ARBITRAGE EN VERTU DU RÈGLEMENT SUR LE PLAN DE GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS (Décret 841-98)
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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Groupe d’arbitrage et de médiation sur mesure (GAMM) |
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Dossier no : |
GAMM : 2009-20-001 |
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APCHQ : 148781-1 (09-218FL) |
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ENTRE : MONIQUE MEUNIER ET JEAN-MARC MEIS
(ci-après les « bénéficiaires »)
ET : LA GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS DE L’APCHQ INC.
(ci-après l’« administrateur »)
ET : COOPÉRATIVE DE TRAVAILLEURS LES HABITATIONS APEX
(ci-après l’« entrepreneur »)
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DEVANT L’ARBITRE : |
Me Johanne Despatis |
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Pour les bénéficiaires : |
Me Claude Coursol |
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Pour l’administrateur : |
Me François Laplante |
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Pour l’entrepreneur : |
Aucune |
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Dates d’audience : |
21 avril et 11 aout 2010 |
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Date de la sentence : |
30 septembre 2010 |
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SENTENCE ARBITRALE
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Adjudex inc.
0905-8331-GAMM
SA 8080-10
I
INTRODUCTION
[1] Madame Monique Meunier et monsieur Jean-Marc Meis, les bénéficiaires, contestent en vertu de l’article 19 du Règlement sur le Plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs, ci-après le Règlement, une soixantaine d’éléments d’une décision rendue le 6 avril 2009 par la Garantie des maisons neuves de l’APCHQ inc., l’administrateur, suite à son inspection de leur propriété construite par la Coopérative de travailleurs les Habitations Apex, l’entrepreneur.
[2] La demande d’arbitrage des bénéficiaires est faite en mai 2009. Le 3 juin 2009, une conférence téléphonique réunit les bénéficiaires, alors non représentés par procureur, l’entrepreneur, qui a depuis fait faillite, le procureur de l’administrateur ainsi que l’arbitre. Son compte rendu transmis aux parties le lendemain se lit ainsi :
La présente confirme l’essentiel de ce qui ressort de notre conférence téléphonique d’hier :
1. Le litige porte sur les points 3, 4, 13, 26 à 78 ainsi que 81 et 82 de la décision rendue le 6 avril 2009 par l’administrateur.
2. Selon monsieur Meis, on ne retrouve dans cette décision aucune conclusion concernant sa réclamation relativement à la fissuration de la dalle de fondation. À cet égard, Me Laplante a indiqué qu’il fera les vérifications auprès de son client et nous en informera par écrit d’ici le 26 juin 2009.
3. Le Cahier des pièces préparé par l’administrateur nous sera transmis d’ici le 12 juin. Afin d’éviter de retarder inutilement l’audience, si une partie entend présenter un document qui n’y serait pas déjà, elle devra en transmettra une copie aux autres parties ainsi qu’à moi-même au plus tard 10 jours avant la première date d’audience.
4. Pour sa part, monsieur Meis transmettra d’ici le 12 juin prochain aux deux autres parties ainsi qu’à moi-même le rapport de monsieur Karl Fournier qu’il entend présenter dans le cadre de l’arbitrage.
5. Après réception et examen de ce rapport, l’administrateur et l’entrepreneur feront savoir par écrit aux deux autres parties ainsi qu’à moi-même, d’ici le 26 juin s’ils entendent procéder de leur côté à une contre-expertise. Dans l’affirmative, ils indiqueront à la même occasion, le délai nécessaire pour ce faire.
6. Dans l’éventualité où aucune contre-expertise n’est demandée, l’audience, d’une durée anticipée de deux jours, aura lieu à deux dates choisies parmi les suivantes après vérifications des disponibilités de vos témoins: 5, 6, 7 août, 8, 9 septembre 2009. Vos disponibilités respectives me seront communiquées par écrit avec copie aux deux autres parties d’ici le 3 juillet 2009.
Si aucune des dates envisagées ne convenait ou qu’une seule convienne, mon bureau entreprendra les démarches afin de fixer avec vous la ou les deux journées manquantes.
Nos échanges ont également porté sur des points de la décision de l’administrateur où celui-ci a ordonné certains travaux correctifs non encore effectués. Cette partie de notre conversation concernait des points qui n’ont pas été portés en arbitrage, mais où le bénéficiaire se plaint de l’inexécution par l’entrepreneur de travaux correctifs non contestés.
L’entrepreneur a indiqué avoir suspendu l’exécution de l’ensemble des travaux correctifs ordonnés par l’administrateur suite à un accord avec ce dernier au motif qu’il préférerait attendre l’issue de l’arbitrage en raison du fait que celui-ci pourrait avoir un impact notamment sur ces travaux correctifs à faire.
Monsieur Meis tout en reconnaissant que certains des travaux en question ne pourraient utilement être entrepris avant le prononcé de ma sentence insiste néanmoins que cela ne vaut pas pour tous les correctifs en question et qu’il n’est pas raisonnable de tout mettre en veilleuse. Bien que n’étant pas saisie de cette question, je vous ai toutefois suggéré d’entreprendre des discussions ouvertes à ce sujet avec l’administrateur et je me réjouis de votre accord de vous y mettre.
[3]
Comme ils s’y étaient engagés, les bénéficiaires ont transmis le rapport
daté du
27 mai 2009 de monsieur Karl Fournier de la firme Les dessins Conspectek inc., suite
à quoi le procureur de l’administrateur a indiqué que son client entendait retenir
les services de l’ingénieur Louis-Philippe Poirier de la firme Stavibel. Son mandat
serait de procéder à un examen de la propriété et à l’évaluation de la
structure afin de statuer sur la performance des matériaux utilisés et de leur
assemblage afin de confirmer s’ils répondent adéquatement aux besoins de ce
type de construction. Son rapport déposé de consentement à l’audience
recommande plusieurs travaux. On y lit :
4. Recommandations
Quelques interventions sont requises afin de compléter la mise en œuvre de la charpente de bois de la propriété du bénéficiaire. Nous recommandons de procéder aux interventions structurales suivantes :
Ajouter une plaque d’acier avec des tire-fond ou des vis de type SFS aux joints à angle des poutres horizontales taillées en biais au droit des poteaux et aux assemblages de la poutraison de la toiture;
Procéder au resserrage de tous les tire-fond de l’ensemble des assemblages;
Fournir un étrier au lieu de la simple plaque soudée au poteau de l’Escalier qui supporte le palier de l’annexe.
5. Conclusion
L’ossature en bois d’œuvre est adéquate pour résister aux sollicitations gravitaires et latérales qui la sollicitent. La charpente se comporte à l’intérieur des limites qui qualifient la tenue en service de la structure de cette propriété.
Une intervention de renfort de certains assemblages est requise.
[4] Ce rapport de l’ingénieur mène à une inspection supplémentaire de l’immeuble par l’administrateur. Suit le 27 octobre 2009 une décision supplémentaire dans laquelle ce dernier révise sa décision initiale relativement aux points 26, 35, 56, 65 et 66 à l’égard desquels il reconnait désormais le bien fondé de la réclamation. L’administrateur y ajoute également deux nouveaux éléments. Il écrit :
À la suite de l’inspection supplémentaire effectuée par M. Marco Lasalle, responsable des travaux à la Garantie des maisons neuves de l’APCHQ, le 19 aout 2009, et à la suite des recommandations contenues au rapport d’expertise produit par la firme Stavibel services d’ingénierie le 9 octobre 2009, laquelle fut mandatée par l’administrateur à la suite du questionnement formulé par le bénéficiaire, des précisions s’imposent en ce qui a trait à la décision émise par l’administrateur le 6 avril 2009.
