ARBITRAGE
EN VERTU DU RÈGLEMENT SUR LE
PLAN DE GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS
(Chapitre B-1.1, r. 8)
Organisme d’arbitrage autorisé par la Régie du bâtiment du Québec:
CENTRE CANADIEN D’ARBITRAGE COMMERCIAL
CANADA
PROVINCE DE QUÉBEC
DISTRICT DE ROBERVAL
No. S21-042201-NP Johanne Lemieux
et
Roger Ménard
Bénéficiaires
c.
Constructions Lem-Tech Inc.
Entrepreneur
Et :
La Garantie Construction Résidentielle (GCR)
Administrateur
DÉCISION ARBITRALE
Arbitre : Roland-Yves Gagné
Pour les Bénéficiaires : Madame Johanne Lemieux
Monsieur Roger Ménard
Madame Marie-Pier Marineau
Pour l’Entrepreneur : Absent
Pour l’Administrateur : Me Nancy Nantel
Monsieur Martin Bérubé
Date de l’audience : 2 décembre 2021
Date de la décision : 10 janvier 2022
Description des parties
Bénéficiaires :
Madame Johanne Lemieux
Monsieur Roger Ménard
[...]
Chambord, Qc. [...]
Entrepreneur :
Constructions Lem-Tech inc.
2330, route Sainte-Geneviève
Saguenay, Qc. G7H 5B2
Domicile élu : Tremblay & Compagnie Syndics et Gestionnaires
582 boul. du Saguenay E
Saguenay (Québec) G7H1L2
Canada
Administrateur :
La Garantie de construction résidentielle (GCR)
a/s Me Nancy Nantel
4101 3e étage, rue Molson
Montréal, Qc. H1Y 3L1
LISTE DES PIÈCES
Le Bénéficiaire a produit les pièces suivantes :
B-1 Rapport de l'entreprise Construction Bon-Air inc. Étude et emplacement des dommages ;
B-2 Appel téléphonique de Eric Schwen (GCR) confirmant la visite du 16 septembre 2019 ;
B-3 Courriel de Eric Schwen (GCR) confirmant la 2e visite du 22 novembre 2019 ;
B-4 Jurisprudence. Rocheleau et Construction Beaubois inc.
« Présence de rongeurs indésirables » ;
B-4.1 Dagenais et 9094-3184 Quebec Inc. « travaux de correction mal exécutés » ;
B-5 Avis du 1er janvier 2015 du Plan de garantie GCR ;
B-6 Appels téléphoniques placés auprès de GCR le 21 novembre 2019 et 6 février 2020 ;
B-7 Historiques des visites/communications informatiques et téléphoniques entre GCR et les bénéficiaires en 2019 ;
B-8 Première réclamation à GCR en 2019 et décision de l'Administrateur en 2019 ;
B-9 Correspondance le 14 juin 2019 adressée à M. Martin Bérubé suite à sa demande de déclarer la fissure au garage ;
B-10 Photos diverses :
- Chambre froide en 2019 avant réparation et chambre froide après réparation ;
- Chambre froide: tuyaux d'aération actuels et tuyaux d'aération proposés ;
- Trappe de rongeur le ou vers le 16 août 2021 et multiples trappes de rongeur installés ;
- Porte de chambre à coucher et cadre de la porte affaissé ;
- Plancher gondolé au sous-sol ;
B-11 Lettre adressée à Me Nancy Nantel le 12 avril 2021 ;
B-12 Autres courriels et document pertinents :
- Courriel de E. Schwen à Daniel Tremblay concernant la visite du 28 août 2019 ;
- Courriel de E. Schwen à Daniel Tremblay lui demandant de ne pas traiter le plancher gondolé du sous-sol ;
- Formulaire de « déclaration de réception des travaux pris en charge par l'Administrateur » signé le 22 novembre 2019 ;
B-13 C.V. de Marie-Pier Marineau ;
B-14 En liasse, courriel concernant la demande d'enregistrement des appels téléphoniques du 15 et 16 octobre 2020 faits auprès de Garantie GCR; et copie du registre d'appels de Bell Canada indiquant les appels téléphoniques de ces mêmes dates (envoyé le 1er octobre 2021) ;
B-15 Photo au-dessus de la porte chambre à coucher prise par Madame Lemieux en juillet 2021 ;
B-16 Facture de l’expert Marineau.
L’Administrateur a produit les pièces suivantes :
Document(s) contractuel(s)
A-1 Contrat d'entreprise signé par les Bénéficiaires et l’Entrepreneur le 28 mai 2018 ;
A-2 Contrat de garantie signé par les Bénéficiaires et l’Entrepreneur le 28 mai 2018 ;
A-3 Formulaire d’inspection pré-réception signé par les Bénéficiaires et l’Entrepreneur le 29 octobre 2018 ;
Dénonciation(s) et réclamation(s)
A-4 Courriel des Bénéficiaires transmis à l’Entrepreneur le 19 octobre 2020, incluant :
Formulaire de dénonciation du 19 octobre 2020 ;
A-5 Courriel des Bénéficiaires transmis à l’Administrateur le 19 octobre 2020 re : échec de la transmission du courriel à l’Entrepreneur ;
A-6 Courriel des Bénéficiaires transmis à l’Administrateur le 2 novembre 2020 re : absence d’entente avec l’Entrepreneur ;
A-7 En liasse, avis de 15 jours transmis par courriel par l’Administrateur à l’Entrepreneur daté du 16 novembre 2020, ainsi que les preuves de remises par courriel le ou vers le 16 novembre 2020, incluant :
Formulaire de dénonciation daté du 19 octobre 2020 (voir A-4) ;
Formulaire (vierge) de mesures à prendre par l’Entrepreneur ;
A-8 Courriel des Bénéficiaires transmis à l’Entrepreneur le 30 novembre 2020, incluant :
Formulaire de dénonciation du 30 novembre 2020 ;
Autre(s) document(s) pertinent(s)
A-9 En liasse, photographies prises par l’Administrateur lors de son inspection du 8 décembre 2020 ;
Décision(s) et demande(s) d'arbitrage
A-10 En liasse, la décision de l'Administrateur datée du 3 février 2021, ainsi que les preuves de remises par courriel à l’Entrepreneur et aux Bénéficiaires le ou vers le 3 février 2021 ;
A-11 Lettre de la ministre des Affaires municipales et de l’Habitation du 17 mars 2021
re : nomination du médiateur Me Léonce E. Roy ;
A-12 Courriel de l’Administrateur transmis au médiateur le 24 mars 2021 l’avisant que l’Entrepreneur a fait faillite ; incluant :
Avis de la faillite et de la première assemblée des créanciers ;
A-13 Courriel de la notification de l'organisme d'arbitrage daté du 26 avril 2021, incluant :
Demande d'arbitrage des Bénéficiaires du 22 avril 2021 ;
Lettre de nomination de l’arbitre du 26 avril 2021 ;
A-14 Curriculum Vitae de Martin Bérubé ;
A-15 Enregistrement téléphonique du 6 février 2020 ;
A-16 Enregistrement téléphonique du 15 octobre 2020 ;
A-17 Courriel de GCR au Bénéficiaire en date du 3-09-2019 référant au sous-sol ;
A-18 Courriel du service de télécommunications.
INTRODUCTION 5
Point 2 Présence de vermines dans la résidence 6
Preuve sur le Point 2 7
Décision sur le Point 2 7
Point 4 Ventilation de la chambre froide du sous-sol 9
Preuve sur le Point 4 10
Décision sur le Point 4 11
Point 3 (Couvre-plancher/sous-sol), Point 6 (fissures/porte/chambre des maîtres) et Point 7 (plancher flottant/rez-de-chaussée) : Introduction - Dates de découverte, couverture du plan de garantie et délai de dénonciation 13
Point 3 Couvre-plancher du sous-sol 15
Preuve quant au Point 3 16
Décision sur le Point 3 17
Point 7. Plancher flottant au corridor du rez-de-chaussée 20
La date de la découverture et la couverture du plan de garantie 21
Décision quant à la date de la découverte et la couverture 22
Le plancher flottant est-il atteint d’un vice caché couvert par l’Administrateur ? 23
Décision quant au vice caché au plancher flottant 25
Point 6 Fissures au placoplâtre au-dessus de la porte de la chambre principale 28
Date de la découverte et couverture 28
Décision quant à la date de la découverte et à la couverture 29
Peut-on qualifier ce point de vice caché couvert par l’Administrateur? 31
Décision sur le Point 6 31
Point 5 Fissures au placoplâtre dans l’escalier menant au sous-sol 32
Preuve sur le Point 5 32
Décision sur le Point 5 33
(Point 5, 6 et 7) L’affaissement du bâtiment allégué par les Bénéficiaires 33
FRAIS 36
Frais d’expertises 36
Coûts de l’arbitrage 36
CONCLUSION 37
[1] Le Tribunal d’arbitrage est initialement saisi du dossier à la suite d’une demande d’arbitrage par les Bénéficiaires, reçue par le Centre Canadien d’Arbitrage Commercial (CCAC) le 22 avril 2021, et par la nomination du soussigné comme arbitre le 26 avril 2021.
[3] Bien que dûment assigné, l’Entrepreneur était absent ; il a fait cession de ses biens le 7 février 2019 (pièce A-11).
[4] L’audition s’est tenue par moyens technologiques (Zoom).
[5] Quant à la valeur de la réclamation :
[5.1] en début d’audience, le représentant de l’Administrateur a évalué la valeur de la réclamation des Bénéficiaires entre $7,500 et $10,000 ;
[5.2] pendant l’audience, les Bénéficiaires ont cherché à mettre en preuve, et plaidé, qu’une partie de leur bâtiment s’était affaissée ;
[5.3] le rapport d’expert produit par les Bénéficiaires recommande de faire vérifier les semelles des poteaux porteurs ;
considérant, entre autres, qu’un affaissement, à supposer qu’il existe et c’est ce que le Tribunal a dû déterminer, entraînerait, entre autres, un rehaussement et un rééquilibrage, en plus de dommages collatéraux au paysagement lors de travaux correctifs, sans l’ombre d’un doute, la valeur de la réclamation était supérieure à $15,000.
[6] Les Bénéficiaires ont réitéré en début d’audience que les points de la décision de l’Administrateur du 3 février 2021 avec lesquels ils ont un différend qu’ils demandent au Tribunal d’arbitrage de trancher, sont les points 2 à 7, soit (considérant la nature des différends à trancher, le Tribunal d’arbitrage a suivi l’ordre suivant dans sa décision) :
[6.1] 2. Présence de vermines dans la résidence ;
[6.2] 4. Ventilation de la chambre froide du sous-sol ;
[6.3] 3. Couvre-plancher du sous-sol ;
[6.4] 7. Plancher flottant au corridor du rez-de-chaussée ;
[6.5] 6. Fissures au placoplâtre au-dessus de la porte de la chambre principale ;
[6.6] 5. Fissures au placoplâtre dans l’escalier menant au sous-sol.
[7] La réclamation sur ces points est produite en pièce A-4 et, sauf pour le point 4, Ventilation de la chambre froide, dont ils contestent les travaux correctifs effectués après une première décision de l’Administrateur, toutes les dates de la découverte inscrites par les Bénéficiaires sont après l’année de la couverture de la malfaçon, soit la première année suivant la réception des travaux du 29 octobre 2018.
[8] Voici les extraits pertinents de l’article 10 du Règlement, qui réfère à deux périodes, soit le moment de la découverte pour déterminer la couverture de la Garantie géré par l’Administrateur et le délai raisonnable pour dénoncer ce qui est découvert :
10. La garantie d’un plan dans le cas de manquement de l’entrepreneur à ses obligations légales ou contractuelles après la réception du bâtiment doit couvrir:
[...]
3° la réparation des malfaçons existantes et non apparentes au moment de la réception et découvertes dans l’année qui suit la réception, visées aux articles 2113 et 2120 du Code civil et dénoncées, par écrit, à l’entrepreneur et à l’administrateur dans un délai raisonnable de la découverte des malfaçons ;
4° la réparation des vices cachés au sens de l’article 1726 ou de l’article 2103 du Code civil qui sont découverts dans les 3 ans suivant la réception du bâtiment et dénoncés, par écrit, à l’entrepreneur et à l’administrateur dans un délai raisonnable de la découverte des vices cachés au sens de l’article 1739 du Code civil ;.
[9] La Cour supérieure a confirmé dans 9264-3212 Québec Inc. c. Moseka[1] que l’arbitrage est un procès « de novo », au cours duquel les Bénéficiaires, entre autres, peuvent apporter toute preuve nouvelle :
[20] […] L’arbitre peut entendre des témoins, recevoir des expertises et procéder à l’inspection des biens ou à la visite des lieux
[…] [24] Le Tribunal rappelle que l’arbitre ne siège pas en appel ou en révision de la décision du Conciliateur. Il ne procède pas non plus à décider en se basant uniquement sur le dossier transmis. […]
[10] Dans la décision du 3 février 2021, l’Administrateur a rejeté cette réclamation en ces termes :
Les bénéficiaires dénoncent la présence de souris au grenier et de criquets au sous-sol, situation qui est en lien selon eux à l’absence de certaines grilles anti-rongeurs au pourtour du revêtement extérieur et qu’ils ont découverte au cours du mois d’août 2020, soit en deuxième année de garantie.
