TRIBUNAL D’ARBITRAGE

ARBITRAGE SELON LE

RÈGLEMENT SUR LE

PLAN DE GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS

(Décret 841-98 du 17 juin 1998, c. B-1.1, r. 8)

 

CENTRE CANADIEN D’ARBITRAGE COMMERCIAL

 (Organisme d’arbitrage accrédité par la Régie du bâtiment du Québec)

____________________________________________________________________________________

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE SAGUENAY

DOSSIER NO: S15-022401-NP

3093-2313 QUÉBEC INC.

 (L’« ENTREPRENEUR»)

et

ALEXANDRA LÉTOURNEAU

ET LOUIS BOUCHARD

(LES « BÉNÉFICIAIRES »)

et

LA GARANTIE DES MAISONS NEUVES DE L’APCHQ

(L’« ADMINISTRATEUR »)

 

______________________________________________________________________

 

DÉCISION ARBITRALE RECTIFIÉE

______________________________________________________________________

 

Arbitre :                                                         Me Roland-Yves Gagné

 

Pour l’Entrepreneur:                                    Me Éric Gagnon (Gagnon Minier)

Larry Dallaire

Simon Bouchand

Frédéric Gagnon

Anne McSween

Michel Millmore

Dahi Ouaras

André Tremblay (sous 294.1 c.p.c.)

 

Pour les Bénéficiaires:                               Me Yves Laperrière (Aubin Girard Côté)

                                                                       Alexandra Létourneau

Louis Bouchard

Alexandre Champagne

Louis Parent

                                                                      

Pour l’Administrateur:                                 Me Nancy Nantel

                                                                      Michel Hamel

Dates et lieu de l’audience :                      30 septembre, 1er et 2 octobre 2015

Palais de Justice de Chicoutimi

                                                                      227 est, rue Racine

                                                             Saguenay (Chicoutimi), Qc.

                                                             Salle 3.09

                                                                     

Date de la décision rectifiée :                    12 novembre 2015

 

 

TABLE DES MATIÈRES

 

MANDAT ET JURIDICTION.. 6

LE DROIT. 6

LES FAITS.. 8

Preuve des Bénéficiaires. 10

Preuve de l’Entrepreneur 20

Preuve de l’Administrateur 30

Contre-preuve de l’Entrepreneur 32

PLAIDOIRIE.. 32

Entrepreneur 32

Bénéficiaires. 34

Administrateur 36

Réplique. 37

DÉCISION.. 38

Le différend sous la juridiction du Tribunal d’Arbitrage. 38

La réclamation des Bénéficiaires fut-elle produite dans les délais prévus à l’article 10(5) du Règlement?  40

Les garanties procédurales ou équité procédurale et justice naturelle. 48

Les faits au dossier et les arguments de l’Entrepreneur 48

Les précédents jurisprudentiels et le Règlement 52

Conclusion. 56

Décision contradictoire et donc, inapplicable car incompréhensible. 56

Y a-t-il vice majeur selon les articles 10(5) du Règlement et 2118 C.c.q.?. 58

Disposition d’ordre public. 59

Le vice de construction. 60

La perte causée par le vice de construction. 65

Mode de vie allégué. 73

L’état de santé et l’évacuation des lieux. 74

Arguments soulevés personnellement par l’Entrepreneur 75

Les Travaux Correctifs. 79

Conclusion. 80

FRAIS.. 81

Réclamation des Bénéficiaires pour leurs frais d’expertises et rétroactivité du nouveau Règlement 82

Réclamation de l’Entrepreneur pour ses frais d’expertise. 85

Réclamation de l’Administrateur pour une condamnation solidaire avec l’Entrepreneur quant aux frais de l’arbitrage. 86

CONCLUSION.. 89


 

Dans la numérotation et place du paragraphe [115] contenu dans la décision du 2 novembre 2015, une erreur s’est glissée et on devrait lire ce paragraphe qui était numéroté [115] à la suite de [114], nouvellement numéroté  [69A] à la suite de [69], et le paragraphe [137] doit donc se référer au paragraphe nouvellement numéroté [69A], au lieu de se référer au paragraphe [115]. Il y a donc lieu de rectifier la décision arbitrale du 2 novembre en conséquence.

Montréal, le 12 novembre 2015

__________________________

Me ROLAND-YVES GAGNÉ

Arbitre / CCAC

 

 

DESCRIPTION DES PARTIES

ENTREPRENEUR

 

3093-2313 Québec Inc.

a/s Me Éric Gagnon

Gagnon Minier

393 est, Racine, 3e étage

Chicoutimi, Qc.

G7H 1T2

 

BÉNÉFICIAIRES

 

Alexandra Létourneau

et Louis Bouchard

a/s Me Yves Laperrière

Aubin Girard Côté

1700 boul. Talbot, suite 310

Chicoutimi, Qc.

G7H 7Y1

 

ADMINISTRATEUR

 

La Garantie des maisons neuves de l'APCHQ

a/s Me Nancy Nantel

Contentieux des garanties Abritat/GMN

7333 Place des Roseraies, 3e étage

Anjou, Qc.

H1M 2X6

 


PIÈCES

 

Lors de l’audience, l’Administrateur a soumis les pièces suivantes :

 

A-1 : Acte de vente en date du 17 août 2009;

A-2 : Soumission du 15 septembre 2009;

A-3 : Formulaire d’inspection pré-réception en date du 15 janvier 2010;

A-4 : Lettre de dénonciation en date du 6 août 2014;

A-4.1 : Mise en demeure de Me Éric Lebel du 28 avril 2014;

A-5 : Rapport technique de Mme Christine Côté du 9 juin 2014;

A-6 : Rapport de visite de la firme Inspection Immotech en date du 26 mai 2014 (Louis Parent);

A-7 : Rapport synthèse d’évaluation de qualité de l’air intérieur pour moisissures du 1er mai 2014;

A-8 : Rapport préliminaire d’évaluation de qualité de l’air intérieur pour moisissures et bactéries du 9 mai 2014;

A-9 : Rapport d’évaluation pour moisissures et bactéries de la firme Inspection Immotech;

A-10 : Lettre adressée à l’entrepreneur en date du 27 août 2014;

A-11 : Demande de réclamation du 16 septembre 2014;

A-12 : Lettre adressée à l’administrateur en date du 17 septembre 2014;

A-13 : Avis de 15 jours en date du 8 octobre 2014;

A-14 : Rapport de Contex Environnement en date du 5 janvier 2015;

A-15 : Décision de l’administrateur en date du 26 janvier 2015 et lettres;

A-16 : Demande d’arbitrage en date du 24 février 2015;

A-17 : Rapport d’expert Expertbâtiment.ca (ou rapport Champagne) avec les Annexes A, B, C;

A-18 : Courriel du 15 juin 2015.

 

Lors de l’audience, l’Entrepreneur a soumis les pièces suivantes :

 

E-1 : Lettre du 11 juin 2015;

E-2 : Rapport LVM daté du 14 novembre 2014;

E-3 : Rapport de GAMS daté du 7 juillet 2014;

E-4 : Rapport de Dahi Ouaras daté du 10 décembre 2014;

E-5 : Rapport des Experts-Conseil CEP daté du 27 mars 2015 (Michel Millmore);

E-6 : Rapport des Expert-Conseils CEP daté du 29 avril 2015 (Frédéric Gagnon);

E-7 : Rapport complémentaire d’expertise de Dahi Ouaras daté du 16 août 2015;

E-8 : Annexe 1 Liste des témoins;

E-9 : Lettre du 17 août 2015;

E-10 : Lettre au CCAC  du 2 mars 2015;

E-11 : Lettre du 19 juin 2015;

E-12: Rapport d’expert du Frédéric Gagnon du 8 octobre 2014;

E-13 : Pré-Soumission du 15 septembre 2009;

E-14 : Photos A b et c en liasse;

E-15 : Déclaration écrite produite sous 294.1 c.p.c. en date du 23 juillet 2014 par André Tremblay;

E-16 : CV de Dahi Ouaras, de Michel Millmore, de Simon Bouchand, d’Anne McSween et Frédéric Gagnon en liasse;

E-17 : En liasse, courriel du 3 mars 2015 de Spenza de Abritat, avec envoi du rapport complet daté du 5 janvier et copie du 6 janvier 2015,  lettre de Me Yves Laperrière où on dit d’enlever une mention;

E-18 : Appareil 2020 combo;

E-19 : Document émis par l’Alberta Health Services.

 

Lors de l’audience, les Bénéficiaires ont soumis les pièces suivantes:

 

B-1 : Lettre du 28 avril 2015 au CCAC;

B-2 : Lettre du 27 mai 2015;

B-3 : Document de Jonquière medic tel que le dit le témoin Alexandra Letourneau;

B-4 : Facture Expertbâtiment.ca;

B-5 : Rapport d’Expert A-17 (sans les annexes A, B, C) version apportée par le témoin Champagne lors de l’audience;

B-6 : CV de Louis Parent.

 

 

 

 

 


 

MANDAT ET JURIDICTION

 

[1]       Le Tribunal d’arbitrage est initialement saisi du dossier suite à une demande d’arbitrage par l’Entrepreneur, reçue par le Centre Canadien d’Arbitrage Commercial le 24 février 2015 et par la nomination de l’arbitre soussigné en date du 2 mars 2015. 

[2]       Aucune objection quant à la compétence du Tribunal d’arbitrage n’a été soulevée par les parties et la juridiction du Tribunal est alors confirmée.

 

LE DROIT

 

[3]       L’Entrepreneur a produit une demande d’arbitrage en vertu de l’Article 19 du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs (ci-après nommé le Règlement)

Le bénéficiaire ou l'entrepreneur, insatisfait d'une décision de l'administrateur, doit, pour que la garantie s'applique, soumettre le différend à l'arbitrage dans les 30 jours de la réception par poste recommandée de la décision de l'administrateur à moins que le bénéficiaire et l'entrepreneur ne s'entendent pour soumettre, dans ce même délai, le différend à un médiateur choisi sur une liste dressée par le ministre du Travail afin de tenter d'en arriver à une entente. Dans ce cas, le délai pour soumettre le différend à l'arbitrage est de 30 jours à compter de la réception par poste recommandée de l'avis du médiateur constatant l'échec total ou partiel de la médiation.

 

[4]       La Cour d’appel du Québec, dans l’affaire La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ Inc. c. Maryse Desindes et Yvan Larochelle, et René Blanchet mise en cause[1] a jugé que ce Règlement était d’ordre public :

[11] Le Règlement est d’ordre public. Il pose les conditions applicables aux personnes morales qui aspirent à administrer un plan de garantie. Il fixe les modalités et les limites du plan de garantie ainsi que, pour ses dispositions essentielles, le contenu du contrat de garantie souscrit par les bénéficiaires de la garantie, en l’occurrence, les intimés.

[12] L’appelante est autorisée par la Régie du bâtiment du Québec (la Régie) à agir comme administrateur d’un plan de garantie approuvé. Elle s’oblige, dès lors, à cautionner les obligations légales et contractuelles des entrepreneurs généraux qui adhèrent à son plan de garantie.

[13] Toutefois, cette obligation de caution n’est ni illimitée ni inconditionnelle. Elle

variera selon les circonstances factuelles […]

 


[5]       La Cour supérieure affirme dans Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l'APCHQ inc. c. Dupuis[2]

[75] Il est acquis au débat que l'arbitre doit trancher le litige suivant les règles de droit et qu'il doit tenir compte de la preuve déposée devant lui.  Il doit interpréter les dispositions du Règlement et les appliquer au cas qui lui est soumis. Il peut cependant faire appel aux règles de l'équité lorsque les circonstances le justifient. Cela signifie qu'il peut suppléer au silence du règlement ou l'interpréter de manière plus favorable à une partie.

 

[6]       L’Article 10 du Règlement, dans la version qui existait en 2009 au moment où le contrat de construction et de garantie a été conclu, stipule quoi consiste la couverture du Plan de garantie administré par l’Administrateur :

10.  La garantie d'un plan dans le cas de manquement de l'entrepreneur à ses obligations légales ou contractuelles après la réception du bâtiment doit couvrir:

 

  1°    le parachèvement des travaux relatifs au bâtiment et dénoncés, par écrit, au moment de la réception ou, tant que le bénéficiaire n'a pas emménagé, dans les 3 jours qui suivent la réception;

 

  2°    la réparation des vices et malfaçons apparents visés à l'article 2111 du Code civil et dénoncés, par écrit, au moment de la réception ou, tant que le bénéficiaire n'a pas emménagé, dans les 3 jours qui suivent la réception;

 

  3°    la réparation des malfaçons existantes et non apparentes au moment de la réception et découvertes dans l'année qui suit la réception, visées aux articles 2113 et 2120 du Code civil et dénoncées, par écrit, à l'entrepreneur et à l'administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte des malfaçons;

 

  4°    la réparation des vices cachés au sens de l'article 1726 ou de l'article 2103 du Code civil qui sont découverts dans les 3 ans suivant la réception du bâtiment et dénoncés, par écrit, à l'entrepreneur et à l'administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte des vices cachés au sens de l'article 1739 du Code civil;

 

  5°    la réparation des vices de conception, de construction ou de réalisation et des vices du sol, au sens de l'article 2118 du Code civil, qui apparaissent dans les 5 ans suivant la fin des travaux et dénoncés, par écrit, à l'entrepreneur et à l'administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte ou survenance du vice ou, en cas de vices ou de pertes graduelles, de leur première manifestation.

 


 

LES FAITS

[7]       Une visite des lieux s’est effectuée en cours d’audience au deuxième jour de trois.

[8]       Le 26 janvier 2015 (pièce A-15), l’Administrateur a rendu une décision accueillant en partie la réclamation des Bénéficiaires, affirmant que les situations observées sur place en rapport avec le point 1 de sa décision rencontraient tous les critères du vice majeur.

Il importe de noter qu’au moment de l’inspection, la maison était inoccupée, les bénéficiaires ayant décidé de quitter le bâtiment le 26 mai 2014

De plus, il fut convenu avec l’entrepreneur et les bénéficiaires que l’administrateur rendra sa décision avec les documents déposés au dossier, au surplus des documents reçus en date du 5 janvier 2015, et ce, bien que l’inspection ait eu lieu le 3 décembre 2014.

1. Rapport de EspertBâtiment.ca du 5 janvier 2015

-        Présence d’insectes et taux d’humidité anormalement élevé sous le prélart du sous-sol;

-        Absence de pare-vapeur sur le mur de fondation.

-        Présence de moisissure et autres contaminants bactériologiques.

Les faits

Il est de notre compréhension, à la lecture du rapport de l’expert, que son mandat visait à déterminer la présence de différents contaminants dans l’air, à savoir :

-     Moisissure et autre contaminants fongiques;

-     Présence de composés organiques volatils.

L’expert affirme qu’au Québec, aucune norme ne régit la qualité de l’air intérieur.

Nous comprenons que l’expert a récolté des échantillons sur place et les a fait analyser par la firme Eau-Air-Sol.

En ce qui a trait à la moisissure et autres contaminants fongiques, l’expert conclut à l’effet que la concentration de bactéries est anormalement élevée sur le plancher de béton du sous-sol et sur les murs de béton du sous-sol et qu’un foyer de contamination importante est présent.

Il mentionne que les correctifs suivants sont requis, à savoir :

-     Retirer le prélart du sous-sol;

-     Retirer l’isolant rigide au sous-sol qui n’est pas pare-vapeur;

-     Effectuer une décontamination complète de la résidence selon un protocole établi.

Analyse et Décision (point 1) - De l’avis de l’administrateur, les situations observées sur place en rapport avec le point 1 rencontrent tous les critères du vice majeur. Par conséquent, l’administrateur doit accueillir la demande de réclamation des bénéficiaires à l’égard de ce point.

[9]       Par lettre datée du 24 février 2015 (pièce A-16), l’Entrepreneur a déposé une demande d’arbitrage de cette décision auprès du Centre canadien d’arbitrage commercial (CCAC) en vertu de l’article 19 du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs.

[10]    Vu les nombreux éléments mis en preuve lors de l’audience sur plusieurs aspects de la maison des Bénéficiaires, le Tribunal d’arbitrage considère, pour la compréhension de la trame factuelle des évènements,

[10.1]    qu’il convient de débuter la trame de la preuve en commençant par celle des Bénéficiaires même si l’Entrepreneur a présenté sa preuve en premier à l’audience, puisque ce dernier conteste la décision de l’Administrateur qui a maintenu la réclamation des Bénéficiaires;

[10.2]    qu’il se doit de noter dès maintenant sur quoi porte le différend qu’il a à trancher, le tout, en vertu des motifs qui seront détaillés dans la partie « décision » des présentes:

[10.2.1]        la décision de l’Administrateur du 26 janvier 2015 accueillait une réclamation des Bénéficiaires comme vice majeur seulement, puisque le plan de garantie ne couvre que les vices majeurs dans la quatrième et cinquième année suivant la fin des travaux;

[10.2.2]        que parmi les nombreux objets de réclamation des Bénéficiaires, seul a été accueilli par l’Administrateur (point 1)

Présence d’insectes et taux d’humidité anormalement élevé sous le prélart du sous-sol;

Absence de pare-vapeur sur le mur de fondation.

Présence de moisissure […]

En ce qui a trait à la moisissure et autres contaminants fongiques, l’expert conclut à l’effet que la concentration de bactéries est anormalement élevée sur le plancher de béton du sous-sol et sur les murs de béton du sous-sol et qu’un foyer de contamination importante est présent. Il mentionne que les correctifs suivants sont requis, à savoir : Retirer le prélart du sous-sol; Retirer l’isolant rigide au sous-sol qui n’est pas pare-vapeur; Effectuer une décontamination complète de la résidence selon un protocole établi.

et l’Administrateur a rejeté les autres objets de réclamation;

[10.2.3]        seul l’Entrepreneur a porté en arbitrage cette décision qui n’a accueilli que le point 1, donc

10.2.3.1.             l’odeur, qui a fait l’objet de plusieurs témoignages exhaustifs et de rapports d’expert, n’est pas soumise à l’arbitrage puisque

10.2.3.1.1.             la réclamation quant à l’odeur n’a pas été reconnue par l’Administrateur comme vice majeur;

10.2.3.1.2.            que cette décision n’a pas été portée en arbitrage;

10.2.3.2.             les composés organiques volatils (COV), qui ont fait l’objet de plusieurs témoignages exhaustifs, ne sont pas soumis à l’arbitrage puisque

10.2.3.2.1.        la réclamation quant aux COV n’a pas été reconnue par l’Administrateur comme vice majeur;

10.2.3.2.2.        que cette décision n’a pas été portée en arbitrage.

Preuve des Bénéficiaires

[11]    Jusqu’en mai 2014, les Bénéficiaires vivaient dans leur maison avec cinq enfants, une sixième venant un week-end sur deux; les Bénéficiaires y avaient emménagé en décembre 2009.

[12]    Deux femmes de ménage venaient deux fois par semaine « pour que rien ne traîne ».

[13]    Des lapins sont arrivés sur les lieux à Pâques 2014[3], restés une semaine dans la maison puis transférés dans le garage (jusqu’au déménagement).

[14]    Trois chiens habitent aussi sur les lieux (deux couchent à l’intérieur, les femelles ont eu des portées), et quelques occupants font de l’équitation.

[15]    En décembre 2013, la mère de la Bénéficiaire vient visiter sa fille et lui fait part que son manteau mis au sous-sol s’est imprégné d’une mauvaise odeur et lui dit : « quand on va chez vous ça pue ».

[16]    A partir de janvier 2014, les Bénéficiaires ont cherché la source de l’odeur, ils ont ouvert les fenêtres même en hiver, monté sur le toit, etc., pour trouver la source de l’odeur. En mars 2014, ils ont cru que la source était le dégel printanier.

[17]    La Bénéficiaire témoigne à l’effet qu’ils ont fait beaucoup d’efforts pour essayer de trouver la cause de l’odeur.

[18]    A la même époque, ils souffraient tout comme leurs enfants de multiples problèmes de santé, les « enfants toussaient comme des fumeurs avec des pompes », la Bénéficiaire faisait des sinusites, le Bénéficiaire se fit diagnostiquer une amygdalite : « tout le temps on était toujours malade ».

[19]    Le Bénéficiaire dit que quand la famille a emménagé dans cette maison, ils étaient « pas pires » mais après avoir emménagé, les enfants ont eu le nez qui coulait et « on les entendait siller ». Il ajoute que ça ne pouvait pas être les chiens puisqu’ils les avaient dans leur ancienne maison et qu’il n’y avait pas de problèmes.

[20]    Il dit qu’il travaillait à l’extérieur, il partait au début de la semaine malade et revenait à la fin de la semaine « pas pire » mais redevenait malade chez lui, il avait le nez bouché, mal de gorge, il était sur les antibiotiques tout le temps.

[21]    Ils font venir Louis Parent, expert en bâtiment en avril 2014.

[22]    La preuve montre (rapport pièce A-9) que les prélèvements que Louis Parent a pris l’ont été le 28 avril 2014, ce dernier a témoigné avoir commencé à 8 :30 du matin, ce qui situe donc la date de visite de Louis Parent et la période de la journée.

[23]    Le même 28 avril 2014 (pièce A-4.1), les Bénéficiaires envoient une mise en demeure à l’Entrepreneur par l’entremise de leurs procureurs :

« Notre client, depuis quelques semaines, a fait face à des problèmes d’odeur de moisissure et d’égout qui rendre la situation très problématique. Depuis, notre client a fait faire certaines vérifications et il appert que plusieurs anomalies subsistent dans la construction de sa résidence. […]

5. Isolation mur de fondation (styrofoam) […]

En conséquence, en vertu de l’article 1739 du Code civil du Québec, nous vous mettons en demeure de venir constater l’étendue et les raisons des différentes problématiques dans les cinq (5) jours […]

[24]    Alors que la Bénéficiaire croyait « avoir un problème d’odeur », elle envoie une réclamation à l’Administrateur car « j’aurais jamais pensé que c’était si pire que ça ».

[25]    Le Tribunal d’arbitrage lui a posé la question : «  quand est-ce que vous avez pensé que c’était si pire que ça? », la Bénéficiaire a répondu : « quand Monsieur Parent a dit que les résultats étaient nocifs avec son rapport ».

[26]    La preuve montre (rapport A-9) que les prélèvements ont été pris le 28 avril 2014, que le rapport du laboratoire est daté du 1er mai 2014, et le rapport de Louis Parent est daté du 9 mai 2014. Le Tribunal d’arbitrage conclut que cette conversation avec « Monsieur Parent » quant aux résultats nocifs n’a pu avoir lieu qu’à partir du 1er mai 2014.

[27]    Les Bénéficiaires quittent leur maison le 26 mai 2014 à cause des « résultats nocifs » de la qualité de l’air.

[28]    La Bénéficiaire est retournée sur les lieux après avoir quitté en mai 2014, elle affirme que « ça sent fort, mauvais, chimique, c’est terrible ».

[29]    Par lettre datée du 6 août 2014 (pièce A-4), les Bénéficiaires envoient une dénonciation écrite. Cette lettre fut reçue en août par l’Entrepreneur, et, d’après la preuve à l’audience[4], le 1er octobre 2014 par l’Administrateur :

Nous représentons les intérêts de Mme Alexandra Létourneau et M. Louis Bouchard concernant les vices de construction affectant leur résidence sise au 1935 rue des Camélias, à Jonquière, résidence que vous avez construite et livrée à nos clients à la mi-décembre 2009. En complément à la mise en demeure du 28 avril 2014 […] veuillez trouver sous pli les documents suivants, le tout pour valoir à  dénonciation au sens de l’article 1739 du Code Civil du Québec :

a)      Rapport technique de Mme Christiane Côté, architecte, du 9 juin 2014;

b)      Rapport de visite de la firme Inspection Immotech en date du 26 mai 2014;

c)      Rapport de synthèse d’évaluation de qualité de l’air intérieur pour moisissures du 1er mai 2014;

d)      Rapport préliminaire d’évaluation de qualité de l’air intérieur pour moisissures et bactéries du 6 mai 2014;

e)      Rapport d’évaluation pour moisissures et bactéries de la firme Inspection Immotech suite à ces prélèvement.

Ces tests et examens effectués à compter de mai 2014 révèlent l’importance des problèmes, de même que les causes probables de cette situation.

Évidemment, ces rapports et examens devront être complétés. Dès lors, vous constaterez, à la lecture de ces documents, que la situation prévalant à cette résidence est très grave, avec une quantité importante de levure à 42% et la présence de penicillium à un pourcentage de 31%.

Cette situation a forcé l’évacuation des lieux, par nos clients et leurs cinq (5) enfants, en les obligeant à se reloger ailleurs et ce, dès le 26 mai 2014.

[30]    Bien que cette lettre soit datée du 6 août, la preuve révèle que les experts des assureurs de l’Entrepreneur étaient déjà en possession du rapport Immotech/Louis Parent (pièce A-9) dès mai 2014 (à tout le moins, au 26 juin), comme ci-après détaillé.

 

Louis Parent

[31]    Louis Parent est produit comme témoin expert par les Bénéficiaires. Il est membre de l’ordre des technologues professionnels du Québec depuis 1997.

[32]    Il a suivi une formation sur la prise d’échantillons et sur la qualité de l’air. Son CV (pièce B-6) mentionne : « 2012 Formation sur la qualité de l’air, la présence de moisissures, l’investigation, le prélèvement et l’analyse, donnée par LAB’EAU-AIR-SOL, laboratoire accrédité par le (M.D.D.E.P. ministère du Développement durable en Environnement et des Parcs), (L’I.R.S.S.T. L’institut de recherche Robert-Sauvé en santé et en sécurité du travail) et (C.E.A.E.Q. centre d’expertise et analyse environnementale du Québec ».

[33]    Il a suivi une formation avec le protocole du laboratoire pour prendre les échantillons. Il a aussi suivi un cour sur l’interprétation des résultats.

[34]    Le Tribunal d’arbitrage l’a reconnu comme expert technologue en bâtiment, et comme expert sur la qualité de l’air et présence de moisissures.

[35]    Un représentant de Construction Béchard (l’identité et le rôle de cette compagnie n’ont pas été explicités à l’audience) lui a demandé d’aller sur les lieux, une problématique d’ « odeur persistante au niveau de l’intérieur du bâtiment » ayant été dénoncée.

[36]    En contre-interrogatoire, il dit qu’il est intervenu pour un problème d’odeur, puis on a pris les moyens pour chercher la cause, et qu’au 28 avril, jour de sa première visite, il était en « mode de recherche ».

[37]    Il dit qu’en ouvrant la porte, il y avait une odeur « causée par quoi je ne le sais pas, on peut penser à n’importe quoi », « je n’ai plus de mots pour vous le dire ».

[38]    Vu l’absence de traces de moisissure et d’humidité, et il n’a pas vu de signe d’infiltration, il a conclu à une possibilité d’ « odeur par levure ».

[39]    C’est pour cela que le 28 avril, il a pris des prélèvements de qualité de l’air, car il a recommandé à ses clients de faire des tests pour savoir s’il y avait des moisissures dans l’air.

[40]    Il a produit un rapport daté du 9 mai 2014 (pièce A-9, produite en couleur à l’audience), intitulé « Rapport d’évaluation pour moisissures et bactéries ».

Le Mandat - À la suite du mandat que vous nous avez confié, soit de procéder à l’analyse de l’air et de poussière contenue à l’intérieur de votre résidence, nous vous informons des analyses effectuées par le laboratoire LAB’EAU-AIR-SOL. […]

La Méthodologie - À votre résidence, nous avons effectué des prélèvements de poussière et d’air sur cassette. Les prélèvements ont été en accord avec le protocole de prise d’échantillonnages et analyse élaborée par le laboratoire LAB’EAU-AIR-SOL. Les travaux de décontamination et de nettoyage qui devront être réalisés seront localisés au niveau des pièces du rez-de-chaussée ainsi qu’au sous-sol.

Avant-propos - Votre bâtiment est affecté par une quantité importante de levure à 42%. Les odeurs que vous percevez à l’intérieur du bâtiment, et plus particulièrement au rez-de-chaussée, émanent en grande partie de la présence de ces levures. La présence de penicillium a été détectée à un pourcentage de 31%. Le penicillium est un irritant bien connu au niveau du système respiratoire. Votre bâtiment devra subir une décontamination de type 2 [note du soussigné, définit plus loin comme « Réduire la concentration de spore dans l’air »…] Les moisissures et levures sont des microorganismes vivants pouvant nuire à la santé des occupants.

[41]    Il dit à l’audience qu’avant de recommander la prise d’échantillons pour les moisissures, il a demandé de ventiler le bâtiment, de mettre l’échangeur d’air à haut débit et de ventiler le bâtiment, mais ses clients lui ont dit que cela ne changeait rien, qu’ils percevaient toujours la même odeur.

[42]    Est joint à ce rapport, un « Rapport synthèse d’évaluation de qualité de l’air intérieur pour moisissures », suite à des prélèvements effectués le 28 avril 2014.

[43]    Un deuxième rapport est joint, « Rapport préliminaire d’évaluation de qualité de l’air intérieur pour moisissures et bactéries » suite à des prélèvements effectués le 28 avril 2014[5].

 

[44]    Dans les deux rapports de LAB’EAU-AIR-SOL, les risques associés A, B et C sont ainsi définis :

[45]    Aussi,

[45.1]    le premier rapport indique ce qui suit : « Il est important de noter que les résultats quantitatifs et qualitatifs ci-dessus ne représentent que le profil de l’environnement intérieur à un temps donné relativement bref. Ce profil peut être sujet à d’importantes variations dans un laps de temps plus ou moins court en fonction des conditions extérieures, de la ventilation, etc. Ce faisant, les résultats doivent être interprétés avec précaution et l’inspection des lieux, la revue de l’historique du bâtiment et l’évaluation de l’état de santé des occupants sont nécessaires pour confirmer le diagnostic et doivent être réalisés par un ou des professionnels compétents »;

[45.2]    le deuxième rapport indique ce qui suit : « Pour être interprétés, ces résultats d’analyse de laboratoire doivent être cumulés aux observations d’une personne compétente ayant procédé à une investigation complète des lieux, de l’historique du bâtiment et à un questionnaire sur l’état de santé des occupants ».

[46]    Il note à l’audience que ce qui a retenu son attention est la présence d’occupants malades d’une part, et, d’autre part, le laboratoire avait accordé une cote de « 7 » ou anormal, quant à la présence de penicillium.

[47]    Il retourne sur les lieux le 21 mai 2014 et produit le 26 mai 2014 un « rapport de visite » (pièce A-6, produite en couleur à l’audience) :

Notre mandat consiste à effectuer une expertise sur la cause la plus probable pour expliquer le problème d’une forte odeur persistante à l’intérieur du bâtiment. Préalablement, un rapport d’évaluation pour moisissures et bactéries a été produit le 9 mai 2014. Le 21 mai 2014, nous avons procédé à l’ouverture de murs et planchers, et ce, afin de pouvoir expertiser davantage le bâtiment.

[48]    Il constate, entre autres, un problème d’isolation du mur de fondation et d’étanchéité du bâtiment :

[48.1]    1. L’isolation du mur de fondation

1.1 L’entrepreneur a isolé les murs de la fondation à l’aide d’un isolant rigide de type 2, expansé de la compagnie LEGERLITE d’une épaisseur de 2’’ et ¾’’. Ce type d’isolant a une perméabilité à la vapeur d’eau de 200 ng (ng/Pa.s.m2). Lors de l’installation de l’isolant, l’entrepreneur doit, conformément à l’’article 9.25.4 du Code de construction du Québec[6] 2005, faire l’installation d’un pare-vapeur.

1.2 Le plan de construction indique que l’isolant doit recouvrir des murs de la fondation. L’entrepreneur a arrêté l’isolant à 18 pouces de la dalle de béton.

