TRIBUNAL D’ARBITRAGE

 

Sous l’égide du

 

CENTRE CANADIEN D’ARBITRAGE COMMERCIAL (CCAC)

Organisme d’arbitrage autorisé par la Régie du bâtiment

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC                                ENTRE

CCAC : S13-122101-NP                           

               S14-051602-NP

               S14-102701-NP

               S15-090201-NP                                     SYNDICAT DU 18 IMPASSE HUET

" Bénéficiaire "

 

c.

 

9153-5914 QUÉBEC INC.

CONDOS PLACE D’AMERIQUE

Entrepreneur "

 

et

 

GARANTIE HABITATION DU QUÉBEC

" Administrateur "

 

 

 

ARBITRAGE EN VERTU DU RÈGLEMENT SUR LE PLAN DE

GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS

(Décret 841-98 du 17 juin 1998)

 

 

 

DÉCISION ARBITRALE RENDUE LE 15 JUILLET 2016

 

YVES FOURNIER ARBITRE

                                             IDENTIFICATION DES PARTIES

 

 

BÉNÉFICIAIRE :                                              SYNDICAT DU 18 IMPASSE HUET

                                                                                    18, IMPASSE HUET,

QUÉBEC,  (QUÉBEC)

G2A 4C8

 

REPRÉSENTÉ PAR

Me MICHEL PARADIS

     

               

ENTREPRENEUR :                                         9153-5914 QUÉBEC INC.

                                                                             CONDOS PLACE D’AMERIQUE

    

                                                                             PERSONNE MORALEMENT CONSTITUÉE        

                                                                             DONT LE SIÈGE SOCIAL  EST SITUÉ AU

                                                                             14.882, BOUL.DE LA COLLINE,

                                                                             QUÉBEC, (QUÉBEC)

                                                                             G3E 1H3

 

                                                                              REPRÉSENTÉE PAR

                                                                              Me HUGO LAFRENIÈRE

      

 

ADMINISTRATEUR :                                     GARANTIE HABITATION DU QUÉBEC

 

                                                                              PERSONNE MORALEMENT CONSTITUÉE        

                                                                              DONT LE SIÈGE SOCIAL  EST SITUÉ AU

9200, BOUL. MÉTROPOLITAIN EST,

MONTRÉAL,  (QUÉBEC)

H1K 4L2

                       

REPRÉSENTÉE PAR

Me FRANÇOIS-OLIVIER GODIN         

 

                                                                DÉCISION     

 

 

INFORMATIONS QUANT À L’IMMEUBLE

 

[1] Le bâtiment concerné est situé au 18 Impasse Huet, à Québec. L’immeuble en est un de 4 étages hors sol, dont le premier étage est constitué de garages et de services. Il comporte 12 logements.

 

[2] L’immeuble fut construit en 2009. Initialement, l’Entrepreneur avait prévu un revêtement de brique conventionnel. L’Entrepreneur a opté pour une construction pré-usinée livrée en cubes.

 

[3] Le revêtement extérieur est constitué de planches et de panneaux en fibrociment. On retrouve des planches de déclin du fabricant James Hardie et des modules de panneaux de brique pour les coins de l’immeuble provenant du fabricant Nichiha.

 

[4] L’Entrepreneur s’est présenté sur les lieux après la livraison de l’immeuble pour faire des interventions sur le revêtement extérieur, notamment pour l’ajout de vis au parement d’imitation brique, pour le sciage à la base du parement Nichiha au niveau du toit des marquises, pour l’ajout d’un câble électrique à l’extérieur et finalement pour des retouches de teinture ou de joints d’étanchéité au niveau des parements.

 

 

HISTORIQUE DES PROCÉDURES

 

 

[5] Le 14 mars 2012, Colombe Lacasse, vice-présidente du Syndicat, dénonçait à l’Administrateur et à l’Entrepreneur une infiltration d’eau le long des cloisons de ciment au rez-de-chaussée de l’immeuble. Le 6 avril 2012 elle récidivait en ciblant cette fois 13 autres points.

 

[6] Le 7 juin 2012, le conciliateur, Martin Gignac, visitait les lieux et signait sa première décision le 19 juillet 2012. (A-1)

 

[7] Le 22 août 2012, monsieur Gignac signait un autre  rapport de conciliation,  « addenda », traitant d’un point omis dans le premier rapport, identifié ainsi : « plafond et mur intérieur du logement #204 : Finition de Placoplâtre ». (A-2)

 

[8] Le 21 décembre 2013, le Syndicat formulait une demande d’arbitrage pour le point 2 : « parement extérieur en fibrociment imitation de brique », et pour le point 3 : « infiltration aux marquises des entrées de garage ». Le Syndicat indiquait son désaccord avec le conciliateur par  son envoi transmis le 13 novembre 2013. Ce dernier affirmait que certains travaux correctifs avaient été exécutés par l’Entrepreneur selon les règles de l’art. (A-3)

 

[9] Le 22 décembre 2013, le Syndicat signifiait, notamment, à l’Administrateur et à l’Entrepreneur, l’existence de problèmes quant au revêtement en fibrociment de couleur os,  « James Hardie », sur deux faces de l’immeuble. (A-6)

 

[10] Le 16 avril 2014, le conciliateur livrait une autre décision et rejetait ainsi la demande traitant du parement James Hardie. (A-6)

 

[11] Le 15 mai 2014, le Syndicat demandait l’arbitrage quant au point 2 de la décision du 16 avril 2014. (A-7)

 

[12] Le 25 août 2014, le Syndicat dénonçait un « vice de construction grave pour l’installation des différents parements de fibrociment » et « l’absence de linteau au-dessus de l’ensemble des ouvertures. » (A-10)

 

[13] Le 24 octobre 2014, monsieur Gignac transmettait son rapport de conciliation quant aux situations décrites au paragraphe précédent. (A-12)

 

[14] Le 27 octobre 2014, le président du Syndicat avisait le centre d’arbitrage (CCAC) de procéder à l’arbitrage quant à la décision rendue le 24 octobre 2014. (A-13)

 

[15] Le 13 mai 2015, le Syndicat dénonçait plusieurs points concernant les exigences réglementaires de construction et de prévention des incendies.

 

[16] Le 27 août 2015, le conciliateur rejetait l’ensemble des points dénoncés. (A-15)

 

[17] Le 28 août 2015, le procureur du Bénéficiaire réclamait l’arbitrage quant à ce dernier rapport. (A-16)

 

[18] Selon la prétention du conciliateur Martin Gignac, lequel a signé quatre (4) rapports de conciliation pour l’immeuble, la date de fin des travaux des parties communes (avis de fin des travaux) se situe au 10 décembre 2009 alors que la réception des parties communes serait en date du 2 juin 2010.

 

 

EXPERTISES

 

 

[19] Le 26 mai 2014, le Bénéficiaire mandatait Michel Landry, expert-conseil, afin de présenter une opinion technique sur les défauts d’installation affectant le revêtement de fibrociment de l’immeuble situé au 18 Impasse Huet à Québec et plus spécifiquement les problèmes affectant les modules de panneaux de brique du fabricant Nichiha, posés aux quatre coins de l’immeuble. Son expertise fut livrée le 18 juin 2014. (B-2)

 

[20] Lors des ouvertures exploratoires intérieures réalisées le 26 février 2014 par monsieur Landry aux condos 301 et 302, ce dernier découvrit des défauts qui altèrent la protection incendie du bâtiment. Suite à sa recommandation, le Bénéficiaire retenait les services de Sylvain Ebasher pour procéder à une inspection et par la suite produire un rapport quant à la conformité du bâtiment. Le rapport fut signé le 12 mai 2015. (B-9)

 

[21] À cette dernière date, monsieur Landry signait un second rapport, dans la continuité de celui du 18 juin 2014 en traitant du revêtement de fibrociment James Hardie (Hardie Plank). (B-9)

 

 

DATES IMPORTANTES

 

[22] Je rapporte certaines dates que j’estime importantes dont certaines traitent de la transmission de certains documents :

 

·           Avril 2009 : Index des immeubles : (E-2). Document démontrant qu’initialement les copropriétaires avaient acquis individuellement une partie indivise (achat d’une quote-part) de la copropriété.

·           10 décembre 2009 : Avis de fin des travaux des parties communes (A-21).

·           9 février 2010 : Première réunion des copropriétaires du Syndicat 18 Impasse Huet (B-12).

·           8 mars 2010 : Les copropriétaires acquièrent chacun une partie divise de l’immeuble (E-1).

·           2 juin 2010 : Formulaire d’inspection pré réception (A-18).

·           2 juin 2010 : Date de déclaration de réception (A-18).

·           2 juin 2010 : Avis de fin des travaux (second) des parties communes (A-20).

 

 

PREUVE DU BÉNÉFICIAIRE

 

 

SYLVAIN EBACHER

 

 

[23] Monsieur Sylvain Ebacher est un consultant en réglementation de construction et possède un DEC en architecture (1978). Il a une expérience de plus de 30 ans en construction.

 

[24] À la demande de Michel Landry et avec l’aval du Bénéficiaire, il se rend au 18 Impasse Huet, à Québec pour vérifier si le bâtiment est conforme aux exigences réglementaires de construction et de prévention des incendies.

 

[25] Selon monsieur Ebacher, les travaux de construction ayant débuté avant le 17 novembre 2009, c’est l’édition 2000 du Code de construction du Québec, partie 9, qui doit s’appliquer. Il identifie les défauts mettant à risque les occupants et propose les correctifs qui s’imposent.

 

[26] Les points suivants sont retenus et notés dans son rapport daté du 12 mai 2015 :

 

·           Le sens d’ouvertures  des portes extérieures d’issue.

·           La protection des mousses plastiques.

·           Les locaux de rangement qui sont sans aucune résistance.

·           Les compartiments des vides de construction non recoupés par des coupe-feu.

[27] Pour chacune des situations le témoin propose la correction appropriée :

 

·           La composition du plancher-plafond au-dessus du garage qui ne rencontre pas l’exigence de résistance d’une heure.

·           La gaine technique verticale : le tuyau ABS devant comporter un dispositif coupe-feu à chaque étage.

·           Les portes et trappes d’accès des regards de nettoyage ne peuvent être comblés par du bois.

·           Les ouvertures dans les séparations coupe-feu pour le passage des câbles : ces câbles ne peuvent percer une séparation coupe-feu horizontale ou verticale.

·           L’étanchéité à l’air des stationnements : l’étanchéité aux gaz d’échappement doit être censurée.

·           Conception des garde-corps et des mains-courantes : un prolongement est nécessaire.

 

 

[27] Pour chacune des situations le témoin propose la correction appropriée.

 

[28] En contre-interrogatoire, monsieur Ebacher reconnaît qu’il est facile de se rendre compte que le sens de l’ouverture des portes d’issue n’a pas été respecté. Quant aux portes, on ne pourrait utiliser les mêmes portes pour les mettre dans le sens requis.

 

[29] Le témoin reconnaît qu’il n’a procédé qu’à une seule ouverture, soit au 3ème étage, pour vérifier les vides de construction entre les modules, où il a passé un fichoir jusqu’au bas. L’espacement entre les modules était environ 1, 1.5 pouces. Il soutient qu’il est probable que cette absence de coupe-feu se retrouve pour tous les compartiments de vides de construction. De fait, la preuve révélera que cette assertion ne sera pas contredite par les autres parties.

 

[30] Il confirme qu’il est interdit d’installer des tuyaux combustibles de plastique dans une gaine technique verticale. Le tuyau en ABS doit obligatoirement comporter un dispositif coupe-feu à chaque étage.

 

 

 

 

JOCELYN CHABOT

 

[31] Monsieur Jocelyn Chabot était le gestionnaire de projet pour l’Entrepreneur. La compagnie à numéro (l’Entrepreneur) agissait comme entrepreneur général.

 

[32] Le « 18 Impasse Huet » fut son premier et dernier projet. Il passait régulièrement sur les lieux de la construction pour s’enquérir de l’avancement des travaux.

 

[33] Trois actionnaires composaient la compagnie, mais celle-ci serait actuellement inopérante.

 

 

ANDRÉ LETOURNEAU

 

[34] Monsieur André Letourneau préside actuellement le conseil d’administration du Syndicat. Il a pris possession de son unité en mars 2009, soit un mois avant de passer chez le notaire. Il était présent lors de la construction, car lui et son associé agissaient à titre de courtiers pour l’Entrepreneur quant à la vente des condos.

 

[35] Il confirme que la construction du rangement pour l’unité 302 fut faite par les commettants de l’Entrepreneur.

 

 

MICHEL LANDRY

 

[36] Monsieur Michel Landry est un expert-conseil en construction. Il fut reconnu expert tant par les parties que par le Tribunal. Il se dit spécialisé en « enveloppe de bâtiment ». Il a effectué  de nombreuses expertises en revêtement (acrylique, pierre, brique, bois et autres). Il traitera des deux expertises qui furent produites et considérées dans certaines décisions du conciliateur Martin Gignac.

 

Expertise du 18 juin 2014  (Revêtement Nichiha)

 

[37] Le premier mandat dont il a hérité du Syndicat consistait  à expertiser le revêtement extérieur des 4 coins de l’immeuble en cause, lequel parement est composé de fibrociment imitation brique du fabricant Nichiha.

 

[38] Dès son arrivée il constata une dislocation des panneaux, des ouvertures et des mouvements des panneaux. Le 11 juin 2014, il procéda à l’aide d’une nacelle à faire quelques percées exploratoires. C’était la première expertise qu’il menait sur les panneaux de fibrociment Nichiha.

 

[39] Il remarqua l’écaillement du revêtement causé probablement par l’eau car sa composition est de bois et de ciment et le bois en contact avec l’eau gonfle et s’écaille. Il aurait fallu un dégagement de ¼ pouce à la base et au haut des ouvertures ainsi qu’une pente positive.

 

[40] Il fait remarquer que la longueur du solin confirme que la brique devait être le revêtement retenu au départ par l’Entrepreneur.

 

[41] La photo 2-7 de son rapport confirme, à ses dires, le gondolement du revêtement et une courbure sur le montant de la fenêtre, à savoir le jambage latéral. Il justifie ce résultat par la charge qui prend appui sur la fenêtre. Une situation similaire se retrouve à d’autres fenêtres (2-10 et 14). Il ne pourrait s’agir d’un retrait du bois de structure car les modules construits en usine furent livrés directement sur les lieux. Le bois devait être sec, selon lui.

 

[42] Il a constaté que les fourrures de bois verticales étaient fixées dans un panneau OBS de 7/10” d’épaisseur. Ce n’est certes pas amuré comme il est requis par le Code du bâtiment. Il est prescrit  que la vis pénètre au moins 1 pouce dans les montants de 2x4 pour qu’il y ait un lien structural dans le support du poids du revêtement. Il faut retenir, selon l’expert, que derrière le revêtement Nichiha il y a un isolant de mousse plastique (polystyrène) de 2 pouces d’épaisseur.

 

[43] La photo 2-8 tente de démontrer la déformation ou une démarcation à chaque rangée des panneaux. Les joints verticaux sont quelque peu visibles ce qui l’amène à opiner qu’il y a un mouvement du revêtement. Il n’a pu constater s’il y a avait eu aggravation de ce mouvement depuis sa première visite en juin 2014.

 

[44] Une ouverture (trou fait à partir d’un objet quelconque et pointu) au-dessus de la fenêtre (2-10) entraîne de l’infiltration d’eau qui entre dans le mur. De plus, il y a un scellant à la jonction du solin métallique (2-10) et du revêtement, ce qui entraîne un rejet d’eau.

 

[45] Il spécifie que les panneaux Nichiha sont rectangulaires et sont maintenus par des agrafes. Une photo permet de constater que l’expert peut à un endroit précis pousser le panneau vers l’intérieur par une simple pression (2-12). Il remarque que les joints sont ouverts alors qu’ils doivent être en contact. Il explique qu’il y a un scellant appliqué pour permettre à chaque panneau de s’épouser sans produire de telles ouvertures. Il en ressort qu’un mouvement est forcément intervenu suite à la pose.

 

[46] La photo 2-14 permet de constater qu’un scellant fut appliqué à l’endroit du rejet d’eau.

 

[47] À une autre fenêtre (2-16), monsieur Landry tente avec une lame de couteau de la passer entre le revêtement et le solin, ce qui s’avère impossible  dû au fait que le panneau est en contact avec la tête supérieure de la fenêtre. Il y a là, de toute évidence, une surcharge sur la tête de la fenêtre.

 

[48] Au coin avant, côté Sud du bâtiment, on constate par la photo 3-18, une pente inverse du solin. De plus, il y a une ouverture faite à partir d’un quelconque outil ou objet. La même situation est reprise en d’autres endroits (3-19) et au-dessus du stationnement. Une autre photo prise au-dessus du garage dévoile que le bas du revêtement a été coupé pour permettre l’ajout d’un contre-solin (4-20).

 

[49] Au coin Ouest, côté Sud, le gondolement apparaît sur une autre portion de l’immeuble. Des coulisses sur le mur de fondation sont apparentes (5-21).

 

[50] Monsieur Landry fait état d’un joint ouvert au haut de l’appartement 303. Le panneau est déplacé et présente une ouverture de 3-4 mm (5-22).

 

[51] L’expert commente souvent sur l’état rouillé des vis posées et leur positionnement souvent aléatoire sur le revêtement Nichiha. Questionné quant à la problématique que cela peut faire naître. Monsieur Landry explique que ce n’est pas la façon de poser les panneaux. C’est une mesure d’urgence pour éviter que ça bouge trop. Le problème survient lorsque les vis sont posées au hasard. Il faudrait ouvrir ou prendre les mesures pour s’assurer que la prise se fait dans les montants.

 

[52] De ce même côté du bâtiment, on constate également des joints ouverts entraînant des déplacements de panneaux (5-24 à 5-30). Pour la photo 5-28, elle illustre également qu’un scellant a été appliqué entre deux panneaux, probablement mis lors de la pose, et que suite au déplacement des panneaux le scellant s’est étiré.

 

[53] Le témoin soumet qu’au côté Ouest-Nord le déplacement des panneaux apparaît sur plusieurs photos (6-31, 6-32 entre autres). À la tête de la fenêtre montrée à la photo 6-35 on constate que la moulure métallique ne permet pas le rejet d’eau. Celle-ci n’a d’autre choix que d’aller sur les côtés de la fenêtre pour être évacuée.

 

[54] À une fenêtre du haut du mur (6-37), l’expert note la fissure dans le revêtement, laquelle est signe d’un mouvement différentiel entre deux panneaux. Quant à la photo 6-38, elle démontre pour lui des mouvements importants des panneaux. Il indique que s’il y a eu relâchement de 2 ou 3 panneaux, les autres ont tendance à suivre, ce qui crée des contraintes. Il conclut :

 

« J’ai des indices d’affaissements, de déplacements

 latéraux, des déplacements dans les deux sens. »

 

[55] À la photo 6-39, au bas du parement, on remarque que le panneau sort du mur de 8 mm.

 

[56] Du côté Nord-Ouest, côté de la piste cyclable, il y a un déplacement de joint avec une ouverture de 3.9 mm (7-43). La photo suivante fait voir la bande d’étanchéité décalée de l’autre panneau.

 

[57] À la façade avant, on peut observer des ouvertures de 4.16 mm (8-47) et 4.4 mm (8-49). Les vis sont davantage apparentes lorsque les ouvertures sont manifestes.

 

[58] La percée exploratoire à la façade Ouest, côté Nord, montre le panneau OBS sans protection i.e. sans membrane. La fourrure de bois non réglementaire montre des cernes d’eau (9-53, 9-54).

 

[59] L’agrafe métallique dévoilée par les photos 9-56 et 9-57 nous laisse voir que le parement est en contact avec le solin et la vis de ¼ pouce qui retient l’agrafe est rouillée.

 

[60] Du côté de la façade Nord, côté Est, la percée exploratoire confirme que le panneau a été coupé et qu’il n’est plus supporté par l’agrafe métallique (10-61).

 

[61] La photo 10-62 valide le fait que l’Entrepreneur a utilisé un ruban adhésif comme ruban pare-vapeur et non un ruban pare-air tel que recommandé. La présence du frimas fut également constatée.

