[1] L'appelante se pourvoit contre le jugement de la Cour supérieure, district de Frontenac, rendu le 23 mai 2012 par M. le juge Marc St-Pierre, qui prononce le divorce des parties et entérine leur entente quant au partage du patrimoine familial et de la société d'acquêts.
[2] Pour les motifs du juge Chamberland, auxquels souscrivent les juges Giroux et Gagnon, LA COUR :
[3] REJETTE l'appel;
[4] SANS FRAIS, vu la nature du débat opposant les parties.
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MOTIFS DU JUGE CHAMBERLAND |
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[5] L'appelante se pourvoit contre le jugement de la Cour supérieure, district de Frontenac, rendu le 23 mai 2012 par M. le juge Marc St-Pierre, qui prononce le divorce des parties et entérine leur entente quant au partage du patrimoine familial et de la société d'acquêts.
Le contexte factuel
[6] Les parties se sont mariées le 20 juin 1992, sous le régime de la société d'acquêts.
[7] Elles ont eu deux enfants, en 1996 et en 1997.
[8] Vers la fin du mois de janvier ou au début du mois de février 2010, les parties convenaient de mettre fin à leur union.
[9] Au cours des mois qui ont suivi, elles ont discuté des modalités de leur séparation. L'intimé a tout d'abord proposé à l'appelante qu'elle conserve la résidence familiale et lui, la terre adjacente, ce qu'elle a refusé. Elle a préféré acheter une maison appartenant à un ami du couple, M. F..., maison que l'intimé - qui est menuisier de profession - avait récemment rénovée. L'intimé profitait d'ailleurs de son amitié avec M. F... et du fait qu'il avait beaucoup travaillé sur la maison pour négocier un bon prix pour son achat. Il a également offert à l'appelante de compléter, gratuitement, la rénovation de la maison de façon à ce qu'elle puisse y recevoir les enfants confortablement.
[10] Le 6 avril 2010, l'appelante signait une promesse d'achat pour la maison. Il convient d'ajouter que, dès le tout début du mois d'avril, l'appelante avait déjà commencé à acheter des meubles, en en portant le prix d'achat au compte de M. F....
[11] Le 22 avril 2010, l'appelante faisait une demande de crédit pour financer l'achat de la maison.
[12] Le 30 avril 2010, - une date clef - l'appelante donnait à l'intimé sa moitié indivise de la résidence familiale et de la terre adjacente. Le contrat de donation notarié indique que l'immeuble n'est pas assujetti à une déclaration de résidence familiale. Il contient aussi une « stipulation de propre » : « L'immeuble et tous les autres biens présentement donnés ainsi que ceux acquis en remploi et les fruits et revenus en provenant seront propres au donataire. ».
[13] Le même jour, en soirée, l'appelante quittait la résidence familiale pour emménager dans la maison qu'elle envisageait d'acheter.
[14] Ce départ marquait la fin de leur vie commune.
[15] L'acte de vente est signé le 7 mai 2010. Le prix d'achat est de 90 000 $, ce qui inclut 10 000 $ de meubles.
[16] Le 12 avril 2010, la maison est évaluée à 120 000 $ par une évaluatrice agréée dont les services avaient été retenus par l'institution financière.
[17] Les parties ont continué leurs discussions après le 30 avril 2010. L'appelante se dit en désaccord avec le partage tel qu'il a été fait, mais elle ne fait rien de concret avant le dépôt de sa demande en divorce, le 6 mai 2010.
[18] Les parties s'entendent sur la garde des enfants et sur d'autres questions accessoires à leur divorce. Reste la question du partage du patrimoine familial et de la liquidation de la société d'acquêts selon les dispositions du Code civil. L'intimé soutient que le partage du patrimoine familial et la liquidation de la société d'acquêts ont déjà été faits le 30 avril 2010, à la fin de la vie commune, selon l'entente des parties.
[19] Le juge St-Pierre est d'avis que la prépondérance de la preuve penche du côté de l'intimé quant à l'existence d'une entente concernant le partage du patrimoine familial et la liquidation de la société d'acquêts. Il ne voit pas d'autres explications à la donation entre vifs du 30 avril 2010. Il estime qu'aucune cause valable d'annulation n'a été établie. Il doit donc entériner l'entente des parties. Vu sa conclusion, il ne se prononce ni sur le contenu du patrimoine familial ni sur sa valeur.
