[1] L’appelante se pourvoit contre un jugement rendu le 6 octobre 2009 par la Cour supérieure, district de Montréal (l’honorable J. Fraser Martin), qui a infirmé un jugement rendu le 10 novembre 2008 par la Cour du Québec, district de Montréal (l’honorable Serge Boisvert), condamnant l’intimée sous 56 constats d’infraction sous la Loi sur la distribution des produits et services financiers, L.R.Q., ch. D-9.2.
[2] Pour les motifs des juges Kasirer et Cournoyer :
LA COUR :
[3] REJETTE la partie de la requête pour permission d’appeler déférée à la formation;
[4] ACCUEILLE l'appel;
[5] INFIRME le jugement de la Cour supérieure;
[6] RÉTABLIT les condamnations de l'intimée prononcée par la Cour du Québec.
[7] De son côté, pour d’autres motifs, le juge Dalphond aurait REJETÉ la requête pour permission d’appeler quant aux moyens déférés à la formation et REJETÉ l’appel.
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MOTIFS DU JUGE DALPHOND (DISSIDENT) |
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[8] J'ai pris connaissance des motifs rédigés par mon collègue le juge Cournoyer. Malheureusement, je ne peux y souscrire, d’avis que le jugement de la Cour supérieure acquittant l’intimée, La Souveraine, Compagnie d’assurance générale, est bien fondé.
[9] Je retiens de la preuve les aspects suivants.
[10] La Souveraine est une compagnie d’assurance de l’Alberta. Son modèle d’affaires est la délivrance de polices par l’entremise d’un certain nombre de courtiers de confiance, dont Flanders Insurance Management and Administrative Services Ltd. de Winnipeg (Flanders). Elle détient depuis 1999 un permis d’exercice délivré par l'AMF sous la Loi sur les assurances, L.R.Q., ch. A-32, qui l’autorise à offrir de l’assurance au Québec où elle a une place d’affaires et un fondé de pouvoir. Elle peut donc y émettre des polices directement quoique, à ce jour, elle n'ait agi au Québec que par l'intermédiaire de courtiers. Son représentant québécois confirme qu'elle s'assure que les courtiers autorisés à délivrer en son nom des polices dans la province sont détenteurs des inscriptions et certificats requis sous la Loi sur la distribution de produits et services financiers, L.R.Q., ch. D-9.2 (LDPSF).
[11] Parmi les produits offerts par La Souveraine, on trouve des polices collectives d’assurance de biens. En septembre 2004, GE financement commercial aux détaillants (GE), une entreprise de Toronto qui finance, entre autres, les inventaires de véhicules récréatifs chez des centaines de commerçants canadiens, avise ces derniers qu’elle a opté pour une nouvelle police-cadre, par l’entremise de Flanders, couvrant les inventaires de véhicules récréatifs qu’elle finance à travers le pays. Une police maîtresse, portant le no SOV79470563 est ainsi délivrée par Flanders pour le compte de La Souveraine à GE.
[12] À l’invitation de GE, 56 commerçants québécois ont adhéré à cette police, et ce, par l’entremise de Flanders. Il est à noter que les commerçants financés par GE ont l’obligation d’assurer les inventaires au bénéfice de cette dernière et que l’adhésion à la police-cadre leur permet de satisfaire cette obligation pour un montant apparemment très compétitif, facturé mensuellement par GE aux commerçants adhérents et remis ensuite par GE à Flanders. Le commerçant québécois qui adhère n'obtient une couverture que pour les inventaires qui sont la propriété de GE. Les certificats délivrés aux adhérents québécois désignent GE comme « assuré », le commerçant comme « titulaire du certificat » et Flanders le « gestionnaire du régime » [1]. La preuve établit enfin qu'en aucun temps, un commerçant québécois n'a contracté, par l'entremise de Flanders, une police qui couvrirait tout autre bien que ceux appartenant à GE[2].
[13] La mise en place de cette nouvelle police-cadre fruste le courtier qui offrait l'ancienne couverture, HED Arcand Hayhurst Associés inc, aussi de Winnipeg. Le courtier éconduit par GE dépose alors des plaintes contre son rival, Flanders, et GE, auprès des autorités de régulation de quelques provinces, dont l’AMF. La plainte déposée à l'AMF reproche à GE de solliciter et vendre de l’assurance, de recevoir des commissions de Flanders et de ne pas exiger la taxe provinciale de 9 % sur les primes perçues des commerçants québécois. Aucune référence à La Souveraine. Les plaintes ont été rejetées dans les autres provinces en début de 2005.
[14] Dans le cadre de son enquête débutée en janvier 2005 à la suite de la plainte, l'AMF a demandé diverses informations à La Souveraine en avril 2005. Celle-ci a alors pleinement collaboré. À aucun moment, on ne lui a mentionné qu’elle faisait aussi l’objet d’une enquête.
[15] C'est dans ce contexte que La Souveraine a communiqué le 10 juin 2005 à l'AMF la liste des commerçants québécois qui ont adhéré à la police collective délivrée à GE. Dans cette lettre, La Souveraine explique en long et en large la nature de cette police, notamment l'endroit de sa négociation (l'Ontario), les parties à celle-ci (La Souveraine, une compagnie d'assurance albertaine, et GE, une entreprise basée en Ontario), la nature des biens couverts et le fait qu’ils demeurent jusqu’à leur vente par un commerçant la propriété de GE. Elle souligne aussi que la perception des primes est faite par GE qui les remet à Flanders. Elle précise que, en cas de sinistre, l'indemnité sera versée en Ontario par La Souveraine à GE. La date d'expiration de la couverture pour les biens au Québec, le 1er septembre 2005, est aussi bien indiquée.
[16] Le juge du procès énonce la conclusion factuelle suivante quant au contexte de cette lettre au par. 59 de son jugement :
[59] La lettre de la défenderesse à l'AMF datée du 10 juin 2005 (P-65) est manifestement une réponse préparée en collaboration avec Flanders, vu la similarité entre les termes de cette lettre et ceux utilisés par les procureurs de Flanders dans des lettres de décembre 2004 et janvier 2005 (P-66) adressées aux autorités réglementaires d'autres provinces, malgré l'affirmation contraire de Robert G. Phillips. Ces lettres confirment que La Souveraine et Flanders partageaient l'opinion que les contrats couvrant les inventaires n'étaient pas soumis aux lois québécoises, et ce, antérieurement au renouvellement des certificats d'assurance le 25 août 2005.
[je souligne]
[17] En d’autres mots, La Souveraine s’est questionnée, a consulté Flanders et a bénéficié des avis juridiques reçus par cette dernière avant de conclure que la délivrance au Québec de certificats d’adhésion à la police collective émise à GE n’exigeait pas que le courtier intermédiaire soit inscrit auprès de l’AMF puisqu’il ne s’agissait pas de la délivrance d’une police au Québec.
[18] À la suite de la réception de cette lettre, l’AMF garde le silence, et ce, jusqu’en janvier 2006, moment où elle poursuivra La Souveraine. Entre-temps, soit le 25 août 2005, Flanders délivre aux 56 commerçants québécois ayant adhéré à nouveau à la police collective des certificats prenant effet le 1er septembre 2005, valides pour douze mois.
[19] En janvier 2006, 56 constats d’infractions sont portés contre La Souveraine, à la suite de l'opinion du contentieux de l'AMF donnée en décembre 2005 que les certificats délivrés le 25 août 2005 à 56 marchands québécois par Flanders au nom de La Souveraine constituaient autant d'infractions par cette dernière à l'art. 482 LDPSF. Les constats sont ainsi rédigés :
À [localité] et ses environs, dans le district
judiciaire de [localité], le ou vers le 25 août 2005, a consenti et/ou autorisé
Flanders Insurance Management and Administrative Services Ltd., un cabinet non
inscrit auprès de l'Autorité des marchés financiers, à délivrer à [nom de l’adhérent]
une police d'assurance sur les stocks, numéro […], le tout en contravention à
l'article
[20]
Le 10 novembre 2008, le juge de la Cour du Québec a déclaré La
Souveraine coupable des 56 infractions et l’a condamnée à 560 000 $[3],
d’avis qu’elle avait participé intentionnellement à la délivrance de polices
d’assurance au Québec par un courtier non autorisé à y faire affaires (
[63] La défenderesse n'a fait valoir aucune démarche qu'elle aurait entreprise pour s'assurer ou pour vérifier si sa police d'assurance sur les inventaires était régie par la loi québécoise et elle semble s'être fiée entièrement aux affirmations de Flanders à ce sujet.
[21]
Le juge de la Cour supérieure, forum d’appel en vertu de l’art.
[22]
Un collègue de la Cour a autorisé, sous l’art.
[23] L'autorisation d'appeler se comprend aisément à l'égard de la mens rea, puisqu'il s'agit d'une pure question de droit sur laquelle les instances inférieures sont divisées. Le juge de première instance a conclu au par. 44 de son jugement que l'infraction prévue à l'art. 482 LDPSF constituait une infraction de responsabilité stricte et n'exigeait pas la preuve d'une mens rea; subsidiairement, si elle était requise, il semble dire qu'elle a été démontrée aux par. 45 et 61. Le juge de la Cour supérieure a conclu que les mots utilisés à l’art. 482 et la nature de l’infraction « aider » ou « amener » commandaient la preuve par l’AMF d'une mens rea spécifique, fardeau dont elle ne s'était pas déchargée (par. 172). Subsidiairement, il écrit que s'il s'agit d'une infraction de responsabilité stricte, une défense de diligence raisonnable a été démontrée par La Souveraine (par. 120-122).
[24] Il demeure cependant que le juge de la Cour supérieure, avant de traiter de la mens rea, a d’abord conclu à l’absence de preuve hors de tout doute raisonnable d’un actus reus en ces termes :
[140] The operative words of "aiding" and "inducing" are however of prime importance in the resolution of this matter. The role that they play in relation to the culpability of the appellant is pivotal. In my view, these words indicate the requirement for some sort of voluntary action on the part of the accused as an essential element of the offence and secondly they also invest the offence with a mens rea component. I will deal with these points one by one.
[141] Quite independently of whether or not a regulatory offence has some mens rea component to it the fact remains that proof of each element of the actus reus must always be established beyond a reasonable doubt. As Mewett and Manning point out in Criminal Law 2nd edition, 1985, Butterworth, Toronto, even offences of strict liability require an actor to do something. I would add to that that liability would also be engaged if the actor omitted to do something that it has a statutory duty to do. That latter notion, however, does not concern us in the case at bar.
[142] The evidence is to the effect that the appellant played a totally passive role throughout the unfolding of the events giving rise to this prosecution. In the introductory paragraphs of this decision I reproduced the resume of the facts relied upon by the first judge. I also cited Phillips' letter of June 10th, 2005 to Turgeon setting out in detail the role of the appellant.
[143] From a review of the evidence and particularly that relied on by the first judge I cannot but conclude that the appellant played no active role with regard either the solicitations made by Flanders to the Quebec participants nor in relation to issuance or the delivery of the certificates of participation. Indeed its role in relation with the Canada wide "floor plan" program including Quebec was merely one, which I would qualify as "ongoing recordkeeping" reflecting information conveyed from time to time by Flanders.
[144] The wording of the statute clearly requires evidence of "helping" or "inducing". There is nothing in the evidence to support the conclusion that the appellant did any such thing. True it did not decline to participate in the program in Quebec. It did not decline to do so because it did not believe that Flanders required to be licensed in Quebec with regard to the "floor plan" coverage. The fact that the appellant did not refuse to participate is however a long way from engaging the operative words of the statute. On this basis alone an acquittal should have been entered with regard to all of the counts.
[je souligne]
[25] Comme l'autorisation d'appeler ne porte pas sur l'actus reus, ni les quatre autres moyens énoncés dans la requête de l'AMF déférés à la Cour, on pourrait soutenir que l'acquittement doit être maintenu. En effet, la requête de l'AMF soulève cinq moyens, ainsi rédigés :
a) Le juge de la Cour supérieure a-t-il erré en droit en concluant que l'assurance collective de dommages pouvait légalement être distribuée au Québec malgré les dispositions d'ordre public dictées tant par le Code civil du Québec que de la LDPSF?
b) Le juge de la Cour supérieure a-t-il erré en droit en imposant un fardeau de responsabilité de mens rea spécifique pour l’infraction édictée à l’article 482 de la LDPSF?
c) Le juge de la Cour supérieure a-t-il erré en droit en substituant son appréciation des faits en litige à celle du juge de la Cour du Québec en l'absence d'une erreur manifestement déraisonnable?
d) Le juge de la Cour supérieure a-t-il erré en droit en imposant à l'Appelante l'obligation d'aviser préalablement l'Intimée du fait qu'elle contrevenait à la LDPSF?
e) Enfin, le juge de la Cour supérieure a-t-il erré en droit en concluant que l’infraction sous-jacente reprochée à Flanders n'avait pas été démontrée hors de tout doute raisonnable alors que ce cabinet a plaidé coupable à tous les chefs portés contre elle et que la Souveraine a admis les éléments constitutifs de ces infractions?
[26] Tel qu'indiqué précédemment, le juge d'autorisation n'a autorisé que le moyen b). Si le moyen c) peut, en apparence, s'appliquer à l'égard de la preuve de l'actus reus, il ressort cependant de la requête de l'AMF qu'il ne porte que sur la conclusion subsidiaire du juge du procès qu'une mens rea spécifique, si requise, a été établie hors de tout doute raisonnable. D'ailleurs dans leurs mémoires et leurs représentations orales, les parties n’ont pas traité de l'actus reus.
[27] Dans ces circonstances, on peut en déduire soit qu'il n'y a pas de contestation que l'actus reus a été démontré, et que le juge de la Cour supérieure a erré sur ce point, soit que le pourvoi, en y ajoutant le moyen c), vise à déterminer tous les éléments de l'infraction prévue à l'art. 482 LDPSF, incluant le fardeau de la poursuivante, l'AMF, et celui de l'accusée, La Souveraine. Sur la première option, aucune concession de cette nature n’a été faite par l'intimée dans son mémoire ou dans ses représentations devant nous. Seul son silence et son défaut de plaider que l’appel est purement théorique peuvent, peut-être, permettre de conclure, implicitement, à une telle concession. J’ajoute que la Cour supérieure n’aurait pu conclure en l'absence de démonstration de l'actus reus, si celui-ci avait été admis par La Souveraine? Sur la deuxième option, cela découle, sans doute, implicitement de la conclusion recherchée par l'appelante, mais pas clairement.
[28] Une chose est certaine, un accusé ne peut perdre le bénéfice d'un acquittement pour défaut de preuve de l'actus reus par une conclusion de notre Cour qui se contenterait de conclure que la mens rea n'avait pas à être démontrée.
[29] En somme, il s'agit, probablement, d'un pourvoi mal engagé et, par prudence, je traiterai tant de l'actus reus que de la mens rea.
[30] L’infraction est ainsi décrite à l’art. 482 LDPSF :
482. Un assureur qui aide ou, par un encouragement, un conseil, un consentement, une autorisation ou un ordre, amène un cabinet, ou un représentant autonome ou une société autonome par l’entremise de qui il offre des produits d’assurance, ou un dirigeant, administrateur, associé, employé ou représentant de ce cabinet ou de cette société autonome, à enfreindre une disposition de la présente loi ou de ses règlements commet une infraction.
Il en est de même de tout administrateur, dirigeant, employé ou mandataire d’un assureur.
[je souligne] |
482. Every insurer that helps or, by encouragement, advice or consent or by an authorization or order, induces a firm or an independent representative or independent partnership through which it offers insurance products or an executive officer, director, partner, employee or representative of such a firm or independent partnership to contravene any provision of this Act or the regulations is guilty of an offence.
The same applies to any director, executive officer, employee or mandatary of an insurer.
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[31] Une lecture attentive de l’art. 482 permet de dégager que le législateur a voulu interdire et sanctionner deux comportements d'un assureur qui se rapprochent, mais demeurent distincts, soit aider un cabinet à enfreindre la LDPSF, soit amener un cabinet à enfreindre la LDPSF[4].
[32] Il s'agit d'une infraction grave puisqu'elle implique un joueur clé, un assureur, qui aide ou amène un joueur secondaire, un cabinet ou autre intermédiaire autonome, à violer le cadre réglementaire applicable aux activités de ce dernier. On comprend alors pourquoi le législateur y attache les plus importantes amendes prévues à la LDPSF.
[33] À l'époque pertinente, la sanction applicable est la suivante :
490. Un assureur déclaré coupable de l’infraction visée à l’article 480 ou 482 est passible d’une amende d’au moins 10 000 $ et d’au plus 50 000 $ et, en cas de récidive, d’une amende d’au moins 20 000 $ et d’au plus 100 000 $.