1.3 À plusieurs endroits, on peut observer la présence d’espace non isolé entre deux feuilles. Les feuilles d’isolant n’ont pas été correctement installées, car on peut aisément soulever les feuilles ou les déplacer, ce qui contrevient aux articles 5.3, 9.25.2 et 9.25.4 du Code de construction du Québec 2005.

[48.1.1]        à l’audience, il ajoute que le problème est que le produit n’est pas muni d’une pellicule pare-vapeur, l’air humide va donc aller à la grandeur sur le mur de fondation;

[48.1.2]        il montre, entre autres, les photos 5 et 6 de son rapport produit en A-6, avec les commentaires suivants :

48.1.2.1.     5. Ouverture effectuée sur le mur de fondation adjacent au garage. On peut observer un espace non isolé entre deux feuilles. On peut observer l’absence d’un pare-vapeur sur l’isolant. Les joints entre les feuilles ne sont pas scellés.

48.1.2.2.     6. Ouverture effectuée sur le mur de fondation adjacent au garage. On peut observer un espace non isolé entre deux feuilles. On peut observer l’absence d’un pare-vapeur sur l’isolant. Les joints entre les feuilles ne sont pas scellés.

[48.1.3]        il affirme qu’au niveau de la qualité de la pose, outre le fait qu’il y ait des jours, des espaces, on voit des espaces entre les panneaux, et s’il y a un espace, c’est qu’il n’y a pas d’isolant, ce qui est contre le Code National du Bâtiment;

[48.1.4]        vu les déficiences quant à l’isolant, vu l’odeur, il a recommandé de faire d’autres tests au niveau des COV et des moisissures;

 

[48.2]    4. L’étanchéité du bâtiment :

4.1 L’étanchéité entre la résidence et le garage est déficiente. L’air peut circuler par la cloison du mur, ce qui contrevient à l’article 9.10.9.16 du Code de construction du Québec 2005

4.2 Le bâtiment comporte un taux de changement d’air à l’heure de 3.40 (cha). Nous sommes d’avis que l’étanchéité du bâtiment est déficiente pour l’année de construction.

[48.2.1]        à l’audience, Louis Parent précise que s’il y a moins d’étanchéité, la moisissure ou le contaminant va entrer plus facilement vu la plus grande circulation d’air à l’intérieur de la maison.

[48.2.2]        il affirme qu’il faut que le pare gaz entre le garage et le bâtiment soit refait, et, en réponse à une question, que le manque d’étanchéité peut avoir un impact sur les moisissures, s’il y en a dans le garage, c’est une entrée potentielle d’air contaminé.

[49]    Louis Parent conclut :

[…] Le fait d’installer un isolant rigide non pare-vapeur aux murs de fondations résulte d’une déficience du bâtiment. Un pare-vapeur aurait dû être mis en place par-dessus l’isolation. Le fait que l’isolant ne soit pas bien fixé aux murs de la fondation est, selon nous, une grave lacune d’installation. (nos soulignés)

[50]    Louis Parent est retourné sur les lieux le 22 septembre 2014 avec les auteurs du rapport Champagne (pièce A-17), dans le but de parfaire ses connaissances quant à l’état du bâtiment et les accompagner.

[51]    À cette date, il y avait la même odeur, il a mis un filtre à charbon pour respirer.

[52]    À la question à savoir s’il accepterait d’habiter dans cette maison, il répond que son front lui piquait sur les lieux « le problème que j’ai quand je sue, le front me pique, moi je n’aurais pas habité là ».

[53]    En contre-interrogatoire, il affirme, quant à l’évacuation, que chaque personne est différente et va réagir d’une façon différente; quant à lui le front lui piquait.

[54]    Dans le doute, il préfère recommander de quitter les lieux, comme membre d’un ordre professionnel, il doit protéger le public; Madame lui a dit « j’ai des enfants, ils sont malades », il a suggéré à Madame par prévention de quitter les lieux, après, d’autres experts et les tribunaux « viendront » mais dans le doute on doit agir.

[55]    Il ajoute que c’est toujours le gros bon sens qui prime avant tout : quand on rentre dans une maison et qu’on se trouve devant une situation qui n’est pas normale même si on ne sait pas ce que c’est, on doit agir.

[56]    La littérature dit que quand on agit à temps on sauve des vies, on ne doit pas attendre les résultats scientifiques, après les avocats les juges pourront juger du bien-fondé de son intervention.

[57]    Il précise « moi j’ai dit personnellement je quitterais la maison ».

[58]    Quant à l’état de propreté des lieux avant le 26 mai, il répond que c’était standard, que c’était habité avec des enfants, il n’a remarqué rien de spécial, pas de linge qui trainait.

[59]    En contre-interrogatoire, il explique que lors de sa formation, on lui a remis un cahier sur la procédure à suivre pour le prélèvement d’échantillons. Il a demandé à la Bénéficiaire de fermer la ventilation et les fenêtres douze heures avant la prise d’échantillons, il s’est présenté à 8:30 du matin, il a mis des gants, mis la cassette au niveau des gens malades avec un trépied, etc.

[60]    Enfin, à la question « vous recommandez une liste de travaux, est-ce que cela va régler tous les problèmes », il répond que ce sont des travaux qui auraient dû être fait selon le Code [national du Bâtiment] de 2005 et les plans.

 

Alexandre Champagne

[61]    Alexandre Champagne est produit comme témoin expert par les Bénéficiaires. Le Tribunal d’arbitrage l’a reconnu comme expert en génie chimique. Il a co-signé le rapport produit sous la pièce A-17, étant à l’époque de la signature, ingénieur junior[7].

[62]    Il a été amplement question de COV (composés organiques volatils) dans son témoignage, de l’appareil PhotoVac (et de sa calibration) qui prend la mesure des parties par millier (PPM), mais le Tribunal d’arbitrage n’est pas saisi de cette problématique alléguée, qui a été rejetée par l’Administrateur et pour laquelle décision, aucune demande d’arbitrage en vertu du Règlement n’a été faite par les Bénéficiaires.

[63]    Il s’est rendu sur les lieux et dit avoir senti une « odeur jamais sentie de ma vie ».

[64]    Il est entré sans protection respiratoire pour chercher d’où venait l’odeur puis il est sorti après cinq minutes car il avait la gorge toute irritée.

[65]    Il est rentré avec un masque respiratoire avec une cartouche de protection contre les COV et avec ce masque il ne ressentait plus rien.

[66]    Il dit qu’il n’aurait jamais accepté d’habiter dans cette maison sans avoir de masque protecteur contre les COV, mais admet ne pas avoir déterminé lesquels sont présents (« il y en a 70,000 »).

[67]    Il est resté sur les lieux de six à sept heures avec Michel Ann Champagne, c’est elle qui lui a dit où prélever les échantillons.

[68]    Son rapport daté du 5 janvier 2015 contient en annexes A et B, des rapports d’analyse d’échantillons pris le 22 septembre 2014,

[68.1]    le premier intitulé : « Rapport préliminaire d’évaluation de qualité de l’air intérieur pour moisissures et bactéries, Type : Échantillon d’air par impaction sur gélose » (note, les Classes de risque associé A, B et C sont définies de même façon que ci-haut, paragraphe [44])

 

[68.2]    le second intitulé : « Rapport préliminaire d’évaluation de qualité de l’air intérieur pour moisissures, Type : Échantillon de surface »

.

 

[69]    Son rapport daté du 5 janvier 2015 débute ainsi :

Notre mandat consistait à effectuer une investigation complète des lieux cités en référence afin de :

-          Effectuer l’investigation et les prélèvements nécessaires afin déterminer la présence de moisissures ou d’autres contaminants bactériologiques;

-          Effectuer l’investigation et les prélèvements nécessaires afin de déterminer la présence de composé organique volatil pouvant émaner des matériaux de construction ou de finition;

-          Produire un rapport décrivant la situation, identifiant les contaminations fongiques et les composés organiques volatils présents dans la résidence. Énoncer les correctifs nécessaires. […]

Afin d’assurer un contrôle microbien de l’environnement intérieur, plusieurs types d’échantillons ont été prélevés en différents endroits soit :

o   Trois (3) prélèvements d’air avec impaction sur milieu gélosé, dont un (1) contrôle extérieur;

o   Trois (3) prélèvements de surface (1 m2) type éponge.

Tous ces types d’échantillons sont primordiaux afin de bien définir tous les types de moisissures et/ou de levures pouvant être présents dans l’air intérieur afin d’associer les risques probables de chacun de ces contaminants sur la santé humaine.

Les échantillons pour analyse moisissure et bactéries ont été acheminés au laboratoire Lab’Eau-Air-Sol pour fin de mise en culture  et analyse. Lab-Eau-Air-Sol est le seul laboratoire au Québec à être accrédité en microbiologie de l’air, 1320-492, ISO/CEI 1725, par le centre d’expertise en analyse environnementale du Québec, par le Ministère du Développement durable, de l’Environnement, de la Faune et des Parcs du Québec (M.D.D.E.P.) par l’Institut de recherche Robert-Sauvé en santé et sécurité du travail (IRSST) et à offrir un service de prélèvement et d’expertise par des experts certifiés Q.A.I. par la Société canadienne d’Hypothèque et de Logement (SCHL). De plus, ce laboratoire est agréé par la commission des partenaires du travail du Québec en tant qu’organisme formateur.

Se poursuit ainsi :

                 […] Cette situation porte à croire que la présence de l’isolant rigide non pare-vapeur appliqué directement sur les murs de béton engendre de la condensation et que cette humidité est suffisante pour soutenir la croissance et la prolifération fongique […]

     6.1 Qualité de l’air (moisissures)

Afin de rétablir la qualité de l’air intérieur, les mesures suivantes devront être suivies :

-      Retirer le prélart au sous-sol

-      L’isolant rigide au sous-sol

-      Effectuer une décontamination complète de la résidence selon un protocole établi

Et se termine ainsi :

De plus, des problèmes directement liés au bâtiment ont été observés, notamment l’absence d’un pare-vapeur au mur de fondation […] Quant à la qualité de l’air intérieur, des foyers de contamination sont présents dans le sous-sol et peuvent être dus à l’absence de pare-vapeur sur les murs de béton […].

[69A] En contre-interrogatoire, il répond quant à la confusion alléguée par l’expert Millmore dans son rapport quant aux numéros d’échantillons, qu’il y avait tout simplement eu une erreur dans la transcription des numéros, puisque dans les résultats, les lieux de prélèvements de ces échantillons avaient été clairement identifiés, ce qui élimine toute confusion. De plus, il affirme avoir pris un échantillon à l’extérieur qui a été analysé (voir le paragraphe [137] ci-après).


 

Preuve de l’Entrepreneur

Laboratoire GMS/Anne McSween

[70]    Le laboratoire Microbiologie du bâtiment GMS a effectué des analyses sur des échantillons « afin de statuer sur la présence de contamination fongiques (levures et moisissures) » qui lui ont été remis le 30 juin 2014, analyses produites sous la pièce E-3.

 

[71]    Anne McSween est biologiste de formation et a été reconnue par le Tribunal comme témoin expert, technicienne et biologiste en gestion parasitaire. Elle a témoigné par téléphone, son témoignage entendu par toutes les personnes présentes dans la salle d’audience.

[72]    Elle a fait les rapports d’expertise produits sous E-3. Elle ajoute que ce n’est pas elle qui fait l’interprétation ou la contextualisation  des résultats, elle n’est pas allée sur les lieux. Ce n’est pas un rapport d’expertise, mais un rapport de résultat.

[73]    La contextualisation est importante, une orange pourrie, une tranche de pain, l’insalubrité, peuvent influer sur les résultats.

[74]    Il faut donc en plus, inspecter les lieux, connaître l’humidité présente, on ne peut pas seulement regarder la fiche des résultats.

[75]    Elle affirme que pour justifier que l’on doive quitter une maison, les critères sont qu’une personne soit malade, que la problématique soit considérée et qu’enfin, des prélèvements soit positifs, que l’on voit des moisissures (visibles).

[76]    En contre-interrogatoire, elle réitère n’avoir qu’analysé et non interprété les résultats puisqu’elle n’est pas allée sur les lieux.

 

Frédéric Gagnon

[77]    Frédéric Gagnon, reconnu comme témoin expert ingénieur civil, en matière de structure et de matériaux, a témoigné et produit deux rapports.

[78]    Il a reçu son mandat des assureurs de l’Entrepreneur, de vérifier si l’odeur était reliée à la construction du bâtiment.

[79]    Sa lettre à « M. André Néron RSA » du 8 octobre 2014 débute ainsi « Depuis que le mandat nous a été confié le 30 mai 2014, nous avons effectué trois examens des lieux. Ces examens se sont déroulés les 4 et 26 juin de même que le 13 août 2014. » (pièce E-12).

[80]    Sa première visite est le 4 juin 2014, en présence d’André Néron (représentant l’assurance), l’Entrepreneur, un « représentant des propriétaires » et un jeune ingénieur.

[81]    En entrant dans le hall d’entrée, il dit qu’« on a une odeur d’humidité qu’on détecte rapidement », mais on ne la perçoit pas dans le rez de chaussée.

[82]    Il n’a pas trouvé de source d’humidité, pas de cerne d’eau.

[83]    Alors qu’il y une salle de lavage près de l’entrée, il dit qu’il y a une odeur d’humidité de linge.

[84]    Il y a fait une ouverture et n’a pas vu de signe.

[85]    Il a conclu que oui, il y avait une « source d’odeur », mais il n’était pas un expert en moisissure, c’est pour cela qu’il a mis en contact l’expert Michel Millmore.

[86]    Dans sa lettre « opinion préliminaire » à « M. André Néron RSA » du 8 octobre 2014 (pièce E-12) il écrit :

Le 26 juin 2014,, monsieur Michel Millmore de notre firme s’est rendu sur place afin d’examiner les lieux, prélever des échantillons d’air et d’effectuer des frottis sur les différentes surfaces. Lors de cette visite, une faible odeur d’humidité avait encore été perçue dans le secteur du hall d’entrée.

Les résultats d’analyse fongique réalisés sur les échantillons prélevés ont démontré qu’il y avait un profil fongique anormal dans le hall d’entrée. En effet, des moisissures appartenant au phénotype Penicilium Chrysogenum ont été mesurées en quantité relativement limitée dans l’air de la résidence, alors qu’elles sont absentes de l’air extérieur. La source de ce phénomène demeurait toutefois inconnue.

[87]    Il a suggéré de sortir le contenu des lieux, et finalement André Néron lui a dit qu’on a tout sorti et qu’il y a encore l’odeur. Dans sa lettre du 8 octobre 2014 il avait écrit :

Afin d’éliminer différentes sources possibles d’odeur ou d’humidité, les meubles et vêtements ainsi que l’ensemble laveuse/sécheuse ont été retirés de la résidence. Un examen des conduites de plomberie et du drain de fondation aurait également été effectué. Ces examens n’auraient permis de révéler aucun problème particulier avec ces équipements.

[88]    Quant au mur de fondation et l’isolant rigide il affirme à l’audience :

« ce n’est pas un pare-vapeur au niveau du Code National du Bâtiment. On peut dire que cet isolant-là est une non-conformité au Code mais il n’y a aucun signe que ça cause un problème, il fallait faire des ouvertures pour le voir ».

[89]    Il n’a pas vu de vermines.

[90]    A sa première visite le 4 juin, la maison était presque vide, elle n’était plus habitée.

[91]    Avant la formule de politesse d’usage, il termine ainsi son opinion préliminaire du 8 octobre 2014 (pièce E-12) :

Les examens et travaux réalisés à ce jour n’ont pas permis d’identifier la cause des odeurs perçues dans le hall d’entrée de la résidence. Nous sommes d’avis qu’il est peu pertinent de s’attarder à la dalle du sous-sol ou encore aux matériaux granulaires sous-jacents, puisqu’il n’y a pas d’odeur particulière notée dans ce secteur du bâtiment. En effet, nous croyons que l’investigation [notre ajout : pour l’odeur] devrait plutôt être orientée dans le secteur du hall d’entrée, soit là où les odeurs ont été perçues. À cet effet, un dégarnissage plus important des murs et plancher au niveau du rez-de-chaussée pourrait être effectué afin de tenter à nouveau d’identifier s’il y a  présence ou non d’humidité ou d’une autre source d’odeur désagréable. Il serait également pertinent d’investiguer davantage à l’extérieur du bâtiment, près du mur extérieur du hall d’entrée. Il est toutefois à noter qu’’il n’y a pas de certitude quant à l’efficacité de ces investigations supplémentaires et que celles-ci pourraient entraîner des dommages relativement importants à l’intérieur de la résidence. Dans l’attente de vos directives pour la suite du dossier […]

[92]    Par lettre du 29 avril 2015 (pièce E-6), il écrit quant au pare-vapeur (en réponse au rapport Champagne pièce A-17) :

Dans les autres observations, ils mentionnent aussi l’absence de pare-vapeur sur les murs de fondation. En effet, l’isolant en panneau de polystyrène rigide installé sur la face intérieure des murs de fondation ne peut pas être considéré comme une membrane pare-vapeur. Cet isolant est fait d’un polystyrène expansé et a une épaisseur de 2 ½ pouces. Ces panneaux, de marque Thermolite type II, offrent une résistance thermique de R-10. Ce produit offre aussi une résistance à la perméabilité à la vapeur d’eau, mais ne rencontre toutefois pas les critères de performance exigés par le CODE NATIONAL DU BATIMENT DU CANADA pour être considéré comme une protection pare-vapeur. Nous jugeons tout de même important de mentionner que lors de nos examens, différentes ouvertures avaient été pratiquées au niveau des revêtements de finition des murs de fondation et aucun cerne ou autre signe de problématique n’avait été observé. Dans ces circonstances, nous avions jugé qu’il n’y avait pas de démonstration que l’élément non conforme entraînait une problématique particulière […] Il s’avère malheureusement que les examens et travaux réalisés à ce jour ne permettent pas d’identifier la cause des odeurs perçues dans le hall d’entrée de la résidence.


Dahi Ouaras

[93]    Dahi Ouaras a été reconnu comme témoin expert/ingénieur civil en structure des bâtiments (aussi en structure industrielle et gestion d’actifs).

[94]    Il a fait sa première visite en octobre 2014, suite à une problématique de senteur.

[95]    Il a demandé un forage sous la dalle car il se demandait s’il y avait de l’eau sous la dalle, mais le forage s’est rapidement arrêté puisqu’on était sur du « gros rochement » et on ne pouvait pas forer.

[96]    Il y a vu le sable, qui n’était pas humide.

[97]    Il cherchait des odeurs dans le sol mais rien.

[98]    Le sol n’avait rien d’anormal, il n’y avait rien de particulier donc cette piste était écartée.

[99]    La dalle est bien isolée et il n’y aucune risque que l’humidité monte.

[100] Il a regardé les ouvertures déjà faites (il n’a rien démoli) dans les murs et entretoit, il n’a pas vu d’indices de moisissures visuellement.

[101] Il affirme :

« Selon mon expérience, je me suis dit ça va pas être facile, je n’ai pas vu d’indices au niveau des moisissures, rien de visuel, cette maison n’a pas de problème d’infiltration d’eau, car on le voit dans les ouvertures il doit y avoir des indices, il y a des critères pour le béton, si on voit de cernes, ou des traces blanches, il y aurait de l’humidité, mais je n’ai vu nulle part, aucune cerne, aucune fissure, aucune infiltration ».

[102] Il a regardé autour de la maison et il n’a rien vu de particulier.

[103] Quant à la senteur, en octobre 2014, il y avait une légère senteur ammoniaquée à l’entrée, pour lui, ça sentait l’urine de chien.

[104] L’odeur est à l’entrée, dans une zone de 5 pieds par 5 pieds, quand on s’éloigne il n’y a plus rien.

[105] Ça sentait le renfermé[8], il n’y avait pas d’échangeur d’air.

[106] Il est retourné en août 2015 pour compléter son rapport et répondre aux nouveaux points soulevés par l’expert Champagne.

[107] Il n’a pas contacté l’expert Champagne.

[108] Il n’a pas vu d’insectes sous le prélart, il n’y avait pas de cerne, pas de trace d’humidité, pas d’efflorescence, pas d’humidité qui monte.

[109] Il affirme à l’audience « le problème à mon sens, il y a un problème à quelque part mais pas dans les matériaux ou dans la méthode de construction », en ajoutant faire une différence entre les deux, car on peut avoir une défaillance dans l’une ou l’autre.

[110] Il n’a relevé aucun problème au niveau de la peinture (par exemple, de la peinture qui cloquerait), ou de fissuration dans le placoplâtre, aucune source d’infiltration ou de moisissures visibles.

[111] Quant à l’isolant, il affirme :

« on constate que l’isolant ne se rend pas au plancher, ce n’est pas normal, mais ça n’influe pas la problématique, ça ne met pas en péril sur le devenir de la maison ».

[112] Quant à la cause de l’odeur, « on ne sait pas la cause ». Il n’est pas expert mais il peut y avoir plusieurs facteurs, le taux d’humidité extérieure, s’il y a beaucoup de pluie par exemple.

[113] A la question, si la cause n’est pas à l’extérieur, ne peut-on pas conclure que la cause est à l’intérieur de la maison, il répond que la cause est peut-être les habitudes de vie des occupants, telles les douches, les plantations, les chiens, mais ceci dit comme généralité et non comme jugement de valeurs.

[114] En contre-interrogatoire, il dit qu’il n’a pas fait de nouvelles ouvertures dans les murs, mais il affirme que c’est fort probable qu’au niveau de laine et du placoplatre même si « ça » sèche, on aurait vu des traces après deux ans.

[115] [Réservé]

[116] Il avait écrit un rapport d’étape le 10 décembre 2014 (pièce E-4) :

Bonjour Maitre Gagnon, Suite à votre demande, en date du 8 décembre, ci-joint un bref résumé de ma visite [… (Note : aucune date)] Lors de ma visite, il y avait deux ouvertures d’observation, effectuées par d’autres, dans la dalle de béton au sous-sol. Je me suis attardé sur les points suivants :

1. analyse du sol accessible

2. humidité du sol

3. senteur du matériel.

Parmi les points d’observations :

1- À l’extérieur

a. Topographie du terrain permettant l’accumulation d’eau vers l’édifice,

b. Aucune fissure d’observée dans le solage de béton,

c. Aucune fissure d’observée dans le revêtement de façade en brique.

2- À l’intérieur (dans les ouvertures de mur déjà effectuées)

a. Béton de bonne consistance selon le test au marteau, qui laisse valoir visuellement un béton de bonne qualité,

b. Pas de fissure dans le béton,

c. Pas de suintement ou infiltration dans le béton,

d. Pas de zone d’altération dans le béton laissant présager un béton avec infiltration d’eau

e. Dans le secteur de l’entrée (vestibule) une odeur ammoniaquée, bien perceptible au plancher de l’étage (bien délimité au niveau du plancher et à un endroit bien précis).

Selon mes observations, la qualité d’exécution des travaux des parties inspectées me semble bonne à très bonne.

[…] Aucune senteur particulière ne fut perceptible. De manière générale, la senteur dans l’édifice ne me semblait pas particulière lors de la visite. […] On n’arrive pas à détecter une source d’odeur particulière.

Il aurait fallu faire d’autres ouvertures. Mais une telle recherche serait hasardeux et n’assurerait pas de résultats nécessairement concluants sans les compter les coûts reliés.

[117] La date de sa première visite apparaît dans le rapport du 16 août 2015 (pièce E7) :

Les services de Dahi Ouaras ont été retenus par Me Éric Gagnon pour procéder à l’analyse d’un problème de senteur, humidité et moisissure dans une résidence sise au 1935 rue des Camélias Jonquière et propriété de M. Louis Bouchard et Mme Alexandra Letourneau. Le présent rapport a été rédigé le 16 août 2015 par M. Dahi Ouaras, ing suite aux visites effectuées sur les lieux le 30 octobre 2014 et le 12 août 2015.

[118] Il écrit : « Nous n’avons aucune source probable d’infiltration d’eau ou d’humidité ».

[119] Voici la fin du rapport de l’expert Ouaras :

Nous estimons que le rapport d’Expertbâtiment fait des observations et constatations qualitatives mais non quantitatives. Et ne fait aucune analyse sur la source de l’humidité ni des moisissures. Sur cette base nous nous questionnons comment ils arrivent à des recommandations.

Nous ne sommes pas d’avis des recommandations du rapport à savoir

- Enlever l’isolant rigide.

- Retirer la mousse polyuréthane

- Ces deux points précédents ne sont pas la cause de la problématique à notre avis.

- À moins que ces supports soient contaminés et il n’y a pas d’autres moyens de les nettoyer de la moisissure. Est-ce que la décontamination complète ne règle le problème?

- Retirer le prélart. Selon notre relevé, il n’y a aucune humidité sur la dalle de béton.

5.3 Interprétation

Lors de notre inspection, nous n’avons pas relevé de moisissure visible à l’œil. Ainsi nous n’avons pas tenté d’évaluer par nous même, du degré d’altération des matériaux (par la moisissure) et par le fait même le degré de la contamination soit, l’infiltration (dans le temps et par le débit).

Par ailleurs à notre sens, l’absence :

- de boursouflure de peinture :

- d’efflorescence à la base des murs et dans la dalle de béton

- de cerne dans la dalle de béton

Ne laisse pas présager une humidité par l’enveloppe du bâtiment.

La topographie du terrain laisserait une accumulation d’eau de surface en arrière du bâtiment. Les niveaux de fenêtre n’est pas adéquat. À notre avis, il n’y a pas d’humidité provenant de la dalle du béton, ou dans les murs de béton. Nos explications […] confirment notre constatations (sic!) sur la bonne qualité de ce béton selon nos observations. La contamination observée dans l’uréthane est une contamination de surface et non une contamination de l’extérieur vu le degré de perméabilité faible de l’uréthane. Celui du placoplatre étant plus élevé mais aucune moisissure n’a été relevée sur le placoplatre.

6.0 Conclusion et recommandations :

Selon notre expérience, il n’y a aucune infiltration majeure à travers la masse de béton, et les murs de façade qui justifierait de telle senteur d’autant plus que les odeurs sont apparues en 2013 soit 4 ans après la construction.

Malheureusement nous ne sommes pas arrivés à une conclusion sur la cause des odeurs relevées. Comme nous ne sommes pas en mesure d’expliquer les causes de l’humidité ou moisissure relevées dans le rapport Experbatiment.ca. D’ailleurs leur rapport n’explique pas la source de la problématique. Il reste probable à notre sens que la cause est plus reliée aux habitudes de vie des occupants.

 

Michel Millmore

[120] Michel Millmore a été reconnu comme expert, technologue en matière d’évaluation environnementale.

[121] Il est allé sur les lieux le 26 juin 2014, son mandat était de vérifier les conclusions d’Immotech (notre ajout : Louis Parent), de prendre des échantillons de surface de l’air, à la recherche de contaminants.

[122] Le Tribunal note ici qu’aucun rapport d’expert signé par Michel Millmore de « vérifications des conclusions d’Immotech », n’est produit au dossier, son rapport produit en E-5, daté du 27 mars 2015, est une réponse au rapport d’ExpertBâtiment.ca du 5 janvier 2015, intitulé « commentaires sur le rapport d’EXPERTBÂTIMENT.CA ».

[123] L’opinion préliminaire de l’expert Frédéric Gagnon du 8 octobre 2014 fait toutefois mention de son expertise sur les lieux (selon les termes cités au paragraphe [86] ci-haut).

[124] Il n’y avait aucune moisissure visible lors des prélèvements.

[125] Il y avait une présence de penicillium dans le vestibule; il ajoute qu’il y avait un foyer de contamination et qu’il fallait investiguer, mais il n’a pas investigué car ce n’était pas dans son mandat.

[126] La majeure partie de son rapport produit en E-5, ainsi que son témoignage, a porté sur les COV.

[127] Il dit d’ailleurs « moi, je n’ai pas senti d’odeur relié au COV » mais avoir senti une odeur dans le vestibule, sans dire à quoi il l’a « reliée ».

[128] Le Tribunal d’arbitrage rappelle, et il y reviendra dans la partie « décision », qu’il n’a pas la compétence juridictionnelle pour traiter des COV.

[129] Seule la question des moisissures est rapportée ici; toutefois, le Tribunal d’arbitrage note que lors du contre-interrogatoire, à la question à savoir en présence de COV, quels étaient les critères pour forcer l’évacuation des lieux, le témoin Millmore a affirmé d’abord qu’il fallait (1) identifier la source (2) la concentration de cette source (3) obtenir l’avis d’un professionnel de la santé et (4) voir si des personnes éprouvent des symptômes.

[130] Toujours en contre-interrogatoire, à la question si les symptômes n’étaient pas suffisants, il répond par la négative, qu’il fallait la confirmation d’un professionnel de la santé.

[131] Toujours en contre-interrogatoire, à la question, si on ne trouve pas la cause des problèmes de santé, si ces problèmes de santé sont crédibles, est-ce suffisant pour justifier l’évacuation?, le témoin Millmore répond, « si moi j’ai des ennuis je peux choisir de quitter mais comme professionnel, je fais l’inspection et l’historique du bâtiment » (avant de faire évacuer) (note du soussigné, à comparer avec l’opinion « comme membre d’un ordre professionnel » de Louis Parent, paragraphes [54] et seq.).

[132] Michel Millmore affirme avoir demandé à André Néron (représentant les assureurs de l’Entrepreneur) s’il y avait eu une évaluation de la santé des occupants, et il n’a pas eu de réponse.

[133] Il reproche au rapport Champagne (pièce A-17) qu’il fait référence à un protocole non inclus dans le rapport, mais il n’en a pas de copie, il voulait s’assurer que la méthode utilisée était valable, que les résultats étaient cohérents.

[134] Il a demandé à Lab-Eau-Air-Sol copie de leur protocole (« protocole » lors de son témoignage, ou « guide » dans son rapport écrit en E-5), mais un représentant de ce laboratoire lui aurait répondu de faire la demande par l’entremise d’un avocat; rien dans la preuve ne montre que quelqu’un a fait cette démarche.

[135] Il écrit dans son rapport (pièce E-5) pour les prélèvements de surface d’ExpertBâtiment.ca (rapport Champagne):

Monsieur Jacob devait nous faire parvenir une copie du guide ainsi qu’une confirmation à l’effet que les valeurs ne devraient pas être utilisées pour des prélèvements de surface à l’éponge. Cependant, le président du laboratoire, monsieur Michel Champagne, a communiqué avec nous et tenté d’obtenir plus d’informations sur le projet qui nous occupe. C’est de cette façon que nous avons compris que le consultant Expertise Champagne retenu pour l’expertise et le laboratoire d’analyses ne forment qu’une seule et même entité.

Comme nous avons refusé de donner à monsieur Champagne plus de précisions sur le projet en question, celui-ci a préféré ne pas nous transmettre le guide et nous a invités à en faire la demande via des avocats, le cas échéant.

[136] Il dit qu’il n’y a pas de protocole réglementé, et qu’il n’y a pas de normes canadiennes pour les bactéries.

[137] Michel Millmore note pour les résultats de l’échantillonnage de l’air qu’il y a une confusion quant aux numéros d’échantillons dans le rapport Champagne et cela l’amène à conclure (pièce E-5, la réponse d’Alexandre Champagne est au paragraphe [69A] ci-haut) : 

Cette confusion nous oblige à questionner la validité des conclusions concernant la qualité de l’air qui reposent essentiellement sur une comparaison avec l’échantillon prélevé à l’extérieur alors que nous ne savons même pas si un des échantillons prélevés à l’extérieur a été analysé.

[…] l’évaluation environnementale de la présence de moisissures et de bactéries effectuée par Expertise Champagne soulève des incertitudes quant à la qualité de l’information, notamment considérant la confusion par rapport à l’indentification des échantillons, les méthodes de prélèvement des échantillons de surface et l’interprétation des résultats.