Lors de notre visite, nous avons constaté que certaines grilles anti-rongeurs sont incomplètes au pourtour du bâtiment, de même que nous observons que la situation a été dénoncée en deuxième année de garantie, laquelle ne saurait rencontrer les critères du vice caché.
[11] Le Bénéficiaire réfère à la pièce B-10 sur laquelle il y a une photo à la page 5, sur laquelle il y a deux trappes de souris, c’est le grenier du garage qui (le grenier) sert aussi d’entrepôt (tel que prévu à l’origine, on a fait faire les « trusts habitables ») il y a découvert des rongeurs.
[12] En se rendant au grenier du garage, il a aperçu une souris ; étant donné qu’il ne va pas souvent dans le grenier depuis la fin des travaux, la première fois qu’il a vu une souris fut vers le début d’août 2020 ; par contre, la présence de criquets au sous-sol date de l’été 2019, 2020, 2021.
[13] Pour s’en débarrasser (des souris), il a dû installer des trappes à souris, il est allé au grenier chaque jour pour s’assurer que les trappes étaient appâtées et fonctionnelles.
[14] Depuis le mois d’août 2020, entre 25 et 30 souris ont été attrapés, parfois jusqu’à trois dans la même journée.
[15] Le fait d’avoir des souris, ça fait des crottes partout, c’est insalubre.
[16] Il dit que pour les criquets ça passe par la même place.
[17] Le grenier du garage communique avec le grenier de la maison, c’est un grenier ouvert en totalité, il n’y a pas de séparation entre les deux, c’est le grenier de tout le bâtiment, autant garage que maison.
[18] Le grenier a été finalisé par l’Entrepreneur d’origine.
[19] Il a trouvé des souris dans la portion habitable du grenier alors que les criquets c’était dans le sous-sol aussi.
[20] Pour sa part, l’Inspecteur-conciliateur témoigne à l’effet qu’il s’agit de grilles anti-rongeurs qui ne sont pas continues mais elles sont présentes lors de sa visite, il a constaté les faits au niveau de la présence des grilles mais qu’elles n’étaient pas nécessairement continues donc « je reconnais qu’il y a une problématique au niveau de malfaçon non apparente mais pas la gravité d’un vice caché ».
[21] Le témoin conclut que dans le cadre d’une dénonciation dans la deuxième année, ça ne revêt pas la gravité d’un vice caché puisqu’elles sont partiellement installées.
[22] Vu la preuve, vu le Règlement, le Tribunal d’arbitrage accueille la demande d’arbitrage des Bénéficiaires.
[23] Sur le formulaire de dénonciation (pièce A-4) et lors de l’audience, les Bénéficiaires ont confirmé avoir constaté la présence de souris en août 2020, et leur dénonciation a été produite en octobre 2020, dans un délai raisonnable.
[24] L’Inspecteur-conciliateur a témoigné qu’il y avait une cause au problème : les grilles qui ne sont pas continues, qu’il a qualifié au début de son témoignage de malfaçon non apparente mais n’ayant pas la gravité d’un vice caché mais, avec égards, le soussigné ne partage pas cet avis.
[25] Le Tribunal d’arbitrage soussigné a déjà vu une promesse d’achat annulée après la découverte d’une seule souris morte dans une trappe à souris lors d’une inspection préachat.
[26] Le Tribunal d’arbitrage partage l’opinion de l’arbitre dans Mélanie Rocheleau, Antoine St-Pierre c. Construction Beaubois Inc. (Ci-Après L’« Entrepreneur ») La Garantie Abritat Inc.[2] et de l’honorable Jeffrey Edwards, aujourd’hui juge à la Cour supérieure, qu’il cite :
31. Les Bénéficiaires ont déposé à l’attention du tribunal une décision de Me Jeffrey Edwards, dans l’affaire Radulescu et Groupe Axxco Inc., GAMM, 58153-2914, 2010-12-001 et 13185-60-2010-0-20.
32. Me Edwards, maintenant Juge à la Cour du Québec, statue comme suit :
« Un examen des lieux a permis de constater que les ouvertures aux extrémités inférieures de la porte de garante étaient, avant que le conjoint de la bénéficiaire n’effectue des travaux, assez grandes pour permettre aux rats d’entrer et les bénéficiaires ont démontré qu’ils s’étaient en toute probabilité introduits dans l’immeuble ainsi. Il s’agit d’un vice caché. En effet, l’entrepreneur d’une maison neuve doit livrer un bâtiment qui empêche d’une façon efficace la présence de vermines et de rongeurs comme des rats particulièrement lorsqu’il y a des motifs raisonnables de croire que de tels animaux se trouvent à proximité, comme c’est le cas en l’espèce. »
[...] 34. Le tribunal n’a aucune hésitation à conclure comme l’a fait Me Edwards à l’effet qu’il s’agit d’un vice caché.
35. En effet, la présence de vermine dans les murs d’une propriété, dans le cadre de la Garantie des vices cachés, peut être considérée comme tel au sens de l’article 1726 en ce que une telle infestation rend l’immeuble impropre à l’usage et qu’un acheteur éventuel n’aurait certainement pas payer le prix demandé eut-il été prévenu de la présence de vermines ou d’interstice permettant l’entrée de telles vermines.
[27] Voici d’autres extraits de la décision de Jeffrey Edwards (aujourd’hui juge à la Cour supérieure), dans l’affaire Radulescu et Groupe Axxco Inc.[3] :
Les ouvertures à chacune des extrémités inférieures de la porte de garage qui permettent aux rats l’accès au garage et du fait même, au sous-sol du bâtiment habitable, constituent-ils des vices cachés au sens de l’article 1726 du Code civil du Québec?
[40] Le Règlement énonce une protection de trois (3) ans contre les vices cachés au sens de l’article 1726 du Code civil du Québec (Article 27, alinéa 4).
[41] Un vice au sens de la garantie est tout fait qui provoque une diminution anormale du bien qui engendre un déficit d’usage (ABB Inc. c. Domtar[4]). Il semble clair pour le Tribunal d’arbitrage que l’Entrepreneur d’une maison neuve doit livrer un bâtiment qui empêche efficacement l’introduction des vermines et des rongeurs, tels les rats. L’omission par l’Entrepreneur de le faire ici a sérieusement nui et ébranlé la jouissance normale par la Bénéficiaire, son conjoint et leur enfant de leur maison. Cela est d’autant plus nécessaire lorsqu’il y a des motifs raisonnables de croire à la présence de vermines et de rongeurs à proximité de la nouvelle résidence (terrain vacant dans un milieu urbain). Il est à noter que la jurisprudence a établi que, devant l’existence d’un vice au sens de l’article 1726 du Code civil du Québec et donc un vice qui porte atteinte aux attentes raisonnables de l’acheteur, le respect des normes n’est pas une défense[5]. Le fait de laisser des ouvertures suffisantes qui permettent l’introduction des rats dans le sous-sol d’une demeure constitue un vice au sens de l’article 1726 du Code civil du Québec.
[42] Ainsi, le Tribunal d’arbitrage conclut à l’existence d’un vice au sens de l’Article 1726 du Code civil du Québec. Cependant, ce vice rencontre-t-il les autres conditions pour le qualifier de « caché », à savoir, qu’il était non apparent, inconnu de l’acheteur, antérieure à la vente et grave. Le vice était clairement non apparent, car il ne pouvait être découvert qu’après l’entrée et l’infestation des rats au sous-sol et l’examen minutieux des possibilités d’introduction des rats dans la demeure. Ce ne serait sûrement pas normal pour un acheteur d’une maison neuve de se prêter à de tels exercices d’enquête lors d’une inspection avant achat.
[28] Vu la preuve, vu le Règlement, le Tribunal d’arbitrage accueille donc la demande d’arbitrage des Bénéficiaires.
[29] Dans la décision du 3 février 2021, l’Administrateur a rejeté cette réclamation en ces termes :
Les bénéficiaires dénoncent une ventilation inadéquate dans la chambre froide en période estivale, pièce dans laquelle la température se maintient à environ 20 degrés Celsius en été, alors qu’elle commence à circuler au retour de la saison froide, situation qu’ils ont découverte au cours du mois de juin 2020, soit en deuxième année de garantie, laquelle nous sommes d’avis ne rencontre pas les critères d’un vice caché.
[30] La chambre froide avait déjà fait l’objet d’une première dénonciation par les Bénéficiaires en mars 2019.
[31] Dans sa première décision du 11 juillet 2019 (pièce B-8), l’Administrateur écrit au Point 5. Chambre froide du sous-sol non isolée :
5. Chambre froide du sous-sol non isolée
Les bénéficiaires dénoncent que la chambre froide du sous-sol n’a pas été isolée.
Lors de notre visite, nous avons été en mesure de constater que plusieurs travaux ont été faits tels qu’au plan d’origine.
La bénéficiaire mentionne cependant qu’une problématique relative au contrôle de l’air extérieur en hiver cause des problèmes.
L’entrepreneur devra effectuer les travaux requis afin de permettre l’admission de l’air de façon adéquate dans la chambre froide du sous-sol, en s’assurant que l’isolation et le maintien de la température sont adéquats
[32] La Bénéficiaire dit que lors de la construction en 2018, l’Entrepreneur a bouché les trous d’aération avec de la laine minérale et il devait revenir au printemps 2019 pour terminer l’installation mais il a fait faillite en février 2019.
[33] La Bénéficiaire montre à la pièce B-10 la chambre froide avant les réparations d’octobre 2019 et après ces réparations, les réparations ont été faites en octobre 2019 (à la suite de la première décision) mais c’est seulement au mois de juin 2020 qu’ils se sont rendus compte que la température de la chambre froide montait jusqu’à 20° et qu’elle ne conservait pas sa climatisation, que les travaux n’avaient pas réglé le problème d’aération.
[34] Elle l’a dénoncé en octobre 2020.
[35] Elle affirme qu’il y a un lien entre les deux réclamations, parce que quant aux trous d’aération, lors de la visite des lieux de Martin Bérubé le 8 décembre 2020, il a expliqué que c’était lui qui avait indiqué à l’entrepreneur en octobre 2019 de placer deux conduits de plastique à l’emplacement original des trous d’aération faits par le premier Entrepreneur.
[36] Les travaux ont été faits mais ça n’a pas réglé la problématique, c’est ce qu’ils ont constaté en juin 2020.
[37] Pendant l’été il n’y a aucune aération qui circule dans la chambre froide de par la place où elle est située.
[38] Les plans originaux prévoyaient qu’il y aurait une chambre froide.
[39] À la question de la procureure de l’Administrateur, s’il était prévu dans son contrat initial un système mécanique quelconque, la Bénéficiaire répond non, c’était seulement la perforation des deux trous d’aération, mais elle se plaint de leur localisation selon ce qu’une personne absente à l’audience lui aurait dit ;
[39.1] le Tribunal a accueilli l’objection de la procureure de l’Administrateur à l’effet qu’il s’agissait d’une opinion d’expert et d’un ouï-dire et ajoute qu’il considère ce point comme non pertinent vu sa conclusion sur le fond.
[40] L’Inspecteur-conciliateur témoigne à l’effet que :
[40.1] au niveau de la première décision c’était de compléter l’isolation de la chambre froide et au surplus, il y avait deux ouvertures dans le béton qui étaient bouchées avec de la laine minérale donc il y avait une problématique de ventilation de la chambre froide ;
[40.2] la ventilation devait se faire par les conduits directement mais ils étaient bouchés avec l’extérieur ;
[40.3] lors de sa visite de décembre 2020, les travaux correctifs avaient été terminés, l’isolation et la ventilation avaient été modifiées, il a vérifié la conformité de ces travaux et il ne voyait rien d’anormal à la suite de la dénonciation des Bénéficiaires d’une température de 20° pendant l’été au niveau la chambre froide ;
[40.4] il est certain que l’on peut atteindre des températures plus élevées en été, ce qui veut dire que l’on doit contrôler le niveau de l’admission de l’air ou contrôler le niveau de la température intérieure, il n’a pas détecté d’anomalie ;
[40.5] c’est un différentiel de pression avec la pression extérieure et intérieure, c’est un jeu barométrique, c’est un système standard ;
[40.6] une chambre froide ouverte à l’extérieur est tributaire de l’air qu’il y a à l’extérieur selon la saison, il n’y a pas d’appareils mécaniques soit un ventilateur ou même à la rigueur un climatiseur qui peut permettre de refroidir la pièce ;
[40.7] pour que ce soit plus frais en été, il faudrait apporter soit un système mécanique qui permette de rabaisser la température ou carrément obstruer l’air extérieur pour ne pas admettre de la température plus élevée.
[41] Pendant son délibéré le Tribunal d’arbitrage a vérifié la température de mai et juin 2020 à la station météorologique de Roberval (Navcan)[6] (environ 20 km du bâtiment résidentiel) et a constaté qu’il y a fait chaud, jusqu’à 35o Celsius ou 95o Fahrenheit (bien qu’il a été écrit sur le formulaire de dénonciation (pièce A-4) que c’est le 1er juin qu’il y a eu une première observation, les Bénéficiaires ont référé pendant leur témoignage au mois de juin de façon générale, sans autre précision) ;
[41.1] 27 mai (31,6o) ;
[41.2] 28 mai (33,5o) ;
[41.3] 29 mai (28,1o) ;
[41.4] 16 juin (29,6o) ;
[41.5] 17 juin (32,1o) ;
[41.6] 18 juin (35,0o) ;
[41.7] 19 juin (34,1 o) ;
[41.8] 20 juin (28,5 o) ;
[41.9] 21 juin 2020 (33,5 o).