[je souligne]
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490. An insurer convicted of an offence under section 480 or 482 is liable to a fine of not less than $10,000 and not more than $50,000 and, for every subsequent offence, to a fine of not less than $20,000 and not more than $100,000. |
Elle constitue la peine minimale la plus sévère alors prévue à la LDPSF.
[34] La peine actuellement en vigueur, que l'on trouve à l'art. 487 LDPSF, qui remplace l'art. 490 cité au paragraphe précédent à la suite de l'adoption de la Loi modifiant diverses dispositions législatives afin principalement de resserrer l'encadrement du secteur financier, L.Q. 2009, ch. 58, va encore plus loin :
487. Un assureur déclaré coupable de l'infraction visée à l'art. 480 ou 482 est passible d'une amende minimale, selon le plus élevé des montants, de 10 000 $, du double du bénéficie réalisé ou du cinquième des sommes qui lui ont été confiées ou qu'il a perçues. Le montant maximal de l'amende est, selon le plus élevé des montants, de 200 000 $, du quadruple du bénéfice réalisé ou de la moitié des sommes qui lui ont été confiées ou qu'il a perçues.
En cas de récidive, les amendes minimales et maximales sont portées au double.
[je souligne]
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487. An insurer convicted of an offence under section 480 or 482 is liable to a minimum fine of $10,000, double the profit realized or one fifth of the sums entrusted to or collected by the person, whichever is the greatest amount. The maximum fine is $200,000, four times the profit realized or half the sums entrusted to or collected by the person, whichever is the greatest amount.
In the case of a second or subsequent conviction, the minimum and maximum fines are doubled.
|
[35] Je souligne au passage que le délinquant primaire, Flanders, a été poursuivi sous l’art. 462 LDPSF (agir comme cabinet sans être inscrit auprès de l’AMF). Chacun des constats indique une peine minimale de 1 000 $ et une peine maximale de 25 000 $. Flanders a plaidé coupable aux 210 chefs. Elle a été condamnée à payer à l'AMF des amendes totalisant 210 000 $ (1 000 $ par chef, soit l’amende minimale).
[36] Je traiterai maintenant des deux composantes de l'infraction prévue à l'art. 482, d'abord la mens rea, puis l'actus reus.
i) La mens rea
[37]
Les infractions créées par la LDPSF et la présence d’amendes
minimales s'inscrivent dans un encadrement réglementaire robuste visant à en
assurer le respect, et ce, généralement par des entreprises. Clairement,
l’ensemble de la LDPSF vise l’encadrement du secteur de la distribution
des produits d’assurance afin de protéger les consommateurs (Marston c.
Autorité des marchés financiers,
[38]
Il s’agit d’une législation adoptée pour la protection de la
collectivité afin d’inciter les participants à se conformer à des normes de
qualité et d’intégrité, soit le genre de lois provinciales auxquelles la Cour
suprême reconnaît aisément qu’elles créent des infractions de responsabilité
stricte depuis l'arrêt R. c. Sault Ste-Marie,
[39]
Le juge de la Cour supérieure voit dans les mots « aide » et
« amène » de l'art. 482 LDPSF l’indication d’une volonté
d’exiger de la poursuite la preuve d’une mens rea. Certes, ces mots
importent l’idée d’un acte positif et volontaire, mais cela n’implique pas
aussi la preuve d’une intention coupable par la poursuite. Il ne faut pas
confondre l’aspect volontaire de l’acte prohibé et son effet (éléments de l’actus
reus), et l’intention subjective qui caractérise la mens rea (Lavoie
c. Ordre des chiropraticiens du Québec,
[40] Tout en reconnaissant cela, l’avocat de La Souveraine affirme qu’il doit en aller autrement pour l’infraction de complicité par laquelle on tente d’obtenir la condamnation non pas du délinquant primaire, mais d’un tiers qui l’a aidé ou incité à commettre une infraction de responsabilité stricte, le délinquant secondaire. Selon lui, la common law, telle que comprise tant en Angleterre qu’en Australie et en Nouvelle-Zélande, enseigne que la mens rea est toujours requise pour obtenir la condamnation d’un complice à une infraction de responsabilité stricte. Il n’en irait d’ailleurs pas autrement au Canada et l'avocat cite à l’appui de sa proposition deux arrêts de la Cour d’appel de l’Ontario : R. v. F.W. Woolworth Co. Ltd. (1974), 3 O.R. (2d) 629 et R. v. Fell (1982), 34 O.R. (2d) 665. Il concède que le législateur peut cependant écarter ce principe.
[41] Cette thèse est peut-être vraie à l'égard de l'interprétation de l'art. 491 LDPSF, vu sa similarité avec les al. 21(1)b) et c) du Code criminel :
491. Celui qui, par son acte ou son omission, aide ou amène quelqu'un à commettre une infraction est coupable de cette infraction comme s'il l'avait commise lui-même. Il est passible de la même peine que celle prévue pour l'infraction qu'il a aidé ou amené à commettre.
La même règle s'applique à celui qui, par des encouragements, des conseils ou des ordres, amène quelqu'un à commettre une infraction.
[je souligne]
|
491. A person who, by an act or omission, helps or induces another person to commit an offence is guilty of the offence as if the person had committed it. The person is liable to the same penalty as that prescribed for the commission of the offence.
The same applies to a person who, by encouragement or advice or by an order, induces another person to commit an offence.
|
[42] Quoi qu'il en soit, elle ne tient pas à l'égard de l'art. 482 qui, contrairement à l’art. 491, ne vise pas toute forme de complicité par qui que ce soit, mais uniquement celle qui résulte d’un acte positif (puisque le mot omission n'y apparaît pas), et ce, d’un assureur, une personne qui s’adonne à une activité réglementée, aidant ou amenant un cabinet ou autre intermédiaire, à ne pas se conformer au régime réglementaire.
[43]
Je ne peux me convaincre que le législateur a voulu une responsabilité
autrement que stricte pour ce genre d’infraction bien particulière qui va à
l’essence du système mis en place et ne vise qu’un acteur principal de
celui-ci, l'assureur, une personne qui accepte de participer à une activité
hautement encadrée, et ce, dans le meilleur intérêt des consommateurs (R. c.
Wholesale Travel Group Inc.,
[44] J’en conclus donc que l’infraction prévue à l’art. 482 LDPSF est de responsabilité stricte.
[45] Je m'empresse par contre d'ajouter que le même texte ne comporte aucune expression d’une volonté législative de créer un régime de responsabilité absolue.
ii) L'actus reus
[46]
Le législateur ne définit pas ce qui peut constituer un acte d’aide. On
peut cependant s’en remettre à la jurisprudence sous l’al.
[47]
Il faut cependant un acte positif puisqu'une omission ne saurait
constituer une forme d’aide sous l’art. 482. En effet, lorsque le
législateur veut inclure l'omission d'agir, il le précise comme il l’a fait à
l’art. 491 LDPSF, disposition du même titre de la même loi. Selon
le principe de la cohérence, il faut en retenir que l'infraction de
l'art. 482 vise les actes positifs mais non les omissions (Pierre-André
Côté,
[48] Quant aux actes qui peuvent constituer l’actus reus suffisant pour conclure que l’assureur a amené une violation par un cabinet ou autre intermédiaire, le législateur s’est fait très précis : il faut un encouragement, un conseil, un consentement, une autorisation ou un ordre.
[49] Cela dit, il demeure que l’utilisation des mots « aide » et « amène » à l'art. 482 LDPSF est indicative de la volonté du législateur que le poursuivant démontre, hors de tout doute raisonnable, un acte positif d’aide ou d’incitation (helping or inducing), en d’autres mots, un geste positif d'un assureur ayant pour effet d’aider ou d’amener un cabinet à enfreindre la LDPSF.
[50] Clairement, l'art. 482 ne fait pas de l'assureur un garant du respect de la LDPSF par les cabinets avec qui il a une relation d'affaires. Au contraire, il exige de lui une participation active à la violation de la loi par un cabinet ou autre intermédiaire.
[51] Seul l'aspect participation active peut d'ailleurs expliquer la sévérité de la peine minimale imposée par la LDPSF à l’assureur (à l'époque 10 000 $) par rapport à celle applicable au cabinet ou autre intermédiaire qui lui fait le geste interdit, soit le délinquant primaire (à l'époque 1 000 $). Le fait que pour une même illégalité, la peine pour l'assureur soit 10 fois celle du courtier dénote clairement que ce dernier doit avoir agi sous la dictée du premier.
[52] Il s'ensuit que, pour obtenir une condamnation, le poursuivant (l'AMF ou le ministère public, selon le cas) doit établir, hors de tout doute raisonnable, les trois éléments matériels suivants :
i) des gestes ou un comportement d'un cabinet constituant une infraction à la LDPSF;
ii) un acte positif d'un assureur (dans le cas d'une accusation d'amener, cet acte doit être un encouragement, un conseil, un consentement, une autorisation ou un ordre bref un geste d’incitation); et
iii) le fait que cet acte a aidé ou a amené le cabinet à poser les gestes reprochés ou à adopter le comportement reproché.
[53] Il n’est cependant pas nécessaire que la poursuite établisse que l'assureur savait que les gestes en question du cabinet seraient constitutifs d’une infraction au sens de la LDPSF vu l'absence de mens rea. Il suffit que l'assureur ait participé activement aux gestes illégaux du cabinet. En d'autres mots, le législateur veut que les assureurs, avant qu'ils n'aident ou n'amènent des cabinets à poser des gestes, s'assurent que ces gestes soient conformes à la LDPSF. Il ne fait cependant pas, je le répète, de l'assureur un garant du respect de cette loi par les cabinets ou autres intermédiaires agissant en son nom.
[54] Ici, il n’y a aucune preuve hors de tout doute raisonnable (ni même un mince indice) d’un acte positif d’aide par La Souveraine à la sollicitation de commerçants au Québec par Flanders durant l'été 2005 ou à l’émission à ceux-ci de certificats le 25 août 2005, comme le souligne le juge de la Cour supérieure.
[55] De même, il n'y a aucune preuve ou même indice d’un ordre donné à Flanders en regard des certificats délivrés en août 2005, ni preuve ou indice d'un conseil, d'un encouragement, d'un consentement ou d'une autorisation ayant eu pour effet d’inciter Flanders à contacter des commerçants québécois ou à leur délivrer des certificats.
[56] Ce n’est d’ailleurs pas sans raison que le juge du procès s’en tient à un acquiescement passif de La Souveraine aux gestes de Flanders. Je trouve significatif qu'il écrive :
[57] La preuve est muette sur les démarches effectuées par la défenderesse pour s'assurer de la légalité des opérations effectuées par Flanders au Québec, mais confirme plutôt que La Souveraine a partagé l'opinion de Flanders à l'effet que les contrats P-1 à P-56 n'étaient pas soumis aux lois du Québec et que Flanders n'avait pas à être licencié au Québec pour offrir aux concessionnaires québécois de GE des plans d'assurance inventaires.
[58] La preuve révèle que la défenderesse, qui recevait mensuellement une liste des certificats émis par Flanders aux concessionnaires de GE, savait en 2005 qu'elle assurait des biens situés au Québec dans lesquels GE avait un intérêt conjoint avec les concessionnaires québécois.
[59] La lettre de la défenderesse à l'AMF datée du 10 juin 2005 (P-65) est manifestement une réponse préparée en collaboration avec Flanders, vu la similarité entre les termes de cette lettre et ceux utilisés par les procureurs de Flanders dans des lettres de décembre 2004 et janvier 2005 (P-66) adressées aux autorités réglementaires d'autres provinces, malgré l'affirmation contraire de Robert G. Phillips. Ces lettres confirment que La Souveraine et Flanders partageaient l'opinion que les contrats couvrant les inventaires n'étaient pas soumis aux lois québécoises, et ce, antérieurement au renouvellement des certificats d'assurance le 25 août 2005.
[60] La défenderesse a donc autorisé, permis ou consenti à ce que Flanders délivre des polices d'assurance sachant que cette dernière n'avait pas les permis requis. Cette délivrance ne s'est pas faite à l'insu de la défenderesse.
[je souligne]
[57] En somme, aucune preuve que La Souveraine a amené par un quelconque geste positif Flanders à violer la LDPSF ou a aidé Flanders à solliciter ou délivrer des certificats. Elle a tout simplement partagé l'opinion de Flanders et de ses conseillers et laissé cette dernière continuer sa pratique après l'avoir expliquée à l'AMF qui n'a pas réagi. On lui reproche donc essentiellement son défaut de retirer au courtier durant l'été 2005 l’autorité pour continuer d’émettre des certificats à des commerçants québécois. En d'autres mots, une omission d'agir. Un tel comportement pourrait, peut-être, justifier une condamnation sous l'art. 491, mais l'AMF a choisi de poursuivre sous l'art. 482, ce qui lui permettait, en cas de condamnation, d'encaisser des amendes beaucoup plus importantes, mais exigeait d'elle la preuve hors de tout doute raisonnable d'un acte positif qui a aidé ou amené Flanders à délivrer les renouvellements.
[58] Dans ces circonstances, je partage la conclusion du juge de la Cour supérieure que le juge de la Cour du Québec a commis une erreur de droit au niveau de l’actus reus en confondant « acte positif d'encouragement » et « omission d'agir ». En l’espèce, La Souveraine a omis de restreindre l’autorité de Flanders d'émettre des certificats afin d’exclure la province de Québec, alors qu'elle croyait honnêtement et de bonne foi[5] que Flanders pouvait y délivrer des certificats aux adhérents à la police-cadre convenue avec GE comme elle faisait ailleurs au Canada où les plaintes du courtier éconduit avaient été rejetées.
[59] En réalité, cela dit avec égards, le juge du procès a fait de La Souveraine un garant du respect de la LDPSF par le cabinet Flanders, ce qui n'est pas l'objet de l'art. 482. Il faut ajouter que le juge du procès a pu être induit en erreur par le libellé des constats d'infraction qui modifie la nature de l'infraction en utilisant de façon vague et large les mots « a consenti et/ou autorisé Flanders (…) à délivrer (…) une police » plutôt que de dire a amené Flanders par un consentement ou une autorisation à délivrer une police, ce qui aurait fait ressortir la nécessité de prouver un acte positif ayant amené Flanders à délivrer des certificats en août 2005.
[60] Pour ce motif, l'acquittement sous les 56 chefs s’imposait, comme en a décidé le juge Martin de la Cour supérieure.
[61]
Puisque nous sommes en présence d’une infraction de responsabilité
stricte et tenant pour acquis aux fins de l'analyse que l'actus reus a
été établi (ce qui n'est pas le cas selon le jugement de la Cour supérieure,
conclusion que je partage), cela signifie que le degré de faute requis est
réputé prouvé. Il revient alors à La Souveraine d’établir, selon la balance des
probabilités, un moyen de défense valide puisque le principe selon lequel une
peine ne doit pas être infligée à ceux qui n’ont commis aucune faute demeure applicable
(Sault Ste-Marie, précité, p. 1326; Lévis (Ville) c. Tétreault;
Lévis (Ville) c. 2629-4470 Québec inc.,
[62] Quant à l'aspect responsabilité, les moyens de défense d’un accusé à une infraction de responsabilité stricte se limitent à l'erreur provoquée par une personne en autorité et à la diligence raisonnable. Cette dernière s’articule, selon la jurisprudence, autour de deux axes : i) la démonstration que l'accusé croyait pour des motifs raisonnables à un état de fait inexistant qui, s’il avait existé, aurait rendu l’acte ou l’omission innocent[6], ou ii) la démonstration qu'il a pris toutes les précautions raisonnables pour éviter l’événement en question (Sault Ste-Marie, p. 1326; Lévis (Ville), par. 15).
[63] En l'espèce, La Souveraine prétend avoir fait preuve de diligence raisonnable dans les circonstances[7].
[64] Comme le souligne le juge LeBel pour la Cour suprême dans Lévis (Ville), au par. 30 : « Le concept de diligence repose sur l’acceptation d’un devoir de responsabilité du citoyen de chercher activement à connaître les obligations qui lui sont imposées ». Cela requiert de l'accusé de démontrer qu'il a fait montre dans sa conduite du même degré de diligence qu’une personne raisonnable placée dans des circonstances similaires aurait démontré, une norme objective (Lévis (Ville), par. 15), et non du plus haut degré possible de diligence.
[65] Il faut donc déterminer si La Souveraine a démontré, par la balance des probabilités, avoir eu un comportement conforme à cette exigence.
[66] Avec égards pour la position contraire, je suis d’avis que le juge de la Cour supérieure, après avoir pris en considération l'ensemble des faits, contrairement au juge du procès[8], pouvait conclure raisonnablement que La Souveraine avait fait preuve de diligence raisonnable.
[67] D'abord, il n’y a aucun indice que La Souveraine a tenté d'éviter de se conformer à la loi ou ne s'est pas préoccupée des exigences légales. Au contraire, la preuve indique qu’elle est soucieuse du respect de la LDPSF et des autres lois provinciales applicables à elle au Québec.