[20] Le juge tranche ensuite diverses autres réclamations faites tant par l'appelante que par l'intimé, lesquelles ne sont pas remises en question en appel, sauf une. Il s'agit de savoir qui va assumer la responsabilité du paiement de deux billets promissoires, l'un signé par le couple au bénéfice des parents de l'intimé, l'autre par l'appelante au bénéfice de l'une de ses tantes. Le juge mentionne que les parties se sont entendues à ce sujet à l'audience, mais il n'en traite pas dans les conclusions de son jugement.
Les moyens d'appel
[21] L'appelante demande à la Cour de répondre à trois questions :
1) Le juge de première instance a-t-il commis une erreur manifeste et dominante dans l'appréciation de la preuve et dans la motivation de son raisonnement en concluant à l'existence d'une entente sur le partage du patrimoine familial et de la société d'acquêts?
2) Subsidiairement, le juge de première instance a-t-il erré en droit en entérinant a) une entente verbale sur le partage du patrimoine familial; b) extrajudiciaire et survenue avant la fin de la vie commune; c) contestée par l'appelante dans ses procédures et à l'audience; et ce, d) sans soulever d'office le caractère hautement inéquitable et lésionnaire de ladite entente pour l'appelante?
3) Le juge de première instance a-t-il commis une erreur en omettant, dans les conclusions du jugement, de donner acte de l'entente des parties relativement aux billets promissoires?
Analyse
[22] J'aborderai l'examen de ces trois questions dans le même ordre.
L'existence d'une entente sur le partage du patrimoine familial et la liquidation de la société d'acquêts
[23] La question posée par l'appelante en est une de fait et, à moins d'une erreur manifeste et dominante du juge à cet égard, la Cour doit s'abstenir d'intervenir. Le juge du procès était le mieux à même de décider s'il y avait eu entente entre les parties ou non. Il a vu et entendu les témoins. Il pouvait préférer la version de l'intimé à celle de l'appelante, à moins de commettre ainsi une erreur manifeste et dominante que l'appelante a maintenant, en appel, le fardeau de démontrer.
[24] En l'espèce, l'appelante ne me convainc pas d'une telle erreur.
[25] Au procès, l'appelante soutenait avoir procédé à la donation entre vifs de la moitié de la résidence familiale afin de se libérer ainsi de dettes importantes et d'obtenir du financement pour l'acquisition de sa nouvelle résidence. Elle plaidait que sa version des événements était corroborée par la représentante de l'institution financière.
[26] De toute évidence, le juge ne l'a pas crue et je ne vois pas en quoi, ce faisant, il se serait trompé.
[27] La donation de la moitié de la résidence familiale par l'appelante à l'intimé s'inscrit parfaitement bien dans le contexte du partage des biens du couple. L'ensemble des gestes posés par les parties après qu'elles eurent pris la décision de divorcer visait à mettre à exécution leur entente de partage et à les rendre autonomes dès la fin de la vie commune.
[28] Il faut se rappeler que l'intimé avait offert à l'appelante de conserver la résidence familiale, mais qu'elle avait refusé. L'intimé a donc conservé cette résidence (d'une valeur de 241 000 $) tout en assumant la totalité des dettes afférentes à cette propriété (soit 203 598,08 $).
[29] Lors de son contre-interrogatoire, l'appelante a dit qu'elle savait, au moment de la signature du contrat de donation, que son conjoint assumerait ces dettes. Il ressort également de son témoignage qu'il y a eu des discussions par rapport au partage des biens et des dettes avant de rencontrer le notaire, lors de la rencontre avec la représentante de l'institution financière ainsi qu'en compagnie des enfants.
[30] Contrairement à ce que prétend l'appelante, le témoignage de la représentante de l'institution financière ne corrobore aucunement sa prétention voulant que la donation ait été faite pour lui permettre d'obtenir du financement en vue de l'achat d'une maison.
[31] Sur un autre registre, l'appelante fait valoir que l'entente, telle que décrite par l'intimé, implique une renonciation de sa part au partage du patrimoine familial et que cela aurait dû susciter dans l'esprit du juge une inférence négative quant à l'existence d'une telle entente.
[32] L'argument ne tient pas la route. Ce n'est pas parce que l'appelante donnait à l'intimé sa part de la résidence familiale qu'elle renonçait pour autant au partage du patrimoine familial. La donation n'était qu'une des modalités de leur entente de partage.
[33] Il y a donc bel et bien eu entente entre les parties concernant le partage du patrimoine familial et la liquidation de la société d'acquêts. Il reste à voir si cette entente est valide.
La validité de l'entente
[34] L'appelante plaide que le juge n'aurait pas dû entériner l'entente puisqu'elle ne pouvait être conclue avant l'institution des procédures en divorce. L'appelante plaide également qu'elle avait le droit de la répudier en tout temps avant qu'elle soit entérinée par le tribunal. Enfin, l'appelante soutient que le juge aurait dû refuser d'entériner l'entente vu son caractère hautement lésionnaire à son endroit.