[138] Michel Millmore déclare aussi que l’évaluation d’Expertise Champagne « soulève des incertitudes » avec des « informations difficiles à interpréter qui peuvent créer des inquiétudes inutiles ».

[139] Il produit le document « Alberta Health Services - Fungal Air Testing, Investigation and Reporting Requirements for Extensively Mould-Contaminated Buildings » (pièce E-19) qui est cité par l’expert Champagne dans son rapport et qui a été lu par le soussigné pendant son délibéré, il s’agit des critères de l’Alberta Health Services pour émettre un ordre d’éviction ou « Executive Officer Order », ajoutant qu’il « provide guidance on the interpretation of fungal air monitoring results in any situation ».

[140] Le témoin expert souligne que pour l’Alberta Health Services « the consultant shall collect at least three (3) representative outdoor samples for each day of sampling in accordance with Health Canada (2004) recommendations ».

[141] Le Tribunal, bien qu’il apprécie avoir pour pu lire le document, note qu’il n’est pas saisi d’une demande d’ordonnance d’évacuation par le Gouvernement, qu’il n’est pas saisi non plus d’une action en dommages pour, selon des allégations et des représentations, avoir dû sortir des lieux.

 

Simon Bouchand

[142] Simon Bouchand a été reconnu comme témoin expert géologue.

[143] Il a eu le mandat d’expertiser cet immeuble pour caractériser le sol sous la dalle pour y voir les matériaux en place.

[144] Il réitère à l’audience le contenu de son rapport daté du 14 novembre 2014 (pièce E-2) à l’effet que le sol n’était pas contaminé:

Le mandat régissant la réalisation de la présente étude a été défini suivant les termes d’une offre de services préparée le 30 octobre 2014 par LVM et approuvée le même jour par monsieur Larry Dallaire, représentant de Construction Larry enr. Une problématique liée à une odeur d’origine inconnue est présente dans le sous-sol de la résidence localisée au 1935, rue des Camélias à Jonquière. Le présent mandat avait pour objectif de valider le type de sols présents sous la dalle de béton de la maison afin de notamment, valider si un remblai contaminé était présent, et si celui-ci présentait des indices organoleptiques particuliers (odeur, couleur, présence de matière organique, etc.) […]  À la lumière des informations recueillies, au droit des cibles d’échantillonnage, aucune trace de contamination n’est présente. De plus, le sol est exempt de matière organique. Aucune odeur particulière n’a été relevée pendant les travaux. Notons que le socle rocheux n’a pas été atteint, de par la densité du matériel sus-jacent. Au droit du sondage réalisé, nous croyons que le remblai utilisé respecte les règles de l’art.

 

André Tremblay

[145] André Tremblay a témoigné sous l’article 294.1 C.p.c. Dans une lettre du 23 juillet 2014 (pièce E-15), il écrit à « Union Canadienne Monsieur André Néron » :

Pour faire suite à votre demande concernant le 1935 Camélias, Jonquière. Nous avons fait l’inspection du latéral sanitaire à partir d’un clapet vers la conduite principale. L’inspection caméra n’a pas déterminé de problème qui nuit à l’écoulement. Le latéral est en plastic sdr sur une longueur total de 98 pieds en très bonne condition. Nous avons passé sur place pour un problème d’odeur, une vérification devra être faite dans le grenier pour voir l’évent.

 

Larry Dallaire

[146] Larry Dallaire, représentant l’Entrepreneur, est entrepreneur depuis 22 ans et a construit plus de 200 maisons.

[147] La construction de cette maison s’est terminée le 15 janvier 2010 mais les Bénéficiaires voulaient y entrer avant les Fêtes en décembre 2009.

[148] C’était une construction clés en main, avec un prix budgétaire.

[149] Le dynamitage a été effectué par une société appartenant au Bénéficiaire, qui a aussi fourni les plans de construction.

[150] Il n’a pas de pare-vapeur « vu le styrofoam de 2 pouces », il ajoute toutefois « le Bénéficiaire était au courant de ce qu’il achetait, c’est sur la feuille [de soumission]».

[151] C’est le Bénéficiaire qui a fourni le prélart et l’a installé.

[152] Il n’a rencontré aucune difficulté particulière dans l’exécution du contrat.

[153] La première fois qu’on lui a parlé d’un problème est en mars 2014, on lui a dit qu’ils avaient un problème d’odeur.

[154] Plus loin dans son témoignage, il dit que c’est à la fin février 2014 que la Bénéficiaire lui a dit qu’elle devait ouvrir les fenêtres « car elle avait de la senteur ».

[155] Il est allé voir tout seul, puis avec d’autres personnes.

[156] L’échangeur d’air ne fonctionnait pas mais le filtre n’avait jamais été nettoyé, il ne fonctionnait qu’à 50%.

[157] Il y avait trois lapins avec des crottes au sous-sol et une balle de foin, et trois chiens (note : les Bénéficiaires ont témoigné que ces lapins sont arrivés à Pâques 2014).

[158] Il y avait un « set up » sous la partie du hall d’entrée pour « faire des ongles ».

[159] Il s’est déplacé sur les lieux au moins huit fois.

[160] Le 4 juin il est entré dans la maison, « ça sentait l’eau stagnante quelque part dans la maison », il a fait le tour avec les experts et tout était numéro 1.

[161] Il y a eu une décontamination par « Steam-matic » mais personne n’avait le droit d’entrer et il n’est pas au courant de leur procédé [ajout du soussigné : aucune preuve n’a été faite dans ce dossier de ce que Steam-matic a réellement fait sur les lieux, suite à quel mandat, dans quel but précis, quel procédé, etc.]

[162] C’est lui qui a fait sortir la laveuse car elle empestait, sentait très fort. C’était toujours au même secteur, au même coin.

[163] Il nie que les plans prévoyaient un pare vapeur sur les murs de fondation qui n’aurait pas été posé.

 

Preuve de l’Administrateur

[164] L’Inspecteur-conciliateur qui a rédigé la décision pour l’Administrateur affirme faire ce travail pour ce dernier depuis 12 ans, et qu’il rend environ 150 décisions par année. Il est membre de l’ordre des technologues.

[165] Sa décision du 26 janvier fait suite à la réception de la même plainte des Bénéficiaires reçues à deux reprises, soit les 1er et 14 octobre 2014, produite en pièce A-4, alors que la lettre de dénonciation est datée du 6 août 2014.

[166] La lettre de dénonciation faisait référence à plusieurs autres documents.

[167] Un seul des points dénoncés a été accueilli, tous les autres ont été rejetés, y compris l’odeur et les COV.


 

[168] Puisque la date de réception du bâtiment est le 15 janvier 2010 (document de réception du bâtiment produit en pièce A-3), et que la dénonciation fut reçue le 1er octobre 2014, l’Administrateur a donc considéré que les Bénéficiaires étaient à l’intérieur de la période couvrant la 4e et 5e années de la couverture du plan de garantie, qui couvre seulement les vices majeurs sous l’article 2118 C.c.q.

[169] Après avoir pris connaissance des rapports et suite à son inspection des lieux, le seul point qui était associé au vice majeur était les moisissures.

[170] L’Administrateur a pris sa décision suite aux nombreux documents et le dernier rapport des Bénéficiaires.

[171] Il affirme :

 « moi je comprends à la conclusion qu’il y a un risque qu’il y ait des moisissures et que ce risque est assez grand ».

[172]  Il note aussi qu’il est question que la condensation puisse passer à travers de l’isolant rigide (page 12 de 14 du rapport A-17).

[173] Il affirme : « Ce que la garantie considère est que la conclusion de l’expert est assez importante, je lui ordonne à la fin de la décision de faire les travaux correctifs qui sont requis », ces travaux étant cités sous le point 1 de sa décision.

[174] Bien que l’ordonnance ne porte que sur l’isolant rigide et non sur l’isolant soufflé entre les solives, il ajoute qu’ « il est recommandé d’enlever la mousse » de polyuréthane lors des travaux correctifs, « ça sera à lui à décider d’enlever la mousse, mais si j’étais lui je le ferais ».

[175] Il ajoute qu’il n’a pas reconnu les COV, qu’il n’a pas reconnu l’odeur, mais seulement les moisissures.

[176] Il affirme avoir déjà traité de dossiers de moisissures, que ces micro-organismes peuvent être dangereux pour les occupants.

[177] Si on peut démontrer la présence de moisissure, l’Administrateur y accorde une plus grande priorité puisque le risque est important - il y a même une mention spéciale sur la couverture de ce genre de dossier.

[178] Comme la présence de moisissures est « appuyée » et que c’est « assez clair », il a reconnu la présence d’un vice majeur à l’intérieur de la maison.

[179] Il n’a pas vu de moisissures visibles, toutefois, il a fréquemment vu des moisissures derrières des parements rigides mal appuyés, et la « préoccupation » des experts lui « a semblé solide ».

[180] L’isolant mal appuyé permet à l’humidité de s’infiltrer derrière alors qu’il n’y a pas de circulation d’air, et la combinaison de l’eau, la noirceur et l’absence de circulation d’air entraîne la prolifération de moisissures.

[181] Il n’a pas retiré l’isolant, puisqu’il avait des rapports d’expert qui confirmait la présence de moisissures dans l’air.

[182] Quant au prélart, il affirme qu’un rapport d’expert dit que le prélart est en cause, et qu’il pouvait être une source de moisissures.

[183] Pour cette raison, il a retenu la recommandation d’enlever le prélart, sans se prononcer sur l’état de la dalle de béton.

[184] Il affirme « je suis d’accord avec la majorité des points du témoignage de Louis Parent ».

[185] Enfin, la nature de la décision est la présence de moisissures dans l’air et qu’il faut enlever l’isolant rigide.

[186] Quand il a reçu le rapport Champagne le 5 janvier 2015 (A-17), il a  demandé par courriels au Bénéficiaire d’en envoyer une copie du rapport Champagne à l’Entrepreneur, toutefois, il n’a pas de traces à l’effet qu’il ait, lui-même, envoyé une telle copie à l’Entrepreneur.

[187] Il a aussi été question des COV lors de ce contre-interrogatoire, point dont le soussigné n’est pas saisi.

Contre-preuve de l’Entrepreneur

[188] Michel Millmore parle d’abord des COV et de l’appareil utilisé par Champagne à cet effet, mais cela ne fait pas l’objet du différend à trancher par le Tribunal d’arbitrage.

[189] Quant aux moisissures, il affirme que l’expert Champagne n’est pas un expert en moisissures et bactéries.

[190] Il dit qu’il n’est pas anormal qu’il y ait des bactéries sur le plancher, qu’on n’a pas vérifié si ces bactéries étaient pathogènes.

 

 

PLAIDOIRIE

Entrepreneur

 

[191] Pour l’Entrepreneur, la décision de l’Administrateur est erronée, pour plusieurs motifs.

[192] D’abord, la décision est erronée au niveau de la qualification des vices majeurs et des travaux correctifs.

[193] L’Administrateur s’est appuyé sur le rapport d’expert Champagne (A-17).

[194] Les mêmes vices que l’Administrateur accueille au point 1 de sa décision sont rejetés au point 6 de la même décision.

[195] La décision est donc incohérente, et l’Administrateur ne pouvait pas à l’audience essayer de modifier sa décision dans le but d’y mettre de la cohérence.


 

[196] Il a rendu une décision qui est inapplicable et il s’agit d’une objection en droit : il ne peut pas accorder puis rejeter les mêmes vices, et un arbitre ne peut utiliser ses pouvoirs en vertu de l’article 116 du Règlement (faire appel à l’équité) dans le but de modifier la décision contradictoire quant aux vices reconnus et rejetés et aux travaux correctifs à apporter.

[197] Un autre motif en droit est le non-respect des garanties procédurales (ou équité procédurale) : l’Administrateur a procédé à l’inspection le 3 décembre, le Bénéficiaire a informé l’Inspecteur de ne pas rendre sa décision car un autre rapport d’experts venait le 5 janvier 2015.

[198] Toutefois, l’Entrepreneur n’était nullement au courant au 5 janvier 2015 qu’un rapport était remis.

[199] Le procureur du Bénéficiaire a envoyé ce rapport à l’Administrateur mais nullement au procureur de l’Entrepreneur connu du procureur du Bénéficiaire.

[200] L’Entrepreneur n’a pu s’enquérir ou contester les conclusions de ce rapport et s’est retrouvé devant le fait accompli.

[201] Donc, l’Administrateur n’avait pas une preuve complète pour rendre sa décision.

[202] L’Entrepreneur lui reproche aussi de n’avoir pas vérifié sur place, les points soulevés par le rapport Champagne, considérant que l’Inspecteur aurait dû effectuer une visite supplémentaire par la suite pour constater lui-même le vice majeur.

[203] Ensuite, l’Entrepreneur plaide un troisième point de droit : le délai de dénonciation prévu à l’article 10(5) du Règlement qui n’a pas été respecté.

[204] Quant au fond et aux faits mis en preuve, l’Entrepreneur conteste que les problèmes soulevés constituent un vice majeur en vertu de l’article 2118 du Code Civil.

[205] Si l’expert Champagne a témoigné qu’il y avait eu des traces d’humidité et d’insectes sur le plancher de béton, il ne peut pas dire quel genre d’insectes il s’agit, ni leur nombre.

[206] Toutefois, l’expert Ouaras est allé sur les lieux en août 2015, il n’a pas vu d’insecte, ni relevé de l’humidité au même endroit, alors que leurs visites respectives sont assez contemporaines.

[207] Il a inspecté les fondations aux endroits déjà ouverts par le Bénéficiaire et il n’a pas vu de trace d’humidité ni de moisissure, ni aucune source probable d’infiltration d’eau.

[208] Le béton est en bon état et semble présenter une bonne qualité d’exécution.

[209] A part l’expert Champagne, aucun autre expert des Bénéficiaires n’a constaté d’humidité.

[210] En juin 2014, l’ingénieur Frédéric Gagnon a confirmé qu’il n’y avait pas d’humidité sous le prélart.

[211] Quant à l’absence de pare-vapeur sur les murs de fondations, le procureur de l’Entrepreneur affirme que l’expert Ouaras a dit qu’un isolant rigide agissait à titre de pare-vapeur.

[212] Il y a peut-être eu une mauvaise exécution, mais cela ne constitue pas de vice majeur.

[213] Quant aux taux de bactérie et de moisissures, l’expert McSween a analysé les échantillons, elle en a vu une quantité limitée dans l’air.

[214] L’expert Champagne a eu pour sa part des taux anormalement élevés, mais on ne connait pas les données et on ne sait pas sur quoi il se base, cet expert ayant été dans l’incapacité de témoigner sauf sur des généralités, truffant ses phrases de « je ne sais pas » ou de termes généraux comme « anormal ».

[215] Il considère que cet expert a perdu sa crédibilité en lançant des mises en garde (qualifiées d’ « alarmes ») avant la visite des lieux.

[216] La maison est inhabitée depuis fin mai 2014, et il n’y a aucun échangeur d’air - cela ne tient pas la route que par la suite, l’expert Champagne aille sur les lieux et conclut à l’obligation d’y faire des travaux.

[217] Beaucoup d’hypothèses (mode de vie ou autres) ont été soulevées de part et d’autres, les photos montrent la présence de lapins, il y avait trois chiens, avec des portées de chiots, il y avait une balle de foin.

[218] Dahi Ouaras a d’ailleurs signalé une « senteur d’ammoniaque », d’urine.

[219] Le seul rapport qui parle de moisissures est celui de Champagne.

[220] Il demande donc d’accueillir sa demande d’arbitrage et d’avoir jusqu’au vendredi 9 octobre pour soumettre ses représentations quant aux frais.

 

Bénéficiaires

 

[221] Les Bénéficiaires plaident d’abord que la décision est applicable puisque la décision est dans les conclusions, qui sont très claires, tout le reste de la décision n’est que réflexion.

[222] Dans différents points l’Inspecteur-conciliateur a tout simplement repris la même énumération mais son cheminement n’est nullement affecté.

[223] L’Inspecteur a bien expliqué que sa décision était dans les conclusions et le Tribunal d’arbitrage peut intervenir en équité sous l’article 116 du Règlement pour confirmer que les motifs ne vicient en rien la décision.

[224] Quant à la justice naturelle qui n’aurait soi-disant pas été respectée, ils plaident l’existence d’un contrat judiciaire mentionné à la page 5 de la décision, que tout le monde savait qu’un rapport sortirait le 5 janvier et jamais l’Entrepreneur, qui savait qu’un rapport s’en venait, n’a demandé la permission de produire un autre rapport en réponse au prochain rapport des Bénéficiaires avant que l’Administrateur ne rende sa décision.

[225] L’Entrepreneur n’a pas contesté ce contrat judiciaire, il a été respecté et il ne peut aujourd’hui invoquer une violation de la justice naturelle.

[226] Quant aux délais de dénonciation, le président du Tribunal d’arbitrage a posé « la question piège ». La Bénéficiaire a répondu et sa connaissance est à l’intérieur des délais.

[227] Quant aux vices majeurs comme tels, il y a eu une éviction des occupants du bâtiment, dans un contexte douloureux.

[228] Les experts Champagne et Parent se sont prononcés à l’effet que jamais, ils n’auraient habité dans cet endroit - aucun autre expert (de la partie adverse) ne s’est prononcé sur cela.

[229] Quant à l’expert Anne McSween, elle a dit que les résultats peuvent soulever une problématique, qu’il faut toujours contextualiser les résultats et qu’elle ne peut tirer de conclusion.

[230] Il est faux de prétendre que seul l’expert Champagne a parlé de moisissures puisque dans le rapport Immotech pièce A-9, l’avant-propos dit que « votre bâtiment est affecté par une quantité importante de levure à 42% […] la présence de penicillium a été détectée à un pourcentage de 31% ».

[231] Il y a aussi le témoignage du couple de Bénéficiaires, sincère, précis sur les faits, l’état de santé des occupants et sur la « question qui tue » du soussigné quant au moment où ils ont eu connaissance du problème, ils ont été forcé de quitter à contrecœur cette résidence, comme le prouve le fait que la Bénéficiaire amène les enfants jouer dans la cour arrière.

[232] Les experts de l’Entrepreneur n’ont pas contacté les experts des Bénéficiaires, ils ont toutefois parlé d’odeur inconnue, de « canis », les premiers sont donc conscients d’un problème.

[233] L’expert Ouaras est un expert en structure de bâtiment, il ne se prononce pas sur la cause de l’odeur, il dit avoir exclus toute possibilité d’une infiltration de l’extérieur, donc si la problématique ne vient pas de l’extérieur ça vient de l’intérieur.

[234] Selon l’article 2118 du Code civil, les Bénéficiaires n’ont pas à prouver la cause du vice majeur, ils n’ont qu’à prouver l’existence du vice majeur, qui a ici mené à l’éviction de la résidence.

[235] Même si on ne connait pas la source, il y a un problème de moisissures dans la maison, couvert par le Plan de garantie géré par l’Administrateur.

[236] En conclusion, il y a un vice majeur et le fardeau de preuve de l’Entrepreneur n’a pas été pas été rencontré, même extrêmement loin.

[237] Il conclut aussi qu’il est certain que tôt ou tard il faudra régler la problématique des COV et il demande formellement que le soussigné se saisisse aussi du différend quant aux COV en vertu de l’article 116 du Règlement (sur la base de l’équité) même si aucune demande d’arbitrage n’a été portée par les Bénéficiaires.

Administrateur

 

[238] L’Administrateur plaide que la majorité des experts des Bénéficiaires et de l’Entrepreneur ont témoigné avoir senti une odeur anormale.

[239] Plusieurs experts ont cherché une trace visible d’infiltration d’eau et de moisissures, et sont tous arrivés à la même conclusion :

[239.1] ils n’ont pas vu d’infiltration d’eau;

[239.2] ils n’ont pas vu de moisissure visible.

[240] Cela a amené les Bénéficiaires à faire des démarches sur la qualité de l’air quant aux COV et aux moisissures dans l’air.

[241] Ce que l’arbitre doit trancher, c’est de déterminer si des moisissures sont présentes et si la décision de l’Administrateur est fondée.

[242] Le soussigné ne peut tenir compte des analyses de COV car on n’a aucune preuve que des COV ont un lien avec les problèmes de moisissures.

[243] Ni l’odeur ni les COV n’ont été reconnus par l’Administrateur comme vice majeur et selon la jurisprudence non citée par le procureur car déjà connue du Tribunal d’arbitrage (note du soussigné : ce qui est parfaitement exact), si un point n’est pas soumis à l’arbitrage, le Tribunal d’arbitrage n’a aucune juridiction (note du soussigné : le soussigné a ajouté à l’audience qu’un point peut aussi être soumis à l’arbitrage du consentement de toutes les parties, ce qui n’a pas eu lieu ici).

[244] Il rejette l’argument de l’Entrepreneur à l’effet que la procédure n’ait pas été respectée.

[245] Le Règlement prévoit qu’il doit y avoir une inspection suivie d’une décision.

[246] Rien dans le Règlement ne prévoit que si l’Administrateur du Plan de garantie se base sur un rapport d’expert, qu’il doive communiquer ce rapport à l’autre partie avant de rendre cette décision.

[247] De plus, il n’est mentionné nulle part dans la décision et dans la preuve à l’arbitrage que l’Entrepreneur ait dit qu’il se réservait le droit d’effectuer une contre-expertise.

[248] L’Article 18 du Règlement établit les étapes (dénonciation, inspection, décision) et la justice naturelle est prévue par le Règlement à l’article 19, soit que la décision est appelable devant un arbitre, et il est de pratique courante que des expertises supplémentaires soit déposées dans le cadre d’un arbitrage.

[249] Il ne voit nulle part en quoi l’Administrateur aurait une obligation d’essayer de contredire le rapport d’expert soumis par les Bénéficiaires et il n’avait pas l’obligation d’effectuer une inspection supplémentaire.

[250] La question à considérer : est-ce que les résultats de relevés d’échantillons (Annexes A et B du rapport du rapport Champagne, pièce A-17) d’air concernaient la moisissure et est-ce que les conclusions du rapport Champagne sont suffisantes pour être considérées comme un vice majeur.

[251] Dans les relevés d’analyses aux Annexes A et B, Lab Eau Air Sol a associé la qualité d’air aux cotes B et C, il y a même une cote A.

[252] On a donc un rapport qui montre des risques assez élevés et l’Administrateur n’a aucune information à l’effet contraire.

[253] Il a aussi les témoignages des problèmes de santé, il n’y a eu aucune expertise à ce sujet mais coïncidence ou cause à effet? les Bénéficiaires ont déménagé, tous les occupants étaient affectés et aucun occupant n’a été malade après le déménagement.

[254] Il faut mettre ces problèmes dans le contexte du rapport Champagne, des échantillons d’air, il est important de regarder le contexte.

[255] Deux experts qui n’ont aucun intérêt dans la cause ont témoigné à l’effet d’avoir ressenti des malaises, gorge irritée ou front qui pique; dans le présent cas, il y a eu des enfants, qui étaient peut-être plus fragiles.

[256] Il rappelle que l’évacuation n’est pas nécessaire pour déterminer la présence d’un vice majeur, un risque pour la santé est suffisant, il est suffisant d’être incommodé, être incommodé aurait rempli les critères de vice majeur.

[257] Il affirme que même si l’Entrepreneur allègue que l’Expert Ouaras aurait dit que l’isolant rigide agissait comme pare-vapeur, il est admis que selon le Code National du Bâtiment, cet isolant n’est pas reconnu comme pare-vapeur.

[258] L’expert Parent a dit que l’isolant pourrait causer une condensation et des moisissures.

[259] Le rapport d’expert soumis par les Bénéficiaires dit qu’il y a des moisissures et l’Entrepreneur n’a fourni « aucune preuve concrète que les problèmes dans l’air de moisissures n’existent pas », contrevenant ainsi à son fardeau de preuve de selon l’article 2803 C.c.q.

Réplique

 

[260] En réplique l’Entrepreneur plaide qu’il ne peut être blâmé de ne pas avoir su qu’un autre rapport sortirait le 5 janvier, il a été pris par surprise et il n’y a eu aucun contrat judiciaire.

[261] Quant à l’expert McSween et son témoignage à l’effet qu’il faut contextualiser, ce travail a été fait par l’expert MillMore.

[262] Les rapports Parent et Champagne mélangent les pommes et les oranges, l’arbitrage ne porte que sur le point 1 de la décision.

[263] A toutes les questions, Champagne a dit « je ne sais pas », ses données ne prouvent rien, et si on compare avec les autres rapports de ses experts, son fardeau de preuve a été rencontré.

[264] Quant à l’odeur forte sentie par l’expert Ouaras, la maison était fermée et sans aération depuis longtemps.

 

DÉCISION

Le différend sous la juridiction du Tribunal d’Arbitrage

 

[265] Les Bénéficiaires demandent que le Tribunal d’arbitrage se saisisse de différends parmi les points 2 à 6 de la décision et qu’il tranche leurs réclamations sous ces points en leur faveur, alors qu’ils n’ont pas produits de demande d’arbitrage quant à ces points (odeur, COV, etc.).

[266] De plus, par lettre datée du 28 avril 2015, les Bénéficiaires indiquaient au CCAC qu’ils désiraient obtenir une ordonnance du soussigné quant à la démolition de la dalle de béton et installation d’un pare-vapeur dans la dalle de béton:

En conséquence, nous entendons rechercher auprès de l’arbitre une conclusion additionnelle, soit de démolir la dalle de béton du sous-sol pour installer une membrane protectrice de même qu’un pare-vapeur.

[267] Les Bénéficiaires basent leur demande avec l’Article 116 du Règlement, qui se lit ainsi :

116.  Un arbitre statue conformément aux règles de droit; il fait aussi appel à l'équité lorsque les circonstances le justifient.

[268]  À part ce qui concerne le point 1 de la décision de l’Administrateur, objet de l’arbitrage demandé par l’Entrepreneur, le Tribunal d’arbitrage ne peut pas accepter la demande des Bénéficiaires.

[269] D’une part, ils n’ont pas produit de demande d’arbitrage au sujet des autres points tels l’odeur et les COV alors que le Tribunal d’arbitrage tire sa « juridiction » ou compétence d’attribution de l’article 106 du Règlement :

19.  Le bénéficiaire ou l'entrepreneur, insatisfait d'une décision de l'administrateur, doit, pour que la garantie s'applique, soumettre le différend à l'arbitrage dans les 30 jours […]

106.  Tout différend portant sur une décision de l'administrateur concernant une réclamation ou le refus ou l'annulation de l'adhésion d'un entrepreneur relève de la compétence exclusive de l'arbitre désigné en vertu de la présente section.

Peut demander l'arbitrage, toute partie intéressée:

1°    pour une réclamation, le bénéficiaire ou l'entrepreneur; […]

 

[270] Dans l’affaire Construction Lortie inc. c. Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ[9] la Cour supérieure écrit :

[23] L'article 106 du Règlement énonce: 

106.: […]  

[24] Il faut donc conclure que c'est en vertu de la loi qu'est créé un tel tribunal statutaire.

[271] À l’audience, le Tribunal d’arbitrage a rappelé que tout autre différend peut aussi être porté en arbitrage, mais seulement du consentement de toutes les parties, or, les autres parties n’ont pas consenti à la demande des Bénéficiaires.

[272] Le 15 juin 2015, l’Administrateur écrit :

Monsieur l’arbitre,

J’ai pris connaissance de la lettre de Me Laperrière datée du 28 avril 2015 et de son rapport d’expert Technorm daté du 2 février 2015.

Je désire vous informer de mon objection préliminaire quant à la production de ce rapport entres autres pour les motifs suivants […]  Ce que j’ai compris du dossier, la demande d’arbitrage de l’entrepreneur porte uniquement sur le point #1 de la décision. […].

[273] Le 19 juin 2015 (pièce E-1), l’Entrepreneur écrit :

[…] Nous sommes entièrement d’accord avec les commentaires formulés par Me Nancy Nantel le 15 juin 2015, qui rejoignait ce que nous formulions dans notre lettre du 11 juin 2015 [….]

[274] Le 22 juin 2015, le Tribunal soussigné écrivait aux parties :

[…] Nous avons DÉJÀ écrit le 12 juin que nous n'étions saisis que d'une seule demande d'arbitrage, soit celle de l'Entrepreneur. Nous avons écrit le 12 juin que les Bénéficiaires faisaient une demande d'ordonnance alors même qu'ils n'ont produit aucune demande d'arbitrage. Depuis lors, le procureur de l'Administrateur a clairement écrit qu'elle s'objectait. Nous avons inféré de la lettre du procureur de l'Entrepreneur qu'il s'objectait. […]

[275] D’autre part, la compétence d’attribution est autant une question d’ordre public que l’est le Règlement sur le Plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs, comme le soussigné l’a rappelé dans Syndicat « Les Copropriétaires du Oxxford » c. Mario di Palma et a.[10], puis dans Frève et Constructions Levasseur Inc.[11], et Morin et Constructions Paul Genesse et La Garantie Qualité Habitation[12].

[276] Dans l’arrêt Gignac c. Marcotte[13], la Cour d’appel rappelle :

[52] […] La compétence d’un tribunal est une matière qui vise l’ordre public, faut-il le rappeler.

[277] Malgré tous les pouvoirs qui sont dévolus à l’arbitre en vertu du Règlement confirmé par la jurisprudence à ce sujet[14], le Tribunal d’arbitrage soussigné ne peut se donner une compétence d’attribution qu’il n’a pas, puisque la compétence d’attribution est d’ordre public.

[278] Vu l’arrêt de la Cour d’appel, vu l’absence de consentement de toutes les parties, vu donc son absence de compétence d’attribution, le Tribunal d’arbitrage soussigné se doit de décliner juridiction ou compétence quant à l’odeur, les COV, l’existence du para-vapeur de la dalle de béton et autres points ou objets de réclamation entre les parties qui ne concernent pas le point 1 de la décision de l’Administrateur du 26 janvier 2015.

[279] La Cour d’appel dans Consortium M.R. Canada Ltée c. Office municipal d’habitation de Montréal[15] écrit :

[17] La juge avait raison de souligner les différences de vocation entre les recours arbitral et de droit commun.

 

[280] Le Tribunal d’arbitrage rappelle :

[280.1] l’article 11 de la Loi sur le bâtiment qui stipule :

11. La présente loi n'a pas pour effet de limiter les obligations autrement imposées à une personne visée par la présente loi.

[280.2] la décision de la Cour supérieure dans l’affaire Garantie d'habitation du Québec c. Jeanniot[16] :

 

[63] Il est clair des dispositions de la Loi et du Règlement que la garantie réglementaire ne remplace pas le régime légal de responsabilité de l'entrepreneur prévu au Code civil du Québec. Il est clair également que la garantie prévue à la Loi et au Règlement ne couvre pas l'ensemble des droits que possède un bénéficiaire, notamment en vertu des dispositions du Code civil du Québec et que les recours civils sont toujours disponibles aux parties au contrat.

[281] Le Tribunal d’arbitrage réservera les droits des Bénéficiaires de porter leurs prétentions, quant aux autres objets que celui du Point 1, devant les tribunaux de droit commun contre toute personne autre que l’Administrateur du Plan de Garantie sur ces points et objets de réclamation, le tout, sujet aux règles de la prescription civile et de droit commun, sans que cette affirmation puisse être interprétée dans un sens ou dans l’autre.

 

La réclamation des Bénéficiaires fut-elle produite dans les délais prévus à l’article 10(5) du Règlement?

 

[282] Au début de l’audience de trois jours, l’Entrepreneur a annoncé qu’il avait un moyen préliminaire quant au délai de dénonciation de six mois prévu à l’article 10(5) du Règlement, tel qu’il était en vigueur avant le 1er janvier 2015.

[283] L’Administrateur du Plan de Garantie a accepté de couvrir un vice majeur dénoncé par les Bénéficiaires, sans invoquer le délai de dénonciation.

