Décision

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Sher-Wood Hockey inc. c. Mathieu

2012 QCCS 5517

COUR SUPÉRIEURE

(Chambre Commerciale)

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE

ST_FRANÇOIS

 

 

N° :

450-17-004655-123

 

DATE :

29 octobre 2012

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SOUS LA PRÉSIDENCE DE

L’HONORABLE

MARTIN BUREAU, J.C.S.

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SHER-WOOD HOCKEY INC.

Demanderesse

c.

LOUIS-PHILIPPE MATHIEU

Défendeur

 

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MOTIFS RÉVISÉS DU JUGEMENT SUR INJONCTION INTERLOCUTOIRE

PRONONCÉ SÉANCE TENANTE LE 26 OCTOBRE 2012

 

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[1]           Le Tribunal est saisi d’une demande d’injonction interlocutoire provisoire.

[2]           La demanderesse est une personne morale régie par la Loi sur les sociétés par actions de l’Ontario. Elle œuvre dans la fabrication et la distribution de bâtons et d’équipement de hockey. La demanderesse a son siège social et une usine de fabrication d’équipement et de bâtons de hockey à Sherbrooke.

[3]           Depuis plus de 60 ans, la compagnie Sher-Wood produit et distribue de l’équipement de hockey, notamment des bâtons.  À travers le temps, les bâtons de hockey fabriqués par Sher-Wood ont acquis une grande réputation ce qui en fait une des marques les plus réputées dans le domaine.

[4]           Le défendeur a été à l’emploi de la demanderesse depuis le mois d’août 2009 jusqu’à la fin septembre 2012.  Au début, il a agi comme analyste d’affaires et depuis mai 2010, comme chef de produit, bâtons de hockey.

[5]           Le défendeur se décrit lui-même et décrit son travail et ce que ce travail lui a apporté de la façon suivante dans un projet de plan d’affaire pour sa nouvelle entreprise :

« Reconnaissant son potentiel, les dirigeants de Sher-Wood ont offert à Louis-Philippe le poste de chef de produit pour la catégorie bâtons de hockey, un poste crucial au succès de l’entreprise qu’il occupe depuis mai 2010. »

Et un peu plus loin,

« Finalement, le poste de chef de produit de la catégorie des bâtons a permis à Louis-Philippe d’identifier tous les fournisseurs de bâtons de hockey au monde, de tisser des relations solides avec 4 d’entre eux, d’apprendre à travailler avec des fournisseurs asiatiques et de développer ses connaissances de l’import de produits en provenance de l’Asie.  Aujourd’hui, Louis-Philippe est perçu comme un expert de l’industrie dans la catégorie des bâtons de hockey, comme le témoignent ses apparitions dans les magazines de Hockey News et Sports Net Magazine. »

[6]           La demanderesse lui reproche d’avoir  bâti une entreprise concurrente pendant qu’il était encore à son emploi et d’avoir développé des produits concurrentiels aux siens, c'est-à-dire des bâtons de hockey, pendant qu’il occupait ses fonctions de chef de produit.

[7]           De fait, le défendeur aurait informé en juillet 2012 le président de la demanderesse qu’il quittait son emploi pour s’investir dans une entreprise d’informatique avec un associé. Il est demeuré à l’emploi de la demanderesse à la demande de celle-ci, jusqu’en fin septembre 2012. 

[8]           Moins d’un mois plus tard, la demanderesse découvre que son ancien directeur de produit a mis en place une entreprise dont l’objectif est de la concurrencer en offrant des produits fort semblables, mais à un bien meilleur coût. 

[9]           Les recherches faites de toute urgence cette semaine par les employés de la demanderesse démontrent que le défendeur élabore son projet depuis près de deux ans  et qu’il a eu accès à des informations privilégiées, en raison de son emploi, tant sur les produits que sur leurs procédés de fabrication et de mise en marché.

[10]        La preuve démontre que pendant qu’il occupait un emploi clé chez la demanderesse, le défendeur a procédé avec un associé à toutes les étapes pour mettre en place, en secret, une entreprise concurrentielle à celle de la demanderesse. 

[11]        Il a, avec semble t’il un associé, créé un site web, commencé à établir un réseau de distribution, conçu et fait fabriqué des bâtons de hockey, lesquels semblent à plusieurs égards être le résultat final ou corrigé de prototypes envisagés et conçus par la demanderesse.

[12]        Le défendeur n’avait pas dans son contrat d’emploi de clause d’exclusivité ou de non-concurrence. 