 

[62] Il est visible à la photo 10-65 que le solin métallique n’est pas scellé sur la façade mais sur l’isolant simplement.

 

[63] La percée que l’on présente à la photo 10-66 confirme que le colombage et l’OSB vont au-delà des paramètres autorisés par le fabricant et par le Code du bâtiment.

 

[64] Il fut découvert lors de l’ouverture du mur que trois vis étaient fixées uniquement dans l’OSB. La localisation des montants démontre que ceux-ci ne rencontrent pas la distance requise par le manufacturier (10-58,10-59).

 

[65] L’ouverture faite sous la marquise valide le fait que le solin aurait dû être prolongé pour que l’eau puisse couler vers l’extérieur. Des cernes d’eau apparaissent sur le bois (11-71,11-72).

 

[66] À la façade Est, côté Sud, la percée fait voir que le solin métallique ne remonte pas derrière les fourrures mais plutôt derrière le panneau (12-78). Le solin ne capte pas tout l’eau qui tombe dans la cavité murale.

 

[67] La photo 12-83 montre une vis rouillée dans sa partie intérieure et extérieure. La percée effectuée (12-84) apporte un éclairage sur un solin appliqué contre l’OSB sur le mur au-dessus de la fenêtre. Le dessus de cette fenêtre est 1 ¾ pouce plus bas que le dessus de la moulure de PVC. Autrement dit, l’eau ne peut s’évacuer et elle se retrouve sur la tête de la fenêtre.

 

[68] La percée # 5 Sud, côté Est, montre que la fourrure est mouillée et très humide. La mesure montre 23.6 % d’humidité, alors qu’on aurait dû retrouver une mesure de 8 à 10%. De plus, la pente du solin est inversée (13-90, 13-91).

 

[69] Les situations décrites plus haut se retrouvent également à d’autres endroits. La photo 13-99 démontre que derrière l’isolant il n’y a pas de membrane, l’isolant s’appuie directement sur l’OSB.

 

[70] Selon monsieur Landry, l’Entrepreneur n’a pas respecté le Code du bâtiment et le Guide d’installation du fabricant Nichiha. Quant à lui, c’est le genre de produit qui demande un intervenant du manufacturier lorsqu’on pose ce revêtement pour la première fois. Il ajoute que le ruban adhésif utilisé par l’Entrepreneur fait en sorte que l’humidité peur rester derrière les panneaux.

 

[71] Des constatations qu’il a faites, il en découle de graves problèmes d’infiltration d’eau au niveau de solins et une instabilité du revêtement Nichiha qui entraîne le déplacement des panneaux ce qui amène un désordre majeur dans le comportement du revêtement.

 

[72] Il en résulte également une instabilité structurale qui débouche sur des infiltrations d’eau dans les composantes du mur. Pour l’expert, le problème est majeur. Il s’exprime ainsi lors de son témoignage:

 

« L’épaisseur de l’isolant est hors norme pour la pose de ce revêtement sur fourrure de bois et c’est peut-être ce qui pourrait expliquer de plus l’instabilité du revêtement étant donné que l’isolant vient placer la fourrure 2 pouces plus loin que le support structural, de sorte que tout le revêtement extérieur est en porte-à-faux (hors d’aplomb, sans point d’appui) par rapport aux fixations, aux vis de fixation et avec ce que j’ai constaté plusieurs vis de fixation ne sont pas fixées dans les montants structurés.

 

Je suis convaincu qu’il faut enlever tout le revêtement sinon on peut avoir des dommages sournois et on peut même avoir un risque de chute à court ou moyen terme du revêtement.

 

Si on a des épisodes prévisibles de vents très forts, si on a des infiltrations d’eau qui accentuent le problème de détérioration, de corrosion etc., à moyen terme on risque d’avoir des problèmes majeurs sans qu’il soit nécessairement possible de le découvrir de l’extérieur. Par l’intérieur, partout où j’ai percé il y avait un pare-vapeur donc l’humidité ne se communique pas au matériau intérieur, donc ça se passe derrière l’isolant et le pare-vapeur, dans les composantes internes. Il y a seulement dans la cage d’escalier où les dommages par infiltrations d’eau ont pu être visibles sur le fini intérieur. Ailleurs il n’y avait pas de trace.

 

Il faut enlever nécessairement tout l’isolant extérieur parce que le ruban adhésif n’est pas adéquat, j’ai constaté la présence de dommages derrière l’OSB, derrière l’isolant polystyrène.

 

Il faut comprendre que lorsque l’eau peut pénétrer sur le dessus des fenêtres, elle a déjà traversé l’isolant. L’eau qui s’écoule vient affecter le panneau OSB derrière l’isolant. Donc autour de toutes les fenêtres il est susceptible d’avoir des dommages aux panneaux OSB et pour ça je dois enlever l’isolant. »

 

 

Expertise du 12 mai 2015 (Revêtement James Hardie)

 

[73] Monsieur Landry procéda les 22 et 23 janvier 2015 à des percées exploratoires avec nacelle au niveau des têtes de fenêtres, des bouches d’extraction murales, des hottes de salle de bain et des échangeurs d’air. Des percées exploratoires intérieures à l’appartement # 301 s’ajoutèrent le 26 février 2015. Son rapport est en date du 12 mai 2015.

 

[74] Le revêtement du clin du fabricant James Hardie comporte des tâches inesthétiques particulièrement au niveau des joints d’aboutement. (Photo 1.1.1. du rapport). On retrouve un joint de scellement à la tête des fenêtres à l’occasion.

 

[75] On peut constater une importante ouverture laquelle permet l’infiltration d’eau à l’arrière de la fenêtre sur la façade Sud. (1.1.3)

 

[76] Certains joints d’assemblage présentent des espacements, ce qui permet des infiltrations d’eau (1.2.13).

 

[77] Selon l’expert, certains endroits du revêtement accotent sur le dessus de la fenêtre. On devrait retrouver un espacement minimal de 6 mm tel que le recommande le fabricant (1.1.4).

 

[78] Le témoignage de monsieur Landry soutenu par la production de photos à l’intérieur de sa seconde expertise cible les infiltrations d’eau constatées à l’intérieur de certaines fenêtres. De plus, le jambage d’une fenêtre (1.2.3) montrerait, selon l’expert, une déformation. Il soumet que le retrait de la structure de bois a possiblement provoqué une compression sur celles-ci. Pour le Tribunal cette prétention (déformation) est plus que difficile à constater à partir de cette photographie.

 

[79] La fenêtre de la cage d’escalier au dernier étage montrée par une ouverture exploratoire laisse deviner des infiltrations d’eau à l’intérieur et une légère déformation des montants et du jambage de celle-ci (photos 1.2.16, 1.2.22). Faut-il ajouter l’absence de solin rejet d’eau à la tête des ouvertures de la fenestration tel qu’exigé par la compagnie James Hardie. Il a pu relever des cernes d’infiltrations d’eau et de l’humidité des deux côtés (1.2.11 à 1.2.21). Les vis à la base du châssis et celles dans les montants sont rouillées.

 

[80] La fenêtre de l’appartement 102 côté Sud montre une présence de scellant à la tête posé contre la planche de fibrociment et le dessus du cadre de la fenêtre (1.2.24). Une ouverture non scellée sur le côté Est se voit facilement. L’exploration dévoile des cernes sur la latte en contrebas des montants, de la condensation sur le ruban adhésif, la présence d’eau sur le dessus du solin situé sur le dessus de la fenestration. L’eau sur ce solin peut verser par les côtés de la fenêtre ou s’enchâsser sous le solin (1.2.30 à 1.2.33). Un linteau composite est assemblé avec des 2x4 et un panneau aggloméré.

 

[81] L’ouverture à la tête de la porte-patio de l’appartement 102 Sud permet de constater qu’il n’existe pas d’étanchéité à la jonction du balcon et du revêtement extérieur, ni de solin de rejet d’eau dans la cavité murale extérieure et ni de solin rejet d’eau à la tête de la porte-patio. Il a noté également la présence de traces d’écoulement et de cernes sur le panneau isolant et la sur la fourrure (1.2.37 à 1.2.43).

 

[82] Le solin de membrane est appliqué sur le dessus du cadre de la porte-patio, ce qui empêche l’évacuation d’eau à cet endroit (1.2.41 à 1.2.43).

 

[83] Monsieur Landry a constaté que les fourrures de bois fixées au parement James Hardie furent posées par-dessus un isolant mousse plastique de 2 pouces d’épaisseur au lieu de 1 pouce, comme le recommande le fabricant.

 

 

Dispositifs d’extraction et de prises d’air (apt.102, 202 et 302)

 

[84] Les problèmes suivants sont notamment dénoncés par le témoin: coulisses d’eau et de glaçons, dommages causés par la condensation (302), bois mouillé et noirci en surface, clous rouillés, dommages de moisissures, conduit non scellé, pente inverse d’un conduit d’extraction, revêtement extérieur endommage au pourtour des dispositifs desservant l’appartement 202 (1.3.1. à 1.3.15).

 

[85] Quant aux appartements 104, 204 et 304, l’expert a constaté que les dispositifs de prise d’air et d’extraction présentaient des écoulements d’eau et de glace ainsi que des dommages au revêtement (1.3.17 à 1.3.20). La condensation d’eau se propage sous le contreplaqué du parapet.

 

[86] L’expert avance que la condensation provenant des extracteurs d’air pour les appartements 201 et 301 endommage le déclin et possiblement le bois dans le mur (1.3.22 à 1.3.24).

 

[87] À l’appartement 301, le mode d’assemblage des conduits de prise d’air du côté intérieur du mur présente une enveloppe isolante du conduit non scellée avec le tuyau et ni scellée avec le   pare-vapeur  du mur (1.3.25 à 1.3.27).

 

[88] Le tuyau de la prise d’air affiche de la condensation d’eau compte tenu d’un défaut de scellement avec le pare-vapeur du tuyau et du mur  (1.3.29). Il reconnaît que certains dispositifs d’extraction ne présentent pas de désordres.

 

[89] Au niveau du toit des marquises (Nord et Sud) le solin de la cavité murale des murs n’a pas été installé, de sorte que l’eau provenant de la cavité murale mouille les éléments de la charpente.

 

[90] L’ouverture exploratoire en façade Est dévoile que le solin du mur de fondation présente une pente inverse.  L’enlèvement du contre-solin métallique a permis de constater qu’il y a de l’eau stagnée sur le solin membrané du mur de fondation, ce qui explique les cernes aux planches de latte.

 

[91] L’expert soutient que les parements James Hardie pouvaient apporter des contraintes sur les têtes de fenêtres et possiblement des déformations permanentes des fenêtres.

 

 

CONTRE-INTERROGATOIRE

 

 

[92] Monsieur Landry admet ne pas avoir fait d’étude structurale sur le bâtiment ajoutant qu’il n’est pas ingénieur en structure.

 

[93] Il reconnaît que pour le James Hardie il a vérifié si les fourrures de bois étaient fixées dans le montant structural et aux endroits vérifiés et il conclut qu’elles étaient fixées correctement. Il n’a  fait aucune percée sur une partie courante d’un des murs.

 

[94] Pour ce même revêtement, il indique ceci :

 

 « Dans ce cas, c’est au niveau de la fenestration, c’est le défaut au     niveau du solin, l’eau s’en va derrière le panneau. C’est ce qui affecte principalement le panneau OSB. »  

 

[95] Quant à la charge du parement Nichiha, monsieur Landry prétend que le poids de ce dernier s’additionne au fur et à mesure et jusqu’à sa base. Les paramètres d’installation n’ont pas été respectés et en sus l’isolant est de 2 pouces au lieu d’un pouce. La fixation du parement est toujours en porte-à-faux par rapport aux fixations. Toutefois l’immeuble ne travaille pas suffisamment pour affecter le fini intérieur.

 

[96] Il soutient qu’au niveau des fourrures du revêtement Nichiha, les 1x3 pouces ne sont pas suffisants. C’est uniquement au niveau du mur de fondation que l’on retrouve le support métallique. Pour le reste, c’est par un système d’agrafes que l’on retrouve de place en place.

 

[97] Le Tribunal fait remarquer, à ce stade, que de toutes les photos prises par l’expert qui permettent de voir un parement Nichiha en contre-plongée, démontre l’existence de l’agrafe de joint métallique tout au long ou pratiquement tout au long de ces parements.

 

[98] Monsieur Landry professe que pour déterminer si une fenêtre a trop fléchi, il faut considérer si le volet de cette fenêtre ouvre ou pas. Il semble que cet exercice ou cette vérification n’a pas été faite, ou du moins n’a pas été rapportée.

 

[99] Le témoin n’a pas trouvé dans la documentation ou les spécifications du fabricant une contre-indication spécifique au fait qu’une structure standard ne serait pas apte à supporter la charge des parements. Il souscrit au fait que le revêtement James Hardie ne gondole pas.

 

[100] Me Godin l’amène à reconnaître que lors de son témoignage il recommandait un architecte ou un ingénieur pour évaluer la situation du revêtement Nichiha en fonction de la structure qui ne semble pas avoir été conçue pour ce genre de parement.

 

[101] Pour le revêtement James Hardie, l’expert n’a pas constaté qu’il y aurait eu du mouvement de sorte que les lattes auraient glissé les unes sur les autres, sauf peut-être un appui sur les têtes des fenêtres, mais pour lui il n’y a pas de déflexion visible.

 

[102] Monsieur Landry expose que la fourrure possède sa propre fixation. Elle est normalement fixée aux montants, ce n’est pas toujours le cas pour le Nichiha. Par la suite les agrafes métalliques viennent se fixer uniquement dans la fourrure, verticale ou horizontale. L’important c’est l’encrage de la fourrure. On demande 1 pouce d’encrage dans le montant. L’OSD n’est pas suffisant, car il a 7/8 de pouce d’encrage.

 

[103] Il admet ne pas avoir perçu de mouvements ou d’indices de mouvement de glissement quant à l’isolant. 

 

 

ANDRÉ LETOURNEAU

 

[104] Il indique que la construction a débuté en juillet 2008. Il était sur les lieux tant pour les fondations que pour l’installation des modules. Il explique qu’il y a 3 modules pour chaque unité de condo, plus 2 modules par corridor. Au total, l’immeuble est composé de 42 modules.

 

[105] A la livraison des modules les portes et fenêtres étaient déjà installées. Par la suite, ce fut notamment la pose du revêtement, des hottes et des balcons.

 

[106] Tout comme les autres copropriétaires, il a initialement acheté en copropriété indivise. La conversion en copropriété divise est survenue le 18 mars 2010 (B-12).

 

[107] La répartition des dépenses entre l’Entrepreneur et l’assemblée des copropriétaires s’est faite lors de la première réunion du syndicat au bureau de Me Morin, notaire, le 9 février 2010. À cette réunion les copropriétaires détenaient plus de 50% des côtes.

 

[108] Il « aurait normalement reçu » l’avis de fin des travaux des parties communes (A-21). Il ne peut dire s’il a reçu ou pas le rapport d’inspection préréception (A-18) daté du 2 juin 2010, tout comme A-20, premier avis de fin des travaux et tout autant pour le rapport de l’inspecteur en bâtiment (A-19).

 

 

PREUVE DE L’ENTREPRENEUR

 

JOCELYN CHABOT

 

[109] Monsieur Jocelyn Chabot était le chargé de projet au niveau administratif pour l’Entrepreneur. Yvon Bolduc agissait comme chargé de projet au niveau de la construction. L’Entrepreneur, la compagnie à numéro, a retenu les services d’Index Construction comme sous-contractant pour la pose du revêtement extérieur.

 

[110] Index Construction fut l’un des soumissionnaires qui facturaient à l’heure. Les employés Lévesque et Pelletier auraient reçu une formation pour l’installation des panneaux en fibrociment.

 

[111] Les travaux furent exécutés de février à la mi-juin 2009. Le revêtement Nichiha fut installé initialement, suivi du James Hardie. L’abandon du revêtement en brique découle du fait que la température hivernale arrivait et du coût élevé de ce revêtement. Le dernier condo fut vendu en novembre 2009 à Kevin Grégoire.

 

[112] L’avis de fin des travaux des parties communes (A-21) daté du 10 décembre 2009 fut remis à chaque propriétaire. Pour certains, il fut remis en main propre, pour d’autres il fut transmis par courrier. Lorsqu’il signe l’avis, les travaux sont déjà terminés. Le nom d’Alain Lacasse apparaissant à l’avis (A-21)  était en réalité un futur représentant du syndicat. Aucun copropriétaire ne lui a émis des commentaires quant à la date de la fin des travaux des parties communes qu’il avait transmise par le premier avis.

 

[113] La déclaration de copropriété divise fut enregistrée le 15 mars 2010 (E-1).

 

[114] Il a remis un second avis de fin des travaux des parties communes (A-20), daté du 2 juin 2010, au syndicat et aux copropriétaires, tandis que le formulaire d’inspection préréception (A-18) fut remis ou transmis à tous  les copropriétaires et au syndicat. Il signa ledit formulaire le 15 septembre 2010.

 

[115] Il explique qu’il a signé à deux endroits par inadvertance : « De toute évidence je me suis trompé de ligne » dira-t-il. Il signa une seconde fois au bas en y ajoutant la date du 15 septembre 2010.

 

[116] Lorsque certains courriels font état du resurfaçage de la membrane de la toiture, cela provient du fait qu’il a constaté de petites ondulations de la membrane et il a alors requis la présence du représentant du manufacturier de la membrane, lequel lui suggéra de faire un resurfaçage de toute la toiture au printemps 2014.

 

[117] Le rapport de l’inspecteur en bâtiments (A-18) indiquait au niveau de la toiture « nombreux plis à l’élastomère (à surveiller) ». Cette situation fut corrigée avant le 15 novembre 2010.

 

[118] Contrairement à ce qui était prévu au procès-verbal du 4 octobre 2011 (B-14), il n’a jamais rencontré madame Lacasse ou Ranger relativement aux travaux à effectuer et découlant du rapport d’inspection.

 

[119] À l’automne 2012, il a rencontré 2 représentants de Kaycan, 2 américains (représentants de Nichiha). Ils ont procédé à une « expertise » et il a reçu un « devis » pour faire des travaux de correction. Les employés ont reçu une formation de 2 jours pour la pose du revêtement Nichiha.   Il s’est alors exécuté. D’autres interventions furent faites sur l’immeuble, notamment au niveau d’une porte-patio.

 

[120] Quant à la photo 13-89 du rapport de monsieur Landry, il la décrit ainsi : « il y a une moulure de départ et en haut c’est une moulure métallique de transition qui sert à supporter chaque panneau et ce, pour tout l’immeuble. » Le témoin souligne la présence d’un support métallique important.

 

 

CONTRE-INTERROGATOIRE

 

 

[121] Me Paradis amène le témoin à la pièce B-15, soit le courriel qu’il a transmis au syndicat et à monsieur Gignac. Trois points sont traités, soit la membrane sur la toiture, les panneaux fibrociment imitation brique et le revêtement au-dessus des entrées de garage. Monsieur Chabot insiste pour dire et redire que 2 de ces points étaient en suspens.

 

[122] C’est Yvon Bolduc, son associé, qui supervisait le chantier. Monsieur Chabot avait une certaine connaissance du fonctionnement du plan de garantie mais pas dans tous ses détails. Il a rencontré un représentant de Qualité Habitation au moment de l’accréditation et en d’autres occasions.

 

[123] Les dates du 18 décembre 2009 (A-21) et du 2 juin 2010 (A-18 et A-20) sont attribuées comme dates de fin de travaux, note Me Paradis. Le témoin explique que le 2 juin 2010 est la date de l’avis au syndicat une fois qu’il fut formé, et d’ajouter :

 

« Monsieur le juge, j’ai quand même été très clair là-dessus, que la fin des travaux des parties communes, pour moi, c’est le 10 décembre 2009. Je l’ai écrite 12 fois aux copropriétaires. »

 

[124] Le procureur du Bénéficiaire lui soumet que la date de la fin des travaux pour les parties communes est le 15 novembre 2010, tel qu’il apparaît au formulaire d’inspection préréception (A-18).