[68] Ensuite, elle n'a pas fait preuve d'insouciance quant à la délivrance en 2005 de certificats de renouvellement par Flanders. Au contraire, à la suite de la demande d'information de l'AMF, elle a cherché activement à se conformer à la loi :
- analyse de son produit (couverture uniquement de biens appartenant à GE, une entreprise ontarienne; paiement des primes par GE (Ontario) à Flanders (Manitoba); indemnité payable à GE);
- prise en considération de son traitement dans les autres provinces;
- questions à Flanders et obtention d'avis que les certificats n'étaient pas couverts par la LDPSF.
[69] Ce n'est qu'après cet exercice qu'elle a conclu que la délivrance à des commerçants québécois liés à GE d'un certificat de renouvellement confirmant que les produits de GE dans leur inventaire étaient assurés à nouveau en vertu de la police-cadre délivrée à GE ne constituait pas la délivrance d’un contrat d'assurance régi par les lois du Québec.
[70] De plus, La Souveraine a bien exposé sa position à l’AMF dans sa lettre du 10 juin 2005, résumée au début de ces motifs. En aucun temps, elle n’a cherché à dissimuler la réalité du produit offert, sa compréhension de la situation et son modèle d'affaires pour ce produit. Le silence subséquent de l'AMF n'a fait que la réconforter dans sa conclusion que la délivrance des certificats n'étaient pas plus problématique au Québec qu'ailleurs.
[71] Il lui aurait d'ailleurs été facile, si l’AMF avait montré des réticences ou si elle avait été autrement avisée que la délivrance des certificats d’adhésion par Flanders causait problème au Québec et l'exposait à des poursuites, de solliciter et d’émettre directement les renouvellements puisqu’elle est autorisée à faire des affaires dans la province et que le produit est offert uniquement à une cinquantaine de commerçants bien identifiés par GE.
[72]
Il faut aussi souligner que si l'assurance de groupe en matière de
dommages aux biens n'est pas reconnue au Code civil du Québec (voir les
art.
[73] Si pour les inspecteurs de l'AMF il avait été manifeste que le modèle d'affaires de La Souveraine à l'égard du produit particulier offert aux clients commerciaux de GE était illégal, ils auraient, de bonne foi, réagi rapidement et signalé leur questionnement ou position à l'assureur qui aurait pu facilement ajuster son modèle de distribution du produit au Québec et éviter les infractions qu'on lui reproche ensuite. En réalité, l'affaire était complexe aussi pour les inspecteurs de l'organisme spécialisé et il faudra l'intervention du contentieux de l'AMF, à la fin de l'année 2005, pour que le régulateur conclut à l'absence de conformité du mode de distribution de ce produit très particulier[9].
[74]
Faut-il reprocher à La Souveraine de ne pas avoir réalisé plus
rapidement que l'AMF, le régulateur spécialisé, que son modèle de distribution
d'un produit particulier à une cinquantaine de commerçants sollicités par GE
violait la LDPSF? Fallait-il en l'absence de doute sur la légalité de la
délivrance des certificats chez Flanders et ses conseillers et devant le rejet
des plaintes ailleurs au Canada et le silence de l'AMF en juin, juillet et août
2005, que La Souveraine saisisse la Cour supérieure d'une requête en jugement
déclaratoire sur l’application de l’art.
[75] À mon avis, non.
[76] Bref, l’omission de La Souveraine de restreindre durant l'été 2005 l’autorisation donnée à Flanders de délivrer des certificats de renouvellement pour exclure la province de Québec résulte non seulement d’une interprétation erronée du corpus législatif québécois, comme celle d’ailleurs de l’AMF que le produit offert est illégal au Québec, mais aussi d'un ensemble de faits concomitants qui laissaient croire à La Souveraine que cette interprétation était bien fondée:
- produit très particulier offert uniquement pour renouvellement, et ce, à des commerçants liés à GE;
- couverture venant à échéance le 1er septembre 2005, ne couvrant que des biens appartenant à GE, avec primes et indemnités payables hors du Québec;
- silence de l’AMF et position favorable des organismes équivalents dans les autres provinces;
- réassurances données par Flanders et ses avocats.
[77] On ne saurait donc parler ici d’une ignorance de la loi ou d’une simple erreur d’interprétation de la loi. Nous sommes plutôt en présence d'un ensemble de circonstances qui se combinent pour expliquer la conduite de La Souveraine. Bref, nous sommes en présence d'un comportement découlant d'une erreur mixte de fait et de droit et non d'une simple erreur de droit. La défense de diligence raisonnable était alors ouverte.
[78] Je rejoins ainsi la position subsidiaire du juge Martin de la Cour supérieure lorsqu'il écrit :
[107] The trial judge concluded from the testimony of both Roberts and Soltendieck that they were generally aware of Quebec licensing requirements insofar as they applied to Flanders. As a consequence, in his opinion any error on the appellant's part as to whether these rules applied notwithstanding that the master policy had been issued and delivered in Ontario, would necessarily involve a pure question of law.
[108] In the trial judge's view it would therefore be no answer for the appellant to invoke any such error or misunderstanding on its part as to the licensing requirements applicable to Flanders in the particular circumstances of this case. Obviously ignorance of the law is no excuse and will not excuse one's failure to conform to it.
[109] If the issue were no more complicated than that then the first judge would, I believe, be correct. There is however more to it. If Roberts and Soltendieck were indeed under the impression that the Regulator had acquiesced with regard to licensing requirements in the case of the "floor plan coverage" then that, I believe, is quite another matter. The question would then become one of mixed fact and law with consequences potentially quite different from those taken for granted by the first judge.
[110] That, in my respectful view, is precisely what the witnesses Soltendieck and Roberts were respectively alluding to in the extracts from their testimony that I reproduced above at paragraphs 105 and 106 (supra) and which were in turn cited by the first judge in his decision.
[111] I find comfort on this issue when I consider that such an interpretation is confirmed and corroborated by the content of the letter of June 10, 2005. It will be recalled that Roberts underlined in that letter that in the view of the appellant there was no licensing issue. That fact can be reconciled perfectly with the testimony that he gave at trial.
[112] The respondent in its capacity as Regulator chose not to reply to that latter and accordingly did nothing to put in question the appellant's belief that, at least as far as the "floor plan coverage" was concerned, there was indeed no licensing issue.
[113] It may well be that the appellant's reading of the situation was wrong but it was nevertheless based up on an honest belief held in good faith. It was after all open to the Regulator to reply to that letter, disagree with the appellant's position and to put its "cards on the table". It chose not to do so. Perhaps it declined to answer in view of the ongoing investigation. I do not know. The appellant is not, however, in my view to be blamed for interpreting that silence, as an indication that it's appreciation of the licensing issue was correct.
[114] I am acutely aware that it is not for me to substitute my interpretation of the evidence for that of the first judge. It appears to me however, and I say so with the greatest of respect, that the first judge did not even consider any such interpretation.
[115] At paragraph 42 of his decision the first judge qualifies the infraction committed by Flanders as being one of strict responsibility. Curiously later at paragraph 61 he concludes however that, in so far as the appellant is concerned, it is not necessary to qualify the infraction as being either one of strict responsibility or a mens rea offense "puisque la preuve révèle l'acquiescement de la défenderesse aux actes posés par Flanders"
[116] "L'acquiescement" is a rather wide term, of debatable import, and at no place does it appear in the applicable section of the statute (L.R.Q. c. D-9.2 sec.482). With respect to the judge was obliged to consider and weigh the wording of the statute.
[117] The first judge points out that the appellant's failure to appreciate that the issuance of the certificates by Flanders was illegal does not constitute a defence in since it is a pure error in law. He then adds that the error was not, according to the evidence, attributable in any manner to "l’autorité compétente". Presumably by the use of that term he means the respondent. For the reasons set out in the foregoing paragraphs I am unable to agree with him on either of these issues.
[118] The first judge, in my respectful opinion was, as I have said, obliged to consider both the nature and the elements of the offence in the light of the wording of the statute. In as much as he considered the appellant's error to be a pure question of law he apparently believed that that distinction was immaterial.
[119] If, as I have suggested, the appellant's mistake constitutes an error of mixed fact and law then different considerations come into play. That is so quite independently of whether it is a strict liability offence having a dimension of intent or mens rea to it, as Me Hébert contends, or whether it is purely a strict liability offence in the traditional regulatory sense as Me Blais contends.
[120] As a Stuart, Delisle and Coughlan point out in Learning Canadian Criminal Law, Thompson Carswell, Toronto, 10th Edition, 2006 at page 677:
MISTAKE OF FACT
(a) General Principles
On the issue of whether a mistake of fact is a defence, Pappajohn v R. (see previous chapter) is still the leading decision. Chief Justice Dickson there decided for the majority that a mistake of fact defence constitutes a denial that the Crown has proved the fault element. It follows that, in the absence of statutory wording to the contrary:
1. Where there is a subjective mens rea requirement the mistake need merely be honestly held with reasonableness only relevant to assessment of credibility;
2. Where the fault element requires objective negligence, the mistake must be both honest and reasonable;
3. Where there is a due diligence defence, the mistake must be both honest and reasonable, with an onus of proof on the accused in the case of regulatory offences; and
4. Where the offence is one of absolute liability, mistake of fact is not a defence.
[121] For the reasons set out previously I would conclude that, given the manner in which events unfolded in the course of 2005, the error attributable to the appellant is at the very least one of mixed fact and law.
[122] Furthermore, if I am (not)[10] correct in my conclusion that there is a mens rea dimension to the infraction, an issue which I will discuss later, then I would, for the reasons previously articulated, be inclined to conclude that the mistaken belief on the part of the appellant was honestly held.
[je souligne]
[79] Une erreur raisonnable de droit par un citoyen proactif (par opposition à l'ignorance du droit) peut être un des éléments du contexte donnant lieu à une défense de diligence raisonnable. Cette approche m'apparaît particulièrement nécessaire lorsque l'état du droit sur une question est complexe et que l'organisme de régulation spécialisé est lui-même incapable de conclure rapidement en la présence d'un modèle d'affaires contraire à la loi. En pareil contexte, tenir l'assureur à l'obligation de mieux connaître la loi que l'AMF, et ce, sans marge d'erreur, équivaut à dire que la LDPSF crée des infractions de responsabilité absolue.
[80] Contrairement au juge Cournoyer, je partage l'analyse de l'arrêt Lévis (Ville) faite par les professeurs Christine Boyle et Sam de Groot, dans un commentaire intitulé « The Responsible Citizen in the City of Lévis: Due Diligence and Officially Induced Error » publié dans (2006), 36 C.R. (6th) 249, lorsqu'ils affirment à la p. 255 :
On the other hand, the Court does not assert an absolute duty to know the law, just one of due diligence. The "civic duty" aspect of the case appears to conjure an unrealistic image of the citizen competent to navigate the complex regulatory state. However, conceptualizing knowledge of the law in terms of diligent effort may provide support for defence arguments that accused persons had exercised due diligence with respect to knowing the law and thus should be acquitted.
[je souligne]
[81] En l'espèce, La Souveraine a agi en citoyenne corporative responsable qui a cherché activement à connaître les obligations qui lui sont imposées par les lois québécoises; elle n'a pas fait preuve de négligence, nonchalance ou d'aveuglement volontaire. Si elle a omis de restreindre l'autorisation de Flanders de délivrer des certificats afin d'exclure la province de Québec, c'est en raison d'un contexte particulier, incluant non seulement des informations obtenues et l'analyse de son produit, mais aussi le silence de l'AMF. Comme le souligne le juge Martin, il ne s’agit pas d’une simple erreur de droit mais d’une erreur mixte de fait et de droit.
[82] En terminant, un commentaire. Il n’est pas nécessaire de déterminer la nature exacte des rapports contractuels entre La Souveraine et chacun des adhérents québécois, comme nous y invite l’AMF dans son mémoire. Qu’il suffise de dire que le concept d’adhésion à un contrat collectif en matière d’assurance de biens ne semble pas exister au Québec. Par contre, rien n’indique que de tels contrats sont nuls ab initio.
[83] Il s’ensuit que les contrats intervenus avec les commerçants québécois pourraient être autonomes aux yeux du civiliste québécois, détachés de la police-cadre délivrée à GE. Il existerait ainsi 56 contrats parallèles et distincts au Québec, dont le contenu serait identique et régi par le droit québécois. S’agirait-il dans chaque cas d’un contrat où le commerçant québécois serait un coassuré avec GE? S’agirait-il plutôt d’une police d’assurance où l’assuré et bénéficiaire serait GE et le preneur, le commerçant québécois? S’agirait-il d’une stipulation pour autrui contractée par GE au bénéfice du commerçant qui pourrait choisir de s’en prévaloir et alors faire naître un contrat d’assurance entre La Souveraine et lui?
[84] Chacune de ces options colle mal à la réalité des arrangements décrits plus haut et est parsemée d'embûches qu'il est préférable de laisser à une affaire où seront en litige des enjeux contractuels. Aux fins du présent pourvoi, il suffit de retenir qu'il y a eu distribution au Québec d’un produit d’assurance.
[85] J'ai déjà discuté du moyen c) de la requête pour permission d’appeler de l’AMF. Quant aux autres moyens invoqués déférés à notre formation, ils doivent être écartés parce qu’on n’y soulève pas de véritables questions de droit.
[86] En résumé, je suis d'avis que rien ne justifie l'intervention de la Cour à l'égard de la conclusion du juge de la Cour supérieure que La Souveraine doit être acquittée eu égard aux circonstances particulières de notre affaire.
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PIERRE J. DALPHOND, J.C.A. |
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MOTIFS DU JUGE KASIRER, J.C.A. |
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[87] I have had the advantage of reading the reasons of my colleagues Dalphond, J.A. and Cournoyer, J.A. (ad hoc). With respect for the contrary opinion, I agree with Cournoyer, J.A.'s conclusions that the appeal should be allowed, the judgment of the Superior Court be set aside and the convictions entered against the respondent be restored.
[88] I agree with the reasons given by Cournoyer, J.A. in respect of the actus reus of the offence. I agree as well with both my colleagues that the offence is not one for which a mens rea attaches, but instead a strict liability offence within the meaning of R. v. Sault Ste. Marie.[11]
[89] To avoid liability La Souveraine must show that it had taken all reasonable steps to avoid committing the offence or that it has a proper defence of mistake in the circumstances.
[90] Here again, I agree with the conclusion of Cournoyer, J.A. that the respondent has failed to show due diligence.
[91] I allow myself to add the following comments in respect of the availability of a defence of mistake in the circumstances.
[92] The respondent did not claim to be acting under the sway of a mistake of fact - say, an honest and reasonably-held belief that Flanders had a licence when in fact it did not - as a means of excusing its conduct. The respondent acted under the belief that Flanders did not need a licence in connection with the insurance scheme in question. The trial judge decided this was an inexcusable mistake of law.
[93] Among the active steps that La Souveraine took to avoid committing the offence was sending the letter of explanation to the AMF on June 10, 2005. As we know, that letter went unanswered. The judge of the Superior Court sitting in appeal concluded that La Souveraine mistakenly relied on the AMF’s silence as an indication that its proposed conduct was legal. In obiter, he concluded that La Souveraine’s error was a mixed error of law and fact. On that view, if the error was a reasonable one, it could be considered an excuse from liability pursuant to Sault Ste. Marie.
[94] Central, then, to La Souveraine's defence of mistake is the AMF's failure to answer the letter and the impact of that failure on the respondent's subsequent conduct.
[95] As a preliminary point, it bears noting that as regulator pursuant to the Act respecting the Autorités des marches financiers, the AMF has defined statutory responsibilities.[12] It has a mandate to act as an "information and reference centre in all fields of the financial sector"[13] and "to grant the public and the business community access to reliable, accurate and complete information" in respect of players, products and services in the field.[14] The AMF does not have, as one of its ordinary duties, the obligation to inform individuals that conduct they propose to undertake is legal or illegal. Unlike certain other administrative agencies, the AMF does not provide advance rulings on the legal effects of proposed conduct to members of the public. The fact that the letter remained unanswered must be understood with that in mind.
[96] With respect, I disagree with the view expressed by the judge of the Superior Court that the AMF had "a duty to advise the appellant [La Souveraine] of its position as Regulator with regard to the proposed 'floor plan' coverage" (paragraph [9] of his reasons). Imposing this kind of duty on the AMF would be a perilous matter in that, if broadly extended, it could potentially transform the role that the regulator plays in the marketplace. Even in circumstances in which a member of the public might be seen as soliciting an opinion as to the legality of proposed conduct before undertaking it, I do not believe the courts should impress a duty to act on the AMF - in the absence of statutory direction - such that its silence could excuse penal conduct for reasons.
