Bessette et Québec (Ministère des Ressources naturelles) |
2014 QCCFP 7 |
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COMMISSION DE LA FONCTION PUBLIQUE |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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DOSSIERS Nos : |
1301067 et 1301068 |
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DATE : |
28 mars 2014 |
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DEVANT LA COMMISSAIRE : |
Me Louise Caron |
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MARJOLAINE BESSETTE
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Appelants
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Et
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MINISTÈRE DES RESSOURCES NATURELLES
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Intimé |
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DÉCISION |
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(Article
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[1] Mme Marjolaine Bessette et M. Sylvain Ouellet déposent un appel devant la Commission de la fonction publique à la suite de leur échec au concours ministériel de promotion pour pourvoir un emploi de chef d’unité de gestion, cadre, classe 4[1], au ministère des Ressources naturelles et de la Faune devenu le ministère des Ressources naturelles (ci-après appelé le « MRN »), à la Direction générale de la Côte-Nord.
[2] Les candidatures de Mme Bessette et de M. Ouellet n’ont pas été retenues au motif que leurs résultats aux examens sont inférieurs au minimum requis.
[3] Dans la lettre que le MRN adressait à Mme Bessette, le 10 octobre 2012, il est mentionné qu’elle a obtenu une note globale de 92 sur 200, soit seize points de moins que le minimum requis de 108. Plus précisément, il est indiqué qu’elle a obtenu une note de 55 sur 110 pour l’examen d’habiletés fonctionnelles de gestion, classe 4 (ci-après appelé le « HFOG4 »), et une note de 37 sur 90 pour l’examen d’habiletés relationnelles de gestion, classe 4 (ci-après appelé le HREG4).
[4] Dans la lettre adressée à M. Ouellet à cette même date, il est indiqué qu’il a obtenu une note globale de 99 sur 200, soit neuf points de moins que le minimum requis. M. Ouellet a obtenu une note de 57 sur 110 pour le HFOG4 et une note de 42 sur 90 pour le HREG4.
[5] À la suite de la tenue d’une séance d’échanges et d’information (SEI), Mme Bessette et M. Ouellet ont précisé leurs motifs d’appel qui sont les mêmes pour tous les deux.
[6] Le premier motif des appelants remet en cause l’impartialité de la procédure d’évaluation attribuable au fait qu’un employé du MRN a suivi une formation particulière préalablement à la séance d’examens. Les appelants soutiennent que le MRN a ainsi fait preuve de favoritisme à l’égard de ce candidat en lui accordant un privilège par rapport aux autres candidats.
[7] Comme deuxième motif, les appelants soutiennent qu’il y a eu une irrégularité lors de l’administration des examens, puisque le matin des examens, dans les instructions données aux candidats, la valeur de chacun des examens avait été inversée. Les instructions indiquaient que le HFOG4 valait 90 sur 200 et que le HREG4 valait 110 sur 200, alors qu’en réalité la valeur du HFOG4 avait été fixée à 110 et que celle du HREG4 avait été fixée à 90.
[8] Les appelants avaient aussi soulevé un motif de discrimination, motif qu’ils ont abandonné en cours d’audience.
LES FAITS
[9] Le MRN dépose des documents et fait entendre comme témoins Mme Ann-Gabrielle Carette et Mme Cynthia Paquet. Les appelants témoignent également et déposent des documents.
[10] Mme Carette est conseillère en gestion des ressources humaines à La Financière agricole du Québec depuis le 13 mai 2013. Avant cette date, elle occupait cette même fonction à la Direction des ressources humaines du MRN à Québec et était responsable de la région de la Côte-Nord (région 09).
[11] En tant que responsable du concours, Mme Carette en a coordonné toutes les étapes, elle a vu à la composition du comité d’évaluation, a conseillé ses membres et s’est occupée des communications avec les candidats.
[12] Mme Cynthia Paquet a remplacé Mme Carette comme conseillère en gestion des ressources humaines à Québec, en mai 2013.
[13] Mme Bessette est présentement adjointe au directeur général à la Direction de la protection de la faune, au ministère du Développement durable, de l’Environnement, de la Faune et des Parcs. À la date du concours, elle était à l’Unité de gestion de Sept-Îles-Havre-Saint-Pierre-Anticosti du MRN (ci-après appelée « Unité de gestion de Sept-Îles »).
[14] M. Ouellet travaille au MRN depuis 1991. À la date du concours, il était lui aussi à l’Unité de gestion de Sept-Îles et il y est toujours.