En effet, les vérifications supplémentaires effectuées par M. Lasalle permettent à l’administrateur de revoir sa décision relativement aux points 26, 35, 56, 65 et 66, lesquels sont dorénavant reconnus dans le cadre du contrat de garantie et devront se lire tel que ci-après mentionné.
Finalement, à la lecture du rapport de la firme Stavibel des constatations effectuées lors de l’expertise, l’administrateur doit préciser sa pensée et émettre de nouvelles décisions en ce qui a trait à la structure du bâtiment, décisions énumérées aux points 83 et 84 de la présente.
[...]
83. Ancrages structuraux à compléter
[...]
84. Poteau de l’escalier supportant le palier de l’annexe à modifier
[5] Cette décision supplémentaire a été suivie de d’autres expertises réalisées à la demande des bénéficiaires et de l’administrateur sans toutefois que celles-ci soient déposées pour les fins de cette sentence. Les bénéficiaires font donc réaliser une expertise par l’ingénieur Louis Denoncourt de la firme Louis Denoncourt & Associés suivie d’une expertise par la firme Expertise en bâtiments Champagne inc. par le technicien en architecture Tomy René afin de mesurer la qualité de l’air de la résidence et finalement une expertise par la firme Douglas Consultants inc. par l’ingénieur Kevin D. Below. Ces expertises mènent à des contre-expertises réalisées à la demande de l’administrateur.
[6] Une fois le dossier en état, j’ai procédé en avril de cette année à une visite des lieux suivie d’une conférence préparatoire. Y étaient présents, outre moi-même, les deux procureurs et leurs clients, ainsi que leurs experts respectifs, auteurs des différentes expertises mentionnées ci-haut. Des discussions ont eu lieu entre les experts et par la suite les parties ont engagé des pourparlers.
[7] Puis le 28 avril suivant, le procureur des bénéficiaires m’écrit :
N’ayant eu aucune nouvelle de Me Laplante et après discussion avec mes clients, les bénéficiaires, je vous demande de convoquer la tenue d’une séance d’arbitrage.
La séance d’arbitrage portera essentiellement sur la qualité du bois employé qui n’est pas gradé et dont le taux d’humidité, tous les experts le reconnaissent, dépassait les 19% au moment de la construction.
Cette situation qui demande que certains travaux devant garantir l’intégrité structurale du bâtiment soient effectués entraine par ailleurs nombre de déficiences esthétiques et de restrictions à l’usage qui ont été dénoncées mais qui n’ont pas été retenues par l’APCHQ.
Comme le soulignait Me Laplante, une décision favorable aux prétentions de mes clients changerait l’aspect du dossier quant aux autres sujets portés en arbitrage et il y a donc lieu d’abord de trancher cette question.
[8] Une audience est conséquemment convoquée et porte sur seulement onze des soixante points portés en arbitrage et que les parties ont subdivisés en trois groupes :
A. Le point 3 concernant les éléments de menuiseries mal réalisés et qui se lit ainsi :
3. Menuiserie intérieure sans grande maîtrise
Les faits
Les bénéficiaires dénoncent notamment les éléments suivants :
- Espace important visible sous la plinthe au mur est de l’annexe.
- Porte du rangement de l’annexe est déformée et de nombreuses ouvertures se créent entre les éléments de bois.
- Porte donnant accès à la salle mécanique - une partie de décolle.
- Ouverture et déformation entre les deux portes de l’armoire à la salle mécanique.
- Déformation de la trappe de plancher à l’étage de l’annexe et frottement du bas de la porte de la salle de bain de l’annexe.
L’entrepreneur a souligné qu’à la suite de la rédaction de la déclaration de réception du bâtiment, beaucoup de reprises ont été réalisés de sa part.
En fait, l’entrepreneur nous a indiqué que du 7 aout au 17 septembre 2008, les bénéficiaires ont analysé pièce par pièce, la qualité des travaux de finition et ont confirmé leur satisfaction.
Lors de la visite de M. Bibeau, le 28 aout 2008, ce dernier a mentionné que les travaux de correction déjà entrepris et complétés étaient adéquats.
L’entrepreneur devra donc, pour les items précédemment mentionnés, procéder aux correctifs nécessaires afin d’obtenir un résultat qui s’apparente à l’ensemble de la finition intérieure.
B. Les points 13, 36, 37, 40, 51, 54, 61, 62, 65 relatifs à l’utilisation de bois vert et les conséquences de son assèchement :
13. Escalier de la maison - palier démontre de larges ouvertures
Les bénéficiaires dénoncent que les planches composant le palier sont démesurément espacées.
De plus, bien que les bénéficiaires disent observer d’autres rétrécissements et de mauvais ajustements de certaines pièces de bois à ce même escalier, l’ensemble nous apparait homogène.
Par conséquent, l’entrepreneur devra corriger la situation en s’assurant d’obtenir un résultat semblable aux surfaces similaires.
36. Ouverture de la porte menant à l’annexe trop large
Les faits
Les bénéficiaires dénoncent le fait que cet encadrement de porte ait été installé dans un mur très épais, résultant en une juxtaposition de plusieurs pièces de bois, dont le résultat est inesthétique.
37. Pontage de bois au plafond de la chambre des maîtres cerné
Les faits
Les bénéficiaires et l’entrepreneur ont souligné qu’il s’agit de cernes apparus lors de la construction.
40. Finition inesthétique du mur nord de l’escalier de la maison
51. Bois de construction - qualité non approuvée
Les faits
Les bénéficiaires dénoncent que cette situation a comme conséquence de provoquer d’importants rétrécissements.
L’entrepreneur souligne pour sa part que le bois provient de la région et qu’il a été débité dans un moulin local.
54. Poutre de pruche fissurée au-dessus du foyer
61. Plancher de bois à l’étage - ouvertures visibles entre certaines planches et soulèvement
Les faits
Bien que des espaces soient visibles entre certaines planches de bois au plancher (1 ½ po x 6 po en pin), le résultat correspond aux exigences de ce genre d’installation.
62. Plâtrage inesthétique à l’arrière des équerres des poutres
65. Hauteur des portes différentes au rez-de chaussée.
[...]
Analyse et décision (points 42 à 74)
En ce qui concerne les points 42 à 74, l’administrateur n’a pas été en mesure lors de l’inspection, d’identifier quelque malfaçon que ce soit en rapport avec les situations dénoncées par le bénéficiaire.
C. Le point 34 concernant d’autres déficiences présentant un caractère inesthétiques :
34. Cache-câbles sont présents le long des poutres au plafond
Les faits
Les bénéficiaires ont souligné qu’à certains endroits, les câbles ne sont pas dissimulés.
[...]
Analyse et décision
Du point de vue de l’administrateur, les points 26 à 41 étaient apparents au moment de la réception en ce sens qu’ils étaient décelables pour un acheteur raisonnablement diligent.
Or, il appert que, contrairement aux exigences de l’article 3.2 du contrat de garantie, ces points n’ont pas été dénoncés par écrit au moment de la réception.