[97] That said, it is of course nonetheless possible, even in the absence of a duty, that La Souveraine honestly but mistakenly took the lack of an answer to its letter as a sign that its proposed conduct was legal.
[98] Two lines of argument may be invoked in support of the view that La Souveraine committed an error that relieves it from liability here. First, it might be said, that La Souveraine acted pursuant to a mixed error of law and fact that it was doing nothing wrong. If that mistake were proved to be a reasonable one in light of all the circumstances, including the unanswered letter, La Souveraine should be excused. Alternatively, if La Souveraine did act under a mistake of law, one might argue that it did so in part as a result of the failure by the AMF to answer the letter. Taking into account all the circumstances, reliance on the unanswered letter arguably amounts to an excuse for this mistake of law in a manner comparable with the doctrine of officially induced error as interpreted in Lévis (City) v. Tétreault .[15]
[99] I propose to address briefly each of these two arguments in turn.
A) Mixed Error of Law and Fact or an Error of Law?
[100] La Souveraine acted under the mistaken impression that this conduct was legal because, in its view, Flanders did not need a licence from the Quebec authorities. The trial judge in the Court of Québec held that this was a mistake in law that cannot be set up as a defence to a strict liability offence.
[101] Was it instead a mixed error of fact and law that, if honestly and reasonably held, could provide La Souveraine with a defence?
[102] A combination of circumstances, taken together, may well have induced La Souveraine to believe honestly that its interpretation of the law was correct. These circumstances would include, in particular, the complex nature of the insurance scheme, the fact that GE is a non-Quebec company, the fact that the arrangement would have been legal in some other parts of Canada, the legal opinions it had in hand, and the lack of an answer to the letter from AMF. Specifically, the judge of the Superior Court observed that the representatives of La Souveraine were under the impression that the AMF had "acquiesced with regard to licensing requirements in the case of the 'floor plan coverage'" (paragraph [109]). In the circumstances, the judge of the Superior Court was of the view that the error attributable to La Souveraine was "at the very least one of mixed fact and law" (paragraph [121]).
[103] Again, central to this view is the importance one attaches to the fact of the unanswered letter. One might argue that La Souveraine mistakenly interpreted the silence as a sign that the AMF had agreed with its position that Flanders did not need a licence.
[104] Did the silence of the AMF following its receipt of the letter in which La Souveraine set out its understanding of the law give rise to a reasonable error of fact or mixed error that can be invoked as a defence to the charge?
[105] The judge of the Superior Court underscored the role of the unanswered letter as follows:
[112] The respondent in its capacity as Regulator chose not to reply to that letter and accordingly did nothing to put in question the appellant's [La Souveraine's] belief that, at least as far as the "floor plan coverage" was concerned, there was indeed no licensing issue.
[113] It may well be that the appellant's reading of the situation was wrong but it was nevertheless based upon an honest belief held in good faith. It was after all open to the Regulator to reply to that letter, disagree with the appellant's position and to put its "cards on the table". It chose not to do so. Perhaps it declined to answer in view of the ongoing investigation. I do not know. The appellant is not, however, in my view to be blamed for interpreting that silence, as an indication that its appreciation of the licensing issue was correct.
[Emphasis added.]
[106] This would seem to suggest that the judge saw the silence as giving rise to an erroneous "appreciation of the licensing issue" for which La Souveraine should not be blamed. In other words, the circumstances, including the AMF's silence, left La Souveraine believing that Flanders did not need a licence. In my respectful view, this was a mistake in law, not one of fact or a mixed error of law and fact, for which there is no excuse.
[107] At trial, the judge of the Court of Québec observed that the evidence demonstrated that La Souveraine "ignorait que le contrat d'assurance sur les inventaires proposé par Flanders aux concessionnaires du Québec était soumis au droit québécois et que Flanders devait être enregistré au Québec" (paragraph [45]). In paragraphs [46] and following, he cited extensive excerpts from the testimony at trial confirming that La Souveraine thought that Flanders did not need a licence. The respondent did not identify direct evidence that La Souveraine interpreted the silence to mean that the AMF had acquiesced to its view and that it relied on that acquiescence going forward. The trial judge did record, at paragraph [50] of his reasons, that Stephen Soltendieck, a manager at La Souveraine, thought the AMF had an obligation, as a "partner" and a "regulator" to "pick up the phone" and to prevent La Souveraine from breaking the law. Mr. Soltendieck did testify that he reacted with "astonishment" when he learned of the notice of offences months later, but he explained that was because he had never thought the company was in violation of the law. La Souveraine's Assistant Vice President Robert Phillips remarked upon the lack of follow-up correspondence from the AMF in his testimony, but he did not say that it induced him to believe that the AMF had acquiesced. La Souveraine has not pointed to evidence that it believed the AMF's silence provided a reliable sign of the regulator's acquiescence, much less demonstrated - as is its burden - that its mistake was reasonable in the circumstances.
[108] The trial judge has not been shown to have misread the facts on this point nor has it been shown that he was wrong to conclude that this was an error of law on the part of La Souveraine. The complex circumstances did not transform that into a mixed error of law and fact. Fully aware of the complexity of the arrangement, La Souveraine persisted in its view that its conduct was legal. For the trial judge, La Souveraine was ignorant of the meaning of the law and, in the absence of a recognized excuse for the mistake in law, the company must answer for its conduct.
[109] Moreover, the plain fact that the AMF had no statutory obligation to answer the letter renders it very difficult for the accused corporation to argue that its mistake was a reasonable one. It was not reasonable for La Souveraine to expect that the AMF had a duty, as "regulator" and "partner", to provide confirmation of the legality of its proposed course of conduct given the nature and scope of the AMF's statutory mandate.
[110] This leaves the question as to whether circumstances exist in which La Souveraine can be excused from its ignorance of the law. I now turn to that matter.
B) Excusable Mistake in Law?
[111] While the courts have regularly invoked the principle that ignorance of the law is no excuse, they have not been unmindful of injustices caused by its inflexible application. Among the exceptions to the rule is the doctrine of officially induced error which, in a word, provides a defence for an accused who reasonably relied on erroneous legal advice from an official responsible for the administration of the law.[16]
[112] That doctrine, as set forth in Lévis, does not apply here. The AMF did not provide legal advice upon which La Souveraine relied, that advice having led to the error that Flanders did not need a licence. The advice it did receive came not from an official of the AMF but from an independent legal counsel. While some might feel that it is reasonable to rely on a lawyer's opinion to excuse a mistake in law, the courts have been firm in rejecting this as an excuse for ignorance of the law, as my colleague Cournoyer, J.A. amply explains in his reasons.
[113] What about the AMF's failure to answer the letter of June 10, 2005? Can this be said to excuse La Souveraine's mistake of law? One might argue that the doctrine of officially induced error can be extended to include an omission to act by an official, at least by analogy. On this view, the AMF's silence amounts to a "green light" of sorts - the notional equivalent of an official authorization to act - inducing La Souveraine to believe that its proposed conduct was not mistaken in law. As such, the argument goes, it was reasonable for La Souveraine to rely on the AMF's silence in a manner not dissimilar to that in which an accused might rely on mistaken advice from an official as an inducement to make an error of law.
[114] The idea that AMF's silence excuses La Souveraine's mistake in law might be said to rest on a policy justification of reliance. This has been broadly described by some as a "criminal estoppel argument", based on "[t]he mistaken assumption upon which [an accused] acts was implanted or confirmed by another, whose authority he reasonably trusted".[17]
[115] In my view, La Souveraine could not reasonably rely on the AMF’s silence as an indication that its proposed conduct was legal. As noted above, AMF had no obligation to respond to the letter. Its silence does not constitute, according to the criteria in Lévis, "reasonable advice" from an "appropriate official",[18] nor was it reasonable for La Souveraine to rely upon it given the absence of any obligation to answer the letter.
[116] The failure to answer the letter could not reasonably be construed in the circumstances as a "green light" upon which La Souveraine could rely to excuse its mistake of law. Whatever one's views may be on how the AMF goes about its business, it cannot be said that the appellant was involved in snaring La Souveraine in this case in a manner comparable to entrapment.
[117] La Souveraine chose to rely on independent legal advice and, as a consequence, it made the mistake of law of consenting to Flanders proceeding without a licence. However honest La Souveraine's belief might have been that the conduct was legal, its ignorance of the law is no excuse.
[118] I would dispose of the appeal as suggested by my colleague Cournoyer, J.A.
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NICHOLAS KASIRER, J.C.A. |
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MOTIFS DU JUGE COURNOYER |
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[119] L'intimée, La Souveraine, Compagnie d'assurance générale, a été poursuivie par l'Autorité des marchés financiers (« AMF ») pour avoir consenti et/ou autorisé Flanders Insurance Management and Administrative Services Ltd. (« Flanders »), un cabinet d'assurance non inscrit auprès de l'AMF, à délivrer une police d'assurance de financement sur les stocks de concessionnaires de produits récréatifs ayant leur établissement au Québec.
[120] Voici le texte de l'un des constats d'infraction :
À Alma et ses environs, dans le district judiciaire
d'Alma, le ou vers le 25 août 2005, a consenti et/ou autorisé Flanders
Insurance Management and Administrative Services Ltd., un cabinet non inscrit
auprès de l'Autorité des marchés financiers, à délivrer à Atelier Fortin Sports
Inc. une police d'assurance sur les stocks, numéro […], le tout en
contravention à l'article
[121] Le 10 juin 2005, dans une lettre complète et détaillée, La Souveraine explique à l'AMF qu'elle estime que le cabinet d'assurance qu'elle utilise pour délivrer les polices d'assurance n'a pas à être inscrit auprès de l'AMF, car les polices protègent principalement les intérêts d'une compagnie de financement, GE Financement Commercial aux Détaillants, Canada (« GE ») qui finance les inventaires des concessionnaires de véhicules récréatifs du Québec. Or, le siège social de GE est en Ontario et le contrat y a été conclu.
[122] Cette lettre est aussi accompagnée d'un exemple de police d'assurance qui a été signée au nom de La Souveraine par un représentant de Flanders, M. Gordon B. Roberts[19].
[123] L'intimée ne reçoit aucune réponse de l'AMF.
[124] Le 16 janvier 2006, 56 constats d'infraction sont signifiés à l'intimée.
[125] Ces constats visent tous des infractions commises le 25 août 2005 lors du renouvellement des polices d'assurance en question. Les infractions ont donc été commises environ dix semaines après l'envoi de la lettre à l'AMF. Dans le cas de Flanders, les infractions déposées contre celle-ci visent une période antérieure à la lettre de l'intimée.
[126] L'intimée a été trouvée coupable de 56 chefs d'accusation par le juge d'instance qui l'a condamnée à une amende de 560 000,00 $.
[127] La Cour supérieure a renversé la condamnation de l'intimée.
[128] L'AMF appelle de cette décision.
[129] L'applicabilité de la Loi sur la distribution de produits et services financiers[20] (« LDPSF ») au présent dossier ne fait pas l'objet du pourvoi. Tant la Cour du Québec que la Cour supérieure ont conclu qu'elle s'appliquait. Il y a eu distribution au Québec d'un produit d'assurance[21].
[130] La seule question en litige concerne la classification de l'infraction créée par l'article 482 de la LDPSF.
[131] Cette infraction crée une règle de complicité qui vise spécifiquement les assureurs.
[132] Il faut d'abord déterminer s'il est question d'une infraction de mens rea ou de responsabilité stricte. Si l'infraction créée par l'art. 482 exige la preuve d'une mens rea, il est évident que l'intimée doit être acquittée. Si l'infraction est considérée comme une infraction de responsabilité stricte, il faut décider si l'intimée a fait preuve de diligence raisonnable dans les circonstances.
[133] Pour les motifs qui suivent, j'estime que l'infraction prévue à l'article 482 LDPSF est une infraction de responsabilité stricte.
[134] La Souveraine n'a pas établi qu'elle avait fait preuve de diligence raisonnable selon la norme reconnue par la jurisprudence. L'appel doit être accueilli.
I - Les dispositions législatives pertinentes
[135] L'article 71 de la LDPSF prévoit qu'un cabinet d'assurance doit être inscrit auprès de l'AMF:
71. Nul ne peut agir comme cabinet, ni se présenter comme tel, à moins d’être inscrit auprès de l'Autorité. |
71. No person may act as or purport to be a firm without being registered with the Authority
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[136] L'article 482 LDPSF énonce l'infraction dont a été trouvée coupable l'intimée :
482. Un assureur qui aide ou, par un encouragement, un conseil, un consentement, une autorisation ou un ordre, amène un cabinet, ou un représentant autonome ou une société autonome par l’entremise de qui il offre des produits d’assurance, ou un dirigeant, administrateur, associé, employé ou représentant de ce cabinet ou de cette société autonome, à enfreindre une disposition de la présente loi ou de ses règlements commet une infraction.
Il en est de même de tout administrateur, dirigeant, employé ou mandataire d’un assureur.
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482. Every insurer that helps or, by encouragement, advice or consent or by an authorization or order, induces a firm or an independent representative or independent partnership through which it offers insurance products or an executive officer, director, partner, employee or representative of such a firm or independent partnership to contravene any provision of this Act or the regulations is guilty of an offence.
The same applies to any director, executive officer, employee or mandatary of an insurer. |
II - Les faits
[137] Dans son jugement, le juge d'instance résume ainsi les principaux faits :
[4] Les circonstances donnant ouverture aux 56 chefs d'accusation peuvent sommairement être décrites de la manière suivante.
[5] La défenderesse, une société d'assurance dûment inscrite au Québec, a négocié une police d'assurance portant le numéro […] en Ontario par l'intermédiaire du courtier Flanders Insurance Management and Administrative Services Ltd. («Flanders»), avec la société GE Financement Commercial aux Détaillants, Canada («GE»), aux fins d'assurer les inventaires de biens financés par cette dernière, lesquels étaient situés partout au Canada chez différents concessionnaires de produits récréatifs.
[6] Les 56 individus ou sociétés mentionnés aux chefs d'accusation sont des concessionnaires de produits récréatifs ayant leur place d'affaires au Québec, financés par GE et assurés par la défenderesse.
[7] En 2004, GE a acquis une société concurrente, soit Corporation de Financement Commercial Transamérica, Canada («TCFCC») et a informé les clients de TCFCC de cette acquisition, lesquels étaient jusqu'alors assurés pour la plupart par le courtier Hayhurst Elias Dudek Inc. («HED»).
[8] GE informe alors les clients de TCFCC qu'à compter de décembre 2004 le programme d'assurance, jusqu'alors assumé par HED, est remplacé par un nouveau produit offert par Flanders et qu'en conséquence ils doivent, soit opter pour ce produit de Flanders ou se procurer une assurance supplémentaire auprès d'un fournisseur de leur choix.
[9] Flanders, par son vice-président Gordon Roberts, écrit à chacun des concessionnaires québécois en septembre 2004 pour offrir de maintenir l'assurance sur les stocks détenus par GE. À sa lettre est joint un projet d'avis au courtier HED pour annuler la police, jusqu'alors en vigueur. La quasi-totalité des concessionnaires québécois accepte de joindre le programme d'assurance offert par la défenderesse par l'intermédiaire de Flanders.
[10] La perte de cette importante clientèle n'a pas plu aux dirigeants de HED, lesquels ont déposé des plaintes contre Flanders et son employé Gordon Roberts auprès de diverses autorités réglementaires canadiennes et plus particulièrement au Québec (P-57). La plainte datée du 1er novembre 2004 allègue, entre autres, que Flanders exerce la fonction de courtier en assurance au Québec sans détenir de permis.
[11] L'AMF, après analyse sommaire de la plainte, ouvre un dossier d'enquête le 13 janvier 2005 (D-1).
[12] Par lettre du 28 avril 2005 (P-64), l'AMF requiert de la défenderesse des informations relatives à sa relation d'affaires avec Flanders et GE et, entre autres, concernant l'assurance sur les inventaires financés par GE auprès des concessionnaires de produits récréatifs situés au Québec.
[13] La défenderesse répond à l'AMF par lettre (P-65) en date du 2 juin 2005 en spécifiant que, comme GE est un client de Flanders ayant son siège social en Ontario, là où le contrat-cadre a été signé, il n'existe aucun problème de licence au Québec où La Souveraine n'assure, en ce qui concerne GE, que les inventaires financés auprès des concessionnaires québécois.
[14] Vers le 25 août 2005, Flanders offre de renouveler et renouvelle les certificats d'assurance de 55 concessionnaires québécois mentionnés aux chefs d'accusation, lesquels certificats indiquent comme assurés GE et nommément chacun des concessionnaires pour des biens financés situés au Québec. Un seul concessionnaire québécois refuse l'offre malgré la sollicitation (P-49).
[15] Le contentieux de l'AMF conclut à l'existence de 56 infractions commises par la défenderesse et décide de déposer la présente dénonciation en janvier 2006.