 

[125] Monsieur Chabot réplique en identifiant à nouveau le 10 décembre 2009 comme la date de fin des travaux et le 2 juin 2010 la date identifiée par le professionnel du bâtiment, Pierre Bélanger, au formulaire A-18. Il argumente que pour l’inspecteur, les travaux à compléter n’étaient ni urgents ni majeurs de sorte que le 15 novembre 2010 ne peut être la date de fin des travaux.

 

[126] Discutant de la toiture, le témoin affirme avoir reçu la présence du manufacturier de la membrane qui lui a conseillé de la remplacer. L’Entrepreneur s’est exécuté au printemps 2014.

 

[127] Quant aux infiltrations d’eau, la problématique prenait naissance dans le drain du toit. Ce drain fut remplacé.

 

[128] Pour les panneaux en fibrociment, l’Entrepreneur a posé des encrages pour les stabiliser. Il poursuit : « On s’est assuré que les vis devaient prendre dans le stud, en arrière. »

 

[129] Suite à une question de Me Godin, monsieur Chabot précise qu’aucune partie, ni même le professionnel du bâtiment s’est objecté à ce qui a été noté au formulaire d’inspection préréception (A-18) et personne n’a fait état que le document ne pouvait être complété.

 

[130] Questionné par Me Lafrenière relativement au point 4, « Parement extérieur », de la pièce A-18 et A-19, où il est inscrit : « Espacements entre les panneaux de fibrociment (opinion du fabricant ou de l’installateur nécessaire). » monsieur Chabot rappelle qu’il a fait venir deux représentants du fabricant Nichiha. Il n’a pas fait venir des représentants de James Hardie parce qu’il n’en a pas été question, et qu’au surplus, il n’y avait pas cette problématique pour ce dernier revêtement.

 

[131] Sur la question des vis qui n’atteignaient pas leur cible, il soutient qu’au moment de l’installation il n’y avait pas ce manquement. Par contre, cela c’est possiblement produit lors d’interventions subséquentes.

 

 

PREUVE DE L’ADMINISTRATEUR

 

 

MARTIN GIGNAC

 

[132] Monsieur Martin Gignac agit comme conciliateur depuis 6 ans et il travaille dans le domaine de la construction depuis 30 ans. Il fut chargé de projet pendant plusieurs années et estimateur. Il a suivi des projets allant jusqu’à 25 millions de dollars. Il est membre de l’Association des technologues professionnels.

 

[133] Se référant au rapport de conciliation du 19 juillet 2012 (A-1), il explique les informations mises à la première page du rapport.

 

[134] Pour la date du 10 décembre 2009 rattachée à celle de la fin des travaux des parties communes, elle prend son origine dans le formulaire que l’Entrepreneur a transmis à la Garantie et aux copropriétaires. Il fait référence à A-21 qui est l’avis de fin des travaux des parties communes transmis aux parties déjà identifiées.

 

[135] Cette date sert de point de départ pour la computation du délai de 5 ans qui est associé les vices de construction.

 

[136] Il a inscrit le 2 juin 2010 comme date de la réception des parties communes laquelle prend assise sur le rapport d’inspection préréception où il est inscrit par le professionnel du bâtiment, tant en page 1 qu’à la page 3, cette même date.

 

[137] Les réclamations portent les dates de réception par l’Administrateur. Elles peuvent émanées tant du Bénéficiaire que de l’Entrepreneur. Dans le présent cas (A-1), elles sont du 14 mars et 6 avril 2012. Les réclamations sont produites au rapport de conciliation.

 

[138] Revenant au rapport du 19 juillet 2012 (A-1) le point 1 traitant de la toiture est accordé mais il fait  l’objet d’un autre litige.

 

[139] Quant au point 2, à savoir le gondolement du revêtement extérieur, l’étanchéité des joints et l’espacement entre les panneaux de fibrociment imitation brique, le conciliateur donne également raison au Bénéficiaire.

 

[140] Il en est tout autant pour l’écoulement de l’eau derrière et aux extrémités des demis-toits et des garages, causant la désagrégation du revêtement, étudié au point 3, pour lequel le conciliateur donne raison au Bénéficiaire.

 

[141] Le Tribunal relève qu’au procès-verbal de la conférence téléphonique préparatoire du 2 mai 2014, seuls ces deux points demeuraient litigieux pour l’arbitrage. Au procès-verbal de la conférence téléphonique du 2 décembre 2015, le Bénéficiaire ajoutait les points 8 à 14. Toutefois, le procureur du Bénéficiaire délaissa ces derniers points à l’audition.

 

[142] Monsieur Gignac signe un second rapport le 22 août 2014,  identifié comme « Addenda » (A-2).

 

[143] Le point 8 du rapport A-2 traite de la perte d’étanchéité de la fenêtre du côté Sud-Ouest entre le premier et le second étage. Le conciliateur refuse ce point alléguant que le syndicat n’a pas démontré la situation. Le même résultat est inscrit pour le point 9 qui traite de fils électriques découverts.

 

[144] Au point 10, où l’on fait état que les moustiquaires sont difficiles à ouvrir, le conciliateur indique qu’il ne peut s’agir de vice caché. Le point 11 qui traite de la moulure de l’imposte au-dessus de la porte qui est décrochée et du manque de vis sur le cadre reçoit la même conclusion.

 

[145] Le point 12 parle d’une rampe extérieure. Aucune preuve n’a été apportée pour démontrer la nécessité d’une telle rampe.

 

[146] Au point 13 du même rapport, on note que la hotte de cuisine et l’échangeur d’air aux condos 201 et 202 furent refusés alors, mais ils seront reconnus plus tard par le conciliateur.

 

[147] Le point 14 discute de la finition de Placoplâtre au condo 204. Ce point fut refusé car il est attribuable au comportement normal des matériaux.

 

[148] Le témoin soumet que l’Entrepreneur fit venir des représentants de la compagnie Nichiha pour obtenir des méthodes adéquates de travail afin d’apporter des correctifs au niveau des panneaux. Des travaux de rectification prirent place à l’automne 2013. Le Bénéficiaire lui ayant signalé la mauvaise exécution, il alla sur les lieux pour constater ce fait et avisa aussitôt l’Entrepreneur de s’exécuter.

 

[149] Le 6 janvier 2014, le conciliateur transmet au Bénéficiaire le Guide de réparation des panneaux imitation de brique lequel avait été fourni à l’Entrepreneur. Le Bénéficiaire toujours insatisfait  achemine à monsieur Gignac des photos pour tenter de le convaincre.

 

[150] Le 16 avril 2014, le conciliateur rend une autre décision (A-6), suite à la réclamation du 10 janvier 2014 qui traite au point 1 de deux sorties de hotte au 2e étage. Le point est reconnu par monsieur Gignac. Le second point qui s’attaque au parement en fibrociment James Hardie n’a pas été retenu car il n’a pas été dénoncé à titre de vice caché « dans les trois ans de la réception des parties communes ». Il faut remarquer que la formulation empruntée par le conciliateur dans son rapport ne respecte pas les termes ou l’esprit de l’article 10 du Règlement.

 

[151] Monsieur Gignac ajoute l’opinion suivante :

 

« Concrètement, j’ai vérifié ce point, les espacements pour moi, j’ai pas été plus loin, pour moi c’est une malfaçon non apparente, si les joints s’écartillent au niveau d’un panneau James Hardie et c’est pas un vice caché.

 

...Ce n’est pas un vice de construction car le bâtiment n’est pas en péril. C’est juste des joints qui sont ouverts, 2 panneaux de fibrociment. »

 

[152] Le 17 avril 2014, le président du syndicat transmet un courriel à monsieur Gignac dans lequel il relie le point 4 du formulaire d’inspection préréception (A-18) aux panneaux de fibrociment gris et soutient par conséquent les deux parements devraient être reconnus par ce dernier (A-9).

 

[153] Le 25 août 2014, Florian Auger, président du syndicat signifiait une nouvelle réclamation (A-10) à l’Administrateur en reprenant en partie certains passages du rapport du 18 juin 2014 de l’expert Michel Landry.

 

[154] Les points reconnus par le conciliateur à son rapport sont ainsi identifiés (A-12):

 

Points reconnus : travaux à effectuer avant le 15 juin 2015

 

1. Parement extérieur de type imitation de brique sur les quatre (4)       

    façades : solin d’acier et finition.    

2. Marquise au-dessus des portes de garage du côté droit et gauche

    du bâtiment : étanchéité.

 

Points non reconnus :

 

3.  Parement de type « Fibrociment » de couleur gris et os : solin.

4. Mur extérieur : lattage.

5. Mur extérieur : linteaux.

6. Deux (2) fenêtres extérieures des cages d’escalier : étanchéité.

 

[155] Pour le point 1, il a constaté que des solins avaient été posés en sens inverse et de plus il n’y avait pas d’espace au bas du parement lequel s’appuyait sur le solin contrairement aux exigences du fabricant Nichiha. Cette situation se retrouvait tout autant au haut des ouvertures. Il y a pour ce point une continuité avec le rapport du 22 août 2012.

 

[156] Le point 2 concernant tous les revêtements au-dessus des marquises, incluant les agrafes métalliques, lesquels furent coupées, faisant en sorte que le parement, peu importe sa couleur, n’est plus maintenu ou supporté à ces endroits, est retenu par le conciliateur.

 

[157] Le point 3 traitant de l’absence de linteau au-dessus des fenêtres, ainsi que toutes les ouvertures dans la section du parement James Hardie, n’a pas été considéré comme un vice de construction d’autant plus que la situation était visible.

 

[158] Le point 4 indique que le lattage (James Hardie) de 1x3 n’est pas toujours fixé vis-à-vis les colombages des murs. Pour monsieur Gignac, il n’y a aucun vice, c’est adéquatement cloué et il rappelle que monsieur Landry l’a lui-même confirmé.

 

[159] Il y a eu désistement du point 5 par le Bénéficiaire.

 

[160] Pour l’étanchéité de deux fenêtres extérieures des cages d’escalier traitée au point 6, celui-ci n’est pas reconnu considérant l’absence d’humidité à l’arrière du mur. La situation découle du fait que la fenêtre aurait été ouverte à l’occasion et on a probablement omis de la fermer.

 

[161] Relativement au rapport de conciliation du 27 août 2015 (A-15) qui traite du rapport du consultant Sylvain Ebacher, tous les points sont réfutés par monsieur Gignac sur la base qu’ils sont des malfaçons apparentes ou des vices cachés et conséquemment le délai de trois ans est expiré.

 

 

CONTRE-INTERROGATOIRE

 

 

[162] Monsieur Gignac n’avait pas d’expérience dans la pose du revêtement James Hardie. Par contre, il fait valoir qu’il a été chargé de projet sur des ouvrages employant le revêtement Nichiha. Aussi, dans le cadre de la garantie Qualité Habitation du Québec il a expertisé à quelques reprises le revêtement fibrociment James Hardie.

 

[163] Il était au fait de la date de la première assemblée des copropriétaires (9 février 2010) tout comme  la date de l’enregistrement de la copropriété au Bureau des publicités.

 

[164] Il arrêta la date du 10 décembre 2009 comme date de fin des travaux des parties communes. Il reconnaît que le syndicat n’était pas constitué, mais les formulaires de fin de travaux avaient été transmis à chaque copropriétaire. Il ajoute que l’inspection par un professionnel du bâtiment n’est pas obligatoire et de fait certains syndicats ne s’en prévalent pas.

 

[165] Traitant de l’étanchéité de la toiture (A-2, point 1) il considère qu’avec sa longue expérience il était en mesure de déterminer qu’il existait un problème au niveau de la toiture. Il s’agissait d’une membrane déficiente et d’une problématique de drainage.

 

[166] Relativement au gondolement, l’espacement et l’étanchéité des joints, il a constaté le problème. Il appartenait alors à l’Entrepreneur de corriger le problème.

 

[167] Il souscrit au fait qu’il  n’a pas inspecté le revêtement James Hardie le 7 juin 2012, lors de sa visite en compagnie des représentants du syndicat et ce, parce qu’il avait été convenu par courriels transmis par le syndicat que seul le revêtement Nichiha était en cause .

 

[168] Quant aux réparations ou correctifs apportés par l’Entrepreneur, il souligne qu’il ne lui appartient pas de donner à ce dernier la méthode de travail pour apporter les correctifs reconnus.

 

[169] Me Paradis le questionne ainsi :

 

Q. : Comment vous déterminez la gravité du vice, soit un vice caché

       ou un vice de construction, si vous ne faites pas d’investigation ?

R. : Ça se voit à l’oeil. À savoir s’il y a des infiltrations d’eau qui

       entre à l’intérieur du bâtiment. Pour le James Hardie on ne voit

       pas de défaut comme le montre le Nichiha.   

       Dans le cas présent on voit que le solin était mal fait et mal posé

       à la hauteur des marquises.

Q. : Au-dessus des fenêtres ?

R. : Je répète, c’est une chose visible, c’est une malfaçon apparente.

Q. : Selon vous, la réfection complète d’un mur ce n’est pas un vice

       de construction ?

R. : Non.

 

[170] Pour les sorties des sécheuses et autres sorties, il s’agit pour lui d’un vice caché car il y a un manque d’isolation.

 

[171] Le procureur du Bénéficiaire le confronta à l’un des problèmes soulevé dans le rapport du 12 mai 2015 de monsieur Landry (page 1) qui est ainsi libellé :

 

« Les fourrures verticales supportant le revêtement de clin sont généralement fixées sur les montants de la structure des murs, cependant la fourrure de bois est posée sur un isolant de mousse plastique de 2 pouces d’épaisseur, alors que le fabricant recommande que l’isolant extérieur ne dépasse pas 1 pouce  (25 mm) (voir page 1 de l’ANNEXE 2). »

 

[172] On lui demande s’il s’agit d’un problème de solin. Monsieur Gignac rétorque :

 

« Non, c’est complètement opposé des solins, ça c’est pas un problème. Qu’il y ait un isolant de 2´´ ou 1´´, la latte qui est posée en avant, tant que le clou traverse au moins 1 pouce dans le montant en arrière, ça fait la job. Le bâtiment ne descendra pas, c’est sûr. Il a confirmé que la latte était posée dans les montants. »

 

 

CONTRE PREUVE

 

MCHEL LANDRY

 

 

[173] Discutant de l’écoulement d’eau sous la marquise, il conclut qu’il « faut enlever le revêtement pour poser un solin qui n’a pas été posé. »

 

[174] Il soutient qu’il faudra changer de revêtement pour le Nichiha considérant la différence dans la couleur et encore faut-il que le produit existe comme tel.

 

[175] Pour ce qui est des clous ou des agrafes il mentionne que le Code national du bâtiment exige qu’ils soient protégés contre la corrosion.

 

 

ARGUMENTATION DES PARTIES

 

 

BÉNÉFICIAIRE

 

[176] Me Michel Paradis soumet qu’il faut analyser les demandes d’arbitrage du Bénéficiaire sous trois angles, à savoir le recouvrement en fibrociment du fabricant Nichiha, le recouvrement en fibrociment  du fabricant James Hardie et finalement les dérogations aux normes de sécurité incendie proposées par le rapport de monsieur Sylvain Ebacher.

 

[177] Quant aux deux premiers sujets il s’en remet aux expertises de monsieur Michel Landry, lesquelles sont du 18 juin 2014 et du 12 mai 2015. L’opinion de celui-ci doit primer sur celle de l’inspecteur concernant les effets de l’insuffisance de supports et sur la solidité du bâtiment.

 

[178] Il soumet que l’Entrepreneur a une obligation de résultat. De plus, le Bénéficiaire n’est pas un expert et que la véritable découverte des vices de construction est survenue au moment où le Bénéficiaire a pris connaissance des expertises soumises.

 

[179] Le procureur soumet que le notaire Morin a créé initialement une propriété indivise afin d’accélérer  le processus en vue d’en arriver à la création d’une propriété divise et ce, à cause d’une certaine problématique quant à la subdivision du cadastre. Selon le procureur, ceci fut fait sans que les copropriétaires soient informés. De cette situation il en découle qu’il ne peut y avoir de fin de travaux avant la prise de contrôle par le Syndicat. Celle-ci prend place à la première assemblée des copropriétaires, soit en date du 9 février 2010.

 

[180] Me Paradis soutient que lorsque le Bénéficiaire, par l’intermédiaire de sa présidente, Colombe Laccase, dénonçait notamment le 6 avril 2012 à l’Entrepreneur et à la Garantie  le gonflement du revêtement extérieur, l’étanchéité des joints à refaire et l’espacement entre les panneaux de fibrociment, elle ciblait alors tant le revêtement de fibrociment Nichiha que le James Hardie

 

[181] Revenant à la date de la fin des travaux, après l’avoir arrêtée au 9 février 2010, il la situe le 15 novembre 2010, date indiquée au formulaire d’inspection préréception (A-18), où il est écrit à « Date prévue de fin des travaux : le 15 novembre 2010. » Dans un autre temps, il avancera que la fin des travaux n’aurait pas encore abouti.

 

[182] Pour le revêtement extérieur Nichiha, monsieur Landry considère qu’il comporte des vices d’installation graves qui affectent la stabilité du parement, car les fourrures de bois ne sont pas fixées dans les montants de la charpente. Ce problème est d’ordre structural et explique le mauvais comportement du revêtement extérieur, soit le gondolement et la dislocation des panneaux de fibrociment.

 

[183] L’expert recommande la démolition et l’installation d’un nouveau revêtement extérieur et la correction des dommages incluant les correctifs aux systèmes de pare-air et des solins.

 

[184] La découverte et la dénonciation ont été faites dans le délai prescrit à l’article 10 du Règlement.

 

[185] L'expertise examinant le revêtement en fibrociment James Hardie conclut dans le même sens, soit l’enlèvement complet de ce revêtement. Monsieur Landry s’est appuyé sur l’absence de solin rejet d’eau à la tête de toute la fenestration, les défauts qui affectent les dispositifs d’extraction d’air, la pente du solin au niveau des murs de fondation et le ruban d’étanchéité pour déterminer qu’il s’agissait d’un vice de construction.

 

[186] Le procureur réitère que dans ce cas également, la découverte et la dénonciation ont été faites dans le délai imparti.

 

 

ENTREPRENEUR

 

[187] Me Hugo Lafrenière réfute la prétention du Bénéficiaire quant à savoir que la lettre de madame Lacasse du 6 août 2012 couvraient les deux revêtements en rappelant que monsieur Gignac, le conciliateur, a confirmé que lors de la visite du 7 juin 2012 aucun membre du syndicat n’est intervenu relativement au revêtement James Hardie.

 

[188] Au rapport de l’inspecteur en bâtiment (A-16), celui-ci utilise au point 4, au poste maçonnerie, joints, chantepleures, les mots « Espacements entre les panneaux de fibrociment (opinion du fabricant ou de l’installateur) », ce qui fait dire au procureur que l’on traite ici de brique et que seul le revêtement Nichiha présente une ressemblance à ce matériau de construction.

 

[189] La date de fin des travaux, selon la définition donnée au Règlement à l’article 8 se veut la date où les travaux convenus par écrit avec le Bénéficiaire et relatifs au bâtiment sont exécutés et que celui-ci est en état de servir. À la « note au professionnel » au même document, il est dit :

 

« Note au professionnel.

Le professionnel peut compléter la Déclaration de réception des parties communes du bâtiment s’il reste des travaux à parachever dans les parties communes du bâtiment autres que des menus travaux. »

 

[190] La réception des parties communes se fait lorsque l’avis de la fin des travaux a été envoyé. La fin des travaux se situe au 10 décembre 2009. Subsidiairement, si l’arbitre ne retient pas cette date, il faudra reconnaitre que l’Entrepreneur a signifié un nouvel avis de  fin des travaux le 2 juin 2010, dès lors, cette dernière date pourrait être retenue.

 

[191] Il expose que le Bénéficiaire se montre contradictoire. Dans un premier temps, il veut se prévaloir du plan de garantie et en même temps il a plaidé que la fin des travaux n’était pas encore consommée.