[42] Vu la preuve, la réclamation sur la chambre froide des Bénéficiaires quant au fait qu’il y fasse 20oC pendant les chaleurs de fin mai/juin 2020 et ce, en l’absence de système mécanique, est rejetée.
[43] Il ne s’agit pas d’une question de travaux correctifs mal exécutés, comme le plaide les Bénéficiaires, ce qui avait été accueilli était un problème de chambre froide en hiver.
[44] La situation est différente de la décision produite par les Bénéficiaires, soit l’affaire Dagenais et 9094-3184 Quebec Inc.[7] « travaux de correction mal exécutés », dans laquelle l’arbitre a conclu qu’un parement de vinyle devait résister aux conditions climatiques de la région – il ne s’agit pas ici d’un parement de vinyle, mais d’une chaleur de 20oC dans une chambre froide pendant les chaleurs de l’été (35oC) sans système mécanique selon les plans originaux.
[45] La chambre froide laisse entrer l’air froid/frais de l’automne au printemps (avant les chaleurs associées normalement à l’été), permettant une température fraîche ambiante, toutefois si tout l’environnement est très chaud en été et qu’il fait 35oC à l’extérieur, sans système mécanique tout en laissant entrer l’air à 35oC de l’extérieur, elle risque en effet de monter à 20oC comme s’en plaint les Bénéficiaires.
[46] Les Bénéficiaires ont acheté et payé une chambre froide sans aucun système mécanique de ventilation.
[47] La preuve au dossier est qu’ils ont reçu ce pour quoi ils ont payé.
[48] La Cour d’appel dans Desrochers c. 2533-0838 Québec inc.[8] affirme, dans le cas où la Cour rejette ainsi le recours en malfaçons de l’acheteur qui avait reçu la contrepartie complète correspondant à son paiement :
[21] Mais surtout, il est crucial de rappeler que l’appelant n’a payé que pour une dalle de quatre pouces vu la nature du contrat [...] de sorte que l’appelant a reçu la contrepartie complète (soit une dalle de quatre pouces) correspondant à son obligation de paiement. Il n’a pas subi de dommages dans les circonstances.
[49] Vu la preuve, vu le Règlement, le Tribunal d’arbitrage rejette la réclamation des Bénéficiaires sur ce point.
[50] Le Tribunal d’arbitrage a à trancher des différends semblables sur trois points quant aux dates de découverte, la couverture du plan de garantie et le délai de dénonciation, le tout, à la lumière de l’Article 10 du Règlement (cité au paragraphe [8] ci-haut) décrivant la couverture de la garantie.
[51] La présente introduction concerne ces trois points, pour lesquels la preuve, traitée à chaque point en particulier, a amené à des conclusions différentes selon le point traité.
[52] Les Bénéficiaires ont produit une preuve à l’audience disant vouloir corriger les « erreurs » (sic!) de dates inscrites dans la décision de l’Administrateur alors même que ces dates sont celles qu’ils ont eux-mêmes inscrites dans leur formulaire de dénonciation, leur preuve à l’audience vise donc, à première vue, à contredire leurs propres déclarations écrites.
[53] Le Tribunal d’arbitrage, à l’esprit bien ouvert, se doit tout de même de baser sa décision sur la Loi, le Règlement et les règles juridiques quant à la preuve.
[54] Ce n’est pas contre l’Entrepreneur et en vertu du droit commun, qu’est exercé le présent recours mais contre l’Administrateur du Plan de garantie en vertu du Règlement.
[55] Le Plan de garantie géré par l’Administrateur prévoit que la garantie couvre la malfaçon non apparente qui est découverte dans l’année de la réception et le vice caché découvert dans les trois ans.
[56] C’est le Règlement, décrété par le Gouvernement du Québec, Règlement qu’au moins quatre[9] arrêts de la Cour d’appel du Québec ont déclaré être d’ordre public, qui détermine sa période de couverture et non, la compréhension personnelle des Bénéficiaires, et le soussigné n’a pas le pouvoir de mettre ce Règlement de côté.
[57] Éric Schwen (chargé de projet, GCR) et Daniel Tremblay (de l’entreprise BonAir, choisi par GCR pour effectuer les travaux correctifs à la suite d’une première décision de l’Administrateur) sont venus au bâtiment résidentiel des Bénéficiaires le 28 août 2019 à la suite d’une première décision de l’Administrateur du 11 juillet 2019 (signée par Martin Bérubé, le même Inspecteur-conciliateur qui a signé la décision objet de l’arbitrage) en vue d’effectuer les travaux correctifs ordonnés dans cette première décision.
[58] Les Bénéficiaires ont produit sous B-12 :
[58.1] un courriel d’Éric Schwen qui donne rendez-vous à Daniel Tremblay le 28 août 2019 à 10 :00 ;
[58.2] un courriel d’Éric Schwen du 5 novembre 2019 aux Bénéficiaires à l’effet que les travaux pris en charge étaient complétés ;
[58.3] un courriel des Bénéficiaires disant à Éric Schwen être disponibles le 22 novembre 2019 ;
[58.4] une Déclaration de réception des travaux pris en charge par l’Administrateur – Réception sans réserve - portant la signature du Bénéficiaire Roger Ménard datée du 22 novembre 2019.
[59] Lors de cette visite du 28 août 2019, la Bénéficiaire affirme à l’audience avoir fait une dénonciation verbale à Monsieur Schwen concernant le plancher du sous-sol qui gondolait (point 3), le plancher flottant du rez-de-chaussée (point 7) et la porte de chambre des maîtres (point 6).
[60] La Bénéficiaire allègue qu’Éric Schwen a répondu qu’il s’agissait du comportement normal des matériaux, non couvert par le plan de garantie.
[61] L’Administrateur s’est objecté à ce que la Bénéficiaire rapporte ce qu’aurait dit Éric Schwen, sur la base de la prohibition du ouï-dire[10].
[62] Le Tribunal d’arbitrage a partiellement rejeté l’objection sur la base qu’il s’agissait des propos de son représentant, que le soussigné avait pris soin de reproduire les propos allégués dans son procès-verbal du 11 août 2021 lors de la conférence de gestion dans le but de ne pas prendre par surprise l’Administrateur, et rappelle l’arrêt de la Cour de la Cour suprême dans O’Brien[11] ;
[62.1] le Tribunal ajoute que l’Administrateur a lui-même produit un courriel qu’il dit avoir été envoyé par le même Éric Schwen, alors qu’en droit, les courriels sont tout autant soumis à la règle de la meilleure preuve et l’Administrateur n’a pas produit le même Éric Schwen comme témoin[12] ;
toutefois, le Tribunal a précisé que sa position était sous réserves des autres règles de la preuve :
[62.2] la preuve doit être pertinente ;
[62.3] la preuve que l’on veut produire est susceptible d’une contre-preuve ;
[62.4] surtout, même en recevant le témoignage, il reste soumis à la règle d’appréciation (art. 2845 C.c.Q.) ; le professeur Claude Fabien[13] écrit :
Après tout cet exercice, la déclaration extrajudiciaire, élevée à la dignité de témoignage (art. 2869 C.c.Q.), est soumise à la règle d’appréciation du témoignage par le tribunal (art. 2845 C.c.Q.). Il s’agit d’une opération distincte de celle de la réception en preuve de la déclaration. Le tribunal doit apprécier la force probante de la déclaration en elle-même, en tenant compte de sa fiabilité. Il doit ensuite l’apprécier en fonction des autres éléments qui composent l’ensemble de la preuve. Au terme de cet examen sur le fond, le tribunal peut être amené à écarter une déclaration, malgré la décision de la recevoir en preuve. Il y a là une sauvegarde dont il ne faut pas sous-estimer l’importance. ;
donc, le Tribunal d’arbitrage se doit d’en apprécier la force probante en fonction des autres éléments qui composent l’ensemble de la preuve, à la suite de l’objection de l’Administrateur qui n’admet pas ce témoignage et en rappelant que les Bénéficiaires ont eux-mêmes inscrit des dates de découverte (« première observation ») sur le formulaire de dénonciation du 19 octobre 2020 (pièce A-4) qu’ils ont eux-mêmes signé.
[63] Il reste à disposer de chacun des points, selon la preuve, les règles de la preuve et le Règlement.
[64] Dans la décision du 3 février 2021, l’Administrateur a rejeté cette réclamation en ces termes :
Les bénéficiaires dénoncent que le couvre plancher de vinyle gondole au pied de l'escalier du sous-sol, situation ayant été dénoncée au chargé de projet de la GCR en novembre 2019.
Lors de notre visite, nous avons observé le gondolement du revêtement de plancher au bas de l’escalier du sous-sol, situation qui fut toutefois officiellement dénoncée en deuxième année de la garantie, soit le 19 octobre 2020, délai que l’administrateur juge déraisonnable et au surplus, nous sommes d’avis que la situation ne revêt pas les caractéristiques d’un vice caché.
[65] Sur le formulaire de dénonciation signé par les deux Bénéficiaires le 19 octobre 2020 (pièce A-4), les Bénéficiaires ont inscrit, comme date de la première observation, le 1er novembre 2019.
[66] La Bénéficiaire affirme à l’audience :
[66.1] avoir dénoncé verbalement à Éric Schwen, chargé de projet de la GCR, le gondolement du revêtement de plancher au sous-sol le 28 août 2019 ;
[66.2] mais que le courriel suivant du 3 septembre 2019 d’Éric Schwen à l’adresse de courriel du Bénéficiaire (pièce A-17), n’est jamais parvenu aux Bénéficiaires, ajoutant que c’est impossible pour eux de le retrouver dans la boîte de courriel et n’a jamais été lu ; ce courriel du 3 septembre 2019 (pièce A-17) se lit ainsi :
Bonjour Mme Lemieux et M. Ménard,
Pour donner suite au point soulevé la semaine dernière concernant le revêtement de plancher au sous-sol qui semble avoir subi un gonflement, je vous informe que le nouveau point demande à être traité dans une nouvelle dénonciation.
Donc vous devrez faire parvenir un courriel au service de réclamation ainsi qu’à l’entrepreneur d’origine même si celui-ci est en faillite afin d’entamer le processus.
[67] La Bénéficiaire ajoute que si les Bénéficiaires avaient reçu et lu ce courriel du 3 septembre, ils auraient agi immédiatement comme ils l’ont fait sur les recommandations du conciliateur Martin Bérubé le 12 juin 2019 lors de sa visite sur un autre point.
[68] Quant au second courriel du 3 septembre 2019 (pièce B-12, p. 3 de 7, joint à un courriel du 7 octobre 2019), envoyé par Éric Schwen à l’entrepreneur Daniel Tremblay dans lequel le premier dit au second : « en ce qui concerne le point du plancher gondolé au sous-sol soulevé lors de notre visite celui-ci ne sera pas traité dans votre soumission » ;
[68.1] d’une part, la Bénéficiaire affirme que ce courriel du 3 septembre 2019 leur a été envoyé le 7 octobre 2019 par erreur puisqu’eux ils n’avaient rien demandé ;
[68.2] d’autre part, la Bénéficiaire affirme que les deux courriels du 3 septembre d’Éric Schwen adressés à quatre minutes d’intervalle n’apparaissent nulle part dans leur boîte de courriel et il n’y a aucune confirmation de lecture de leur part.
[69] Quant au revêtement de plancher lui-même, en dessous du gondolement, c’est vide, ce n’est pas le plancher qui monte, c’est le revêtement qui gondole au bas des marches, (pièce B-10, page 4, photo prise en février 2021), ça continue plus loin qu’au bas des marches à droite si on descend, sur une distance de six à sept pieds.
[70] En février 2021 lors de la prise de la photo, c’était dans le même état que quand ça été dénoncé en août 2019.
[71] Ça commençait à gondoler en juin, juillet 2019 alors qu’ils sont rentrés le 1er décembre 2018.
[72] Le gondolement est à peu près entre un demi-pouce et un pouce.
[73] En plus du problème de l’esthétisme, la Bénéficiaire affirme que « c’est désagréable quand on marche, sous nos pas, quand on prend la première marche ça nous fait comme trébucher, faut toujours faire attention quand on met le pied dessus parce que ça nous déstabilise ».
[74] L’Inspecteur-conciliateur a quant à lui constaté le gondolement du bas de l’escalier, c’est seulement une malfaçon non apparente au niveau de l’installation du prélart flottant, et en plus du délai de dénonciation qui n’est pas raisonnable, la situation ne saurait revêtir la gravité d’un vice caché (seul couvert pour les problématiques découvertes en novembre 2019 comme inscrit sur le formulaire de dénonciation).
[75] C’est un prélart flottant directement sur la dalle de béton, s’il n’est pas bien appuyé, il va forcément ballouner, environ ½ pouce.
[76] S’il avait été dénoncé dans la première année ça aurait couvert comme malfaçon non apparente.
[77] C’est un problème d’installation.
[78] Vu la preuve, vu le Règlement, la demande d’arbitrage des Bénéficiaires est accueillie quant au point 3.