De plus, en ce qui concerne les points 29 à 36, l’administrateur n’a pas été en mesure, lors de l’inspection, d’identifier quelque malfaçon que ce soit en rapport avec les situations dénoncées par le bénéficiaire.
[...]
Par conséquent, l’administrateur doit rejeter la demande de réclamation des bénéficiaires à l’égard de ces points.
[9] Les parties conviennent de l’à-propos de suspendre l’instruction relative aux autres points en raison de l’incidence probable de la présente décision sur ces autres éléments ainsi que sur certains travaux correctifs déjà reconnus nécessaires par l’administrateur dans le cadre de ces décisions ou des pourparlers intervenus entre les experts lors de la conférence préparatoire.
[10] En effet, le litige concerne une résidence neuve de deux étages réalisée avec une charpente en bois d’œuvre apparente de l’intérieur, une conception communément appelée à poutres et poteaux où le squelette de la maison est réalisé en gros bois d’œuvre largement apparent.
[11] Pour les fins des présentes, la principale dénonciation des bénéficiaires concerne précisément la qualité du bois d’œuvre utilisé. Il est admis que l’entrepreneur a utilisé du bois vert et que son assèchement a eu des conséquences sur l’ensemble de l’immeuble non seulement sur sa structure mais également sur son enveloppe ainsi que sur l’aspect visuel de l’ensemble. En séchant, le bois a rétréci, fendu ou tordu. L’administrateur reconnait que les problèmes qui en ont résulté aux niveaux de la structure et de l’enveloppe du bâtiment doivent tous être corrigés.
[12] Concernant l’impact de ces problèmes sur le bois d’œuvre, les experts consultés et présents au cours de la conférence préparatoire tenue en l’espèce ont convenu que les fissures et gerces observées sur les poteaux et poutres n’avaient pas d’incidence structurale. Cela dit, tous conviennent également que la seule façon d’éliminer les gerces et fissures est de changer ces pièces de bois donc pratiquement de démanteler l’immeuble. C’est là la solution recherchée par les bénéficiaires.
[13] Selon l’administrateur, les conséquences du séchage tardif du bois sont corrigeables, camouflables mais pas les gerces et fissures visibles sur les éléments de bois destinés à être apparents. Dans ces cas, l’administrateur affirme qu’il s’agit d’une simple question esthétique et que conséquemment le correctif recherché par les bénéficiaires est purement esthétique. Or, avance l’administrateur, les problèmes esthétiques ne sont pas couverts par le Règlement.
II
PREUVE
[14] L’audience a permis aux bénéficiaires, originaires de Belgique, de tracer un bref historique des évènements ayant entouré leur décision prise en 2007 de venir s’installer avec leurs enfants au Québec. Ils ont choisi de le faire dans une nouvelle propriété construite par l’entrepreneur et couverte par la Garantie des maisons neuves de l’APCHQ. Ils disent avoir été séduits par le projet domiciliaire de l’entrepreneur. Celui-ci prévoyait la construction d’une résidence clé en main dans le projet domiciliaire de l’Écoquartier de Saint-Mathieu-du-Parc, une coopérative d’habitation écologique. Il s’agirait de résidences écologiques, éco énergétiques, situées dans un environnement communautaire comportant même une école alternative pour leurs enfants.
[15] Les recherches qu’ils font concernant l’entrepreneur leur apprennent notamment que la municipalité de Saint-Mathieu-du-Parc a confiance au projet. Ils communiquent à distance avec l’entrepreneur et monsieur Meis vient le rencontrer au Québec en aout 2007. Un contrat d’achat du terrain est signé le 23 du mois. Des pourparlers s’engagent avec l’entrepreneur, les bénéficiaires et la firme Les Dessins Conspectek inc. chargée des plans en vue de la construction.
[16] Leur choix s’arrête sur une conception dite à poutres et poteaux plutôt que pièces sur pièces. Le plan éventuellement préparé par Les Dessins Conspectek inc. et retenu pour la construction comporte la mention suivante à l’intention de l’entrepreneur :
L’entrepreneur et les sous-traitants devront exécuter tous les travaux décrits ou non selon les exigences du Code de construction du Québec chapitre 1, le Code national du Bâtiment 1995 et du Règlement municipal de l’édition en vigueur.
[17] Le marché étant conclu, la famille Meunier Meis fait le nécessaire pour quitter définitivement la Belgique afin d’emménager dans leur nouvelle résidence dont la prise de possession est prévue pour la fin avril 2008.
[18] À leur arrivée au début mai 2008, la maison n’est pas prête et ils sont relogés pendant six semaines par l’entrepreneur. Comme question de fait, ils prendront possession de leur maison le 13 juin 2008 alors que celle-ci est toujours en chantier.
[19] Le 5 septembre 2008 a lieu la visite pré-réception du bâtiment. Les bénéficiaires retiennent à cette fin la firme Inspect Mauricie Bois-Francs représentée par monsieur Philippe Bibeau et dont les observations sont inscrites comme éléments à corriger ou à parachever à un document intitulé liste pré-réception. Plusieurs éléments y sont identifiés. À cette époque, les poutres et poteaux visibles sont corrects et il n’y a ni fendillement, ni fissuration, ni torsion. Les bénéficiaires toutefois soulignent la piètre qualité de la finition notamment des travaux de menuiserie. Je reproduis la note suivante tirée de ce document :
Ce bâtiment n’a pas de sous-sol, les murs extérieurs sont préfabriqués et les poutres intérieures sont apparentes et structurales. L’ensemble des travaux a été réalisé avec des matériaux de qualité; ce type de bâtiment n’est pas conventionnel. L’ensemble des travaux de finition n’a pas été réalisé avec une bonne qualité d’exécution. Certaines corrections seront à faire pour compléter correctement ces travaux.
[20] Par la suite les bénéficiaires attendent des travaux correctifs qui ne se font pas et leurs relations avec l’entrepreneur se dégradent rapidement. En octobre 2008, l’entrepreneur écrit aux bénéficiaires notamment ce qui suit :
Nous ne ferons plus de bilans, de rencontres ou de visites supplémentaires chez vous. Tout cela a été fait et refait. Après la visite de l’inspecteur puis la réalisation des travaux finaux par notre équipe de finition, nous avons fait le tour avec vous pièce par pièce en n’omettant aucun détail. Notre mission est donc accomplie, notre travail chez vous est terminé.
Cette maison est un produit neuf et si vous pensez toujours qu’il y a des malfaçons dans le produit livré, nous vous prions maintenant de vous adresser au programme de Garantie des bâtiments neufs qui protège votre investissement.
La maison que la Coopérative de travailleurs Les habitations APEX vous livre est un produit qui répond en tous points à nos exigences et celles de l’industrie.
[21] Une première réclamation est présentée à l’administrateur en novembre 2008 et, dans les mois qui suivent, les bénéficiaires constatent d’autres problèmes notamment ceux associés aux conséquences de l’assèchement du bois utilisé pour la construction. Ils observent des infiltrations d’air importantes, d’eau, d’insectes et de rongeurs. Des fissures et des torsions apparaissent sur les poutres et poteaux. Suivront trois autres réclamations respectivement présentées à l’administrateur les 30 janvier, 4 et 23 février 2009.
[22] En somme les bénéficiaires dénoncent au total 84 éléments devant être corrigés. Parmi ceux-ci, l’allégation que toute la menuiserie intérieure a été faite sans grande maitrise.
