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ARBITRAGE EN VERTU DU RÈGLEMENT SUR LE PLAN DE GARANTIE

DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS

 

Organisme d'arbitrage autorisé par la Régie du bâtiment:

CENTRE CANADIEN D'ARBITRAGE COMMERCIAL (CCAC)

 

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   ENTRE:                               MADAME DIANE FORTIER

                                                MONSIEUR ROLAND DEMERS

 

                                                                   (ci-après désignés « les Bénéficiaires »)

 

 

                                                CONSTRUCTIONS S.P.R. POULIOT INC.

 

                                                                          (ci-après désignée « l'Entrepreneur »)

 

 

                                                LA GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS        NEUFS DE L'APCHQ INC.

 

                                                                        (ci-après désignée « l'Administrateur »)

 

 

 

   No dossier CCAC: S11-102001-NP

 

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DÉCISION ARBITRALE

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   Arbitre:                                                       Me Reynald Poulin

 

   Pour les Bénéficiaires:                              Me Jean Dallaire

 

   Pour l'Entrepreneur:                                  Absent

 

   Pour l'Administrateur:                               Me François Laplante

                                                                     Me Nancy Nantel

 

 

 

Identification complète des parties

 

 

Arbitre:                                                        Me Reynald Poulin

                                                                   79, boul. René-Lévesque Est

                                                                   Bureau 200

                                                                   C.P. 1000, Haute-Ville

                                                                   Québec (Québec)  G1R 4T4

 

 

 

Bénéficiaires:                                             Madame Diane Fortier

                                                                   Monsieur Roland Demers

[…] St-Jean-Chrysostome (Québec)  […]

Et leur procureur:

Me Jean Dallaire

Bélanger Longtin, s.e.n.c.r.l.

 

 

 

Entrepreneur:                                             Constructions S.P.R. Pouliot inc.

698, rue Félix-Leclerc

Pintendre (Québec)  G6V 1T5

 

 

 

Administrateur:                                          La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l'APCHQ inc.

5930, boul. Louis-H. Lafontaine

Anjou (Québec)  H1M 1S7

Et ses procureurs:

Me François Laplante et Me Nancy Nantel

Contentieux La Garantie Abritat/GMN

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

DÉCISION ARBITRALE

 

INTRODUCTION

 

[1]           La présente affaire a fait l'objet de plusieurs décisions de l'Administrateur et de l'arbitre soussigné.

[2]           En fait, il s'agit d'un dossier impliquant plusieurs problématiques affectant l'immeuble des Bénéficiaires, lequel a été érigé en 2003 par l'Entrepreneur, Constructions S.P.R. Pouliot inc., et situé au […], en la ville de Saint-Jean-Chrysostome. Cette résidence repose sur un solage conventionnel en béton comprenant un rez-de-chaussée, un étage et un sous-sol avec dalle non structurale en béton. L'avant de la résidence est recouverte d'un revêtement de pierre. On retrouve également à cet endroit une galerie en béton donnant également sur le côté avant droit de l'immeuble.

[3]           En juillet 2008, les Bénéficiaires se sont plaints auprès de l'Entrepreneur et de l'Administrateur au sujet, notamment, de la stabilité de leur bâtiment.

[4]           Le 30 juin 2009, l'Administrateur a fait droit (A-1) aux demandes de réclamation suivantes des Bénéficiaires:

     1.    Fissures au mur de pierre sur le côté

            2.    Fissures au béton de la galerie avant

            3.    Fissures au plancher du sous-sol

            4.    Porte avant affectée

            5.    Marches de bois franc menant à l'étage

            6.    Courbe au mur du passage à l'étage

            7.    Portes de chambres du deuxième ne fonctionnent pas bien.

[5]           Après avoir constaté un dénivelé d'environ 50 mm entre l'avant et l'arrière de la résidence, de même que constaté les résultats des experts de la firme LVM-Technisol inc., spécialement mandatés pour analyser la capacité portante du sol se retrouvant sous la résidence, l'Administrateur s'est déclaré d'avis que des travaux de stabilisation du bâtiment étaient requis considérant les tassements à venir. Ainsi, l'Administrateur a requis l'intervention de l'Entrepreneur pour la remise des lieux dans un état reflétant celui d'origine et ce, dans les 90 jours de la réception de sa décision.

[6]           En août 2009, l'Entrepreneur a demandé l'arbitrage des décisions de l'Administrateur ayant accueilli les demandes des Bénéficiaires. En réplique, les Bénéficiaires ont soulevé une objection préliminaire suite au non-respect, par l'Entrepreneur, du délai de 30 jours prévu à l'article 107 du Règlement sur le Plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs. De son côté, l'Entrepreneur a soulevé l'irrecevabilité des demandes des Bénéficiaires en ce que ceux-ci n'auraient pas transmis une dénonciation écrite à l'Administrateur et à l'Entrepreneur dans un délai raisonnable, lequel ne pouvait excéder six (6) mois de la découverte ou la survenance du vice.

[7]           Les deux (2) moyens d'irrecevabilité soulevés respectivement par les Bénéficiaires et l'Entrepreneur ont été rejetés le 29 juillet 2010 par l'arbitre soussigné (A - 2). À noter que cette décision comportant 20 pages dresse l'inventaire des pièces déposées par les parties à cette occasion, de même que le descriptif de certains témoignages entendus par le Tribunal. Considérant le rejet des moyens d'irrecevabilité, l'arbitre a conservé juridiction de même que déclaré que les coûts de l'arbitrage allaient être déterminés lors de l'audition au fond de la demande d'arbitrage de l'Entrepreneur.

[8]           L'Entrepreneur a abandonné sa demande d'arbitrage, tel que confirmé par courriel de son procureur du 15 septembre 2010, et le Tribunal en a pris acte dans le cadre d'une décision rendue le 30 septembre 2010. Il a aussi été déclaré dans cette décision que les coûts de l'arbitrage devaient être supportés, solidairement, chacun pour moitié entre eux, par l'Administrateur et l'Entrepreneur (D-3).