 

[192] Discutant du rapport Ebasher, le procureur rappelle que deux points ne seraient pas apparents soit la compartimentation des vides de construction (point 3.2.2) lesquels ne sont pas recoupés par des coupe-feu comme l’exige la section 9.10.15 du Code de la construction (CNB 1995) et la gaine technique verticale. Pour le premier point, les matériaux exposés à l’intérieur de ces vides sont de bois et de panneaux d’aggloméré, des matériaux ayant un indice de propagation des flammes supérieur à 25. Me Lafrenière plaide qu’une seule ouverture fut faite et l’espace est de 1-11/2  pouce. L’ouverture se situe entre les appartements 301 et 302 et on a inséré une lampe de poche, ce qui ne saurait être concluant tant pour cet endroit que pour l’ensemble du bâtiment.

 

[193] Pour les autres points du rapport, ils sont apparents et qui plus est l’inspecteur Bélanger ne les avait pas notés.

 

[194] Pour le rapport du 18 juin 2014 de monsieur Landry, le procureur trouve concluant le fait que le Syndicat ne lui avait pas confié à cette époque mandat pour le revêtement James Hardie. Il est évident que le premier rapport du conciliateur ne touchait aucunement ce revêtement.

 

[195] Monsieur Landry a confirmé qu’il n’y avait pas eu d’étude de structure. Il ne croyait pas que c’était le retrait du bois de la structure lequel devait être sec à la livraison, qui aurait entraîné le retrait de la structure. Pourtant dans son rapport du 12 mai 2015, il écrivait au point 1.2 :

 

« Nous avons constaté de façon générale que les jambages des fenêtres étaient déformés et nous avons relevé à plusieurs endroits que le revêtement de clin était en contact avec le dessus de la tête des fenêtres. Le retrait initial de la structure de bois a pu entraîner des efforts en compression sur les fenêtres, ce qui expliquerait la déformation des jambages et le fait que l’utilisation des battants soit rendue plus difficile. »

                                    (Je souligne)         

[196] Quant à l’espacement entre les panneaux, le procureur avance qu’il y aura toujours un certain joint vertical et horizontal visible entre les panneaux. C’est de la nature même du principe de panneaux.

 

[197] La prétention de l’expert est à l’effet que les fourrures doivent être plus épaisses i.e. 11/4 ´´x 5´´ (p.3, annexe 15). Toutefois le guide utilisé est de 2012 alors que l’année de construction est 2009. De plus, le Code du bâtiment n’apporte aucune norme pour ce type de revêtement. La seule preuve qui fut livrée repose sur le témoignage de l’Entrepreneur qui indique avoir reçu une formation de Kaycan.

 

[198] Me Lafrenière discute de l’appui des panneaux sur la tête des fenêtres en retenant la photo 12-76. Il est contradictoire de prétendre que la problématique du revêtement est confirmée par cette situation d’appui, alors que la photo présente une ouverture au-dessus de la fenêtre. Aussi, il faut retenir que tous les panneaux prennent appui sur des agrafes métalliques. Les photos qui permettent de le constater le confirment. Alors que l’expert a fait état de pourriture lors de son témoignage, aucune photo ne démontre une telle situation.

 

[199] En l’espèce, il ne saurait s’agir de perte partielle du bâtiment, c’est le parement qui est en cause selon monsieur Landry. La structure n’est pas menacée d’effondrement. Ce dernier n’a pas constaté d’aggravation de la situation entre 2014 et 2016.

 

[200] Quant au revêtement James Hardie, le procureur signale qu’il n’y a pas de gondolement. L’expert a reconnu que la fourrure de bois était bien fixée (photo 1.2.9). Une seule allège de fenêtre (1.2.16) a été pointée par l’expert montrant une faible courbure et curieusement elle est au bas de la celle-ci.

 

[201] Le conduit d’extraction (photo 1.3.14) montre une pente inverse, mais l’expert note qu’il n’y a pas de dommage.

 

[202] Le procureur reconnaît qu’au niveau de fenêtres il existe une problématique d’humidité. Aussi, au-dessus du mur de fondation le solin montre une contre-pente et finalement un ruban pare-air aurait dû être posé au lieu du ruban pare-vapeur.

 

[203] Le témoignage de l’inspecteur Martin Gignac a révélé que le problème au-dessus du garage en était un d’étanchéité au niveau du solinage et non de l’espacement des joints de planches James Hardie. Il a aussi soutenu qu’au niveau des dispositifs d’extraction d’air l’isolation était perfectible.

 

[204] Relativement aux différents rapports de conciliation, le procureur de l’Entrepreneur soumet les arguments suivants.

 

[205] La demande d’arbitrage quant au rapport de conciliation du 19 juillet 2012 (A-1) est hors délai puisqu’elle excède le délai de 30 jours. De fait, elle est datée du 21 décembre 2013.

 

[206] Quant au rapport du 16 avril 2014 (A-6), le point 2 (parement extérieur de type fibrociment du fabricant James Hardie) doit être considéré comme un vice caché si on considère que la fin des travaux prend place le 2 juin 2010. Il ne peut s’agir ici d’un vice de construction, le syndicat ayant simplement indiqué « quant aux feuilles de couleur grises, elles sont décollées du bâtiment et les joints sont ouverts. »

 

[207] Quant au rapport du 24 octobre 2014 (A-12), la dénonciation fut faite le 18 juin 2014, ce qui est au-delà du délai de trois ans attribuables au vice caché. L’expert conclut à des vices de construction observés sur le parement de fibrociment gris et l’absence de linteau. Pour le procureur il s’agit plutôt de problèmes précis qui furent notés et qui ne rejoignent pas le niveau de vice de construction.

 

[208] Le rapport du 27 août 2015 de monsieur Ebacher expose des problématiques qui pour la plupart étaient visibles ou peuvent être des vices cachés. Dans les deux cas la dénonciation est au-delà des de trois ans, par conséquent les points présentés ne peuvent être retenus.

 

 

ADMINISTRATEUR

 

[209] Me François-Olivier Godin rappelle qu’initialement les unités furent vendues sous la forme d’une copropriété indivise. La prise de possession par les copropriétaires se situe entre les mois d’avril et juin 2009. Le 18 mars 2010 on passe à une copropriété divise.

 

[210] L’Entrepreneur avait transmis en décembre 2009 un avis de fin des travaux. Il n’avait pas à récidiver car les personnes étaient déjà propriétaires et personne ne s’est opposée. Aucune preuve ne fut présentée établissant que les travaux n’étaient pas complétés.

 

[211] Le 9 février 2010 le syndicat est formé lors de la première assemblée des copropriétaires. Toutefois la date retenue par le conciliateur Martin Gignac, soit le 10 décembre 2009 est la bonne date pour la fin des travaux. De toutes les demandes d’arbitrage, aucune, à l’exception de celle de Me Paradis du 28 août 2015, ne conteste la date de la fin des travaux. Il était devenu trop tard pour le Bénéficiaire d’argumenter sur cette date. Le soussigné a déjà tranché dans le sens contraire à cet argument.

 

[212] Traitant du revêtement Nichiha, Me Godin soumet que dès le premier rapport la Garantie a reconnu la problématique et que des interventions étaient requises. Qui plus est, le conciliateur, dans son rapport du 24 octobre 2014 (A-12, p.25) rappelle dans sa conclusion que l’Entrepreneur ne s’est pas exécuté.

 

[213] L’obligation de l’Entrepreneur en est une de résultat et il se doit de corriger en fonction des règles de l’art et des usages courants du marché.

 

[214] En observant la pièce B-9 (4 photos), on constate que les ouvertures qui furent faites sur l’entièreté de l’immeuble se retrouvent toujours et uniquement au niveau du solin, des fenêtres, de la fondation ou des bouches de sortie. L’expert Landry n’a procédé à aucune ouverture dans les murs, soit au milieu des murs, entre les ouvertures. C’était incontournable et nécessaire d’y avoir recours pour conclure à un vice de construction, pour justifier sa conclusion i.e. qu’il faut tout refaire.

 

[215] Les expertises de monsieur Landry n’atteignent pas le fardeau de preuve nécessaire pour conclure à la réfection complète des parements.

 

[216] Il n’y a pas de confusion possible quant à savoir si initialement le syndicat a voulu inclure ou pas les deux types de revêtements. La preuve non contredite du témoignage du conciliateur doit être retenue.

 

[217] Quant aux espacements dénoncés dans le rapport préréception (A-18), sous la rubrique maçonnerie, nul doute qu’on ciblait uniquement le parement imitation de brique Nichiha.

 

[218] La manifestation du syndicat ne prend place, pour le revêtement James Hardie, que dans la correspondance du 22 décembre 2013 (D-4) où il est dit :

 

« ...suite aux travaux...

non avons aussi constaté ...de couleur os »

 

[219] Si la réception des parties communes remonte au 2 juin 2010, la réclamation concernant le revêtement fibrociment James Hardie doit être traitée comme un vice de construction pour recevoir la couverture de la Garantie parce que la dénonciation fut faite le 25 avril 2014. Pour ce revêtement il ne peut s’agir d’un vice de construction, car on rapporte uniquement au conciliateur qu’il y a des espacements, des gonflements.

 

[220] Me Godin reconnaît qu’il y a des problèmes au niveau du James Hardie, spécifiant le solinage, les ouvertures et les hottes. Dès lors, en quoi le bâtiment peut-il être en péril au niveau de la structure ? Poser la question c’est y répondre.

 

[221] Le procureur soumet une lettre datée du 29 mars 2016 et signé par Me Karine Poulin, laquelle expose ici :

 

« Objet : Dispositif de la sentence

 

 Jean-François Joyal et Catherine Roy c. 3858081 Canada Inc. (Les Maisons Dominus) et La Garantie Habitation du Québec Inc.

Notre dossier : G1115-65

GAMM : 2015-16-015

Dossier QH : 0002-103

 

Messieurs,

 

Suivant l’audition tenue dans le dossier en titre le 18 février 2016, et tel que demandé, je vous informe que la sentence rejettera la demande d’arbitrage des Bénéficiaires. Le Tribunal estime que les Bénéficiaires ne se sont pas acquittés de leur fardeau de la preuve de démontrer au Tribunal d’arbitrage que le problème dénoncé constitue un vice de construction au sens du Règlement et de l’article 2118 du Code civil du Québec.

 

Il ressort de la preuve que tant l’expert des Bénéficiaires que l’inspecteur-conciliateur sont en accord sur le fait qu’il y a absence de ventilation suffisante derrière le parement extérieur. Cependant, le désaccord se situe dans la qualification de ce problème, à savoir s’il s’agit d’un vice caché ou d’un vice de construction.

 

De l’avis du Tribunal, le vice dénoncé est certes important, désagréable et de nature à inquiéter les Bénéficiaires. Cependant, selon la preuve soumise, celui-ci n’est pas de nature à mettre en péril la pérennité de l’immeuble.

 

Les motifs précis et détaillés vous seront communiqués dans la sentence qui sera transmise au GAMM ultérieurement.

Recevez, Messieurs, l’expression de mes sentiments distingués.

 

                                                                       POULIN AVOCATS

                                                                        Me  Karine Poulin, arbitre »

 

                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                       

[222] Quant au rapport Ebacher, il soutient dans un premier temps que le délai dénonciation est tardif. Il ne s’agit aucunement de vices de construction.

 

[223] Toutefois, si le Tribunal devait mettre de côté cet argument, il faudrait retenir qu’il appartenait à monsieur Bélanger, le professionnel en bâtiment, engagé par le Bénéficiaire, d’en être tenu responsable.

 

[224] Quant aux ouvertures entre les espaces des cubes, le Bénéficiaire n’a pas présenté une preuve prépondérante. On a procédé qu’à une seule ouverture, pour les autres espaces on n’a aucune preuve.

 

 

ANALYSE ET DÉCISION

 

 

[225] Puisque le Bénéficiaire conteste le bien-fondé des décisions de l’Administrateur, le fardeau de preuve repose sur ses épaules. Quel est le niveau de preuve à offrir pour le Bénéficiaire ? À l’article 2803 du Code civil du Québec, le législateur indique :

                   

2803 - Celui qui veut faire valoir un droit doit prouver les faits qui soutiennent sa prétention.

 

[226] L’article 2804 C.c.Q. définit ainsi la preuve prépondérante.

 

2804- La preuve qui rend l’existence d’un fait plus probable que son inexistence est suffisante, à moins que la loi n’exige une preuve plus convaincante.

 

[227] Il suffit pour le Bénéficiaire, en l’espèce, que sa preuve soit prépondérante. La Cour suprême, dans l’arrêt Montréal Tramways Co. c. Léveillé[1], nous enseignait :

 

«This does not mean that he must demonstrate his case. The more probable conclusion is that for which he contends, and there is anything pointing to it, then there is evidence for a court to act upon. »

 

[228]  Plus tard, le plus haut tribunal du pays traitait ainsi de la norme applicable en matière civile laquelle se veut similaire à celle en matière réglementaire[2] :

 

 «  En conséquence, je suis d’avis de confirmer que dans une instance civile, une seule norme de preuve s’applique, celle de la prépondérance des probabilités. Dans toute affaire civile, le juge du procès doit examiner la preuve pertinente attentivement pour déterminer si, selon toute vraisemblance, le fait allégué a eu lieu (...) »

 

[229] Les tribunaux doivent souvent agir en pesant les probabilités. Rien ne peut être mathématiquement prouvé[3]. La décision doit être rendue judiciairement et par conséquent en conformité aux règles de preuve généralement admises devant les tribunaux. Le Règlement étant d’ordre public, l’arbitre ne peut décider par complaisance ou par le fait que la preuve présentée par l’une des parties se veut sympathique.

 

 [230] Il convient de souligner le droit applicable dans le cas où le Bénéficiaire dénonce des malfaçons, des vices cachés ou des vices de construction ou de réalisation. Le législateur l’a ainsi formulé à l’article 10 du Règlement :

 

10. La garantie d’un plan dans le cas de manquement de l’entrepreneur à ses obligations légales ou contractuelles après la réception du bâtiment doit couvrir :

...

 

4° la réparation des vices cachés au sens de l’article 1726 ou de l’article 2103 du Code civil qui sont découverts dans les 3 ans suivant la réception du bâtiment et dénoncés, par écrit, à l’entrepreneur et à l’administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte des vices cachés au sens de l’article 1739 du Code civil ;

 

5° la réparation des vices de conception, de construction ou de réalisation et des vices du sol, au sens de l’article 2118 du Code civil, qui apparaissent dans les 5 ans suivant la fin des travaux et dénoncés, par écrit, à l’entrepreneur et à l’administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte ou survenance du vice ou, en cas de vices ou de pertes graduelles, de leur première manifestation.

                                                                  (Je souligne)

 

[231] L’article 1739 du C.c.Q. auquel réfère le Règlement stipule :

 

1739. L’acheteur qui constate que le bien est atteint d’un vice doit, par écrit, le dénoncer au vendeur dans un délai raisonnable depuis sa découverte. Ce délai commence à courir, lorsque le vice apparaît graduellement, du jour où l’acheteur a pu en soupçonner la gravité et l’étendue.

                                                                 (Je souligne)

 

[232] Ajoutons que le délai de six mois entraîne la déchéance du recours. L’article 2878 C.c.Q. le confirme :

 

2878. Le tribunal ne peut suppléer d’office le moyen résultant de la prescription. Toutefois, le tribunal doit déclarer d’office la déchéance du recours, lorsque celle-ci est prévue par la loi. Cette déchéance ne se présume pas, elle résulte d’un texte exprès.

(Je souligne)

 

[233] Faut-il rappeler que le rôle de l’arbitre est d’analyser la preuve soumise quant à un différend découlant d’une décision du conciliateur (Administrateur) touchant une dénonciation et, par conséquent, de reconnaître ou pas si ce dernier a correctement analysé la dénonciation dans le cadre de la Garantie et, par voie de conséquence, si l’Entrepreneur a manqué à ses obligations tant contractuelles que légales afin de circonscrire la couverture de la Garantie.

 

 

DATE DE FIN DES TRAVAUX

 

 

[234] Le Tribunal joue un rôle d’interprète du droit, ce qui ne lui permet pas de créer des normes. Les interventions en équité doivent s’appuyer sur des balises qu’on pourrait les regrouper ainsi. D’abord, il faut respecter l’intention du législateur, puis évaluer la gravité du préjudice et déterminer s’il est opportun d’y déroger et finalement il ne doit pas y avoir une disproportion au niveau des conséquences.

 

[235] Trois dates furent soumises quant à la fin des travaux. Je retiendrai le 15 novembre 2010 pour le Bénéficiaire, le 10 décembre 2009 pour l’Entrepreneur et l’Administrateur et ultimement le 2 juin 2010 pour ces derniers.

 

[236] Les faits non contestés se résument ainsi. Le 10 décembre 2009, l’Entrepreneur transmet un premier avis de fin des travaux. La première assemblée des copropriétaires prend place le 9 février 2010. Le formulaire d’inspection préréception (A-18) est signé le 15 septembre 2010 par le professionnel du bâtiment, Pierre Bélanger, par Jocelyn Chabot représentant l’Entrepreneur et par le représentant du syndicat. Ce document établit la date de fin des travaux au 2 juin 2006. Le Tribunal rapporte à nouveau une partie du texte intitulé « Note au professionnel » incorporée au formulaire :

 

« Le professionnel ne peut compléter la Déclaration de réception des parties communes du bâtiment s’il reste des travaux à parachever dans les parties communes du bâtiment autres que des menus travaux. »

(Je souligne)

 

[237] Plus loin, au même document, se trouve la « Déclaration de réception des parties communes du bâtiment » :

 

« Le professionnel du bâtiment déclare :

Que les travaux relatifs aux parties communes du bâtiment sont terminés, sous réserve de travaux à corriger ou de menus travaux à compléter identifiés sur la présente liste, et que le bâtiment est en état de servir conformément à l’usage auquel il a été destiné. »

(Je souligne)

 

[238] La fin des travaux des parties communes est prévue et définie à l’article 25 du Règlement qui stipule à la sous-section « Couverture de la garantie » :

 

« 25. Pour l’application de la présente sous-section, à moins que le contexte n’indique un sens différent, on entend par :

….

« fin des travaux des parties communes » : la date à laquelle tous les travaux de l’entrepreneur convenus par écrit avec le bénéficiaire et relatifs aux parties communes sont exécutés et le bâtiment est en état de servir conformément à l’usage auquel on le destine. »

 

[239] La transmission de cet avis fut faite initialement le 10 décembre 2009. À cette date le Syndicat du 18 Impasse Huet n’avait aucune existence. L’Entrepreneur ne pouvait certainement pas transmettre cet avis faute de bénéficiaire existant. Monsieur Chabot reconnaissait lui-même cette défaillance en fournissant le 2 juin 2010 un second avis de fin des travaux des parties communes au Bénéficiaire, à savoir le syndicat et aux copropriétaires.

 

[240] L’ancien juge en chef de notre plus haut Tribunal, le juge Lamer écrivait dans l’arrêt S. Schachter  c. Canada[4] , à la page 683 :

 

« Lorsque l’on détermine s’il faut donner une interprétation large à un texte législatif, la question n’est pas de savoir si les tribunaux peuvent prendre des décisions qui entraînent des répercussions de nature financière, mais bien jusqu’à quel point il est de circonstance de le faire. »

 

[241] La juge Deschamps dans Dikranian c. Québec (Procureur général)[5] traitait ainsi du pouvoir conféré aux tribunaux:

 

« Le législateur est libre d’énoncer dans ses lois des dispositions qui peuvent paraître dures. Il n’appartient pas aux tribunaux de s’immiscer dans le processus législatif . »

 

[242] Le législateur s’est exprimé clairement et il n’a pas parlé pour rien dire. Il impose à un entrepreneur de transmettre un avis de fin des travaux en autant que le Bénéficiaire existe.

 

[243] La définition que le Règlement donne à l’article 25 pour « fin des travaux des parties communes » exige que deux éléments soient présents. Dans un premier temps il faut que tous les travaux de l’entrepreneur convenus par écrit avec le Bénéficiaire doivent être exécutés et dans un second temps que le bâtiment soit en état de servir conformément à l’usage auquel on le destine.