Premier motif d’appel : Formation suivie par un employé du MRN
[15] Au sujet du déroulement du concours, Mme Carette mentionne que la période d’inscription était du 18 juin au 3 juillet 2012, que les candidats ont été convoqués aux examens, par lettre, le 30 août 2012, et que la séance d’examens s’est tenue le 15 septembre 2012. Le concours était réservé aux employés du ministère des Ressources naturelles et de la Faune.
[16] Mme Carette s’attarde sur les différents organigrammes du MRN et explique que le poste qui devait être comblé par le concours était celui de M. Donald Gingras, supérieur immédiat des appelants à l’Unité de gestion de Sept-Îles.
[17] Elle mentionne par la suite que M. Jean-Pierre Otis, directeur de la Direction des opérations intégrées et l’un des membres du comité d’évaluation, était leur supérieur hiérarchique. Pour sa part, Mme Linda Tremblay, alors directrice de la Direction des affaires régionales, était la supérieure immédiate de M. Frédérick Perron, candidat choisi après la constitution de la liste de déclaration d’aptitudes pour occuper le poste de M. Gingras et employé ayant suivi la formation ici en cause. M. Normand Laprise était le directeur de la région de la Côte-Nord.
[18] Pour les questions relatives aux ressources humaines, Mme Carette explique que des techniciens en administration de la Direction des affaires régionales communiquaient avec elle au besoin. Elle affirme n’avoir jamais communiqué avec Mme Tremblay dans le cadre de ce concours.
[19] Mme Carette expose par la suite les mesures prises pour assurer la confidentialité entourant le choix et la tenue des examens. Elle explique, plus particulièrement, que lorsque le comité d’évaluation est formé, chaque membre est assermenté et s’engage à respecter la confidentialité du contenu de la procédure d’évaluation et à faire preuve d’impartialité.
[20] Quant au sujet plus particulier des formations accordées par le MRN à ses employés, Mme Carette explique que la Direction des ressources humaines n’exerce aucun contrôle à cet égard et qu’il relève de chaque gestionnaire de gérer son budget de formation et d’accorder à ses employés des formations. Elle précise que c’est en région que se prennent les décisions concernant les demandes de formation et que la Direction des ressources humaines de Québec n’intervient à aucun moment.
[21] Elle ajoute que la Direction des ressources humaines ne fait jamais de recommandations relativement à des formations qui pourraient être offertes aux candidats à un concours. Les seules recommandations qui ont été faites aux candidats dans le cadre du présent concours sont celles qui se retrouvent en annexe de la lettre de convocation à la séance d’examens et qui invitent les candidats à consulter des exemples de questions pour les types d’examens retenus, avec l’adresse Internet où les trouver.
[22] À cet égard, Mme Bessette raconte les démarches qu’elle a entreprises auprès de M. Gingras, environ deux mois avant la période d’inscription au concours, conjointement avec M. Ouellet et deux autres employés de l’Unité de gestion de Sept-Îles, afin de suivre des cours de perfectionnement dans le but éventuel d’occuper le poste de M. Gingras. Ce dernier aurait alors présenté leur demande auprès du comité de gestion de la Direction des opérations intégrées mais, comme elle en témoigne avec M. Ouellet, aucune suite n’y a été donnée.
[23] Quant à la formation suivie par M. Perron, Mme Bessette mentionne que ce n’est qu’en octobre 2012, après la tenue du concours, que certains employés ont commencé à se douter que M. Perron avait bénéficié d’une formation préalablement à la tenue des examens. Mme Bessette et M. Ouellet racontent par la suite toutes les difficultés rencontrées auprès de leur employeur pour obtenir des informations à ce sujet. Mme Bessette mentionne que c’est le 30 octobre 2012, soit la dernière journée pour faire appel devant la Commission, qu’ils ont été informés du fait que M. Perron avait suivi une formation auprès de l’École nationale d’administration publique (ci-après appelée l’« ENAP »), sans plus.
[24] Mme Bessette et M. Ouellet témoignent par la suite avoir fait face au même type de difficultés pour obtenir de l’information auprès de leur employeur concernant la nature de la formation suivie par M. Perron. M. Ouellet mentionne que ce n’est que le 13 février 2014, soit quelques jours avant l’audience devant la Commission, que l’employeur les a avisés avoir transmis l’information utile à son procureur.