[9]           Le 19 novembre 2010, Meunier G.P.R. inc. (ci-après désignée « Meunier ») a transmis à l'Administrateur une soumission (A-4) au montant de 103 380,63 $ pour effectuer les travaux de réparation exigés par la décision initiale de l'Administrateur du 30 juin 2009. Meunier a sous-contracté les travaux de « pieux » à l'entreprise Prétech (9130-0616 Québec inc.) (ci-après désignée « Prétech »). La proposition de Prétech était jointe à celle de Meunier et était décrite comme suit:

« Stabilisation sur pieux d'acier et réparation de la fondation de l'immeuble situé au […], St-Jean-Chrysostome ».

[10]        Le 22 novembre 2010, l'Administrateur a accepté (A-5) la soumission de Meunier (incluant celle de Prétech).

[11]        Selon la preuve administrée en arbitrage, il appert que certains problèmes sont survenus pendant l'exécution des travaux par Meunier, principalement au niveau de l'aménagement extérieur de la résidence.

[12]        Le 30 août 2011, l'Administrateur a effectué une inspection du bâtiment et a rendu, le 16 septembre 2011, une décision (A-7) portant sur plusieurs éléments de réclamation des Bénéficiaires résultant principalement de l'exécution des travaux de redressement du bâtiment. Tous les points visés à cette décision de l'Administrateur, de même que certains autres, puisque l'Administrateur n'en aurait pas tenu compte lors de sa visite selon les Bénéficiaires, ont été portés en arbitrage par une demande formulée le 18 octobre 2011 (A-8). Cette demande d'arbitrage fut, à nouveau, soumise au soussigné pour décision. Une lettre de Meunier portant la date du 31 octobre 2011 (A-9) adressée à l'Administrateur, de même qu'une lettre portant la date du 10 novembre 2011 (A-10) de l'Administrateur aux Bénéficiaires démontrent nettement le climat de tension et d'insatisfaction entre, d'une part, Meunier et la sous-traitante et, d'autre part, les Bénéficiaires.

[13]        Lors de l'audition, les Bénéficiaires ont confirmé avoir exécuté eux-mêmes certains travaux, de nature « définitive » et « temporaire », selon le cas. Les travaux faits de façon « définitive » (plastrage et peinture) n'ont pas été soumis à l'arbitrage et la demande d'arbitrage concernant les travaux « temporaires » (aménagement extérieur) a été maintenue par les Bénéficiaires.

 

 

DÉCISIONS INTERLOCUTOIRES

 

[14]        Après avoir acquis compétence dans le cadre d'une décision interlocutoire rendue le 8 février 2012, le Tribunal a prononcé quatre (4) autres décisions interlocutoires dans le cadre de la gestion des procédures d'arbitrage. En fait, des délais ont été occasionnés par la demande des Bénéficiaires de mandater un expert pour qu'il puisse produire un rapport à l'appui de leur demande d'arbitrage et par le droit à la contre-expertise de l'Administrateur.

[15]        Les procureurs de l'Entrepreneur, la firme Carter Gourdeau, ont confirmé qu'ils ne seraient pas présents à l'arbitrage puisque les travaux de réparation avaient été effectués par un tiers, soit Meunier. Ainsi, les procureurs ont déclaré n'avoir aucune représentation à faire. Ils n'étaient d'ailleurs pas, finalement, présents lors de l'arbitrage.

 

 

VISITE DES LIEUX ET PREUVE DOCUMENTAIRE

[16]        Tel qu'il le fut décidé dans le cadre d'une décision interlocutoire, l'arbitre s'est rendu à la résidence des Bénéficiaires en matinée de la première journée d'audition afin de visualiser les éléments problématiques soumis au processus d'arbitrage. À cette occasion, les Bénéficiaires étaient présents accompagnés de leur procureur et de leur expert, M. Marcel LeBlanc, ingénieur, tout comme les représentants de l'Administrateur, soit Me François Laplante, M. Michel Hamel et leur expert, M. Alexandre Leblanc, ingénieur de la firme Prétech. La visite des lieux a consisté à un examen de l'extérieur de la résidence et à une inspection visuelle des pieux vissés sous la galerie avant en béton de la résidence et ayant fait l'objet de recommandations par l'expert Marcel LeBlanc.

[17]        L'arbitre et les parties se sont par la suite déplacés au Palais de justice de Québec pour la poursuite du processus d'arbitrage. Les mêmes personnes se sont ainsi présentées devant le Tribunal. Il n'y a eu aucune exclusion de témoins durant l'audience. Les parties ont également convenu que les propos tenus lors de la visite des lieux préalable pouvaient être considérés par le Tribunal dans le cadre de sa décision.

[18]        Tous ont aussi convenu que les documents A-1 à A-10 se retrouvant au cahier de pièces émis par l'Administrateur et communiqués à l'Entrepreneur et aux Bénéficiaires faisaient partie du dossier d'arbitrage sous les mêmes cotes. L'Administrateur a aussi produit, sans contestation de la part des Bénéficiaires, les pièces suivantes lors de l'audition:

Pièce A-11:     Rapport d'expert de M. Alexandre Leblanc, ingénieur à la firme Prétech et portant la date du 29 août 2012;

Pièce A-12:     En liasse, documents intitulés « Relevé de niveau balcon avant » et « Évolution des mouvements » préparés par la firme Prétech et faisant suite à des prises de mesures, de consentement avec l'expert des Bénéficiaires, à six (6) endroits sur le balcon avant droit de la résidence. Ces mesures ont été prises à quatre (4) occasions, soit le 6 juillet 2012, le 20 décembre 2012, le 30 avril 2013 et le 9 octobre 2013.