 

[244] Cette date ayant été déterminée, soit le 2 juin 2010, il est impératif de discuter et de déterminer l’étape de la réception des parties communes.

 

[245] La réception des parties communes d’une copropriété et une étape bien encadrée et qui donne effet à des couvertures, lesquelles reposent sur des détails extinctifs qui courent dès l’accomplissement de cette étape.

 

[246] Le Règlement, à l’article 33, structure le processus de réception ainsi :

 

"33. Chaque partie privative visée par la garantie doit être inspectée avant la réception. Cette inspection doit être effectuée conjointement par l’entrepreneur et le bénéficiaire à partir d’une liste préétablie d’éléments à vérifier fournie par l’administrateur. Le bénéficiaire peut être assisté par une personne de son choix.

 

L’inspection doit être différée lorsque la réception de la partie privative intervient après la fin des travaux des parties communes.

 

Les parties communes visées par la garantie doivent être inspectées avant leur réception. Cette inspection doit être effectuée conjointement par l’entrepreneur, le professionnel du bâtiment choisi par le syndicat de copropriétaires et ce dernier à partir d’une liste préétablie d’éléments à vérifier fournie par l’administrateur. »

 

[247] La réception se veut une démarche rigoureuse et formaliste. La définition de cette réception des parties communes est prévue à l’article 25 du Règlement. Il faut retenir que le Règlement a pour objet d’offrir une garantie afin de protéger l’acheteur d’un immeuble neuf. Tout comme une assurance, le Règlement renferme des obligations tant pour le Bénéficiaire que l’entrepreneur qui y souscrit. Ainsi, l’une ou l’autre des parties est exposée à des conséquences si elle ne s’acquitte pas de ces mêmes obligations.

 

[248] L'article 25 du Règlement offre une définition articulée de la réception des parties communes :

 

«réception des parties communes » : l’acte dont copie a été transmise à chaque bénéficiaire connu, au syndicat et à l’entrepreneur, par lequel un professionnel du bâtiment choisi par le syndicat de copropriétaires déclare la date de la fin des travaux des parties communes sous réserve, le cas échéant, de menus travaux  à parachever qu’il indique. Cette déclaration s’effectue à la suite de la réception d’un avis de fin des travaux expédié par l’entrepreneur à chaque bénéficiaire connu et au syndicat de copropriétaires. »

 

[249] Tous reconnaîtront que le document produit (A-18) et identifié comme « formulaire d’inspection préréception » doit être reconnu comme conforme et respectant les dispositions expresses de l’article 25 du Règlement. En effet, le professionnel fut retenu par le syndicat, il ne restait que des menus travaux, tant dans l’esprit et la compréhension du professionnel lui-même, du Bénéficiaire et de l’Entrepreneur, et le bâtiment était en état de servir conformément à l’usage auquel il était destiné en date du 2 juin 2010.

 

[250] L’écriture apportée par l’inspecteur Pierre Bélanger à son rapport (A-18), à la section 4, intitulée « Parement extérieur », énonce :

 

                                             « Espacements entre les panneaux de fibrociment (opinion du          

                                                fabricant ou de l’installateur nécessaire ) »

 

[251] L’inspecteur et les parties reconnaissaient que cette situation était assimilée à des menus travaux et non des travaux importants. Le document est signé en septembre 2010. Le seul témoin qui était présent et qui a témoigné fut le représentant de l’Entrepreneur. Son témoignage n’a pas été contredit. Qui plus est, le Tribunal ne peut se substituer aux parties présentes à l’époque de l’inspection. On ne pourrait faire dire au texte autre chose que ce qu’il expose.

 

[252] Le 2 juin 2010, l’Entrepreneur transmettait au Bénéficiaire et aux copropriétaires l’avis de fin de travaux des parties communes. Lorsque les parties signèrent le formulaire d’inspection préréception, toutes les conditions réglementaires requises étaient rencontrées pour établir que la fin des travaux soit la date du 2 juin 2010, i.e. la date initiale pour la computation des délais.

 

 

CONCLUSIONS DU CONCILIATEUR - vs - EXPERTISES

 

[253] Le procureur de l’Administrateur a argumenté que le conciliateur avait donné raison au Bénéficiaire dans son rapport de conciliation du 19 juillet 2012 (A-1), notamment aux points 2 et 3 qui traitaient de points suivants :

 

 2- Le gondolement du revêtement extérieur, l’étanchéité des joints à refaire et l’espacement entre les panneaux de fibrociment.

 

3- L’écoulement d’eau derrière et aux extrémités des demi-toits et des garages causant la désagrégation du revêtement (photos à l’appui).

 

[254] Le conciliateur concluait ainsi pour ces deux points :

 

« Par conséquent, l’entrepreneur devra faire les vérifications nécessaires et les correctifs requis, selon les règles de l’art, et l’usage courant du marché. »

 

[255] Dès lors, le procureur interroge le Tribunal : « Pourquoi avoir procédé à des expertises ? » Nous ne serions pas en face de l’arbitre tentant de débattre des points qui furent déjà reconnus, indique le procureur.

 

[256] L’argument se veut intéressant mais tardif de l’avis de Tribunal. Depuis mai 2014, le Bénéficiaire a annoncé qu’il procéderait à des expertises. Entre temps, des échanges de courriels ont pris place entre les parties et le Tribunal et des conférences téléphoniques préparatoires ont été tenues. En aucun temps l’Administrateur a exprimé son désaccord. Se  greffe également l’argument que ce dernier n’a jamais forcé l’exécution des décisions par l’Entrepreneur permettant ainsi de protéger le bâtiment de quelque type de dégradation possible.

 

[257] Au surplus, les expertises ont donné naissance à de nouvelles dénonciations de la part du Bénéficiaire.

 

[258] Les expertises offrent une fenêtre au Tribunal que le conciliateur n’a pas tenu à entrouvrir. Le Bénéficiaire a fait valoir son incompréhension à l’égard de l’absence d’inspection des parements de la part de l’Administrateur. La position prise en d’autres circonstances, par l’arbitre Jean Morrisette dans l’affaire G. Lafrançoise et L. Bouchard c. 9125-3575 Québec Inc. et la Garantie des maîtres bâtisseurs Inc. [6] est endossée par le soussigné et mérite son rappel:

 

« (38)...  Inspecter est synonyme de contrôler, examiner, explorer, fouiller, prospecter, scruter, surveiller. L’inspecteur doit faire ce travail et en venir à une décision éclairée en fonction de ses propres trouvailles et après une analyse complète et sérieuse de toute la documentation qu’il a en main, que cette documentation lui ait été remise par un Bénéficiaire, un Entrepreneur ou que son travail lui a permis d’obtenir. L’inspecteur doit être une personne connaissant les méthodes et règles de construction et s’il ne connaît pas un produit ou les causes d’un désordre, son enquête doit lui permettre de rendre une décision éclairée, objective et dénuée d’intérêt. »

 

[259] Bref, l’argument de l’Administrateur ne peut être retenu.

 

 

RAPPORT DE CONCILIATION DU 19 JUILLET 2012

 

 

[260] Le procureur de l’Entrepreneur soutient que la demande d’arbitrage quant au rapport du 19 juillet 2012 est hors délai. Le Tribunal avalise l’argument. Le Bénéficiaire transmettait le 21 décembre 2013 au Centre canadien d’arbitrage commercial (CCAC) une lettre dans laquelle il se disait en désaccord avec la décision rendue.

 

[261] L’article 19 du Règlement édicte :

 

« 19. Le bénéficiaire ou l’entrepreneur, insatisfait d’une décision de l’administrateur, doit, pour que la garantie s’applique, soumettre le différend à l’arbitrage dans les 30 jours de la réception par poste recommandée de la décision de l’administrateur à moins que le bénéficiaire et l’entrepreneur ne s’entendent pour soumettre, dans ce même délai, le différend à un médiateur choisi sur une liste dressée par le ministre du Travail afin de tenter d’en arriver à une entente. Dans ce cas, le délai pour soumettre le différend à l’arbitrage est de 30 jours à compter de la réception par poste recommandée de l’avis du médiateur constatant l’échec total ou partiel de la médiation. »

 

[262] Le courant jurisprudentiel très majoritaire sur le délai prévu à l’article 19 du Règlement n’est pas de rigueur, mais indicatif[7]. Le soussigné adhère à cette interprétation. Aussi, le Tribunal pourrait proroger le délai de 30 jours, uniquement si les explications soumises sont justifiées, crédibles et acceptables pour qu’elles puissent légitimer un délai additionnel.

 

[263] Dans le présent cas, le Bénéficiaire n’a pas soumis une telle preuve et le procureur du Bénéficiaire n’a pas répliqué à l’argument de l’Entrepreneur.

 

[264] Conséquemment, les points 6 à 13 de la décision du conciliateur sont maintenus et le Tribunal doit rejeter l’appel formulé quant à ces points.

 

[265] Qu’en est-il des autres points reconnus par le conciliateur ?

 

[266] Pour tous les rapports de conciliation (4) qui sont sous étude, dont le premier remonte au 19 juillet 2012, il est plus que particulier que l’Entrepreneur ne se soit d’aucune façon exécuté lorsque requis de le faire par le conciliateur. Par surcroit, pour deux de ces rapports, l’Entrepreneur n’était pas présent lors des visites des lieux annoncées préalablement par le conciliateur Martin Gignac. A contrario, il est aussi particulier que le Bénéficiaire n’ait pas forcé l’exécution des travaux exigée par les décisions du conciliateur.

 

PAREMENT EN FIBROCIMENT DU FABRICANT NICHIHA

 

[267] Ceci dit, le point 2 du premier rapport (A-1) qui est intitulé « parement extérieur de type imitation de brique sur les quatre façades : Finition », formulation issue du conciliateur, avait été dénoncé ainsi par le Bénéficiaire le 6 avril 2012 :

 

« 2. Parement de revêtement extérieur, l’étanchéité des joints à refaire et l’espacement entre les panneaux de fibrociment. »

 

[268] Au rapport de conciliation du 24 octobre 2014 (A-12), le point 1 est ainsi formulé par le conciliateur : « Parement extérieur de type imitation de brique sur les quatre (4) façades : solin d’acier et finition. »  Ce point traite en très grande partie du rapport de l’expert Michel Landry du 18 juin 2014. Certes, je ne peux pas reprendre l’entièreté du texte rapporté, mais certains passages méritent d’être exposés :

 

« Extraits de la Note A :

 

                               On note également que le solin de membrane autocollante posé sur le

                                dessus  du mur de fondation  comporte  une pente  inverse ou  ne  se

                                 prolonge pas partout devant la partie verticale du mur empêchant

                                ainsi l’évacuation de l’eau vers l’extérieur.   

 

Selon M. Michel Landry, le non-respect des dispositifs de solins et d’évacuation d’eau, provenant des cavités intra-murales engendre des désordres et des problèmes d’infiltrations d’eau qui font pourrir par endroits l’assise structurale de la charpente ce qui affectera à moyen terme la solidité de l’immeuble. 

Aux façades Est et Ouest, nous retrouvons par endroits des traces anormales d’écoulement d’eau sur le mur de fondation en provenance du dessous du solin métallique qui comporte généralement une pente inverse.

 

Les nombreuses ouvertures dans le parement et les défauts de solin aux têtes de la fenestration et à la base des murs ne rencontrent pas les objectifs de résistance aux infiltrations d’eau de la section 9.27.2 et 9.27.3 Revêtements extérieurs du CNBQ 2005.

...

 

Les fourrures de bois supportant le parement ne sont pas fixées aux éléments de la charpente, ce qui contrevient aux articles 9.27.5.1 et 9.27.5.3. En raison du poids élevé du parement et de la nature compressible de l’isolant de mousse plastique contre lequel les fourrures de bois sont posées, il aurait fallu utiliser un autre type d’élément de support que les fourrures de bois de dimensions ¾ po x 2 ½ po. Les vis maintenant les fourrures sont fixées dans les panneaux OSB au travers l’isolant de polystyrène, ce qui crée un effet de levier, un porte-à-faux ce qui est inefficace pour retenir le poids important du revêtement de fibrociment. De plus, ce mode de fixation n’est pas conforme aux recommandations du fabricant.

… 

 

Le non-respect des dispositifs de solins et d’évacuation d’eau provenant des cavités intra murales cause des désordres et des problèmes d’infiltrations d’eau pour les matériaux dans les composantes des murs extérieurs. Ces problèmes d’infiltration d’eau font pourrir par endroits l’assise de la charpente, ce qui affectera à moyen terme la solidité de l’immeuble. »

 

[269] Pour le coin en façade Est côté Sud, tout comme le coin en façade Ouest du côté Sud, le coin en façade Ouest côté Nord, le coin façade Nord du côté Ouest, le coin en façade Nord côté Est, l’expert soulève notamment un problème de gondolement de panneaux, de dislocation des modules et de déplacements latéraux dans le plan vertical des panneaux de fibrociment. Il rapporte également des écarts dans les joints entre les panneaux, des joints ouverts.

 

[270] L'article 1739 du C.c.Q. impose à l’acheteur à transmettre sa dénonciation « lorsqu’il constate que le bien est atteint d’un vice et ce délai commence à courir, lorsque le vice apparaît graduellement, du jour où l’acheteur a pu soupçonner la gravité et l’étendue. »

 

[271] Applicable en l’espèce, les auteurs Baudouin et Deslauriers indiquent sous une analyse de l’article 2926 C.c.Q. et de la manifestation graduelle que :

 

« ...la prescription du recours commence à courir du jour où il se manifeste pour la première fois. Le législateur entend probablement, par cette expression, la faire débuter au jour où le réclamant constate le premier signe appréciable ou tangible de la réalisation du préjudice, alors même qu’il ne s’est pas totalement réalisé... »[8]

 

[272] Le Bénéficiaire n’a pas à circonscrire au départ tous les éléments particularisés des causes sous-jacentes.

 

[273] Par conséquent, la seconde formulation n’étant que le prolongement de la caractérisation de la première dénonciation, il en résulte que la dénonciation du 25 août 2014 se doit d’être ramenée au moment où le syndicat s’est manifesté la première fois, soit le 6 avril 2012.

 

[274] L’arbitre Me Karine Poulin propose le raisonnement suivant, auquel le soussigné adhère, dans l’affaire Hélène Parent c. Constructions Yvon Loiselle Inc.[9] :

 

« [44] Le défaut de construction, tel que mentionné à l’article 18 du Règlement, réfère à la même réalité juridique : soit la malfaçon, le vice caché et le vice de construction, chacun a des degrés divers de gravité. L’article 18 est rédigé dans des termes suffisamment larges pour permettre d’englober ces 3 réalités.

 

[45] La jurisprudence est constante à l’effet que c’est la connaissance de l’existence d’un problème qui déclenche l’obligation de dénonciation. Prétendre que le Bénéficiaire devait connaître la nature du vice, i.e. procéder à toutes les analyses et expertises requises pour confirmer la nature du vice affectant sa propriété avant de le dénoncer à l’Entrepreneur avec copie à l’Administrateur serait lui imposer un trop lourd fardeau. »

 

[275] Le Bénéficiaire peut maladroitement ou inadéquatement traduire une situation. Cela ne peut écarter ou museler la possibilité de reconnaître la véritable problématique qui se campe derrière son écriture. Le Bénéficiaire n’est pas un expert, ni un technicien, ni un érudit, il n’est qu’un simple consommateur, un « monsieur tout le monde » qui tente de s’exécuter comme le ferait l’homme diligent et raisonnable. L’éveil et la manifestation du Bénéficiaire remontent, à mon avis, à la première dénonciation où celui-ci ciblait les gondolements, l’étanchéité des joints et l’espacement entre les panneaux fibrociment, et je précise, imitation de brique.

 

[276] Il faut objectivement reconnaître que ce qu’exprimait madame Colombe Lacasse, présidente du syndicat en avril 2012 par sa lettre transmise à l’Entrepreneur et à l’Administrateur se voulait un ensemble des problèmes qui repris sous une autre forme par l’expert Landry traduisait assurément vices cachés et potentiellement des vices de construction.

 

[277] Il est profitable de reprendre ce passage de Madame la juge Rousseau-Houle traitant du vice de construction[10] :

 

« Deux conditions sont explicitement posées à l’article 1688 pour qu’entre en jeu la responsabilité qui y est édictée : il doit s’agir de vice de construction ou de sol et ce vice doit entraîner la perte totale ou partielle de l’ouvrage.

[...]

a)      Vices entraînant la perte partielle ou totale de l’ouvrage

 

Selon les termes de l’article 1688, la responsabilité quinquennale n’est engagée que « si l’édifice périt en tout ou en parte ».  Cet article, constituant une exception au principe de la libération du locuteur d’ouvrage par la réception, devrait normalement être interprété de façon stricte. Or, comme la dérogation au droit commun provient du souci de protéger le propriétaire à l’égard des travaux difficilement vérifiables et de la nécessité d’assurer au public une protection efficace, nos tribunaux n’ont jamais appliqué l’article 1688 à la lettre et n’ont pas exigé que les vices du sol ou de construction produisent des effets aussi radicaux. Ils ont au contraire reconnu que les termes « périt en tout ou en partie » ne sont pas limitatifs et comprennent les vices compromettant la solidité de l’édifice et les défectuosités graves qui entraînent des inconvénients sérieux. [Audet c. Guérard et Guérin, (1912) 42 C.S.14, p.18. Par ces mots la loi ne comprend pas seulement la démolition ou perte totale ou partielle de l’édifice, mais elle comprend les défectuosités, le manque de solidité des travaux et les vices de construction ; Gauthier c. Seguin (1969) B.R. 913. Le terme périr doit été interprété de manière à comprendre tout dommage sérieux aux gros ouvrages d’un édifice ; Donolo Inc. c. Saint-Michel Realties Inc., (1971) C.A. 536. Ces mots ne sont pas limitatifs mais comprennent les défectuosités graves qui entraînent les inconvénients sérieux ou un danger sérieux que l’édifice s’écroule en tout ou en partie.]

 

Le champ d'application de la garantie quinquennale n’est donc pas restreint aux désordres qui entraînent la ruine effective des ouvrages. De telles hypothèses sont d’ailleurs relativement peu fréquentes car, lorsque la gravité des vices est susceptible de provoquer la ruine, l’effondrement de l’ouvrage se produit généralement en cours de construction et c’est alors la responsabilité contractuelle de l’entrepreneur et de l’architecte qui peut être mise en cause. Il suffit pour engager la responsabilité quinquennale des constructeurs que le danger de ruine soit imminent, voir latent. La simple menace de ruine d’un ouvrage constitue déjà un préjudice né et actuel, car l’ouvrage qui menace ruine perd une grande partie de sa valeur marchande et de son utilité. De même, une ruine simplement partielle et suffisante lorsque, par suite des vices affectant les parties maîtresses de l’ouvrage, il y a menace d’effondrement ou fléchissement de certaines parties de l’immeuble ou simplement des fissures importantes pouvant causer la perte de composantes essentielles du bâtiment. »

 

[278] Dans la cause Chabot c. Raymond Caron Inc.[11] la Cour d’appel a retenu la responsabilité de l’entrepreneur sous l’article 1688 C.C. car le manque d’étanchéité de la toiture constitue une perte partielle du bâtiment et a été causé par un défaut de conception dans les plans et devis.