[138] Le 10 juin 2005, le président de La Souveraine répond à la demande d'information de l'AMF formulée le 28 avril précédent. Il écrit :
Subject: Flanders Insurance Management and Administrative Services Ltd.
GE Commercial Distribution Finance Canada GE CDF
File : SE 4458
Dear Sir:
I am responding to the letter of May 3rd 2005 from Richard Perron to your attention as requested. The facts regarding Flanders' relationship with GE Commercial Distribution Finance (GE-CDF) are as follows:
1. As GE-CDF is Flanders' client, and has its head office in Ontario, there is no licensing issue.
2. Flanders' client, GE-CDF, finances the purchase of floor plan goods such as snow machines, A-TVs, recreational vehicles, mobile homes, computers, manufactured homes, consumer electronics and appliances.
3. A floor plan insurance policy is issued to GE-CDF and certificates issued for GE and dealer as per the attached certificate page.
4. Much like other, similar lending institutions, GE-CDF retains title to the goods, and requires that the floor plan goods be insured in order to protect its interests.
5. Each GE-CDF dealer has the option to participate in the floor plan insurance program. Alternatively, dealers may supply evidence of insurance otherwise placed, which confirms that GE-CDF's goods are properly insured. A brochure is supplied to the dealers, either by the GE-CDF representative arranging the financing, or by Flanders.
6. When, and if, a dealer expresses interest in the insurance policy available, Flanders obtains all required underwriting information from GE-CDF, and from the individual dealer. Rating for the risk is then determined by Flanders, and the monthly cost is confirmed to GE-CDF, and to the dealer.
7. Subsequently, the dealer signs a form confirming the rate, and authorized GE-CDF to include the insurance premium on the monthly billing statement. Flanders then issues a Certificate confirming insurance coverage.
8. No commissions or fee payments are made to GE-CDF by Flanders.
9. All lost payment cheques are payable to GE-CDF, not the dealer.
Flanders receives 22.5% commission based on the premium billed.
GE-CDF recently (2004) acquired the business of TransAmerica Commercial Finance in respect of these type of dealers and we have attached bordereau for business written from November 2004 to April 2005 as well as copies of the type of certificate issued.
This is the information that you specifically requested in your telephone conversation with Serge Byette of our Montreal office.
Please note that the Floor plan program for GE-CDF (out of Ontario) is all that we currently insure as far as any Quebec locations.
We do not write any property, liability, automobile, key-man life or health and sickness covers for Flanders' in Quebec and in this regard you should address any concerns to Nick Leitch the principal owner of Flanders Insurance at 210-200 Waterfront Drive, Winnipeg, Manitoba R3B 3P1.
We are aware that a previous broker that had the TransAmerica business decided to issue letters of complaint against Flanders to all provincial jurisdictions across the country. We believe that to date most if not all have responded positively to the response given by Flanders' through their lawyer.
We trust that the information provided is to your satisfaction and responds to your needs. Should you have any other questions or require further detail please do not hesitate to contact the writer.
Yours truly,
Robert G. Phillips
AVP, Reinsurance and Special Risks
Encl.
[139] L'intimée ne recevra aucune autre communication de la part de l'AMF avant le dépôt des constats d'infraction.
[140] Le 12 janvier 2006, l'AMF publie un communiqué de presse au sujet du dépôt des accusations contre l'intimée, Flanders et son vice-président. L'appelante y formule deux commentaires au sujet de la conduite de l'intimée :
L'enquête de l'Autorité démontre que Flanders, dont le siège social est situé à Winnipeg, et Gordon B. Roberts, ont agi illégalement puisqu'ils ne sont pas inscrits auprès de l'Autorité à titre de cabinet en assurance de dommages et de représentant en assurances de dommages.
L'enquête démontre également que La Souveraine s'est rendue complice de certaines de ces infractions, soit celles commises depuis juin 2005, puisqu'elle était alors informée de cette problématique et a néanmoins émis les polices négociées par Flanders.
[Je souligne]
[141] Lors de l'instruction, l'intimée soumet cinq moyens en défense :
- La prescription ;
- La non-applicabilité de la loi québécoise au contrat en litige;
- Le fait qu'aucune infraction n'a été commise par Flanders;
- Sa participation à l'infraction commise par Flanders n'entraîne pas sa culpabilité;
- L'erreur.
[142] Le juge d'instance rejette tous ces moyens.
[143] Dans son jugement, il détermine que les contrats d'assurance sont soumis aux lois québécoises et à la compétence de l'AMF[22].
[144] Il énonce ainsi sa conclusion sur cette question :
[31] Bien que l'intérêt principal que voulait protéger le contrat-cadre conclu entre Flanders et GE soit celui de GE, chacun des concessionnaires qui demande de participer au programme d'assurance offert par la défenderesse par l'intermédiaire de Flanders a un intérêt dans le contrat d'assurance et est, à l'instar de GE, inscrit comme étant l'assuré sur chacun des certificats.
[32] Les admissions signées par la défenderesse et la preuve testimoniale établissent clairement que les biens assurés étaient situés au Québec et que les preneurs, nommément désignés dans chacun des chefs d'accusation, étaient des concessionnaires ayant fait la demande d'adhérer au contrat d'assurance au Québec.
[33] Au surplus, c'est au Québec que l'assureur a délivré les certificats d'assurance qui constituent, selon l'admission 2.4 de P-69, les contrats d'assurance de chacun des coassurés.
[34] Vu ce qui précède, le Tribunal conclut que les contrats visés aux chefs d'accusation sont soumis aux lois du Québec et à la juridiction de l'AMF.
[145] Au sujet de l'actus reus de l'infraction commise par l'intimée, le juge formule sa conclusion en ces termes :
[57] La preuve est muette sur les démarches effectuées par la défenderesse pour s'assurer de la légalité des opérations effectuées par Flanders au Québec, mais confirme plutôt que La Souveraine a partagé l'opinion de Flanders à l'effet que les contrats P-1 à P-56 n'étaient pas soumis aux lois du Québec et que Flanders n'avait pas à être licencié au Québec pour offrir aux concessionnaires québécois de GE des plans d'assurance inventaires.
[58] La preuve révèle que la défenderesse, qui recevait mensuellement une liste des certificats émis par Flanders aux concessionnaires de GE, savait en 2005 qu'elle assurait des biens situés au Québec dans lesquels GE avait un intérêt conjoint avec les concessionnaires québécois.
[59] La lettre de la défenderesse à l'AMF datée du 10 juin 2005 (P-65) est manifestement une réponse préparée en collaboration avec Flanders, vu la similarité entre les termes de cette lettre et ceux utilisés par les procureurs de Flanders dans des lettres de décembre 2004 et janvier 2005 (P-66) adressées aux autorités réglementaires d'autres provinces, malgré l'affirmation contraire de Robert G. Phillips. Ces lettres confirment que La Souveraine et Flanders partageaient l'opinion que les contrats couvrant les inventaires n'étaient pas soumis aux lois québécoises, et ce, antérieurement au renouvellement des certificats d'assurance le 25 août 2005.
[60] La défenderesse a donc autorisé, permis ou consenti à ce que Flanders délivre des polices d'assurance sachant que cette dernière n'avait pas les permis requis. Cette délivrance ne s'est pas faite à l'insu de la défenderesse.
[146] Après avoir énoncé ces conclusions, le juge d'instance examine la question de savoir si la lettre envoyée par l'intimée à l'AMF pouvait constituer une défense. Le juge écrit :
Son erreur constitue un moyen de défense
[61] Vu les conclusions du Tribunal, il n'est pas nécessaire de qualifier l'infraction reprochée comme étant de responsabilité stricte ou d'infraction d'intention spécifique puisque la preuve révèle l'acquiescement de la défenderesse aux actes posés par Flanders. Le fait que la défenderesse ignorait que cette délivrance de police était illégale ne peut constituer une défense puisqu'il s'agit d'une erreur de droit, laquelle n'a pas été selon la preuve, en aucune façon, provoquée par l'autorité compétente.
[62] Comme le mentionne le juge LeBel dans Ville de Lévis, au nom d'une cour unanime :
21 Au
départ, pour bien situer la nature et les limites de cette défense, il convient
de rappeler que le droit pénal canadien refuse d'accepter que l'ignorance de la
loi supprime ou atténue la responsabilité pénale, malgré les critiques
formulées parfois à propos de la rigueur de cette règle (D. Stuart, Canadian
Criminal Law : A Treatise (4e éd. 2001), p. 323-331). Ainsi, l'art.
22
Notre Cour a appliqué fermement et constamment le principe de l'irrecevabilité
d'une défense d'ignorance de la loi. Elle a d'ailleurs donné effet à ce
principe, non seulement en droit criminel proprement dit, mais aussi à l'égard
des infractions réglementaires (Molis c. La Reine,
[63] La défenderesse n'a fait valoir aucune démarche qu'elle aurait entreprise pour s'assurer ou pour vérifier si sa police d'assurance sur les inventaires était régie par la loi québécoise et elle semble s'être fiée entièrement aux affirmations de Flanders à ce sujet.
[64] La défenderesse soumet qu'au lieu d'agir comme partenaire de l'industrie comme la poursuivante prétend l'être, cette dernière aurait agi de manière déraisonnable en ne l'informant pas, dès avril 2005, qu'elle était sous enquête pour avoir aidé à commettre une infraction, information qui aurait évité sa participation au renouvellement des polices d'assurance en août 2005.
[65] Cette prétention ne tient pas compte des remarques antérieures à l'effet qu’au mois d'avril 2005, lorsque les renseignements ont été demandés à la défenderesse, le dossier n'avait pas encore été soumis au contentieux de l'AMF et que les enquêteurs ignoraient que la défenderesse commettait elle-même une infraction. La défenderesse savait pourtant, dès lors, qu'une enquête était menée au sujet des polices distribuées par Flanders sans permis au Québec. Aucune démarche ne semble avoir été effectuée par la défenderesse suite aux requêtes de l'AMF et elle a accepté que les polices soient renouvelées au mois d'août 2005 sans solliciter, selon la preuve, d'opinion juridique ni d'avis, se contentant de réitérer à l'AMF la prétention de Flanders qu'aucun permis n'était requis au Québec.
[66] En conséquence, le Tribunal déclare que tous et chacun des éléments de l'accusation ont été prouvés hors de tout doute raisonnable et la défenderesse est déclarée coupable des 56 chefs d'accusation.
[Je souligne]
[147] Essentiellement, la Cour supérieure conclut que l'infraction est une infraction de mens rea et que La Souveraine a commis une erreur mixte de fait et de droit quant à la nécessité pour Flanders d'être inscrit auprès de l'AMF.
[148] J'estime utile de reproduire un long passage du jugement rendu qui permettra de comprendre le moyen d'appel soumis par l'AMF et de mettre en évidence les questions de politique pénale que son appel pose. La Cour supérieure écrit :
[8] The respondent is neither the Attorney General of Quebec nor the Director of criminal and penal prosecutions. It is the Regulator with all that that implies. As such it has for its mission the duties and obligations so eloquently alluded to by Me Blais in his factum.
[9] In my view, it was not entirely without justification that Stephen Soltendieck, the appellant's senior executive officer in Quebec, expressed the view in the course of his testimony, that the respondent had a duty to advise the appellant of its position as Regulator with regard to the proposed "floor plan" coverage.
[10] I am conscious that it might be argued that, in the interest of protecting an ongoing investigation, there was some justification for the respondent's silence. In my respectful view that is not however a very convincing argument at least in the particular circumstances of this case.
[11] The Regulator has indeed been given the role of supervising the activities for which it is responsible. It is also responsible for ensuring that the statutes and regulations that it is charged with administering are respected and complied with. Finally it has the duty of investigating complaints and questionable practices that come to light and, in the appropriate cases instituting prosecutions.
[12] The respondent in its position as Regulator owes a duty to the public at large on one hand and to those whom it has the power to regulate on the other. It ought not to be seen to be lurking in wait in the bushes ready to pounce, so to speak, once it is satisfied that offences have been committed. The Regulator is not, after all, a "rainmaker" for the Ministère des finances.
[13] The respondent appears to have adopted the view, at least as far as the appellant is concerned, that the infractions in question were only committed on or about August the 25th 2005, the date of the delivery of the certificates of participation. That at least is what I conclude from the wording of the various counts. In June 2005, when the requested particulars were furnished no offence, if offence there was, had yet been committed.
[14] In paragraphs in 64 and 65 of his decision the first judge gives short shrift to Soltendieck's suggestion that the respondent had a duty to advise the appellant of its position on the licensing issue. The first judge takes the view that when the initial request for information was made to the appellant in April 2005 the issue of the appellant's potential responsibility had not been submitted to the respondent's legal department.
[15] At paragraph 23 he states, incorrectly as it turns out, that the inquiry initiated on January the 13th 2005 related solely to the activities of Flanders. He goes on to affirm that it was only in December of 2005 that the respondent's legal department determined that the appellant had participated in the commission of the infractions.
[16] The testimony of Turgeon makes it perfectly clear that he was thoroughly aware of the questions at issue throughout the investigation. The complaint by Hayhurst Elias Dudek Inc. could not have been clearer.
[17] Exhibit D-1 signed by Me Nathalie G. Drouin in her capacity as Directrice générale aux affaires juridiques et secrétaire of the respondent confirms that the appellant was indeed the subject of an investigation commencing on January 13, 2005. Section 494 of the statute (L.R.Q. c. D-9.2) deems the certificate to constitute conclusive proof of said date in the absence of proof to the contrary.
[18] Finally, at paragraph 13 of his factum Me Blais concedes that the investigation launched on January 13th, 2005 concerned both Les Assurances Flanders Ltée “et accessoirement sur les activités de la Souveraine, qui avait autorisé et consenti à ce cabinet d’agir en son nom au Québec”.
[19] The respondent is a corporate entity established by statute. It is simply not susceptible of being compartmentalized when it comes to the consequences of investigations initiated by it and information that comes to hand in the course of such investigations. It cannot take refuge behind what may or may not have been the knowledge of its legal department at any given point in time. With the greatest of respect the date on which the respondent's legal department became involved is of no moment whatsoever.
[20] If Perron or Turgeon were incapable of appreciating the significance of the issues arising from the letter of June [10], 2005 than it was up to them to consult with their "in house" legal advisers in order to be properly informed. Perron was, as I have said, the Directeur-adjoint de l’inspection for the respondent. Turgeon was an inspector.
[21] The respondent in its capacity as Regulator is deemed to know the law. Either there was a licensing issue or there was not. The appellant took the position in its letter of June the 10th, 2005 that there was not. That letter case went unacknowledged and unanswered. Whether there were valid reasons for the failure to reply or not it is disingenuous for the respondent to claim that it only came to the realization in December 2005 that the appellant had committed the infractions for which it was subsequently charged.
[22] I hasten to add that I am not for a moment suggesting that the failure of the respondent to appraise the appellant fully and frankly of Flanders' licensing issue and the potential for an infraction under the statute could be invoked by the appellant in support of a claim of “officially induced error” in the technical sense of that term. None of the five criteria set out by the Ontario Court of Appeal in its decision in Maitland Valley Conservation Authority v. Cranbrooke Swine, [2003] 64 O.R. (3d) 417 and necessary to support such a defence are present here.
[23] The foregoing will serve to set the background against which the various competing arguments of the appellant and the respondent stand to be analyzed.
[Je souligne]
[149] Au sujet de la question de l'interprétation de l'infraction énoncée à l'article 482 LDPSF, la Cour supérieure écrit :
[140] The operative words of "aiding" and "inducing" are however of prime importance in the resolution of this matter. The role that they play in relation to the culpability of the appellant is pivotal. In my view, these words indicate the requirement for some sort of voluntary action on the part of the accused as an essential element of the offence and secondly they also invest the offence with a mens rea component. I will deal with these points one by one.
[141] Quite independently of whether or not a regulatory offence has some mens rea component to it the fact remains that proof of each element of the actus reus must always be established beyond a reasonable doubt. As Mewett and Manning point out in Criminal Law 2nd edition, 1985, Butterworth, Toronto, even offences of strict liability require an actor to do something. I would add to that that liability would also be engaged if the actor omitted to do something that it has a statutory duty to do. That latter notion, however, does not concern us in the case at bar.
[142] The evidence is to the effect that the appellant played a totally passive role throughout the unfolding of the events giving rise to this prosecution. In the introductory paragraphs of this decision I reproduced the resume of the facts relied upon by the first judge. I also cited Phillips' letter of June 10th, 2005 to Turgeon setting out in detail the role of the appellant.
[143] From a review of the evidence and particularly that relied on by the first judge I cannot but conclude that the appellant played no active role with regard either the solicitations made by Flanders to the Quebec participants nor in relation to issuance or the delivery of the certificates of participation. Indeed its role in relation with the Canada wide "floor plan" program including Quebec was merely one, which I would qualify as "ongoing recordkeeping" reflecting information conveyed from time to time by Flanders.