[19]        Quant aux Bénéficiaires, demandeurs en arbitrage, ceux-ci ont produit, de consentement avec l'Administrateur, la pièce suivante lors de l'arbitrage:

Pièce B-1:      Rapport de visite et d'analyse préparé en mai 2012 par M. Marcel LeBlanc, ingénieur à la firme Les Investigations Marcel LeBlanc inc.;

[20]        Lors de l'audition, le procureur de l'Administrateur a aussi transmis au procureur des Bénéficiaires et au Tribunal pour fins de dépôt, de consentement, deux (2) photos couleur de l’endroit représenté par la photo B-2 de l'ingénieur Marcel LeBlanc et ce, à titre comparatif pour l'évolution, le cas échéant, des fissures ou de la grosseur de celles-ci.

[21]        Des négociations ont aussi été tenues entre les parties après l'audition et le Tribunal a obtenu, par la suite, une confirmation écrite du règlement partiel des demandes des Bénéficiaires. Le procureur des Bénéficiaires a aussi produit des autorités à l'appui des prétentions de ses clients. De la même façon, des photos du « repère d'arpentage » sur les terrains contigus à celui des Bénéficiaires et qui serait toujours visible ont aussi été produites de consentement avec l'Administrateur. Bien qu'invité à faire des représentations écrites au sujet de certaines questions qui se soulèvent en l'instance et concernant les documents communiqués après l'audience par les Bénéficiaires, l'Administrateur a décidé de s'abstenir.

 

 

QUESTIONS EN LITIGE

[22]        La demande d'arbitrage des Bénéficiaires A-8 comporte neuf (9) éléments de réclamation. À l'audience et de consentement, il fut ajouté la question de la suffisance des travaux de soutènement de la résidence. Bien que non particulièrement documentée dans le cadre du processus d'arbitrage, les parties ont toutes deux consenties à traiter de cette question et ceci afin que soient décidées de façon complète les demandes des Bénéficiaires.

[23]        Tel que mentionné précédemment, une entente est intervenue entre les parties et, plus particulièrement, concernant le trottoir de pavés à l'arrière menant à la piscine et au garage de la résidence, au coulis entre les pierres, aux pots de fleurs et à la peinture intérieure. Quant à la demande concernant les pierres de couronnement, celle-ci aurait été réglée par la sous-traitante de Meunier. Cette demande est donc aussi exclue du processus d'arbitrage. Enfin, l'Administrateur a accepté d'apporter les correctifs nécessaires pour le drainage de la margelle se retrouvant sur le mur latéral droit de la résidence (vue de face de celle-ci).

[24]        Ainsi, le Tribunal doit décider des éléments suivants:

1.      Fissures au béton de la galerie avant;

2.      Hauteur des contremarches;

3.      Borne de terrain;

4.      Suffisance des travaux de soutènement.

[25]        Avant d'aborder les éléments demeurant en arbitrage, le Tribunal rappelle certains faits.

[26]        Les Bénéficiaires ont contracté avec l'Entrepreneur pour la construction de leur résidence. Cette résidence a été construite sur un solage conventionnel en béton avec dalle au sol en béton. Une galerie en béton a été construite en façade et à l'avant-droit de la résidence.

[27]        Tel que vu précédemment, l'Administrateur a ordonné, par une décision du 30 juin 2009, que d'importants travaux de stabilisation du bâtiment devaient être effectués et ce, considérant les tassements à venir. L'Administrateur a décidé que l'intervention de l'Entrepreneur nécessitait la remise des lieux dans un « état reflétant celui d'origine ».

[28]        Après qu'un contrat lui fut consenti par l'Administrateur, la firme Meunier Construction-Rénovation (ci-après désignée « Meunier ») a exécuté des travaux de réparation à la résidence des Bénéficiaires pour un montant de plus de 100 000,00 $. Entre autres travaux, la firme Meunier a procédé à la stabilisation sur pieux d'acier de la résidence des Bénéficiaires en engageant, à titre de sous-traitante spécialisée, la firme Prétech. À la révision du sous-contrat de Prétech, le Tribunal constate qu'elle s'était engagée à installer vingt-trois (23) socles d'attaches galvanisées et procéder au fonçage de vingt-trois (23) pieux par pression statique et six (6) pieux vissés pour les balcons avant et arrière. La réparation des fissures était également incluse à ce sous-contrat.

[29]        L'exécution de ces travaux n'a pas été sans heurts. Les Bénéficiaires se sont plaints de la qualité d'exécution de ces travaux auprès de l'Administrateur.

[30]        Après une demande en ce sens, l'Administrateur a dû trancher les réclamations des Bénéficiaires par une décision du 16 septembre 2011. C'est cette décision de l'Administrateur qui fut portée en arbitrage.

[31]        Le Tribunal traitera, dans l'ordre, des éléments soumis par les parties.

1.            Fissures au béton de la galerie avant

[32]        Dans sa décision du 16 septembre 2011, l'Administrateur s'exprime comme suit:

« Nous avons constaté des fissures sur la dalle de béton du balcon, au coin droit, lesquelles devront être colmatées au moyen d'un calfeutrant flexible pour le béton afin d'empêcher les infiltrations d'eau.

En ce qui a trait à la fissure située juste à l'avant de la porte d'entrée, elle est de nature capillaire et ne nécessite aucun correctif. »

[33]        Le Tribunal rappelle la décision initiale de l'Administrateur en date du 30 juin 2009 au sujet des travaux correctifs. L'Administrateur a requis que l'intervention de l'Entrepreneur consiste en la remise des lieux « dans un état reflétant celui d'origine ».

[34]        Les deux (2) experts entendus à l'audience ont constaté la présence de plusieurs fissures sur l'ensemble du balcon avant droit de la résidence. Ces fissures sont évidemment apparues après la construction de la résidence et, aussi selon la preuve, après les travaux de réparation et de stabilisation des fondations de la résidence des Bénéficiaires. Les deux (2) experts entendus lors de l'audience conviennent que ces fissures doivent être réparées. Par contre, la méthode de réparation diffère.