[25] Mme Paquet explique les démarches entreprises pour obtenir l’information relative à la formation suivie par M. Perron. Elle mentionne avoir obtenu d’une collègue, en novembre 2013, un extrait du système de comptabilité central sur lequel est indiqué que M. Perron a suivi l’activité « Appréciation par simulation (APS) ». Elle souligne avoir aussi obtenu, le 17 février 2014, quelques jours avant l’audience, la copie d’une facture de l’ENAP sur laquelle est mentionné que cette activité a été dispensée les 19 et 20 juin 2012.
[26] Mme Paquet apporte certaines précisions concernant l’activité suivie par M. Perron en référant au site Internet de l’ENAP. Elle mentionne que, bien que n’étant pas une experte en la matière, elle comprend des informations recueillies dans ce site, que l’APS suivie par M. Perron consiste avant tout en une évaluation du potentiel de gestion d’un individu. Elle souligne ne voir aucune relation directe entre l’évaluation des compétences faite dans le cadre de l’APS et les deux examens tenus dans le cadre du concours.
Deuxième motif d’appel : Erreur concernant la valeur accordée aux examens en raison de l’inversement de leur valeur respective
[27] Mme Carette explique le rôle du comité d’évaluation. Elle précise qu’il décide de la valeur relative des examens et du seuil de passage de chacun. En l’espèce, comme il appert du Guide d’évaluation du concours, l’évaluation a été portée sur 200, la valeur du HFOG4 étant fixée à 55 %, soit 110 sur 200, et la valeur du HREG4 à 45 %, soit 90 sur 200.
[28] Mme Carette reconnaît qu’il y a eu une erreur administrative dans les directives à l’intention des responsables de l’administration des examens et que la valeur de chacun des examens a été inversée, ce document indiquant que le HFOG4 valait 90 sur 200, plutôt que 110, et que le HREG4 valait 110 sur 200, plutôt que 90. Elle souligne par ailleurs que les résultats transmis aux candidats correspondent aux valeurs retenues par le comité d’évaluation.
[29] Mme Carette explique que les directives à l’intention des responsables de l’administration des examens ont été préparées par un technicien en administration du MRN.
[30]
Le MRN rappelle tout d’abord les articles 35 et 49 de la Loi sur la
fonction publique[2]
(ci-après appelée la « Loi »). L’article
[31]
Le MRN souligne par la suite que les deux examens utilisés dans le cadre
du concours ont fait l’objet d’une certification de la part de la Commission,
conformément au dernier alinéa de l’article
Formation suivie par un employé du MRN
[32] Le MRN aborde le premier motif d’appel soulevé, soit le favoritisme de l’employeur dans l’administration du concours en permettant à un seul employé de suivre une formation.
[33] Le MRN revient sur le caractère confidentiel entourant tout le processus d’évaluation et rappelle les engagements de confidentialité signés par les membres du comité d’évaluation incluant le directeur de la Direction des opérations intégrées, M. Otis. Ces membres ne pouvaient donc dévoiler à quiconque les critères d’évaluation. Le MRN conclut que rien dans la preuve soumise ne permet de mettre en doute que les règles de confidentialité n’ont pas été suivies.
[34] Il rappelle que les examens utilisés étaient des examens certifiés, qu’aucun membre du comité d’évaluation n’en connaissait le contenu ni ne pouvait intervenir pour le modifier et que les seules informations que détenaient ces membres concernaient la liste des dix-sept compétences annexées au guide d’évaluation.
[35] Au sujet du développement des ressources humaines, le MRN rappelle les témoignages de Mme Carette et de Mme Paquet sur le rôle de la Direction des ressources humaines du MRN à Québec et sur celui des directions régionales quant aux formations offertes aux employés. Leur témoignage a démontré que la Direction des ressources humaines n’intervenait pas à cet égard, qu’elle ne faisait aucune recommandation concernant des formations particulières et que les décisions relevaient des directions régionales, seules responsables du développement de leurs employés.
[36] Plus précisément, le MRN souligne que le développement des ressources humaines est étranger à la tenue du concours et qu’il est possible qu’un gestionnaire puisse décider d’investir dans un individu en particulier, pour son cheminement de carrière, après avoir évalué son potentiel. Il soutient que certains ministères peuvent élaborer un plan de relève des gestionnaires sans avoir l’obligation d’offrir à tous leurs employés des formations à cet égard.
[37] Le MRN soutient qu’il n’y a eu aucun favoritisme dans l’administration du concours et que ce dernier a été tenu de façon impartiale. Il souligne que s’il y a eu du favoritisme, c’est dans la gestion du développement des ressources humaines, gestion qui ne relève pas de la compétence de la Commission.