[13]        Ces agissements, tant pendant qu’il était à l’emploi de la demanderesse que depuis qu’il a cessé son travail pour celle-ci, il y a moins d’un mois, dénotent des apparences de mauvaise foi et de déloyauté envers son ancien employeur.

[14]        La demanderesse invoque que le droit est clair en sa faveur, que le préjudice qui lui est causé par cette concurrence déloyale est irrémédiable et que si besoin est, la balance des inconvénients est en sa faveur. 

[15]        Le Tribunal considère que de façon très claire le défendeur semble avoir transgressé les normes minimales de loyauté envers un ex-employeur.  De plus, il est fort possible, et cela restera à déterminer, que les produits qu’il met en marché sous le nom de Avenzy, sont en partie des œuvres sur lesquelles la demanderesse peut invoquer des droits d’auteur. 

[16]        Il est difficilement quantifiable et à peu près impossible d’évaluer généralement le préjudice causé par une perte de clientèle, de sorte que les tribunaux arrivent souvent à la conclusion qu’une perte de clientèle est irrémédiable. 

[17]        Il y a aussi urgence à faire cesser cette concurrence qui est la résultante apparente de travaux réalisés par le défendeur à l’occasion ou pendant qu’il occupait une fonction clé et névralgique chez la demanderesse. 

[18]        Permettre, à ce stade-ci ou laisser au défendeur la possibilité de continuer sa mise en marché, la promotion de ses produits et leur vente serait cautionner des agissements, lesquels, selon toute la preuve présentée à ce stade-ci, apparaissent déloyaux et abusifs. 

[19]        Il y a urgence à ce que cesse cette concurrence déloyale et que les produits mis en marché ne le soient plus à court terme. 

[20]        Peut-être qu’après avoir entendu la preuve présentée par le défendeur, au stade de l’interlocutoire, il y aura lieu de changer d’idée, mais à ce stade-ci, avec les éléments présentés, la preuve est accablante à l’encontre du défendeur. 

[21]        Il y a également des demandes en ce qui concerne le retour de biens ou le retour de documents.  Le Tribunal ne considère pas à ce stade-ci qu’il y a urgence en ce sens.  Il y a plutôt urgence à faire cesser la concurrence déloyale. En ce qui concerne le reste des demandes, elles pourront être étudiées lors de l’interlocutoire. 

PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

[22]        ACCUEILLE partiellement la requête en injonction interlocutoire provisoire; 

[23]        ORDONNE au défendeur, à ses associés et partenaires, à ses employés, distributeurs ou représentants de cesser de promouvoir, mettre en marché, distribuer, utiliser ou vendre tout bâton de hockey de marque Avenzy, quelque soit le modèle et plus particulièrement les modèles V300, V400 et V500;

[24]        ORDONNE au défendeur à ses associés et partenaires de cesser d’utiliser le site web Avenzy.com ou tout autre site web pour promouvoir, mettre en marché, distribuer ou vendre tout bâton de hockey de marque Avenzy;

[25]        ORDONNE au défendeur personnellement ou par l’entremise de la dénomination sociale Avenzy de cesser d’utiliser toute information confidentielle obtenue ou provenant de la demanderesse sur quelque support que ce soit;

[26]        ORDONNE au défendeur d’aviser sans délai ses associés, partenaires, employés, distributeurs ou représentants de l’obligation de cesser immédiatement de mettre en marché, promouvoir, vendre, distribuer tout bâton de hockey Avenzy tel entre autres, mais sans restriction les modèles V300, V400, V500;

[27]        ORDONNE au défendeur de cesser de solliciter de quelque façon que ce soit, directement ou indirectement, par quelque moyen que ce soit toute personne qui était cliente, fournisseur et/ou personne contact de la demanderesse au 28 septembre 2012 ;

[28]        ORDONNE que cette injonction interlocutoire provisoire soit valable pour une durée de 10 jours à compter du 26 octobre 2012;

[29]        PERMET à la demanderesse de signifier le jugement par huissier, par courrier recommandé ou certifié ou en laissant copie en personne ou sous l’huis de la porte et ce, même en dehors des heures légales de signification;

[30]        DISPENSE la demanderesse de fournir caution;

[31]        ORDONNE l’exécution provisoire du jugement, nonobstant appel;

[32]        REMET la présentation de la demande d’injonction interlocutoire au lundi 5 novembre 2012;

[33]        LE TOUT frais à suivre le sort de l’instance principale.

 

 

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MARTIN BUREAU, J.C.S.

 

Me Martin Tétreault

Heenan Blaikie

Procureure de la demanderesse

 

 

 

 

Date d’audience :

Le 26 octobre 2012

 

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