[35]        Au-delà de la question du support à l'aide de pieux de stabilisation, tel que suggéré par l'expert des Bénéficiaires, le Tribunal doit traiter des correctifs à apporter à ce balcon. La question est relativement simple, « la remise des lieux dans un état reflétant celui d'origine » nécessite-t-elle la pose d'un calfeutrant flexible ou une autre méthode de réparation ? L'expert mandaté par l'Administrateur ne traite pas de cette question dans son rapport écrit. Par contre, l'expert des Bénéficiaires, M. Marcel LeBlanc, était en désaccord avec la méthode de réparation des fissures du balcon préconisée par l'Administrateur. Au-delà du fait qu'il était nécessaire, selon lui, de stabiliser ce balcon, il ajouta, dans le cadre de son témoignage à l'audience, qu'il était préférable d'exécuter une « petite scarification d'approximativement ½ pouce avec injection de « Sika » ou d'un matériau flexible et autonivelant pour l'ensemble de la surface du balcon ».

[36]        Selon le Tribunal, il apparaît évident qu'une telle méthode de réparation est conforme à la décision de l'Administrateur du 30 juin 2009 qui exige de l'Entrepreneur que la remise des lieux soit dans un état reflétant celui d'origine. Le Tribunal ne peut concevoir que les Bénéficiaires n'auraient droit qu'à un balcon fissuré et colmaté, à titre de remise en état. Ils ont droit à ce que l'esthétique de ce balcon, situé à l'avant de leur résidence, soit dans un état similaire à l'origine. Le colmatage proposé par l'Administrateur ferait en sorte que le balcon de la résidence des Bénéficiaires souffrirait d'un problème d'esthétique (après réparation) évident.

[37]        Ainsi, sans imposer de méthode corrective précise, les fissures au béton de la galerie avant devront être réparées de façon à ce que ce balcon soit dans un « état reflétant celui d'origine », comme l'a décidé l'Administrateur dans sa décision du 30 juin 2009.

2.         Hauteur des contremarches

[38]        À l'avant de la résidence, d'importants travaux de réfection des infrastructures menant à l'entrée de la résidence ont été effectués. Ces travaux découlent de ceux visant la stabilisation des fondations.

[39]        Voici le constat de l'Administrateur à sa décision du 16 septembre 2011:

« À l'exception des trois (3) premières marches menant au balcon avant, la hauteur des contremarches nous a semblé conforme aux règles de l'art. Les écarts de hauteur mesurés sont jugés acceptables. »

[40]        À titre de correctifs supplémentaires, l'Administrateur décida ce qui suit:

« La hauteur des contremarches de la première volée d'escalier, à la sortie de la porte d'entrée avant, doit être la même. »

[41]        L'expert mandaté par l'Administrateur, M. Alexandre Leblanc, ingénieur de la firme Prétech, ne s'est pas prononcé au sujet de la hauteur des contremarches dans son rapport écrit déposé au Tribunal. Il n'a pas non plus témoigné à ce sujet lors de l'audience.

[42]        Voici de quelle façon l'expert des Bénéficiaires, M. Marcel LeBlanc, se prononce au sujet de cette problématique:

« (…); cela est très dangereux et peut-être blessant. Nous sommes d'accord avec l'opinion de l'inspecteur qui conclut que les contremarches de cette première volée d'escalier doivent être uniformes. Nous concluons que cela veut dire que devront être repris les travaux d'aménagement d'accès au perron de façade. »

[43]        Le procureur de l'Administrateur plaide la règle de la « proportionnalité ». Il invoque que la réparation des problèmes de hauteur des contremarches nécessiterait trop de déboursés et invoque qu'une réparation ne serait pas équitable.

[44]        Le Tribunal rejette ce moyen de défense et ne peut que constater que la hauteur des contremarches est non conforme aux règles de l'art. Cela n'est pas même contesté par l'une ou l'autre des parties.

[45]        Des travaux correctifs devront être exécutés à ce sujet, et ce, afin que les règles de l'art soient respectées.

3.         « Borne de terrain »

[46]        Les Bénéficiaires se plaignent que l'une des « bornes » de leur terrain est disparue après l'exécution des travaux de stabilisation des fondations de leur résidence. À l'audience, ils ont témoigné à l'effet que le « repère » qui était placé, selon eux, à l'avant du côté ouest de leur résidence est disparu à l'époque contemporaine des travaux de réfection.

[47]        Bien que le Tribunal ait interrogé les Bénéficiaires à ce sujet à l'audience, ceux-ci étaient incapables de préciser s'il s'agissait véritablement d'une « borne » ou simplement d'un « repère » placé par un arpenteur-géomètre. Des photos ont été transmises au Tribunal après l'audience. De la même façon, il n'est pas possible pour le Tribunal d'identifier s'il s'agit d'une « borne » ou tout simplement d'un « repère » qui serait disparu. Bien que le Tribunal ne mette pas en doute la preuve faite à l'audience par les Bénéficiaires au sujet de la disparition de cette marque, il ne s'agit malheureusement pas d'un élément visé par le Plan de garantie. Ainsi, l'Administrateur n'est pas responsable du préjudice pouvant découler de la disparition de cette borne ou de ce repère. S'il y a responsabilité, celle-ci découle de l'exécution des travaux de l'entrepreneur mandaté pour exécuter les travaux correctifs. Par contre, l'arbitrage en l'instance ne peut être opposable à cet entrepreneur qui n'est pas partie en cause.

[48]        Ainsi, la demande d'arbitrage au sujet de cette « borne » ou de ce « repère » est rejetée.

4.         Suffisance des travaux de soutènement

[49]        À l'analyse de la décision de l'Administrateur du 30 juin 2009, force est de constater que les fondations de l'immeuble avaient déjà eu des comportements fort inquiétants. En fait, il y aurait eu apparition graduelle de manifestations liées au mouvement des fondations, après la construction. L'Entrepreneur aurait indiqué à l'Administrateur qu'il avait demandé, à l'époque de la construction, une opinion d'un laboratoire en sol ainsi que d'un ingénieur en structure pour la construction. Ce qui précède aurait amené l'Entrepreneur, selon ses dires, à prévoir un surdimensionnement des empattements de l'immeuble ainsi que l'ajout d'armature aux murs de fondation.

[50]        Malgré ce qui précède, cela n'a pas été suffisant pour éviter les graves préjudices à la résidence des Bénéficiaires.