[144] The wording of the statute clearly requires evidence of "helping" or "inducing". There is nothing in the evidence to support the conclusion that the appellant did any such thing. True it did not decline to participate in the program in Quebec. It did not decline to do so because it did not believe that Flanders required to be licensed in Quebec with regard to the "floor plan" coverage. The fact that the appellant did not refuse to participate is however a long way from engaging the operative words of the statute. On this basis alone an acquittal should have been entered with regard to all of the counts.
[150] La Cour supérieure ajoute ceci :
[174] I also agree generally with the position adopted by the appellant in paragraphs 85 to 92 of its factum and with the authorities to which counsel refer. In my respectful view the notion of "aiding" and "inducing" pre-supposes on the part of the appellant not only some sort of voluntary action as but also knowledge that that action will either "help" or "induce" Flanders to carry out the act in question. A mere bystander cannot accomplish that. It may be that it was not necessary for the respondent in to prove that the appellant knew that the circumstances constituted an offence but more than passive acquiescence is required.
[151] Ce tour d'horizon fournit une toile de fond complète pour analyser la seule question que nous présente l'appelante.
[152] L'appelante présente les moyens d'appel dans l'ordre suivant dans son mémoire :
1- Le juge de la Cour supérieure a-t-il erré en droit en concluant que l'infraction prévue à l'article 482 de la LDPSF requiert d'établir la preuve d'une intention coupable (mens rea)?;
2- Le juge de la Cour supérieure a-t-il erré en droit en substituant son appréciation des faits à celle du juge de la Cour du Québec en l'absence d'une erreur manifestement déraisonnable;
3- Le juge de la Cour supérieure a-t-il erré en droit en imposant à l'appelante l'obligation d'aviser préalablement l'intimée du fait qu'elle contrevenait à la LDPSF et en concluant par conséquent à l'application d'une défense d'erreur de fait?
4- Le juge de la Cour supérieure a-t-il erré en droit en concluant que l'infraction sous-jacente reprochée à Flanders n'avait pas été démontrée hors de tout doute raisonnable alors que ce cabinet a plaidé coupable à tous les chefs portés contre elle et que l'intimée a admis les éléments constitutifs de ces infractions?
5) Le juge de la Cour supérieure a-t-il erré en droit en exprimant que l'assurance collective de dommages n'était pas contraire à l'ordre public et en soutenant que, de toute façon, l'appelante tolérait une telle pratique?
[153] Elle a obtenu l'autorisation d'appeler à l'égard de la question qui concerne la classification de l'infraction à l'article 482 LDPSF, mais l'autorisation à l'égard des autres questions a été déférée à notre formation. Ces moyens ne soulèvent pas de questions de droit et la permission d'appeler doit être refusée.
[154] La seule question en litige est celle de la classification de l'infraction prévue à l'article 482 LDPSF. Avec respect pour l'opinion du juge Dalphond, le pourvoi n'est pas mal engagé, il ne porte pas sur l'actus reus de l'infraction.
1) L'AMF
[155] L'AMF fait valoir que la LDPSF doit faire l'objet d'une interprétation large et libérale. L'infraction prévue à l'art. 482 est, selon la présomption énoncée dans l'arrêt Sault Ste-Marie et confirmée dans Lévis c. Tétreault, une infraction de responsabilité stricte. En l'absence de termes tels que « volontairement », « sciemment », « avec l'intention de », on ne peut conclure que le législateur avait l'intention de créer une infraction de mens rea en droit provincial.
[156] Elle estime aussi que l'adoption d'une norme de faute exigeant la participation active de l'assureur à l'infraction de l'auteur principal serait de nature à inciter ceux-ci à être insouciants à l'égard de leur obligation de s'assurer que seuls des cabinets inscrits distribuent des produits d'assurance. Or, affirme-t-elle, être un assureur est un privilège et non un droit. L'exigence que les cabinets d'assurance soient inscrits auprès de l'AMF est le premier rempart qui assure la protection du public, en l'occurrence, les intérêts des assurés.
2) La Souveraine
[157] L'intimée soutient que la norme de réglementation pénale énoncée à l'art. 482 LDPSF tire ses origines de la common law qui exige la preuve d'une mens rea avant de déclarer coupable le complice d'une infraction de responsabilité stricte. Selon l'intimée, cette approche a été confirmée par la jurisprudence canadienne.
1) La classification de l'infraction : mens rea ou responsabilité stricte?
[158] Dans Lévis (Ville) c. Tétreault[23], le juge LeBel décrit le régime canadien de responsabilité pénale. Comme on le sait, normalement, « les infractions réglementaires ou de bien-être public se retrouvent habituellement dans la catégorie des infractions de responsabilité stricte, plutôt que dans celle des infractions de mens rea »[24].
[159] L'intimée invoque toutefois le rôle supplétif joué par la common law en droit pénal québécois à l'égard des principes généraux de la responsabilité pénale pour repousser cette présomption.
[160] Elle s'appuie notamment sur les propos de Létourneau dans l'ouvrage Code de procédure pénale du Québec annoté où l'auteur écrit :
Toutefois, la législation québécoise est généralement silencieuse quant aux principes de responsabilité pénale applicables à la violation d'un texte d'incrimination. Aussi traditionnellement, la common law telle qu'interprétée par la jurisprudence canadienne joue-t-elle un rôle supplétif de première importance au plan des principes généraux du droit pénal substantif. De fait, l'article 60 du Code reconnaît explicitement l'application des principes établis par la jurisprudence tant en droit pénal que criminel, sous réserve des modifications que peuvent y apporter le présent Code et les lois sectorielles[25].
[161] Selon l'intimée, la norme de responsabilité pénale prévue à l'article 482 LDPSF tire son origine de la common law. On trouve la description suivante de cette norme de common law dans Smith and Hogan Criminal Law[26]:
In addition to proof of intention, there is a further, yet more complex element of the secondary party's mens rea: he must have knowledge of, or at least turn a blind eye to, the essential elements of the principal offence.
Before a person can be convicted of aiding and abetting the comission of an offence he must at least know the essential matters which constitue that offence. He need not actually know that an offence has been committed, because he may not know that the facts constitute an offence an ignorance of the law is not a defence[27].
[162] Au sujet de l'état d'esprit requis pour le complice d'une infraction de responsabilité stricte, l'auteur écrit :
Knowledge in abetting an offence of strict liability
D must have this same mens rea - 'knowledge' of the essential elements of P's wrongdoing - for secondary participation in an offence of strict liability as for any other offence. The principal offender may, but a secondary party may not, be convicted without mens rea. The reason is that secondary participation is a common law notion. It was never necessary for a statute creating an offence to specify that is should also be an offence to aid, etc, its commission. It is natural that the normal principles of liability at common law should apply. The result, however, is to emphasize the peculiar nature of offences of strict liability, for the alleged aider who has no mens rea must be acquitted even if he was negligent whereas the principal offender who has cause the actus reus must be convicted even if he took all proper care[28].
[Je souligne]
[163] Ce principe de common law aurait été reconnu par les tribunaux canadiens dont l'arrêt R. v. F.W. Woolworth Co.[29] de la Cour d'appel de l'Ontario. Dans cette affaire, le juge Kelly écrit :
Even with respect to offences of strict liability the alleged aider must know that he is aiding. Although it is not necessary that it be proven that he know that the conduct he is aiding constitutes an offence it is necessary that the accused be proven at least to have known the circumstances necessary to constitute the offence he is accused of aiding[30].
[Je souligne]
[164] Il ajoute :
There is another reason why I am of the opinion that the convictions cannot stand. Section 21 requires that an alleged party must do or omit to do something for the purpose of aiding the principal to commit the offence. That purpose must be the purpose of the one sought to be made a party to the offence (Sweet v. Parsley, supra) but if what is done incidentally and innocently assists in the commission of an offence that is not enough to involve the alleged party whose purpose was not that of furthering the perpetration of the offence[31].
[Je souligne]
[165] Finalement, de l'avis de l'intimée, la Cour suprême aurait adopté ce principe dans R. c. Briscoe[32].
[166] S'appuyant sur l'arrêt Briscoe et les autres décisions citées, l'intimée soutient que l'AMF devait prouver qu'elle avait l'intention d'aider Flanders à commettre l'infraction énoncée à l'article 482 LDPSF.
[167] À son avis, en raison de la lettre du 10 juin 2005 qu'elle a envoyée à l'AMF, elle n'aurait pas eu une telle intention. En effet, en expliquant pourquoi aucune infraction n'avait été commise, la démarche de l'intimée était, par la force des choses, incompatible avec l'intention d'aider Flanders à commettre une infraction. La Souveraine n'aurait pas accompli quoi que ce soit en vue d'aider Flanders à commettre l'infraction à l'article 482 LDPSF. Je rappelle que la lettre de l'intimée a été acheminée à l'appelante avant la date de la commission des infractions.
[168] L'infraction prévue à l'article 482 LDPSF fait partie de « l’immense catégorie des infractions dites réglementaires »[33] que le législateur « édicte comme sanctions accessoires destinées à assurer le respect d’obligations diverses, préservant ainsi le bien-être commun de la société »[34].
[169] Dans Marston c. Autorité des marchés financiers[35], la juge Thibault analyse l'objet de la LDPSF et elle écrit que « l'objectif central de cette loi est la protection du public et que les moyens mis de l'avant pour atteindre ce but se rattachent d'abord et avant tout au contrôle de l'exercice de la fonction par la délivrance d'un certificat autorisant son titulaire à exercer sa profession et par le maintien d'une discipline rigoureuse »[36].
[170] Cette description supporte bien la conclusion que la LDPSF est une loi appartenant à la deuxième catégorie établie par l'arrêt R. c. Sault Ste-Marie[37], soit une infraction de responsabilité stricte. La présomption énoncée dans Sault Ste-Marie devrait donc normalement s'appliquer à moins de trouver des indices à l'effet contraire dans le texte de l'article.
[171] Dans Lévis, le juge LeBel écrit ceci au sujet de l'article du Code de la sécurité routière soumis à son attention dans cette affaire :
29 L’examen de cette disposition ne révèle pas la présence d’un langage qui indiquerait une intention de créer une infraction de mens rea ou, à l’inverse, d’imposer une responsabilité absolue excluant la défense de diligence raisonnable. Le texte de la disposition n’impose nulle part au poursuivant le fardeau de démontrer l’existence de la mens rea. Par contre, le même texte ne comporte aucune expression d’une volonté législative de créer un régime de responsabilité absolue[38].
[172] J'estime que le même commentaire peut être fait à l'égard de l'article 482 LDPSF. Le texte de l'article ne révèle aucun indice de la volonté du législateur de créer une infraction exigeant la preuve de la mens rea.
[173] Malgré la sévérité des amendes en cause, il faut aussi tenir compte du fait que l'infraction prévue à l'article 482 vise une personne morale, l'assureur, plutôt qu'une personne physique. Dans R. c. Wholesale Travel Group Inc.[39], le juge Lamer écrit :
À mon avis, lorsque le droit pénal s'applique à une personne morale, il perd dans une large mesure son caractère "pénal" et devient, essentiellement, une forme "énergique" de droit administratif. Si la possibilité de l'emprisonnement est supprimée et si les stigmates qui se rattachent à la déclaration de culpabilité sont effectivement réduits à la perte d'argent, la personne morale se trouve dans une situation tout à fait différente de celle d'une personne physique. On pourrait certes soutenir que, dans le cas d'une société ayant peu d'actionnaires, soit deux ou trois personnes qui l'administrent elles-mêmes, les stigmates qui s'impriment sur la société sont reportés sur ces individus et ont un effet sur les droits de personnes physiques, mais, à mon avis, ce facteur ne doit pas modifier l'analyse. Les particuliers choisissent la constitution d'une société par actions parce qu'elle comporte de nombreux avantages (juridiques et autres). Ceux qui recourent au paravent de la personnalité morale et qui invoquent la distinction juridique entre eux-mêmes et la personne morale quand ils peuvent en tirer profit, ne doivent pas être autorisés à nier cette distinction dans les circonstances qui nous occupent (lorsque la distinction n'opère pas à leur avantage)[40].
[Je souligne]
[174] Le fait que l'infraction définie à l'article 482 vise une personne morale est une raison supplémentaire pour la qualifier d'infraction de responsabilité stricte.
[175] Par ailleurs, il faut aussi tenir compte, comme le souligne le juge Cory dans son opinion dans Wholesale, de « la nature distinctive de l'activité réglementaire »[41] et de « la nécessité fondamentale d'assurer la protection des personnes vulnérables par des lois de nature réglementaire »[42]. De plus, l'assureur accepte les conditions posées par la LDPSF dans la poursuite de l'activité réglementée[43].
[176] Concrètement, en raison de l'acceptation des conditions énoncées à la LDPSF et de la vulnérabilité des assurés visés par cette loi[44], j'estime que l'intimée devait faire preuve de diligence raisonnable afin de respecter l'article 482 LDPSF.
[177] La question qui se posait à l'intimée était de savoir si elle devait utiliser les services d'un cabinet en assurance inscrit auprès de l'AMF pour la délivrance d'une police d'assurance. Il ne semble pas excessif et contraire aux principes fondamentaux de la responsabilité pénale de s'attendre à ce qu'un assureur ait l'obligation de faire preuve de diligence raisonnable à cet égard.
[178] Je souligne que, lors de leur témoignage, les deux dirigeants de La Souveraine ont admis qu'ils étaient bien conscients de cette exigence de la LDPSF et de la nécessité de faire preuve de diligence raisonnable afin de s'assurer que la délivrance de polices d'assurance s'effectue par l'intermédiaire d'un cabinet inscrit.
[179] Le
dernier argument qui doit être considéré est celui qui est fondé sur les arrêts
Woolworth et Briscoe. À mon avis, il doit être rejeté en raison
de la différence entre la rédaction de l'article
[180] L'alinéa
[181] Cette différence est essentielle puisque la méthode moderne d’interprétation législative enseigne qu’« il faut lire les termes d’une loi dans leur contexte global en suivant le sens ordinaire et grammatical qui s’harmonise avec l’esprit de la loi, l’objet de la loi et l’intention du législateur »[45].
[182] La terminologie utilisée à l'article 482, dans le contexte du droit réglementaire, est un indice important que le législateur ne voulait pas créer une infraction de mens rea.
[183] D'ailleurs, dans l'arrêt Briscoe, la juge Charron explique l'importance de l'expression « en vue de » :
15 Évidemment, accomplir ou omettre d’accomplir une chose qui a pour effet d’aider une autre personne à commettre un crime ne suffit pas à engager la responsabilité criminelle. Comme l’a souligné la Cour d’appel de l’Ontario dans R. c. F. W. Woolworth Co. (1974), 3 O.R. (2d) 629, [TRADUCTION] « une personne ne se rend pas coupable en louant ou en prêtant une voiture pour des activités commerciales ou récréatives légitimes simplement parce que la personne à qui elle a prêté ou loué la voiture décide au cours de l’utilisation de transporter des articles volés, ou en louant une maison à des fins résidentielles à un locataire qui l’utilise à son insu pour entreposer des drogues » (p. 640). La personne qui aide ou qui encourage doit aussi avoir l’état d’esprit requis ou la mens rea requise. Plus précisément, aux termes de l’al. 21(1)b), la personne doit avoir prêté assistance en vue d’aider l’auteur principal à commettre le crime.
16 L’exigence de
la mens rea qui ressort de l’expression « en vue de » à l’al. 21(1)b)
comporte deux éléments : l’intention et la connaissance. En ce qui concerne
l’élément d’intention, il a été établi dans R. c. Hibbert,
[TRADUCTION] Un homme se fait dire par un ami qu’il va dévaliser une banque, qu’il aimerait utiliser sa voiture pour s’enfuir et qu’il lui versera 100 $ en échange de ce service. Lorsqu’il est [. . .] accusé, en vertu de l’art. 21, d’avoir accompli quelque chose en vue d’aider son ami à commettre l’infraction, cet homme peut-il dire « Mon but était non pas d’aider à commettre le vol, mais de gagner 100 $ »? Il soutiendrait que, même s’il savait qu’il aidait à commettre le vol, son désir était d’obtenir les 100 $ et il lui était parfaitement égal que le vol réussisse ou non.
(W. Mewett et M. Manning, Criminal Law (2e éd. 1985), p. 112)[46]
[Je souligne]
[184] En droit
criminel, l'exigence posée par l'article
[185] Par contre, je le souligne de nouveau, l'article 482 LDPSF est une infraction de droit réglementaire qui n'exige pas la preuve d'une intention spécifique selon laquelle l'aide apportée par l'assureur l'a été en vue d'aider un cabinet, ou un représentant autonome ou une société autonome à enfreindre la LDPSF.