[79] La Bénéficiaire a affirmé à l’audience :
[79.1] que ça a commencé à gondoler « en juin, juillet 2019 » alors qu’ils sont rentrés le 1er décembre 2018, lors de la première année de la garantie qui couvre les malfaçons non apparentes à partir du 29 octobre 2018 (réception des travaux) ;
[79.2] avoir dénoncé ce point verbalement le 28 août 2019 ;
[79.3] ne pas avoir été au courant de la position de l’Administrateur écrite le 3 septembre 2019 (le courriel d’Éric Schwen) à l’effet qu’ils devaient produire une nouvelle dénonciation à ce sujet ;
[79.4] avoir rencontré le chargé de projet par la suite le 22 novembre 2019.
[80] Le Tribunal d’arbitrage conclut de la preuve :
[80.1] que le courriel du 3 septembre 2019 corrobore l’affirmation de la Bénéficiaire quant à sa dénonciation verbale du 28 août 2019 ;
[80.2] que si Éric Schwen (chargé de projet de l’Administrateur pour les travaux correctifs à la suite de la première décision du 11 juillet 2019) a pris la peine d’envoyer un courriel du 3 septembre 2019 :
[80.2.1] la problématique du plancher au sous-sol a été découverte dans la première année et dénoncée verbalement le 28 août, comme l’affirment la Bénéficiaire à l’audience et le courriel du 3 septembre 2019 ;
[80.2.2] et, surtout, l’information que contient le courriel du 3 septembre 2019 n’a pas été donnée avant, le courriel ne réfère à aucune réponse antérieure.
[81] Éric Schwen a rencontré la Bénéficiaire le 22 novembre 2019, et le Tribunal ne peut pas conclure autrement que ce qu’il a dit le 22 novembre 2019 est en accord avec l’information communiquée par courriel le 3 septembre, d’ailleurs, la Bénéficiaire affirme qu’Éric Schwen leur a recommandé le 22 novembre d’envoyer une vidéo à la GCR.
[82] Lors de leur dénonciation du 19 octobre 2020, les Bénéficiaires ont affirmé avoir constaté le gondolement le 1er novembre 2019 (pièce A-4).
[83] Même si le formulaire indique comme date de découverte le 1er novembre 2019, les Bénéficiaires affirment à l’audience que c’est le 22 novembre 2019 (mais sans jamais expliquer pourquoi la date du 1er novembre a été inscrite), que Monsieur Éric Schwen a dit qu’il fallait faire une vidéo et l’envoyer à la GCR ;
[83.1] la Bénéficiaire affirme à l’audience comprendre que Monsieur Éric Schwen leur a fait cette recommandation parce qu’il acceptait la prise en charge des travaux, toutefois, cette compréhension n’est pas supportée par la preuve ;
[83.1.1] le 6 février 2020, la Bénéficiaire appelle la GCR, elle ne fait aucune mention du plancher du sous-sol, ni qu’Éric Schwen a affirmé que la GCR prenait en charge les travaux, il y a aussi absence de mention dans la conversation téléphonique du 15 octobre 2020 et dans le formulaire de dénonciation du 19 octobre ;
[83.1.2] le fait de « comprendre personnellement » comme on le veut le Règlement ne change pas son contenu décrété par le Gouvernement.
[84] Voici ce que la Bénéficiaire affirme le 6 février 2020 lors de la conversation téléphonique avec la GCR (pièce A-15) :
[84.1] « [Note du Tribunal : le début concerne le Point 7, nous y reviendrons sous cette section] Monsieur Éric Schwen nous avait recommandé à ce moment-là de faire un vidéo, pis de vous le faire parvenir parce que je ne voudrais pas faire tout de suite une nouvelle réclamation parce que la maison elle est neuve, s’il y a d’autres malfaçons qui vont se créer j’aimerais mieux la faire comme à la fin de l’année. Dites-moi comment procéder, est-ce que ça ça l’aurait du sens ».
[85] Voici la réponse de la préposée de la GCR : « mais de toutes façons il va falloir que vous fassiez une dénonciation à ce moment-là ».
[86] De plus, si d’une part,
[86.1] ce n’est pas exactement la prétention des Bénéficiaires dans leur résumé écrit, pièce B-11, à l’effet la « GCR nous conseille alors d’attendre que d’autres troubles se manifestent avant de faire une dénonciation » ;
d’autre part,
[86.2] la préposée de la GCR dit aussi à la Bénéficiaire que « vous connaissez la procédure, vous allez avoir éventuellement une date pour une visite, après [ou « à travers »?] la réclamation et tout ça, mais vous pouvez jusqu’à deux semaines avant la visite, vous pouvez faire des rajouts ».
[87] Le Tribunal d’arbitrage conclut qu’il était raisonnable et crédible pour la Bénéficiaire de conclure, comme elle l’a plaidé à l’audience, que les représentations par la préposée de l’Administrateur ;
[87.1] « à ce moment-là » - référait à ce que venait de dire la Bénéficiaire, « comme à la fin de l’année » ;
[87.2] et à la suite de quoi, comme lui a dit la préposée : « vous pouvez jusqu’à deux semaines avant la visite, vous pouvez faire des rajouts ».
[88] Le Règlement est clair : l’article 19.1, deuxième alinéa, se lit ainsi :
19.1. Le non-respect d’un délai de recours ou de mise en œuvre de la garantie par le bénéficiaire ne peut lui être opposé [...] Le non-respect d’un délai ne peut non plus être opposé au bénéficiaire, lorsque les circonstances permettent d’établir que le bénéficiaire a été amené à outrepasser ce délai suite aux représentations de l’entrepreneur ou de l’administrateur.
[89] Le Tribunal ajoute avoir pris en compte et jugé non pertinent pour les fins de l’article 19.1 du Règlement que lors de la conversation du 6 février 2020, la Bénéficiaire s’est trompée sur le contenu du Règlement car elle ne dit pas au téléphone que son immeuble avait été construit en 2018 et sa couverture pour malfaçons était déjà terminée en octobre 2019 (un an après la réception), elle affirme plutôt que d’autres malfaçons peuvent survenir dans l’année ; le motif : « malfaçon » pour un juriste très au fait du Règlement n’a pas nécessairement le même sens que « malfaçon » pour un simple acheteur.
[90] Avant de conclure, le Tribunal ajoute, quant à la conversation du 15 octobre 2020 dont l’enregistrement est aussi au dossier :
[90.1] la conversation du 15 octobre n’a aucune pertinence quant au moment de la découverte, ni le délai de dénonciation après la découverte – la Bénéficiaire dit qu’il y a déjà eu dans le passé une dénonciation qui a été réglé, et il y a eu d’autres malfaçons entretemps et qu’elle recommence à zéro sa dénonciation, « je voulais juste savoir comment procéder si je faisais comme la première fois vous m’avez très bien répondu sur ça » ;
[90.2] lors de la conversation du 15 octobre, la Bénéficiaire affirme (autour de 3 :30) « si je comprends bien suite à mon téléphone du 15 décembre je vais quand même l’envoyer à l’adresse courriel de construction LemTech » ;
[90.2.1] il n’y a eu aucune référence à cette conversation du 15 décembre à l’audience ou au dossier ;
[90.2.2] dans la série de courriels de septembre 2021 produits pendant l’audience sous A-18, on trouve celui d’un représentant de l’Administrateur qui écrit à la Bénéficiaire :
Bonjour Mme Lemieux,
Concernant votre demande d’avoir accès à certains appels téléphoniques, vous trouverez ci-dessous ce que nous avons trouvé aux dates mentionnées.
· 21 novembre 2019 à 12 h 39 : Aucun appel trouvé. Le service à la clientèle de GCR est fermé entre 12 h et 13 h. Néanmoins, une recherche pour les journées en entier des 20, 21 et 22 novembre n’ont pas permis de trouver un appel associé à ce numéro.
· 21 novembre 2019 à 12 h 44 : Aucun appel trouvé. Le service à la clientèle de GCR est fermé entre 12 h et 13 h. Néanmoins, une recherche pour les journées en entier des 20, 21 et 22 novembre n’ont pas permis de trouver un appel associé à ce numéro.
· 6 février 2020 à 15 h 02 : Un appel a été trouvé. Il se trouve en pièce jointe.
· 15 octobre 2020 à 9 h 05 : Un appel a été trouvé. Il se trouve en pièce jointe.
· 16 octobre 2020 à 13 h 58 : Aucun appel avec le service à la clientèle n’a été trouvé.
Si vous avez des questions supplémentaires, n’hésitez pas à communiquer avec nous.
[91] Pour tous ces motifs, vu la preuve quant à la présence d’une malfaçon non apparente découverte pendant la première année de la réception des travaux, vu l’article 10 du Règlement, vu la preuve quant aux représentations faites par la préposée de l’Administrateur le 6 février 2020, vu l’article 19.1 du Règlement, la demande d’arbitrage des Bénéficiaires est accueillie quant au point 3.
[92] Dans sa décision du 3 février 2021 (pièce A-10), l’Administrateur rejette la réclamation des Bénéficiaires quant au plancher flottant en ces termes :
Les bénéficiaires dénoncent le soulèvement du revêtement de plancher flottant au corridor entre la salle de bain et la cuisine, sur une longueur de 8 pieds, situation constatée au cours du mois de novembre 2019.
Lors de notre visite, nous avons constaté que le plancher du corridor entre la salle de bain et la cuisine est soulevé, lequel émet un craquement lorsque la surface de plancher est sollicitée sous le pas.
L’administrateur constate que la situation observée et dénoncée en deuxième année de la garantie ne rencontre pas les critères du vice caché et au surplus, l’administrateur considère le délai de dénonciation déraisonnable, onze mois s’étant écoulé entre la découverte de la situation et la dénonciation.
[93] Sur le formulaire de dénonciation signé par les deux Bénéficiaires le 19 octobre 2020 (pièce A-4), les Bénéficiaires ont inscrit, comme date de la première observation, le 1er novembre 2019.
[94] Quant à la date de la découverte, la Bénéficiaire affirme à l’audience que contrairement à ce qui est mentionné dans la décision de l’Administrateur du 3 février 2021, ce n’est pas en novembre 2019 qu’elle a dénoncé le plancher flottant mais en août 2019 en présence de l’entrepreneur Daniel Tremblay, encore que, pendant les plaidoiries elle dira que c’était en attendant Daniel Tremblay.
[95] Elle affirme qu’Éric Schwen a alors mentionné que c’était le comportement normal des matériaux qui expliquait ce qui se passait avec le plancher de bois flottant.
[96] L’Administrateur s’est objecté à ce que la Bénéficiaire rapporte les propos de son chargé de projet en plaidant que c’était du ouï-dire, le Tribunal réfère aux paragraphes [61] et suivants ci-haut sur cette objection.
[97] La preuve montre qu’en octobre 2019, un entrepreneur a effectué des travaux correctifs chez les Bénéficiaires et que le 5 novembre 2019, le chargé de projet Éric Schwen a envoyé un courriel pour prendre rendez-vous disant que les travaux étaient complétés, et qu’il a rencontré les Bénéficiaires le 22 novembre 2019.
[98] Voici ce que la Bénéficiaire affirme le 6 février 2020 lors d’un appel à la GCR (pièce A-15) :
[98.1] « On a depuis le mois de décembre mais même quand Monsieur Sché euh, Monsieur euh, moi je dis toujours Schwen que je devrais dire, Monsieur Éric Schwen quand il est passé en novembre on l’a, ça avait commencé à craquer à l’intérieur de notre rez-de-chaussée quand on marche sur le plancher de bois flottant il y a comme une bosse c’est comme soulevé ça a commencé à craquer puis quand on marche ça fait du bruit plus ça va plus ça s’étend vers la cuisine, c’est tout ça, alors Monsieur Éric Schwen nous avait recommandé à ce moment-là de faire un vidéo, pis de vous le faire parvenir parce que je ne voudrais pas faire tout de suite une nouvelle réclamation parce que la maison elle est neuve, s’il y a d’autres malfaçons qui vont se créer j’aimerais mieux la faire comme à la fin de l’année. Dites-moi comment procéder, est-ce que ça ça l’aurait du sens ».
[99] Réponse de la préposée de la GCR : « mais de toutes façons il va falloir que vous fassiez une dénonciation à ce moment-là ».
[100] Le reste de la réponse de la préposée réfère à comment envoyer la dénonciation.
[101] En témoignage principal, la Bénéficiaire affirme que le 28 août, en présence de l’entrepreneur Daniel Tremblay, elle a montré le tout à Éric Schwen et ce dernier a dit qu’il s’agissait de comportement normal des matériaux pour le plancher de bois flottant.
[102] En plaidoirie, la Bénéficiaire affirme qu’en présence de Monsieur Éric et en attendant l’arrivée de Monsieur Daniel Tremblay le 28 août, elle a montré et dénoncé verbalement le problème du plancher flottant qui se soulevait à la sortie de la salle de bains, démontré le craquement du plancher au même endroit.
[103] Elle ajoute que le 16 septembre 2019, 2 semaines plus tard, elle a appelé directement Éric Schwen sur son cellulaire à 9 :05 pour trois minutes, elle a laissé un message vocal à l’effet que le plancher flottant du rez-de-chaussée et la porte de la chambre des maîtres s’aggravaient, elle montre à la pièce B-2 le relevé montrant l’existence de cet appel, puis le 7 octobre 2019 il y a eu les travaux correctifs et elle n’a pas eu de retour d’appel de la part d’Éric Schwen et l’a revu seulement le 22 novembre.