[284] Le rôle du Tribunal est de faire apparaître les faits et le droit.

[285] Alors que la Bénéficiaire a témoigné qu’elle croyait « avoir un problème d’odeur », mais qu’elle a envoyé une réclamation à l’Administrateur car « j’aurais jamais pensé que c’était si pire que ça », le Tribunal d’arbitrage lui a posé la question : «quand est-ce que vous avez pensé que c’était si pire que ça? ».

[286] La Bénéficiaire a répondu : « quand Monsieur Parent a dit que les résultats étaient nocifs avec son rapport ».

[287] Vu le contenu du rapport de Louis Parent (pièce A-9) qui indique que les prélèvements ont été effectués le 28 avril 2014, que le rapport du laboratoire est daté du 1er mai 2014, et que le rapport de Louis Parent est daté du 9 mai 2014, le Tribunal d’arbitrage conclut que cette conversation avec « Monsieur Parent » quant aux résultats nocifs avec son rapport, n’a pu avoir lieu qu’à partir du 1er mai 2014.

[288] C’est donc à partir du 1er mai 2014 (ou après, le 9 mai) que les Bénéficiaires ont pris connaissance que leur maison avait un vice majeur, que leur problématique n’était pas un « problème d’odeur », mais la présence de « résultats nocifs » de la qualité de l’air, et présence de moisissures, qui les a poussés à décider de quitter les lieux.

[289] Quant à « Isolation mur de fondation (styrofoam) », dénoncée dans le rapport de Louis Parent, elle est dénoncée le 28 avril 2014 par mise en demeure (pièce 4.1), jour même de la visite de Louis Parent.

[290] La dénonciation reçue par l’Administrateur le 1er octobre 2014 n’était pas tardive. Quant à la date de réception de la mise en demeure du 6 août 2014 par l’Entrepreneur, il fut prouvé à l’audience non seulement qu’elle fut reçue par l’Entrepreneur en août, mais que les experts de l’Entrepreneur s’étaient déplacés sur place en juin 2014 pour répondre au rapport de Louis Parent (voir paragraphe [121] ci-haut).

[291] L’Entrepreneur plaide en même temps une première manifestation d’un vice majeur mais il plaide néanmoins que le vice n’existe pas et que l’odeur n’était qu’une odeur d’urine de chien ou de renfermé; il plaide  

[291.1] que l’odeur sentie par la mère de la Bénéficiaire en décembre 2013 est la première manifestation d’un vice dont il nie l’existence,

[291.2] que l’odeur serait d’après son expert Ouaras semblable à de l’urine de chien ou une odeur de renfermé comme une maison fermée et sans aération depuis longtemps; comment plaider aussi que ce genre d’odeur puisse éveiller un soupçon suffisant de la gravité et de l’étendue des problèmes liés à la présence d’un vice de construction favorisant l’apparition de moisissures?

[292] À supposer que l’Entrepreneur voulait signifier qu’il plaidait ce point d’une façon subsidiaire à supposer que le Tribunal d’arbitrage maintienne la position de l’Administrateur quant à l’existence du vice majeur, le Tribunal mentionne d’abord qu’il n’est pas saisi par la réclamation des Bénéficiaires pour l’odeur, cette réclamation ayant été rejetée par l’Administrateur qui devait décider si elle constituait un vice majeur.

[293] À supposer qu’il y ait un lien entre l’odeur et la présence de moisissures, la Bénéficiaire a témoigné croire avant la réception des « résultats nocifs » mentionnés dans le rapport de l’expert Louis Parent en mai 2014 qu’elle avait un simple problème d’odeur, d’abord causé par sa laveuse, puis elle a dit avoir lavé les semelles des bottes des occupants, puis avoir nettoyé son échangeur d’air, puis en mars avoir cru que l’odeur venait du dégel printanier.

[294] Dans l’affaire Syndicat des Copropriétaires du 716 Saint-Ferdinand et al. c. Développements TGB et La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ[17], notre confrère Me Jean Philippe Ewart dispose ainsi de l’objection quant au délai de dénonciation en présence d’un vice majeur :

Point de départ du délai de dénonciation

[87]      La preuve révèle que nous sommes dans un cadre de non simultanéité de la faute (vice de conception et construction - absence de blocage et d’entretoisement) et du préjudice (affaissement de structure et al.) et que la manifestation du préjudice peut être qualifiée de tardive qui emporte la manifestation graduelle de l’art. 27 [note du soussigné, équivalent à l’article 10 pour la copropriété] du Règlement. […]

 

[91]      La doctrine nous enseigne sous la plume de Jean Louis Beaudouin, citant d’autre part l’auteur et une jurisprudence très abondante de nos tribunaux, dans un cadre de simultanéité lorsque la faute et le dommage se produisent en même temps :

 

« La victime n’a pas à attendre que le dommage se réalise complètement, du moment que sa manifestation est certaine. » [BAUDOUIN, J.L. et DESLAURIERS, P., La responsabilité civile, 7e éd., Cowansville, Ed. Yvon Blais inc, 2007, para.1-1419.]

 

et dans le cadre de non-simultanéité de la faute et du dommage, Beaudouin indique :

« … que l’on doit se reporter au fondement même de la prescription extinctive : la sanction d’une conduite négligente. On doit donc, à notre avis, partir du jour où une victime raisonnablement prudente et avertie pouvait soupçonner le lien entre le préjudice et la faute » Idem, para.1-1420. VOIR pour jurisprudence la note 92, p. 1199 sous le para. 1-1420.

 

[92]      Applicable en l’espèce, Baudouin indique sous une analyse de l’art. 2926 C.c.Q. et de la manifestation graduelle, que :

 

« …la prescription du recours commence à courir du jour où il se manifeste pour la première fois. Le législateur entend probablement, par cette expression, la faire débuter au jour où le réclamant constate le premier signe appréciable ou tangible de la réalisation du préjudice, alors même qu’il ne s’est pas totalement réalisé… » Idem, no. 1-1421

 

[93]      Baudouin conclut que la réalisation du préjudice se doit d’être entendue dans un sens subjectif, qu’il faut que la victime l’ait identifiée Idem, no. 1-1420. et que la connaissance du préjudice et donc du dommage est essentielle à la réunion des conditions juridiques du droit de poursuite.

 

[94]      L’on retrouve à diverses jurisprudences une approche de la manifestation graduelle ou tardive, tel dans l’affaire Ménard c. LeBire 2008 QCCS 3274 où, dans le cadre d’une révision judiciaire d’une décision arbitrale sous le Règlement, la juge Sévigny ne trouve pas motif sur ce point à réviser la décision de l’arbitre qui (en 2005) sous une preuve d’un expert qui opinait « qu’une fissure qui peut paraître anodine … ce n’est que quand la fissure s’élargit ou devient plus longue … » ) - alors que l’entrepreneur avait déjà été appelé à réparer une fissure à cet endroit en 2002 - détermine que ce n’est que ce trois ans plus tard qu’un vice allégué sous 2118 C.c.Q. s’est manifesté. […]

 

[107]   Il faut conclure de cette série d’analyses telles que le révèle la preuve […] que divers copropriétaires qui se sont penchés spécifiquement sur la question et ont procédé à des vérifications et inspections avec des professionnels du bâtiment n’ont certes pas douté de la possibilité d’un vice de construction et ce à tout le moins selon la preuve jusqu’au 15 mai 2009; la dénonciation serait dans les délais (à l’intérieur du délai de 6 mois - par quelques jours) si on cristallisait une découverte ou première manifestation appréciable ou tangible à la date de remise du Rapport RB - mais le Tribunal considère que cette manifestation est même postérieure à cette date.

[108]   La preuve est significativement en faveur que la manifestation du vice de construction n’a pu être constatée que suite à l’inondation de novembre 2009 et aux expertises subséquentes alors qu’il a été procédé à des ouvertures exploratoires afin de constater l’absence de blocage et des dommages importants à plusieurs solives.

[295] Déjà il y a cinq ans dans l’affaire Crystal Kaczkowski vs. Les Constructions Arsenault & Frères Inc. et La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ Inc,[18] le soussigné écrivait :

the Beneficiary continued during the period between April and August 2009 to open her back door occasionally, and did not pay attention to the crack until the real estate agent told her in August 2009 that she had a problem and that she should file a claim about it.

 

The Beneficiary, who is a layperson, who hired experts to build her house, cannot be blamed for not knowing, at the sight of a benign, subtle or tiny crack, that there would be a defect within the meaning of Section 2118 of the Civil Code, to which Section 10(5) of the Regulation refers precisely.

[296] Dans Crystal Kaczkowski le soussigné cite l’honorable juge Beetz de la Cour suprême dans Desgagné c. Fabrique de la paroisse St-Philippe d’Arvida, [1984] 1 R.C.S. 19, qui écrit :

Si le fardeau est lourd pour le tribunal, qui est le plus souvent assisté d’experts appelés par toutes les parties ou désignés d’office et qui a l’avantage unique de prendre connaissance, des mois et même des années après qu’elles se sont produites, des circonstances qui ont donné naissance au litige et de leur évolution, ce fardeau est, dans la majorité des cas, insupportable pour le propriétaire qui ne connaît encore ni le déroulement ni la conclusion des événements. Ce propriétaire est un profane. Il a engagé des experts ou professionnels de la construction auxquels il fait confiance […]

[297] Dans l’affaire Élizabeth Séguin et Gilles Séguin et Constructions Cholette Inc. et La Garantie des Bâtiments Résidentiels neufs de l'APCHQ Inc[19], notre collègue Alcide Fournier écrit :

[6] Dans sa décision du 4 octobre 2006, l'administrateur mentionne que les vices cachés ou vices majeurs doivent être dénoncés par écrit à l'entrepreneur et à l'administrateur dans un délai raisonnable ne pouvant excéder 6 mois de leur découverte ou première manifestation, ce qui n'est pas le cas dans le présent dossier. […]

[20] Dans le présent litige, la décision de l'administrateur porte uniquement sur la recevabilité de la demande de réclamation des bénéficiaires de sorte que la décision de l'arbitre soussigné doit se limiter à cet élément.

[21]  La preuve révèle que des dommages mineurs sont survenus à la toiture de 2003 à 2006, et que ces dommages ont été réparés par l'entrepreneur.

[22] Pour les bénéficiaires, il s'agissait de problèmes mineurs causés par le vent, puisque la région de Mont St-Hilaire est réputée pour ses vents forts et fréquents (nos soulignés)

[23]  Le 17 février 2006, les dommages à la toiture sont importants et suite à l'avis d'un expert, le bénéficiaire prend conscience que l'ensemble de la toiture est affecté par un défaut majeur, soit l'installation déficiente des bardeaux de recouvrement. (Nos soulignés)

[24]  Dans l'affaire Martin Lapointe et Marie-Claude Fortin contre Construction Réjean D'Astous et la Garantie de l'APCHQ Inc., l'arbitre soussigné affirmait aux paragraphes 65 et 66 et ce, après l'analyse de la jurisprudence de tribunaux civils :

65.           « De l'avis du soussigné, il ne suffit pas d'affirmer avoir pris conscience de l'importance d'un problème à une date donnée pour qu'automatiquement, la compilation du délai pour aviser par écrit l'entrepreneur et l'administrateur commence à cette date. »

66.           « Il faudrait à tout le moins que cette affirmation soit corroborée par certains faits concrets, comme cela peut se produire lors de dommages progressifs, par exemple. »

[25] Dans le présent dossier, la prise de conscience de la gravité de la situation a été provoquée d'abord par l'occurrence d'un dommage beaucoup plus important le 16 février 2006 et par le dépôt d'un  rapport d'expert qui affirme que l'ensemble des bandeaux du toit ont mal été cloués et collés. (Nos soulignés)

[26] Ainsi l'arbitre soussigné estime que la date du 17 février 2006 doit être considérée comme étant la date de départ pour la compilation du délai.

[298] Dans l’affaire Linda Jacques et al. et A.G.P. Couture et Fils et La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ[20], où il était question de vice majeur, notre collègue Me Reynald Poulain écrit :

[63]  Il s'agit évidemment, et la preuve à cet égard apparaît évidente au soussigné, d'une situation où le vice allégué provoque des manifestations à l'immeuble qui se découvrent graduellement et dont l'importance s'accentue, pour certaines de ces manifestations, dans le temps. La preuve est à l'effet que moins de six (6) mois se sont écoulés entre la demande de réclamation et la première manifestation du vice allégué par les Bénéficiaires qui se manifeste, rappelons-le, graduellement. À l'été 2009, le représentant de l'Entrepreneur s'est rendu à la résidence des Bénéficiaires et a constaté une dénivellation de 6mm à 8mm. Cette dénivellation n'apparaissait aucunement problématique à l'Entrepreneur puisqu'il a qualifié, selon les dires des Bénéficiaires, cet écart comme étant négligeable. Force est de constater qu'un an plus tard, l'écart était de 27mm selon les mesures des Bénéficiaires et encore plus important après les vérifications de la firme LVM à leur rapport A-5. C'est à ce moment que les Bénéficiaires ont véritablement eu connaissance du vice selon le Tribunal. Lors de l'arbitrage, tous ont constaté que l'affaissement de la résidence s'était également aggravé depuis la visite de l'Entrepreneur à l'été 2009 et les experts ont même invoqué de possibles tassements différentiels additionnels pour le futur. La demande a donc été formulée à l'intérieur du délai de six (6) mois de la connaissance, en juin 2010, du vice par les Bénéficiaires. [Nos soulignés]

[64]        Pour ces raisons, l'irrecevabilité soulevée par les procureurs de l'Administrateur et de l'Entrepreneur est rejetée.

[299] La Cour supérieure dans l’affaire Services loisirs et tourisme St-Victor c. Réfrigération Thetford inc.[21] rejetait une requête en irrecevabilité sur la base de la prescription en ces termes, considérant que les  « manifestations n'étaient ni appréciables ni clairement reliées à ou causées par une isolation déficiente des murs de l'aréna, comme l'avance aujourd'hui la demanderesse »:

[27]        Le tribunal est d'avis que le délai de prescription qui s'applique ici est celui de trois ans prévu à l'article 2925 du Code civil du Québec. Si le droit d'action résulte d'un préjudice qui se manifeste graduellement, ce délai court, selon l'article 2926 C.c.Q., à compter du jour où il se manifeste pour la première fois.

[28]        Même si la demanderesse appuie son recours sur l'article 2118 C.c.Q., en espérant sans doute rallonger le délai de prescription et aussi pouvoir demander une condamnation solidaire, le tribunal estime qu'il n'a pas à décider cette question à ce stade-ci, d'autant plus que le tribunal n'a pas les éléments de preuve pour le faire.

[29]        La demanderesse prend la position que son droit d'action est né à l'hiver 2009. Voici les allégations de sa procédure à cet égard :

34.        Au cours de l'hiver 2009, l'eau coule sur les murs de l'aréna et on perçoit des problèmes importants de condensation sur les murs;

35.        La demanderesse procède alors à une nouvelle expertise qui révèle que le système d'isolation des murs présente des discontinuités importantes, au niveau du pare-air, pare-vapeur (étanchéité à l'air et à la vapeur d'eau) de même qu'au niveau de l'isolant;

36         De plus, la structure d'acier des murs est rouillée pendant que le plancher de l'aréna, constitué d'une dalle de béton non isolée, s'est soulevé et a endommagé la base des murs en question;

37.        Le système d'isolation des murs, installé en 2004, est complètement affaissé et ne fonctionne pas pendant que les deux systèmes de refroidissement de glace installés, l'un en 2004 et l'autre en 2007, ont toujours été incapables de fournir la fabrication de glace promise par leurs fournisseurs;

38.        Ces problèmes sont causés par le fait que le type d'isolation des murs est inadéquat pour assurer le fonctionnement d'un tel système de fabrication de glace;

[30]        Si ces allégations sont tenues pour avérées, la demanderesse a raison de soutenir que c'est à ce moment que son droit d'action est né et donc que le délai de prescription a commencé à courir.

[31]        Les défenderesses plaident que les premières manifestations du problème sont apparues dès septembre 2005, lorsque la demanderesse n'a pu fabriquer de glace d'une qualité acceptable avant le mois de novembre 2005.

[32]        Les défenderesses ajoutent que les mêmes difficultés se sont présentées en 2006 et à l'automne 2007 et ont persistées même après qu'un nouveau système de refroidissement eut été installé.

[33]        Mais il ressort des allégations de la requête introductive d'instance que ces manifestations n'étaient ni appréciables ni clairement reliées à ou causées par une isolation déficiente des murs de l'aréna, comme l'avance aujourd'hui la demanderesse. La demanderesse était justifiée de croire que les difficultés à faire de la glace résultaient d'un système de réfrigération inefficace. Cette croyance a sans doute été renforcée par la conclusion de l'expertise de la défenderesse Les Entreprises Danplex inc. voulant que « l'isolation de la bâtisse est adéquate et que le problème n'y est pas relié ». Même si l'expert de Danplex a suggéré à la demanderesse de vérifier avec un spécialiste en isolation concernant une différence de température à l'endroit d'une poutrelle de métal, cette recommandation ne changeait pas la conclusion générale de l'expertise.

[34]        Il se peut que la conclusion à laquelle en est arrivée Danplex ait été erronée, mais il n'appartient pas au tribunal d'en décider ici. Qu'il suffise de conclure que la demanderesse était justifiée de croire que ses difficultés à fabriquer la glace n'étaient pas reliées à un problème d'isolation. Ce n'est qu'à l'hiver 2009, selon la procédure introductive d'instance, que des manifestations appréciables et sérieuses pointaient vers un problème d'isolation.

[35]        Le tribunal conclut que le recours de la demanderesse n'était pas prescrit lorsqu'il fut intenté en février 2010.

[36]        Les moyens préliminaires en irrecevabilité sont donc rejetés.


 

[300]  Le présent dossier concerne un problème de vice majeur dont la Bénéficiaire a connaissance après la visite de Louis Parent en avril 2014 et lors de son rapport en mai 2014.

[301] Tous les éléments qui sont venus à l’esprit des Bénéficiaires (laveuse, bottes, échangeur d’air et dégel) n’ont rien à voir avec la connaissance d’un vice majeur entraînant la perte partielle ou totale du bâtiment en vertu de l’article 2118 C.c.q.

[302] L’Entrepreneur a soumis au soutien de ses prétentions la décision rendue par notre collègue Jean Morissette dans l’affaire Syndicat des Copropriétaires Lot 3 977 437 c. Gestion Mikalin et La Garantie Abritat[22].

[303] L’Administrateur a décidé de ne pas soulever la question du non-respect de délai de dénonciation; de plus, la décision rendue par l’arbitre Morissette dans Syndicat des Copropriétaires Lot 3 977 437 est sûrement connue de lui puisque son procureur lors de cette décision est la même que dans la présente cause devant le soussigné.

[304] Dans cette cause, l’arbitre Jean Morissette a choisi de motiver sa décision en citant de nombreuses décisions arbitrales applicables aux faits de la cause devant lui.

[305] Face à une situation différente, l'arbitre Jean Morissette écrit, dans l’affaire Diallo et 4176855 Canada Inc., et la Garantie d'Habitation du Québec Inc[23] :

 [65] La preuve de l'expert-ingénieur n'est pas contredite à l'effet que pour une personne non-initiée au domaine de la construction, les pentes de terrain n'apparaissent pas une question importante. J'ajoute que l'inquiétude exprimée par madame Diallo dans son courriel du 28 juin 2010, pièce B-2, n'est pas la preuve qu'elle en connaissait la gravité et l'étendue. Selon la preuve, ce n'est qu'au moment des pluies torrentielles de juin 2011 qu'elle réalise l'étendue du problème. C'est à partir de ce moment que ce vice qui apparaît graduellement ne peut plus être caché.

[66] La date de l'inondation du 24 juin 2011 est le point de départ d'une connaissance de la gravité et l'étendue du vice qu'entraine l'aménagement déficient. La dénonciation du 4 juillet 2011 est reçue par l'Administrateur le 8 août 2011, pièce A-3. Cette dénonciation effectuée dans les six (6) mois de l'événement qui permettait à la Bénéficiaire d'en soupçonner toute la gravité et l'étendue est valide. »

[306] Vu que

[306.1] la visite de Louis Parent a eu lieu le 28 avril 2014,

[306.2] les résultats de laboratoire sont sortis le 1er mai 2014,

[306.3] la Bénéficiaire a témoigné avoir eu peur sur réception de ces résultats alors qu’avant elle ne croyait avoir qu’un simple problème d’odeur, et

[306.4] le 1er mai est cinq mois avant la dénonciation reçue par l’Administrateur le 1er octobre et bien avant, les dénonciations reçues par l’Entrepreneur de mai/juin à août 2014,

le Tribunal d’arbitrage, considérant, en plus de sa conclusion personnelle, qu’il était raisonnable pour l’Administrateur de ne pas soulever cette objection dans sa décision du 26 janvier 2015, rejette l’objection préliminaire de l’Entrepreneur en irrecevabilité quant au délai.

[307] Le Tribunal d’arbitrage souligne que l’Entrepreneur a plaidé que le délai de dénonciation était de six mois, tout comme le stipule l’article 10(5) Règlement en vigueur avant le 1er janvier 2015; la mention des six mois n’apparaît plus dans la version amendée en vigueur le 1er janvier 2015, remplacée par « délai raisonnable »; vu la conclusion à laquelle il en arrive, le soussigné n’a pas, dans cette section de sa décision, à discuter de la rétroactivité du nouveau Règlement amendé quant au délai de dénonciation, celle-ci étant reçue dans un délai de 5 mois.

Les garanties procédurales ou équité procédurale et justice naturelle

 

[308] Alors que la preuve était close et juste au moment des plaidoiries, l’Entrepreneur plaide comme moyen préliminaire qu’il y a lieu de rejeter la décision de l’Administrateur sur la base du non-respect des « garanties procédurales » par ce dernier.

[309] L’Entrepreneur n’a cité aucun article du Règlement, ni soumis aucun précédent (décision ou autorité) et ce point de droit n’a jamais été plaidé devant le soussigné.

[310] Avec respect, vu la preuve au dossier, et vu le Règlement, le Tribunal d’arbitrage rejette la requête de l’Entrepreneur à l’effet que la décision de l’Administrateur doit être rejetée pour la seule raison que l’équité procédurale et la justice naturelle n’ont pas, de l’avis de l’Entrepreneur, été respectées.

[311] Considérant qu’il existe deux courants jurisprudentiels différents pour qualifier les décisions de l’Administrateur, le soussigné passera en revue les faits de ce dossier qui pourraient y référer, même si les deux courants différents conduisent de la même façon, la partie insatisfaite de la décision de l’Administrateur, à l’arbitrage prévu au Règlement.

Les faits au dossier et les arguments de l’Entrepreneur

 

[312] La base de l’argument de l’Entrepreneur est une phrase de la décision de l’Administrateur du 26 janvier 2015 à l’effet que lors de l’inspection de l’Inspecteur-conciliateur du 3 décembre 2014, les parties ont convenu d’attendre la production d’un rapport supplémentaire le 5 janvier.

[313] Par la suite, décision a été rendue sans que l’Entrepreneur n’ait reçu copie du rapport supplémentaire envoyé directement par le procureur des Bénéficiaires à l’Inspecteur-conciliateur sans copie en c.c. au procureur de l’Entrepreneur.

[314] L’Entrepreneur plaide le défaut pour l’Administrateur quant aux « garanties procédurales » alors même que :

[314.1] le procureur n’a posé aucune question à l’Entrepreneur personnellement et ce dernier, personnellement, n’a donné aucune preuve à cet effet à l’audience, sur la visite de l’Inspecteur-conciliateur du 3 décembre et de ce que l’Entrepreneur a convenu ou n’a pas convenu, etc.;

[314.2] le soussigné n’a pu poser ces questions au témoin puisque ce « moyen en irrecevabilité » est apparu seulement au stade des plaidoiries;

[314.3] le seul remède qu’il demande au Tribunal d’arbitrage est le rejet de la décision, sans préciser

[314.3.1]     s’il demande de retourner le dossier à l’Inspecteur-conciliateur pour qu’il rende une autre décision (ce qu’il n’a pas demandé, alors que l’Inspecteur, qui fut le dernier à témoigner, a répondu par la positive, à la question s’il aurait rendu la même décision après avoir entendu la preuve à l’audience),

[314.3.2]     s’il demande ou non, un rejet sans que le soussigné ne se prononce sur le fond.

[315] Le Tribunal d’arbitrage considère dans le présent dossier qu’il doit se prononcer sur le fond du différend, et agir autrement irait à l’encontre des buts du Règlement qui a prévu une procédure expéditive pour réparer rapidement les vices et malfaçons (si ils existent), ou pour répondre de façon rapide et à moindre coût aux différends, comme l’a jugé notre Cour d’appel dans Consortium M.R. Canada Ltée c. Office municipal d’habitation de Montréal[24] :

 [18] La procédure d'arbitrage expéditive prévue au Règlement pour réparer rapidement les malfaçons est, comme le note la juge, un complément aux garanties contre les vices cachés du Code civil. Régime d’ordre public[5], le Règlement vise notamment à obliger que les réparations des bâtiments résidentiels neufs soient effectuées rapidement par l'entrepreneur ou prises en charge par l'administrateur de la garantie. […]

 

puis la Cour supérieure dans Garantie habitation du Québec inc. c. Lebire[25]:

[72] Qui plus est, l'intention du législateur est clairement exprimée, tant dans la Loi que dans le Règlement : il a voulu mettre en place un système pour répondre de façon rapide et à moindre coût aux différends pouvant survenir entre l'entrepreneur et l'acheteur d'un bâtiment résidentiel neuf. […]

[316] La décision du 26 janvier 2015 rapporte que l’Inspecteur s’est fait dire par le Bénéficiaire sur place à l’inspection, qu’un rapport allait venir au plus tard le 5 janvier 2015.

[317] L’Inspecteur rapporte que le Bénéficiaire et l’Entrepreneur ont accepté que la décision soit rendue après cette date :

De plus, il fut convenu avec l’entrepreneur et les bénéficiaires que l’administrateur rendra sa décision avec les documents déposés au dossier, au surplus des documents reçus en date du 5 janvier 2015, et ce, bien que l’inspection ait eu lieu le 3 décembre 2014.

[318] Le Tribunal d’arbitrage lit ce dernier paragraphe en parallèle de l’alinéa 5 de l’article 18 du Règlement et conclut que l’Inspecteur expliquait dans sa décision la raison du délai de production de sa décision :

           5°    dans les 20 jours qui suivent l'inspection, l'administrateur doit produire un rapport écrit et détaillé constatant le règlement du dossier ou l'absence de règlement et en transmettre copie, par poste recommandée, aux parties impliquées. En l'absence de règlement, l'administrateur statue sur la demande de réclamation et ordonne, le cas échéant, à l'entrepreneur de rembourser au bénéficiaire le coût des réparations conservatoires nécessaires et urgentes et de parachever ou corriger les travaux dans le délai qu'il indique, convenu avec le bénéficiaire.

 

[319] Le 6 janvier 2015, le procureur des Bénéficiaires envoie ce nouveau rapport d’expert à l’Inspecteur-conciliateur, sans mettre en copie le procureur de l’Entrepreneur, connu du procureur du Bénéficiaire.

[320] L’Inspecteur envoie un courriel au Bénéficiaire personnellement (non au procureur qui lui a fait l’envoi), lui demandant de faire parvenir copie de ce rapport à l’Entrepreneur, ce que le Bénéficiaire ne fait pas (le Bénéficiaire n’a pas témoigné personnellement à ce sujet, donc sous réserves).

[321] L’Inspecteur rend une décision datée du 26 janvier, alors que l’Entrepreneur n’a pas eu connaissance du rapport du 5 janvier (d’après le procureur de l’Entrepreneur, aucune question n’a été posée à l’Entrepreneur personnellement à ce sujet), donc dans l’impossibilité de le commenter et/ou le contester.

[322] L’Entrepreneur plaide que la décision est viciée et devrait être annulée parce que

[322.1]  les garanties procédurales, soit l’équité procédurale et la justice naturelle, n’ont pas été suivies, puisque l’Administrateur aurait dû lui donner copie du rapport avant de rendre sa décision basée sur ce rapport, et lui donner la possibilité d’y répondre avant de rendre sa décision,

[322.2] l’Inspecteur aurait dû retourner sur les lieux pour valider les conclusions de ce nouveau rapport d’expert.

[323] Quant aux garanties procédurales, les Bénéficiaires plaident que c’était plutôt à l’Entrepreneur de s’enquérir le 5 (ou le 6?) si le rapport avait été émis et en exiger une copie, alléguant un « contrat judiciaire » puisque l’Entrepreneur a consenti à ce que la décision soit rendue après la réception d’un rapport.

[324] Notons que le Tribunal d’arbitrage, faute de preuve testimoniale de la part de l’Entrepreneur qui ne s’est pas exprimé sur ce qui s’est passé le 3 décembre, faute de question à ce sujet, donc faute de preuve concluante, rejette la prétention des Bénéficiaires quant à l’existence d’un contrat judiciaire.

[325] Quant au fond, le rapport du 5 janvier 2015 n’est pas le premier rapport mentionnant la présence de moisissures sur les lieux, ou de murs de fondation sans pare-vapeur conforme au Code National du Bâtiment, mais il est vrai qu’il aborde pour la première fois la question du prélart, des insectes et de l’humidité à son niveau.

[326] Dans le présent différend,

[326.1]  le Règlement prévoit spécifiquement un mécanisme d’arbitrage;

[326.2] l’Entrepreneur s’est prévalu de son droit à l’arbitrage;

[326.3] l’Entrepreneur s’est présenté à l’audition de l’arbitrage avec un avocat d’expérience et six témoins experts (dont un a pu témoigner par écrit, une autre par téléphone pour éviter les frais de déplacement)

l’Entrepreneur a donc pu bénéficier des « garanties procédurales » dans le processus prévu par les articles 18 et 19 du Règlement après la réception d’une dénonciation des Bénéficiaires suivie d’une décision de l’Administrateur.

[327] Le Tribunal d’arbitrage rejette l’argument de l’Entrepreneur que l’Inspecteur-conciliateur était obligé de confirmer sur les lieux les conclusions d’un rapport d’expert.

[328] Il appartenait ici à l’Inspecteur-conciliateur de faire ce choix s’il considérait ou non que ce fût nécessaire et si une des parties n’était pas d’accord avec les conclusions de sa décision rendue par la suite, elle pouvait la porter en arbitrage, et c’est ce qu’a fait l’Entrepreneur.

[329] Qui plus est, d’une part, l’Inspecteur a témoigné à l’effet que les dossiers de moisissures étaient considérés comme urgents, et que même, une inscription « moisissures » à cet effet apparaissait sur les dossiers.

[330] D’autre part, et cela est soumis avec respect puisqu’il n’y a eu aucune preuve quant aux raisons du retard et que les procureurs ont tous bien collaboré au déroulement du présent arbitrage et de l’audience, le Tribunal soussigné a demandé à les 11 juin, 12 juin, 16 juin, 20 juin et 22 juin 2015 (trois mois et demi après la réception du rapport du 5 janvier 2015 par le procureur) à l’Entrepreneur quand il prévoyait produire son rapport d’expert supplémentaire et, vu l’absence de réponse quant à une date, a été contraint d’émettre une ordonnance contenant un échéancier contraignant.

[331] Faut-il conclure de l’argument de l’Entrepreneur que l’Inspecteur aurait dû avant de pouvoir rendre sa décision le 26 janvier 2015, attendre jusqu’au 16 août 2015 pour le deuxième rapport de Dahi Ouaras en réponse au rapport ExpertBâtiment.Ca reçu par le procureur de l’Entrepreneur le 3 mars 2015[26], soit cinq mois et demi avant? Quoiqu’il en soit, le recours à l’arbitrage a permis à l’Entrepreneur de soumettre tous ses rapports d’experts et sa preuve testimoniale à l’analyse d’un Tribunal d’arbitrage auquel il a soumis son différend quant au point 1 de la décision rendue le 26 janvier 2015 par l’Administrateur, tout comme cela a été permis aux Bénéficiaires lors de l’audience de cet arbitrage.