[35] L'argument est mal fondé.
[36] Lors d'une séparation, il est courant - et tout à fait souhaitable - que les conjoints s'entendent entre eux pour régler les questions entourant la fin de leur union :
Les conventions de séparation de corps ou de divorce conclues en vue ou au cours des procédures sont parfaitement valides. Elles n'ont rien d'illégal en elles-mêmes et ne sont pas prohibées par la loi. Il n'est pas contraire à l'ordre public que les époux tentent de régler les conséquences de leur rupture et le fait pour les conjoints de convenir d'une entente à cet effet n'est pas non plus en soi contraire à l'ordre public.[1]
[37] Ces ententes, qu'elles soient formelles ou informelles, ne sont toutefois possibles que si elles « demeurent à l'intérieur des paramètres imposés par la loi »[2], y compris donc l'obligation de ne pas déroger aux dispositions du chapitre du Code civil du Québec traitant des effets du mariage (art. 391 C.c.Q.).
[38] Ainsi, les parties ne pourront pas renoncer à l'avance à leurs droits dans le patrimoine familial (art. 423 C.c.Q.).
[39] Sénécal écrit :
On ne peut donc transiger sur une éventuelle acceptation ou renonciation à la communauté de biens ou au partage des acquêts, mais on peut transiger sur ce que sera le partage, s'il a lieu. Les parties sont alors liées par leur entente.[3]
[40] En l'espèce, les parties pouvaient transiger sur ce que serait le partage de leurs biens après avoir décidé de mettre fin à leur mariage. Elles ont expliqué que leur décision de se séparer datait de la fin du mois de janvier ou du début du mois de février et que leurs discussions subséquentes visaient à établir les modalités de leur séparation. La demande en divorce n'a été déposée qu'au mois d'août, mais dès le 30 avril 2010 les parties faisaient inscrire au contrat de donation que « des procédures en divorce [avaient] été entreprises ». Le moment de la conclusion de l'entente de partage ne pose donc pas de problème.
[41] L'argument de l'appelante voulant qu'elle ait le droit de répudier l'entente en tout temps avant qu'elle soit entérinée par le tribunal ne tient pas puisqu'il s'agit ici d'une entente visant le partage des biens et non une renonciation au patrimoine familial.
[42] Reste le caractère lésionnaire de l'entente.
[43] En principe, l'entente des parties concernant le partage de leurs biens au moment du divorce n'est pas révisable, bien qu'elle puisse être annulée pour l'une des causes ordinaires d'annulation des contrats[4].
[44] Le professeur Karim note toutefois que, contrairement à ce que permet une lecture des seuls articles 424, 472 et 1405 C.c.Q., les tribunaux ont tendance à appliquer le concept de la lésion à toutes les ententes sur les mesures accessoires découlant d'un divorce :
Notons aussi que les tribunaux ont tendance à appliquer la lésion à toutes les ententes sur mesures accessoires découlant d'un divorce ou une séparation, même s'il ne s'agit pas d'une renonciation au partage du patrimoine familial ou de la société d'acquêts. Précisons cependant que, dans le cas où les parties ont conclu une entente sur les mesures accessoires réglant leur séparation ou leur divorce lors d'une conférence de règlement à l'amiable, l'entente doit revêtir un caractère manifestement injuste dénotant une sérieuse disproportion entre les parties pour que le tribunal intervienne et modifie une telle entente.[5]
[Renvois omis.]
[45] L'analyse du professeur Karim est juste.
[46] Dans D.V. c. J.A.F.[6], sous la plume de la juge Otis, la Cour écrit que le « recours en révision [des conventions sur mesures accessoires au divorce] fondé sur l'inégalité abusive des prestations est inhérent à la Loi sur le divorce ainsi qu'aux lois provinciales régissant les effets du mariage »[7]. Partant, il s'agit d'examiner « les prestations convenues entre les parties afin de déterminer si elles sont affectées d'un déséquilibre sérieux qui altère le résultat du contrat, le rendant oppressif et inéquitable »[8]. Les parties peuvent s'entendre quant à des prestations différentes de celles qui résulteraient d'une détermination judiciaire et celles-ci ne pourront être annulées simplement parce qu'elles semblent désavantageuses pour l'une des parties. Il en ira différemment toutefois si elles sont déraisonnables, ou encore, si elles sont marquées par la sujétion et l'iniquité[9] :
[53] Il est souhaitable et même nécessaire que les parties, dans un souci d'autonomie, règlent par convention les conséquences économiques de leur rupture (Pelech c. Pelech, [1987] 1 R.C.S. 801, à la p. 850). Dans le contexte des négociations, il est possible que les parties conviennent de prestations qui diffèrent de celles résultant d'une détermination judiciaire. Le tribunal examinera avec prudence et circonspection les conventions soumises à son examen judiciaire et ne pourra les écarter au seul motif que - de prime apparence - elles paraissent économiquement désavantageuses à l'une des parties. Ce serait faire fi de la volonté réelle manifestée par les parties qui ont choisi la voie du compromis pour régler les conséquences économiques de leur divorce.