[104] Elle dit que le 22 novembre 2019, Éric Schwen lui a recommandé en présence de son conjoint de faire un vidéo du plancher flottant et de la porte de chambre et de l’expédier à la GCR disant à ce moment-là qu’il ne s’agissait plus de comportement normal des matériaux.
[105] Contrairement au point 3 où un courriel du 3 septembre 2019 émanant d’un représentant de la GCR (Éric Schwen) confirme une date de découverte et une dénonciation verbale pendant la première année de la réception, la preuve est différente pour le point 7.
[106] Le Tribunal d’arbitrage ne peut pas faire fi de la preuve.
[107] Dans son traité sur la preuve, Léo Ducharme[14] écrit :
les faits connus doivent être tels qu’ils rendent au moins probable l’existence du fait qu’on veut en induire. Si les faits connus sont aussi compatibles avec l’existence que la non‑existence de ce fait, ils ne peuvent servir de fondement à une présomption et l’on dira alors qu’ils ne sont pas suffisamment graves, précis et concordants. Il faut bien remarquer qu’une simple probabilité est suffisante et qu’il n’est pas nécessaire que la présomption soit tellement forte qu’elle exclue toute autre possibilité
[108] Deux déclarations émanant des Bénéficiaires et antérieures à la décision de l’Administrateur du 3 février 2021 sont à l’effet que la découverte a eu lieu dans la deuxième année de la couverture, dans la période de la couverture du vice caché.
[109] Le Tribunal d’arbitrage doit donc choisir entre deux déclarations faites librement par la Bénéficiaire avant la décision de l’Administrateur soulignant quelle est la couverture du Plan de garantie en fonction de la date de la découverte, soit le vice caché, et une déclaration contradictoire non corroborée faite à l’audience après cette décision.
[110] Première déclaration : la dénonciation (pièce A-4), signée par les deux Bénéficiaires le 19 octobre 2020, indique comme date de la découverte, le 1er novembre 2019.
[111] Deuxième déclaration, encore plus probante : le 6 février 2020, la Bénéficiaire affirme que sa problématique est depuis décembre, et aussi le 22 novembre quand Éric Schwen est venu :
[112] Voici ce que la Bénéficiaire affirme le 6 février 2020 :
[112.1] « On a depuis le mois de décembre mais même quand Monsieur Sché euh, Monsieur euh, moi je dis toujours Schwen que je devrais dire, Monsieur Éric Schwen quand il est passé en novembre on l’a, ça avait commencé à craquer à l’intérieur de notre rez-de-chaussée quand on marche sur le plancher de bois flottant il y a comme une bosse c’est comme soulevé ça a commencé à craquer puis quand on marche ça fait du bruit plus ça va plus ça s’étend vers la cuisine [...] ».
[113] Vu les mots « depuis » et « commencé » à la déclaration du 6 février, le Tribunal considère cette déclaration plus probante que l’affirmation lors des plaidoiries : « le 28 août en présence de Monsieur Éric et en attendant l’arrivée de Monsieur Daniel Tremblay j’ai montré et dénoncé verbalement le problème du plancher flottant qui se soulevait à la sortie de la salle de bains, démontrer le craquement du plancher au même endroit ».
[114] Vu la preuve, le Tribunal conclut que la découverte étant après la première année après la réception, seul le vice caché est couvert sur ce point.
[115] Pour les raisons exposées ci-haut (paragraphes [84] et suivants], dont les représentations du 6 février 2020 et l’article 19.1 du Règlement, le Tribunal d’arbitrage ne peut pas reprocher aux Bénéficiaires leur délai de dénonciation.
[116] Reste à déterminer si le plancher flottant est atteint d’un vice caché couvert par le Plan de garantie.
[117] Les Bénéficiaires ont produit comme témoin expert Madame Marie-Pier Marineau, reconnu comme témoin expert par le Tribunal, son CV (pièce B-13) montre qu’elle a une formation comme technologue en génie civil (non membre de l’Ordre des technologues), elle est chargée de projet en construction pour Construction BonAir, spécialisée dans la construction résidentielle et commerciale, ils font de l’après sinistre, des inspections de bâtiments et des recherches de cause.
[118] Son rapport du 14 juillet 2021 a été produit en B-1 (extrait) :
Lorsque je suis allée sur les lieux, j’ai observé que le plancher en face de la salle de bains était bombé. À l’aide d’un niveau, on a pu le constater qu’il y avait une bonne différence (Voir photos) Le plancher de bois flottant craque à plusieurs endroits dans le passage vers la cuisine.
[119] Le Tribunal ajoute :
[119.1] que son rapport parle aussi du point 6 (porte de la chambre des maîtres, voir section suivante) mais pas du point 5 (cage d’escalier) ;
[119.2] que le rapport conclut par une recommandation :
Recommandation sur la suite des travaux à faire : Faire des ouvertures dans le mur au sous-sol au niveau de la poutre principale et de faire vérifier les semelles des poteaux porteurs. Il faut trouver la cause pour déterminer l’ampleur des dommages.
[119.3] que ni le rapport ni le témoignage de l’expert à l’audience ne supporte cette recommandation quant aux points soumis à l’arbitrage.
[120] Commentant la photo 1 de son rapport : elle a constaté que le plancher en face de la salle de bains était bombé vers le haut et qu’il craquait énormément sur une bonne distance de la salle de bains jusqu’à la cuisine.
[121] Elle a produit une série de photos avec un niveau.
[122] À la question, s’il est normal pour le plancher flottant qu’il soit bombé comme ici, elle répond habituellement vu que c’est un plancher de bois qui vit et qui bouge, il prend de l’expansion avec la chaleur et le froid mais habituellement ça revient toujours à sa place.
[123] Quand on voit qu’il bombe habituellement à la longue il devrait toujours revenir à sa place.
[124] Ici on constate qu’il ne revient pas à sa place, elle ne peut pas s’avancer sur l’installation car elle n’a pas pu enlever les moulures de bas de mur mais c’est sûr et certain qu’on peut regarder l’installation, il faut tout le temps qu’il y ait un jour tout le tour des murs pour un plancher de bois, c’est sûr et certain que s’il n’y a pas assez d’espace on peut remarquer qu’il y a un plancher qui bombe à certains endroits.
[125] Le Bénéficiaire lui demande s’il doit y avoir un problème si ça reste bombé, le témoin expert ajoute que c’est sûr qu’il faudrait faire des ouvertures plus approfondies dans ce cas-là pour trouver une cause à ce phénomène pour le plancher flottant bombé.
[126] Elle dit qu’on peut supposer qu’il y a eu un autre facteur que le chaud et le froid mais elle ne peut pas se prononcer là-dessus.
[127] En contre-interrogatoire, elle ajoute que :
[127.1] elle n’a pas vérifié sous les moulures des murs pour voir s’il y avait un espace ou si les lattes étaient accotées directement au mur ;
[127.2] à la question :
[127.2.1] si la latte est directement en dessous de la plinthe ça empêche le bois de prendre de l’expansion et de reprendre sa place ? Elle répond, ça c’est sûr et certain, s’il n’y a pas d’espace le bois ne peut pas bouger ;
[127.2.2] si le bois ne peut pas bouger et qu’il n’y a d’espace ça pourrait être l’explication du bombement du plancher ? Elle répond ça peut en être une ;
[127.2.3] vis-à-vis la cage d’escalier (photo A-9/Point 7/-17/21) il ne peut pas y avoir d’espace parce que le bois est collé directement sur le nez de la marche ? Elle répond oui ;
[127.3] elle est d’accord que le seul espace où ça pourrait bouger ce serait à la hauteur du garde-robe ;
[127.4] elle a remarqué qu’il n’y a aucune moulure de transition entre la chambre et le passage, habituellement c’est conseillé de mettre une moulure pour que le plancher puisse bouger à sa convenance, donc ça aussi ça peut être une explication.
[128] Quant à savoir comment c’est bombé, elle répond avoir mis un niveau, 1/8 à ¼ à certains endroits et a témoigné sur les photos de son rapport.
[129] Elle y est allée une seule fois, en avril, on lui a demandé de vérifier le rez-de-chaussée, surtout le passage cuisine et chambre des maîtres, puis on a descendu au sous-sol pour vérifier les solives de plancher, elle a pu observer, vérifier deux trois solives, c’est un plafond suspendu, elle a enlevé trois ou quatre tuiles.
[130] Dans la salle de bains (qui donne sur le passage où le plancher flottant est bombé), elle n’a pas vu de tuiles de fissurées ou du coulis de craqué.
[131] Pour sa part, l’Inspecteur-conciliateur de l’Administrateur affirme ce qui suit :
[131.1] il n’a pas constaté de problème structural, le plancher flottant est coincé, il n’a pas le quart de pouce de dégagement requis pour l’espacement que le plancher puisse se déplacer (d’où « plancher flottant ») ;
[131.2] au périmètre de l’installation du plancher flottant ça prend un dégagement requis, on voit à l’ouverture de la salle de bains que c’est une porte encastrée, si le plancher coince directement sur la structure de la porte il ne peut pas se déplacer, il aura tendance à émettre des craquements et à bomber directement par rapport à l’espacement qui n’est pas présent pour permettre aux planchers de pouvoir se déplacer, de plus il y a l’absence de moulure de transition entre autres qui fait que c’est continu comme plancher.
[132] Après une longue et mûre réflexion, vu l’état du droit, vu la preuve, vu le Règlement, le Tribunal accueille la réclamation des Bénéficiaires.
[133] Bien que chaque cas soit un cas d’espèce, le Tribunal d’arbitrage soussigné a relues lors de son délibéré, les quatre dernières décisions qu’il avait rendues de 2018 à 2021 concernant la présence ou non d’un vice caché dans un plancher :
[133.1] Hammoum et Développement P10 inc et GCR 2021 CanLII 94830 (QC OAGBRN, 15 mars 2021, Roland-Yves Gagné, arbitre) ;
[133.2] Leblanc c. Gestion Immobilière Santi et GCR (CCAC S20-072901-NP, 23 novembre 2020, Roland-Yves Gagné, arbitre) ;
[133.3] Morcos c. Sotramont Bois-Franc et Raymond Chabot Administrateur Provisoire Inc. ès qualités d’administrateur provisoire du plan de garantie autrefois administré par la Garantie Habitation du Québec Inc. (CCAC S19-093002-NP, 13 juillet 2020, Roland-Yves Gagné, arbitre) ;
[133.4] Tremblay c. 7663609 Canada Inc. et Raymond Chabot Administrateur Provisoire es qualités La Garantie Abritat Inc. (Soreconi 1717110001, 5 juin 2018, Roland-Yves Gagné, arbitre).
[134] Considérant l’article 1729 du Code civil (cité ci-après), le Tribunal souligne la détérioration prématurée du plancher, découverte moins de 13 mois après la réception des travaux (présent le 22 novembre 2019) et moins d’un an après l’emménagement du 1er décembre 2018.
[135] Vu la preuve, le Tribunal d’arbitrage conclut comme l’a fait récemment (le 20 mai 2021) la Cour du Québec dans l’affaire Thérien c. MGA Commodities inc.[15] dans une affaire de gondolement de plancher flottant :
a) M. Thérien a-t-il raison de soutenir que le bois franc est affecté d’un vice de qualité ayant causé le gauchissement-tuilage du plancher ?
[6] D’entrée de jeu et pour les fins de son analyse, le Tribunal doit se référer aux articles 1726 et suivants du Code civil du Québec (C.c.Q.), lesquels traitent de la garantie légale de qualité.
[7] Pour qu’un vice soit visé par la garantie légale de qualité, quatre critères cumulatifs[1] ([1] Art. 1726 C.c.Q., ABB inc. c. Domtar inc. 2007 CSC 50, [2007] 3 R.C.S. 461; Leroux c. Gravano, 2016 QCCA 79). S’ajoute à ces critères la condition de fond afférente à la dénonciation du vice au vendeur prévue à l’article 1739 C.c.Q., condition qui n’est pas en cause en l’instance doivent être rencontrés, à savoir :
a) caché;
b) inconnu de l’acheteur;
c) antérieur à la vente; et
d) suffisamment grave.
[8] Plus particulièrement, l’article 1729 C.c.Q. crée une présomption en faveur de l’acheteur lorsqu’un bien vendu par un vendeur professionnel, comme c’est le cas en l’espèce, se détériore prématurément :
1729. En cas de vente par un vendeur professionnel, l'existence d'un vice au moment de la vente est présumée, lorsque le mauvais fonctionnement du bien ou sa détérioration survient prématurément par rapport à des biens identiques ou de même espèce; cette présomption est repoussée si le défaut est dû à une mauvaise utilisation du bien par l'acheteur.
[9] L’existence d’un vice affectant le bien est donc présumée lorsque celui-ci se détériore prématurément. [...]