[186] Avec respect pour l'opinion contraire, l'assureur qui pose un geste qui a pour effet d’aider un cabinet, ou un représentant autonome ou une société autonome à enfreindre la LDPSF engage sa responsabilité pénale.
[187] Puisque l'article 482 est une infraction de responsabilité stricte, il n'était pas nécessaire d'établir que l'assureur avait l'intention d'aider Flanders à enfreindre la LDPSF, mais simplement que les gestes posés ont aidé Flanders à commettre l'infraction, c'est-à-dire d'agir comme cabinet sans être inscrit auprès de l'AMF.
2) L'actus reus
[188] Il n'est pas strictement nécessaire de se prononcer sur la question de l'actus reus, car cette question ne fait pas l'objet du pourvoi, mais compte tenu de l'importance que lui accorde le juge Dalphond, j'estime préférable de formuler les observations suivantes.
[189] Dans son jugement, la Cour supérieure aborde la question de l'actus reus. Elle conclut que La Souveraine a joué un rôle complètement passif dans la commission de l'infraction par Flanders.
[190] Je souligne que cette question n'est pas un moyen que La Souveraine avait soumis au juge du procès.
[191] La raison est très simple, essentiellement La Souveraine admettait sa participation à l'infraction, mais pas sa culpabilité. Elle soutenait plutôt que cette participation n'entraîne pas sa culpabilité en raison de l'exigence de mens rea. C'est ainsi que le juge du procès formule la question dans son jugement.
[192] Afin de mettre la question dans sa juste perspective, il faut rappeler la nature de la participation alléguée contre La Souveraine dans la commission des infractions par Flanders.
[193] Je reproduis de nouveau un des constats d'infraction:
À Alma et ses environs, dans le district judiciaire
d'Alma, le ou vers le 25 août 2005, a consenti et/ou autorisé Flanders
Insurance Management and Administrative Services Ltd., un cabinet non
inscrit auprès de l'Autorité des marchés financiers, à délivrer à
Atelier Fortin Sports Inc. une police d'assurance sur les stocks, numéro
[…], le tout en contravention à l'article
[Je souligne]
[194] La conduite reprochée à l'intimée était d'avoir consenti et/ou autorisé Flanders, un cabinet non inscrit auprès de l'AMF, à délivrer une police d'assurance sur les stocks.
[195] La rédaction du constat n'est pas vague et large, elle précise plutôt la nature de l'aide reprochée à la Souveraine. La nature de l'infraction n'est pas modifiée par cette précision. La poursuite n'avait pas l'obligation de préciser cette conduite ou la nature de l'aide, mais l'ayant fait, elle devait en faire la preuve[49].
[196] L'intimée n'a jamais prétendu qu'elle n'avait pas autorisé et/ou consenti à ce que Flanders délivre des polices d'assurance sur les stocks ou que Flanders a délivré des polices d'assurance sans son autorisation.
[197] Il lui aurait été difficile de le faire. Le dossier contient, en effet, un exemple de police d'assurance signée par Flanders au nom de l'intimée. Ce document a d'ailleurs été transmis par l'intimée à l'AMF avec sa lettre du 10 juin 2005.
[198] De plus, il faut tenir compte de la conclusion à laquelle est arrivé le juge du procès en se fondant sur la preuve qu'il analyse[50], il écrit :
[60] La défenderesse a donc autorisé, permis ou consenti à ce que Flanders délivre des polices d'assurance sachant que cette dernière n'avait pas les permis requis. Cette délivrance ne s'est pas faite à l'insu de la défenderesse.
[199] De l'ensemble de la preuve entendue, le juge du procès pouvait conclure que la Souveraine a autorisé et/ou consenti à ce que Flanders délivre des polices d'assurance. Cette autorisation ne fait, à mon avis, aucun doute.
[200] En l'absence d'une erreur manifeste et dominante à l'égard de l'interprétation des faits, j'estime que la Cour supérieure ne pouvait intervenir.
[201] Il ne saurait dès lors être question d'une conduite passive de la part de La Souveraine, car elle a autorisé et/ou consenti à ce que Flanders délivre les polices d'assurance qui font l'objet des constats d'infraction.
[202] En l'espèce, le consentement ou l'autorisation à la délivrance de polices d'assurance par Flanders était suffisant pour établir l'actus reus de l'infraction prévue à l'article 482 LDPSF, sous réserve de la preuve de diligence raisonnable.
[203] L'autorisation de La Souveraine a eu pour effet d'aider Flanders à commettre l'infraction prévue à l'article 71 de la LPDSF. Flanders ne pouvait délivrer les polices d'assurance sans l'autorisation de l'intimée. Cette autorisation est un geste positif qui établissait la commission de l'infraction par La Souveraine.
[204] À moins de prétendre que l'autorisation ou le consentement de La Souveraine à délivrer des polices d'assurance n'a pas eu pour effet d'aider Flanders à commettre une infraction à la LPDSF, il me semble difficile de conclure autrement. L'actus reus a été établi.
[205] J'examine maintenant si La Souveraine a fait preuve de diligence raisonnable.
A- Les principes et l'application à l'espèce
[206] Même si l'intimée a principalement fait valoir qu'elle n'avait pas la mens rea requise par l'article 482 de la LDPSF, interprétation que j'ai rejetée, il convient maintenant d'examiner si sa conduite était diligente.
[207] En l'espèce, la diligence raisonnable de l'intimée ne peut être fondée que sur sa lettre du 10 juin 2005 à l'AMF où elle expose sa prétention qu'il n'est pas nécessaire de recourir aux services d'un cabinet inscrit auprès de l'AMF. Dans ses motifs, le juge Dalphond fait valoir que La Souveraine pouvait aussi se fonder sur l'avis juridique des conseillers de Flanders.
[208] Essentiellement, la question est de savoir si la démarche de La Souveraine auprès de l'AMF fait la preuve qu'elle a pris toutes les mesures raisonnables pour éviter la commission de l'infraction.
[209] Dans Lévis, le juge LeBel résume la défense de diligence raisonnable reconnue dans Sault Ste-Marie :
Dans l’approche qui a été adoptée par notre Cour, il s’agit en réalité de laisser au prévenu la possibilité et le fardeau de démontrer une diligence raisonnable. On applique à ce moment une norme objective, qui apprécie son comportement par rapport à celui d’une personne raisonnable, placée dans un contexte similaire. Le juge Dickson décrivait ainsi les infractions de responsabilité stricte :
2. Les infractions dans lesquelles il n’est pas nécessaire que la poursuite prouve l’existence de la mens rea; l’accomplissement de l’acte comporte une présomption d’infraction, laissant à l’accusé la possibilité d’écarter sa responsabilité en prouvant qu’il a pris toutes les précautions nécessaires. Ceci comporte l’examen de ce qu’une personne raisonnable aurait fait dans les circonstances. La défense sera recevable si l’accusé croyait pour des motifs raisonnables à un état de fait inexistant qui, s’il avait existé, aurait rendu l’acte ou l’omission innocent, ou si l’accusé a pris toutes les précautions raisonnables pour éviter l’événement en question. Ces infractions peuvent être à juste titre appelées des infractions de responsabilité stricte. C’est ainsi que le juge Estey les a appelées dans l’affaire Hickey[51].
[210] Le juge Doherty de la Cour d'appel de l'Ontario résumait récemment la défense de diligence raisonnable dans R. c. Raham[52]. Il écrit :
A due diligence defence to a strict liability charge amounts to a claim that the defendant took all reasonable care to avoid committing the offence with which he or she is charged. Where the accused contends that he or she operated under a reasonable misapprehension of the relevant facts, the due diligence defence takes the form of a reasonable mistake of fact claim. As explained in Sault Ste. Marie, at p. 1326:
[T]he doing of the prohibited act prima facie imports the offence, leaving it open to the accused to avoid liability by proving that he took all reasonable care. This involves consideration of what a reasonable man would have done in the circumstances.
The due diligence defence relates to the doing of the prohibited act with which the defendant is charged and not to the defendant's conduct in a larger sense. The defendant must show he took reasonable steps to avoid committing the offence charged, not that he or she was acting lawfully in a broader sense: see John Swaigen, Regulatory Offences in Canada: Liability & Defences (Toronto: Carswell, 1992), at pp. 98-100. The point is well made in Kurtzman, at para. 37: "The due diligence defence must relate to the commission of the prohibited act, not some broader notion of acting reasonably" (emphasis in original). Just as a due diligence defence is not made out by acting generally in a reasonable way, it is not necessarily lost by virtue of actions surrounding the prohibited act, legal or illegal, unless those actions establish that the defendant, in committing the prohibited act, failed to take all reasonable care[53].
[Je souligne]
[211] La
prétention de l'intimée ne s'articule pas autour de l'idée que sa conduite
était généralement raisonnable, ce qui ne peut, selon l'arrêt Raham,
constituer une défense, mais plutôt qu'elle s'est enquise de l'exactitude de
son interprétation auprès de l'AMF, qui agit, selon l'article
[212] La démarche de La Souveraine peut-elle être considérée comme une conduite raisonnable pour éviter la commission de l'infraction?
[213] Dans Lévis, le juge LeBel écrit :
30 Dans le cas de M. Tétreault, les jugements attaqués ont confondu passivité et diligence. Le prévenu s’est contenté d’affirmer qu’il s’attendait à recevoir un avis de renouvellement de son permis et qu’il avait confondu date d’expiration du permis et date d’exigibilité des droits payables pour le maintenir en vigueur. Il n’a justifié d’aucune démarche ou tentative de se renseigner. Le concept de diligence repose sur l’acceptation d’un devoir de responsabilité du citoyen de chercher activement à connaître les obligations qui lui sont imposées. L’ignorance passive ne constitue pas un moyen de défense valable en droit pénal. En conséquence, les jugements d’acquittement dans ce cas sont mal fondés. La Cour municipale aurait dû reconnaître la culpabilité de l’intimé à l’accusation et lui imposer l’amende prévue par la loi.
[Je souligne]
[214] Dans la présente affaire, La Souveraine a cherché activement, dans sa lettre du 10 juin 2005 auprès de l'AMF, à connaître les obligations qui lui sont imposées. Il ne s'agit donc pas d'un cas d'ignorance passive.
[215] Cette lettre est toutefois demeurée sans réponse. Il ne saurait être question, dans les circonstances, d'une erreur provoquée par une personne en autorité, mais peut-on considérer que cette démarche établit la diligence raisonnable de La Souveraine?
[216] Le passage précité de l'arrêt Lévis a fait l'objet d'un commentaire par les auteurs Boyle et de Groot The Responsible Citizen in the City of Lévis: Due Diligence and Officially Induced Error. Ils se demandent si l'opinion émise par le juge LeBel dans Lévis n'introduit pas un changement dans l'approche de la diligence raisonnable conduisant à son élargissement. Ils écrivent :
On the other hand, the Court does not assert an absolute duty to know the law, just one of due diligence. The "civic duty" aspect of the case appears to conjure an unrealistic image of the citizen competent to navigate the complex regulatory state. However, conceptualizing knowledge of the law in terms of diligent effort may provide support for defence arguments that accused persons had exercised due diligence with respect to knowing the law and thus should be acquitted[54].
[Je souligne]
[217] Si l'interprétation des auteurs Boyle et de Groot devait être adoptée, elle devrait conduire à l'acquittement de La Souveraine.
[218] La Cour supérieure adopte d'une certaine manière une position similaire.
[219] Avec respect pour l'opinion contraire, l'extension de la diligence raisonnable à des circonstances comme celle de l'espèce, ne reflète pas l'état du droit au Canada et soulève des questions sérieuses de politique pénale.
[220] Les conditions d'application de la défense de diligence raisonnable et de la défense d'erreur provoquée par une personne en autorité sont bien connues. Il n'est pas prudent d'en modifier l'équilibre, car cela ne ferait qu'accroître l'incertitude dans l'application de la défense de diligence raisonnable en droit réglementaire.
[221] J'estime donc préférable d'adopter l'opinion énoncée par le juge en chef Lamer dans R. c. Jorgensen[55] à l'égard de la règle relative à l'ignorance de la loi :
Bien que, selon Stuart, la règle relative à l'ignorance de la loi soit sommaire et que ces principes ne soient pas convaincants de nos jours, cette maxime constitue un principe directeur de notre droit criminel qui ne devrait pas être perturbé à la légère[56].
[Je souligne]
[222] Comme l'explique le juge LeBel dans Lévis, l'approche de la Cour suprême à l'égard de cette question est constante, tant en matière criminelle qu'en droit réglementaire. Il écrit :
22 Notre Cour a appliqué fermement et
constamment le principe de l’irrecevabilité d’une défense d’ignorance de la
loi. Elle a d’ailleurs donné effet à ce principe, non seulement en droit criminel
proprement dit, mais aussi à l’égard des infractions réglementaires (Molis
c. La Reine,
[Je souligne]
[223] On le constate, la rigidité de la règle relative à l'ignorance de la loi est susceptible de soulever des inquiétudes à l'égard de certaines condamnations. Afin de déterminer si c'est le cas en l'espèce, il convient d'analyser l'opinion émise par le juge Lamer dans Jorgensen.
[224] Dans cette affaire, où il aborde la question de l'erreur de droit provoquée par une personne en autorité, le juge Lamer confirme les principes qu'il avait lui-même énoncés dans l'arrêt Molis[58] au sujet de la portée de la défense de diligence raisonnable. Il écrit :
22 Stuart et Kastner ont interprété l'arrêt Molis, précité, de notre Cour comme écartant la possibilité d'élaborer un moyen de défense fondé sur l'erreur de droit provoquée par une personne en autorité. Compte tenu de ces interprétations, je clarifierai la portée de l'arrêt Molis. Dans cet arrêt, au nom de la Cour à l'unanimité, j'ai affirmé qu'il n'existait aucun moyen de défense fondé sur l'ignorance d'un règlement (à la p. 361) et j'ai conclu (à la p. 364) :
. . . l'arrêt Sault Ste-Marie parle de la défense de diligence raisonnable par rapport à l'accomplissement d'une obligation imposée par la loi et non par rapport aux recherches sur l'existence d'une interdiction ou sur son interprétation.
Comme l'a souligné la Cour d'appel de l'Ontario dans l'arrêt Cancoil Thermal, la diligence raisonnable comme moyen de défense est distinct de celui fondé sur l'erreur provoquée par une personne en autorité. Bien que la diligence raisonnable exercée pour vérifier le droit ne constitue pas une excuse, le fondement raisonnable sur un avis officiel qui est erroné excusera l'accusé mais, à mon avis, n'écartera pas la culpabilité. Il existe deux distinctions importantes entre ces dispositions connexes. Premièrement, la diligence raisonnable dans des circonstances appropriées constitue un moyen de défense complet. S'il est soulevé avec succès, les éléments de l'infraction ne sont pas complétés. Par ailleurs, l'erreur provoquée par une personne en autorité n'écarte pas la culpabilité. Elle fonctionne plutôt comme la provocation policière, c'est-à-dire comme une excuse pour un accusé dont la culpabilité a été établie par le ministère public. Deuxièmement, la diligence peut être nécessaire pour obtenir le conseil sur lequel est fondée l'erreur provoquée par une personne en autorité. Il en est ainsi parce qu'un accusé qui cherche à se fonder sur cette excuse doit avoir évalué la possibilité d'illégalité de ses actions et s'être renseigné de façon raisonnable[59].
[Je souligne]
[225] Il faut retenir de l'opinion du juge Lamer énoncée dans Molis que « l'arrêt Sault Ste-Marie parle de la défense de diligence raisonnable par rapport à l'accomplissement d'une obligation imposée par la loi et non par rapport aux recherches sur l'existence d'une interdiction ou sur son interprétation »[60] et que « la diligence raisonnable exercée pour vérifier le droit ne constitue pas une excuse »[61].
B - L'arrêt Lévis élargit-il la défense de diligence raisonnable?
[226] La question qui se pose ici est de déterminer si l'opinion du juge LeBel (paragr. 30 de l'arrêt Lévis) énonce un élargissement de la défense de diligence raisonnable qui écarterait l'opinion du juge Lamer dans l'arrêt Molis.
[227] Les auteurs Manning, Mewett et Sankoff formulent les observations suivantes au sujet de ce paragraphe de l'arrêt Lévis :
The excerpt is horribly confused. To begin with, it seems to confuse the defence of due diligence with that of a reasonable mistake of fact. While due diligence requires inquiries of the sort suggested by the Court, a mistake of fact defence does not. It simply requires that the accused rely upon facts that are reasonably perceived. As Boyle and Groot have suggested, the decision "appears to conclude that there is no defense that an accused person made a reasonable, albeit passive error".