[23] Par la suite la situation continue de s’aggraver et en juin 2009, soit exactement un an après leur emménagement, les bénéficiaires quittent la maison pour aller vivre ailleurs. Ils déclarent n’avoir aucune intention d’y revenir se plaignant avoir été les victimes de représailles de la part de gens de la région leur reprochant leurs différentes réclamations à l’encontre de l’entrepreneur qui est alors en difficulté.
[24] Monsieur Yvan Mireault, architecte et inspecteur-conciliateur à l’emploi de l’administrateur procède à une visite des lieux le 12 mars 2009 en vue de vérifier les problèmes dénoncés. Il fait rapport le 6 avril suivant et l’essentiel de ce qui y est dit qui soit pertinent à nos fins est reproduit plus haut. Le document recense plus de 80 éléments. L’administrateur en reconnait 25 comme fondés à des degrés divers, dont le point 3 intitulé Menuiserie intérieure réalisée sans grande maitrise. Il rejette les points 26 à 41 qualifié d’éléments visibles au moment de la réception du bâtiment et non dénoncés en temps. Quant aux points 42 à 74, l’inspecteur les rejette n’ayant pas été en mesure d’y voir quelque malfaçon.
[25] Dans les paragraphes qui suivent, je résume la preuve présentée à l’égard de chacune des catégories identifiées plus haut.
A. Le point 3 concernant la menuiserie intérieure réalisée sans grande maitrise
[26] Selon les bénéficiaires, cette réclamation déborde des seuls éléments mentionnés par monsieur Mireault au point 3 et vise en réalité l’ensemble de la menuiserie de la maison. Au cours de la visite des lieux, j’ai pu constater la piètre qualité de la finition de l’ensemble de la menuiserie.
[27] À l’audience, monsieur Mireault réplique avoir demandé aux bénéficiaires au moment de sa visite des lieux en mars 2009, d’identifier de façon précise les éléments visés par leur réclamation qui à ses yeux était très générale. Et ceux-ci l’ont fait, dit-il, de sorte que c’est de cela dont il a traité dans son rapport.
[28] Monsieur Mireault ajoute en outre que certains éléments de menuiserie qu’il a examinés ne se retrouvent cependant pas tous au point 3 mais plutôt aux points suivants :
1. Angle du mur et position de la porte de la chambre des maîtres - installation non adéquate;
5. Nombreux cadrages de portes mal faits;
13. Escalier de bois de la maison - palier démontre de larges ouvertures;
17. Portes intérieures menant à l’annexe et au sas d’entrée frottent à la surface des tuiles de plancher;
19. Quincaillerie des portes de placard de mauvaise qualité;
20. Mauvais raccords aux arêtes des murs de gypse et des poteaux de bois;
22. Découpe des plaques de gypse mal effectuée au pourtour de certaines sorties électriques murales;
65. Hauteurs de portes différentes au rez-de-chaussée.
B. Les points 13, 36, 37, 40, 51, 54, 61, 62, 65 relatifs à l’utilisation de bois vert et les conséquences de son assèchement
[29] Au cours de ma visite des lieux en avril 2010, j’ai pu constater à quel point l’assèchement du bois avait créé d’importants retraits, torsions, gerces et fissures aux poutres et poteaux de la structure.
[30] Les bénéficiaires ont produit à l’audience un plan des deux étages de l’immeuble qui identifie distinctement chaque poutre ou poteau dont les gerces et fissures se situent entre 5 et 6 millimètres et les autres où elles dépassent 6 millimètres de largeur. La situation n’est pas limitée à un seul endroit dans l’immeuble; elle est généralisée, une situation qu’ils qualifient d’inacceptable et de non conforme à ce qu’ils ont acheté. Ils ajoutent que depuis la visite de l’inspecteur Mireault en mars 2009 la situation continue d’évoluer et de se dégrader.
[31] Les bénéficiaires insistent qu’en choisissant de confier la construction de leur résidence à l’entrepreneur, ils estimaient traiter avec un artisan compétent aimant son métier et apte à réaliser quelque chose de beau et d’unique. Ils attendaient une maison rustique, chaleureuse et jolie offrant un look campagnard par opposition à urbain.
[32] En février 2010, les bénéficiaires ont retenu les services de monsieur Kevin D. Below, ingénieur en structure, qui a témoigné à titre d’expert. Il a inspecté la structure de la résidence et a fait un rapport en mars 2010, rapport qui n’a pas été déposé à l’audience où on l’a invité à témoigner uniquement sur l’utilisation de ce bois et l’impact de son assèchement sur l’esthétique de la maison. Il connait bien ce type de construction à poutres et poteaux qui représente moins de 5 % du marché résidentiel au Québec.
[33] En général, explique l’expert, le bois utilisé dans la construction d’une maison est d’abord séché au four de manière à obtenir un taux d’humidité non supérieur à 19 %. Il cite l’article 9.3.2.5 du Code national du bâtiment, le CNB, qui prescrit que la teneur en eau du bois de construction ne doit pas excéder 19% lors de la mise en œuvre. Cela dit, il a ajouté tout comme l’a écrit l’expert de Stavibel dans son rapport, que cette norme ne s’applique à ce type de construction.
[34] Il reste cependant, poursuit l’expert, que la teneur en humidité du bois utilisé ici était largement supérieure à 19 % au moment de la construction et que son assèchement a eu des conséquences importantes sur l’immeuble vu que plus le bois est vert et que plus il sèche vite, plus il gerce et se tord.
[35] Il ne fait aucun doute pour lui que les gerces et fissures observées sur les poutres et poteaux de l’immeuble sont la conséquence d’un séchage trop rapide par rapport au taux d’humidité initial. Il explique en outre qu’un morceau de bois n’est pas toujours uniforme et que son cœur n’est pas toujours localisé en son centre et c’est ce qui explique que le bois sèche différemment et se tord.
[36] De là l’importance du délai entre la coupe et l’assèchement du bois. Aussi, ajoute ce témoin, faut-il prendre certaines précautions lorsque l’on utilise ce type de matériau que leur taille empêche d’être sécher au four, des précautions qui selon lui n’ont pas été prises en l’espèce.
[37] Ainsi, pour monsieur Below, même si la norme du CNB ne s’applique pas ici, il reste qu’on a utilisé un bois beaucoup trop humide sans prendre les précautions nécessaires : notamment d’utiliser du bois coupé en hiver alors qu’il y a moins de sève dans l’arbre; et ensuite de le laisser à l’air libre pendant un ou deux mois; et finalement lors de l’assemblage des poutres et poteaux, utiliser des connexions d’assemblage destinées à cacher le fait qu’il y aura inévitablement retrait partiel. Or, l’expert affirme que toute évidence aucune de ces règles n’a été suivie en l’espèce.
[38] Invité à comparer la résidence des bénéficiaires à d’autres du même type, l’expert affirme que la situation des bénéficiaires échappe à toute comparaison car bien que des gerces, fissures, torsions soient normales pour ce type de construction, il déclare n’avoir jamais rien vu d’aussi mal fait. Il qualifie l’aspect visuel de l’ensemble des poutres et poteaux de particulièrement atroce et de totalement inacceptable en termes de qualité.
[39] Il poursuit en disant que même si à sa connaissance il n’existe pas de norme sur la largeur des gerces qui serait acceptable, il reste que la situation observée dépasse l’entendement et le gros bon sens. Ici, affirme l’expert, les gerces vont continuer et on ne sait pas comment cela va être dans cinq ans. Selon lui, comparée à ce qui se produit normalement, la situation observée ici est totalement inacceptable, tout cela parce qu’on a construit avec du bois trop humide qui a séché sur une trop courte période de temps.
