ARBITRAGE EN VERTU DU RÈGLEMENT SUR LE PLAN DE GARANTIE DES

BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS

(Décret 841-98)

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

 

Groupe d’arbitrage et de médiation sur mesure (GAMM)

 

 Dossier no :  GAMM :   2018-06-27

     GCR :   101306-1037      

 

 

ENTRE:    

 

SDC 594 À 598 DES CÉPAGES

 

      

 

      

ET :     

 

ALLIANCE TAILLON VOYER INC.

 

(ci-après le « Bénéficiaires»)

      

(ci-après   l’« Entrepreneur »)

ET:  

 

LA GARANTIE DE CONSTRUCTION RÉSIDENTIELLE (GCR)

 

         (ci-après   l’« Administrateur »)

 

    

SENTENCE  

 

 

 DEVANT L’ARBITRE :    Me Jean Doyle

 

 

 Pour le Bénéficiaire :   M. Patrick Lemay

     

 Pour l’Administrateur de la Garantie :  Me Pierre-Marc Boyer

        Madame Marylène Rousseau

 

Pour l’Entrepreneur : Monsieur Jean-François Voyer     Monsieur Denis Richard (en lieu et place de      

monsieur Jocelyn Dubuc retraité)

 

 AUDIENCE :      Le 11 octobre 2018

 

 

 

LES PIÈCES DE L’ADMINISTRATEUR

 

 

 

Documents contractuels

 

A-1 Certificat de localisation;

 

A-2 Déclaration de copropriété;

 

A-3 Avis de fin de travaux;

 

A-4 Rapport d’inspection préréception des parties communes daté du 30 octobre 2015;

 

Dénonciation et réclamation

 

A-5 Formulaire de réclamation daté du 25 février 2018;

 

A-6 En liasse, le courriel de l’avis de réclamation transmis par l’Administrateur à l’Entrepreneur, auquel est jointe une mise en demeure du Bénéficiaire ainsi que l’accusé de réception de l’Entrepreneur datés du 3 avril 2018;

 

Correspondance

 

A-7 Échange de courriels entre le Bénéficiaire et l’Entrepreneur et l’Administrateur datés des 28 mars et 1er avril 2018;

 

Autres documents pertinents

 

A-8 L’état de renseignements d’une personne morale au registre des entreprises de Syndicat de la copropriété 594 à 598 des Cépages, daté du 9 juillet 2018;

 

A-9 L’état de renseignements d’une personne morale au registre des entreprises de Alliance Taillon Voyer Inc. daté du 9 juillet 2018;

 

Décision

 

A-10 En liasse, la décision de l’Administrateur datée du 31 mai 2018 et l’accusé de réception de Postes Canada de l’Entrepreneur daté aussi du 8 juin 2018;

 

A-11 En liasse, le courriel de la notification de l’organisme d’arbitrage daté du 28 juin 2018, à laquelle est jointe la notification d’arbitrage de l’organisme de d’arbitrage, la lettre de nomination et la demande d’arbitrage du Bénéficiaire;

 

A-12 Curriculum vitae de Jocelyn Dubuc.

 

 

LES PIÈCES DE L’ENTREPRENEUR 

 

 

 

E-1 Rapport de la firme Legault Dubois du 26 juin 2015.

 

E-2 La liste des commentaires et ajouts au formulaire d’inspection préréception produit en A-4 et datée du 30 octobre 2015.

 

 

 

LE MANDAT

 

 

1.             Le Tribunal a été désigné aux présentes par lettre du Groupe d’Arbitrage et de Médiation sur mesure (GAMM), le 28 juin 2018;

 

2.             Cette assignation suivait la demande de monsieur Patrick Lemay, représentant le Bénéficiaire, par correspondance du 27 juin 2018, alors que :

 

« Les points contestés sont les suivants :

 

Point 1 :  Odeurs se propageant d’un condo à l’autre;

 

Point 2 :  Joints de mortier fissurés et fondation fissurée;

 

Point 3 :  Joints de plâtre fissurés au condo 596 (toit et plafonds se soulèvent en hiver);

 

Point 4 :  Joints de plâtre fissurés au condo 598 partout dû au mouvement de la structure. »

 

3.             La juridiction du tribunal et, en particulier du soussigné, n’ont pas été contestées par les parties, lors de l’audience tenue, le 11 octobre 2018;

 

 

 

LA PREUVE

 

 

4.             Tel que   requis par le Bénéficiaire, le tribunal et les divers intervenants au dossier ont convenu de visiter les lieux situés au 594, 596 et 598 rue des Cépages, à Laval.