 

[279] La Cour Supérieure s’exprimait ainsi dans Commission de la Construction du Québec c. Construction Verbois Inc.[12] :

 

« La jurisprudence a tempéré la notion de perte totale ou partie de l’édifice l’assimilant plutôt à celle d’inconvénients sérieux : Or, comme la dérogation au droit commun provient du souci de protéger le propriétaire à l’égard de travaux difficilement vérifiables et de la nécessité d’assurer au public une protection efficace, nos tribunaux n’ont jamais appliqué l’article 1688 à la lettre et n’ont pas exigé que les vices du sol ou de construction produisent des effets aussi radicaux. Ils ont au contraire reconnu que les termes « périt en tout ou en partie » ne sont pas limitatifs et comprennent les vices compromettant la solidité de l’édifice et des défectuosités graves qui entraînent des inconvénients sérieux. »

 

[280] Dans Office municipal d’habitation de la ville de Jonquière c. Constructions Lavoie & Duchesne Ltée[13], l’honorable juge André Trottier rappelle certaines conditions d’application de l’article 1688. Ainsi :

 

« Pour que l’article 1688 du Code civil s’applique, il n’est pas nécessaire que la perte partielle ou totale de l’édifice se soit produite ; il suffit que les vices soient de nature à causer cette perte.  Ainsi, dans le cas d’un mur, il n’est pas nécessaire qu’il soit tombé, il suffit qu’il menace de tomber, qu’il y ait danger par suite d’un fléchissement du sol ou des fondations, ou d’une ouverture, ou d’une fissure dans le mur lui-même.

 

                

Les défauts de construction ou les défectuosités, qui ne sont pas de nature à causer la perte totale ou partielle de l’édifice mais qui n’en font qu’en compromettre la conservation, de même que les défectuosités qui exposent le propriétaire à des inconvénients même sérieux, qui dépassent la mesure des imperfections auxquelles on est en droit de s’attendre dans une construction, ne sont pas des vices de construction tombant sous le coup de l’article 1688. Cela ne veut pas dire que le constructeur n’en est pas responsable ; il l’est en vertu du droit commun sous l’empire de l’article 1065 C.C., c’est-à-dire fonde sur un manquement contractuel certain de l’entrepreneur ; cependant, la preuve de ce défaut contractuel est le fardeau du propriétaire. »

 

[281] Le Tribunal rappelle la position de l’Administrateur à l’effet que le conciliateur avait en quelque sorte déjà reconnu  dans son rapport (A-1) les problèmes de gondolement du revêtement, l’étanchéité des joints et l’espacement entre les panneaux et qu’il avait enjoint l’Entrepreneur de faire les vérifications nécessaires et les correctifs requis, selon les règles de l’art et l’usage du marché.

 

[282] Il m’apparaît pertinent et nécessaire de reprendre les conclusions de l’expert, Michel Landry, dans son rapport du 18 juin 2014 (B-2) et auxquelles le Tribunal souscrit :

 

« 14.1 Non-conformité au CNBQ 2005

 

Nous avons constaté des vices de construction graves et plusieurs malfaçons affectant le revêtement de fibrociment qui ne respectent pas les exigences ni performances minimales demandées par la CNBQ 2005, que nous résumons comme suit :

 

·        Les nombreuses ouvertures dans le parement et les défauts de solin aux têtes de la fenestration et à la base des murs ne rencontrent pas les objectifs de résistance aux infiltrations d’eau de la section 9.27.2 et 9.27.3 Revêtements extérieurs du CNBQ 2005.

·        L’isolant de mousse plastique dans la cavité murale a été revêtu d’un ruban autocollant qui n’est pas approprié au système d’isolant qui est conçu par le fabricant OWENS CORNING. Cet assemblage comporte un risque de condensation et l’utilisation d’un ruban d’étanchéité non conçu pour être posé sur un isolant de polystyrène ne peut pas procurer la performance d’étanchéité à l’air escompté ni avoir la durabilité attendue (voir ANNEXE 16).

·        Les contre-solins métalliques et le solin de membrane autocollante comportent des pentes inverses au lieu d’avoir une pente positive minimum de 6% , ne se prolongent pas partout en surplomb du mur de fondation, ce qui favorise l’infiltration d’eau à la base des murs extérieurs comme nous l’avons constaté.

·        Les solins de membrane et les contre-solins métalliques ne sont pas munis d’eau aux extrémités, ces défauts ne rencontrent pas les exigences de l’article 9.27.3.8, paragraphe 4.

·        Les fourrures de bois supportant le parement ne sont pas fixées aux éléments de la charpente, ce qui contrevient aux articles 9.27.5.1 et 9.27.5.3. En raison du poids élevé du parement et de la nature compressible de l’isolant de mousse plastique contre lequel les fourrures de bois sont posées, il aurait fallu utiliser un autre type d’élément de support que les fourrures de bois de dimensions ¾ po x 2 ½ po. Les vis maintenant les fourrures sont fixées dans les panneaux OSB au travers l’isolant de polystyrène, ce qui crée un effet de levier, un porte-à-faux ce qui est inefficace pour retenir le poids important du revêtement de fibrociment. De plus, ce mode de fixation n’est pas conforme aux recommandations du fabricant.

 

·        Les dispositifs de fixation utilisés (vis) sont non protégés contre la corrosion, contrairement aux exigences de l’article 9.27.5.5.

 

En résumé, les revêtements extérieurs en fibrociment comportent des vices d’installation graves qui affectent la stabilité du parement, car les fourrures de bois qui ont pour fonction de supporter le parement ne sont pas fixées dans les montants de la charpente. Ce défaut grave de fixation est d’ordre structural et explique le mauvais comportement du revêtement extérieur, soit le gondolement et la dislocation des panneaux de fibrociment. À notre avis, le défaut de fixation du parement représente un risque de déformation évolutif et un risque élevé d’aggravation à court ou à moyen terme. 

 

Le non-respect des dispositifs de solins et d’évacuation d’eau provenant des cavités intra murales engendre des désordres et des problèmes d’infiltrations d’eau pour les matériaux dans les composantes des murs extérieurs. Ces problèmes d’infiltrations d’eau font pourrir par endroits l’assise structurale de la charpente, ce qui affectera à moyen terme la solidité de l’immeuble. »

 

 

[283]  De plus, monsieur Landry identifie plusieurs points quant au non-respect de la pose du revêtement Nichiha, lesquels ne respectent pas le « Guide d’installation 2012 du fabricant. » On a plaidé que ce guide était postérieur à la date de la construction. Il m’apparait que les points identifiés s’apparentent aux règles de l’art auxquels l’Entrepreneur est soumis et qui s’associent à l’obligation de résultat à laquelle ce dernier est tenu. Les points sont des vis ne résistant pas à la corrosion, des attaches trop petites, des fourrures sous-dimensionnées, un assemblage espacé et le scellement défectueux des panneaux.

[284] Le Tribunal soumet la définition fournie, à titre de guide, dans une brochure[14] publiée par la Régie du bâtiment du Québec, lequel organisme est chargé, en vertu de la Loi sur le bâtiment [15] , de l’application du Règlement :

 

« Règles de l’art : Ensemble des techniques et pratiques de construction reconnues, approuvées ou sanctionnées. Ces règles ont un caractère évolutif car les méthodes de construction, les équipements et les matériaux disponibles évoluent constamment.

 

Elles trouvent notamment leurs sources dans les documents suivants :

 

·        les instructions ou guides fournis par les fabricants d’équipements ou des matériaux entrant dans la construction d’immeubles ;

·        les normes ou standards publiés par les organismes de normalisation ;

·        les lois ou règlements contenant des prescriptions obligatoires relativement à l’ouvrage à construire ;

·        les publications scientifiques ou techniques utilisées à des fins d’enseignement des professions ou des métiers, ou servant à la diffusion du savoir le plus récent . »

 

[285] Qui plus est, en vertu de l’annexe 11 du Règlement, l’entrepreneur accrédité s’engage entre autres :

 

« ...3e à respecter les règles de l’art et les normes en vigueur applicables au bâtiment »

 

[286] J’ajouterai que le compte rendu de son témoignage enrichi d’une partie de l’expertise rapportée et des conclusions du rapport militent amplement, à mon avis, à conclure qu’il y a vice de construction.

 

[287] Le Tribunal ajoute que la dénonciation du 6 avril 2012 formulée par la présidente du syndicat permet de reconnaître que toute la problématique du parement en fibrociment du fabricant Nichiha se veut minimalement un vice caché et à la limite un vice de construction compte tenu des faits en cause et de l’état de la jurisprudence rapportés.

 

 

PAREMENT EN FIBROCIMENT JAMES HARDIE

 

 

[288] Le Bénéficiaire dénonçait le 22 décembre 2013 les problèmes suivants relativement au parement en fibrociment du fabricant James Hardie :

 

« ...nous avons constaté en inspectant vos travaux qu’il avait un autre problème encore plus sérieux sur le revêtement couleur os au-dessus et en dessous des hottes de poêle sur les deux façades de l’immeubles, mais surtout du côté de la piste cyclable. Les feuilles sont décolorées et gondolées comme s’il y avait eu ou s’il y avait encore des infiltrations à l’arrière. En plus, les vis prises ne sont pas galvanisées, donc il a toujours des traces de rouille qui ne sont pas très esthétiques. »

 

[289] Le conciliateur, Martin Gignac, a conclu que ce point ne pouvait être reconnu par la Garantie aux motifs suivants :

 

« Or, selon ce qu’il nous a été possible de constater lors de notre visite des lieux, ce point ne peut être considéré comme un vice caché.

De plus, la situation décrite doit être réclamée par écrit à l’entrepreneur et à l’administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder trois (3) ans la réception des parties communes.

Le point n’ayant pas été dénoncé par écrit à l’entrepreneur et à la Garantie Qualité Habitation dans les trois (3) ans suivant la réception des parties communes, nous devons nous prononcer dans le cadre d’un vice de construction au sens de l’article 2118 du Code civil du Québec et pour laquelle l’article 6.4.2.5 du contrat de garantie obligatoire de condominium s’applique et dont voici l’extrait : »

 

[290] Il va sans dire que cette formulation traitant du délai pour dénoncer un vice caché est fort boîteuse. Il aurait été davantage approprié de reprendre textuellement le texte de l’article 6.4.2.4. du contrat de garantie obligatoire de condominium qui se lit ainsi :

 

« La réparation des vices cachés au sens de l’article 1726 ou de l’article 2103 du Code civil qui sont découverts dans les 3 ans suivant la réception et dénoncés, par écrit, à l’entrepreneur et à l’administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte des vices cachés au sens de l’article 1739 du Code civil.

 

ou encore l’article 6.4.2.5., lequel traite du vice de construction :

 

La réparation des vices de conception, de construction ou de réalisation et des vices du sol, au sens de l’article 2118 du Code civil, qui apparaissent dans les 5 ans suivant la fin des travaux  des parties communes ou, lorsqu’il n’y a pas de parties communes faisant partie du bâtiment, de la partie privative et dénoncés, par écrit, à l’entrepreneur et à l’administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte ou survenance du vice ou, en cas de vices ou de pertes graduelles, de leur première manifestation. »

 

[291] Considérant que la fin des travaux est du 2 juin 2010 et que la dénonciation est en date du 22 décembre 2013, il faut conclure que pour traiter les problèmes du parement James Hardie sous l’angle de vices cachés, la date limite se situe au 2 décembre 2013. Il faut conclure que cette dénonciation devra être analysée dans le cadre d’un vice de construction.

 

[292] Le Bénéficiaire récidivait le 25 août 2014 en soumettant au conciliateur les problèmes perçus suite aux vérifications faites par Menuiserie D. Pouliot Inc. Le Tribunal en rapporte quelques extraits :

 

« De plus, des vérifications effectuées par l’entreprise Menuiserie D. Pouliot Inc. Entrepreneur général ont permis de constater que les vices de construction graves observés par l’expert-conseil étaient également présents sous le parement de fibrociment gris. Ainsi, les risques d’aggravation s’appliquent aussi au parement de fibrociment gris. De plus, les risques s’étendent aux ouvertures de l’immeuble pour cause d’absence de linteau.

 

Compte tenu que les vices graves de construction sont présents pour les revêtements imitation brique et gris, il est logique de présumer que le parement de couleur os rencontre les mêmes vices graves de construction puisqu’ils ont tous été installés par le même entrepreneur.

...

 

Par surcroît, l’absence de linteau au-dessus des fenêtres ainsi que toutes les ouvertures entraîne une déformation de la tête ; ces dernières qui ont été constatées par l’expert-conseil et par le représentant de l’entreprise Menuiserie D. Pouliot Inc. Le détail d’étanchéité entre les moulures et le cadre des fenêtres quant à lui n’a pas été configuré pour recevoir adéquatement un joint d’étanchéité.»

(Je souligne)

 

[293] Aucun rapport ou témoignage n’a été déposé ou apporté par un représentant de Menuiserie D. Pouliot Inc. à l’audition. Qu’il ne soit permis de mettre de côté tout ce qui concerne le texte traitant des propos tenus par le représentant de Monsieur D. Pouliot Inc., puisqu’il s’agit d’une preuve par ouï-dire. Il faut donc s’en remettre à l’expertise de monsieur Landry du 12 mai 2015 (B-9)  laquelle ne traite pas de l’absence de linteau.

 

[294] Il faut le rappeler, la dénonciation doit être étudiée sous l’angle du vice de construction.

 

[295] L’expert a constaté les problèmes suivants relativement au revêtement de clin de James Hardie.

 

[296] Il a noté des tâches inesthétiques, la rupture d’une planche de clin, un manque de scellement à la tête des ouvertures, les joints d’assemblage présentent des ouvertures, l’épaisseur de l’isolant de mousse plastique dépassant la recommandation du fabricant et à certains endroits le revêtement de clin est en contact avec le dessus du cadre à la fenestration.

 

[297] Les infiltrations d’eau à l’intérieur de certaines fenêtres relève d’une preuve par ouï-dire et ne peuvent être considérées.

 

[298] Quant aux jambages des fenêtres déformés, deux photos furent produites dont l’une n’est nullement concluante pour le Tribunal. Le constat qui suit me semble quelque peu exagéré selon la preuve offerte au Tribunal.

 

[299] Il est noté à la page 2 du rapport d’expertise :

 

« Le retrait initial de la structure de bois a pu entraîner des efforts en compression sur les fenêtres, ce qui expliquerait la déformation des jambages et le fait que l’utilisation des battants soit rendue plus difficile. »              ( Je souligne) 

 

[300] L’expert s’est montré contradictoire sur cet aspect. En effet, lors de son témoignage rendu dans le cadre des panneaux en fibrociment Nichiha, il a prétendu le contraire pour ce type de panneau qui par surcroît est beaucoup plus massif et lourd que le James Hardie.

 

[301] Monsieur Landry a procédé à des ouvertures exploratoires aux têtes de la fenestration. Il émet les commentaires suivants :

 

« Les percées exploratoires que nous avons faites ont relevé que les têtes de fenestration ne comportent aucun solin rejet d’eau ni aucun autre dispositif d’évacuation, de sorte que l’eau d’infiltration ou de condensation reste dans les composantes du mur entourant la fenestration. Les infiltrations d’eau le long des jambages des fenêtres et des portes-patio entraînent une humidification des composantes du mur et des dommages plus ou moins importants selon la sévérité des expositions et du phénomène de condensation.

 

Nous avons constaté également que les fourrures de bois fixées au revêtement James Hardie sont posées par-dessus un isolant de mousse plastique de 2 po d’épaisseur au lieu de 1 po d’épaisseur maximum comme recommandé par le fabricant. La retenue de la tête des vis des fourrures est donc en porte à faux de 2 7/16 po par rapport à l’élément structural  des montants. Cette pose inadéquate peut dans le temps occasionner des déplacements du parement et accentuer les infiltrations d’eau dans la cavité murale. Ce défaut de fixation peut réduire l’espérance de vie utile du parement, notamment lorsque celui-ci est sollicité par des conditions météorologiques extrêmes.

 

Nous avons constaté également que les montants latéraux des ouvertures de fenestration n’étaient pas doublés comme requis par les règles de l’art. M. Chabot nous a mentionné que les poutrelles de plancher étaient installées dans le sens avant-arrière (Est-Ouest) sauf pour la partie de la cage d’escalier. Cette orientation des poutrelles s’avère compatible avec les plans de structure que nous avons consultés. Dans ces conditions, il n’y aurait pas de surcharge importante au-dessus de la fenestration située sur les murs des côtés nord et sud, car ces murs ne recevraient pas les charges provenant des poutrelles. D’ailleurs nous n’avons pas constaté d’écrasement du bois ou de déformation sur le montant ni sur le linteau de la fenêtre examiné du côté sud et à notre avis il n’y a pas lieu de faire d’intervention. »

(Je souligne)

 

[302] En fait l’absence de solin entraîne de toute évidence des problèmes. Cette situation fut d’ailleurs  reconnue par les procureurs de l’Administrateur et de l’Entrepreneur.

 

[303] En contre-interrogatoire il reconnaît ne pas avoir fait d’étude structurale sur le bâtiment, n’étant ni ingénieur ni architecte.

 

[304] Il confirme que pour le James Hardie les fourrures de bois étaient fixées correctement.

 

[305] Les deux joints ouverts initialement ciblés par le syndicat au conciliateur n’ont pas fait l’objet d’ouvertures exploratoires tout comme aucune percée sur une partie courante d’un des murs.

 

[306] Monsieur Landry a constaté que l’immeuble ne travaille pas suffisamment pour affecter le fini intérieur.

 

[307] Les agrafes métalliques auraient été posées de place en place selon l’expert. Monsieur Chabot a prétendu le contraire et le Tribunal n’a pas noté cette situation. De plus, l’expert a souscrit au fait que le revêtement ne gondole pas. Il n’a pas remarqué de changements ou de mouvements quant au revêtement du clin.

 

[308] Aucune documentation ou spécification du fabricant n’a été trouvée ou retracée démontrant une contre-indication précise au fait qu’une structure standard ne serait pas apte à supporter la charge de ce type de parement. Pourtant le procureur de l’Administrateur lui a fait admettre qu’il avait indiqué qu’il recommandait un architecte ou un ingénieur pour évaluer la situation de ce revêtement en fonction de la structure qui ne semble pas avoir été conçue pour ce genre de parement.

 

[309]  Finalement, il n’a pas perçu de mouvements ou d’indices de mouvement, de glissement quant à l’isolant.

 

[310] Pour le toit des marquises du côté Nord et du côté Sud il est noté qu’il y a des écoulements d’eau sur le mur de fondation en provenance de la cavité murale qui révélait que le solin de la cavité murale des murs n’a pas été installé au niveau du toit des marquises et l’expert ajoute :

 

« et par conséquent l’eau provenant de la cavité murale mouille les éléments de charpente de l’assise du toit mansarde et peut s’infiltrer sous le solin mal adhéré, comme nous l’avions constaté au coin Nord-Est de la percée que nous avions faite et présenté à la section 11 de notre rapport du 18 juin 2014. »

 

[311] Le solin du mur de fondation présente une contre pente tout comme le contre-solin métallique au-dessus du solin de fondation.

 

[312] À cela s’ajoute un ruban adhésif qui provoque de la condensation lequel est posé par-dessus les joints d’assemblage des isolants de polystyrène. Cette condensation découle du fait que le ruban n’ait pas pare-air et ce veut en contravention à l’article 9.25.4.2.2  du CNB 1995.

 

[313] Les dispositifs d’extraction d’air pour les appartements 102, 202 et 302 présentent les problèmes suivants : des coulisses d’eau et des glaçons se formant sous le déclin, le bois est mouillé et noirci en surface et les clous sont rouillés, dommages de moisissure qui se sont propagés au dos du contreplaqué et qui endommagent les fourrures appliquées sur l’isolant de mousse plastique, pente inclinée dans le sens inverse, le revêtement extérieur au pourtour des dispositifs est endommagé.

 

[314] Pour l’appartement 304 les problèmes suivants ont été constatés :

 

[315] Le dispositif de prise d’air de l’échangeur d’air de l’appartement 304 présente des écoulements d’eau et de glace entre le boîtier et le fibrociment qui commence à gonfler (photos 1.3.17 à 1.3.19). Les dispositifs d’extraction présentent des glaçons et des écoulements d’eau, ainsi que des dommages au fibrociment (photo 1.3.20). La condensation d’eau se propage sous le contreplaqué du parapet situé plus haut (photo 1.3.21).

 

[316] Pour les dispositifs d’extraction d’air des appartements 201 et 301, l’expert a constaté qu’une condensation provenant des extracteurs des appartements 201 et 301 endommage le déclin et vraisemblablement le bois dans la cavité murale (photos 1.3.22 à 1.3.24). Le dommage au déclin est difficilement perceptible pour le Tribunal.