[40] On peut, dit-il, corriger la situation en remplissant les gerces d’un produit quelconque mais ces réparations resteront toujours visibles : Ça aurait toujours l’air patché.
[41] Pour sa part, l’inspecteur Mireault parle de dommages collatéraux liés au retrait du bois. Il affirme que ceux concernant l’enveloppe de l’immeuble tout comme ceux identifiés par Stavibel peuvent et seront corrigés tout en se disant incapable de préciser le type d’interventions correctives à réaliser. Ainsi, selon monsieur Mireault, le résultat fera en sorte que l’enveloppe du bâtiment retrouvera son intégrité et que tout sera remis visuellement dans un état acceptable. Ne resteront au niveau visuel que les gerces et fissures aux poutres et poteaux.
[42] Monsieur Mireault rappelle que tous les experts conviennent que ce type de construction n’est pas visé par le CNB et qu’il n’existe aucune norme concernant les fissures et gerces aux poutres et poteaux.
[43] Selon lui, une malfaçon se définit comme une situation contrevenant à une norme d’un code de construction ou à aux règles de l’art, ou enfin une défectuosité d’un matériau. Il affirme qu’à la limite la mauvaise apparence peut constituer une malfaçon mais qu’en l’espèce, les gerces apparues n’étaient pas à son avis des malfaçons et que le gros bon sens l’amenait quant à lui à une conclusion différente de celle de l’expert Below.
[44] En contre-interrogatoire, il reconnait que certains problèmes dénoncés ne seront pas corrigés ni remis dans un état acceptable malgré les correctifs qu’il a ordonné, notamment au point 23 concernant le plancher.
C. Le point 34 concernant d’autres déficiences présentant un caractère inesthétiques
[45] Hormis la visite des lieux où j’ai pu constater la situation, aucune autre preuve n’a été présentée à ce sujet.
III
PLAIDOIRIES
Bénéficiaires
[46] D’entrée de jeu, le procureur se tourne vers la notion de malfaçon. Il s’agit, dit-il, d’un défaut dans un ouvrage résultant d’un manquement aux normes ou aux règles de l’art qui régissent un métier ou encore de l’utilisation d’un matériau non conforme.
[47] Se référant aux plans réalisés par Les dessins Conspectek inc. en vue de la construction, le procureur fait valoir que l’entrepreneur s’y engageait formellement à construire une habitation en conformité du CNB 1995. Il est donc faux, selon lui, de prétendre que les dispositions du CNB ne s’appliquent pas en l’espèce puisqu’en raison de leur liberté contractuelle les parties étaient libres d’y adhérer et elles l’ont fait.
[48] Or, poursuit le procureur, la preuve non contredite révèle que le bois utilisé ne répondait pas aux exigences du CNB quant à son taux d’humidité qui dépassait largement les 19 %. Il en résulte donc une malfaçon en ce que le matériau utilisé n’était pas conforme.
[49] Au-delà de la question de l’application du CNB, il y a aussi, poursuit le procureur, l’apparence, l’esthétisme. Certes, affirme Me Coursol, la notion est beaucoup plus subjective, mais il reste qu’un manquement à cet égard peut constituer une malfaçon, comme l’a d’ailleurs reconnu, selon lui, monsieur Mireault.
[50] S’agissant d’une question subjective, il faut pour l’évaluer, soutient le procureur, s’en remettre à ce qu’une personne moyennement prudente qui achète une maison neuve accepterait comme écart. En l’espèce, les bénéficiaires en choisissant ce style, recherchaient, ce qui est normal, un cachet particulier, artisanal, unique. Toutefois, poursuit le procureur, ce n’est pas parce que c’est artisanal qu’une construction doit être mal faite. On s’attend à un produit qui n’est pas réalisé à la chaine mais unique et aussi de qualité parce que c’est un artisan qui le fait.
[51] Pour le procureur, il est faux de prétendre que le problème serait réglé lorsque l’enveloppe du bâtiment sera corrigée et les travaux recommandés par Stavibel faits et qu’il ne resterait que les poutres et poteaux avec leurs gerces. Le procureur soutient que ce n’est pas ce qui ressort de l’ensemble du témoignage de monsieur Mireault.
[52] Cela dit, poursuit le procureur, on ne parle pas ici de petites déficiences peu nombreuses mais au contraire de beaucoup de déficiences, gerces et fissures affectant presque tous les poteaux et poutres de la résidence, une situation, rappelle le procureur, que l’expert Below a qualifié de particulièrement atroce. Or, poursuit le procureur, c’est là l’opinion d’un expert indépendant qui en a vu d’autres et qui affirme qu’aucune personne raisonnable n’accepterait une maison dans cet état.
[53] Anticipant l’argumentation de l’administrateur à l’effet qu’il n’y aurait aucune commune mesure entre le remède et la malfaçon dénoncée puisque que pour la corriger il faudrait en pratique démanteler la maison, le procureur soutient que les difficultés techniques pour la corriger ou les coûts impliqués ne sont pas des critères pertinents.
[54] Le procureur a invoqué les autorités suivantes : Syndicat de la copropriété Les Jardins du Parc et Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ, SA, 28 janvier 2010, arbitre Johanne Despatis; Kieu Thuy Truong et Cau Chiem et Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ, SA, 23 juin 2009, arbitre Johanne Despatis; Bordeleau c. Thomassin, 2002 CANLII 34288 (QC C.Q.); Morency c. Tarbis Construction inc., 2007 CANLII 4114 (QC C.Q.); Martel c. Ouellet, 2008 CANLII 3860 (QC C.S.); Robitaille c. 2794357 Canada inc., 2006 CANLII 60398 (QC O.A.G.B.R.N.); Syndicat de la copropriété du 73 rue du Liseron à Sainte-Julie et La Garantie Habitation du Québec inc., SA, 28 septembre 2007, arbitre Claude Dupuis; Dumont et Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ, SA, 30 mars 2009, arbitre Bernard Lefebvre.
Administrateur
[55] Le procureur de l’administrateur fait valoir d’entrée de jeu qu’aucun problème structural n’affectera l’immeuble dans la mesure où les correctifs recommandés par Stavibel sont apportés. Tout ce qui restera d’apparent sont les gerces et les fissures, des problèmes purement esthétiques.
[56] Pour le procureur, dès lors que ce type de construction échappe à la section 9 du CNB, comme l’ont reconnu les experts, on ne doit pas tenir compte de la note retrouvée aux plans de la firme Les Dessins Conspectek inc. selon laquelle le CNB devait s’y appliquer. Pour le procureur, cette mention résulte soit d’un oubli des parties qui ont omis d’en exclure la structure ou tout simplement d’une erreur due à l’incompétence de celles-ci. Pour lui, on ne peut tout simplement pas invoquer ce contrat pour affirmer que le CNB s’appliquerait en l’espèce.
[57] Or, dit Me Laplante, ce type de construction n’est pas visé par le CNB et dès lors que les calculs de charge sont bien faits, la preuve révèle que malgré les fissures et gerces, la structure de l’ouvrage n’est pas compromise. D’ailleurs, fait valoir le procureur, l’expert Below a lui-même reconnu que les gerces et fissures étaient inévitables dans ce genre de matériau.