[136] Dans ABB Inc. c. Domtar Inc.[16], la Cour suprême du Canada définit ainsi le vice caché :
50 Les différentes qualifications du vice peuvent parfois se chevaucher. […] Cependant, quelle que soit la qualification du vice, il doit présenter quatre caractères, tous essentiels à la garantie : il doit être caché, suffisamment grave, existant au moment de la vente et inconnu de l’acheteur. […]
52 La simple présence d’un déficit d’usage ne suffit pas en elle-même pour justifier la qualification de vice caché. Encore faut-il que ce déficit d’usage soit grave, c’est-à-dire qu’il rende le bien impropre à l’usage auquel il est destiné ou en diminue tellement l’utilité que son acheteur ne l’aurait pas acheté à ce prix. Ce deuxième critère, celui de la gravité du vice, découle du texte de l’art. 1522 C.c.B.C. Cela dit, il n’est pas nécessaire que le vice empêche toute utilisation du bien, mais simplement qu’il en réduise l’utilité de façon importante, en regard des attentes légitimes d’un acheteur prudent et diligent. […]
47 Le législateur n’a pas expressément défini ce qui constitue un « défaut » ou un « vice ». Le texte de l’art. 1522 C.c.B.C. comporte toutefois certaines précisions utiles. Ainsi, le premier critère qui permet de déterminer si l’on est en présence d’un défaut caché est le déficit d’usage qu’il engendre. La garantie contre les vices cachés vise ainsi à assurer à l’acheteur l’utilité pratique et économique du bien acquis.
[137] L’honorable Jeffrey Edwards, alors qu’il était arbitre en vertu du Règlement, (aujourd’hui juge à la Cour supérieure) s’était exprimé de la même façon en 2008 dans la décision arbitrale Diane Bellehumeur c. Groupe J.F. Malo Inc. et La Garantie des maisons neuves de l’APCHQ Inc[17] :
[12] Selon le représentant de l’Administrateur, les céramiques ont été, à certains endroits, installées avec trop de colle, ce qui entraîne la fissuration progressive de certains joints de mortier qui sont évidés et qui se défont. Cela s’est fait progressivement et a été constaté seulement après 2 ans suivant la réception du bâtiment. L’Administrateur allègue que ce vice ou malfaçon n’a pas la gravité requise pour constituer un vice caché parce que le problème, aussi réel qu’il soit, n’est pas généralisé (à date du moins) à l’ensemble du plancher de la cuisine.
[13] Selon la jurisprudence pertinente, il faut tenir compte des attentes raisonnables objectives de l’acheteur pour évaluer la gravité du vice. Or, ici, la Bénéficiaire est un acheteur d’une propriété neuve et, selon le Tribunal d’arbitrage, il est anormal et inacceptable qu’il y ait une détérioration de ce type après seulement deux (2) ans suivant la réception du plancher.
[138] Le Tribunal d’arbitrage rend sa décision en fonction de la preuve et du droit applicable.
[139] Dans notre dossier, le manque d’espace permettant au plancher flottant de bouger entraînera une progression dans le temps des dommages réduisant la durée utile de l’usage du plancher, le vice ayant la gravité nécessaire à la déclaration de la présence d’un vice caché.
[140] Vu la preuve, vu l’état du droit actuel, vu le Règlement, le Tribunal d’arbitrage conclut que le plancher flottant est atteint d’un vice caché, couvert par le plan de garantie géré par l’Administrateur.
[141] La réclamation des Bénéficiaires sur ce point est accueillie, sous réserves de ce qui suit : l’allégation des Bénéficiaires quant à la présence d’un affaissement du bâtiment est rejetée pour les motifs exprimés ci-après aux paragraphes [180] et suivants.
[142] Dans sa décision de février 2021, l’Administrateur rejette la dénonciation en ces termes :
Les bénéficiaires dénoncent observer à la lumière du jour, dans la chambre principale, ce qui leur semble être des fissures dans le revêtement de placoplâtre, de même qu’ils mentionnent qu’il est impossible de fermer porte de la chambre puisque le cadrage de ladite porte s’est déplacé, situation qu’ils ont constatée au cours du mois d’avis 2020, soit en deuxième année de garantie.
Lors de notre visite, nous avons constaté la situation dénoncée à la porte et la fissuration au placoplâtre dans la chambre principale du rez-de-chaussée
Nous sommes toutefois d’avis que la situation dénoncée ne revêt pas les critères d’un vice caché.
[143] La Bénéficiaire affirme à l’audience que contrairement à ce qui apparaît à la décision de l’Administrateur du 3 février 2021 (pièce A-10), ce n’est pas en août 2020 qu’elle constaté la situation, mais elle l’a dénoncé verbalement au chargé de projet de la GCR en août 2019.
[144] En plaidoirie, la Bénéficiaire affirme qu’en présence de Monsieur Éric et en attendant l’arrivée de Monsieur Daniel Tremblay le 28 août 2019, elle a montré la porte de la chambre à coucher qui ne fermait plus parce que le barillet ne s’enclenchait pas et Éric Schwen a mentionné que c’était le comportement normal des matériaux pour la porte de la chambre qui ne fermait plus.
[145] C’est le 22 novembre 2019 qu’Éric Schwen lui aurait recommandé en présence de son conjoint de faire une vidéo incluant la porte de chambre et de l’expédier à la GCR disant à ce moment-là qu’il ne s’agissait plus de comportement normal des matériaux.
[146] L’Administrateur s’est objecté à ce que la Bénéficiaire rapporte les propos de son chargé de projet en plaidant que c’était du ouï-dire, le Tribunal réfère le lecteur aux paragraphes [61] et suivants, ci-haut.
[147] Les Bénéficiaires ont signé une dénonciation écrite le 19 octobre 2020 (pièce A-4), à l’effet que la « date de la première observation » est le 1er avril 2020 :
5. Point Deux fissures verticales au-dessus de la porte à l’intérieur de la chambre des maîtres jusqu’au plafond
Description – A la lumière du jour et à l’intérieur de la chambre des maîtres, apparence de fissures dans le plâtre jusqu’au plafond et le cadre de porte s’est déplacé – le coin droit tire vers le bas. Impossible de fermer la porte de la chambre des maîtres
[148] Contrairement aux points 3 et 7 ci-haut, il n’y a rien au dossier concernant ce point avant la dénonciation écrite du 19 octobre 2020, dans laquelle, les Bénéficiaires ont eux-mêmes, inscrits le 1er avril 2020 comme date de première observation.
[149] La Bénéficiaire, au moment des plaidoiries, a affirmé avoir mentionné la porte lors de la conversation téléphonique du 6 février 2020, dont l’enregistrement est produit au dossier (plaidoiries : À l’appel du 6 février je demandais qu’on m’avait dit que Monsieur Schwen m’avait demandé un vidéo du plancher et de la porte de chambre et d’expédier ça à GCR).
[150] Le Tribunal a réécouté cette conversation du 6 février : cette conversation ne réfère à aucun moment à la porte.
[151] Les Bénéficiaires ont aussi voulu prouver, par présomption, que c’est sûr que si on leur avait dit de produire une dénonciation écrite en août 2019 ils l’auraient fait immédiatement comme ils l’avaient fait en juillet 2019 (fissure dans le garage) lors d’une visite de l’Inspecteur Martin Bérubé ;
[151.1] or pour réussir une preuve par présomption, les éléments de preuve doivent aller dans le même sens (être concordants, voir Ducharme, paragraphe [107] ci-haut), et si le 22 novembre 2019 Éric Schwen leur aurait dit d’envoyer une vidéo ce n’est que le 6 février 2020 que la Bénéficiaire a téléphoné pour annoncer produire une dénonciation à la fin de l’année et ce n’est que le 19 octobre 2020 qu’elle envoie sa dénonciation écrite en écrivant le 1er avril 2020 comme date de découverte, ce qui n’est pas un exemple de dénonciation immédiate.
[152] Les Bénéficiaires n’ont pas produit de preuve plus probante, qui permette de mettre de côté leur propre déclaration à leur dénonciation écrite du 19 octobre 2020 quant à la problématique qui fait l’objet du présent arbitrage.
[153] Vu la date de la découverte inscrite dans le formulaire de la dénonciation écrite par les Bénéficiaires eux-mêmes, le Tribunal conclut de la preuve que la malfaçon n’est plus couverte et qu’il doit considérer si la problématique est un vice caché, non pas au sens de « Monsieur Madame tout le monde », mais au sens du Règlement et du Code civil.
[154] La Cour supérieure dans l’affaire Garantie Habitation du Québec inc. c. Masson[18] affirme que (nos caractères gras) :
[37] En effet, le Règlement prévoit que Qualité Habitation doit couvrir certaines des obligations contractuelles d’un entrepreneur. Le Règlement stipule cependant que les limites du Plan de garantie demeurent applicables néanmoins :
7. Un plan de garantie doit garantir l’exécution des obligations légales et contractuelles d’un entrepreneur dans la mesure et de la manière prévues par la présente section.
74. Aux fins du présent règlement et, en l’absence ou à défaut de l’entrepreneur d’intervenir, l’administrateur doit assumer tous et chacun des engagements de l’entrepreneur dans le cadre du plan approuvé.
[Soulignements du Tribunal] [...]
[41] Rappelons que le Plan de garantie prévu au Règlement est d’ordre public. Il fixe les modalités et limites du Plan de garantie, de même que les dispositions essentielles du contrat de garantie auquel souscrivent les bénéficiaires. Ce Plan de garantie est donc réglementé et les obligations qui en découlent ne sont ni illimitées, ni inconditionnelles.
[42] Qualité Habitation n’intervient donc à titre de caution que pour les obligations couvertes par le Plan de garantie et dans la mesure où les parties respectent les règles relatives à sa mise en œuvre. Les limites des obligations de la caution ne peuvent varier au gré des ententes entre les entrepreneurs et les bénéficiaires, sans égard aux termes du Règlement.
[155] La Cour d’appel affirme dans Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l'APCHQ c. Desindes[19] ;
[13] Toutefois, cette obligation de caution n’est ni illimitée ni inconditionnelle.
[156] Dans Mingole c. Construction Investipro Inc. et La Garantie de Construction Résidentielle (GCR)[20], Me Karine Poulain, arbitre, écrit :
[322] En aucun cas le Règlement ne prévoit que l’Administrateur cautionne l’ensemble des obligations contractuelles et extracontractuelles de l’Entrepreneur. Le plan de garantie se veut un Règlement de la nature de la protection du consommateur en matière de construction neuve et vise à protéger les acheteurs contre les constructions inadéquates. Bref, il garantit que les constructions au Québec sont construites selon des standards spécifiques et exempts de déficiences, en fonction des différents délais stipulés par le législateur.
[323] Comme l’ont affirmé d’autres avant moi, le plan de garantie ne règle pas le sort de tous les droits et recours dont bénéficient les bénéficiaires. Bien que le Tribunal comprenne la situation et la déplore, il demeure tenu de statuer en vertu des dispositions législatives applicables et le recours à l’équité ne saurait ajouter ou modifier le Règlement. [...]
[157] Il reste à décider devant la preuve si la problématique a, en droit, la gravité d’un vice caché.
[158] L’expert produit par les Bénéficiaires, Marie-Pier Marineau, a montré sur ses photos, qu’il y a un jour dans le cadre de la porte quand on la ferme, on peut observer surtout dans le bas, on voit la lumière de la chambre, on voit que la porte ne « fitte » plus sur le rabat du cadre.
[159] Il n’y a rien du côté du passage ; du côté de la chambre des maîtres, il y a deux fissures en haut de la porte de la chambre des maîtres, un niveau sur le cadre de la porte montre que le cadre qui n’est pas de niveau et la porte avec un jour entre la porte et le cadre, et deux fissures verticales.
[160] Le Bénéficiaire confirme qu’il s’agit de jonctions entre les feuilles, à gauche il y a une compression alors que sur celle de droite on voit une séparation ;
[160.1] le Bénéficiaire demande à l’expert qu’est-ce qui peut produire ça, son expert répond qu’elle n’a pas de commentaire, qu’elle ne peut pas s’avancer tant qu’on n’a pas fait d’ouverture, je ne peux pas m’avancer sur une cause ou quelque chose, si comme vous le dîtes il y avait, ils ont mis deux placoplâtres les petites sections c’est sûr que ça peut faire ça.
[161] Pour sa part, l’Inspecteur-conciliateur de l’Administrateur témoigne à l’effet que les deux fissures verticales au-dessus de la porte de la chambre des maîtres s’expliquent par le mouvement au niveau du cadrage de la porte, on voit clairement que c’est une feuille installée au-dessus de la porte reliée à un mouvement au niveau du cadrage à un point tel que la porte était désaxée par rapport au cadrage ce qui explique le jour que l’on voit au-dessus et dans le bas de la porte.
[162] Il affirme qu’on a un ajustement au niveau de la porte à faire, ça ne revêt pas l’importance de vice caché.
[163] Il n’y a pas de fissures dans le gypse à la jonction des deux murs, on voit que c’est le cadrage qui a travaillé par rapport à la porte, même les plinthes de contournement du cadrage ne sont pas ouvertes.
[164] La déformation se fait au pourtour du cadrage la porte, c’est la porte qui a pu entraîner la fissuration il n’y a pas de fissuration au plafond ni sur les murs adjacents donc il n’y a pas de problèmes structuraux.
[165] Vu le Règlement, vu la preuve, le Tribunal d’arbitrage ne peut que conclure au rejet de la demande d’arbitrage sur ce point.
[166] Vu la preuve, la problématique n’a pas la « gravité » nécessaire à ce qu’en droit, elle puisse être considérée comme vice caché, seul couvert par l’Administrateur.