[54] Toutefois, dès lors que la convention revêt un caractère déraisonnable et que le résultat auquel elle conduit est marqué à l'empreinte de la sujétion et de l'iniquité, elle pourra, dans son intégralité ou en partie, être annulée par les tribunaux compétents. Voilà pourquoi les termes choisis par les parties doivent refléter la nature du consentement et l'intelligibilité du mode de règlement qu'elles ont choisi de privilégier. Les clauses de renonciation de style, emportant en des termes généraux l'annihilation de tout rapport économique entre les époux, ne pourront, à elles seules, écarter un examen attentif de l'équilibre des prestations Le fondement rationnel de la convention devra émaner, avec limpidité, des aménagements conventionnels choisis par les parties afin que l'on puisse mesurer la validité des clauses de renonciation et de rupture définitive.
[47] Bien que, dans cette affaire, la Cour ait conclu à l'annulation du terme de trois ans prévu à la convention des parties relativement au paiement de la pension alimentaire, tout en refusant d'annuler la partie de la convention consacrée au partage du patrimoine familial, les principes énoncés dans cet arrêt s'appliquent à la révision des conventions de partage.
[48] Le seul fait qu'une entente puisse être, à première vue, économiquement désavantageuse pour l'une des parties est insuffisant pour entraîner l'annulation de la convention. Comme l'expliquait mon collègue le juge Dalphond, alors à la Cour supérieure, dans Droit de la famille-2087[10], « Le fait qu'une convention puisse ne pas être équitable ou soit désavantageuse pour l'une des parties n'implique pas que cette convention doive être annulée; l'aspect dirimant, c'est le caractère grossièrement déraisonnable, subordonnément à l'ordre public » (références omises, je souligne).
[49] Qu'en est-il ici?
[50] En l'espèce, la valeur partageable du patrimoine familial, selon les règles décrites aux articles 416 à 418 C.c.Q., s'élevait à 114 521,47 $ :
Résidence familiale et terrain adjacent : 37 401,92 $
Véhicules : 14 153,90 $
Régimes de retraite (REER) : 62 965,65 $
114 521,47 $
[51] À défaut d'entente, les parties auraient donc dû recevoir chacune la somme de 57 260,73 $. En réalité, l'entente de partage fait en sorte que l'intimé conserve la totalité de la valeur nette de la résidence familiale, son véhicule automobile et son régime de retraite, pour une valeur totale de 94 862,93 $. Pour sa part, l'appelante conserve son véhicule automobile et son régime de retraite (une valeur de 19 658,54 $), tout en ayant bénéficié d'un substantiel rabais sur l'achat de sa nouvelle maison (environ 40 000 $), auquel s'ajoute la valeur des travaux de rénovation effectués par l'intimé après la fin de la vie commune. La valeur de ces travaux n'a pas été établie avec précision, mais, de toute évidence, il s'agissait de travaux relativement importants si l'on se fie à la liste produite par l'intimé au procès.
[52] À partir de ces données, et surtout en raison du prix avantageux auquel l'appelante a pu acquérir sa nouvelle maison, il faut conclure que l'entente de partage a permis aux deux parties d'avoir plus que ce qu'elles auraient reçu si le partage avait été fait conformément à la loi. Il est clair que l'intimé a reçu considérablement plus (94 862,93 $) que ce qu'il aurait reçu autrement (57 260,73 $), ce que l'on ne peut pas dire avec autant d'assurance en ce qui a trait à l'appelante vu l'impossibilité de chiffrer avec précision la valeur des travaux effectués par l'intimé.
[53] Une chose me semble claire toutefois. Si l'entente est moins avantageuse pour l'appelante que pour l'intimé, elle n'en est pas pour autant « grossièrement déraisonnable » ou « marquée à l'empreinte de la sujétion et de l'iniquité ». L'appelante a nécessairement reçu plus que ce qu'elle aurait reçu en cas de partage selon la loi. L'entente lui a permis de se libérer de ses dettes et d'acquérir, à bon prix, une nouvelle maison, entièrement rénovée, alors que l'intimé conservait une résidence, lourdement hypothéquée, dont il ne voulait pas nécessairement au départ.