Les précédents jurisprudentiels et le Règlement

 

[332] La question de l’équité procédurale et la justice naturelle ne peut être considérée indépendamment du Règlement adopté par le Gouvernement du Québec, et jugé à au moins deux reprises comme étant d’ordre public par la Cour d’appel[27].

[333] L’Administrateur plaide que le Règlement garantit, les garanties procédurales en permettant à l’Entrepreneur non satisfait d’une décision de l’Administrateur d’aller en arbitrage, donnant à l’Entrepreneur la possibilité de répondre à ce rapport et à la décision.

[334] Dans l’affaire 9056-1457 Québec inc. c. Chartier[28], la Cour supérieure écrit :

[12] […] Chose certaine, il semble clair que le législateur n'a pas voulu que l'acquéreur d'une maison neuve soit tenu d'entreprendre des procédures devant les tribunaux de droit commun pour faire respecter la garantie à laquelle est tenu l'entrepreneur.

[13]            On peut tirer de ce contexte un cadre d'interprétation pour les litiges susceptibles de se soulever dans l'application et l'interprétation du Règlement. […]

[335] Récemment en juin 2015, dans l’affaire Syndicat des copropriétaires 6613-6635 boul. des Laurentides Laval c. 9141-0001 Québec Inc. et Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ[29], notre collègue Yves Fournier

[335.1] écrit que « la décision du conciliateur se veut une décision administrative ne découlant aucunement d’une audition »,

[335.2] tout en ajoutant que le processus d’arbitrage prévu au Règlement permet à celui qui le demande de produire une preuve nouvelle de celle vue par l’Inspecteur-conciliateur:

[68]      Encore faut-il relire l’article 19 où le législateur utilise les mots « soumettre le différend » :

 

19.       Le bénéficiaire ou l’entrepreneur, insatisfait d’une décision de l’administrateur, doit, pour que la garantie s’applique, soumettre le différend à l’arbitrage dans les 30 jours de la réception par poste recommandée de la décision de l’administrateur…(Je souligne)

 

[69]      L’une des parties n’étant pas satisfaite de la décision du conciliateur peut soumettre, présenter le différend à l’arbitrage et ce différent reste tout entier. Le législateur n’a jamais restreint la preuve pouvant être présentée.

 

[70]      Mon collègue Jeffrey Edwards écrivait dans la décision arbitrale Gauthier et Gagnon c. Goyette Duchesne Lemieux inc. et La Garantie des Bâtiment Résidentiels Neufs de l’APCHQ inc. (1) :

 

[130Même s’il n’y a pas d’erreur grave dans la décision de l’inspectrice-conciliatrice, il n’en demeure pas moins que la demande d’arbitrage donne droit à un procès de novo et le Tribunal d’arbitrage est requis de faire sa propre évaluation de la preuve administrée contradictoirement et d’en tirer ses propres conclusions.  Il a également bénéficié d’une preuve plus complète que ce qui a été disponible à l’inspectrice-conciliatrice. (Je souligne)

 

[71]      L’arbitre Marcel Chartier, dans l’affaire Latreille c. Léonard Caron et Fils Ltée et La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ inc. (2), écrivait :

 

[9]  L’arbitrage est un peu comme un procès « de novo ».  Aussi le procureur de l’administrateur a-t-il passé en revue tous les délais du Règlement, et il a fait la preuve écrite et testimoniale qu’aucun n’a été respecté, en y incluant bien sûr, celui mentionné dans la décision de l’administrateur en date du 16 janvier 2008.

 

[72]      L’arbitre peut trancher toute question de droit ou de fait nécessaire à l’exercice de sa compétence.  Il est possible que les parties procèdent uniquement sur la foi du dossier de l’Administrateur sans présenter de nouvelle preuve.  Il est possible aussi de présenter une nouvelle preuve tant pour le Bénéficiaire que l’Entrepreneur.  Un fleuve de décisions le confirme.

 

[73]  L’arbitrage permet sans l’ombre d’un doute la possibilité d’approfondir le dossier par une enquête plus poussée.  Un élément de preuve nouveau qui vient confirmer ou infirmer un aspect du dossier original peut donc être présenté lors de l’audition.  Je dirais que toute preuve pertinente est donc admissible dans la mesure où les règles de l’équité procédurale sont respectées.  J’en conclue que l’arbitre a le pouvoir de livrer toute décision qui aurait dû être rendue en premier lieu ce qui lui permet d’entendre toute nouvelle preuve portant sur l’objet de la décision contestée.  […]

 

[74]      La jurisprudence en matière arbitrale et rendue en vertu du Règlement nous permet de constater que la preuve d’éléments subséquents sera recevable si elle facilite à infirmer ou à confirmer le bien-fondé de la décision du conciliateur et évidemment si elle est en lien avec la demande initiale.

 

[75]      Albert Mayrand, dans Dictionnaire de maximes et locutions latines utilisées en droit (3) définit ainsi le procès de novo :

 

Le procès de novo est la reprise d’un procès déjà instruit, soit parce que le premier procès est entaché d’une irrégularité, soit parce qu’on en a appelé du jugement rendu.  À la différence de l’appel, dans un procès de novo on recommence le procès.  Le procès de novo permet entre autre de recevoir, lors de l’audition, une preuve totalement différente de celle entendue en première instance.  Le tribunal peut aussi considérer de nouveaux éléments de preuve pour rendre sa décision.

 

[76]      L’arbitrage n’est pas un véritable appel, au sens où on l’entend habituellement.  La décision du conciliateur se veut une décision administrative ne découlant aucunement d’une audition.  L’arbitre ne juge pas non plus en fonction de mémoires présentés par les parties, accompagnés de notes sténographiques.

 

[336] Dans l’affaire 3984583 Canada Inc. (Jobiko Construction) et La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ et Lina Al-Karkhi et al[30], notre collègue Me Johanne Depatis écrit :

[150]       Avec égards, d’une part l’administrateur n’a pas de caractère judiciaire puisqu’il est en fait davantage assimilable à un assureur devant son assuré.

[151]       D’autre part, selon le régime en place, tout bénéficiaire ou entrepreneur insatisfait d’une décision de l’administrateur peut se pourvoir en arbitrage, ce qui est le cas dans le présent dossier. Le débat revêt alors une forme quasi-judiciaire où chacun peut faire valoir son point de vue dans un forum assujetti aux règles de justice naturelle.

[152]       En somme, une décision de l’administrateur n’est pas une décision judiciaire ni celle d’un corps public indépendant et autonome. Il s’agit plutôt, selon l'expression employée par la Cour supérieure dans La Garantie habitation du Québec c. Masson, REJB 2002-33076, de la décision unilatérale du garant, en l'occurrence l'administrateur. 

[337] Dans l’affaire Lynda Bérubé et Entrepreneur Général J.C.C. Inc. et La Garantie des bâtiments résidentiels neufs Inc. de l’APCHQ[31], notre collègue Me Bernard Lefebvre écrit :

[35]       Sur le fardeau de preuve des bénéficiaires en l’espèce, il est utile de rappeler que ce fardeau est celui de la prépondérance de preuve. La décision de l’administrateur basée sur l’exigence d’une preuve hors de tout doute est erronée à sa base et serait inopposable aux bénéficiaires en raison de cette erreur, si la décision de l’inspecteur - conciliateur de l’administrateur était de nature judiciaire et partant, assujettie à la norme de l’équité procédurale.

 

[36]       Ce n’est pas le cas. (nos soulignés)


 

 

[338] Dans l’affaire Raymond Gravel et R.L. Gravel et La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ [32], notre collègue Me Robert Masson écrit :

[20]        L’inspecteur est un employé de l’administrateur de la garantie.  L’un et l’autre agissent en vertu de l’article 18 du Règlement.  Mais la caution n’est ni un tribunal administratif, un tribunal d’arbitrage ou un organisme parajudiciaire.  C’est une entreprise commerciale.  La caution qui se rend inspecter les travaux de construction à la suite d’une réclamation d’un bénéficiaire de la garantie offerte par l’entrepreneur agit alors privément.  L’article 18 précité n’exige pas que cette inspection soit faite en présence des parties.  Et bien que l’inspecteur, à l’occasion de son inspection, invite les parties à assister à l’inspection et que par la suite il puisse tenter de les réconcilier, c’est à titre purement privé qu’il le fait ; et cette conciliation n’est pas une procédure judiciaire.  La règle Audi alteram partem ne trouve pas d’application à l’occasion de cet exercice.

[339] Il existe un autre courant dans la jurisprudence des décisions arbitrales, exprimé par notre collègue Me Jean Philippe Ewart dans l’affaire Desrochers c. Sotramont Québec et La Garantie Habitation du Québec [33] (la conclusion de cette décision est la convocation des parties à un arbitrage au fond, ce dont bénéficie l’Entrepreneur dans le présent dossier):

[175]   L’Administrateur se doit d’agir suivant un processus quasi-judiciaire lorsqu’il accomplit des actes quasi-judiciaires et le remboursement d’acomptes et la détermination d’une couverture pour vices ou malfaçons sont des actes qui portent atteinte à des droits individuels, et qui, quant à chacune des Parties dans le cadre du Règlement, sont d’une nature et gravité appropriées à être qualifiés d’actes quasi-judiciaires et à requérir que l’Administrateur agisse alors sous, et soit soumis à, un processus quasi-judiciaire.

 

[176]   L’Administrateur se doit selon le Tribunal d’assurer un processus quasi-judiciaire à ses décisions qui emportent acte quasi-judiciaire, soit le respect des règles de justice naturelle ou fondamentale (incluant l’opportunité aux parties d’être présentes aux inspections de l’Administrateur et de chacune pouvoir alors présenter les faits pertinents et leur position respective en découlant) et la nécessité, afin d’assurer ces règles, que les décisions soient motivées de façon appropriée et le corollaire que celles-ci soient rendues en bénéficiant de l’expertise requise de l’Administrateur ou des personnes agissant au sein de sa structure organisationnelle, selon la nature et importance des réclamations visées ou des déterminations requises.


 

Conclusion

 

[340] Le recours à l’arbitrage prévu au Règlement garantit à l’Entrepreneur ses droits à une équité procédurale pour faire valoir tous ses droits dans le cadre de l’application du Règlement, le législateur ayant « voulu mettre en place un système pour répondre de façon rapide et à moindre coût aux différends pouvant survenir entre l'entrepreneur et l'acheteur d'un bâtiment résidentiel neuf[34] ».

[341] Le président du Tribunal d’arbitrage soussigné, nommé dans le présent dossier en conformité avec le Règlement, neutre dans cet arbitrage, a entendu, en conformité avec le processus d’arbitrage prévu au Règlement, toute la preuve soumise par  toutes les parties, avec l’équité procédurale et la justice naturelle, en respect de la règle audi alteram partem.

[342] L’Entrepreneur a donc obtenu le remède requis alors même qu’il plaide n’avoir pu faire entendre toute sa preuve auprès de l’Administrateur.

[343] Le Tribunal d’arbitrage rejette toutefois sa demande de rejeter la décision de l’Administrateur sur cette seule base sans se prononcer sur le fond du différend entre les parties en présence.

[344] Pour les raisons détaillées plus loin, après avoir entendu et analysé toute la preuve, y compris la preuve nouvelle, le Tribunal d’arbitrage en vient à la conclusion de maintenir la décision de l’Administrateur.

[345] Même si le Tribunal d’arbitrage avait conclu que pour toute raison, il avait eu lieu de renverser le fardeau de la preuve de l’Entrepreneur qui doit normalement démontrer en quoi la décision de l’Administrateur n’était pas fondée et ce, sur la base de l’Article 116 du Règlement, le Tribunal aurait quand même maintenu la décision de l’Administrateur sur la base du fait que les Bénéficiaires ont prouvé le bien fondée de leur réclamation quant au point 1.

 

Décision contradictoire et donc, inapplicable car incompréhensible

 

[346] L’Entrepreneur affirme en plaidoirie, donc après trois jours d’audience, que la décision de l’Administrateur doit être rejetée car contradictoire, incompréhensible et non applicable.

[347] Cependant, l’Entrepreneur ne présente aucun élément à l’effet qu’il ait pu subir un quelconque préjudice résultant de l’incompréhensibilité alléguée.

[348] Il est vraiment vrai que la rédaction de la décision de l’Administrateur sort de l’ordinaire, non pas dans la partie « conclusion » mais dans l’énumération des points, puisque pour les points 2 à 6, l’Administrateur met comme titre un rapport d’expert puis énumère chaque élément de dénonciation dans le rapport mais ne traite souvent, dans cette partie de décision, que d’un seul aspect des éléments énumérés.

[349] Qui plus est, les intitulés des points 1 et 6 sont les mêmes, soit « rapport de Expertbatiment.ca daté du 5 janvier 2015 ».

[350] En contre-interrogatoire, il admet avoir transcrit à deux reprises les mêmes éléments aux points 1 et 6, mais il ajoute que c’est clair ce qui a été accueilli et ce qui a été rejeté.

[351] Le Tribunal d’arbitrage rejette l’argument de l’Entrepreneur quant à la non-applicabilité de la décision pour les raisons suivantes,

[351.1] les motifs au point 1 et la conclusion qui en découle sont clairs;

[351.2] les points 2 à 6 n’ont pas été portés en arbitrage et il n’y a donc aucun différend à trancher quant à ces points;

[351.3] la rédaction du texte au point 1, qui est le seul point qui fait l’objet de l’arbitrage, est clair, il énumère les motifs et les travaux correctifs,

En ce qui a trait à la moisissure et autres contaminants fongiques, l’expert conclut à l’effet que la concentration de bactéries est anormalement élevée sur le plancher de béton du sous-sol et sur les murs de béton du sous-sol et qu’un foyer de contamination importante est présent.

Il mentionne que les correctifs suivants sont requis, à savoir :

o   Retirer le prélart du sous-sol;

o   Retirer l’isolant rigide au sous-sol qui n’est pas pare-vapeur;

o   Effectuer une décontamination complète de la résidence selon un protocole établi.

Analyse et Décision (point 1) - De l’avis de l’administrateur, les situations observées sur place en rapport avec le point 1 rencontrent tous les critères du vice majeur. Par conséquent, l’administrateur doit accueillir la demande de réclamation des bénéficiaires à l’égard de ce point.

Et les conclusions de la décision sont aussi claires,

ordonne à l’entrepreneur d’effectuer les travaux correctifs requis en ce qui a trait au point 1, et ce, dans un délai de quarante-cinq (45) jours suivant la réception de la présente

[351.4] l’Entrepreneur soulève cet élément comme base de rejet de la décision pour la première fois en plaidoirie,

[351.4.1]     après trois jours d’audience sur le fond de l’objet du point 1,

[351.4.2]     pendant lesquels il a fait témoigner sept témoins dont six témoins experts (dont un par écrit et un par téléphone), et

[351.4.3]     pendant lesquels il a contre-interrogé les quatre témoins des Bénéficiaires, dont deux experts, et l’Inspecteur-conciliateur,

[351.4.4]     ce qui démontre que l’objet du point 1 était clair pour lui et son moyen d’irrecevabilité est non seulement tardif, mais non fondé;

[351.5] il serait pour le moins étonnant qu’un procureur prépare et procède à un procès de trois jours, assigne des témoins experts avec qui il a nécessairement parlé au préalable, sans comprendre, avant de débuter, l’objet du litige.

[352] Vu la preuve, vu l’absence claire de préjudice, l’argument soulevé par l’Entrepreneur est rejeté.

Y a-t-il vice majeur selon les articles 10(5) du Règlement et 2118 C.c.q.?

 

[353] Le Tribunal d’arbitrage conclut de la preuve de la présence d’un vice de construction qui entraîne la perte du bâtiment des Bénéficiaires sous l’article 2118 C.c.q., vice qui est couvert par le Plan de garantie géré par l’Administrateur en vertu de l’article 10(5) du Règlement.

[354] Baudouin écrit, quant aux conditions d’application de 2118 C.c.q[35] :

2.250. Mise en application. Outre les conditions relatives aux personnes visées et aux titulaires de la présomption, trois autres éléments essentiels doivent être réunis pour mettre en œuvre le régime de responsabilité prévue à l’article 2118 C.c. D’une part, il doit s’agir d’un ouvrage immobilier. D’autre part, l’ouvrage doit avoir subi une perte dans les cinq ans de la fin des travaux. Enfin, cette perte doit avoir été causée par un vice de conception, de construction, de réalisation ou encore par un vice de sol (p. 242 et 243).

[355] Le bâtiment résidentiel est un ouvrage immobilier.

[356] Le bâtiment a subi une perte dans les cinq ans de la fin des travaux.

[357] La perte a été causée par un vice de construction : les murs de fondation ne contiennent pas de pare-vapeur en conformité avec les dispositions du Code National du Bâtiment et cette absence constitue non seulement une contravention à la règle de l’art, mais aussi à la règlementation en vigueur à Saguenay[36], ce qui est en soit, un vice de construction.

[358] Ce vice de construction est contraire aux dispositions expresses de l’article 2100 c.c.q., qui stipule que l’Entrepreneur doit construire son immeuble selon la règle de l’art, disposition d’ordre public.


 

[359] Ce vice de construction, susceptible à la base d’entraîner la prolifération de moisissures, ce qui à la base peut entraîner la perte d’un bâtiment résidentiel au sens de l’article 2118 C.c.q, a, selon la preuve, entraîné la présence de moisissures dans la maison des Bénéficiaires, entraînant sa perte au sens de 2118 C.c.q.

Disposition d’ordre public

 

[360] Les dispositions de l’article 2118 C.c.q. sont d’ordre public.

2118. À moins qu'ils ne puissent se dégager de leur responsabilité, l'entrepreneur, l'architecte et l'ingénieur qui ont, selon le cas, dirigé ou surveillé les travaux, et le sous-entrepreneur pour les travaux qu'il a exécutés, sont solidairement tenus de la perte de l'ouvrage qui survient dans les cinq ans qui suivent la fin des travaux, que la perte résulte d'un vice de conception, de construction ou de réalisation de l'ouvrage, ou, encore, d'un vice du sol.

 

[361] Le 21 septembre 2015, soit une semaine avant le début de l’audience, la Cour d’appel du Québec rappelait ce qui suit dans l’arrêt Installations GMR inc. c. Pointe-Claire (Ville de)[37]:

[7] La Ville et GMR plaident d’abord que le premier juge a commis une erreur dans son analyse de la responsabilité des parties en décidant d’écarter l’application de l’article 2118 C.c.Q. et en se référant plutôt à l’article 2120 C.c.Q. Le juge reconnait que le vice constaté en est un de conception grave. Mais il décide que le fait que l’ouvrage soit rendu impropre à l’usage auquel il était destiné n’est pas suffisant pour conclure à sa perte, lorsque sa solidité et sa stabilité ne sont pas affectées.

[8] Elles ont raison.

[9] Il est bien établi, et la Cour l’a rappelé en quelques occasions, qu’une défectuosité grave entraînant des inconvénients sérieux et rendant l’ouvrage impropre à son usage constitue une perte[38]. En l’espèce, la défectuosité dont était affecté l’ouvrage constituait un vice de conception grave, qui s’est manifesté dans les cinq ans de la fin des travaux, et elle entraîne l’application de l’article 2118 C.c.Q. et la responsabilité des défenderesses GMR et CIMA. Elles peuvent toutefois s’en dégager en faisant la preuve d’un moyen d’exonération prévu à l’article 2119 C.c.Q. […]

[21] L’application de l’article 2118 C.c.Q est d’ordre public et il n’est pas possible d’y renoncer à l’avance[39]. […]

[362] Toujours l’été dernier, le 8 juillet 2015, la Cour d’appel dans SNC-Lavalin inc. c. Société québécoise des infrastructures (Société immobilière du Québec)[40] écrivait :

[79] Plus fondamentalement, l’argument mis de l’avant par SNC ignore complètement la politique législative sur laquelle repose le régime d’ordre public prévu aux articles 2118 C.c.Q. et suivants[41]. La présomption de responsabilité pour perte de l’ouvrage dans les cinq ans de la fin des travaux vise essentiellement à protéger les propriétaires et le public en général contre les dangers des ouvrages immobiliers mal construits. Outre la protection accrue par rapport au droit commun de la responsabilité, ces dispositions encouragent, par leur seul effet dissuasif, les entrepreneurs, ingénieurs et architectes appelés à diriger ou à surveiller les travaux, à prendre les précautions nécessaires au moment de poser les gestes auxquels leur mandat les oblige.

Le vice de construction

 

[363] Dans sa décision du 26 janvier 2015, l’Administrateur ordonne, comme travaux correctifs, entre autres, de « Retirer l’isolant rigide au sous-sol qui n’est pas pare-vapeur ».

[364] Le Code National du Bâtiment version 1995, stipule (article 9.25.4.1) que les murs […] doivent comporter un pare-vapeur de façon à empêcher que la vapeur d’eau contenue dans l’air intérieur ne migre dans les vides des murs.

[365] La preuve à l’audience, et la jurisprudence traitant de l’absence de pare-vapeur, démontre que la condensation de la vapeur d’eau à l’obscurité peut devenir propice à la prolifération de micro-organismes.

[366] Frédéric Gagnon, ingénieur, témoin expert de l’Entrepreneur, affirme (pièce E-6) :

Ce produit offre aussi une résistance à la perméabilité à la vapeur d’eau, mais ne rencontre toutefois pas les critères de performance exigés par le CODE NATIONAL DU BATIMENT DU CANADA pour être considéré comme une protection pare-vapeur

[367] Louis Parent, technologue en bâtiment, témoin expert des Bénéficiaires, affirme (pièce A-6) :

Ce type d’isolant a une perméabilité à la vapeur d’eau de 200 ng (ng/Pa.s.m2)[42]. Lors de l’installation de l’isolant, l’entrepreneur doit, conformément à l’’article 9.25.4 du Code de construction du Québec[43] 2005, faire l’installation d’un pare-vapeur.

1.2 Le plan de construction indique que l’isolant doit recouvrir des murs de la fondation. L’entrepreneur a arrêté l’isolant à 18 pouces de la dalle de béton.

1.3 […]Les feuilles d’isolant n’ont pas été correctement installées, […] ce qui contrevient aux articles […] et 9.25.4 du Code de construction du Québec 2005.

[368] Alexandre Champagne, ingénieur junior à la firme ExpertBâtiment.Ca lors de la préparation du rapport, témoin expert des Bénéficiaires, affirme en conclusion (extraits, pièce A-17) :

De plus, des problèmes directement liés au bâtiment ont été observés, notamment l’absence d’un pare-vapeur au mur de fondation […] Quant à la qualité de l’air intérieur, des foyers de contamination sont présents dans le sous-sol et peuvent être dus à l’absence de pare-vapeur sur les murs de béton […].

[369] L’absence de pare-vapeur conforme aux normes est un vice de construction.

[370] La preuve est claire : il y a absence de pare-vapeur conforme aux normes obligatoires sur les murs de fondation, cela est rapporté par les experts Louis Parent, Alexandre Champagne et Frédéric Gagnon.

[371] Les prescriptions du Code National du Bâtiment à cet effet constituent ici non seulement la règle de l’art dont il est question à l’article 2100 C.c.q, et cela aurait suffi au Tribunal d’arbitrage pour en arriver à la conclusion à laquelle il en arrive, ils sont, de plus, également obligatoires selon le règlement municipal en vigueur dans la ville de Saguenay.

[372] L’immeuble fait donc l’objet d’un vice de construction considérant qu’il n’a pas été construit selon le Code National du Bâtiment, qui est une composante de l’obligation de construire la maison des Bénéficiaires selon règle de l’art, obligation incluse au contrat d’entreprise entre les Bénéficiaires et l’Entrepreneur.

[373] Dans l’affaire Habitations des Cônes c. Roy[44] , la Cour supérieure écrit que l’omission de la pose d’un pare vapeur, à lui seul, est « un désordre susceptible de provoquer éventuellement la perte de l’ouvrage » :

[65] Les constats - Les experts concernés confirment les constats de Luc Babin, voulant que l'installation du pare-vapeur ait été omise sur la section centrale du plancher du vide sanitaire, entre les deux murs porteurs du bâtiment. Cette installation était évidemment requise aux plans de l'architecte Pelletier.

[66] L'analyse - Encore ici, il s'agit d'un désordre susceptible de provoquer éventuellement la perte de l'ouvrage, compte tenu du surcroît d'humidité provoqué.

 

[374] Dans l’affaire Julien (Rénovation Éric Julien enr.) c. Grenier[45], le juge écrit :

 

[50]            De plus, la jupe n'a pas été munie d'un pare-vapeur, ce que le demandeur admet, en rajoutant qu'il ne l'a pas fait en raison du fait que la défenderesse désirait une installation au plus bas coût possible.

 

[51]            L'installation existante de la jupe est une composante essentielle de l'hibernation du bâtiment, et la preuve est prépondérante à l'effet qu'elle devra être remplacée, à moyen terme, à défaut de quoi il y aura une détérioration non seulement de la jupe, mais aussi possiblement de la structure du plancher du bâtiment.

 

[52]            Il s'agit là d'une situation de perte potentielle de l'ouvrage au sens de l'article 2118 du Code civil du Québec, dont l'entrepreneur est responsable.

[375] Déjà en 2006, notre collègue Me Michel A. Jeanniot, qualifiait l’absence de pare-vapeur de « condition de gravité qui impose un caractère sérieux et important » et de vice caché[46], dans Sylvain Boissé et Construction André Taillon Inc. et- La Garantie des bâtiments résidentiels de l’APCHQ Inc.[47] :

[12]        Au soutien de son rapport d’expertise, Jacques Benmussa […] complète en établissant que sans pare-vapeur (et/ou en présence d’un pare-vapeur inadéquat et/ou mal installé) il est plus que probable qu’un excès de condensation se produirait à l’intérieur du mur […]

 

[13]        Monsieur Benmussa renchérit avec l’article 9.25.4.1 (pare-vapeur exigés), extrait du Code National du Bâtiment - Canada 1995 (intégrant les modifications du Québec), lequel précise (l’emphase est du soussigné):

« 9.25.4.1)       Les murs, les plafonds et les planchers isolés doivent comporter   un pare-vapeur de façon à empêcher que la vapeur d’eau contenu dans l’air intérieur ne migre dans les vides des murs et des planchers ou dans les combles ou vides sous toit. ».

 

[14]        L’expert complète en précisant qu’il n’y a aucune problématique évidente mais qu’elle est à prévoir.

 

[15]        L’Administrateur représente que l’impossibilité de constater une trace de moisissure sur les surfaces exposées et/ou toute autre absence de préjudice au bâtiment relié à ces situations établit qu’indépendamment qu’il s’agisse ou non  d’un vice (élément qui n’est pas admis, voir même inféré par l’Administrateur) et, que cette situation soit cachée ne constitue pas un niveau de gravité nécessaire à qualifier cet élément de vice caché, tel que ce terme est défini par la Loi, la doctrine et la jurisprudence.

 

[16]        La norme juridique générale impose un caractère « sérieux » ou « important» du vice, un critère déterminant énoncé à l’article 1726 et suivants du Code civil du Québec.

 

[17]        Tous les intervenants sont d’accord; il ne s’agit pas ici d’un déficit d’usage. Sommes-nous face à une condition de gravité qui impose un caractère sérieux ou important?

 

[18]        La doctrine, les ouvrages techniques ainsi que les experts présents confirment que le rôle d’un pare-vapeur est de réduire la transmission de la vapeur d’eau (tandis que le pare-vent s’installe du côté extérieur de l’immeuble et a pour but de limiter la circulation d’air en provenance de l’extérieur du bâtiment). […]

 

[22]        Avec respect pour toute opinion à l’effet contraire, il est clair que le Code    National du Bâtiment prévoit la nécessité du pare-vapeur, ses auteurs ayant précisés à l’article 9.25.4.1) précité, que les murs, les plafonds et les planchers isolés doivent comporter un pare-vapeur.

 

[23]        Je rappelle que le Bénéficiaire est en demande et qu’à cet effet, ce dernier a le fardeau de la preuve. Je suis satisfait (ceci n’est d’ailleurs pas contredit par l’Administrateur) que l’enveloppe n’est pas conforme aux articles 9.25.4 et suivants du Code National du Bâtiment précité.

 

[24]        Cette non-conformité et/ou dérogation à une obligation prévue au Code National du Bâtiment (une fois cette dérogation et/ou carence admise), a comme effet et/ou conséquence de renverser le fardeau de la preuve, lequel retombe sur l’Entrepreneur, à savoir le commerçant - fabriquant.[…]

 

[28]       De façon plus précise, l’Entrepreneur peut nous satisfaire que certaines dispositions du Code National du Bâtiment ne s’appliquent pas lorsqu’il établit (et c’est l’Entrepreneur qui a ce fardeau) que le comportement d’un ensemble d’éléments de construction est satisfaisant en remplacement d’une ou plusieurs dispositions du Code National du Bâtiment (du moins en ce qui concerne le contrôle de la condensation). L’Entrepreneur ne s’est pas déchargé de ce fardeau. […]

 

[29]       Je dois donc, en l’absence de toute preuve d’une attention toute particulière accordée au pare-air et/ou à l’enveloppe du bâtiment, présumer que l’absence de pare-vapeur provoquera la détérioration du bois de l’ossature à moyen ou long terme, et faisant miens les propos de Laurent Guertin, J.C.S. [Louise Clermont c. Michel Labelle, EYB 2004-60523, 540-02-011414-001, 6 avril 2004] et ce,

« (…) même si aucune détérioration n’a été notée, cela ne signifie pas nécessairement qu’il n’y aura aucune détérioration du bois. Il faut aussi considérer qu’un immeuble est sensé durer de nombreuses années, et rien n’indique qu’il n’y aura aucune détérioration dans le futur. »

 

[30]       L’absence de pare-vapeur provoque de nombreuses infiltrations d’air et d’humidité et en sus d’être un facteur d’augmentation du coût de chauffage, les exfiltrations d’air chaud vers l’extérieur ont pour effet la détérioration des composantes putricibles (sic !) de l’enveloppe de ce bâtiment. Nous faisons ici face à  une condition de gravité qui impose un caractère sérieux et important à ce vice qui, de toute évidence, était caché.

 

[376] Plus généralement, dans l’affaire Syndicat du 3411, au 3417, Avenue des Érables et Devex Inc. et La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ[48], notre collègue Me Michel A. Jeanniot, arbitre écrit :

[26] Je rappelle que le Code National du Bâtiment est d’ordre public et que quiconque désire y déroger a le fardeau de prouver que toute telle dérogation rencontre (ou surpasse) les exigences du Code. […]

[377] Le Tribunal d’arbitrage note aussi, pour être complet, que :

[377.1] l’absence de norme contenue au Code National du Bâtiment n’exempte pas l’Entrepreneur de construire le bâtiment résidentiel selon la règle de l’art qui est spécifiquement prévue au Règlement, comme le signale notre collègue Me Johanne Despatis dans l’affaire Monique Meunier et Coopérative De Travailleurs Les Habitations Apex et la Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ [49]:

 

[83]           Cela dit, même si, strictement, le CNB ne trouvait pas application ici et que l’utilisation de bois d’œuvre dans ce type de construction ne soit pas assujetti à une norme formelle, cela ne signifie toutefois pas que l’on pourrait faire une telle construction n’importe comment.

[84]           En effet, si absence de norme formelle signifiait absence de toute règle on se demande à quoi pourrait bien servir la mention de la nécessité de se conformer aux règles de l’art qui se trouve notamment à l’annexe II du Règlement et qui exige :

ANNEXE II

(a. 78)

LISTE DES ENGAGEMENTS DE L'ENTREPRENEUR

L'entrepreneur s'engage:

[...]