[38] Pour le MRN, on est plutôt en présence ici d’un problème de communication et de suivi à l’égard de demandes de formation formulées par certains employés, dont les appelants, et de manque de transparence.
[39] Sur la formation elle-même, le MRN mentionne qu’aucune preuve n’a démontré qu’elle permettait aux candidats de se préparer aux examens du concours. Il souligne d’ailleurs que selon la liste de déclaration d’aptitudes, sept personnes ont réussi les examens et qu’aucune preuve n’a été faite à l’effet que ces personnes, sous réserve de M. Perron, aient suivi une formation préalable. Le MRN reconnaît que toute formation peut être utile, mais qu’elle n’assure pas la réussite d’examens.
[40]
Le MRN renvoie la Commission à la décision Mesri[3]
dans laquelle elle concluait qu’il n’y avait eu aucune contravention à l’article
[41] Le MRN souligne que l’APS consiste non pas à développer les compétences, mais plutôt, comme mentionné dans les documents de l’ENAP, à évaluer les compétences d’une personne pour qu’elle soit en mesure d’élaborer pour elle-même un projet de développement. Il ajoute que même si le bilan fait à un individu dans le cadre de cette activité identifie ses faiblesses, cela ne lui permet pas d’améliorer ses performances aux examens d’un concours.
[42] Il rappelle qu’il appartient à un employé de voir à ses possibilités de promotion et qu’il peut lui-même se payer les formations qu’il juge utiles.
Erreur concernant la valeur accordée aux examens attribuable à l’inversement de leur valeur respective
[43] Pour le deuxième motif d’appel retenu par les appelants et relatif à l’inversion de la valeur attribuée aux examens, le MRN reconnaît qu’il y a eu une erreur dans l’information donnée lors de la séance d’examens. Il soutient par ailleurs que cette erreur n’affecte en rien l’impartialité de la procédure d’évaluation, qu’elle ne contrevient pas à la Loi et qu’elle n’a eu aucun effet sur les résultats. Il précise qu’un candidat, peu importe la valeur des examens, doit donner la meilleure performance possible aux deux examens.
[44] Le MRN conclut qu’aucune illégalité ou irrégularité n’a été commise dans la procédure d’évaluation du concours.
des appelants
[45] Les appelants ont présenté une argumentation commune.
Formation suivie par un employé du MRN
[46] Les appelants soutiennent que le MRN a fait preuve de favoritisme à l’égard d’un employé, M. Perron, remettant ainsi en cause l’impartialité de la procédure d’évaluation.
[47] Ils considèrent que toute formation dont peut bénéficier un employé permet à celui-ci d’acquérir des connaissances pouvant l’aider lors de concours.
[48] Plus précisément, ils prétendent que l’APS suivie par M. Perron à l’ENAP a un lien avec les examens tenus lors du concours. Ils attirent notamment l’attention de la Commission sur le fait que, dans le document intitulé « sessions publiques » et tiré du site Internet de l’ENAP, il est indiqué que la première journée « consiste à évaluer les compétences du candidat », notamment par des mises en situation et par un exercice de panier de gestion et ils font un parallèle avec les habiletés fonctionnelles de gestion et les habiletés relationnelles de gestion vérifiées par les deux examens du concours. Ils soulignent aussi qu’à la fin de l’APS, il appert de ce document que la personne évaluée bénéficie d’une rétroaction de la part d’un gestionnaire expérimenté. En effet, il est indiqué qu’au terme de l’intervention, « une rencontre de trois heures est prévue avec la personne évaluée » pour lui transmettre les résultats de l’évaluation et cibler les pistes de développement des compétences.
[49] Les appelants précisent par ailleurs qu’ils n’ont pu mettre en preuve les compétences évaluées par l’ENAP, l’information ne leur ayant pas été donnée.
[50] Ils mentionnent que l’APS offerte par l’ENAP est dispensée par des formateurs d’expérience et que, durant les deux jours qu’a duré cette activité, plusieurs choses utiles à un candidat ont dû être dites.
[51] Ils soutiennent que même si l’ENAP n’a pu avoir accès aux questions des examens en cause, elle peut toujours consulter le site Internet gouvernemental approprié, notamment le document déposé par le MRN intitulé « Référentiel de compétences du gestionnaire-leader de la fonction publique québécoise » et développer la formation adéquate aux compétences recherchées dans la fonction publique.