[167] L’honorable Jeffrey Edwards de la Cour supérieure, ancien arbitre en vertu du Règlement du plan de garantie, a écrit un livre sur la vente[21], qui contient une section sur la gravité du vice :
A. Le vice doit posséder une certaine gravité
[...] 360 – Le critère déterminant est énoncé dans l’article 1726 C.c.Q. Seul le vice entraînant un déficit d’usage au point «que l’acheteur ne l’aurait pas acheté, ou n’aurait pas donné si haut prix» est réprimé [...]
[168] Le Tribunal d’arbitrage rend sa décision en fonction de la preuve et du droit applicable.
[169] Les Bénéficiaires n’ont pas rempli leur fardeau de preuve, à amener à conclure que la problématique avait la gravité nécessaire pour être qualifiée de vice caché, conclure autrement serait changer le contenu du plan de garantie décrit au Règlement.
[170] Le Tribunal rejette également pour ce point, la prétention des Bénéficiaires que leur bâtiment a subi un affaissement localisé, pour les motifs exprimés aux paragraphes [180] et suivants.
[171] Vu la preuve, le Tribunal conclut que la problématique ne remplit pas les critères de gravité pour être qualifié de vice caché et se doit de rejeter la réclamation des Bénéficiaires sur ce point.
[172] Dans la décision du 3 février 2021, l’Administrateur a rejeté cette réclamation en ces termes :
Les bénéficiaires dénoncent la présence de fissures horizontales de trois pieds du côté droit de la descente de l'escalier menant au sous-sol, à la hauteur de la main courante, de même qu’une fissure verticale à gauche de la descente de l'escalier, à la hauteur du plafond.
La bénéficiaire, au jour de la visite, nous a expliqués avoir observé la présence des fissures dans l’escalier au cours du mois d’avril 2020, situation dénoncée en deuxième année de garantie.
[173] Dans leur dénonciation (pièce A-4), les Bénéficiaires déclarent avoir observé ce point la première fois le 1er avril 2020, donc dans la période de couverture pour vice caché.
[174] Le Bénéficiaire dit qu’il y a une fissure horizontale de trois pieds du côté droit de la descente d’escalier menant au sous-sol et une fissure verticale à gauche de la descente d’escalier à la hauteur du plafond.
[175] La photo A-9 point 5 (51 de 126 du PDF), au coin en haut à gauche, on voit comme une compression, il y a un petit ballonnement.
[176] Son expert n’a pas pris de photo, mais affirme que les photos incluses dans le rapport de l’Inspecteur conciliateur (A-9) sont ce qu’elle a vues.
[177] Les Bénéficiaires plaident que quand il y a des fissures ça veut dire qu’il y a des problèmes.
[178] L’Inspecteur conciliateur affirme à l’audience :
[178.1] les fissurations au périmètre du placoplâtre de la descente d’escalier entre le plancher du rez-de-chaussée et le plafond du sous-sol, c’est simplement la conséquence d’un comportement normal des matériaux, il n’y a pas de problème structural ;
[178.2] ça n’avait pas la gravité de vice caché, on avait du retrait, du ballounement, ça peut être un décollement au niveau du plâtrage, mais il n’y a pas de fissuration anormale du genre de mouvements de bâtiments.
[179] Vu la date de la découverte, vu la preuve, et en réitérant ce qu’il a écrit aux paragraphes [180] et suivants, rejetant la prétention d’un affaissement allégué, la demande d’arbitrage des Bénéficiaires est rejetée, la problématique dénoncée ne pouvant pas être qualifiée de vice caché.
[180] Malgré l’absence de mention dans le rapport de leur expert, les Bénéficiaires sont convaincus que leur bâtiment s’est affaissé localement pour les motifs suivants :
[180.1] les points 5 (escalier), 6 (la porte de la chambre des maîtres) et 7 (plancher du rez-de-chaussée) sont tous dans le même axe, ou même ligne ;
[180.2] alors qu’il n’y a pas de problème ailleurs dans le bâtiment.
[181] Le Tribunal soussigné se doit donc de traiter de la prétention des Bénéficiaires à l’effet que la cause de ces trois points (ou de l’un des trois) est un affaissement (ou affaissement localisé) de leur bâtiment résidentiel.
[182] Le Plan de garantie couvre les malfaçons et les vices selon l’article 10 du Règlement, il ne couvre nullement les « convictions » ou les hypothèses qui ne reposent pas sur la preuve et la preuve, ici, démontre que cette conviction que ces trois points (ou l’un des trois) soient reliés à un affaissement localisé du bâtiment n’est pas fondée.
[183] Les Bénéficiaires ont produit un expert, qui a une formation de technologue en génie civil et une expérience comme gestionnaire de projet en construction et nulle part dans son rapport il n’est montré un affaissement du bâtiment, ni d’ailleurs dans son témoignage d’expert.
[184] À la question de la Bénéficiaire, « pourquoi sur une longueur de 14 pieds de la chambre à coucher jusqu’à l’escalier du sous-sol, pourquoi y a-t-il un déphasage, un affaissement, d’essayer d’expliquer pourquoi il y a eu un affaissement? »,
[184.1] son expert ne parle pas d’affaissement dans sa réponse malgré que la question fût très suggestive (i.e. la réponse est dans la question), à la place, l’expert explique son rapport qui n’en fait pas référence.
[185] La Bénéficiaire a reposé sa question et a reparlé d’affaissement – « qu’est-ce qui peut expliquer que tout se passe là y a-t-il un affaissement » ?
[185.1] pour le plancher flottant (point 7), son expert répond: « je ne peux pas m’avancer sur un affaissement ou quelque chose comme ça, on n’a pas fait des ouvertures nécessaires pour ça, ce que je peux vraiment dire c’est peut-être l’extension des matériaux, s’il y a assez d’espace pour prendre de l’expansion, il n’y a pas assez d’espace pour s’expansioner ça se peut bien que ce soit, c’est ça qui cause le craquement et tout, mais je ne peux pas m’avancer sur un affaissement ou quelque chose comme ça, il faudra faire plus d’ouvertures au sous-sol » ;
[185.1.1] la Bénéficiaire a alors posé une question qui n’est pas traitée dans le rapport : « vous êtes allés au sous-sol qu’avez-vous constaté sur les solives » ? L’expert a répondu avoir regardé les solives en rapport avec les points discutés, avoir enlevé trois ou quatre tuiles en dessous où le plancher était bombé puis avoir mis son niveau sur une des solives et elle pouvait voir au sujet de cette solive, qu’elle « n’était pas tout à fait au niveau » ;
185.1.1.1. le Tribunal souligne ici que :
185.1.1.1.1. la première réponse de l’expert à l’audience ne concerne aucune mesure précise, mais seulement que ce n’est pas « tout à fait au niveau » ; et
185.1.1.1.2. que l’expert n’avait pas considéré ce point digne de mention dans son rapport, qui n’en parle pas ;
185.1.1.2. l’expert a précisé par la suite qu’il s’agit de 1/8 à ¼ sur 14 pieds, pris avec un niveau de 4 pieds ;
[185.2] pour la porte de la chambre des maîtres (point 6), l’expert affirme qu’habituellement c’est un mouvement de la maison qui fait que ça fissure, surtout qu’une construction neuve ça bouge, et ajoute : « je ne peux pas hors de tout doute vous dire que c’est le mouvement de la maison mais habituellement c’est vraiment le mouvement qui fait fissurer le placoplâtre » ; en contre-interrogatoire :
[185.2.1] à la question « ça ne peut pas être le séchage des matériaux » ? Elle répond ne pas s’avancer là-dessus parce qu’elle n’a pas de réponse à ce sujet ;
[185.2.2] à la question ;
185.2.2.1. dans les portes que vous avez observées, avez-vous vu des fissures en diagonale ? Elle répond non ;
185.2.2.2. dans la salle de bain (qui donne sur le passage où le plancher flottant est bombé) avez-vous vu des tuiles de fissurées ou du coulis de craqué? Elle répond non.
[186] Pour l’Inspecteur-conciliateur :
[186.1] il n’y a pas de signes qu’il y a un problème d’affaissement ;
[186.1.1] à la question, est-ce que vous avez vu des signes, des problématiques qui démontreraient qu’il pourrait y avoir un mouvement structural du bâtiment ? Il répond « de façon catégorique je dis non » ;
[186.2] il n’y a aucune fissuration au niveau de la céramique de la salle de bains qui est dans la même ligne ;
[186.3] si on regarde le cadrage au niveau de la salle de bains et la porte escamotable, il n’y a pas de déformation entre la plinthe et le cadrage, la poutre est directement sous la salle de bains donc elle est dans la même ligne à laquelle font référence les Bénéficiaires, elle est appuyée directement sur un poteau de cave en dessous ;
[186.4] au niveau de la porte (point 6) c’est le cadrage, au niveau du puits de l’escalier (point 5) c’est le comportement normal des matériaux, c’est en lien avec la structure au pourtour du plancher du rez-de-chaussée mais ce sont deux choses distinctes il n’y a pas de lien parce que le support du plancher se fait directement par la poutre qui est en dessous de la salle de bains ce n’est pas la même chose ;
[186.5] on parlait d’une poutrelle de plancher qui avait une variation d’un ¼ de pouces, 3/8 - ¼ de pouces, ce n’est pas une situation anormale parce que si on prend au niveau du nivellement du plancher il n’y a rien d’anormal ;
[186.6] il n’a pas vu de contraintes au niveau structural qui démontre qu’il y a une problématique au niveau structural autant au niveau du plancher qu’au niveau du plafond qui pourrait être une conséquence du soulèvement des fermes de toit ou un autre problème structural par rapport à un autre point plus élevé ;
[186.7] au niveau du pourtour du placoplâtre de l’ensemble des pièces dans le secteur, s’il y a un mouvement du bâtiment les fissures sont en diagonale et beaucoup plus importante au niveau visuel et non pas les deux seules fissures verticales aux jonctions de placoplâtre au-dessus de la porte de la chambre des maîtres ;
[186.8] les coins des murs, les jonctions, les planchers il n’a rien trouvé d’anormal, il n’a rien détecté comme problématique structurale.
[187] En conclusion, ni la preuve d’expert des Bénéficiaires ni les éléments de preuve[22] au dossier ne peut soutenir la « conviction » des Bénéficiaires qu’il y a eu un affaissement, le Tribunal d’arbitrage conclut de la preuve qu’il n’y a aucun signe de mouvement structural ou d’affaissement localisé (ou généralisé) de ce bâtiment.
[188] Vu la preuve, le Tribunal d’arbitrage rejette l’allégation des Bénéficiaires à l’effet que leur bâtiment résidentiel a subi un « affaissement » qui ait causé la problématique dénoncée ou les problématiques dénoncées aux points 5, 6 et 7.
[189] Le Règlement stipule :
124. L'arbitre doit statuer, s'il y a lieu, quant au quantum des frais raisonnables d'expertises pertinentes que l'administrateur doit rembourser au demandeur lorsque celui-ci a gain de cause total ou partiel.
[190] Les Bénéficiaires ayant eu gain de cause partiel, soit le plancher flottant sur lequel son expert a témoigné, il y a lieu de statuer sur ce quantum.
[191] La Bénéficiaire produit sa facture, soit 434,88$ plus les taxes applicables, soit 500,00$, pour le témoignage de l’expert à l’audience.
[192] La Bénéficiaire réclame un total de 500.00$, taxes incluses.
[193] Vu le rapport d’expert, vu le témoignage de l’expert, le Tribunal d’arbitrage statue que la totalité des frais réclamés sont des frais raisonnables d’expertises pertinentes au sens de l’article 124 du Règlement, que l’Administrateur doit rembourser.
[194] L’article 123 du Règlement stipule :
Les coûts de l'arbitrage [...]
Lorsque le demandeur est le bénéficiaire, ces coûts sont à la charge de l'administrateur à moins que le bénéficiaire n'obtienne gain de cause sur aucun des aspects de sa réclamation, auquel cas l'arbitre départage ces coûts.
[195] Les Bénéficiaires ayant eu gain de cause sur au moins un des aspects de leur réclamation, les coûts de l’arbitrage dus au CCAC seront assumés par l’Administrateur.