3° à respecter les règles de l'art et les normes en vigueur applicables au bâtiment;

[377.2] la norme contenue au Code National du Bâtiment en vigueur peut parfois être même considérée comme inférieure à la règle de l’art, comme le signale l’arrêt de la Cour d’appel dans Clouâtre c. Factory Mutual Insurance Company[50] et la décision récente de la Cour supérieure concernant une décision rendue en vertu du Règlement dans Construction Kiraction c. Montambault et La Garantie Abritat et Me Tibor Holländer[51].

La perte causée par le vice de construction

 

[378] La preuve démontre que d’une part, il y a vice de construction, soit l’absence de pare-vapeur conforme au Code National du Bâtiment, dont le but est, entre autres, de prévenir la prolifération de moisissures par l’accumulation de vapeur d’eau dans les murs, et d’autre part, il y a présence de moisissures, susceptibles d’affecter la santé des occupants présents dans ce bâtiment.

[379] En droit, les faits de la présente cause équivalent à une perte du bâtiment selon les termes de l’article 2118 C.c.q.

[380] Tout comme l’Administrateur avant lui, le Tribunal d’arbitrage en vient à la conclusion que les Bénéficiaires ont prouvé les éléments essentiels pour mettre en œuvre la couverture du Plan de Garantie géré par l’Administrateur pour la responsabilité de l’Entrepreneur sous les articles 10(5) du Règlement et l’article 2118 C.c.q. du Code Civil.

[381] La Cour d’appel a récemment affirmé dans Entrepôt International Québec, s.e.c. c. Protection incendie de la Capitale inc.[52], que :

[3]           En l’espèce, le régime de responsabilité prévu à l’article 2118 C.c.Q. pourrait s’appliquer à la défectuosité du système détection/activation concerné. La notion de perte d’ouvrage reçoit une interprétation généreuse selon la jurisprudence. Une perte potentielle suffit. Cette Cour admet d’ailleurs qu’un système de gicleurs défectueux est couvert par la disposition. Cette question mérite d'être débattue au fond. (renvois omis)

[382] Dans la décision arbitrale Tony Jorge et al. c. Les Constructions Naslin Inc. et La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ Inc[53], notre collègue Me Michel A. Jeanniot écrit :

[8] 1. Absence de solin sur toutes les ouvertures, portes et fenêtres :

[9] L’expertise des Bénéficiaires précise qu’à toutes les fenêtres accessibles, il a constaté l’absence de solin dissimulé sous la cornière métallique. […]

[15] Certes, s’il ne s’agit que de une ou deux absences de solin, il s’agirait que de malfaçon ou vice caché. Avec respect pour toute opinion à l’effet contraire, je crois qu’il en serait tout autre si toutes les ouvertures et fenêtres sont sans solin sous les cornières métalliques. Je m’explique. […]

[17] […] Il est de connaissance courante qu’un taux d’humidité élevé entraîne culture de champignons et/ou de moisissure, des éléments connus comme étant néfastes à la santé et au bien-être des occupants.

[18] Bien qu’il soit possible que cet élément ne porte pas atteinte à la structure et/ou l’intégrité du bâtiment (ce qui n’est pas ici dit, voire même inféré), la présence répandue de champignons et de moisissure risque de rendre l’immeuble impropre à l’usage auquel il est destiné constituant ainsi à mon opinion, un vice d’ordre majeur. […]

[383] Dans la décision arbitrale Syndic des copropriétaires La Champêtre-Andante c. Maisons de Ville Laurentiennes Inc. [54]notre collègue Me Jean Philippe Ewart écrit :

Perte de l’ouvrage

[87] Il est fait grand cas par l’Administrateur et l’Entrepreneur que la perte visée par

2118 C.c.Q. se devait d’être soit une perte totale de l’immeuble ou dans le cas de perte partielle qu’il y ait à tout le moins menace d’effondrement ou de fléchissement de l’ouvrage ou encore de ses composantes principales. On a aussi caractérisé la perte par la nécessité que le dommage subi ou à venir se doit d’être majeur afin de souligner que de simples malfaçons ou vices de faible importance n’ouvrent pas application à la responsabilité de 2118 C.c.Q. ce qui a amené certains à conjuguer l’expression « vice majeur ».

 

[88] Toutefois, et prenant note de la « malfaçon » autrement prévue à l’article 2120 C.c.Q. et du « vice caché » de 1726 C.c.Q. afin de comparer les notions déterminatives applicables et de les appliquer dans le cadre de l’article 27 [ajout du soussigné : équivalent à l’article 10 pour la copropriété] du Règlement qui couvre chacune de ces notions sous des conséquences différentes, il ne faut pas perdre de vue que la notion de perte dans le cadre de 2118 C.c.Q. doit recevoir une interprétation large s’étendant sur tout dommage sérieux subi par l’ouvrage et que, tel que le soulignent les auteurs J. Edwards et S. Rodrigue sous La responsabilité légale pour la perte de l’ouvrage et la garantie légale contre les malfaçons dans le cadre de l’ouvrage bien connu La construction au Québec - perspectives juridiques :

 

« Il est également possible que la simple perte de l’usage normal des lieux tombe sous le coup de cette disposition. De fait, certains tribunaux ont décidé, en vertu des règles de l’ancien Code, que la présence de troubles graves, nuisant à l’utilisation de l’immeuble, constituait une perte. La responsabilité quinquennale a notamment été retenue lorsque les vices empêchaient l’ouvrage de servir à sa destination normale ou limitaient, de manière importante, l’usage normal de l’ouvrage. »

Nos soulignés

 

[89] Les auteurs citent plusieurs arrêts jurisprudentiels et il apparaît clair au Tribunal que la notion d’utilité ou de viabilité de la construction visée est applicable à la détermination recherchée, ce que souligne d’ailleurs T. Rousseau-Houle dans Les contrats de construction en droit public & privé et plus particulièrement J.L. Beaudoin qui écrit :

« La jurisprudence a donné une interprétation large à la notion de perte en l’appréciant par rapport à la destination et à l’utilisation prospective de l’ouvrage. Constitue donc une perte toute défectuosité grave qui entraîne un inconvénient sérieux et rend l’ouvrage impropre à sa destination. En d’autres termes, le défaut qui, en raison de sa gravité, limite substantiellement l’utilisation normale de l’ouvrage entraîne une perte qui autorise la mise en œuvre du régime. » Nos soulignés.

 

[90] On peut de plus se reporter entre autres à diverses décisions de jurisprudence telles Gauthier c. Séguin, Foundation Co. Of Canada Ltd. C. Golden Eagle Canada Ltd, Constructions François et Richards Inc. c. Audet.

 

[91] Toutefois, et nonobstant et tenant compte de cette interprétation libérale, il est nécessaire que le préjudice subi soit un empêchement ou une limite substantielle à l’utilisation normale de l’ouvrage, que le vice et perte rende l’ouvrage impropre à sa destination, soit dans le cadre des présentes de pouvoir être utilisé comme propriété résidentielle.

 

[384]  Dans l’affaire Paul Bordeleau Syndicat de Copropriété c. Saint-Luc Habitation Inc. et La Garantie des immeubles résidentiels de l’APCHQ[55], notre ancien collègue Me Jeffrey Edwards, aujourd’hui juge à la Cour du Québec, écrit :

En effet, il faut également établir que le vice entraîne ou entraînera, à court ou à long terme, suivant les termes de l’article 2118 du Code civil du Québec, une perte partielle de la Propriété.

Or, suivant une jurisprudence constante et bien établie, la notion de « perte » en vertu de l’article 2118 du Code civil du Québec fait l’objet d’une interprétation large et comprend la « perte potentielle » ou la « perte probable à long terme[1][15]».

Dans Construction J.R.L. (1977) Ltée c. Zurich Compagnie d’assurances, J.E. 91-824 (C.A.), page 6, la Cour d’appel affirme :

«Sont considérés comme vices de construction susceptibles d’engager la responsabilité quinquennale des constructeurs, les défectuosités qui sont de nature à empêcher l’ouvrage de remplir sa destination ou qui limitent, de façon majeure, l’usage normal de l’édifice... Le vice affectant une composante permanente et importante de celui-ci et sa présence impliquaient nécessairement des probabilités de détérioration grave en l’absence de corrections.»

Dans Commission de la construction du Québec c. Construction Verbois Inc., J.E. 97-2080 (C.S.), page 8, la Cour supérieure affirme :

«La jurisprudence a tempéré la notion de perte totale ou partie de l’édifice l’assimilant plutôt à celle d’inconvénients sérieux : «Or, comme la dérogation au droit commun provient du souci de protéger le propriétaire à l’égard de travaux difficilement vérifiables et de la nécessité d’assurer au public une protection efficace, nos tribunaux n’ont jamais appliqué l’article 1688 à la lettre et n’ont pas exigé que les vices du sol ou de construction produisent des effets aussi radicaux. Ils ont au contraire reconnu que les termes « périt en tout ou en partie » ne sont pas limitatifs et comprennent les vices compromettant la solidité de l’édifice et des défectuosités graves qui entraînent des inconvénients sérieux.»

À notre avis, la preuve d’une perte partielle à long terme a été établie avec prépondérance. […] Mais la détérioration et la perte sont constantes et progressives, ce qui satisfait aux critères requis pour qualifier le vice de vice de construction au sens de l’article 2118 du Code civil du Québec. […]

[385] Baudouin écrit, quant aux conditions d’application de 2118 C.c.q[56] :

 […] 2.-273. Extension. La jurisprudence a donné une interprétation large à la notion de perte en l’appréciant par rapport à la destination et à l’utilisation prospective de l’ouvrage. Constitue donc une perte, toute défectuosité grave qui entraîne un inconvénient sérieux et rend l’ouvrage impropre à sa destination. En d’autres termes, le défaut qui, en raison de sa gravité, limite substantiellement l’utilisation normale de l’ouvrage entraîne une perte qui autorise la mise en œuvre du régime […] (p. 257, 258)

2-274. Perte partielle. En cas de perte partielle, la jurisprudence, en pratique, se montre relativement sévère. Elle exige que celle-ci soit grave et sérieuse et refuse de considérer comme rentrant dans cette catégorie de simples dégradations mineures qui ne compromettent ni la solidité globale de l’ouvrage, ni la solidité d’une partie importante de celui-ci, ni son utilisation normale ou sa destination.

2-280. Preuve du vice - La preuve de la perte de l’ouvrage n’est pas suffisante pour donner naissance à la présomption que cette perte a bel et bien été causée par un vice. Le propriétaire doit, en effet, démontrer que cette perte est attribuable à un vice, démonstration qui relève essentiellement de l’expertise. […] Toutefois, la présomption dont bénéficie le propriétaire lui évite d’avoir à démontrer la cause technique exacte de la perte de l’édifice. […] p. 262 et 263) (nos soulignés)

[386] Deslauriers écrit[57] :

Le propriétaire n’a pas à prouver la faute commise par l’architecte, l’ingénieur ou l’entrepreneur, mais il doit prouver l’existence d’un vice visé par l’article 2118 C.cQ. affectant la stabilité de l’immeuble et de nature à en entraîner la perte.

[387] Le vice de construction susceptible de créer une prolifération de micro-organismes a déjà été établi comme vice majeur en vertu de l’article 2118 C.c.q. dans une autre décision de la Cour supérieure dans Viala c. Ligeron[58] :

 

[282]     En ce qui concerne la nature du vice, avec tout ce qu'on retrouve à l'expertise de Michel Landry, et tout ce qui a été dit à date dans le présent jugement, il ne fait aucun doute que l'immeuble était affecté d'un vice de construction et/ou de réalisation, et même selon les experts, de conception.

 

[283]     Qu'en est-il maintenant de l'exigence de la « perte de l'ouvrage » pour que l'article 2118 C.c.Q. trouve application.

 

[284]     Tout d'abord, dans son rapport d'expertise, M. Landry écrit ce qui suit à ce sujet:

« L'ensemble des vices de construction découverts sont majeurs car ils entraînent la présence d'eau dans les composantes internes des murs et plafonds isolés, entraînent la ruine du bâtiment et produisent des conditions d'humidité propices à la prolifération des microorganismes » (page i)

(soulignements ajoutés)

 

[285]     À ce sujet, il est intéressant de lire ce que Me Denys-Claude Lamontagne écrivait dans son volume Droit spécialisé des contrats [5]: [LAMONTAGNE, Denys-Claude, Droit spécialisé des contrats, Volume 2, Les Éditions Yvon Blais inc., pp. 139-140].

« [100] Pour la mise en œuvre de cette responsabilité, il faut qu'il y ait perte de l'ouvrage immobilier. La jurisprudence l'a définie en fonction de la ruine du bâtiment, qu'il s'agisse d'une perte totale, partielle, ou potentielle ou encore que le défaut rende la construction impropre à l'usage auquel elle est destinée. Dans l'affaire de Bélanger c. Association provinciale des constructeurs d'habitation du Québec, la Cour supérieure a souligné que la présomption ne se limite pas au cas où il y a un péril imminent de l'intégrité de la structure, mais qu'il suffit que les défectuosités touchent un élément important et qu'elles soient de nature à compromettre la solidité de la construction ou créer des difficultés importantes dans son utilisation. Parce que le but du régime est la protection du propriétaire et même du public en général contre les vices graves, les tribunaux ont donné une portée très large à ce régime légal.

Alors que sous l'ancien droit le code parlait de perte de «l'édifice», qui en soi est plus restrictif qu'«ouvrage immobilier», la jurisprudence a inclus tout ouvrage et structure immobilière.

[101] La cause de la perte devra être le vice de conception, de construction, de réalisation ou le vice du sol. Le client sera protégé contre l'effondrement ou la dégradation de l'ouvrage. La notion de perte s'appréciera en rapport avec le résultat mais aussi suivant la destination et l'utilisation prévue de l'ouvrage. La perte sera toute défectuosité grave qui entraîne un inconvénient sérieux et rend l'ouvrage impropre à sa destination. Malgré qu'il n'y ait pas de risque immédiat, si les vices de construction sont susceptibles de compromettre la durée et la conservation de l'immeuble la présomption trouvera application. La présomption vaut pour une durée de cinq ans qui suit la fin des travaux. »

(soulignements ajoutés).

[388] Le soussigné réitère l’affaire Habitations des Cônes c. Roy[59], dans laquelle la Cour supérieure écrit que l’omission de la pose d’un pare vapeur, à lui seul, est « un désordre susceptible de provoquer éventuellement la perte de l’ouvrage » et qui rejoint l’affirmation de l’Administrateur à l’audience, à l’effet qu’une évacuation des lieux n’était pas nécessaire pour que le soussigné conclut à une perte selon l’article 2118 C.c.q. :

[65] Les constats - Les experts concernés confirment les constats de Luc Babin, voulant que l'installation du pare-vapeur ait été omise sur la section centrale du plancher du vide sanitaire, entre les deux murs porteurs du bâtiment. Cette installation était évidemment requise aux plans de l'architecte Pelletier.

[66] L'analyse - Encore ici, il s'agit d'un désordre susceptible de provoquer éventuellement la perte de l'ouvrage, compte tenu du surcroît d'humidité provoqué.

[389] L’Entrepreneur a plaidé que Michel Millmore avait fait la contextualisation des résultats d’analyses.

[390] Avant d’aller plus loin, le Tribunal d’arbitrage tient à souligner qu’il ne s’immisce pas ici dans le contenu et l’exécution du mandat entre l’assureur de l’Entrepreneur, l’Entrepreneur et l’expert Millmore (le rapport du 27 mars 2015 pièce E-5 n’est pas adressé au soussigné mais au représentant de l’assureur) et qu’il ne conteste pas ses qualifications professionnelles dont le CV a été produit (pièce E-16).

[391] L’Entrepreneur a produit Michel Millmore à l’audience comme témoin expert, or le rôle du témoin expert à l’audience est d’éclairer[60] le Tribunal d’arbitrage sur le différend à trancher; ce témoin produit comme témoin expert:

[391.1] a trouvé du penicillium chrysogenum et un foyer de contamination dans le vestibule mais n’a pas investigué car il n’en avait pas le mandat[61],

[391.1.1]     ce qui n’éclaire pas le Tribunal sur le différend qu’il doit trancher, même s’il comprend bien

391.1.1.1.         que le témoin expert Millmore n’est pas celui qui donnait les mandats;

391.1.1.2.         que le témoin expert Frédéric Gagnon, qui avait fait appel à l’expert Millmore, a proposé à son mandant un « dégarnissage plus important des murs » et qu’il conclut sa lettre du 8 octobre 2014 en disant qu’il demeure dans l’attente de nouvelles directives[62];

[391.2] a demandé au représentant de l’assureur André Néron si une évaluation de l’état de santé des occupants avait eu lieu et n’a pas eu de réponse[63], sans autre explication à l’audience, alors qu’il a témoigné avoir été mandaté « par les assureurs » et la santé des occupants était un des critères à considérer pour la contextualisation;

[391.2.1]     l’absence de demande supplémentaire auprès de son mandant qui ne lui a pas donné de réponse (ou vice versa, l’absence continue de réponses de la part de son mandant malgré des demandes supplémentaires?) pour savoir si une évaluation de l’état de santé des occupants avait eu lieu (et si oui, son contenu), n’éclaire pas le tribunal sur le différend qu’il doit trancher;

[391.3] n’a apporté aucune « contextualisation » quant à l’isolant alors que la décision portée en arbitrage traite non seulement des moisissures mais sur le travail correctif quant à l’isolant rigide sans pare-vapeur conforme au Code National du Bâtiment,

[391.3.1]     ce qui n’est pas de nature à éclairer le Tribunal sur le différend qu’il doit trancher;

[391.4] a demandé au laboratoire Lab-Eau-Air-Sol son protocole ou guide et le représentant du laboratoire lui aurait répondu de faire la demande par l’entremise d’avocats[64] -

[391.4.1]     il n’a pas fait cette demande et sa critique du guide n’est pas basée sur le fait qu’il l’a analysé et qu’il serait critiquable suite à son analyse, 

391.4.1.1.         il conclut en lieu et place d’une analyse du guide du laboratoire, d’une conversation avec monsieur Jacob dont on ignore son degré de connaissance personnelle du présent dossier, alors même que le représentant du laboratoire lui a demandé de quel projet il parlait car il l’ignorait,

[391.4.2]     alors que la preuve démontre :

391.4.2.1.         (pièce B-6) « LAB’EAU-AIR-SOL, laboratoire accrédité par le (M.D.D.E.P. ministère du Développement durable en Environnement et des Parcs), (L’I.R.S.S.T. L’institut de recherche Robert-Sauvé en santé et en sécurité du travail) et (C.E.A.E.Q. centre d’expertise et analyse environnementale du Québec »;

391.4.2.2.      (pièce A-17) « Lab-Eau-Air-Sol est le seul laboratoire au Québec à être accrédité en microbiologie de l’air, 1320-492, ISO/CEI 1725, par le centre d’expertise en analyse environnementale du Québec, par le Ministère du Développement durable, de l’Environnement, de la Faune et des Parcs du Québec (M.D.D.E.P.) par l’Institut de recherche Robert-Sauvé en santé et sécurité du travail (IRSST) et à offrir un service de prélèvement et d’expertise par des experts certifiés Q.A.I. par la Société canadienne d’Hypothèque et de Logement (SCHL). De plus, ce laboratoire est agréé par la commission des partenaires du travail du Québec en tant qu’organisme formateur »;

391.4.2.3.     et que ce laboratoire donne des formations  « sur la qualité de l’air, la présence de moisissures, l’investigation, le prélèvement et l’analyse », comme en a témoigné le témoin expert Louis Parent[65];

[391.4.3]     l’absence de demande par voie de procureurs pour obtenir le guide, pour pouvoir en faire la critique par le témoin expert dans le but d’éclairer le Tribunal, si applicable,

391.4.3.1.  n’est pas de nature à éclairer le Tribunal sur le différend (même si le Tribunal comprend bien que l’expert n’est pas procureur donc il ne pouvait pas faire cette demande lui-même, et que personne d’autre ne semble avoir pensé faire cette demande après le 27 mars 2015, date de son rapport produit en E-5), et

391.4.3.2.  n’est pas la meilleure preuve pour l’éclairer un Tribunal d’arbitrage non plus, le fait de baser ses conclusions sur une conversation tenue avec quelqu’un qui n’est pas à l’audience dont on ignore la connaissance personnelle du dossier et qui puisse dire à quelles questions il a répondu.

[392] Pour sa part, l’expert Ouaras a témoigné à l’effet qu’il n’y a pas d’infiltration d’eau provenant de l’extérieur du bâtiment.

[393] L’expert Ouaras note toutefois en décembre 2014 qu’ « il aurait fallu faire d’autres ouvertures[66] » (tout comme l’expert Gagnon qui propose un « dégarnissage plus importants des murs[67] »), mais alors qu’il n’a fait aucune ouverture, penche d’une façon « probable » sur les habitudes de vie des occupants.

[394] L’expert McSween a évoqué la possible présence d’une orange pourrie ou d’une tranche de pain qui aurait pu contaminer les résultats mais que personne n’a vue, le Tribunal d’arbitrage ne peut retenir cette hypothèse faute de preuve.

[395] La preuve démontre que la cause de ces moisissures n’est pas une infiltration extérieure venant de l’extérieur du bâtiment, comme l’a démontré l’expert Ouaras, et l’Entrepreneur n’a pas réussi à démontrer que le mode de vie des Bénéficiaires soit la cause de cette présence de moisissures.

[396] La preuve démontre que les murs de fondations sont dotés d’un vice de construction, n’ayant pas de pare-vapeur conforme au Code de national du bâtiment et que cette absence est susceptible de créer une prolifération de moisissures, alors même que le bâtiment résidentiel est témoin de la présence de moisissures.

[397] Il ne suffit pas pour l’Entrepreneur de chercher à soulever le doute raisonnable comme lors d’un procès criminel, et encore moins lors d’un litige civil où la responsabilité de l’Entrepreneur est mise en cause en vertu de l’article 2118 C.c.q., car le Tribunal d’arbitrage est un tribunal civil, et le fardeau de la preuve n’est pas, hors de tout doute raisonnable, mais bien, la balance des probabilités, tel que le stipule l’article 2804 du Code civil :

2804.  La preuve qui rend l'existence d'un fait plus probable que son inexistence est suffisante, à moins que la loi n'exige une preuve plus convaincante.

[398] Dans l’affaire Béatrice Radulescu Groupe AXXCO Inc et La Garantie Habitation du Québec Inc [68], notre ancien collègue et aujourd’hui juge à la Cour du Québec Me Jeffrey Edwards écrit :

[53]         Conformément aux motifs exprimés ci-dessus, la Bénéficiaire a déchargé ce fardeau de preuve selon la balance des probabilités (à noter que le fardeau « de hors de tout doute raisonnable », tel qu’utilisé par le conciliateur - inspecteur dans la Décision de l’Administrateur est erroné) à cet égard.

Mode de vie allégué

 

[399] L’Entrepreneur a plaidé que ce n’est pas le bâtiment qui est en cause mais le mode de vie des occupants.

[400] Même si c’est une lapalissade, notons tout d’abord que les Bénéficiaires vivaient dans un bâtiment résidentiel, dont la fonction est de servir de résidence.

[401] D’une part, l’expert Millmore s’est rendu sur les lieux en juin 2014, alors que les Bénéficiaires avaient quitté les lieux.

[402] Il affirme qu’il y avait un foyer de contamination et pourtant, le « mode de vie » des Bénéficiaires avait quitté les lieux.

[403] Il a aussi affirmé ne pas avoir cherché ce foyer, puisqu’il n’en n’avait pas le mandat.

[404] D’autre part, la preuve ne supporte pas la théorie soulevée.

[405] Le mode de vie des Bénéficiaires n’est pas exceptionnel hors des grandes villes au Québec alors que l’on n’a pas apporté lors de l’audience, de preuve prépondérante que ce « mode de vie » soit la cause des moisissures présentes.

[406] La balance des probabilités ne permet aucunement de conclure que deux chiens qui dorment à l’intérieur de cette grande maison vue par le soussigné, et un troisième qui vient faire un tour pendant le jour, avoir des lapins pendant un mois (autour du 20 avril 2014 au 26 mai 2014), que des enfants fassent de l’équitation (faut-il le souligner, à l’extérieur de la maison), de conclure donc que cela soit les causes des moisissures trouvées à l’intérieur.

[407] Les Bénéficiaires ont témoigné avoir eu deux femmes de ménage qui venaient deux fois par semaine, ce qui faisait aussi parti de leur mode de vie.

[408] Surtout, aucune preuve prépondérante n’a été apportée à l’audience que ce mode de vie soit la cause des préjudices subis par leur résidence familiale, l’Entrepreneur n’a pas rencontré son fardeau de preuve que le mode de vie des Bénéficiaires fut la cause des préjudices subis à la maison des Bénéficiaires.

L’état de santé et l’évacuation des lieux

 

[409] L’Entrepreneur a allégué qu’il fallait une preuve produite par un professionnel de la santé pour prouver quel était l’état de santé des occupants.

[410] Le soussigné n’a pas eu de preuve de la part d’un médecin qui fasse le lien de cause à effet entre l’état des lieux et la santé physique des occupants.

[411] Les témoignages des Bénéficiaires, tous très crédibles, ont fait part de leurs problèmes de santé présents lors de l’occupation des lieux, qui problèmes de santé qui sont disparus après leur départ.

[412] Louis Parent, que le Tribunal d’arbitrage a reconnu comme expert pour l’interprétation de résultats d’analyse sur la qualité de l’air et présence de moisissures, très crédible, a affirmé à l’audience « moi je n’aurais pas habité là[69] » et « moi j’ai dit personnellement je quitterais la maison[70] ».

[413] Quant à l’absence de preuve médicale, il est important de préciser que le soussigné n’était pas saisi d’une demande en dommages intérêts (une telle demande a été rejetée par l’Administrateur au point 7 de sa décision faute de « juridiction ») pour le déménagement et relogement suite à une évacuation recommandée par un expert et entérinée par les occupants, ou pour des dommages physiques ou moraux à la santé, et n’a pas à trancher ici si les occupants ont pris la bonne décision de quitter les lieux le 26 mai 2014 et si des dommages monétaires doivent leur être accordés à cause de leur état de santé.

[414] Le Tribunal d’arbitrage est seulement saisi, en vertu du Règlement, de l’objet du Point 1, à savoir si le bâtiment résidentiel est atteint d’un vice majeur en vertu de l’article 2118 C.c.Q., d’une perte suite à un vice de construction, le tout, couvert par le Plan de garantie administré par l’Administrateur en vertu de l’article 10(5) du Règlement, et s’il y lieu d’ordonner les travaux correctifs contenus dans la décision de l’Administrateur.

 

Arguments soulevés personnellement par l’Entrepreneur

 

[415] Lors de son témoignage, l’Entrepreneur a personnellement soulevé deux motifs à l’encontre de la réclamation des Bénéficiaires.

[416] Ces deux motifs n’ont pas été plaidés, avec raison, par son procureur :

[416.1] L’Entrepreneur nie que les plans prévoyaient un pare vapeur sur les murs de fondation qui n’aurait pas été posé;

[416.2] L’Entrepreneur, en montrant du doigt sa soumission, a indiqué que les Bénéficiaires avaient accepté l’isolant Styrofoam de deux pouces.

[417] La première affirmation est erronée en droit : la règle de l’art, dans le présent cas, la conformité au Code National du Bâtiment quant au para-vapeur, est l’essence même du contrat, la règle de l’art est incluse au contrat d’entreprise, et l’Entrepreneur se doit la respecter.

[418] Pour la Cour d’appel, l’Entrepreneur ne peut pas se réfugier sur l’imprécision des devis pour ne pas agir selon les règles de l’art.  Dans Guistini c. Expo Ornemental Inc.[71], elle écrit :

[7] […] L'absence de devis et de précisions de l'ouvrage ne relève pas l'intimée de son obligation de se conformer aux règles de l'art.

 

[419] L’article 2100 du Code Civil est très clair à ce sujet :

2100.  L'entrepreneur et le prestataire de services sont tenus d'agir au mieux des intérêts de leur client, avec prudence et diligence. Ils sont aussi tenus, suivant la nature de l'ouvrage à réaliser ou du service à fournir, d'agir conformément aux usages et règles de leur art, et de s'assurer, le cas échéant, que l'ouvrage réalisé ou le service fourni est conforme au contrat.

 

Lorsqu'ils sont tenus du résultat, ils ne peuvent se dégager de leur responsabilité qu'en prouvant la force majeure.

[420] Me Jeffrey Edwards et Me Sylvie Rodrigue écrivaient au sujet de la malfaçon:

[…] Deux types de normes sont couramment employés pour établir l’existence d’une malfaçon. Premièrement, ce sont les conditions contractuelles fixées, que celles-ci soient écrites ou verbales, entre les parties. Deuxièmement, en l’absence de conditions précises expressément arrêtées, recours est fait aux « règles de l’art » qui sont suivies par chaque corps de métier ou secteur pertinent. Les règles de l’art sont considérées comme intégrées par renvois dans le contrat[72].

[421] Dans l’affaire Promutuel Lévisienne-Orléans, société mutuelle d'assurances générales c. Service de techniciens en électricité du Québec, STEQ inc.[73] la Cour supérieure fait sienne l’affirmation suivante :

[130] À ce sujet, le professeur Jacques Deslauriers[74] écrit :

« […] Le respect des règles de l'art est de l'essence même du contrat d'entreprise, même si le contrat n'y réfère pas. Cette obligation est imposée par la loi et revêt un caractère d'ordre public.

[422] Dans l’affaire  Construction Kiraction c. Montambault et La Garantie Abritat et Me Tibor Holländer[75], la Cour supérieure écrit :

[25] Les normes jouissent de la confiance générale qui leur confère une autorité de fait. La généralisation de leur usage permet à l’entrepreneur de s’y référer et, en principe, de s’assurer de la protection des tribunaux.

[26] Les normes sont des documents officiels, les parties sont présumées les connaître et les prescriptions qu’elles contiennent présentent à cet égard un caractère d’usage conventionnel.

 

 

[423] Dans l’affaire Construction R. Cloutier inc. c. Entreprises CJS inc.[76], la Cour supérieure écrit :

 [128] Ainsi, l'entrepreneur a le devoir d'agir avec prudence et diligence au mieux des intérêts de son client, en conformité avec les règles de l'art.

[424] Dans l’affaire Trudeau c. Tremblay[77], le Tribunal écrit:

ANALYSE

[28]            Le Tribunal constate d’abord que la réclamation des demandeurs ne concerne que les travaux correctifs à effectuer au sous-sol en raison de l’absence d’un pare-humidité au mur de fondation. […]

[30]            Quant au problème affectant l’immeuble, le Tribunal retient le témoignage de l’expert Gautreau qu’il s’agit d’un vice de construction et que les travaux de finition et d’isolation du sous-sol ont été effectués de façon non conforme aux règles de l’art et contraire aux normes du Code National du Bâtiment.

[31]            Même si les plans préparés par l’architecte Yelle ne prévoyaient pas la présence d’un pare-humidité au mur de béton, le témoin expert Gautreau a convaincu le Tribunal que l’entrepreneur général aurait dû en installer un afin de se conformer aux normes de construction.

[425] Bernard P. Quinn[78][1] écrit :

Le respect des règles de l'art par l'entrepreneur ou le professionnel est en principe obligatoire. Il importe peu qu'il soit fait mention dans le contrat d'entreprise ou de services professionnels des règles de l'art spécifiques dont la sanction est recherchée par le plaignant. Il s'agit, pour ce qui est du droit civil québécois et du droit français, d'une obligation imposée par la loi à caractère d'ordre public et non seulement à titre supplétif de la volonté des parties contractantes. L'obligation de se conformer aux règles de l'art incombe, selon le champ de compétence et d'intervention de chacun, à tous les intervenants de la construction.