 

[51]        Voici comment l'Administrateur résume ses constatations sur place:

« Nous avons procédé le 22 janvier 2009 à un relevé sommaire du niveau du plancher au rez-de-chaussée à l'aide d'un niveau laser. Un dénivelé d'environ 50mm fut observé, dont la partie la plus basse se situe en façade du bâtiment. Un bombement du plancher de l'étage fut constaté au centre près de l'escalier. Plusieurs portes intérieures ne sont plus d'aplomb dans leur ouverture. Un léger relâchement a été observé entre les composantes de l'escalier menant à l'étage. Des lézardes au placoplâtre ont été relevées sur les 2 niveaux de plancher. Le sous-sol n'étant pas complété, les dommages au placoplâtre n'étaient pas visible (sic).

Le 13 mars 2009, l'administrateur a donné un mandat à la firme LVM-TECHNISOL INC. qui a procédé à une reconnaissance des lieux le 30 avril 2009. Les travaux de forage ont été réalisés le 4 et le 5 mai 2009.

L'expert mandaté, suite à l'analyse des résultats obtenus, conclut que le bâtiment repose sur un dépôt de consistance ferme sur les premiers 0,60 à 1,2 mètres d'épaisseur et devient molle à très molle sur plusieurs mètres d'épaisseur. Ce type de dépôt est susceptible de subir des tassements sous de fiables (sic) charges. Les tassements peuvent être importants et se poursuivre pendant plusieurs années. »

(soulignement du Tribunal)

[52]        L'Administrateur conclut comme suit:

« L'administrateur est d'avis que des travaux de stabilisation du bâtiment sont requis considérant les tassements à venir, estimés par le laboratoire en sol. L'intervention de l'entrepreneur nécessitera la remise des lieux dans un état reflétant celui d'origine. »

[53]        Puisque les objections préliminaires des parties ont été rejetées et que l'Entrepreneur s'est désisté de sa demande d'arbitrage, d'importants travaux de remise à niveau de l'immeuble ont été exécutés à la demande de l'Administrateur.

[54]        C'est la suffisance de ces travaux de remise à niveau qui est pertinente à la question sous étude.

[55]        En fait, les parties et les experts ont requis l'intervention du Tribunal au sujet de la suffisance des travaux de soutènement du centre de la résidence des Bénéficiaires et au balcon extérieur en béton avant droit.

[56]        La soumission de l'entrepreneur en charge des travaux correctifs a été produite au dossier. Certains éléments de cette soumission et, particulièrement, la proposition de la sous-traitante Prétech y inclue, ont attiré l'attention du Tribunal. Tout d'abord, les « pieux » à être enfoncés par l'entrepreneur sont ceux visés par la soumission de Prétech. À la révision de cette soumission, nous constatons que les travaux y prévus incluent notamment:

·      La conception, les plans et devis signés par ingénieur

·      L'installation de 23 socles d'attaches galvanisées et le fonçage de 23 pieux par pression statique

·      Le fonçage de 23 pieux vissé pour balcon avant et arrière

·      Le redressement de la fondation

·      La stabilisation de la fondation et précontrainte tout comme la réparation des fissures.

[57]        Il est particulièrement intéressant de constater que la garantie de Prétech s'exprime comme suit:

« GARANTIE:  Le Client reconnaît avoir été informé que seuls des Travaux correctifs totaux, exécutés sur l'ensemble des fondations et des éléments porteurs intérieurs, est la seule méthode acceptable pour obtenir une garantie de stabilité complète des fondations et prévenir des dommages potentiels à l'immeuble. »

(soulignement du Tribunal)

[58]        Enfin, la soumission de l'entrepreneur comporte la note suivante:

« Note: Lors de la remise à niveau du bâtiment, si la dalle sur sol au sous-sol se brise, les travaux de réparation collatéraux ne sont pas compris. »

[59]        Avant que la demande d'arbitrage des Bénéficiaires ne soit entendue par le Tribunal, seul l'expert des Bénéficiaires, M. Marcel LeBlanc, ingénieur, a fourni, en annexe à son rapport d'expert déposé au dossier, les plans que pourrait avoir utilisé l'entrepreneur dans le cadre de ses travaux correctifs. La « conception » et le « devis » devant être signés par un ingénieur n'ont jamais été produits au dossier. D'ailleurs, aucun plan d'ingénieur signé et scellé ne fut produit, après les travaux, selon la preuve.

a)      La preuve d'expert des Bénéficiaires

[60]        En appui à leur demande d'arbitrage sur les différents éléments qui étaient visés, les Bénéficiaires ont mandaté M. Marcel LeBlanc, ingénieur à la firme Les Investigations Marcel LeBlanc inc., pour que celui-ci produise un rapport écrit et agisse comme témoin expert, à l'audience.

[61]        M. Marcel LeBlanc a ainsi produit, en mai 2012, un rapport d'expert intitulé « Rapport de visite et d'analyse / Travaux de réparations au […], St-Jean-Chrysostôme (Qc) », lequel a été produit comme pièce P-1 au dossier.

[62]        M. Marcel LeBlanc décrit à son rapport qu'il a consulté certains documents dont, notamment:

1.  Plan Pretech (S1) du 12 octobre 2010 signés et scellés par monsieur Pierre Brassard, ing.

2.  Rapport d'enfoncement en sous-œuvre de Pretech scellé par monsieur Alexandre Leblanc, ing. et signé en date du 17 juin 2011 (Pieux # 1 à # 23)

3.  Rapport d'enfoncement de Pretech scellé par monsieur Alexandre Leblanc, ing. et signé en date du 17 juin 2011 (Pieux # 24 à # 30)

4.  Plans (S1 et S2), Pretech du 23 février 2012 non signés mais scellés par monsieur Alexandre Leblanc, ing.

[63]        Il existe donc deux (2) séries de plans pour le pieutage de la résidence des Bénéficiaires.