 

[317] La vérification des conduits d’extraction et de prises d’air côté intérieur de l’appartement 301 a confirmé que : l’enveloppe isolante du conduit de prise d’air n’est pas scellée avec le tuyau ni scellée avec le pare-vapeur du mur (photos 1.3.25 à 1.3.27). En faisant fonctionner l’échangeur d’air il s’est révélé qu’il se produisait de la condensation d’eau sur le tuyau de la prise d’air près de l’enveloppe isolante du mur en raison du défaut de scellement avec le pare-vapeur du tuyau et du mur (photo 1.3.29). Les conduits d’extraction ont une enveloppe isolante dont le pare-vapeur n’est pas scellé avec le pare-vapeur du mur ni avec le tuyau (photos 1.3.28 et 1.3.30).

 

[318] L’expert transmet son opinion technique dans l’énoncé suivant :

 

« En raison des nombreux vices de construction et des dommages constatés, notamment à ce qui a trait à l’absence de solin rejet d’eau à la tête de toute la fenestration et des toits mansardes, l’appui du revêtement sur la tête de la fenestration, les défauts affectant des dispositifs d’extraction d’air, les non-respects aux règles de l’art des pentes de solin au niveau des murs de fondation, et le défaut de ruban d’étanchéité appliqué sur les isolants de mousse plastique, nous recommandons l’enlèvement complet de tous les revêtements extérieurs de l’immeuble et des balcons pour corriger tous les endroits endommagés et de procéder aux correctifs appropriés. »

 

[319] S’agit-il d’un vice de construction ? Le Tribunal répond par la négative. Relativement aux conditions d’application de l’article 2118 C.c.Q., l’auteur J.L. Baudouin écrit[16] :

 

« 2-273. Extension. La jurisprudence a donné une interprétation large à la notion de perte en l’appréciant par rapport à la destination et à l’utilisation prospective de l’ouvrage. Constitue donc une perte, toute défectuosité grave qui entraîne un inconvénient sérieux et rend l’ouvrage impropre à sa destination. En d’autres termes, le défaut qui, en raison de sa gravité, limite substantiellement l’utilisation normale de l’ouvrage entraîne une perte qui autorise la mise en œuvre du régime [...] (p.257, 258).

 

2-274. Perte partielle. En cas de perte partielle, la jurisprudence, en pratique, se montre relativement sévère. Elle exige que celle-ci soit grave et sérieuse et refuse de considérer comme rentrant dans cette catégorie de simples dégradations mineures qui ne compromettent ni la solidité globale de l’ouvrage, ni la solidité d’une partie importante de celui-ci, ni son utilisation normale ou sa destination.

...

 

2-280. Preuve du vice - La preuve de la perte de l’ouvrage n’est pas suffisante pour donner naissance à la présomption que cette perte a bel et bien été causée par un vice. Le propriétaire doit, en effet, démontrer que cette perte est attribuable à un vice, démonstration qui relève essentiellement de l’expertise. [...] Toutefois, la présomption dont bénéfice le propriétaire lui évite d’avoir à démontrer la cause technique exacte de la perte de l’édifice. [...] p.262 et 263) »

Malgré les nombreux points soulevés par l’expert, le Tribunal est d’avis qu’il ne s’agit pas de vice de construction, mais bien de vices cachés. »

 

[320]  Monsieur Johanne Dépatis s’exprimant ainsi dans SDC Les Jardins du Parc et Garantie des Bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ[17] :

 

« [52] En somme, la preuve ne démontre pas que les problèmes en litige, qui manifestement n’ont pas amené la destruction de l’ouvrage, puissent non plus en compromettre dans sa solidité. Il est vrai que la durée de vie du toit sera possiblement réduite mais rien ne permet de voir là un problème affectant la solidité de cet ouvrage ou de le mettre en péril ou encore une situation pouvant entrainer des troubles graves dans l’utilisation de l’immeuble au sens de l’article 2118.

 

[53] Il en résulte que les défauts dénoncés ne peuvent pas malheureusement pour le bénéficiaire être qualifiés de vices de construction. »        

                                    (Je souligne)

 

[321] Ce n’est pas parce qu’on affirme « en raison des nombreux vices de construction » que le Tribunal doit conclure qu’il s’agit ici (James Hardie) des vices de construction. Oui il y a des dommages importants en périphérie des ouvertures, oui il y a absence de solin, oui il y a défaut de ruban d’étanchéité, mais en aucun temps l’expert n’a établi dans son expertise écrite ou dans son témoignage qu’il y avait une perte potentielle de l’immeuble ou d’une partie de l’immeuble au sens de la jurisprudence et de la doctrine.

 

[322] Le vice doit entraîner un inconvénient sérieux et qui rend le bâtiment impropre à sa destination. Le parement de fibrociment de marque James Hardie n’est pas sur le point de s’effondrer. Il ne montre pas qu’on est en face d’une « perte potentielle » ou encore une « perte probable » à long terme. La preuve ne révèle pas une perte potentielle ou probable.

 

[323] Comme l’a fait remarquer le conciliateur Gignac, tout ce qui est en regard du solinage, la situation était visible tout comme le jambage d’une fenêtre et la décoloration du parement par la rouille et ce depuis des années. Le témoignage de ce dernier n’a pas à être exclu, il fait partie de l’ensemble de la preuve.

 

[324] Le Tribunal est d’avis que certains énoncés de l’expert sont parfois non conformes à la preuve soumise.

 

[325] Dans le rapport traitant du revêtement Nichiha, l’expert avait conclu à un défaut grave de fixation d’ordre structural qui représentait un risque élevé d’aggravation à court ou à moyen terme. Il ajoutait que les problèmes d’infiltrations d’eau font pourrir par endroits l’assise de la charpente, ce qui affectera à moyen terme la solidité de l’immeuble.

 

[326] La situation pour le parement James Hardie est fort différente. En l’espèce, il s’agit de problèmes précis, qui étaient visibles (absence de solin, ou pente inverse) dès la livraison de l’immeuble, et non dénoncés.

 

[327] Cette absence de solin ou la situation d’une pente inverse au niveau de la fondation a engendré au fil du temps plusieurs des problèmes dévoilés par l’expertise. Le fait de ne pas avoir dénoncé ces problèmes a engendré d’autres problèmes pour lequel l’Administrateur ou l’Entrepreneur peuvent en être tenus responsables.

               

[328] Bref, les défauts relatés limitent-ils de façon importante et substantielle l’utilisation normale du bâtiment et emportent-ils une perte ou une possible perte ? Non, et le Tribunal considère qu’il s’agit à la limite des vices cachés.

 

[329] Dès lors, le délai de dénonciation par le syndicat étant au-delà de trois ans. Il faut conclure que la demande du Bénéficiaire doit être rejetée car il ne peut s’agir de vice de constrution.

 

[330] Le Tribunal dispose en bout de piste de l’argument du Bénéficiaire voulant que la dénonciation de madame Lacasse en date du 6 août 2012 ciblait les deux types de parement.

 

[331] Monsieur Gignac a témoigné qu’aucun membre du syndicat n’était intervenu relativement au revêtement James Hardie lors de la visite du 7 juin 2012. Cette affirmation n’a jamais été contredite comme l’a fait valoir le procureur de l’Administrateur. La demande d’arbitrage formulée le 21 décembre 2013, eu regard à la décision du 19 juillet 2012 signée par le président du syndicat, est ainsi rédigée :

 

« …en arbitrage pour des travaux correctifs du revêtement extérieur en fibrociment imitation brique… »

(Je souligne)

 

[332] Comme le souligne le procureur de l’Entrepreneur, une seule expertise fut demandée par le syndicat et elle visait le parement du fabricant Nichiha.

 

[333] Finalement, Me Godin fait valoir que la manifestation du syndicat ne prend place, pour le revêtement James Hardie, que dans la correspondance du 22 décembre 2013 (D-4), où il est dit :

 

« …suite aux travaux…nous avons aussi constaté…de couleur os »

 

[334] Pour ces considérants, l’argument du Bénéficiaire ne peut être retenu.

 

 

 

RAPPORT DE CONCILIATION DU 27 AOÛT 2015….  (A-15)

 

 

[335] Le 13 mai 2015, le Bénéficiaire dénonçait à l’Administrateur 13 points en relation à la conformité du bâtiment aux exigences réglementaires de construction et de prévention d’incendie. Une étude fut préparée par Sylvain Ebacher pour le compte du Bénéficiaire et datée du 12 mai 2015 avec addenda du 15 juin 2015. Elle fut produite sous B-1 par le Bénéficiaire.

 

[336] Les observations rapportées par monsieur Ebacher sont basées sur une visite des lieux ayant pris place le 27 février 2015. Ces observations portent principalement sur des exigences réglementaires, en particulier le Code de construction du Québec. Les points dressés sont les suivants :

 

1.  Portes extérieures d’issue : sens d’ouverture

2. Mousse plastique au niveau de la trappe d’accès au toit :     

    protection

3. Locaux de rangement au sous-sol : résistance au feu

4. Compartimentation des vides de construction : résistance au feu

5. Stationnements intérieurs : séparation coupe-feu

6. Gaine technique verticale : séparation coupe-feu

7. Cinq (5) trappes d’accès des regards de nettoyage au sous-sol :

    résistance au feu

8. Câbles électriques au sous-sol : scellant coupe-feu

 9.   Stationnements intérieurs : étanchéité à l’air

10. Deux (2) escaliers au sous-sol : garde-corps

11. Portes d’issues au sous-sol : étanchéité au gaz

12. Escalier en inter bloc avant et arrière du bâtiment : marches,

      contre marches, garde-corps    et mains-courantes

13. Rehaussement du niveau du sol à l’arrière droit du bâtiment :

      classification au Code national du bâtiment

 

[337] Dans sa décision du 27 août 2015, le conciliateur n’a reconnu aucun des points. Le Bénéficiaire en a appelé. Chaque point sera quelque peu développé. Les deux premiers sont les défauts mettant à risque les occupants en cas d’incendie. Le Bénéficiaire s’est désisté des points 12 et 13.

       

1-      Sens d’ouverture des portes extérieures d’issue.

        

[338]  Monsieur Ebacher indique que la porte d’entrée principale en façade et la porte extérieure de l’escalier d’issue à l’arrière sont des portes d’issue exigées. Le sens d’ouverture actuel est de l’extérieur vers l’intérieur, en sens inverse de l’évacuation. L’article 9.9.6.5.3) du Code de construction du Québec 2000 en vigueur au moment de la construction est pourtant clair :...toutes les portes d’issue exigées doivent pivoter dans la direction de l’issue.

 

[339]  Monsieur Ebacher justifie la norme ainsi :

 

« La logique à la base de tous les Codes de construction, des Codes de sécurité et de tous les règlements de protection incendie est simple ; les occupants doivent être prévenus du danger le plus tôt possible et ils doivent évacuer en toute sécurité dans les meilleurs délais possibles avec le moins de contrainte possible. Un sens d’ouverture de porte contraire à la direction d’évacuation va à l’encontre de ces principes. Non seulement l’évacuation est ralentie mais, dans le cas où un bon nombre d’occupants se presse devant une porte d’issue, il est pratiquement impossible de refouler les personnes pour manœuvrer la porte à contresens du flot. Le risque pour les occupants est élevé et les délais de correction doivent nécessairement être courts. »

 

2-       Mousse plastique au niveau de la trappe d’accès

 

[340] L’intérieur de la trappe d’accès au plafond de l’escalier d’issue avant est recouvert de mousse plastique, un isolant de polystyrène extrudé. Cet isolant n’est pas protégé par une barrière thermique située à moins de 75 mm (3 ´´). Selon les exigences de l’article 9.10.16.10 du Code de construction, édition 2000, au plafond d’une construction combustible, ce matériau doit être protégé par une barrière thermique.

 

[341]  Monsieur Ebacher justifie la norme ainsi :

 

« Les scénarios d’incendie demeurent des hypothèses mais dans le cas de ce bâtiment, les occupants pourraient devoir emprunter un trajet d’évacuation qui risque d’être obscurci par une fumée dense et irritante et où des gouttes enflammées tombent. L’alternative est alors d’emprunter l’escalier arrière ce qui allonge les délais.

 

Les exigences des Codes de construction et de sécurité visent à favoriser l’évacuation prompte et sécuritaire des occupants des bâtiments. La présence d’isolant de polystyrène dans l’escalier d’issue avant va à l’encontre des principes de base de protection incendie. »

 

3-        Locaux de rangement au sous-sol : Résistance au feu

 

[342] Au sous-sol, deux locaux de rangement n’ont aucune résistance au feu. Un degré de résistance au feu de 45 minutes est exigé (article 9.10.10.61) pour les séparer du reste du bâtiment. Les portes de ces locaux peuvent avoir un degré pare-flammes de 20 minutes (article 9.10.13.1.1).

 

4-      Compartimentation des vides de construction : Résistance au feu

 

[343] Le rapport indique :

 

Au cours de l’inspection du 27 février 2015, le ruban d’un fichoir électrique a pu être introduit du 3e étage jusqu’au sous-sol sans rencontrer aucune obstruction dans le vide de construction d’un mur mitoyen devant avoir un degré de résistance au feu entre des logements et qui se situe aussi entre des modules préfabriqués. Par conséquent, les vides de construction des murs ne sont pas recoupés par des coupe-feu comme l’exige la section 9.10.15 du Code de construction (CNB 1995). Les matériaux exposés à l’intérieur de ces vides sont du bois et des panneaux d’aggloméré, des matériaux ayant un indice de propagation des flammes supérieures à 25.

 

Les problèmes engendrés par l’absence de coupe-feu dans les murs et planchers sont décrits en détail à la section 13.0 du document Best Practice Guide on Fire Stops and Fire Blocks and their impact on Sound transmission publié en juin 2007 par le Conseil canadien de recherches du Canada. La base de la protection incendie des Codes de construction est la compartimentation des espaces d’un bâtiment. Chacun des logements, des corridors communs, des escaliers d’issue, des rangements, des étages, etc. est un compartiment résistant au feu isolé des autres compartiments par des séparations coupe-feu. De la même façon, les coupe-feu requis dans les espaces cachés servent à compartimenter les espaces cachés et à restreindre la progression du feu dans des endroits dissimulés et inaccessibles aux pompiers.

 

Lors d’un incendie, l’absence de coupe-feu permet au feu de s’étendre d’un endroit à l’autre sans qu’il soit détecté ce qui pose un risque pour le service des pompiers et rend l’extinction plus difficile. L’absence de coupe-feu pour la compartimentation des espaces augmente également l’ampleur des dommages.

(Je souligne)

 

 

[344] Monsieur Ebacher conclut :

 

« Les espaces cachés de ce bâtiment ont plus de 3 mètres verticalement. Le Code de construction (CNB 1995) exige aussi que la résistance au feu des planchers soit continue. Un article spécifique du Code 1995 ; 9.10.9.2. Barrière continue traite de cette exigence vu son importance. Par conséquent, les vides de construction verticaux de ce bâtiment doivent être recoupés par des coupe-feu au niveau de planchers. »

 

5-      Stationnements intérieurs : séparation coupe-feu

 

[345] Le rédacteur du rapport souligne que la composition du plancher/plafond au-dessus des stationnements montrée aux dessins de l’architecte ne permet pas de rencontrer l’exigence de résistance au feu d’une heure. Il est nécessaire d’apposer du scellant coupe-feu au pourtour du plafond.

 

6-      Gaine technique verticale : séparation coupe-feu

 

[346] Il est noté que l’aménagement actuel des évacuations des sécheuses est acceptable en principe, mais douteux. Toutefois, comme des tuyaux de drainage en ABS sont situés dans la draine technique, l’arrangement ne peut être conforme aux intentions du Code de construction. La tuyauterie d’ABS doit obligatoirement comporter un dispositif coupe-feu à chaque étage donc, le plancher doit obligatoirement constituer une séparation coupe-feu alors que de conduits d’évacuation de sécheuse sans registre coupe-feu percent cette séparation tout à côté.

 

7-      Cinq (5) trappes d’accès des regards de nettoyage au sous-sol : Résistance au feu

 

[347] L'étude révèle sur ces points les commentaires suivants :

 

 A) Au sous-sol, des cadres de porte en acier dans les murs de béton ne sont pas installés conformément aux recommandations de la norme NFPA 80. Des pièces de bois ont été utilisées pour combler un espace vide à la tête. Le degré de résistance au feu de cet ajustement ne peut être établi avec certitude et par conséquent, l’exigence de continuité des séparations coupe-feu n’est pas rencontrée (article 9.10.9.2.1). La correction peut être effectuée en remplaçant le bois par de la laine minérale et du scellent coupe-feu en surface.

 

B) Au sous-sol, les trappes d’accès des regards de nettoyage à la base des colonnes de drainage n’ont pas de ressort ni d’étiquette d’homologation 20 minutes mais elles ne semblent pas être situées incontestablement dans une séparation coupe-feu. (Article 9.10.9.3).

(Je souligne)

 

8-      Câbles électriques au sous-sol : Scellant coupe-feu

 

[348] À cette section monsieur Ebacher rapporte ces constatations :

 

« En vertu de l’article 9.34.1.5.1) du Code de construction, édition 2000, les câbles électriques doivent être conformes à l’article 3.1.43.1). Les câbles électriques avec un isolant FT-1 comme les câbles de polyéthylène réticulé (NMD-90) sont permis dans les bâtiments de construction combustible mais, si ces câbles ont un diamètre supérieur à 30 mm ou le regroupement de plusieurs câbles individuels a un diamètre extérieur supérieur à 30 mm, ils ne peuvent percer une séparation coupe-feu verticale ou horizontale (article 9.10.9.6.4).

 

Au plafond de la salle électrique, les câbles électriques et de télécommunication sont regroupés en au moins deux faisceaux dont le diamètre extérieur est bien supérieur à 30 mm.

 

Au sous-sol, plusieurs ouvertures dans les parois des séparations coupe-feu ne sont pas obturées par du scellant coupe-feu. »

 

9-      Stationnements intérieurs : Étanchéité à l’air

 

[349] Le rapport indique :

 

A) En vertu de l’article 9.10.9.16.4)a) du Code de construction, édition 2000, les stationnements doivent comporter un système d’étanchéité à l’air pour éviter la migration des gaz d’échappement vers d’autres parties du bâtiment. Les composants et l’installation de ces systèmes d’étanchéité  sont décrits à la sous-section 9.25.3. L’annexe A-9.25.3.2 considère que les panneaux de gypse ont une faible perméance à l’air et peuvent servir de système d’étanchéité à l’air. Évidemment, les joints doivent maintenir cette étanchéité. La jonction entre le plafond et les murs de béton armé telle qu’est réalisée présentement ne répond pas à cette exigence mais le colmatage coupe-feu nécessaire pour la correction de la résistance au feu remplira ce rôle.

 

Dans une séparation coupe-feu, les ouvertures pour les prises de courant duplex (one-gang) pour alimenter les systèmes d’ouvertures de porte sont permises (article 9.10.9.6.6) mais, l’étanchéité aux gaz d’échappement doit être assurée. Un simple coupe-froid de prise électrique satisfait l’exigence. 

 

10-  Deux (2) escaliers au sous-sol : Garde-corps

 

[350] Au sous-sol les mains-courantes ne recouvrent pas toutes les marches des deux escaliers entre les niveaux de plancher et ne se prolongent pas horizontalement sur 300 millimètres au bas (article 9.8.7.3.2).

 

11-  Portes d'issues au sous-sol : Étanchéité au gaz

 

[351] B) Les portes piétonnes situées entre les stationnements et le reste du bâtiment doivent comporter des garnitures d’étanchéité, c’est-à-dire des coupe-froids, pour empêcher la migration des gaz d’échappement (article 9.10.9.16.4)b)).

 

 

[352] Faut-il retenir que le conciliateur, dans sa décision du 27 avril 2015 avait conclu que tous les points dénoncés et soumis à l’Administrateur ne pouvaient être considérés comme des vices cachés au sens de l’article 1726 ou 2103 du C.c.Q. ou comme vices de construction, de conception ou de réalisation au sens de l’article 2118 du C.c.Q.