[58] Or, insiste le procureur, une fois les travaux correctifs apportés aux items reconnus tout ce qui restera d’apparent seront les gerces et les fissures, une question purement esthétique non couverte par le Règlement. La situation, poursuit le procureur, serait bien différente si la structure était menacée en raison des gerces et fissures mais tel n’est pas le cas ici et le Règlement n’a pas d’application.
[59] Enfin, le procureur avance que le coût prohibitif des travaux que nécessiterait le remplacement des poutres et poteaux est un critère pertinent à l’analyse que doit faire l’arbitre dans la mesure où une fois les travaux correctifs reconnus réalisés, il ne restera plus que les gerces et fissures. En effet, dit-il, le remplacement des poutres et poteaux nécessitent en pratique la démolition de la maison.
[60] Enfin, le procureur rappelle que les bénéficiaires n’ont pas l’intention de revenir sur place et il serait déraisonnable dans les circonstances d’ordonner la démolition de la maison.
[61] Le procureur a invoqué l’autorité suivante : Habitation Quo-Vadis inc. et Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ, SA, 1er avril 2008, arbitre Claude Dupuis.
Réplique
[62] Pour Me Coursol, juridiquement, les normes à considérer ici sont non seulement légales mais également contractuelles et rien n’empêchait les parties de prévoir dans leur contrat plus que ce que la loi pouvait exiger. Autrement dit, rien n’empêchait l’entrepreneur de stipuler que le CNB s’appliquerait à cette construction. De plus, aucune preuve au dossier ne permet de retenir la prétention de son vis-à-vis à l’effet que les parties ne savaient pas ce qu’elles faisaient en incluant la note aux plans ou encore que cette stipulation ne visait pas l’ensemble de la construction.
[63] Enfin, le procureur écarte comme non pertinent le fait que les bénéficiaires n’entendent pas retourner vivre dans cette maison. Il ne s’agit pas là d’une exclusion au sens du Règlement.
IV
ANALYSE ET DÉCISION
[64] Les points en litige ont été regroupés en trois catégories : (A) les éléments de menuiseries mal réalisés; (B) l’utilisation de bois vert et ses conséquences; et (C) d’autres déficiences présentant un caractère inesthétique et relevés au point 34 de la décision de l’administrateur.
[65] Le Règlement énonce et encadre les obligations respectives de l'entrepreneur et de l’administrateur envers les bénéficiaires. C’est donc en vertu de celui-ci que je dois déterminer les droits et obligations de chacun.
[66] Selon le Règlement, l’administrateur se doit d’exécuter certaines obligations de l'entrepreneur si celui-ci n'y satisfait pas et ce, à l’intérieur toutefois des limites qui y sont définies. A cet égard, l’article 10 du Règlement se lit ainsi :
La garantie d'un plan dans le cas de manquement de l'entrepreneur à ses obligations légales ou contractuelles après la réception du bâtiment doit couvrir:
1- le parachèvement des travaux relatifs au bâtiment et dénoncés, par écrit, au moment de la réception ou, tant que le bénéficiaires n’a pas emménagé, dans les trois jours qui suivent la réception;
2- la réparation des vices et malfaçons apparents visés à l’article 2111 du Code civil et dénoncés par écrit, au moment de la réception ou, tant que le bénéficiaires n’a pas emménagé, dans les trois jours qui suivent la réception;
3- la réparation des malfaçons existantes et non apparentes au moment de la réception et découvertes dans l'année qui suit la réception, visées aux articles 2113 et 2120 du Code civil et dénoncées, par écrit, à l'entrepreneur et à l'administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte des malfaçons;
4- la réparation des vices cachés au sens de l'article 1726 ou de l'article 2103 du Code civil qui sont découverts dans les 3 ans suivant la réception du bâtiment et dénoncés, par écrit, à l'entrepreneur et à l'administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte des vices cachés au sens de l'article 1739 du Code civil.
5- La réparation des vices de conception, de construction ou de réalisation et des vices du sol, au sens de l’article 2118 du Code civil, qui apparaissent dans les 5 ans suivant la fin des travaux et dénoncés, par écrit, à l'entrepreneur et à l'administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte ou survenance du vice ou, en cas de vices ou de pertes graduelles, de leur première manifestation.
[67] Une fois le champ de protection défini, il importe de rappeler que juridiquement toute partie demanderesse a le fardeau de démontrer le bien-fondé de ses prétentions au moyen d’une preuve prépondérante. L’article 2804 du Code civil du Québec nous dit en quoi consiste une preuve prépondérante :
La preuve qui rend l’existence d’un fait plus probable que son inexistence est suffisante, à moins que la loi n’exige une preuve plus convaincante.
[68] Je dois donc décider du bien-fondé du présent recours suivant les obligations juridiques des parties et à la lumière de la preuve présentée.
[69] Malgré le regroupement des matières convenu entre procureurs, je me pencherai d’abord sur la réclamation visée au point 51 relatif à la qualité du bois utilisé pour les poutres et poteaux. En effet, dans l’hypothèse où je devais conclure que ces pièces sont affectées d’un problème exigeant de les remplacer, il s’en suivrait que tous les autres éléments visés dans la présente sentence seraient affectés quoi qu’on en dise dans la mesure où le remplacement des poutres et poteaux exigerait, de l’aveu même des parties, le démantèlement de la maison et sa reconstruction.
[70] Selon ma compréhension, l’administrateur ne nie pas qu’il y ait problème. Il soutient plutôt que les conséquences significatives de l’utilisation de bois humide seront corrigées ou camouflées par des réparations appropriées, sauf pour les gerces et fissures que l’on peut observer sur un grand nombre de poteaux et poutres de la résidence et qui demeureraient. Il en résulterait, certes un problème mais purement esthétique, selon l’administrateur, problème qui de toute façon échapperait à la portée du Règlement.
[71] Selon les bénéficiaires, l’utilisation de bois impropre constituait une malfaçon et sans reconnaitre que les correctifs envisagés règleraient toutes les conséquences de l’assèchement intempestif du bois trop humide utilisé à l’exception des fissures et gerces, ils soutiennent qu’il y a eu violation du Règlement et qu’elle doit être corrigée par le remplacement de l’ensemble des poutres et poteaux.
[72] Le concept de malfaçon est donc au cœur du débat et il est utile de rappeler que ce concept n’est pas défini dans le Règlement.
[73] J’ai déjà eu l’occasion de me pencher sur cette notion, notamment dans la sentence Kieu Thuy Truong et Cau Chiem et Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ [précitée]. Je crois à-propos de m’y référer ici :
[106] [...] pour cerner la malfaçon définie au Règlement, on peut, on doit, s’en remettre au concept issu de l’article 2120 du Code civil du Québec. Or, selon la jurisprudence pertinente, la malfaçon au sens de l’article 2120 s’entend du fruit d’un travail fait avec des matériaux déficients ou d’un travail mal fait.
[107] Dans Bordeleau c. Thomassin, 2002 IIJCan 34288, la Cour du Québec écrit ceci au sujet du concept de malfaçon : [Par.7 et ss]
[L’article 2120 C.c.Q.] garantit l’absence de « malfaçons » dans l’ouvrage immobilier. Une « malfaçon » étant un travail mal fait ou mal exécuté, il faut se demander quelles sont les normes qui sont applicables pour déterminer si le travail a été ou non mal fait. [...].