[426] Les auteurs Jean-Louis Baudouin et Patrice Deslauriers, dans leur ouvrage intitulé La responsabilité civile[79], écrivent:

2-214 - Obligation d'agir en conformité avec les usages et les règles de l'art - La seconde obligation est d'agir conformément aux usages et règles de l'art.  Il s'agit, à promptement parler, de la codification d'une règle fondamentale dégagée par la jurisprudence sous le régime du Code civil du Bas-Canada.  L'article 2100 C.c. en codifiant celle-ci impose un devoir au constructeur de se servir de méthodes reconnues dans son domaine particulier d'expertise et d'utiliser les techniques, les procédés, les systèmes et les moyens de réalisation qui prévalent au sein de la profession à laquelle il appartient, à l'époque où le contrat est exécuté. La jurisprudence, sous le régime du Code civil du Bas-Canada, malgré l'absence législative de cette obligation, avait assimilé le manquement à cette obligation à une faute susceptible d'engager la responsabilité de son auteur et continue donc à s'appliquer […]

[427] Puisque sa position est non fondée en droit, le Tribunal d’arbitrage rejette donc son premier motif.

[428] Quant au deuxième motif, soit l’acceptation alléguée des Bénéficiaires, le Tribunal se doit aussi de la rejeter, puisque non fondée en droit.

[429] L’article 2119 du Code civil, qui mentionne les moyens de défense de l’Entrepreneur confronté à l’article 2118, parle de décisions imposées par les Bénéficiaires, or, il n’y a absolument aucune preuve à cet effet et, faute de preuve, ce moyen doit être rejeté :

2119. L'architecte ou l'ingénieur ne sera dégagé de sa responsabilité qu'en prouvant que les vices de l'ouvrage ou de la partie qu'il a réalisée ne résultent ni d'une erreur ou d'un défaut dans les expertises ou les plans qu'il a pu fournir, ni d'un manquement dans la direction ou dans la surveillance des travaux.

 

L'entrepreneur n'en sera dégagé qu'en prouvant que ces vices résultent d'une erreur ou d'un défaut dans les expertises ou les plans de l'architecte ou de l'ingénieur choisi par le client. Le sous-entrepreneur n'en sera dégagé qu'en prouvant que ces vices résultent des décisions de l'entrepreneur ou des expertises ou plans de l'architecte ou de l'ingénieur.

 

Chacun pourra encore se dégager de sa responsabilité en prouvant que ces vices résultent de décisions imposées par le client dans le choix du sol ou des matériaux, ou dans le choix des sous-entrepreneurs, des experts ou des méthodes de construction.

[430] La mention sur la soumission « Styrofoam 2’’ sur mur +/- 7’0’’ de haut » (pièces A-2 et E-13) n’a aucune mention qu’aucun pare-vapeur ne sera installé en contravention du Code National du Bâtiment et du règlement en vigueur dans la ville de Saguenay, alors que la règle de l’art fait partie du contrat d’entreprise, il n’y a aucune preuve que cette contravention était imposée, ni même, acceptée par les Bénéficiaires.

[431] Dans l’affaire Scaffidi Argentina c. Constructions GSS Gauthier 2000 inc.[80], le Tribunal écrit :

[169]     Dans l’affaire Isotanche Construction inc. c. le Collège d’enseignement général et professionnel du Vieux Montréal[16] [Isotanche Construction inc. c. le Collège d’enseignement général et professionnel du Vieux Montréal, REJB 1994-79425, AZ 94021249] le juge Pierre Jasmin reprenant les propos de Thérèse Rousseau Houle dans son ouvrage Les contrats de construction en droit public et privé[17] [Thérèse Rousseau Houle, Les contrats de construction en droit public et privé, Wilson & Lafleur, Montréal, 1982,p.197] reprend l'analyse :

 

«Dans l'arrêt Davie Shipbuilding c. Cargill Grain, la Cour suprême […]  reconnaît que les entrepreneurs sont présumés responsables de la perte des installations portuaires, mais qu'ils peuvent s'exonérer en prouvant que le dommage provient de la faute du propriétaire.

Deux conditions sont toutefois expressément posées pour que l'immixtion du propriétaire dans la réalisation des travaux puisse exonérer l'entrepreneur et l'architecte. Il faut d'une part, que le maître de l'ouvrage soit notoirement compétent et que d'autre part, il se soit réellement immiscé dans la conception de l'exécution des travaux et que cette immixtion fautive soit la cause du dommage.

La spécificité du contrat d'entreprise oblige à reconnaître que l'exonération de l'entrepreneur ou de l'architecte est subordonnée à la constatation chez le maître de l'ouvrage d'une compétence technique notoire, compétence à défaut de laquelle, la responsabilité des architectes et entrepreneurs est retenue, car il est de leur devoir de résister aux interventions irresponsables d'un client profane.»

 

[432] Dans l’affaire Linda Jacques et al. et A.G.P. Couture et Fils et La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ,[81] notre collègue Me Reynald Poulain, arbitre écrit :

[103]      Quant au troisième alinéa de l’article 2119 C.c.Q., l’Entrepreneur doit démontrer que le vice résulte de décisions imposées par le client […]  Bien plus, les Bénéficiaires en l’instance n’ont pas agi à titre d’autoconstructeurs mais ont plutôt confié la construction de leur résidence aux termes d'un contrat d’entreprise de type «clé en main». […] Il est utile de rappeler que les dispositions de l’article 2118 C.c.Q. sont d’ordre public et que les moyens d’exonération prévus à l’article 2119 C.c.Q. sont interprétés, selon les tribunaux, de façon restrictive. La protection consentie par le législateur à l’article 2118 C.c.Q. existe sans qu’il ne soit nécessaire de prouver une faute particulière de l’entrepreneur. C’est plutôt à lui de démontrer une cause d’exonération. En l’espèce, tel ne fut pas le cas.

[433] Rien dans la preuve ne supporte la défense prévue à l’article 2119 C.c.Q.

[434] Pour ces motifs, le Tribunal d’arbitrage rejette ces deux moyens soulevés personnellement par l’Entrepreneur lors de son interrogatoire.

Les Travaux Correctifs

 

[435] La décision de l’Administrateur consiste non seulement à une reconnaissance de vice majeur, mais aussi, à une ordonnance de travaux correctifs.

[436] Les travaux correctifs ordonnés par l’Administrateur sont :

Retirer le prélart du sous-sol;

Retirer l’isolant rigide au sous-sol qui n’est pas pare-vapeur;

Effectuer une décontamination complète de la résidence selon un protocole établi.

[437] L’Entrepreneur n’a soumis aucune alternative de travaux correctifs, à supposer que le soussigné en vienne à la conclusion de rejeter son arbitrage sur le fond sur la présence d’un vice majeur.

[438] Pour les motifs ci-haut exposés, et vu l’absence de proposition alternative de la part de l’Entrepreneur pour les travaux correctifs, le Tribunal maintient l’ordonnance quant aux travaux correctifs à effectuer, en ajoutant ce qui suit.

[439] Quant au prélart, l’Inspecteur-conciliateur a témoigné ce que suit :

un rapport d’expert dit que le prélart est en cause, et qu’il pouvait être une source de moisissures. Pour cette raison, j’ai retenu la recommandation d’enlever le prélart, sans me prononcer sur l’état de la dalle de béton. (nos soulignés)

[440] Le soussigné maintient quant à lui l’ordonnance de retirer le prélart, considérant l’ordonnance d’effectuer une décontamination complète de la résidence, et sans se prononcer sur l’état de la dalle de béton puisque le Tribunal d’arbitrage n’était pas saisi de l’état de la dalle de béton.

[441] Les travaux correctifs devront être conformes à la règle de l’art. Dans l’affaire Innomax Division Résidentielle inc et SDC 1120 de Sancerre, Longueuil et La Garantie Abritat inc[82] notre collègue Me Albert Zoltowski écrit :

[44]  Le tribunal note que le choix d’une méthode corrective par un entrepreneur ne relève pas de sa discrétion absolue car, tel que le prescrit l’article 2100, la réalisation de l’ouvrage que constitue cette mesure corrective doit être conforme aux usages et aux règles de leur art.

Conclusion

 

[442] En conclusion, vu la preuve qui démontre donc que :

[442.1] le bâtiment résidentiel a un vice de construction, c’est-à-dire, absence de pare-vapeur aux murs de fondation conformes aux dispositions expresses du Code National du Bâtiment, le tout prouvé par les experts Louis Parent, Frédéric Gagnon et Alexandre Champagne;

[442.2] l’absence de pare-vapeur conforme aux normes était susceptible d’entraîner à la fin des travaux, à court et moyen termes, une présence d’humidité élevée dans les composantes internes des murs, produisant des conditions propices à la prolifération de moisissures et/ou levures, ce qui, dans le présent dossier, aurait été suffisant pour conclure à une perte de bâtiment en vertu de l’article 2118 C.c.q. tel qu’il appert, entre autres, de la preuve des experts Louis Parent et Alexandre Champagne et des Bénéficiaires;

[442.3] en plus du sous-paragraphe précédent, la présence des moisissures et levures rend, selon la preuve, les dispositions légales citées dans cette décision et la jurisprudence, le bâtiment résidentiel impropre à l’usage auquel il est destiné et entraîne la perte du bâtiment en vertu de 2118 c.c.q., tel qu’il appert, entre autres, de la preuve des experts Louis Parent et Alexandre Champagne, et des Bénéficiaires;

[442.4] vu la preuve au dossier, la preuve de l’Entrepreneur, y compris sa preuve d’experts, n’a pas permis de renverser la balance des probabilités en faveur de l’Entrepreneur et de l’exonérer de sa responsabilité légale, couverte par le Plan de Garantie quant au différend soumis au Tribunal d’arbitrage;

[442.5] « Il ne s’agit pas, ici, d’un simple travail d’entretien ou de routine mais bien d’un défaut important à corriger » [83];

[442.6] l’Entrepreneur n’a pu se dégager de sa responsabilité en vertu de 2119 c.c.q. ou d’autres motifs soulevés dans ce dossier;

[442.7] le vice majeur fut porté à la connaissance des Bénéficiaires en mai 2014 (au minimum, le 28 avril 2014 lors de la première visite de Louis Parent), pendant la période de couverture du Plan de Garantie pour vice majeur, le tout dûment dénoncé selon les délais prévus par le Règlement;

[442.8] la réclamation des Bénéficiaires, et la décision de l’Administrateur maintenant cette réclamation, sont bien fondées,

et vu les autres éléments de preuve soigneusement analysés aux fins des présentes et les motifs contenus dans la présente décision, le Règlement, la Loi et la jurisprudence applicable, le Tribunal d’arbitrage se doit donc de rejeter la demande d’arbitrage de l’Entrepreneur et maintenir la décision de l’Administrateur.

 

FRAIS

 

[443] À la fin de l’audience, autant sur la base du devoir de s’assurer d’une saine administration de la justice et de l’article 116 du Règlement, le Tribunal d’arbitrage a accueilli la demande de l’Entrepreneur de lui donner une semaine pour produire ses représentations quant aux frais, d’autant plus que le Règlement a des dispositions particulières pour traiter de cette question.

[444] En accordant le délai, le Tribunal d’arbitrage a indiqué qu’il conclurait de l’absence de représentations écrites que les parties réclament quand même leurs frais tels que réclamés lors de l’audience et qu’ils demanderaient alors au soussigné de trancher ces réclamations en conformité avec le Règlement et la Loi.


 

Réclamation des Bénéficiaires pour leurs frais d’expertises et rétroactivité du nouveau Règlement

 

[445] Les Bénéficiaires ont produit une réclamation de remboursement de leurs frais d’expert (pièce B-4) mais n’ont produit aucune représentation écrite.

[446] Comme écrit plus haut, le Tribunal s’est engagé, en cas d’absence de représentation écrite, de disposer de chaque réclamation pour frais selon le Règlement.

[447] Au moment de payer le prix pour la construction de leur bâtiment résidentiel, et de payer en même temps, leur part pour la couverture du Plan de Garantie, et lors de leur demande de mise en œuvre de la couverture du Plan de Garantie auprès de l’Administrateur le 1er octobre 2014, les articles 124 et 125 du Règlement se lisaient comme suit:

124.  L'arbitre doit statuer, s'il y a lieu, quant au quantum des frais raisonnables d'expertises pertinentes que l'administrateur doit rembourser au demandeur lorsque celui-ci a gain de cause total ou partiel.

 

Le présent article ne s'applique pas à un différend portant sur l'adhésion d'un entrepreneur.

 

125.  Les dépenses effectuées par les parties intéressées et l'administrateur pour la tenue de l'arbitrage sont supportées par chacun d'eux.

[448] Depuis le 1er janvier 2015, l’article 124 amendé se lit comme suit :

124.  L'arbitre doit statuer, s'il y a lieu, quant au quantum des frais raisonnables d'expertises pertinentes que l'administrateur doit rembourser au demandeur lorsque celui-ci a gain de cause total ou partiel.

 

Il doit aussi statuer, s'il y a lieu, quant au quantum des frais raisonnables d'expertises pertinentes que l'administrateur et l'entrepreneur solidairement doivent rembourser au bénéficiaire même lorsque ce dernier n'est pas le demandeur.

 

Le présent article ne s'applique pas à un différend portant sur l'adhésion d'un entrepreneur.

 

125.  Les dépenses effectuées par les parties intéressées et l'administrateur pour la tenue de l'arbitrage sont supportées par chacun d'eux.

 

[449] À la connaissance du soussigné, il n’y a pas de précédant quant à l’application ou non, de cette nouvelle disposition de l’article 124 amendé aux arbitrages découlant des contrats de construction et de garantie conclus avant le 1er janvier 2015 - dans le présent cas, le contrat a été signé en 2009, et pour les demandes de mises en œuvre de la garantie avant le 1er janvier 2015, dans le cas présent, le 1er octobre 2014.

[450] Ce point n’a fait l’objet d’aucune plaidoirie à l’audience, dans un sens ou dans l’autre, et ce point n’a été plaidé devant nous dans aucun des dossiers entendus par le soussigné depuis le 1er janvier 2015.

[451] Après mûres réflexions, le Tribunal d’arbitrage conclut que la version 2015 de l’article 124 du Règlement n’est pas applicable au présent dossier.

[452] Ce n’est pas la première fois que le Règlement est amendé, il le fut en 2006, suite au Décret 39-2006 du 25 janvier 2006, « Plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs - Modifications » Gazette Officielle du Québec du 8 février 2006, partie II, p. 994.

[453] Le décret amendant le Règlement en 2006 contenait le présent article :

30. Le présent règlement entre en vigueur le cent quatre-vingtième jour qui suit la date de sa publication à la Gazette officielle du Québec.

Il s’applique aux bâtiments dont le contrat préliminaire ou le contrat d’entreprise est signé entre un bénéficiaire et un entrepreneur accrédité et dont les travaux de construction débutent à compter de cette date.

Toutefois, les dispositions des articles 1, 2, 7, 10, 11, du paragraphe 2° de l’article 12, ainsi que celles des articles 16, 19, 23 à 28 et du paragraphe 1° de l’article 29 sont applicables dans un délai de 15 jours après cette publication en ce qui a trait aux contrats de garantie en cours à cette date.

[454] Notre collègue Claude Dupuis dans l’affaire Syndicat de copropriété du 4551-4565 de Niverville c. GDMD Développement inc. et La Garantie Habitation du Québec inc.[84] a jugé que la version 2006 n’était pas rétroactif aux contrats conclus avant 2006 :

II : POSITION DE L'ADMINISTRATEUR

[9]                Ce nouveau règlement n'a pas d'effet rétroactif, mais plutôt un effet immédiat.

[10]            Ainsi, pour tous les bâtiments existant auparavant, l'ancien règlement s'applique. […]

[45]            En accord avec le procureur de l'administrateur, le soussigné estime que les modifications d'août 2006 au règlement relativement à la réception présumée ne sont pas rétroactives.

[455] Le Règlement amendé en vigueur le 1er janvier 2015 a été adopté par le Décret 156-2014, Gazette officiel du Québec, 5 mars 2014, vol. 10, p. 869.

[456] Il ne contient pas de clause transitoire comparable à celle du décret de 2006.

[457] L’article 54 du Décret 156-2014 ne parle que de l’indexation prévue aux articles 6, 7 et 18 (et autres dispositions non pertinentes au présent débat) :

54. Le présent règlement entre en vigueur le 1er janvier 2015. La Régie pourra cependant enclencher le processus d’autorisation d’une personne morale sans but lucratif pour agir à titre d’administrateur dès la publication du présent règlement en vertu de l’article 15 de la Loi sur les règlements (chapitre R-18.1) et dès son autorisation, cet administrateur pourra amorcer le processus d’accréditation des entrepreneurs.

L’indexation des limites de la garantie prévues aux articles 6, 7 et 18 de ce règlement ne s’applique qu’aux bâtiments dont les travaux de construction ont débuté le ou après le 1er janvier 2015, et ce, dans la mesure où le contrat préliminaire ou le contrat d’entreprise entre un bénéficiaire et un entrepreneur accrédité est signé à compter de cette date.

[458] Le nouvel article 124 du Règlement amendé ne vise pas les relations entre les justiciables et le Gouvernement ou des organismes gouvernementaux; il ne s’agit pas d’augmenter les tarifs ou de changer les critères pour obtenir un permis, mais de donner une responsabilité nouvelle à des particuliers quant au remboursement des dépenses effectués par un autre particulier.

[459] Le Tribunal d’arbitrage conclut qu’à défaut de dispositions transitoires exprimées par le Législateur, le nouvel article 124 du Règlement tel qu’amendé n’est pas applicable pour le contrat de construction objet du présent arbitrage, conclu entre deux particuliers, soit les Bénéficiaires et l’Entrepreneur, du contrat de garantie aussi entre particuliers, avant l’entrée en vigueur du nouvel article le 1er janvier 2015.

[460] En 2009, les Bénéficiaires et l’Entrepreneur ont conclu un contrat, l’Entrepreneur a accepté de leur construire un bâtiment résidentiel pour un prix précis, et les Bénéficiaires ont payé un montant précis à même le prix payé pour obtenir la couverture du Plan de garantie géré par l’Administrateur, selon le Règlement d’ordre public alors en vigueur.

[461] Le Règlement alors en vigueur « gouvernait le contenu des plans de garantie et des contrats qu’offre l’entrepreneur ». Dans l’affaire La Garantie habitation du Québec c. Masson[85], la Cour supérieure écrit :

3. La Loi sur le bâtiment, (L.Q. ch. B-1.1), oblige les entrepreneurs à détenir une licence et à adhérer à un plan qui garantit l'exécution de leurs obligations légales et contractuelles pour la vente ou la construction d'un bâtiment résidentiel. C'est le « Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs », (B-1.1, R. 0.2), qui gouverne le contenu des plans de garantie et des contrats qu'offre l'entrepreneur. Le contrat de garantie comporte des mentions obligatoires quasi identiques à celles du règlement, bien qu'avec une numérotation différente. (nos  soulignés)

[462] Il n’y a aucune disposition précise dans le Règlement amendé en vigueur depuis le 1er janvier 2015 qui stipule que l’article 124 amendé est applicable

[462.1]  aux contrats de construction conclus avant cette date;

[462.2] aux réclamations pour la mise en œuvre du Plan de Garantie reçue par l’Administrateur avant cette date.

[463] Le Tribunal d’arbitrage soussigné considère que, faute de disposition précise à ce sujet de la part du Législateur, il ne peut ajouter cette disposition.

[464] L’article 116 du Règlement permet au Tribunal d’arbitrage de faire appel à l’équité en cas de silence du Législateur pour interpréter le Règlement.

[465] Le Tribunal d’arbitrage soussigné considère qu’il serait contre l’équité pour les parties en présence d’essayer d’interpréter l’article 124 du Règlement pour en ajouter des dispositions non précisées par le Législateur, car il considère qu’il serait contre l’équité de changer

[465.1] le contenu des obligations de l’Administrateur quant au remboursement des frais d’experts des Bénéficiaires, alors qu’il a accepté de couvrir les Bénéficiaires selon un Règlement d’ordre public en échange d’un prix précis;

[465.2] le contenu des obligations de l’Entrepreneur quant au remboursement des frais d’experts des Bénéficiaires, alors qu’il a accepté de construire un bâtiment résidentiel neuf selon un Règlement d’ordre public en échange d’un prix précis;

[465.3] le contenu des obligations de l’Entrepreneur et de l’Administrateur qui ont posé des gestes et fait des frais sur réception de la réclamation des Bénéficiaires à partir d’avril 2014 (première mise en demeure) pour l’un, d’octobre 2014 (dénonciation) pour l’autre, quant au remboursement des frais d’experts des Bénéficiaires, seulement  permis par le nouvel article 124 tel qu’amendé.

[466] Le soussigné fait sien les motifs de notre collègue Jean Morissette détaillés dans l’affaire Syndicat des Copropriétaires Lot 3 977 437 c. Gestion Mikalin et La Garantie Abritat[86], mais quant à la non rétroactivité du nouvel article 124 du Règlement dans le présent dossier seulement (contrats de construction et de garantie signés en 2009 et demande de mise en œuvre du Plan de Garantie en 2014) puisque c’est le seul point que le soussigné ait à trancher.

[467] En conclusion, le Tribunal d’arbitrage ne peut que rejeter cette réclamation vu la version 2014 applicable des articles 124 et 125 au présent dossier, et réserver les droits des Bénéficiaires de porter leurs réclamations devant les Tribunaux de droit commun, sous réserves du droit applicable y compris pour la prescription, sans que cette affirmation ne puisse être interprétée dans un sens ou dans l’autre.

Réclamation de l’Entrepreneur pour ses frais d’expertise

 

[468] L’Entrepreneur réclame ses frais d’expertises sur la base de l’article 124 du Règlement mais vu les conclusions à laquelle le Tribunal d’arbitrage en est venu,  l’Entrepreneur n’ayant pas eu « gain de cause total ou partiel » par rapport à la conclusion de la décision de l’Administrateur du 26 janvier 2015, le Tribunal se doit de rejeter cette réclamation.

 

Réclamation de l’Administrateur pour une condamnation solidaire avec l’Entrepreneur quant aux frais de l’arbitrage

 

[469] L’Administrateur demande que le soussigné condamne l’Administrateur solidairement avec l’Entrepreneur quant aux frais.

[470] L’article 123 du Règlement stipule : 

Les coûts de l'arbitrage sont partagés à parts égales entre l'administrateur et l'entrepreneur lorsque ce dernier est le demandeur.

 

Lorsque le demandeur est le bénéficiaire, ces coûts sont à la charge de l'administrateur à moins que le bénéficiaire n'obtienne gain de cause sur aucun des aspects de sa réclamation, auquel cas l'arbitre départage ces coûts.

[471] Il plaide les dispositions de l’Annexe II, du Règlement, 5e & 19e paragraphes prévoyant l’engagement de l’entrepreneur de rembourser à l’Administrateur « […] les coûts exigibles pour l’arbitrage ».

[472] L’Administrateur plaide qu’il est vrai que le Règlement est d’ordre public, toutefois, si le Législateur avait voulu que les frais d’arbitre ne soient pas visés par l’Annexe II paragraphe 5, il l’aurait spécifiquement exclus du Règlement à l’article 123.

[473] L’Administrateur plaide que le Législateur aurait dû écrire spécifiquement que les coûts étaient moitié moitié nonobstant les dispositions générales de l’Annexe II du Règlement et comme ce n’est pas écrit, c’est l’Annexe II qui s’applique et non, les dispositions claires de l’article 123.

[474] Il plaide aussi la décision rendue par notre collègue Me Michel A. Jeanniot dans SDC Pimbina c. Const. Nomade Faubourg Boisbriand,[87] en date du 9 juillet 2015, mais, avec respect, le soussigné précise que cette décision a été rendue :

[474.1] ex parte sans la présence de l’entrepreneur et

[474.2] avec un ajout, soit un délai pour demander, de façon motivée, la rétractation de la décision de l’arbitre,

ce qui n’est pas la définition d’une décision contestée qui se voulait finale, que l’entrepreneur ait demandé la rétractation ou non, le tout soumis avec respect pour l’opinion contraire.

[475] L’Entrepreneur s’objecte à cette demande.

[476] Il réclame d’abord que l’Administrateur soit condamné aux entiers frais, puis ajoute « notre cliente s’est prévalue d’un droit que lui confère le plan de garantie lorsqu’une partie considère que la décision de l’Administrateur est erronée pour quelque motif que ce soit. Notre cliente n’a pas usé de ce droit de façon abusive […] »

 

[477] Avec respect, le Tribunal d’arbitrage ne partage pas la position de l’Administrateur.

[478] Le Tribunal d’arbitrage lit les dispositions de l’article 123 du Règlement et elles sont très claires.

[479] Si le Législateur avait voulu que l’article 123 se lise autrement, il l’aurait écrit autrement, et le Tribunal d’arbitrage n’a pas le pouvoir en vertu de l’article 116 du Règlement, soit sur la base de l’équité, de réécrire un Règlement adopté par le Gouvernement du Québec en vertu d’une Loi adoptée par l’Assemblée Nationale, dont la Cour d’appel a réitéré à au moins deux reprises qu’il était d’ordre public.

[480] Notre collègue Me Philippe Patry suite à un désistement dans l’affaire 7713673 Canada et La Garantie de Construction Résidentielle[88]  écrit :

[5]        Le premier paragraphe de l’article 123 du Règlement se lit comme suit :

 

«Les coûts de l’arbitrage sont partagés à parts égales entre l’administrateur et l’entrepreneur lorsque ce dernier est le demandeur. »

 

[6]        Tel que l’affirme une jurisprudence récent, [SDC Pimbina c. Const. Nomade Faubourg Boisbriand] le texte de cet article est clair et limpide. Il ne comporte aucune exception. Il stipule explicitement que lorsque l’Entrepreneur est le demandeur, comme en l’espèce, les coûts de l’arbitrage sont partagés à parts égales entre l’Administrateur et l’Entrepreneur. Ainsi, considérant cette disposition spécifique du Règlement quelle que soit l’issue de la demande d’arbitrage, le Code de procédure civile du Québec ne peut trouver application. Enfin, la jurisprudence notée par la procureure de l’Administrateur n’est pas pertinente puisqu’il s’agit d’un cas où les Bénéficiaires, non l’Entrepreneur, ont soumis un appel en arbitrage. Il est à noter que pour les appels d’arbitrage où le Bénéficiaire est le demandeur, le deuxième paragraphe de l’article 123 du Règlement traite de la question du paiement des frais d’arbitrage et laisse une discrétion à l’arbitre en la matière.

 

[7]        Pour toutes ces raisons, le tribunal statue que l’Administrateur et l’Entrepreneur devront assumer à parts égales les frais du présent arbitrage.

 

[481] Le Tribunal d’arbitrage considère que l’article 123 du Règlement est clair et qu’il ne peut décider autrement que de décider que les coûts de l’arbitrage seront partagés à part égales entre l’Administrateur et l’Entrepreneur car ce dernier est le demandeur.

[482] Le soussigné conclut que si le Législateur a pris la peine d’inscrire les mots « partagés à parts égales » dans cet article, c’était que là était son intention.

[483] Avec respect, le soussigné n’est pas le seul à trouver que le contenu de cet article est clair : la Cour Supérieure a même affirmé que «  le législateur ne pouvait pas être plus clair ».

 

[484] Dans l’affaire Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l'APCHQ inc. c. Chartier[89], la Cour supérieure donne raison à l’administrateur qui a déposé une requête en révision judiciaire concernant l’interprétation de l’article 37 du Règlement, qui est identique à l’article 123, bien que les conclusions de l’arbitre fussent différentes de ce qui est recherché ici par l’Administrateur.

[2] Dans le cadre de la décision qu'il a rendue, l'arbitre statue notamment sur les coûts reliés à l'arbitrage dont il était saisi.  Il s'exprime ainsi: «Les frais de l'arbitrage sont partagés en parts égales entre l'entrepreneur, Construction Serge Brouillette, 9046-6962 Québec inc., et l'administrateur de la garantie, La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de L'APCHQ Inc., conformément au Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs, à charge par l'administrateur de la garantie, à défaut par l'entrepreneur de payer sa part des frais de l'arbitrage dans les 30 jours de la présente sentence arbitrale, de payer pour et à l'acquit de l'entrepreneur tous les montants dus, sujet à ses droits de subrogation prévus à l'article 40 du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs.» […]  

[8] Le premier alinéa de l'article 37 du Règlement est rédigé en ces termes: «Les coûts de l'arbitrage sont partagés à parts égales entre l'administrateur et l'entrepreneur lorsque ce dernier est le demandeur. (…)»

[9] Le législateur ne pouvait être plus clair.

[485] L’Administrateur, connaissant la position du soussigné exposée verbalement lors de l’audience, position qu’il a reconsidérée à la lumière des représentations de l’Administrateur dans ce dossier pour conclure de la même façon, plaide que si des travaux doivent être faits, il demande une condamnation aux frais, mais si le soussigné n’ordonne pas que des travaux correctifs soient effectués, il ne les demande pas.

[486] D’une part, l’article 123 du Règlement ne fait pas cette distinction quant aux frais d’arbitrage.

[487] D’autre part, la question des frais des travaux correctifs que l’Administrateur devrait effectuer comme caution de l’Entrepreneur est différente puisque c’est justement comme caution, que l’Administrateur serait alors contraint d’effectuer les travaux.

[488] La Cour d’appel du Québec, dans l’affaire La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ Inc. c. Maryse Desindes et Yvan Larochelle, et René Blanchet mise en cause[90] écrit spécifiquement que l’Administrateur « s’oblige, dès lors, à cautionner les obligations légales et contractuelles des entrepreneurs généraux qui adhèrent à son plan de garantie. »

 

[489]  Déjà dans la décision Syndicat de la Copropriété La Gondola c. Me-Ra Développement et La Garantie Habitation du Québec[91], le soussigné a accepté, suite à la demande de l’administrateur, d’ajouter cette mention dans les conclusions de la décision arbitrale.

[490]  Il accepte donc de modifier la conclusion de sa décision en y ajoutant la précision demandée, mais quant aux travaux correctifs seulement.

[491]  En conclusion, le Tribunal d’arbitrage remercie les procureurs pour leur collaboration et professionnalisme dans le présent dossier.

 

 

CONCLUSION

 

 

PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL D’ARBITRAGE :

 

REJETTE la demande d’arbitrage de l’Entrepreneur et sa demande de remboursement de ses frais d’expert.

MAINTIENT la décision de l’Administrateur du 26 janvier 2015 quant au point 1, sous réserve de la seule modification au troisième (de six) paragraphe de la Conclusion (page 9 de la décision pièce A-15) pour le paragraphe suivant :

ORDONNE à l’Entrepreneur d’effectuer les travaux correctifs requis en ce qui a trait au point 1, et ce, dans un délai de 45 jours de la signature de ce jugement, en conformité avec les règles de l’art, et À défaut par l’Entrepreneur d’effectuer lesdits travaux dans ledit délai, ORDONNE à l’Administrateur, comme caution de l’Entrepreneur en vertu du Règlement, dans le même délai, de :

o   Retirer le prélart du sous-sol;

o   Retirer l’isolant rigide au sous-sol qui n’est pas pare-vapeur;

o   Effectuer une décontamination complète de la résidence selon un protocole établi.

REJETTE les demandes d’ordonnance des Bénéficiaires autres que celles contenues dans les présentes conclusions, et de remboursement des frais d’expert, produites dans le cadre de cet arbitrage, vu l’absence de compétence d’attribution du Tribunal d’arbitrage soussigné en vertu du Règlement, et RÉSERVE le droit des Bénéficiaires, à supposer qu’il ait un recours fondé, de porter, devant les tribunaux de droit commun, leurs réclamations, sujet aux règles de droit commun et de la prescription civile

CONDAMNE l’Entrepreneur et l’Administrateur du Plan de Garantie à payer chacun la moitié à parts égales des frais d'arbitrage encourus dans le présent dossier.                       