 

5.             Lors de cette visite, il fut entendu, comme d’ailleurs requis dans la demande d’arbitrage, que seuls les quatre premiers points étaient à l’ordre du jour, mais non le point 5 relatif aux odeurs d’égouts dans les garages.

 

6.             Il est apparu à toutes les personnes présentes, incluant le soussigné, que les points 2, 3, et 4, soit des fissures dans les joints de mortier aux unités d’habitation 596 et 598 ainsi que des fissures dans le mortier extérieur de la propriété, pouvaient être constatées.    Mais, encore-là par tous, il y a eu défaut de percevoir des odeurs se propageant d’un condo à l’autre.

 

Point no 1 :  Odeurs se propageant d’un condo à l’autre

 

7.             A ce stade-ci, il paraît opportun de constater que l’avis de fin des travaux, dont un exemplaire apparaît en onglet 3 du cahier de pièces de l’Administrateur, manifeste le 6 octobre 2015, alors que le formulaire d’inspection préréception, produit en A4, indique le 4 novembre 2015, comme déclaration de fin des travaux par le représentant de l’Entrepreneur Monsieur Denis Richard.

 

8.             Considérant qu’il appert sur ce formulaire d’inspection préréception, le tout confirmé par la preuve orale lors de l’audience, que le professionnel du bâtiment avait été réservé par l’Entrepreneur, l’inspecteur de l’Administrateur de la garantie, monsieur Jocelyn Dubuc, avait alors déterminé, conformément à l’obligation de l’article 25.1 du Règlement, que la date officielle de réception du bâtiment doit alors être fixée six mois après la date de l’inspection, donc au 4 mai 2016.

 

9.             Le tribunal reconnaît le bien-fondé de cette approche par l’inspecteur de

l’Administrateur;


10.         Cette détermination du moment de réception du bâtiment aura son importance dans la considération des délais de dénonciation des déficiences ou vices cachés, par la suite, dans la présente affaire.

 

11.         Quant à ces odeurs, selon le témoignage du représentant du Bénéficiaire, il n’y aurait propagation qu’en période de l’année où le chauffage est utilisé et, selon monsieur Lemay, il semble que cette propagation se ferait par la cage d’escalier, l’air chaud cherchant à monter à l’étage supérieur.

 

12.         Selon son témoignage, l’Entrepreneur, après avoir reçu cette plainte, a dépêché des ouvriers pour vérifier et tenter de corriger cette déficience par l’application de divers produits scellant, mais en vain.

 

13.         L’Entrepreneur témoigne, quant à lui, qu’il a tenté, effectivement, de calfeutrer certains endroits plus sensibles de la cage d’escalier mais, sans succès.   Il témoigne également à l’effet qu’il n’y a aucune norme applicable à la propagation possible des odeurs d’une unité à l’autre et que, selon lui, il semble parfois que cela dépend du type d’aliments qui sont cuisinés et consommés dans les différentes unités.

 

14.         Le Bénéficiaire n’offre aucune contre-preuve au tribunal à l’effet qu’aucune norme spécifique n’est applicable dans les circonstances et il y a donc un vide dans la preuve sur ce point numéro 1 soumis à l’arbitrage.

 

15.         Ce défaut emporte le rejet de la demande d’arbitrage et le maintien de la décision de l’Administrateur sur ce point.

 

Point no 2 :  joints de mortier fissurés

 

16.         La visite des lieux, tel que mentionné précédemment, a permis au tribunal et aux divers intervenants de constater que le mortier, à différents endroits au pourtour de la propriété, démontrait de fines fissurations, comme démontré d’ailleurs aux photographies jointes au rapport de conciliation A-10.

 

17.         L’inspecteur, monsieur Jocelyn Dubuc, s’est exprimé comme ceci, suite à sa première visite des lieux :

 

« Au printemps 2016, le Bénéficiaire dit avoir remarqué la présence de fissures dans les joints de maçonnerie sur les murs composés de blocs architecturaux.   A sa demande, l’Entrepreneur est intervenu pour réparer les joints fissurés en octobre 2016, après quoi dès le printemps 2017 le Bénéficiaire dit avoir fait le même constat à savoir la présence de fissures dans les joints de maçonnerie dans les mêmes murs. »

 

18.         Puis, le même conciliateur, conclut sur le point numéro 2 :

 

« Toutefois, l’Administrateur considère, encore une fois, que le délai de dénonciation (17 janvier 2018) est déraisonnable, compte tenu de la date de la découverte de la malfaçon (printemps 2016).