Il faut en outre rappeler que la gravité de la malfaçon ou l’intensité de l’effet causé par la malfaçon n’est pas pertinente dans l’application de l’article 2120 C.c.Q..
[...]
[...]. En matière de contrat d’entreprise, l’entrepreneur a une obligation de résultat. L’article 2120 C.c.Q. l’oblige en outre à une obligation légale de garantie contre les malfaçons. Dès que le propriétaire a établi la présence d’une non-conformité de certains travaux aux stipulations contractuelles ou aux « règles de l’art », qu’elles soient celles suivies généralement en construction ou qu’elles découlent d’une réglementation énonçant des règles minimales de construction comme le Code national du bâtiment, les personnes tenues à la garantie doivent répondre de ces malfaçons à moins de prouver que, dans les circonstances précises de l’espèce, la garantie ne trouve pas application.»
[74] Dans Robitaille c. 2794357 Canada inc. [précité], l’arbitre Masson s’est également penché sur le concept de malfaçon. Il écrit :
[52] Dans son ouvrage intitulé Les contrats de construction en droit public & privé, madame la Juge de la Cour d’appel Thérèse Rousseau-Houle, alors qu’elle était professeur à l’Université Laval, s’exprimait ainsi à propos des règles de l’art :
« L’entrepreneur est tenu non seulement au respect de son marché, mais au respect des règles de son art car l’inobservance de ces règles révèle un manquement à son obligation essentielle de livrer un ouvrage de bonne qualité. Les règles de l’art sont définies par M. A. Flamme comme : «l’ensemble des enseignements mis à la disposition des professionnels par le truchement de cours spécialisés, des cahiers des charges les plus utilisés, des normes, des règlements communaux de bâtisse, des publications des organisations professionnelles ou des centres de recherche scientifique.»
[...].
Les règles de l’art sont tout d’abord et principalement constituées par «l’ensemble des techniques et des pratiques de construction approuvées» qui assurent que les ouvrages de construction seront faits avec soin, prudence et diligence et conviendront à leur destination finale.
[...].
L’obligation de respecter les règles de l’art implique encore le respect des normes et règlements applicables à l’exécution des travaux de construction.
[...].
Certaines normes présentent la nature juridique d’un règlement administratif. Tel est le Code national du bâtiment lorsqu’il est adopté comme règlement... Le défaut de s’y conformer constitue automatiquement l’entrepreneur en faute...
[...]
Si les règles de l’art sont celles qui assurent la perfection de l’ouvrage, elles visent aussi à assurer au propriétaire une exécution complète et totale de l’ouvrage. »
[53] Le dictionnaire Larousse définit ainsi «malfaçon» :
“Défaut dans un ouvrage imputable à l’ignorance, à la négligence ou à la malveillance.”
[54] À la lumière de ce qui précède, on retient qu’une malfaçon est un défaut dans un ouvrage, un manquement aux normes qui assurent que les ouvrages de construction seront faits avec soin ; un manquement aux règles qui régissent un métier et qui assurent la perfection de l’ouvrage, et dont l’inobservance conduit à un manquement à une obligation essentielle de livrer un ouvrage de bonne qualité.
[75] Selon la preuve non contredite, le bois composant l’ossature de l’immeuble présentait un taux d’humidité largement supérieur à 19 % et il a séché trop rapidement après sa pose ce qui a entraîné une série de manifestations négatives qui se sont révélées progressivement et vont continuer. En effet, le séchage du bois de la structure a fait travailler la maison au point d’en affecter plusieurs éléments. Il suffit pour s’en convaincre de lire les éléments de la dénonciation que l’administrateur a lui-même jugés fondés.
[76] La question est celle de savoir si en utilisant ce bois l’entrepreneur a commis un manquement susceptible de se traduire en une malfaçon au sens du Règlement.
[77] Le CNB traite du taux d’humidité du bois. Il exige que ce taux soit de 19 % au moment de la pose de manière à éviter le plus possible les défauts susceptibles de résulter notamment de son assèchement. L’expert Below n’est pas contredit lorsqu’il affirme que le bois utilisé ici ne présentait pas du tout ce taux et était beaucoup plus humide, ce qui n’est nullement contesté.
[78] De son côté, l’administrateur soutient que vu que le CNB ne s’applique pas à ce genre de construction et qu’aucune règle ne régit le taux d’humidité du bois utilisé ici, il s’en suivrait que les conséquences négatives pouvant résulter de l’assèchement trop rapide de bois trop humide échapperaient à toute évaluation objective et, que tout ce qu’on pourrait en dire serait purement subjectif et donc, à écarter.
[79] Avec égards, on n’a fourni aucun élément de preuve qui aurait permis d’écarter comme sans portée la stipulation bien présente au contrat et voulant que l’entrepreneur et ses sous-traitants convenaient de se soumettre, notamment au CNB, à l’égard de tous les travaux décrits ou non au document convenu.
[80] Le contrat et les plans discutés et entendus entre les parties renvoient expressément au CNB. L’administrateur n’a présenté aucune preuve à l’effet que cette stipulation résultait d’une erreur ou encore d’incompétence ou de l’ignorance des intéressés. Il en résulte qu’aucun motif ne permet d’ignorer cette mention parmi les obligations souscrites de part et d’autre.
[81] Il s’avère que le CNB comporte la norme que l’on sait sur le taux d’humidité du bois au moment de sa pose, norme non respectée ici. On l’a vu du témoignage de monsieur Below, cette norme vise à assurer que l’ouvrage ne se dégrade pas au moment de l’assèchement du bois et qu’il est fait avec soin et qualité.
[82] L’entrepreneur s’étant engagé à respecter le CNB à l’égard de tous les travaux a donc en utilisant un matériau non conforme au CNB manqué à une disposition explicite de son contrat.
[83] Cela dit, même si, strictement, le CNB ne trouvait pas application ici et que l’utilisation de bois d’œuvre dans ce type de construction ne soit pas assujetti à une norme formelle, cela ne signifie toutefois pas que l’on pourrait faire une telle construction n’importe comment.
[84] En effet, si absence de norme formelle signifiait absence de toute règle on se demande à quoi pourrait bien servir la mention de la nécessité de se conformer aux règles de l’art qui se trouve notamment à l’annexe II du Règlement et qui exige :
ANNEXE II
(a. 78)
LISTE DES ENGAGEMENTS DE L'ENTREPRENEUR
L'entrepreneur s'engage:
[...]
3° à respecter les règles de l'art et les normes en vigueur applicables au bâtiment;
[85] La présence de cette disposition et sa formulation s’expliquent de soi.
[86] Il se peut selon les cas que les règles de l’art soient traduites dans une norme formelle comme les codes de construction en comportent. C’est souvent le cas. Mais il se peut aussi, que ces règles n’aient pas conduit à l’adoption de normes et qu’elles demeurent dans le vécu et la science propres à chaque métier.
[87] En l’espèce, la preuve prépondérante révèle que le matériau utilisé était du bois manifestement trop vert et qu’on n’aurait pas dû utiliser au départ selon la pratique reconnue pour ce genre de construction. Ensuite, ce bois a été soumis à un assèchement trop rapide aux conséquences négatives nombreuses. La nature même de ce type de construction veut et préconise que les poutres et poteaux, qui ailleurs sont cachés, y soient au contraire délibérément exposés en permanence à la vue. Ainsi, l’entrepreneur en acceptant ce contrat devait savoir qu’il allait installer des poutres et poteaux devant demeurer visibles de manière permanente.