This is hardly the only implication of the Court's approach. As aforementioned, the mistake made by the accused seems to be one of law, and the Court said nothing to indicate otherwise. Nonetheless, despite rejecting the accused's defence on the facts the Court implied that the mistake claim might have been accepted had the accused been more diligent in understanding what his obligation were.
This finding seems contrary to the well accepted notion that undertaking due diligence to ascertain what one's legal obligations are is not a defence to criminal liability[62].
[Je souligne] [Les appels de note sont omis]
[228] À mon avis, le droit canadien n'est pas incertain. Dans Lévis, le juge LeBel réfère tant à l'opinion du juge Lamer dans Jorgensen qu'à l'arrêt Molis. Il note que la Cour suprême a toujours fermement appliqué le principe de l’irrecevabilité d’une défense d’ignorance de la loi tant en droit criminel qu'en droit réglementaire. S'il était d'avis que la défense de diligence raisonnable devait être élargie, cette opinion aurait été énoncée plus clairement.
C - L'erreur mixte de fait et de droit de La Souveraine
[229] La question suivante est de savoir si l'ensemble des circonstances justifie la conclusion que l'erreur de La Souveraine avait, en partie, une composante factuelle qui permet de reconnaître une défense d'erreur sincère et raisonnable.
[230] Selon l'arrêt Sault-Ste-Marie, cette défense est recevable si l’accusé croyait pour des motifs raisonnables à un état de fait inexistant qui, s’il avait existé, aurait rendu l’acte ou l’omission innocent.
[231] La Souveraine n'a pas prétendu à l'existence d'un état de fait inexistant qui aurait justifié que les gestes visés par les constats d'infraction étaient innocents. De plus, elle n'a pas prétendu que le silence de l'AMF l'avait induite en erreur. Les faits et circonstances invoqués pour soutenir une défense d'erreur de fait sincère et raisonnable sont liés aux représentations de La Souveraine quant à ses obligations juridiques auprès de l'AMF et au silence de celle-ci[63].
[232] Le seul silence de l'AMF ne peut transformer une erreur de droit en erreur mixte de fait et de droit.
[233] De plus, ce silence ne peut justifier ce qui est essentiellement une prétention que l'erreur de La Souveraine - l'ensemble des faits qui lui laissaient croire que son interprétation était fondée - a été provoquée par le silence de l'AMF.
[234] D'une part, la question n'a pas été soulevée par La Souveraine.
[235] D'autre part, s'il fallait que cet argument soit maintenant analysé dans le contexte d'une défense de diligence raisonnable cela permettrait de contourner l'une des conditions d'admissibilité de la défense d'erreur provoquée par une personne en autorité, soit la présence d'un avis. Or, il n'y a aucun avis de l'AMF dans le présent dossier, seul son silence.
[236] En conclusion, l'argument n'est pas recevable, car la défense d'erreur provoquée par une personne en autorité est une exception à la règle relative à l'ignorance de la loi. Cette défense doit satisfaire aux exigences strictes énoncées dans Lévis[64]. Il n'est pas souhaitable de modifier ces exigences et de les présenter sous de nouveaux oripeaux moins contraignants dans le cadre d'une défense de diligence raisonnable.
D - La diligence raisonnable et les avis juridiques
[237] Il est maintenant nécessaire d'aborder plus spécifiquement la question des avis juridiques reçus par Flanders et dont La Souveraine a eu connaissance.
[238] J'estime que ces avis ne peuvent fonder une défense de diligence raisonnable.
[239] Il faut rappeler les fondements de la règle qui veut que l'ignorance de la loi ne soit pas une défense. Les auteurs Manning, Mewett et Sankoff écrivent ceci dans leur ouvrage :
It is often said that ignorance of the law is no excuse and as a general maxim - now incorporated in section 19 of the Code - the statement is correct, although it does require more careful analysis. A better way of framing the proposition would be to say that knowledge that one's act is contrary to the law is not normally one of the constituent elements of an offence and therefore a mistake as to what the law is does not affect one's potential culpability. That is to say, a belief that an act is lawful, however much it might affect one's punishment, does not affect liability. The principle is characterized quite broadly, and extends to ignorance or any mistake regarding the existence of the law, its meaning, scope or application[65].
[Je souligne]
[240] Les auteurs ajoutent la précision suivante dans une note infrapaginale au sujet des avis juridiques sur lesquels pourrait se fonder un accusé pour expliquer l'erreur de droit commise :
Thus, those who act under a mistaken understanding of the law - including even those who act on a lawyer's opinion - are still culpable. See, e.g., Kotch, [1990] A.J. No. 1029, 61 C.C.C. (3d) 132 (Alta. C.A.); Whelan, [2002] N.J. No. 312, 170 C.C.C. (3d) 151 (Nfld. C.A.). As Andrew Simester & Warren Brookbanks, Principles of Criminal Law, 3d ed. (Wellington: Brookers, 2007) at 443, have noted:
In part this is because of the possibility of abuse; in particular, the concern that granting the excuse might lead people towards purchasing custom-made legal opinions in order to acquire immunity from criminal prosecutions. But more generally, such reliance is excluded because, while a lawyer's task may be to present legal arguments for one party before a court, the power and the right to adjudicate between those arguments lies with judges alone[66].
[Je souligne]
[241] Dans R. c. Eizenga[67], la juge Weiler de la Cour d'appel de l'Ontario écrit :
79 First, it was not open to Eizenga
to advance what amounts to a mistake of law defence based on the legal advice
that he received. It is well established that reliance on legal advice
is a mistake of law which affords no defence to the commission of an offence:
R. v. Pea (2008), 93 O.R. (3d) 67 (C.A.), at para. 17; R. v. Pontes,
[Je souligne]
[242] Dans l'arrêt R. c. Pontes[68] auquel la juge Weiler réfère, une affaire soulevant, comme en l'espèce, la diligence raisonnable, le juge Cory formule les commentaires suivants :
Pour déterminer s'il est possible d'invoquer, en
l'espèce, l'un ou l'autre des aspects du moyen de défense fondé sur la
diligence raisonnable, il est important de se rappeler le principe bien établi,
incorporé à l'art.
L'application de ce principe mène à la conclusion qu'un
accusé ne peut pas invoquer comme moyen de défense qu'il s'est enquis de façon
raisonnable de la légalité de ses actes ou de sa situation. Ce moyen de
défense a été explicitement rejeté dans l'arrêt Molis c. La Reine,
Il me paraît évident que nous sommes en présence d'une infraction qu'on ne doit pas considérer comme une infraction de responsabilité absolue et que, par conséquent, un accusé peut invoquer la diligence raisonnable comme moyen de défense. Mais je m'empresse d'ajouter que l'arrêt Sault Ste-Marie parle de la défense de diligence raisonnable par rapport à l'accomplissement d'une obligation imposée par la loi et non par rapport aux recherches sur l'existence d'une interdiction ou sur son interprétation[69].
[Je souligne.]
[243] Un accusé ne peut se fonder sur un avis juridique pour établir une défense de diligence raisonnable. Ces principes s'appliquent aussi en droit pénal québécois[70].
[244] Dans sa lettre du 10 juin 2005 à l'AMF, La Souveraine énonce les raisons qui l'amènent à conclure qu'elle ne doit pas faire appel à un cabinet d'assurance inscrit au sens de la LDPSF.
[245] Elle a donc cherché activement à connaître les obligations qui lui sont imposées, mais sa lettre étant restée sans réponse, une défense d’erreur provoquée par une personne en autorité ne peut être invoquée[71].
[246] La démarche de l'intimée ne fait pas la preuve de sa diligence raisonnable selon les paramètres énoncés dans les arrêts Sault Ste-Marie, Molis, Pontes et Lévis. Elle ne pouvait pas non plus se fonder sur les avis juridiques reçus par Flanders.
[247] Comme le constate le juge du procès, je rappelle que La Souveraine «savait pourtant, dès lors [avril 2005], qu'une enquête était menée au sujet des polices distribuées par Flanders sans permis au Québec »[72]. Sa lettre du 10 juin 2005 ne laisse d'ailleurs aucun doute quant à sa connaissance des préoccupations de l'AMF.
[248] De plus, comme je l'ai déjà indiqué plus haut, ses dirigeants ont témoigné être conscients de leur obligation de s'assurer de procéder à la délivrance de produits d'assurance par le biais d'un cabinet inscrit.
[249] J'estime néanmoins nécessaire de formuler un dernier commentaire. Je partage entièrement les préoccupations de la Cour supérieure quant à la conduite de l'AMF. Il va sans dire que l'impression générale quant au comportement de l'AMF est exacerbée par le fait qu'un constat d'infraction a été déposé à l'égard de chaque police d'assurance délivrée avec la conséquence qu'une amende minimale de 10 000$ devait être imposée dans chaque cas. Je rappelle que l'AMF agit à titre de centre de renseignements et de référence dans tous les domaines du secteur financier au sens de sa loi constitutive. Il n'est pas surprenant que les dirigeants de l'intimée aient cru que l'AMF répondrait à leurs questions. On peut même penser que cela aurait pu éviter la commission des infractions en l'espèce.
[250] Cela dit, l'arrêt Molis a été rendu en 1980. Les principes qui y sont énoncés ont été réitérés dans les arrêts Pontes[73] et Lévis[74]. Le droit n'est pas nouveau dans ce domaine. En l'absence d'une réponse de l'AMF, le renouvellement des polices d'assurance devait s'effectuer par l'entremise d'un cabinet inscrit auprès de l'AMF.
[251] Je ne considère donc pas qu'il y a, dans ce dossier, une « déclaration de culpabilité manifestement injuste » pour reprendre l'expression utilisée par le juge en chef Lamer dans Jorgensen[75].
[252] POUR CES MOTIFS, je propose d'accueillir l'appel, d'annuler le jugement de la Cour supérieure et de rétablir les condamnations de l'intimée.
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GUY COURNOYER, J.C.A. (AD HOC) |
[1] Voir copie du certificat, M.A. p. 188, 196, 215
[2] Témoignage de Stephen C. Soltendieck, administrateur des opérations de La Souveraine au Québec, p. 214-215, reproduit au jugement de la Cour du Québec au par. 53.
[3] L’art. 490 de la LDPSF, alors applicable, prévoyait une amende minimale de 10 000 $ par chef.
[4]
La Cour suprême a reconnu, en interprétant l’art.
[5]
Aucune preuve ni même indice ici du contraire. De plus, la bonne foi se
présume, principe que reconnaît d'ailleurs le Code civil (art.
[6] Ainsi, l'acte positif fait de bonne foi par un assureur raisonnable peut ne pas engendrer sa responsabilité, même si cela permet au cabinet de violer la loi. Par exemple, l'assureur qui autorise un courtier ontarien à distribuer ses produits en Ontario ne peut être responsable du fait que ce courtier délivre une police au Québec à son insu. Il peut au contraire présumer que le cabinet respectera les limites de son autorisation, même si ce fait s'avère erroné.
[7] Tant le juge de la Cour du Québec que celui de la Cour supérieure excluent, à bon droit, la thèse de l'erreur provoquée par une personne en autorité, soit l’AMF.
[8] Au par. 61 de son jugement, le juge du procès associe le comportement de l'assureur à une simple erreur de droit, ce qui ne peut constituer une défense, tout en lui reprochant au par. 65 de ne pas avoir sollicité un avis juridique. Dans son analyse de la diligence raisonnable, le juge de la Cour supérieure tient compte de la pratique ailleurs au Canada, de la réaction des autres organismes provinciaux de régulation, de la nature particulière du produit et du silence de l'AMF à la suite de l'envoi de la lettre du 10 juin par La Souveraine et conclut au par. 121 de son jugement : « the error attributable to the appelant is at the very least one of mixed fact and law » .
[9] Voir le par. 65 du jugement de la Cour du Québec.
[10] Ce mot est manquant, mais il est manifeste qu'il s'agit d'une erreur d’écriture.
[11]
[12] R.S.Q., c. A-33.2.
[13] Ibid., s. 7, para. 2 (in French, “agit [...] de centre de renseignements et de référence dans tous les domaines du secteur financier”).
[14] Ibid., subs. 8(4) (in French, “à donner aux personnes et aux entreprises un accès à une information fiable, exacte et complète sur les institutions financières et autres intervenants du secteur financier et sur les produits et services financiers offerts”).
[15]
[16] See Lévis, supra, note 5.
[17] A.J. Ashworth, "Excusable Mistake of Law" [1974] Crim. L.R. 652, 658 and, by the same author, "Testing Fidelity to Legal Values: Official Involvement in Criminal Justice" (2000) 63 Modern. L.R. 633.
[18] Supra, note 5, 435.
[19] Ce certificat d'assurance est signé par Gordon B. Roberts, vice-président de Flanders. Le texte placé au-dessus de sa signature est le suivant: « Signed on behalf of the Insurer(s) by Flanders Insurance Management and Admnistrative Services Ltd. ».
[20] Loi sur la distribution de produits et services financiers, L.R.Q., c. D-9.2.
[21] Voir le paragr. 84 des motifs du juge Dalphond.
[22]
Voir l'article
[23]
[24]
2006 CSC 12
,
[25] Gilles Létourneau, Code de procédure pénale du Québec annoté 2011, 9e éd., Wilson & Lafleur, 2011, p. 11.
[26] David Ormerod, Smith and Hogan Criminal Law, 12th ed., Oxford, Oxford University Press, 2008. Dans son mémoire, l'intimée réfère à une édition antérieure de cet ouvrage où la formulation de la norme est légèrement différente, mais la substance de l’argument n'en est pas altérée.
[27] Ibid., p. 198. L'auteur réfère à l'arrêt Johnson v. Youden, [1950] 1 KB 544, 546.
[28] David Ormerod, Smith and Hogan Criminal Law, 12th ed, Oxford, Oxford University Press, 2008, p. 201.
[29] (1975), 18 C.C.C. (2d) 23 (Ont. C.A.).
[30] R. c. Woolworth, (1975), 18 C.C.C. (2d) 23 (Ont. C.A.), 32.
[31] Ibid., 34. La même conclusion est formulée dans R. c. Fell (1981), 64 C.C.C. (2d) 456, 463 (Ont. C.A.).
[32]
[33]
Lévis c. Tétreault,
[34] Ibid.
[35]
[36] Ibid., paragr. 52.
[37]
R. c. Sault Ste-Marie,
[38]
Lévis (Ville) c. Tétreault,
[39] R. c. Wholesale Travel Group Inc.,
[40] Ibid., 182-3. Sur cette question, l'opinion du juge Lamer est partagée par huit juges.
[41] Ibid., 227.
[42] Ibid.
[43] Ibid, 228-229 (le juge Cory).
[44]
R. c. Wholesale Travel Group Inc.,
[45]
Hypothèques Trustco Canada Mortgage c. Canada,
[46]
R. c. Briscoe,
[47] Ibid., paragr. 15,
[48] Ibid. Voir aussi R. c. M.R.,
[49] Steven Penney, Vincenzo Rondinelli et James Stribopoulos, Criminal
Procedure in Canada, 2011, LexisNexis, §11.22, 587; R. c. Thatcher,
[50] Voir notamment les paragraphes 50, 52, 54, 58 du jugement d'instance.
[51]
Lévis (Ville) c. Tétreault,
[52]
[53] Ibid., paragr. 47-48.
[54] Christine Boyle et Sam de Groot, «The Responsible Citizen in the City of Lévis: Due Diligence and Officially Induced Error » (2006), 36 C.R. (6th) 249, 254-55.
[55]
[56] Ibid., paragr. 5.
[57]
2006 CSC 12
,
[58]
Molis c. La Reine,
[59] [1995] 4 R.C.S. 55 , paragr. 22.
[60] Ibid.
[61] Ibid.
[62] Morris Manning, Alan Mewett et Peter Sankoff, Criminal Law, 4th ed., Markham, LexisNexis, 2009, 224-225.
[63] Voir les paragraphes 109 à 113 du jugement de la Cour supérieure.
[64]
2006 CSC 12
,
[65] Morris Manning, Alan Mewett et Peter Sankoff, Criminal Law, 4th ed., Markham, LexisNexis, 2009, 356-357.
[66] Morris Manning, Alan Mewett et Peter Sankoff, Criminal Law, 4th ed., Markham, LexisNexis, 2009, 357.
[67]
[68]
[69] [1995] 3 R.C.S. 44 , paragr. 34.
[70] Gilles Létourneau, Code de procédure pénale du Québec annoté 2011, 9e éd., Wilson & Lafleur, 2011, à la p. 105.
[71] La Cour supérieure conclut aussi en ce sens.
[72] Jugement d'instance, paragr. 65.
[73] [1995] 3 R.C.S. 44 , paragr. 34.
[74]
2006 CSC 12
,
[75] Ibid., paragr. 6.
AVIS :
Le lecteur doit s'assurer que les décisions consultées sont finales et sans
appel; la consultation
du plumitif s'avère une précaution utile.