[52] Ils prétendent que s’ils avaient eu accès à la même formation que M. Perron, ils auraient eu accès aux mêmes connaissances pour pouvoir faire les examens de manière juste et équitable.
[53] Ils rappellent par la suite le manque de suivi à la demande de formation qu’ils avaient présentée conjointement avec deux autres collègues et les difficultés à obtenir l’information relative à l’activité suivie par M. Perron. Ils soulignent qu’il aurait été utile qu’ils puissent bénéficier de cette information avant l’audience pour pouvoir notamment tenter d’obtenir plus de précisions.
[54] Ils soulignent que, sur les cinq candidats de l’Unité de gestion de Sept-Îles, quatre ont échoué la procédure d’évaluation, dont eux.
[55] M. Ouellet remet en question le fait que M. Perron semble avoir été la seule personne considérée par Mme Tremblay comme ayant le potentiel requis pour devenir gestionnaire, puisque seul celui-ci a pu suivre l’APS dispensée par l’ENAP.
[56] Les appelants prétendent que la procédure d’évaluation n’a donc pas été impartiale.
Erreur concernant la valeur accordée aux examens attribuable à l’inversement de leur valeur respective
[57] Quant au motif d’appel relatif au fait que la valeur des examens a été inversée, les appelants reconnaissent que cela peut être une erreur administrative. Ils soulignent toutefois qu’une telle erreur n’est pas normale et prétendent que, bien qu’un candidat doive performer aux deux examens, on peut présumer qu’une personne va tenter de mieux performer à l’examen ayant la plus grande valeur.
ANALYSE ET MOTIFS
[58] La Commission doit décider si la procédure d’évaluation des candidats admis au concours contesté est entachée d’une irrégularité ou d’une illégalité.
[59] Plus précisément, la Commission doit répondre aux deux questions suivantes :
1. En autorisant un
seul employé, candidat au concours, à suivre une formation, le MRN a-t-il
contrevenu à l’article
2. Le fait que, lors de la séance d’examens, l’information donnée aux candidats inversait la valeur des examens a-t-il entaché la procédure d’évaluation d’une illégalité ou d’une irrégularité?
Formation suivie par un employé du MRN
[60]
Les appelants soutiennent que le MRN n’a pas satisfait aux exigences
d’impartialité de l’article
[61] La Commission constate que tant les appelants et même les représentants du MRN ont eu de la difficulté à obtenir de l’information concernant cette activité APS et que ce n’est que quelques jours avant l’audience que les représentants de l’employeur ont pu identifier l’organisme qui l’a dispensée et ont appris les dates et le lieu où elle s’est tenue. Cette information a par la suite dû être complétée par les représentants de l’employeur, par des recherches dans le site Internet de l’ENAP.
[62] Comme il ressort de documents provenant du site Internet de l’ENAP, il apparaît à la Commission que l’APS est une appréciation par simulation qui vise à « permettre aux évaluateurs d’apprécier les compétences par l’observation des comportements manifestés dans des situations semblables à celles que peut rencontrer un gestionnaire dans le cadre de ses fonctions ».
[63] Il est indiqué dans ces documents que l’APS permet une évaluation de dix-huit compétences du Référentiel de compétences en gestion du Centre expert d’évaluation et de carrière de l’ENAP. Ce centre propose des outils et des moyens éprouvés permettant d’évaluer le potentiel en gestion des professionnels et des gestionnaires de la fonction publique, de faire le bilan de leurs compétences et d’identifier des pistes de développement susceptibles d’améliorer leur performance au travail.
[64] Le MRN n’a pu apporter aucune précision sur les dix-huit compétences énumérées dans le Référentiel de gestion de l’ENAP. Il y a toutefois lieu de croire que, parmi ces compétences, on pourrait retrouver des compétences du Référentiel de compétences du gestionnaire-leader de la fonction publique québécoise puisque ce document public a été élaboré en 2012 par le Secrétariat du Conseil du trésor en collaboration avec le Centre expert d’évaluation et de carrière de l’ENAP.
[65] La preuve administrée par le MRN a toutefois démontré, à la satisfaction de la Commission, que l’APS est une activité qui sert à évaluer les compétences d’un individu et à amorcer un plan de développement avec celui-ci en lui suggérant des outils de développement appropriés à ses besoins. Cette preuve ne permet pas d’établir qu’il s’agit d’une formation qui portait particulièrement sur les habiletés mesurées par les examens du concours en cause et qui permettait de mieux répondre aux questions de ceux-ci. Au surplus, rien dans la preuve ne laisse croire que les règles de confidentialité entourant les examens et leur contenu n’ont pas été respectées et que la supérieure de M. Perron ait connu la teneur de ces examens.