[196] POUR CES MOTIFS, le Tribunal d’arbitrage :
[196.1] ACCEUILLE partiellement la demande d’arbitrage des Bénéficiaires ;
[196.1.1] Quant au point 2 Présence de vermines dans la résidence: ORDONNE à l’Administrateur, comme caution de l’Entrepreneur en vertu du Règlement, de prendre en charge et de faire effectuer les travaux correctifs sur le point 2 en conformité avec les règles de l’art et l’obligation de résultat de l’Entrepreneur qu’il cautionne, dans un délai de quatre-vingt-onze[23] (91 jours) de la présente décision ;
[196.1.2] Quant au point 3 Couvre-plancher du sous-sol: ORDONNE à l’Administrateur, comme caution de l’Entrepreneur en vertu du Règlement, de prendre en charge et de faire effectuer les travaux correctifs sur le point 3 en conformité avec les règles de l’art et l’obligation de résultat de l’Entrepreneur qu’il cautionne, dans un délai de quatre-vingt-onze (91 jours) de la présente décision ;
[196.1.3] Quant au point 7 Plancher flottant au rez-de-chaussée: ORDONNE à l’Administrateur, comme caution de l’Entrepreneur en vertu du Règlement, de prendre en charge et de faire effectuer les travaux correctifs sur le point 7 en conformité avec les règles de l’art et l’obligation de résultat de l’Entrepreneur qu’il cautionne, dans un délai de quatre-vingt-onze (91 jours) de la présente décision ;
[196.1.4] SOUS RESERVES DE LA CONCLUSION SUIVANTE : REJETTE la prétention des Bénéficiaires à l’effet que les problématiques à corriger ont eu pour cause un affaissement du bâtiment ;
[196.2] Quant aux autres points 4, 5 et 6, REJETTE la demande d’arbitrage des Bénéficiaires et MAINTIENT la décision de l’Administrateur sur ces points ;
[196.3] ORDONNE à l’Administrateur de payer aux Bénéficiaires conjointement en un versement total, la somme de 434.88$ plus les taxes (t.p.s. $21,74 et t.v.q. 43,38$), soit 500.00$ avec les taxes, pour leurs frais d’expertises dans les trente jours calculés à partir du lundi 10 janvier 2021 ;
[196.4] LE TOUT, avec les frais de l’arbitrage, à la charge de La Garantie de Construction Résidentielle (GCR) (l’Administrateur) conformément au Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs, avec les intérêts au taux légal majoré de l’indemnité additionnelle prévue à l’article 1619 du Code civil du Québec à compter de la date de la facture émise par CCAC, après un délai de grâce de 30 jours ;
[196.5] RÉSERVE à La Garantie de Construction Résidentielle (GCR) ses droits à être indemnisé par l’Entrepreneur, pour sa condamnation en faveur des Bénéficiaires en vertu des présentes et les coûts exigibles pour l’arbitrage, y compris pour les frais d’expertises payés aux Bénéficiaires (par.19 de l’annexe II du Règlement) en ses lieux et place, et ce, conformément à la Convention d’adhésion prévue à l’article 78 du Règlement.
Montréal, le 10 janvier 2022
__________________________
ROLAND-YVES GAGNÉ
Arbitre / CCAC
Autorités citées :
9264-3212 Québec Inc. c. Moseka 2018 QCCS 5286 (Johanne Brodeur, j.c.s).
Immobilier Versant Ouest Inc. c. SDC de la Bâtisse Savage et Raymond Chabot Administrateur Provisoire Inc. ès qualités d’administrateur provisoire du plan de garantie La Garantie Abritat, CCAC S19-012101-NP, 19 juillet 2019, Michel A. Jeanniot, arbitre.
3093-2313 Québec c. Létourneau et Bouchard et la Garantie des maisons neuves de l’APCHQ CCAC S15-022401-NP, Décision rectifiée du 12 novembre 2015, Roland-Yves Gagné, arbitre
Syndicat des copropriétaires 6613-6635 boul. des Laurentides Laval c. 9141-0001 Québec Inc. et Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ, CCAC S14-070901-NP, 1er juin 2015, Yves Fournier, arbitre.
Gauthier et Gagnon c. Goyette Duchesne Lemieux inc. et La Garantie des Bâtiment Résidentiels Neufs de l’APCHQ inc., SORECONI 050629001, 3 novembre 2006, Jeffrey Edwards, alors arbitre, aujourd’hui j.c.s.
Mélanie Rocheleau, Antoine St-Pierre c. Construction Beaubois Inc. et La Garantie Abritat Inc. GAMM 2014-12-002 et al., 2 avril 2015 Me Jean Doyle, arbitre.
Radulescu et Groupe Axxco Inc. GAMM, 58153-2914, 2010-12-001 et 13185-60-2010-0-20.
ABB Inc. c. Domtar Inc., [2007] 3 R.C.S. 461.
Banque de Nouvelle-Écosse c. Raymond, J.E. 87-299 (C.A.).
Fortin c. Deschênes, J.E. 2001-204 (C.Q.)
Groupe commerce (Le), Compagnie d’assurance c. New Holland Canada Ltée, J.E. 2004-467 (C.Q.).
Dagenais et 9094-3184 Québec Inc., Soreconi 060304001, 14 juin 2006, Alcide Fournier, arbitre.
Desrochers c. 2533-0838 Québec inc. 2016 QCCA 825.
Giguère c. Construction Duréco inc. 2019 QCCA 2179.
Consortium M.R. Canada Ltée c. Office municipal d’habitation de Montréal 2013 QCCA 1211.
Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l'APCHQ inc. c. MYL 2011 QCCA 56.
La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ Inc. c. Maryse Desindes et Yvan Larochelle, et René Blanchet mise en cause 2004 CanLII 47872 (QC CA).
Beaulne c. Valeurs mobilières Desjardins inc. 2013 QCCA 1082.
R. c. O'Brien [1978] 1 R.C.S. 591.
Pierre Trudel, Guy Lefebvre, Serge Parisien, La preuve et la signature dans l'échange de documents informatisés au Québec, Les Publications du Québec, Québec, 1993.
Claude Fabien, Les nouvelles règles de la preuve par ouï-dire en droit civil québécois.
Léo Ducharme, Précis de la preuve, 6e éd. (2005).
Hammoum et Développement P10 inc et GCR 2021 CanLII 94830 (QC OAGBRN), 15 mars 2021, Roland-Yves Gagné, arbitre.
Leblanc c. Gestion Immobilière Santi et GCR, CCAC S20-072901-NP, 23 novembre 2020, Roland-Yves Gagné, arbitre.
Morcos c. Sotramont Bois-Franc et Raymond Chabot Administrateur Provisoire Inc. ès qualités d’administrateur provisoire du plan de garantie autrefois administré par la Garantie Habitation du Québec Inc., CCAC S19-093002-NP, 13 juillet 2020, Roland-Yves Gagné, arbitre.
Tremblay c. 7663609 Canada Inc. et Raymond Chabot Administrateur Provisoire es qualités La Garantie Abritat Inc., Soreconi 1717110001, 5 juin 2018, Roland-Yves Gagné, arbitre.
Thérien c. MGA Commodities inc. 2021 QCCQ 4869 (Francine Lauzé, j.c.q.).
Leroux c. Gravano 2016 QCCA 79.
Diane Bellehumeur c. Groupe J.F. Malo Inc. et La Garantie des maisons neuves de l’APCHQ Inc CCAC S08-010401-NP, 30 septembre 2008, Me Jeffrey Edwards, arbitre.
Garantie Habitation du Québec inc. c. Masson 2016 QCCS 5593 (Marie-Anne Paquette, j.c.s.).
Mingole c. Construction Investipro Inc. et La Garantie de Construction Résidentielle (GCR), GAMM 2018-06-30 / 2018-08-06, 9 août 2019, Me Karine Poulain, arbitre.
Jeffrey Edwards, La garantie de qualité du vendeur en droit québécois, 2e éd. (2008), Wilson & Lafleur.
Boiler Inspection and Insurance Company of Canada c. Moody Industries Inc 2006 QCCA 887.
[1] 9264-3212 Québec Inc. c. Moseka 2018 QCCS 5286 (Hon. Juge Johanne Brodeur). Voir aussi, au même effet : Immobilier Versant Ouest Inc. c. SDC de la Bâtisse Savage et Raymond Chabot Administrateur Provisoire Inc. ès qualités d’administrateur provisoire du plan de garantie La Garantie Abritat, CCAC S19-012101-NP, 19 juillet 2019, Michel A. Jeanniot, arbitre (paragraphes [89] et [90]); 3093-2313 Québec c. Létourneau et Bouchard et la Garantie des maisons neuves de l’APCHQ CCAC S15-022401-NP, Décision rectifiée du 12 novembre 2015, Roland-Yves Gagné, arbitre, paragraphe [335]; Syndicat des copropriétaires 6613-6635 boul. des Laurentides Laval c. 9141-0001 Québec Inc. et Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ, (CCAC S14-070901-NP, 1er juin 2015, Yves Fournier, arbitre), paragraphes [68] à [76]. Gauthier et Gagnon c. Goyette Duchesne Lemieux inc. et La Garantie des Bâtiment Résidentiels Neufs de l’APCHQ inc., SORECONI 050629001, 3 novembre 2006, Jeffrey Edwards, alors arbitre, aujourd’hui j.c.s., paragraphe [130].
[2] GAMM 2014-12-002 et al., 2 avril 2015 Me Jean Doyle, arbitre.
[3] GAMM, 58153-2914, 2010-12-001 et 13185-60-2010-0-20.
[4] ABB Inc. c. Domtar Inc., [2007] 3 R.C.S. 461, para. 47.
[5] Banque de Nouvelle-Écosse c. Raymond, J.E. 87-299 (C.A.); Fortin c. Deschênes, J.E. 2001-204 (C.Q.); Groupe commerce (Le), Compagnie d’assurance c. New Holland Canada Ltée, J.E. 2004-467 (C.Q.).
[6] https://climat.meteo.gc.ca/climate_data/daily_data_f.html?hlyRange=2014-03-04%7C2021-12-20&dlyRange=2014-03-06%7C2021-12-20&mlyRange=%7C&StationID=52080&Prov=QC&urlExtension=_f.html&searchType=stnProx&optLimit=specDate&Month=6&Day=20&StartYear=1840&EndYear=2021&Year=2020&selRowPerPage=25&Line=0&txtRadius=25&optProxType=custom&selCity=&selPark=&txtCentralLatDeg=48&txtCentralLatMin=25&txtCentralLatSec=60&txtCentralLongDeg=72&txtCentralLongMin=04&txtCentralLongSec=00&txtLatDecDeg=&txtLongDecDeg=&timeframe=2&time=LST
[7] Dagenais et 9094-3184 Québec Inc., Soreconi 060304001, 14 juin 2006, Alcide Fournier, arbitre.
[8] 2016 QCCA 825.
[9] Giguère c. Construction Duréco inc. 2019 QCCA 2179; Consortium M.R. Canada Ltée c. Office municipal d’habitation de Montréal 2013 QCCA 1211; Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l'APCHQ inc. c. MYL 2011 QCCA 56; La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ Inc. c. Maryse Desindes et Yvan Larochelle, et René Blanchet mise en cause AZ-50285725, J.E. 2005-132 (C.A.).
[10] « 2843 C.c.Q. Le témoignage est la déclaration par laquelle une personne relate les faits dont elle a eu personnellement connaissance ou par laquelle un expert donne son avis. Il doit, pour faire preuve, être contenu dans une déposition faite à l’instance, sauf du consentement des parties ou dans les cas prévus par la loi.
2870. 2e alinéa C.c.Q. Celui-ci doit cependant s’assurer qu’il est impossible d’obtenir la comparution du déclarant comme témoin, ou déraisonnable de l’exiger, et que les circonstances entourant la déclaration donnent à celle-ci des garanties suffisamment sérieuses pour pouvoir s’y fier. »
[11] [1978] 1 R.C.S. 591. La Cour d’appel dit dans Beaulne c. Valeurs mobilières Desjardins inc. 2013 QCCA 1082 : [14] Il s’agit-là d’un corollaire classique de la règle du ouï-dire, dont on trouve une illustration dans l’arrêt R. c. O'Brien. Selon ce corollaire, un témoin est toujours admis à relater une déclaration qu’il a entendue pour établir que cette déclaration a été faite ou pour faire preuve de ce qu’il a entendu mais, sauf exception, son témoignage ne peut servir comme preuve de la véracité de ce qu’affirmait l’auteur de la déclaration. On ne peut donc prétendre ici que le juge de première instance s’est mépris sur la portée de la règle d’exclusion du ouï-dire. […]
[12] « Le second obstacle à l'admissibilité en preuve d'un document informatisé pour prouver un fait matériel est la règle de la meilleure preuve. En vertu de cette règle, une preuve doit, par sa nature, constituer la meilleure preuve susceptible d'être offerte. » Pierre Trudel, Guy Lefebvre, Serge Parisien, La preuve et la signature dans l'échange de documents informatisés au Québec, Les Publications du Québec, Québec, 1993, page 32.
[13] Claude Fabien, Les nouvelles règles de la preuve par ouï-dire en droit civil québécois, p. 13.
[14] Précis de la preuve, 6e éd. (2005), paragraphe 636.
[15] 2021 QCCQ 4869 (Francine Lauzé, j.c.q.)
[16] [2007] 3 R.C.S. 461.
[17] CCAC S08-010401-NP, 30 septembre 2008, Me Jeffrey Edwards, arbitre.
[18] Garantie Habitation du Québec inc. c. Masson 2016 QCCS 5593 (Marie-Anne Paquette, j.c.s.).
[19] 2004 CanLII 47872 (QC CA).
[20] GAMM 2018-06-30 / 2018-08-06, 9 août 2019, Me Karine Poulain, arbitre.
[21] Jeffrey Edwards, La garantie de qualité du vendeur en droit québécois, 2e éd. (2008), Wilson & Lafleur.
[22] La Cour d’appel écrit dans Boiler Inspection and Insurance Company of Canada c. Moody Industries Inc (2006 QCCA 887) : « […] le juge ne doit pas s'empresser de faire succomber celui sur qui reposait la charge de la preuve mais il doit chercher d'abord à découvrir où se situe la vérité en passant au crible tous les éléments de conviction qui lui ont été fournis et c'est seulement lorsque cet examen s'avère infructueux qu'il doit décider en fonction de la charge de la preuve. »
[23] Le 90e jour étant un dimanche, le soussigné a inscrit 91 jours pour éviter tout différend.