée chez Canadian Tire est couverte par la garantie de l’article 38 L.p.c. et devrait à tout le moins lui être remboursée.
[16] En ce qui concerne l’événement du lendemain de la réparation par Canadian Tire, la preuve présentée par la demanderesse est déficiente. Elle ne repose en effet que sur le seul témoignage de la demanderesse complété par celui de son père. Le Tribunal ignore absolument quelle est la nature du problème du véhicule Hyundai vendu, il ignore l’importance de ce vice. L’affirmation de la demanderesse est soumise sans qu’elle soit appuyée par l’opinion d’un garagiste ou d’un expert. Or, la demanderesse Slater n’est ni experte en mécanique ni experte en valeur de véhicules. En réalité, par son témoignage, elle essaie d’introduire ce qu’elle dit être l’opinion que lui auraient mentionnée verbalement les représentants de Canadian Tire. Il s’agit d’une preuve par ouï‑dire qui n’est pas acceptable.
[17] La demanderesse demande la nullité de la vente. Or, le Tribunal ignore si effectivement le véhicule est absolument sans valeur ou encore si une réparation d’un montant moindre ne serait pas suffisante et à quel montant précis.
[18] En vertu du Code civil du Québec, la demanderesse a le fardeau de démontrer les éléments essentiels qui fondent sa réclamation. Or, il y a absence de preuve qui permettrait au Tribunal de prononcer la résolution de la vente.
[19] Toutefois, la demanderesse a cependant assumé son fardeau quant au coût de la réparation qu’elle a déboursé auprès de Canadian Tire.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :
[20] CONDAMNE 9372-2913 Québec inc. à payer à la défenderesse Laurie Slater la somme de 415,16 $, avec intérêts au taux légal depuis la mise en demeure du 17 juin 2019, plus l’indemnité additionnelle prévue à l’article 1619 du Code civil du Québec;
[21] LE TOUT, avec les frais de justice de 103 $.
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| __________________________________ PIERRE SIMARD, J.C.Q. | |
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Date d’audience : | 25 octobre 2021 | |
[1] RLRQ c. P-40.1.
[2] RLRQ c. ccq-1991.
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