[64]        Tout d'abord, une première scellée et signée par M. Pierre Brassard, ingénieur. Les deux (2) plans S1 des ingénieurs Pierre Brassard et Alexandre Leblanc sont semblables à l'exception de la note de M. Brassard, le seul à avoir signé son plan, qui prévoit que les pieux sous les galeries avant et arrière devaient être implantés sous les piliers existants en béton. M. Marcel LeBlanc a témoigné que ces pieux vissés ne furent pas posés sous les pilastres de béton et/ou sonotubes formant les piliers existants mais plutôt à côté de ceux-ci à une distance variant, notamment, de 4" au perron avant en béton. Ainsi, il a émis l'opinion que ces piliers sont retenus d'une façon désaxée importante. Puisqu'aucun plan ni aucune instruction signé ou scellé par un ingénieur ne fut produit par quiconque, il a recommandé que des calculs attestant que ces pieux sont conformes en résistance structurale et en résistance géotechnique soient exécutés. Il précise également que dans le rapport d'enfoncement de ces pieux (pieux # 24 à # 30), aucune capacité en compression flexion n'est donnée. En fait, il prétend qu'il y a deux (2) types de pieux et deux (2) types d'assises dans le sol, ce qui ne rencontre pas les normes puisque les fondations d'une maison doivent reposer sur un sol de même compétence. Il recommande aussi d'éviter que soit chargé l'élément supporté par les pieux désaxés. Afin d'éviter des problèmes, il suggère d'ajouter un deuxième pieu à chaque pilier pour éliminer les excentricités et, par le fait même, les effets secondaires. Malgré qu'il n'y avait pas de relevée effectuée à cette époque par l'expert de l'Administrateur (voir ci-après), il s'est dit d'opinion qu'il y avait mouvement différentiel des pieux vissés et/ou de l'ensemble de leur installation.

[65]        Quant à la stabilisation des empattements internes situés sous la dalle de béton au centre de la maison et autour de l'escalier, il constate que ceux-ci n'ont pas été stabilisés ou pieutés. Il écrit ce qui suit à ce sujet:

« Habituellement, les risques de tassements d'une fondation de béton sont plus grands qu'à l'intérieur parce qu'elle est plus pesante. Dans le présent cas, la situation est inversée et comme l'extérieur est retenu à 100% et l'intérieur à 0%, il risque d'y avoir à moyen et long terme des tassements différentiels vers l'intérieur. »

[66]        Ainsi, il recommande le pieutage des empattements internes.

[67]        À l'audience, il précise que les mouvements différentiels des pieux à la galerie avant de béton peuvent amener des cassures, ce qui serait évité en toute probabilité par des piliers additionnels. Il recommande, par la suite, une scarification et une injection aux fissures avec une finition esthétique à la galerie avant. Il s'est d'ailleurs déclaré fort surpris à l'audience lorsqu'il a appris que ces pieux vissés à la galerie avant de béton pouvaient encore être instables contrairement au pourtour de fondations dont les pieux ont été enfoncés à refus. Il a réitéré que le Code national du bâtiment prévoit un sol d'une même compétence et que des mouvements additionnels apporteront des problématiques de fissuration qu'il faut éviter.

b)     La preuve d'expert de l'Administrateur

[68]        En réponse au rapport d'expert de M. Marcel LeBlanc, l'Administrateur a demandé à M. Alexandre Leblanc, ingénieur à la division Ingénierie de la firme Prétech, de produire une contre-expertise. Le rapport de M. Alexandre Leblanc est daté du 29 août 2012 et fait suite à sa visite de la résidence des Bénéficiaires le 6 juillet 2012. Dans son rapport, il reconnaît avoir vu quatre (4) fissures sur le balcon avant. Il précise que suivant l' « opération de levage », il y avait deux (2) fissures notables. Il a reconnu ne pas avoir de notes quant à des fissures après l'opération de remblai et compactage, ce qui lui a fait reconnaître qu'il n'était pas impossible que le compactage intensif puisse avoir activé des fissures en zones de tensions du balcon. Il n'était pas capable de confirmer que les fissures étaient « actives » et il a procédé à un relevé de niveau précis du balcon ainsi que des colonnes de maçonneries reposant sur ce dernier. Nous verrons plus loin les résultats.

[69]        Quant à la critique de M. Marcel LeBlanc concernant les types de pieux et les types d'assises au sol, il réfère le Tribunal aux règles de l'art, soit la rencontre des normes de conception des fondations qui prévoient une limite de tassements totaux à 25mm et de tassements différentiels à 19mm. Rappelons que ce sont les dépassements de ces tassements totaux et différentiels qui ont mené aux importants travaux correctifs de la résidence des Bénéficiaires. Il précise que les pieux vissés (installés aux galeries), « moins chargés et enfoncés dans le till compact, montreront des tassements de l'ordre de 15 mm. » Il mentionne, sans plus de détail, que ces pieux vissés dépassent la couche de sol compressible problématique. À ce sujet, la décision de l'Administrateur du 30 juin 2009 conclut qu'après le « dépôt de consistance ferme sur les premiers 0,60 à 1,2 mètres d'épaisseur », la consistance devient « molle à très molle sur plusieurs mètres d'épaisseur ». L'Administrateur précise que la firme LVM-Technisol inc. ajoute que ce type de dépôt est susceptible de subir des tassements sous de faibles charges et que ces tassements peuvent être importants et se poursuivre pendant plusieurs années.

[70]        Ainsi, le Tribunal ne peut que mettre en doute les affirmations de M. Alexandre Leblanc.

[71]        M. Alexandre Leblanc reconnaît par la suite que les piliers de la galerie avant, notamment, sont retenus d'une façon désaxée importante. Il explique que cette excentricité est facilement retenue puisque la charge axiale serait relativement faible. Par des calculs, il explique son propos et conclut qu'il est improbable qu'il y ait un mouvement du balcon. Les relevés et mesures de quelques endroits pris à ce balcon démontrent le contraire. Il convient que « l'ajout d'un second pieu tel que proposé ne serait évidemment pas néfaste, néanmoins cette (sic) ajout ne m'apparaît pas nécessaire. » Un relevé de niveaux du balcon avant a également été produit au dossier par M. Alexandre Leblanc. Nous constatons que depuis la visite de M. Alexandre Leblanc, il y a eu effectivement mouvement du balcon avant, ce qui pourrait expliquer la présence de fissures. Le Tribunal note que ces mouvements ont été constatés après les travaux correctifs. Ce qui précède confirme donc qu'il y a mouvements, ce que voulait vérifier M. Alexandre Leblanc par sa recommandation de suivi de niveaux à son rapport. Ainsi, pour utiliser son expression, les fissures au balcon sont « actives » et les piliers sont en mouvement.