 

Dans les circonstances, en raison d’une dénonciation tardive, l’Administrateur dit rejeter la réclamation du Bénéficiaire, à l’égard du point 2. »

 

19.         Le Tribunal croit devoir considérer le printemps 2017, moment de la confirmation d’une problématique, comme date de départ du délai pour dénoncer la déficience relative aux joints de mortier, soit le 21 mars 2017, alors que la dénonciation n’est faite que le 17 janvier 2018.   Ce délai de dix mois doit être, dans les présentes circonstances, considéré comme excessif, puisqu’il s’agissait d’une deuxième constatation, et, en conséquence, le tribunal rejette la demande d’arbitrage du

Bénéficiaire et maintient la décision de l’Administrateur de la garantie, sur le point numéro 2 du rapport A-10.

 

Point no 3 :  Joints de plâtre fissurés au condo 596 :

 

20.         L’inspecteur de l’Administrateur de la garantie rapporte, sur ce point, dans son rapport daté du 31 mai 2018 (A-10), qu’il a effectivement constaté « la présence de fissures dans les joints de plâtre à la jonction du plafond et des murs, ce qui ressemble étrangement à un problème de soulèvement des fermes de toit ».

 

21.         Il rapporte également que, selon les dires du Bénéficiaire, « l’Entrepreneur est intervenu en octobre 2016 pour réparer les joints de plâtre fissurés » mais il appert que les fissures sont réapparues au cours de la période hivernale 2016-2017.

 

22.         Dans son témoignage, monsieur Lemay exprime que les joints doivent être refaits, régulièrement, après la période hivernale et, qu’il ne connaît pas la cause, qu’il faudrait déterminer et corriger.

 

23.         Cependant, cette problématique survenue en 2015-2016 a été corrigée en octobre 2016, puis est réapparue durant la période hivernale de 2016-2017.  Or, ce n’est que le 17 janvier 2018, que le Bénéficiaire a avisé l’administrateur de l’événement, donc certainement à au moins dix mois suivant la deuxième apparition du même problème et, en conséquence, le tribunal ne peut faire autrement que de considérer qu’il s’agit là d’une dénonciation tardive et rejette la demande du Bénéficiaire.

 

Point no 4 :  Joints de plâtre fissurés au condo 598 :

 

24.         L’Entrepreneur n’est jamais intervenu pour corriger les joints, dont il est aisé de percevoir, la fissuration lorsqu’on visite les lieux.

 

25.         Cependant, comme le rapporte l’inspecteur de l’Administrateur de la garantie et, tel que confirmé, par monsieur Lemay, lors de son témoignage, celui-ci est prêt à admettre la tardiveté de sa dénonciation car cette unité résidentielle est occupée par un locataire, qui n’a jamais fait valoir quelque plainte que ce soit, quant à la défectuosité de différents joints apparaissant à plusieurs endroits dans ce logement.

 

26.         Les fissures seraient apparues, selon toute vraisemblance dans la preuve, pendant la première année d’occupation.

 

27.         Il y a donc lieu de considérer que la dénonciation s’est produite pratiquement plus de deux ans et demie, la dénonciation a été faite à l’Administrateur de la garantie environ vingt mois après la prise de possession, donc, au-delà, de l’année de garantie prévue pour les malfaçons non existantes et non apparentes apparaissant à l’article 27 du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs.

 

28.         Puisque, d’autre part, il ne s’agit évidemment pas d’un vice caché, au sens du Règlement et à son article 27 par. 4, ni au sens des articles 1726 et 2103 du Code

Civil, l’immeuble gardant sa valeur et l’utilisation pour laquelle il est prévu, la garantie d’une année prévue pour les malfaçons existantes et non apparentes ne s’applique pas et, par conséquent, le tribunal doit rejeter la demande d’arbitrage du Bénéficiaire sur ce point numéro 4.

 

 

 

CONCLUSIONS

  

     

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

 

REJETTE au complet, sur chacun des points, la demande d’arbitrage du

Bénéficiaire;

 

MAINTIENT l’entièreté de la décision de l’Administrateur de la garantie sur chacun des points;

 

CONSIDÉRANT les articles 123 et 116 du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs, le Tribunal CONDAMNE l’Administrateur de la garantie au paiement des frais d’arbitrage, moins une somme de 150$ pour laquelle il condamne le Bénéficiaire.

 

Le Tribunal CONDAMNE le Bénéficiaire à payer une somme de 150,00$ pour les frais d’arbitrage.

 

MONTRÉAL, le 1er novembre 2018

 

         ___________________________________

         Jean Doyle, avocat, arbitre

GAMM - 2018-06-27 (594 à 598 des Cépages)