[88] Cela étant, il ne parait pas déraisonnable d’affirmer que l’entrepreneur qui accepte pareille construction doit agir avec diligence et prudence, d’une manière particulièrement attentive à la physique des matériaux appelés à demeurer exposés à la vue. À cette fin, il devait s’assurer de prendre les précautions nécessaires à l’intégrité physique de ce type de matériau, précautions amplement décrites par l’expert Below.
[89] Or, en l’espèce, selon l’expert Below, nullement contredit, l’entrepreneur n’a suivi aucune des précautions prévues en pareil cas. En plus de choisir du bois trop humide, il l’a utilisé dans des conditions qui rendaient les problèmes apparus par la suite pratiquement inévitables.
[90] J’en conclus qu’il y a eu là manquement aux règles de l’art, en plus d’un manquement au CNB incorporé par convention aux obligations de l’entrepreneur. En somme, le fait d’utiliser du bois tellement vert qu’il allait connaitre plus tard tous les problèmes depuis toujours associés à un assèchement trop rapide constitue un manquement grave se traduisant en une malfaçon non apparente qui s’est rapidement manifestée au cours de la première année suivant la livraison.
[91] Mais il y a plus. L’utilisation de ce matériau, un bois vert à taux d’humidité très élevé, affecté d'une malfaçon a entraîné des résultats négatifs d’une telle magnitude qu’on ne saurait raisonnablement les qualifier de simplement esthétiques. Ces conséquences sont telles qu’ici elles portent atteinte à l’essence même de cette construction. Certes, chaque cas est un cas d’espèce qui appelle un examen particulier et c’est ce qui s’est fait ici.
[92] Appelé à décrire ce que serait dans ce genre de construction un écart tolérable aux règles de l’art, dans la mesure où aucune norme formelle ne régit les fissures et gerces apparentes dans une construction à poutres et poteaux, l’expert Below, en cela nullement contredit, s’est référé à un critère qui parait fort raisonnable dans les circonstances, i.e. celui de ce qui est généralement observé et toléré dans les ouvrages de ce type, donc construits avec du bois d’œuvre. Selon lui, rien de ce qu’il a vu ici ne supporte la comparaison. Il dit n’avoir jamais rien vu de pareil et que le résultat observé ici est tout simplement inacceptable. Selon cet expert qui admet qu’il puisse y avoir des manifestations du séchage visibles dans ce genre d’ouvrage, ce qui se passe ici est une situation de particulièrement atroce, du jamais vu, selon lui.
[93] Ayant été à même d’observer en compagnie des experts ce dont il s’agit, les fissures et gerces apparues après l’assèchement se retrouvent en très grand nombre et elles sont particulièrement déplaisantes pour l’œil au point où la résultante mérite raisonnablement d’être qualifiée d’intolérable, d’inacceptable et d’anormale comme l’a soutenu monsieur Below.
[94] Je conclus donc que la preuve prépondérante ne permet pas de croire que le simple rapiéçage de ces poutres et poteaux permettrait de les porter à un niveau acceptable d’écart par rapport à un immeuble qui aurait été construit selon les règles de l’art. Il y a donc lieu d’ordonner le remplacement de ces poutres et poteaux par de nouveaux. Cela étant, j’estime qu’il devient inutile de procéder à l’analyse des autres points en litige, les deux parties reconnaissant que le remplacement ordonné ici exigera le démantèlement de l’ouvrage emportant du coup la nécessité de trancher ces autres points par le menu.
[95] Qu’en est-il des frais d’arbitrage ?
[96] Les bénéficiaires demandent que leur soient remboursés des frais d’expertise qui totalisent la somme de 11 944,89 $, tant pour le rapport de la firme Expertise en bâtiment champagne que pour la présence de monsieur Champagne lors de la visite des lieux; également pour la facture de Philippe Bibeau qui a assisté à la visite de pré-réception; pour le rapport de la firme Les dessins Conspectek inc.; la facture de Louis Denoncourt & Associés inc. ainsi que les visites de l’ingénieur Louis Denoncourt. Finalement, la somme demandée couvre les frais encourus pour le rapport de monsieur Below et ses interventions dans le dossier. Selon les bénéficiaires, la majorité de ces dépenses ont été encourues afin de soutenir leur réclamation auprès de l’administrateur.
[97] En revanche l’administrateur estime que seuls les frais encourus pour les interventions de monsieur Below peuvent être remboursés puisque les autres dépenses n’ont pas été faites pour les fins du présent arbitrage.
[98] L’article 124 du Règlement dispose que l’arbitre doit statuer, s’il y a lieu, quant au quantum des frais raisonnables d'expertises pertinentes que l'administrateur doit rembourser au demandeur lorsque celui-ci a gain de cause total ou partiel.
[99] Dans les circonstances et vu la preuve, il parait raisonnable d’accorder l’ensemble des frais réclamés à l’exception de la réclamation pour les frais engagés auprès de monsieur Bibeau au moment de la pré-réception. Ceux-ci ont certes été encourus mais pas en vue de soutenir leur réclamation à l’arbitrage.
[100] Les réclamations visant le remboursement des frais d’expertises engagées pour soutenir l’ensemble des réclamations à l’arbitrage ont été engagées de manière légitime et elles étaient pertinentes pour éclairer les points en litige ici ainsi que d’autres aspects du dossier qui n’ont pas faits l’objet du présent arbitrage parce que mis en suspens pour des raisons déjà décrites ci-haut. Compte tenu de ma conclusion, il m’apparait logique et équitable d’en ordonner le remboursement ici.
[101] Par conséquent je fixe à 11 094,94 $, les frais d’expertises remboursables.
V
CONCLUSIONS ET DISPOSITIF
[102] Pour toutes les raisons qui précèdent, le Tribunal :
- Accueille la réclamation des bénéficiaires à l’égard du point 51 et ordonne à l’administrateur de remplacer les poutres et poteaux de l’immeuble par de nouveaux qui soient conformes.
- Constate qu’il est inutile de procéder à l’analyse des autres points en litige puisque le remplacement ordonné des poutres et poteaux de l’aveu même des parties emporte la nécessité de démanteler l’immeuble, rendant de la sorte inutile de se prononcer sur les autres points en litige.
- Réserve les droits des parties dans l’éventualité où le remplacement ordonné des poutres et poteaux n’obligeait pas le démantèlement de l’immeuble.
-
Relativement au calendrier d’exécution des travaux, prend acte de l’accord
des parties de tenir à ce sujet une conférence téléphonique d’ici le
18 octobre 2010 au cours de laquelle les procureurs m’indiqueront si cette
question est réglée et, à défaut, me feront part de leurs suggestions respectives
afin que je décide de ce calendrier.
- Établit à la somme de 11 094,94 $ les frais d’expertise encourus par les bénéficiaires et déclare en vertu de l’article 124 du Règlement que ces frais seront à la charge de l’administrateur qui devra les rembourser aux bénéficiaires d’ici le 29 octobre 2010.
- Décide en conformité de l’article 123 du Règlement que les coûts du présent arbitrage sont à la charge de l’administrateur.
Montréal, le 30 septembre 2010
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__________________________________ Johanne Despatis, avocate Arbitre
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Adjudex inc.
0905-8331-GAMM
SA 8080-10