[72]        Au-delà de ce qui précède, M. Alexandre Leblanc émet également son opinion quant aux travaux correctifs n'ayant pas été effectués aux empattements internes de la résidence. Le Tribunal rappelle que M. Alexandre Leblanc a été reconnu à titre d'expert devant le Tribunal. Par contre, M. Leblanc signe son rapport sur papier en-tête de la firme Prétech, la même ayant exécuté en sous-traitance les travaux correctifs à l'immeuble. Il apparaît évident au Tribunal que M. Alexandre Leblanc tente de justifier la bonne exécution des travaux par Prétech et l'absence de responsabilité de celle-ci puisque les travaux de soutènement des empattements intérieurs n'étaient pas inclus au mandat initial de cet entrepreneur. C'est d'ailleurs ce qu'il a écrit à son rapport quand il précise que les empattements internes n'étaient pas inclus « à notre mandat » et qu'aucun correctif n'a donc été, par conséquent, apporté.

[73]        Il ajoute, de façon assez surprenante, ce qui suit à son rapport:

« Le risque de tassement différentiel est donc présent. Compte tenu des coûts liés à c'est (sic) travaux, il est usuel de procéder en deuxième phase si le besoin se fait sentir. Notre expérience dans ce type de travaux sur des sols normalement consolidé, tel que rapporté dans l'étude de sol disponible du cas présent, nous montre que très peu de travaux subséquents sont requis. »

[74]        Il y a donc reconnaissance d'un risque de tassement différentiel et une explication de rentabilité pour exclure ces travaux sur les empattements internes. M. Alexandre Leblanc réfère à des « sols normalement consolidés, tel que rapporté dans l'étude de sol disponible du cas présent » sans qu'une preuve à ce sujet ne soit administrée devant le Tribunal. Au contraire, la seule étude de sol à laquelle il a été fait référence est celle de LVM-Technisol inc., du moins l'explication que l'Administrateur en a faite dans sa décision de juin 2009. Le Tribunal estime qu'il n'y a pas de preuve que les sols étaient normalement consolidés, au contraire.

[75]        Il reconnaît que la firme Prétech a fait régulièrement des travaux pour l'Administrateur. Il a aussi reconnu avoir enlevé les notes apparaissant au plan scellé et signé par M. Pierre Brassard, ingénieur, et ne pas avoir signé le plan qu'il a lui-même produit, plusieurs mois plus tard. D'ailleurs, il précise que les plans d'ingénieurs pour soumission sont davantage fournis pour la quantification monétaire plutôt qu'être conforme au niveau technique. Il a témoigné que la technique envisagée par M. Brassard au niveau des pieux aux balcons n'était pas exécutable et qu'il a changé, sur place, la technique. Quant aux travaux sur les empattements intérieurs, il a témoigné qu'à sa mémoire, le « poteau du centre » au sol de la résidence des Bénéficiaires n'aurait jamais été touché. Le Tribunal précise, à ce sujet, que l'expert Marcel LeBlanc, lors de sa visite préalable à son rapport d'expert, a recommandé aux Bénéficiaires de diminuer la charge supportée par un poteau se retrouvant au sous-sol afin d'éviter des problèmes à l'immeuble. À ce moment, M. Marcel LeBlanc a précisé que ce poteau était « très très loadé ».

[76]        Malgré qu'il eût admis que le risque de tassement différentiel était présent et que les travaux de soutènement des empattements intérieurs n'avaient pas été exécutés en raison des coûts importants qui y étaient liés préférant, comme de façon habituelle, « s'attendre en deuxième phase si le besoin se fait sentir », M. Alexandre Leblanc témoigne au Tribunal que ces travaux n'auraient, étonnamment, pas été exécutés puisque l'argile au sol aurait normalement été consolidée et qu'il n'était plus nécessaire de faire ces travaux. Le Tribunal accorde plus ou moins de crédibilité à ce témoignage préférant nettement les conclusions du rapport de LVM-Technisol inc. et les constatations sur place de l'ingénieur Marcel LeBlanc et l'admission, comme il nous apparaît évident, qu'il y a risque de tassements différentiels à cet endroit.

[77]        En contre-interrogatoire, M. Alexandre Leblanc reconnaît qu'à titre d'ingénieur, il ne peut qu'affirmer que le risque de tassements additionnels est présent. Il ajoute, une fois de plus, qu'il n'est pas usuel d'exécuter des travaux de soutènement des empattements intérieurs puisque cela occasionne des coûts additionnels. Enfin, il précise ainsi sa pensée au niveau des travaux aux empattements intérieurs:

« Si on peut le sauver, on le sauve, sinon on le fait plus tard. »

[78]        Questionné sur le respect des normes, il mentionne que, lorsqu'il y a des travaux correctifs, il n'est pas nécessaire de tout ramener en respectant les normes applicables. Enfin, il ajoute que les changements apportés à la conception des travaux et aux plans au sujet, notamment, de la galerie avant droite, n'ont pas fait l'objet de tests spécifiques normalisés.