                                                                       Montréal, le 2 novembre 2015

__________________________

Me ROLAND-YVES GAGNÉ

Arbitre / CCAC

 

PROCUREURS :

Pour l’Entrepreneur

Me Éric Gagnon

Gagnon Minier

 

Pour les Bénéficiaires

Me Yves Laperrière

Aubin Girard Côté

 

Pour l’Administrateur

Me Nancy Nantel

Contentieux des Garanties Abritat et al.

 

 

Jurisprudence citée

La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ Inc. c. Maryse Desindes et Yvan Larochelle, et René Blanchet mise en cause  AZ-50285725, 15 décembre 2004.

 

Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l'APCHQ inc. c. Dupuis 2007 QCCS 4701 (Michèle Monast, j.c.s., 26 octobre 2007).

 

Construction Lortie inc. c. Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ 2009 QCCS 1941 (Marc Lesage, j.c.s.).

 

Syndicat « Les Copropriétaires du Oxxford » c. Mario di Palma et al. (CCAC S13-031501-NP, 7 janvier 2014, Me Roland-Yves Gagné, arbitre).

 

Frève et Constructions Levasseur Inc (CCAC S14-012201-NP et al., 6  octobre 2014, Me Roland-Yves Gagné, arbitre).

 

Morin et Constructions Paul Genesse et La Garantie Qualité Habitation (CCAC S14-110401-NP, 13 mars 2015, Me Roland-Yves Gagné, arbitre).

 

Gignac c. Marcotte 2010 QCCA 821.

 

Consortium M.R. Canada Ltée c. Office municipal d’habitation de Montréal 2013 QCCA 1211.

 

Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l'APCHQ inc. c. MYL 2011 QCCA 56.

 

Garantie habitation du Québec inc. c. Lebire J.E. 2002-1514 (Jacques Dufresne, j,c.s).

 

Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ Inc. c. Décarie 2006 QCCS 907 (Gilles Hébert, j.c.s.).

 

Garantie d'habitation du Québec c. Jeanniot 2009 QCCS 909 (Johanne Mainville, j.c.s.).

 

3984583 Canada Inc. (Jobiko Construction) et La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ et Lina Al-Karkhi et al (SORECONI 060124001, 20 août 2008, Me Johanne Despatis, arbitre).

 

Raymond Gravel et R.L. Gravel et La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ (CCAC S07-121301-NP, 11 janvier 2010, Me Robert Masson, arbitre).

 

9056-1457 Québec inc. c. Chartier 2010 QCCS 5270 (Hélène Le Bel, j.c.s., 4 octobre 2010).

 

Syndicat des copropriétaires 6613-6635 boul. des Laurentides Laval c. 9141-0001 Québec Inc. et Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ, (CCAC S14-070901-NP, 1er juin 2015, Yves Fournier, arbitre).

 

Desrochers c. Sotramont Québec et La Garantie Habitation du Québec (CCAC S09-170401-NP, 18 janvier 2010, Me Jean Philippe Ewart, arbitre).

 

Syndicat des Copropriétaires du 716 Saint-Ferdinand et al. c. Développements TGB et La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ (SORECONI 1012106001, 15 avril 2011, Me Jean Philippe Ewart, arbitre).

 

Ménard c. LeBire 2008 QCCS 3274.

 

Crystal Kaczkowski vs. Les Constructions Arsenault & Frères Inc. et La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ Inc. (CCAC S10-020601-NP, 30 août 2010, Me Roland-Yves Gagné, arbitre).

 

Desgagné c. Fabrique de la paroisse St-Philippe d’Arvida, [1984] 1 R.C.S. 19.

 

Syndicat des Copropriétaires Lot 3 977 437 c. Gestion Mikalin et La Garantie Abritat (GAMM 2013-15-011, 24 avril 2015, Jean Morissette, arbitre).

 

Diallo et 4176855 Canada Inc., et la Garantie d'Habitation du Québec Inc. (GAMM 2012-13-001, Jean Morissette, arbitre).

 

Élizabeth Séguin et Gilles Séguin et Constructions Cholette Inc. et La Garantie des Bâtiments Résidentiels neufs de l'APCHQ Inc. (SORECONI 061110001,  30 janvier 2007, Alcide Fournier, arbitre).

 

Linda Jacques et al. et A.G.P. Couture et Fils et La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ (CCAC S10-241202-NP, 5 septembre 2012, Me Reynald Poulain, arbitre).

 

Services loisirs et tourisme St-Victor c. Réfrigération Thetford inc. 2010 QCCS 3663 (Jean Lemelin, j.c.s., 15 juillet 2010).

 

Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l'APCHQ inc. c. MYL, 2011 QCCA 56.

 

Paguet c. Construction Godin & Leclerc Inc., J.E. 98-199 (C.A.).

 

Installations GMR inc. c. Pointe-Claire (Ville de) 2015 QCCA 1521.

 

Gauthier c. Séguin [1969] B.R. 913.

 

Construction J.R.L. (1977) ltée c. Zurich Compagnie d’assurances, J.E. 91-824 (C.A.).

 

Entrepôt international Québec s.e.c. c. Protection incendie de la Capitale inc., 2014 QCCA 617.

 

General Signal Ltd. c. Allied Canada inc., J.E. 94-1091 (C.A.).

 

 Lanthier c. Entreprises P.F. St-Laurent inc., J.E. 2004-672 (C.S.).

 

Entreprises Grutman Inc. c. L’Archevêque & Rivest Ltée [1991] R.L. 646 (C.A.).

 

SNC-Lavalin inc. c. Société québécoise des infrastructures (Société immobilière du Québec) 2015 QCCA 1153.

 

Habitations des Cônes c. Roy 2013 QCCS 260 (Alain Michaud, j.c.s., 17 janvier 2013).

 

Syndicat de copropriété Jardins des Vosges c. Les Jardins des Vosges et La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ (CCAC S11-111401-NP, 23 septembre 2013. Me Pierre Bélanger, arbitre).

 

CDL 7000 Holdings c. Scanaxa et al 2004 CanLII 20726 (Jean-Yves Lalonde, j.c.s., 10 juin 2004).

 

Sylvain Boissé et Construction André Taillon Inc. et- La Garantie des bâtiments résidentiels de l’APCHQ Inc. (SORECONI 051219002 5 mai 2006, Me Michel A. Jeanniot, arbitre).

 

Julien (Rénovation Éric Julien enr.) c. Grenier 2006 QCCQ 3079 (Claude Bigué, j.c.q., 30 mars 2006). 

 

Louise Clermont c. Michel Labelle EYB 2004-60523, 540-02-011414-001, 6 avril 2004.

 

Syndicat du 3411, au 3417, Avenue des Érables et Devex Inc. et La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ, (SORECONI 061220001, 15 juin 2007, Me Michel A. Jeanniot, arbitre).

 

Clouâtre c. Factory Mutual Insurance Company 2011 QCCA 1690 (19 septembre 2011).

 

Construction Kiraction c. Montambault 2015 QCCS 3611 (Bernard Godbout, j.c.s., 13 juillet 2015).

 

Monique Meunier et Coopérative De Travailleurs Les Habitations Apex et la Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ (GAMM 2009-20-001, 30 septembre 2010, Me Johanne Despatis, arbitre).

 

Roberge c. Bolduc, 1991 1 RCS 374.

 

Mouvement laïque québécois c. Saguenay (Ville) 2015 CSC 16.

 

Shawinigan Engineering Co. c. Naud 1929 R.C.S. 341.

 

Beauchamp c. Sabourin EYB 1980-137620.

 

Syndicat des copropriétaires du 3321-3327 Gaétan-Boucher c. 9113-2506 Québec Inc. et La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ (GAMM 2014-16-010,  6 janvier 2015, Jean Morissette, arbitre).

 

Viala c. Ligeron 2011 QCCS 5514 (Jacques Babin, j.c.s., 30 septembre 2011).

 

Béatrice Radulescu Groupe AXXCO Inc et La Garantie Habitation du Québec Inc. (GAMM 2010-12-001, 20 septembre 2010, Me Jeffrey Edwards, arbitre).

 

Lynda Bérubé et Entrepreneur Général J.C.C. Inc. et La Garantie des bâtiments résidentiels neufs Inc. de l’APCHQ (GAMM 2009-02-001, 16 avril 2010, Me Bernard Lefebvre, arbitre).

 

Tony Jorge et al. c. Les Constructions Naslin Inc. et La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ Inc (SORECONI 051206001, 15 mars 2006, Me Michel A. Jeanniot, arbitre).

 

Entrepôt International Québec, s.e.c. c. Protection incendie de la Capitale inc 2014 QCCA 617 (CanLII).

 

Syndic des copropriétaires La Champêtre-Andante c. Maisons de Ville Laurentiennes Inc. (CCAC S08-011201-NP, 9 avril 2009, Me Jean Philippe Ewart, arbitre).

 

Paul Bordeleau Syndicat de Copropriété c. Saint-Luc Habitation Inc. et La Garantie des immeubles résidentiels de l’APCHQ, (CCAC 03-1204/ML, 27 septembre 2004, Me Jeffrey Edwards, arbitre).

 

Guistini c. Expo Ornemental Inc 2007 QCCA 417.

 

Construction J.R.L. (1977) Ltée c. Zurich Compagnie d’assurances, J.E. 91-824 (C.A.).

 

Commission de la construction du Québec c. Construction Verbois Inc., J.E. 97-2080 (C.S.).

 

Syndicat de la copropriété du 7400, rue Lajeunesse et Montcan Inc. et La Garantie des bâtiments résidentiels de l’APCHQ Inc. (CCAC S09-030701-NP, 17 novembre 2009, Me Albert Zoltowski, arbitre)

 

Polat c. Construction D’Astous ltée et La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ Inc (SORECONI, 27 juin 2014, Me Lydia Milazzo, arbitre). 

 

Promutuel Lévisienne-Orléans, société mutuelle d'assurances générales c. Service de techniciens en électricité du Québec, STEQ inc 2010 QCCS 1608 (Jean-François Émond, j.c.s.)

 

Construction R. Cloutier inc. c. Entreprises CJS inc 2007 QCCS 652, 15 février 2007 (Denis Jacques, j.c.s.)

 

Trudeau c. Tremblay 2007 QCCQ 6132 (Claude Montpetit, j.c.q., 19 avril 2007).

 

Scaffidi Argentina c. Constructions GSS Gauthier 2000 inc 2012 QCCS 5417 (Suzanne Tessier, j.c.s 24 octobre 2012).

 

Innomax Division Résidentielle inc et SDC 1120 de Sancerre, Longueuil et La Garantie Abritat inc (CCAC S14-020601-NP, 9 décembre 2014, Me Albert Zoltowski, arbitre).

 

La Garantie habitation du Québec c. Masson, REJB 2002-33076 (Denis Desrochers, j.c.s.).

 

Syndicat de copropriété du 4551-4565 de Niverville c. GDMD Développement inc. et La Garantie Habitation du Québec inc. (GAMM 2007-09-010, 6 novembre 2007, Claude Dupuis, arbitre).

 

SDC Pimbina c. Const. Nomade Faubourg Boisbriand (CCAC S13-052401-NP, 9 juillet 2015, Me Michel A. Jeanniot, arbitre).

 

7713673 Canada et La Garantie de Construction Résidentielle (CCAC S15-031302-NP, 13 juillet 2015, Me Philippe Patry, arbitre).

 

Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l'APCHQ inc. c. Chartier 2007 QCCS 2146 (Lise Matteau, j.c.s., 11 mai 2007).

Syndicat de la Copropriété La Gondola c. Me-Ra Développement et La Garantie Habitation du Québec (CCAC S13-032101-NP, 12 août 2013, Me Roland-Yves Gagné, arbitre).

 

Doctrine citée

 

Jean-Louis Baudouin et Patrice Deslauriers, La responsabilité civile, Volume II - La Responsabilité professionnelle, 7e éd., 2007, Cowansville, Yvon Blais

 

Vincent Karim, Contrats d’entreprise, 2e éd., Montréal, Éditions Wilson & Lafleur, 2011.

 

Jacques Deslauriers, Vente, louage, contrat d’entreprise ou de service, 2005, Wilson & Lafleur.

 

T. Rousseau-Houle dans Les contrats de construction en droit public & privé.

 

Jeffrey Edwards et Me Sylvie Rodrigue La responsabilité légale pour la perte de l’ouvrage et la garantie légale contre les malfaçons, « La construction au Québec : perspectives juridiques », Wilson & Lafleur Ltée 1998, Montréal.

 

Bernard P. Quinn, Les règles de l'art, tiré du collectif La construction au Québec: perspectives juridiques, sous la direction de Olivier F. Kott et Claudine Roy.

 

 



[1] AZ-50285725, 15 décembre 2004.

[2] 2007 QCCS 4701, 26 octobre 2007, Michèle Monast, juge.

 

[3] Pâques 2014 = 20 avril 2014 d’après Internet.

[4] Lors de son délibéré, le soussigné a noté dans la lettre produite en A-12 que le procureur des Bénéficiaires, dans une lettre du 17 septembre 2014, fait référence à une lettre de l’Administrateur du 19 août 2014, en réponse à une lettre du procureur des Bénéficiaires du 7 août 2014. Ni la lettre du 7 août du procureur des Bénéficaires, ni la lettre du 19 août de l’Administrateur, auxquelles la lettre du 17 septembre fait référence, n’ont été mentionnées lors des témoignages, ou mises en preuve, ou produites dans le cahier de pièces de l’Administrateur en vertu de l’article 109 du Règlement. Toutefois, la non-production de ces deux lettres n’affecte en rien la décision du soussigné, qui a conclu que la dénonciation des Bénéficiaires avait été produite en conformité avec les délais prévus par le Règlement.

[5] Les cercles à 42% et 31% ont été faits par le soussigné.

[6] Le soussigné a bien compris que le témoin réfère au Code National du Bâtiment.

[7] Un débat (ou « protestation » et non une objection par le procureur d’une partie) fut soulevé par le témoin Ouaras à partir de son siège dans l’assistance quant au sens à donner au statut d’ « ingénieur junior » du témoin Champagne. Bien qu’il n’y ait pas eu d’objection formelle à trancher, le soussigné s’est  engagé à l’audience à lire pendant son délibéré le Règlement sur les autres conditions et modalités de délivrance des permis de l'Ordre des ingénieurs du Québec c. I-9, r. 4 et la Loi sur les Ingénieurs c. I-9. Après lecture, le soussigné n’a vu dans ces textes ou dans la preuve au dossier, aucune raison qui, à elles seules, devait entraîner le rejet du témoignage d’expert du témoin Champagne.

[8] Le témoin a dit en premier que cela sentait le « cani », mot inconnu du soussigné qui n’est pas natif de la région, pour lequel le témoin, qui n’est pas natif de la région et qui a dit l’avoir appris des gens de la région, a donné comme deuxième réponse, après discussions parmi les gens présents sur le sens du mot,  « renfermé ». D’après internet, le mot signifierait « moisi » ou « moisissure », toutefois, le soussigné est prudent sur les sens donnés sur internet aux expressions québécoises, puisque ces sens peuvent différer d’une région à l’autre et différer pour les gens qui ne sont pas natifs de la région. Pour cette raison, le soussigné note la deuxième réponse du témoin, soit « renfermé ».

[9] 2009 QCCS 1941 (Hon. juge Marc Lesage).

[10] (Paragraphes [145] et suivants, CCAC S13-031501-NP, 7 janvier 2014, Me Roland-Yves Gagné, arbitre).

[11] (Paragraphes [120] et suivants, CCAC S14-012201-NP et al., 6  octobre 2014, Me Roland-Yves Gagné, arbitre).

[12] (Paragraphes [103] et suivants, CCAC S14-110401-NP, 13 mars 2015, Me Roland-Yves Gagné, arbitre).

[13] 2010 QCCA 821.

[14] Voir, par exemple, Garantie habitation du Québec inc. c. Lebire J.E. 2002-1514 (Hon. juge Jacques Dufresne), paragraphes [97] et [98]; Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ Inc. c. Décarie 2006 QCCS 907 (Hon. juge Gilles Hébert), paragraphes [26] à [28].

[15] 12 juillet 2013, Cour d’appel, 2013 QCCA 1211.

[16] 2009 QCCS 909 (Johanne Mainville, juge).

[17] Syndicat des Copropriétaires du 716 Saint-Ferdinand et al. c. Développements TGB et La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ SORECONI 1012106001, 15 avril 2011, Me Jean Philippe Ewart, arbitre.

[18] Crystal Kaczkowski vs. Les Constructions Arsenault & Frères Inc. et La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ Inc. (CCAC S10-020601-NP, 30 août 2010, Me Roland-Yves Gagné, arbitre).

[19] Élizabeth Séguin et Gilles Séguin et Constructions Cholette Inc. et La Garantie des Bâtiments Résidentiels neufs de l'APCHQ Inc., (SORECONI 061110001,  30 janvier 2007, Alcide Fournier, arbitre).

[20] Linda Jacques et al. et A.G.P. Couture et Fils et La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ, (CCAC S10-241202-NP, 5 septembre 2012, Me Reynald Poulain, arbitre).

[21] Services loisirs et tourisme St-Victor c. Réfrigération Thetford inc. 2010 QCCS 3663 (Jean Lemelin, j.c.s., 15 juillet 2010)

[22] GAMM 2013-15-011, 24 avril 2015, Jean Morissette, arbitre.

[23] Diallo et 4176855 Canada Inc., et la Garantie d'Habitation du Québec Inc.(GAMM 2012-13-001, Jean Morissette, arbitre).

[24] Cour d’appel, 2013 QCCA 1211 Renvoi [5] : Voir art. 3, 4, 5, 18, 105, 139 et 140 du Règlement. Voir aussi Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l'APCHQ inc. c. MYL, 2011 QCCA 56, paragr. [13]; Garantie des bâtiments résidentiels de l'APCHQ Inc. c. Desindes, J.E. 2005-132 (C.A.), paragr. [11];

[25] J.E. 2002-1514 (Hon. juge Jacques Dufresne) 

[26] Selon la pièce E-17.

[27] Consortium M.R. Canada Ltée c. Office municipal d’habitation de Montréal, 2013 QCCA 1211; Garantie des bâtiments résidentiels de l'APCHQ Inc. c. Desindes, J.E. 2005-132 (C.A.).

[28] 9056-1457 Québec inc. c. Chartier 2010 QCCS 5270 (Hélène Le Bel, j.c.s., 4 octobre 2010).

[29] Syndicat des copropriétaires 6613-6635 boul. des Laurentides Laval c. 9141-0001 Québec Inc. et Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ, (CCAC S14-070901-NP, 1er juin 2015, Yves Fournier, arbitre).

[30] 3984583 Canada Inc. (Jobiko Construction) et La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ et Lina Al-Karkhi et al (SORECONI 060124001, 20 août 2008, Me Johanne Despatis, arbitre).

[31] Lynda Bérubé et Entrepreneur Général J.C.C. Inc. et La Garantie des bâtiments résidentiels neufs Inc. de l’APCHQ (GAMM 2009-02-001, 16 avril 2010, Me Bernard Lefebvre, arbitre).

[32] Raymond Gravel et R.L. Gravel et La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ (CCAC S07-121301-NP, 11 janvier 2010, Me Robert Masson, arbitre).

[33] CCAC S09-170401-NP, 18 janvier 2010.

[34] Garantie habitation du Québec inc. c. Lebire J.E. 2002-1514 (Hon. juge Jacques Dufresne).

[35]  Jean-Louis Baudouin et Patrice Deslauriers, La responsabilité civile, 7e éd., Cowansville, Yvon Blais Volume II - La Responsabilité professionnelle.

[36] Ce règlement à Saguenay est cité dans le cahier de pièces de l’Administrateur sous A-5 (10e page). Il est aussi allégué, et non contredit, par Louis Parent dans son rapport (pièce A-6). La Cour d’appel dans Paguet c. Construction Godin & Leclerc Inc., J.E. 98-199 (C.A.) : « Le juge a refusé d'étudier le règlement de construction au motif qu'il n'avait pas été produit conformément aux Règles de la Cour supérieure. À mon humble avis, devant l'importance de la cause pour les parties, la pertinence du règlement de construction, le fait que l'authenticité et la légalité du règlement ne pouvaient être sérieusement contestées et le fait que le règlement n'était pas un écrit ordinaire mais une disposition légale, le juge de première instance s'est montré trop sévère.  Je suis donc d'avis que Godin a fait une double erreur: d'une part, pour le calcul de la pente, il a omis de tenir compte de la présence du trottoir devant le terrain, et, d'autre part, il a omis de tenir compte du règlement de construction. »

[37] Installations GMR inc. c. Pointe-Claire (Ville de) 2015 QCCA 1521 (Cour d’appel, 21 septembre 2015).

[38] Gauthier c. Séguin [1969] B.R. 913; Construction J.R.L. (1977) ltée c. Zurich Compagnie d’assurances, J.E. 91-824 (C.A.); Entrepôt international Québec s.e.c. c. Protection incendie de la Capitale inc., 2014 QCCA 617. Voir aussi, entre autres, Vincent Karim, Contrats d’entreprise, 2e éd., Montréal, Éditions Wilson & Lafleur, 2011, p. 521.

[39] General Signal Ltd. c. Allied Canada inc., J.E. 94-1091 (C.A.); Lanthier c. Entreprises P.F. St-Laurent inc., J.E. 2004-672 (C.S.); Entreprises Grutman Inc. c. L’Archevêque & Rivest Ltée [1991] R.L. 646 (C.A.).

[40] SNC-Lavalin inc. c. Société québécoise des infrastructures (Société immobilière du Québec) 2015 QCCA 1153 (8 juillet 2015).

[41]          Dans Québec, Commentaires du ministre de la Justice : Le Code civil du Québec, tome II, Québec, Pub. du Québec, 1993, p. 1332, sous l’article 2119 C.c.Q. on mentionne que : « […]. On notera que cet article est d’ordre public : toute clause exclusive ou limitative de responsabilité serait nulle. Ce caractère impératif découle de la nécessité d’assurer la sécurité publique ».

[42] Le soussigné a trouvé la corroboration de cette information sur le site suivant : http://www.legerlite.ca/medias/pdf/autres2/fr/THERMOLITE-CCMC-12836-L-FR.pdf

[43] Le soussigné a bien compris que le témoin réfère au Code National du Bâtiment.

[44] Habitations des Cônes c. Roy 2013 QCCS 260 (Alain Michaud, j.c.s., 17 janvier 2013). Cité dans l’application du Règlement dans : Syndicat de copropriété Jardins des Vosges c. Les Jardins des Vosges et La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ CCAC S11-111401-NP, 23 septembre 2013. Me Pierre Bélanger, arbitre.

[45] Julien (Rénovation Éric Julien enr.) c. Grenier, 2006 QCCQ 3079 (Claude Bigué, j.c.q., 30 mars 2006). 

[46] « La garantie légale de cinq ans (art. 2118 C.c.Q.) est indépendante et complémentaire » à la garantie pour vice cachée, voir CDL 7000 Holdings c. Scanaxa et al (Jean-Yves Lalonde, j.c.s., 10 juin 2004, 2004 CanLII 20726).

[47] Sylvain Boissé et Construction André Taillon Inc. et- La Garantie des bâtiments résidentiels de l’APCHQ Inc. SORECONI 051219002 5 mai 2006, Me Michel A. Jeanniot, arbitre.

[48] SORECONI 061220001, 15 juin 2007, Me Michel A. Jeanniot, arbitre.

[49] Monique Meunier et Coopérative De Travailleurs Les Habitations Apex et la Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ (GAMM 2009-20-001, 30 septembre 2010, Me Johanne Despatis, arbitre).

[50] Clouâtre c. Factory Mutual Insurance Company 2011 QCCA 1690 (19 septembre 2011), paragraphes  [36] à [42].

[51] Construction Kiraction c. Montambault 2015 QCCS 3611 (Bernard Godbout, j.c.s., 13 juillet 2015), paragraphes [25] et suivant.

[52] 2014 QCCA 617.

[53] SORECONI 051206001, 15 mars 2006, Me Michel A. Jeanniot, arbitre.

[54] CCAC S08-011201-NP, 9 avril 2009, Me Jean Philippe Ewart, arbitre.

[55] Paul Bordeleau Syndicat de Copropriété c. Saint-Luc Habitation Inc. et La Garantie des immeubles résidentiels de l’APCHQ (CCAC 03-1204/ML, 27 septembre 2004, Me Jeffrey Edwards, arbitre).

[56]  Jean-Louis Baudouin et Patrice Deslauriers, La responsabilité civile, 7e éd., Cowansville, Yvon Blais Volume II - La Responsabilité professionnelle.

[57] Jacques Deslauriers, Vente, louage, contrat d’entreprise ou de service, 2005, Wilson & Lafleur, p. 678.

[58] Viala c. Ligeron 2011 QCCS 5514 (Jacques Babin, j.c.s., 30 septembre 2011).

[59] Habitations des Cônes c. Roy 2013 QCCS 260 (Alain Michaud, j.c.s., 17 janvier 2013). Cité dans l’application du Règlement dans : Syndicat de copropriété Jardins des Vosges c. Les Jardins des Vosges et La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ (CCAC S11-111401-NP, 23 septembre 2013. Me Pierre Bélanger, arbitre).

[60] Roberge c. Bolduc, 1991 1 RCS 374 : «  Le juge, cependant, reste l'arbitre final et n'est pas lié par le témoignage des experts.  Comme l'écrit Jean-Paul Landry, dans son article "De la preuve par expert: la jurisprudence" (1980), 40 R. du B. 652, à la p. 656: Si l'expert agissant comme témoin doit éclairer le jury ou la cour, il ne les lie cependant pas. C'est avec insistance que les juges reviennent là-dessus.  [En italique dans l'original; références omises.]. Mouvement laïque québécois c. Saguenay (Ville) 2015 CSC 16 : « [106] Il est acquis que l’expert doit fournir une opinion indépendante, impartiale et objective, en vue d’aider le décideur. » Shawinigan Engineering Co. c. Naud 1929 R.C.S. 341, p. 343 : « la loi ne fait aucune distinction entre les professionnels et les autres témoins. Leurs témoignages doivent être appréciés comme les autres, et le tribunal est tenu de les examiner et de les peser comme toute autre preuve faite dans la cause ».

[61] Paragraphe [125] ci-haut.

[62] Paragraphe [91].

[63] Paragraphe [132].

[64] Paragraphe [134].

 

[65] Paragraphe [32] ci-haut.

[66] « Il aurait fallu faire d’autres ouvertures. Mais une telle recherche serait hasardeux et n’assurerait pas de résultats nécessairement concluants sans les compter les coûts reliés. » 10 décembre 2014, pièce E-4; « Comme nous ne sommes pas en mesure d’expliquer les causes de l’humidité ou moisissure relevées dans le rapport Experbatiment.ca. D’ailleurs leur rapport n’explique pas la source de la problématique. Il reste probable à notre sens que la cause est plus reliée aux habitudes de vie des occupants. » 16 août 2015, pièce E-7.

[67] Paragraphe [91].

[68] Béatrice Radulescu Groupe AXXCO Inc et La Garantie Habitation du Québec Inc. (GAMM 2010-12-001, 20 septembre 2010, Me Jeffrey Edwards, arbitre). Voir aussi, entre autres, Lynda Bérubé et Entrepreneur Général J.C.C. Inc. et La Garantie des bâtiments résidentiels neufs Inc. de l’APCHQ (GAMM 2009-02-001, 16 avril 2010, Me Bernard Lefebvre, arbitre), paragraphes [34] et [35] [34]  À remarquer que l’administrateur rejette la réclamation des bénéficiaires non pas à cause de l’inexistence d’infiltrations d’eau mais - expressément affirmé à l’arbitrage - c’est parce que les bénéficiaires n’ont pas prouvé hors de tout doute raisonnable que les travaux en question avaient été exécutés par l’entrepreneur. [35]  Sur le fardeau de preuve des bénéficiaires en l’espèce, il est utile de rappeler que ce fardeau est celui de la prépondérance de preuve. La décision de l’administrateur basée sur l’exigence d’une preuve hors de tout doute est erronée à sa base […]

[69] Voir paragraphe [52] ci-haut.

[70] Voir, paragraphe [57].

[71] 2007 QCCA 417.

[72] La responsabilité légale pour la perte de l’ouvrage et la garantie légale contre les malfaçons, « La construction au Québec : perspectives juridiques », Wilson & Lafleur Ltée 1998, Montréal, à la page 453; cités, entre autres, par : Syndicat de la copropriété du 7400, rue Lajeunesse et Montcan Inc. et La Garantie des bâtiments résidentiels de l’APCHQ Inc., CCAC S09-030701-NP, 17 novembre 2009, Me Albert Zoltowski, arbitre; Polat c. Construction D’Astous ltée et La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ Inc SORECONI, 27 juin 2014, Me Lydia Milazzo, arbitre (cité en partie); 

[73] 2010 QCCS 1608, 27 avril 2010 (Jean-François Émond, j.c.s.)

[74] Jacques Deslauriers, Vente, louage, contrat d'entreprise ou de service, Montréal, Wilson & Lafleur ltée, 2005, p. 596 et 597.

[75] Construction Kiraction c. Montambault 2015 QCCS 3611 (Bernard Godbout, j.c.s., 13 juillet 2015), paragraphes [25] et suivant.

[76] 2007 QCCS 652, 15 février 2007 (Denis Jacques, j.c.s.)

[77] Trudeau c. Tremblay 2007 QCCQ 6132 (Claude Montpetit, j.c.q., 19 avril 2007). Note, l’immeuble ayant été construit il y a plus de cinq, l’article 2118 n’avait pas d’application.

[78] Bernard P. Quinn, Les règles de l'art, tiré du collectif La construction au Québec: perspectives juridiques, sous la direction de Olivier F. Kott et Claudine Roy, p. 580.

[79] Jean-Louis Baudouin, Patrice Deslauriers, La responsabilité civile, 7e éd., Cowansville, Éditions Yvon Blais, 2007, p. 230.

[80] Scaffidi Argentina c. Constructions GSS Gauthier 2000 inc 2012 QCCS 5417 (Suzanne Tessier, j.c.s, 24 octobre 2012).

[81] CCAC S10-241202-NP, 5 septembre 2012, Me Reynald Poulain, arbitre.

[82] Innomax Division Résidentielle inc et SDC 1120 de Sancerre, Longueuil et La Garantie Abritat inc (CCAC S14-020601-NP, 9 décembre 2014, Me Albert Zoltowski, arbitre).

[83] Syndicat de copropriété Jardins des Vosges c. Les Jardins des Vosges et La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ CCAC S11-111401-NP, 23 septembre 2013. Me Pierre Bélanger, arbitre, paragraphe [19].

[84] Syndicat de copropriété du 4551-4565 de Niverville c. GDMD Développement inc. et La Garantie Habitation du Québec inc. (GAMM 2007-09-010, 6 novembre 2007, Claude Dupuis, arbitre).

[85] La Garantie habitation du Québec c. Masson, REJB 2002-33076 (Denis Desrochers, j.c.s.).

[86] GAMM 2013-15-011, 24 avril 2015, Jean Morissette, arbitre.

[87] SDC Pimbina c. Const. Nomade Faubourg Boisbriand, CCAC # S13-052401, 9 juillet 2015, Me Michel A. Jeanniot, arbitre.

[88] CCAC S15-031302-NP, 13 juillet 2015, Me Philippe Patry, arbitre.

[89] Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l'APCHQ inc. c. Chartier 2007 QCCS 2146 (Lise Matteau, j.c.s., 11 mai 2007).

[90] AZ-50285725, 15 décembre 2004, paragraphe 12.

[91] S13-032101-NP, 12 août 2013.