[66] Les appelants n’ont pas démontré qu’il existait un lien entre leur échec aux examens et le fait qu’ils n’avaient suivi aucune formation préalablement aux examens, pas plus qu’il n’existe un lien entre la réussite de M. Perron et le fait qu’il ait suivi l’activité APS à l’ENAP. La Commission constate que six autres personnes ont réussi les examens et aucune preuve ne démontre que ces personnes ont suivi une formation.
[67] Comme il est mentionné dans la lettre de convocation transmise aux candidats, tous étaient invités à prendre connaissance d’exemples de questions pour le type d’examen en cause. Tous les candidats disposaient donc de la même information concernant ce concours.
[68] Par ailleurs, la Commission souligne, comme elle l’a fait dans l’affaire Dumaine[5], que chaque candidat se présente à un examen avec ses connaissances, ses aptitudes et ses expériences personnelles et différentes de celles des autres candidats. C’est sa responsabilité propre, non celle de son employeur, de voir à se préparer adéquatement à un examen et d’aménager son horaire en conséquence. Les appelants auraient pu, malgré la demande de formation faite à leur supérieur avant la tenue du concours, décider de suivre par eux-mêmes des formations et consulter tout document public accessible, dont le Référentiel de compétences du gestionnaire-leader de la fonction publique québécoise.
[69] De plus, comme l’a démontré le MRN, il relève de la discrétion de chaque gestionnaire d’accorder des activités de formation. La Commission souligne qu’aucune preuve ne permet de mettre en doute la bonne foi de la gestionnaire qui a autorisé une formation à M. Perron, ni celle des gestionnaires, qui n’ont pas donné suite aux demandes de formation faites par les appelants, en avril 2013. La Commission croit toutefois qu’un meilleur suivi de leur demande aurait permis d’éviter certaines suspicions de leur part, suspicions plus grandes en raison de toutes les difficultés qu’ils ont rencontrées pour tenter d’obtenir de l’information concernant l’activité suivie par M. Perron.
[70] Il n’en résulte pas pour autant que la procédure d’évaluation n’a pas été impartiale. La Commission rappelle, toutefois, les propos énoncés dans l’affaire Van Haverbeke et al[6] :
« Par ailleurs, la Commission invite les ministères et organismes à faire preuve de prudence et de discernement quand vient le temps de décider de donner de la formation alors qu’un concours est lancé ou est sur le point de l’être afin d’éviter de susciter le doute dans l’esprit des candidats aux concours que certains d’entre eux ont été privilégiés. »
Erreur concernant la valeur accordée aux examens attribuable à l’inversement de leur valeur respective.
[71] En regard de l’erreur commise le jour de la tenue des examens relative à l’inversement de la valeur accordée à chacun d’eux, les faits sont admis et le MRN reconnaît qu’il y a eu une erreur administrative.
[72] Toutefois, la preuve n’a pas démontré en quoi les candidats au concours ont subi ou pourraient avoir subi un préjudice en raison de cette erreur. Aucun lien n’a été établi entre la performance des appelants aux examens et l’erreur commise dans les instructions qui leur ont été données le jour de la tenue de ces examens quant à leur valeur respective.
[73] En conclusion, la Commission est d’avis que les appelants n’ont pas démontré que la procédure d’évaluation du concours est entachée d’une irrégularité ou d’une illégalité.
[74] POUR CES MOTIFS, la Commission rejette les appels de Mme Marjolaine Bessette et de M. Sylvain Ouellet.
Original signé par :
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_________________________ Louise Caron, avocate Commissaire |
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Mme Marjolaine Bessette |
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Appelants non représentés |
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Me Claire Lapointe |
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Procureure pour l’intimé |
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Lieu de l’audience : |
Québec |
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Date de l’audience : |
19 février 2014 |
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[1] Concours de promotion 634D-6003066.
[2] RLRQ, c. F-3.1.1.
[3] Mesri c. Secrétariat du Conseil du trésor, 2007 CanLII 51203 (QC CFP).
[4] Carpentier c. Centre de services partagés du Québec, 2012 CanLII 65832 (QC CFP).
[5] Dumaine et al c. Régie du bâtiment du Québec, 2002 CanLII 49200 (QC CFP).
[6] Van Haverbeke et al. c. Ministère du Revenu, [1999] 16 n° 2 R.D.C.F.P. 377.
AVIS :
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