[79]        Dans l'ensemble, l'objectif du témoignage de M. Alexandre Leblanc a semblé être la défense des intérêts de Prétech et, par conséquent, de l'Administrateur, ce qui n'est pas son rôle à titre d'expert reconnu devant le Tribunal. Le Tribunal ne peut retenir son opinion d'expert. Il est surprenant qu'il n'ait pas fait référence au texte de La Garantie se retrouvant au sous-contrat de Prétech qui confirme très clairement que « seuls les Travaux correctifs totaux, exécutés sur l'ensemble des fondations et des éléments porteurs intérieurs » donnent une garantie de stabilité complète des fondations et préviennent des dommages potentiels. Ce texte de garantie limitée concorde difficilement avec la prétention d'absence de nécessité de travaux aux empattements intérieurs et le non-respect des plans de l'ingénieur Brassard formulés avant la conclusion du contrat entre l'Administrateur et Meunier.

c)      Conclusions

[80]        Il apparaît évident au Tribunal, qu'avant tout travail correctif et esthétique aux fissures et à la galerie de béton à l'avant de la résidence des Bénéficiaires, que des travaux additionnels de stabilisation soient effectués. Le relevé des niveaux effectué par M. Alexandre Leblanc, ingénieur, confirme que les fissures sont bien « vivantes ». À ce qui précède s'ajoute le fait que les travaux proposés par l'ingénieur Brassard au moment de la conclusion du contrat d'entreprise entre l'Administrateur et Meunier décrivaient une méthode différente de ce qui a été exécuté sur place. D'ailleurs, aucun test spécifique et confirmant ce changement de méthode ne fut exécuté. Il semble que par souci d'économie, on a voulu modifier l'exécution des travaux les rendant ainsi non conformes à ce qui avait été proposé initialement.

[81]        Le Tribunal ordonnera donc à l'entrepreneur d'exécuter les travaux correctifs comme proposés par l'expert Marcel LeBlanc, ingénieur.

[82]        Quant aux travaux de soutènement des empattements intérieurs de la résidence des Bénéficiaires, seul M. Marcel LeBlanc, ingénieur, témoigne avec probité à ce sujet.

[83]        Il est nécessaire de faire des travaux de soutènement pour éviter des tassements additionnels.

[84]        La garantie de la sous-traitante de Meunier, entrepreneur ayant contracté avec l'Administrateur, est inapplicable si les travaux correctifs exécutés sur l'ensemble des fondations et des éléments porteurs intérieurs ne sont pas exécutés. Aucune preuve ne fut entendue concernant la méthode des travaux correctifs et la suffisance de celle-ci. Le Tribunal ne peut que comprendre que l'absence d'interventions sur les empattements intérieurs était basée principalement sur le désir d'économiser et de reporter à plus tard une éventuelle intervention à ce niveau. Puisque l'expert de l'Administrateur reconnaît qu'il est possible qu'il y ait des tassements additionnels, ce qu'il y a eu de façon très importante par le passé, des travaux sont nécessaires. Vu le résumé de l'étude LVM-Technisol inc. apparaissant à la décision de l'Administrateur de juin 2009, le Tribunal estime que la preuve est prépondérante à l'effet que des tassements additionnels surviendront et que la situation n'est aucunement consolidée au niveau des empattements intérieurs.

[85]        Le Tribunal ne peut ordonner une méthode de correction particulière. Par contre, il devrait y avoir exécution de travaux de soutènement aux empattements intérieurs, le tout selon un plan signé et scellé par un ingénieur.

[86]        Vu ce qui précède, le Tribunal accordera aussi aux Bénéficiaires le remboursement des frais d'experts qu'ils ont dû acquitter pour l'arbitrage. Deux (2) factures ont été produites, lesquelles couvrent la visite, l'analyse, le rapport de visite et d'analyse, la préparation à l'audition et l'audition elle-même de l'expert Marcel LeBlanc. Un montant de 2 800,00 $, en plus des taxes applicables, soit un grand total de 3 219,30 $ est donc accordé aux Bénéficiaires.

[87]        Considérant que les Bénéficiaires ont obtenu gain de cause en arbitrage et conformément à l'article 123 du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs, les coûts de l'arbitrage seront à la charge de l'Administrateur.

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL D'ARBITRAGE:

[88]        ACCUEILLE la demande d'arbitrage des Bénéficiaires concernant la présence de fissures sur le balcon avant droit de leur résidence;

[89]        ORDONNE à l'entrepreneur d'exécuter des travaux de scarification et de colmatage avec un produit adéquat de la surface du balcon avant droit de la résidence des Bénéficiaires et ce, dans un délai de 45 jours de la présente décision;

[90]        ACCUEILLE la demande d'arbitrage des Bénéficiaires concernant la hauteur des contremarches à l'avant de leur résidence;

[91]        ORDONNE à l'entrepreneur d'exécuter les travaux correctifs aux contremarches afin qu'il n'y ait plus de non-conformité au Code national du bâtiment et que soient respectées les règles de l'art en la matière et ce, dans un délai de 45 jours de la présente décision;

[92]        REJETTE la demande d'arbitrage des Bénéficiaires concernant la « borne de terrain »;

[93]        ACCUEILLE la demande d'arbitrage des Bénéficiaires concernant la suffisance des travaux de soutènement;

[94]        ORDONNE à l'entrepreneur d'exécuter les travaux correctifs au balcon avant droit de la résidence des Bénéficiaires, tels que précisés par l'ingénieur Marcel LeBlanc à son rapport d'expert produit au dossier d'arbitrage et ce, dans un délai de 45 jours de la présente décision;

[95]        ORDONNE à l'entrepreneur d'exécuter les travaux de soutènement des empattements intérieurs de la résidence des Bénéficiaires, le tout conformément à un plan signé et scellé par un ingénieur et ce, dans un délai de 45 jours de la présente décision;

[96]        Conformément à l'article 124 du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs, ORDONNE à l'entrepreneur et à l'Administrateur de payer aux Bénéficiaires la somme de 3 219,30 $ (incluant les taxes) à titre de remboursement des frais de l'expert Marcel LeBlanc, ingénieur;

[97]        Enfin, et conformément à l'article 123 du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs, les coûts de l'arbitrage seront à la charge de l'Administrateur.

 

 

 

Québec, le 21 septembre 2015

 

 

 

 

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                                                                     Me Reynald Poulin

                                                                     Arbitre / Centre canadien d'arbitrage commercial (CCAC)