 

[353] La dénonciation du Bénéficiaire remontant au 13 mai 2015, les points soumis à l’arbitrage doivent obligatoirement être considérés comme des vices de construction ou de conception.

 

[354] D’entrée de jeu, le point #10 : « deux escaliers au sous-sol : garde-corps » ne peut être considéré comme un vice de construction ou de conception. La situation pouvait être  dénoncée dès la réception du bâtiment.

 

[355] Le bâtiment en cause n’est sûrement pas une construction incombustible dans laquelle un certain degré de sécurité incendie est assuré grâce à l’utilisation de matériaux incombustibles pour les éléments structuraux et autres composants. On est en présence de matériaux combustibles : bois, panneaux de fibre de bois et j’en passe.

 

[356] Le Code national du bâtiment vise à limiter la gravité et les effets d’un incendie ou d’une explosion. Il limite la probabilité qu’en raison de sa conception ou de sa construction, le bâtiment soit exposé à un risque inacceptable de dommages matériels et pertes humaines sous l’effet d’un incendie.

 

[357] Bref, les objectifs et énoncés fonctionnels visent à ce que les composants prévus pour la conception ou incorporés dans la construction du bâtiment aient le degré de résistance au feu recherché pour éviter des blessures aux occupants et leur assurer suffisamment temps pour évacuer le bâtiment en toute sécurité, de limiter des dommages au bâtiment, donc de retarder sa défaillance ou son effondrement et, par voie de conséquence, faciliter la sécurité et le travail des sauveurs-pompiers.

 

[358] Je me permets de rapporter les propos de Me Michel A. Jeanniot dans le dossier SDC Jardins de Grenoble (3683432) c. 9232-6941 Québec Inc. et La Garantie des Bâtiments Résidentiels neufs de l’APCHQ[18] :

 

« [167] Nous savons que la notion de « perte » doit recevoir une interprétation large et s’il y a démonstration que le défaut de construction risque de nuire à la solidité et à l’utilité du bâtiment, une perte potentielle suffit [9] ;

 

[168] Je note que ce même auteur (Vincent Karim), au chapitre précédent, à la page 438, paragraphes 1056 et suivants rappelle que le but de la disposition de l’article 2118 C.c.Q., (qui est d’ordre public), est entre autre, la sécurité du propriétaire ainsi que celle du public en général ;

 

[169] Ces commentaires de l’auteur s’inscrivent  dans la mouvance de la Cour d’appel sous la plume des juges McCartey, Proulx et Delisle [10] où cette Cour, après un survol de la jurisprudence et de la doctrine pertinente, confirme que l’article 2118 C.c.Q. vise à assurer la qualité et la solidité de l’oeuvre érigée dans un souci de ne pas compromettre la sécurité tant du maître d’ouvrage que le public en général. Faisant alors leurs les propos de Thérèse Rousseau-Houle [11] :

 

« ...il y a donc « un autre principe à la base de la responsabilité de l’architecte et de l’entrepreneur : c’est l’ordre public qui veut que les édifices ne constituent pas un danger pour la vie de l’homme en société »... »

 

[170] J’accepte donc le courant jurisprudentiel et doctrinaire à l’effet que le but de l’article 2118 C.c.Q. est d’assurer la qualité et la solidité des constructions dans un souci d’assurer la sécurité du public en général ainsi que celle de leurs propriétaires [12] ;

 

[171] Dans certaines circonstances, le Tribunal se doit d’étudier le caractère du vice soulevé afin de déterminer quelle disposition du plan trouve application s’il en est. La jurisprudence et la doctrine ont fixé des paramètres différents à certains des critères que l’on retrouve visés aux différents aliénas de l’article 27 du Règlement ;

 

[172] Un vice de conception ou de construction peut s’intégrer à la définition de vice caché, quoique le terme « vice » ne corresponde pas à la même notion juridique ; le vice de 1726 C.c.Q. est fondé sur l’usage du bien alors que celui de 2118 C.c.Q. est évalué par rapport au risque de la perte du bien ou du risque d’un « danger pour la vie de l’homme en société. » Cette perte n’a pas à être totale, elle peut être partielle, potentielle ou elle peut même être de nature à rendre l’immeuble impropre à l’usage auquel il est

destiné [13] ;

 

...

 

[188] Parce que j’accepte de plus le courant jurisprudentiel et doctrinaire à l’effet que le but de l’article 2118 C.c.Q. est d’assurer la qualité et la solidité des constructions dans un souci d’assurer la sécurité du public en général ainsi que celle de leurs propriétaires, et que les édifices ne doivent pas constituer un « danger pour la vie  de l’homme en société » et parce que j’accepte que la problématique telle que longuement décrite, constitue un vice de construction représentant tantôt un risque probable d’incendie, tantôt et de façon plus notable, un risque de propagation d’incendies ; il est manifeste que tous les vides techniques verticaux (ainsi que l’installation de la plupart des appareils à combustion - à divers degrés selon qu’il s’agit d’appareils à combustion solide et/ou autre) violent les règles applicables et constituent tantôt un risque d’incendie, tantôt un risque de propagation d’incendie dans des bâtiments résidentiels à haute densité ; »

 

[359] Le Tribunal considère qu’en l’espèce les déficiences et/ou les dérogations au Code national du bâtiment et au Code de construction, à l’exception du point 10, doivent être considérés dans leur ensemble et non individuellement. Chacune de celles-ci constitue une pullulation du risque à la propagation d’incendie. La qualité technique de l’ouvrage est défaillante et affecte son intégrité pour ainsi faire naître un danger potentiel pour la vie des occupants. La conception du bâtiment dévoile plusieurs carences quant à la sécurité. L’Entrepreneur s’est soustrait à ses obligations de résultat en pareille matière. Considérant le type de bâtiment (structure de bois) et les nombreuses lacunes en matière de sécurité des occupants, considérant que la santé et la vie des occupants est à haut risque, il m’apparait que les déficiences décrites au rapport de monsieur Ebacher doivent être considérées comme un vice de conception. Ce qui prime avant tout dans la construction d’un immeuble est sans doute la sécurité et la vie des individus.

 

[360] Avec respect pour l’opinion contraire, il m’apparait essentiel et urgent que soient effectués les correctifs tels que suggérés par le rapport Ebacher à l’exception du point 10. L’Entrepreneur verra a s’exécuter en conformité des recommandations formulées au rapport.

 

 

 

 

POUVOIR DE FIXER LES CONDITIONS DE CORRECTION

 

 

[361] Dans le cadre de ses pouvoirs, l’arbitre peut-il ordonner que les recommandations contenues à un rapport soient suivies ? Le Tribunal répond positivement eu regard de la décision de Me Jean Philippe Ewart, dans l’affaire SDC Place Marien (4) c. Développement Allogio Inc. et la Garantie Abritat Inc.[19]. Il écrit :

 

« [25] Le Tribunal a compétence pour conclure à l’ensemble des fenêtres et portes patio et de pourvoir pour fins des travaux correctifs à ordonnance incluant l’obligation de l’Administrateur dans le cadre des travaux correctifs de vérifier si des infiltrations d’air proviennent des composantes usinées de celles-ci, tel que confirmé entre autre par la Cour supérieure dans Sotramont où, sous la plume du juge Dufresne, J. (maintenant de notre Cour d’appel) :

 

« 91... L’Arbitre a-t-il toutefois, excéder sa compétence en      imposant à l’entrepreneur de vérifier certaines composantes de la structure avant de procéder au relèvement du plancher de bois franc ? Le Tribunal ne le croit pas.

 

92. Après avoir constaté, à la lumière de la preuve entendue, dont la preuve d’expert présentée par les parties, l’existence et la nature du vice, l’Arbitre agit à l’intérieur de sa compétence lorsqu’il fixe les conditions de correction ou de réfection du plancher. En ce faisant, l’Arbitre accomplit  son mandat à l’intérieur de la compétence que lui accorde la loi. » [5]

(nos soulignés)

 

[26] La Cour d’appel confirme de nouveau en 2011 ce principe dans l’affaire Rae [6] (sentence arbitrale annulée par jugement de la Cour Supérieure sur révision judiciaire, jugement infirmé par notre Cour d’appel qui rétablit la sentence arbitrale) alors que l’arbitre Me Despatis souscrit aux propos de Me Morissette sous l’affaire Ménard [7] et poursuit :

 

« (116)... L’administrateur a l’autorité, ... de statuer sur les travaux que doit faire l’entrepreneur assujetti au Plan.

 

(117) Cet énoncé, avec égards, ne contredit pas celui de l’argument de l’administrateur voulant que l’entrepreneur ait le libre choix des méthodes correctives. [...] En cela le choix des travaux et méthodes d’exécution, renvoie à des réalités distinctes, la première désignant l’objet à faire et la seconde la façon d’y arriver.

 

 

(118) De nier en l’espèce à l’administrateur cette faculté... à ordonner tels ou tels travaux correctifs. Ce serait là une interprétation absurde de la législation et contraire à l’esprit du plan.

 

(119) Il est de commune renommée qu’une sentence arbitrale à l’instar de tout jugement doit été exécutable. ...  Cela signifie que si l’administrateur peut suivant le Plan indiquer les travaux à faire, l’arbitre susceptible de réviser la décision de l’administrateur peut donc également le faire lorsque l’administrateur ne l’a pas fait en conformité du Plan. »[8]

                              (nos soulignés)

 

[362] Le juge M. Monast affirmait dans l’affaire Dupuis[20] relativement à la compétence de l’arbitre pour suppléer au silence du Règlement :

 

« [75]... Il (arbitre) peut cependant faire appel aux règles de l’équité lorsque les circonstances le justifient. Cela signifie qu’il peut suppléer au silence du règlement ou l’interpréter de manière plus favorable à une partie. »

 

[363] Cet énoncé confirme le pouvoir décrit plus haut.

 

[364] L’arbitre Jean Morissette, dans l’affaire José Ménard c. Les Entreprises Christian Dionne et Fils et La Garantie des maisons neuves de l’APCHQ,[21] écrit :

 

« Le texte des articles du Règlement que j’ai souligné m’indique que l’Administrateur a le pouvoir de choisir les travaux qui corrigeront la malfaçon. Nous rejetons l’argument de l’Administrateur et de l’Entrepreneur à l’effet que ce dernier est le seul maître de la façon choisie par la correction de la malfaçon. 

 

Les auteurs Kott et Roy établissent ce principe dans le cadre d’un contrat d’entreprise et non dans le cadre de l’application de la Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ Inc.

 

 ...

 

S’il est d’usage pour l’Administrateur de ne pas s’immiscer dans la correction visant la malfaçon, ce n’est pas que le Règlement ne lui donne pas ce pouvoir. Interpréter le règlement autrement laisserait les Bénéficiaires à la merci d’un entrepreneur incompétent, ce qui va à l’encontre de l’existence même du Plan de Garantie des maisons neuves. Le pouvoir de statuer comporte le pouvoir de choisir les travaux pour corriger la malfaçon. »

 

 

FRAIS D’EXPERTISES

 

 

[365] Le Bénéficiaire réclame les frais d’expertises, de services professionnels et de percées exploratoires pour les montants suivants, incluant les taxes :

 

Michel Landry …………………. 22,126.36 $

Sylvain Ebacher ………………….3,201.54 $

Menuiserie D. Pouliot Inc……….. 8,635.62 $

 

[366] L’article 124 du Règlement stipule que l’arbitre doit statuer, s’il y a lieu, quant au quantum des frais raisonnables d’expertises pertinentes que l’administrateur doit rembourser au Bénéficiaire lorsque ce dernier a gain de cause en totalité ou en partie.

[367] L'Administrateur a représenté que les frais étaient exagérés et qu’une sorte de règle de proportionnalité doit s’appliquer.

 

[368] L’article 124 du Règlement énonce trois volets quant à la recevabilité au remboursement des frais encourus. Le Bénéficiaire doit avoir gain de cause, les frais doivent être raisonnables par rapport à la nature du problème et l’expertise doit avoir été utile.

 

[369] Le Bénéficiaire en l'espèce avait le fardeau de preuve, la nécessité de retenir les services d’un expert se voulait essentielle.

 

[370] Le Tribunal est d’avis que la première expertise de monsieur Michel Landry était indispensable à la compréhension de la problématique et éclairante quant à la solution du litige. Quant au second rapport, bien qu’elle ne soit pas retenue en totalité par le Tribunal pour ce qu’il est du revêtement, il aura apporté une contribution certaine et un dépannage évident quant aux sorties de hotte, point reconnu au rapport de conciliation du 16 avril 2014 et au toit de la marquise.

 

[371] Pour les honoraires de monsieur Ebacher, le Tribunal n’a aucun motif de remettre en cause le montant réclamé.

 

[372] Pour les frais attribuables à Menuiserie D. Pouliot Inc. ils seront remboursables dans la même proportion que les frais d’expertises pour monsieur Landry, soit 75% des montants réclamés.

 

[373] Par conséquent, il y a lieu de faire droit en partie à la demande du Bénéficiaire et d’ordonner le remboursement par l’Administrateur de la somme totale de 26,273.03 $.

 

 

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL D’ARBITRAGE :

 

ACCUEILLE EN PARTIE les demandes d’arbitrage du Bénéficiaire ;

 

MAINTIENT  les conclusions du rapport de conciliation daté du 19 juillet 2012 ;

 

ORDONNE    à l’Entrepreneur de s’exécuter dans les paramètres suivants quant au point 2 du rapport de conciliation daté du 19 juillet 2012, à savoir :

Sous la supervision d’un architecte ou d’un ingénieur, aux frais de l’entrepreneur, démolir les revêtements de Fibrociment Nichiha sur l’ensemble de l’immeuble, réparer les dommages, notamment par pourriture et moisissure causés à l’enveloppe du bâtiment, corriger tous le défauts de solins sous-jacents, faire un pare-air efficace qui sera résistant aux intempéries et réinstaller un nouveau revêtement de fibrociment selon les règles de l’art, après avoir déterminé le mode de fixation approprié du nouveau revêtement . Les correctifs devront corriger l’absence de support pour les solins de membrane au-dessus de la fenestration, corriger les pentes négatives du solin au niveau des fondations dans le but d’assurer des dispositifs de rejet d’eau conformes à la bonne pratique. Les travaux devront être exécutés conformément aux normes prévues par le Code de la construction du Québec, le Code national du bâtiment et toute réglementation y applicable ainsi qu’en conformité aux règles  de l’art en semblables matières ;

 

MAINTIENT   la conclusion du point 1 du rapport de conciliation du 16 avril 2014 ;

 

ORDONNE     à l’Entrepreneur de s’exécuter relativement au point 1 du rapport de conciliation du 16 avril 2014, tenant compte spécifiquement des déficiences et problématiques constatées au rapport d’expertise de Michel Landry daté  du 12 mai 2015 et conformément aux normes prévues par le Code de la construction du Québec, le Code national du bâtiment et toute réglementation y applicable, ainsi qu’en conformité aux règles  de l’art en semblables matières ;

 

REJETTE      la demande d’arbitrage du Bénéficiaire quant au point 2 du rapport de conciliation daté du 16 avril 2014 ;

 

REJETTE      la demande d’arbitrage du Bénéficiaire quant au point 1 du rapport de conciliation daté du 24 octobre 2014 ;

 

MAINTIENT   la conclusion du point 2 du rapport de conciliation daté du 24 octobre 2014 ;

 

ORDONNE     à l’Entrepreneur de s’exécuter relativement au point 2 du rapport de conciliation du 24 octobre 2014 en tenant compte spécifiquement des déficiences et problématiques constatées au rapport d’expertise de Michel Landry daté  du 18 juin 2014 et conformément aux normes prévues par le Code de la construction du Québec, le Code national du bâtiment et toute réglementation y applicable, ainsi qu’en conformité aux règles  de l’art en semblables matières ;

 

REJETTE     la demande d’arbitrage du Bénéficiaire quant aux autres points du rapport de conciliation daté du 24 octobre 2014 ;

 

ACCUEILLE la demande d’arbitrage du rapport de conciliation daté du 27 août 2015 à l’exception du point 10 dudit rapport ;

 

ORDONNE   à l’Entrepreneur de s’exécuter en conformité des recommandations faites au rapport de Sylvain Ebacher daté  du 12 mai 2015 et conformément aux normes prévues par le Code de la construction du Québec, le Code national du bâtiment et toute réglementation y applicable, ainsi qu’en conformité aux règles  de l’art en semblables matières ;

 

ORDONNE   à l’Entrepreneur de pourvoir aux travaux correctifs ou de parachèvement ordonnés, sans autre avis ou délai, incluant par la mise en place par l’Administrateur d’un échéancier séquentiel de travaux, réquisitions de matériaux et vérifications, avec consentement des Bénéficiaires aux délais, emportant une mise en chantier immédiate de l’Entrepreneur ;

 

ORDONNE   que l’Administrateur pourvoit à surveillance des travaux et s’assure de la collaboration de l’Entrepreneur sans autre avis ou délai, incluant par la mise en place par l’Administrateur d’un échéancier séquentiel de travaux, réquisitions de matériaux et vérifications, avec consentement des Bénéficiaires aux délais, emportant une mise en chantier immédiate de l’Entrepreneur à effectuer les parachèvements, remplacements ou correctifs prescrits, de façon continue jusqu'à parachèvement des travaux ; en l’absence du respect de cet échéancier, dont constat par l’Administrateur le 8 août 2016, ou par la suite si défaut subséquent, l’Administrateur devra sans autre délai ou avis prendre charge du parachèvement et corrections, entreprendre si requis la préparation d’un devis correctif et d’un appel d’offres, choisir des entrepreneurs tiers et assurer surveillance et coordination des travaux de façon continue jusqu’à parachèvement de ces travaux et tests ;

 

ORDONNE     que l’Administrateur verse aux Bénéficiaires un montant de 26,273.03 $ en remboursement des frais d’expertises encourus par le Bénéficiaire et ce, dans un délai de quarante-cinq (45) jours des présentes ;

 

ORDONNE      que l’Administrateur assume les coûts du présent arbitrage.

 

 

 

Laval, 15 juillet 2016

 

 

Yves    Fournier

 

YVES FOURNIER ARBITRE

     



[1] [1933] R.C.S. 456

[2] F.H. c. McDougall, [2008] CSC 53 (Canll)

[3] Rousseau c.Bennett, [1956] R.C.S. 89

[4] [1992], 2 R.C.S. 679

[5] [2005], 3 R.C.S. 530

[6] GAMM 2009-10-001, 7 octobre 2010

[7] Roy c. Les résidences Pro-fab Inc. et Qualité Habitation, SORECONI 031222001, M. Chartier arbitre, 6 février 2004, Construction Pavetin Inc. et Malboeuf, 28 décembre 2007, arbitre Marcel Chartier, SOQUIJ AZ-50466035.

[8]Baudouin, S.L. et Deslauriers, P., La responsabilité civile, 7e  edition, Cowansville, Ed. Yvon   Blais inc., 2007, para 1-1421.

[9] H. Parent c. Construction Y. Loiselle Inc. et Garantie des bâtiments résidentiels Neufs de l’APCHQ, GAMM : 2012-11-007, Me Karine Poulin, 23 juillet 2012.

[10] Thérèse Rousseau-Houle : Les contrats de construction en droit public et privé, Montréal, Wilson et Lafleur, 1982, p. 343-345

[11] [1993] R.L. 497

[12] J.E. 97-2080 (C.S.)

[13] J.E. 82-665 (C.S.)

[14] Mesure à prendre pour votre maison concernant le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs, Publication de la Régie du Bâtiment du Québec, dépôt légal 2007, Archives nationales du Québec.

[15] LRQ, c B-1.1

[16] J.L. Baudouin et P. Deslauriers, La responsabilité civile, 7e éd., Cowansville, Y. Blais, Volume 11 La responsabilité professionnelle.

[17] GAMM 2009-09-003, 28 janvier 2010

[18] CCAC, S11-120903-NP, 23 novembre 2012

[19] SORECONI 132604001, 22 mai 2015

[20] Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ c.Claude Dupuis et als., 2007 QCCS.4701, 26 octobre 2007, C.S.

[21] 2006, Can LII 60456