[54] Dans ce contexte, j'estime, à l'instar du juge de première instance, qu'il faut respecter l'entente des parties, et ce, d'autant plus qu'elles ont déjà pris les mesures nécessaires pour en assurer l'exécution, ce qui démontre en quelque sorte la ratification de l'entente et rend à toutes fins utiles impossible la remise en état des parties.
Les billets promissoires
[55] L'appelante demande à la Cour de donner acte à l'entente des parties quant à la prise en charge des billets promissoires, ce que le juge de première instance aurait omis de faire après avoir abordé le sujet dans ses motifs.
[56] L'intimé consent à ce que chacun assume la responsabilité du billet promissoire relatif à sa famille, mais émet des réserves quant à une ordonnance à ce sujet puisque les dettes sont prescrites.
[57] Le billet constatant le prêt de 15 000 $ par une tante à l'appelante pour des rénovations dans la résidence familiale est daté du 2 septembre 2000. Il y a eu une demande de remboursement faite en 2008, mais la tante affirmait au procès n'avoir rien reçu.
[58] Par ailleurs, le 2 octobre 2007, les parties promettaient de rembourser aux parents de l'intimé la somme de 13 300 $. Le dernier paiement, d'un montant de 825 $, a eu lieu le 25 décembre 2008, tel qu'en atteste la reconnaissance de dette avec solde de 12 475 $ datée de ce jour.
[59] Le juge de première instance aborde la question en ces termes :
[6] Elles [les parties] ont aussi convenu à l'audience d'assumer chacune de leur côté un billet promissoire résultant de deux prêts soit par la tante de la demanderesse ou les parents du défendeur, la demanderesse prenant à sa charge le billet résultant du prêt de sa tante tandis que le défendeur prenant à sa charge le billet intervenu lors du prêt de ses parents.
[60] Dans une telle situation, le délai de prescription est de trois ans (art. 2925 C.c.Q.), mais il est bien sûr possible de renoncer à la prescription acquise et au bénéfice du temps écoulé par celle commencée (art. 2883 C.c.Q.).
[61] En l'espèce, selon la preuve au dossier, les dettes sont fort probablement prescrites. De plus, même si les parties ont dit au juge avoir convenu d'assumer une dette chacune de leur côté, je pense que cela constitue davantage, dans le contexte, l'expression d'un simple « devoir de conscience »[11] plutôt que d'un engagement envers les créanciers ou d'une promesse de les payer, ce qui ne donne pas ouverture à une renonciation à la prescription.
[62] Le juge n'a donc pas erré en ne prévoyant pas de conclusion à ce sujet dans le jugement.
[63] Pour toutes ces raisons, je propose le rejet de l'appel, sans frais vu la nature du débat opposant les parties.
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JACQUES CHAMBERLAND, J.C.A. |
[1] Jean-Pierre Sénécal et al., Droit de la famille québécois, mis à jour par Murielle Drapeau, édition sur feuilles mobiles, vol. 1, Brossard, Publications CCH ltée, 2008, no 35-100, p. 3,506.
[2] Jean-Pierre Sénécal et al., ibid., note 1, no 35-085, p. 3,503.
[3] Jean-Pierre Sénécal et al., ibid., note 1, no 35-420, p. 3,589-2; voir également A.P. c. L. C., [2003] R.D.F. 43, paragr. 11-15 (C.S.) et Michel Tétrault, Droit de la famille, 4e éd., vol. 4, Cowansville, Éditions Yvon Blais, 2010, p. 421-423.
[4] Jean-Pierre Sénécal et al., supra, note 1, no 35-365, p. 3,580.
[5] Vincent Karim, Les obligations, 3e édition, vol. 1, Montréal, Wilson & Lafleur, 2009, p. 405.
[6] [2002] R.J.Q. 1309 (C.A.).
[7] Ibid., paragr. 52.
[8] Ibid., paragr. 52.
[9] Ibid., paragr. 53-54.
[10] [1994] R.D.F. 779, 785 (C.S.); voir également Droit de la famille - 08316, 2008 QCCA 285, paragr. 53 (en matière de partage de la société d'acquêts); Droit de la famille - 11865, 2011 QCCS 1540, paragr. 37 et suivants; Droit de la famille - 10721, 2010 QCCS 1347, paragr. 39-40; Droit de la famille - 10967, 2010 QCCS 1796, paragr. 19.
[11] Julie McCann, Prescriptions extinctives et fins de non-recevoir, Montréal, Wilson & Lafleur, 2011, p. 54.
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