TRIBUNAL D’ARBITRAGE

ARBITRAGE

EN VERTU DU RÈGLEMENT SUR LE PLAN DE GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS

(Décret 841-98 du 17 juin 1998)

CENTRE CANADIEN D’ARBITRAGE COMMERCIAL

Organisme d’arbitrage autorisé par la Régie du bâtiment du Québec

 

No dossier S12-063001-NP

                                                                       SDC 1191 RUE PANET

 

                                                                                   Bénéficiaire

                                                                       c.

 

                                                                       LES TERRASSES PLESSIS PANET INC.

 

Entrepreneur

Et :                                       

 

GARANTIE QUALITÉ HABITATION

 

Administrateur       

 

 

DÉCISION ARBITRALE

 

 

Arbitre :                                                         Me Roland-Yves Gagné

 

Pour le Bénéficiaire :                                  Me Marie-Cécile Bodéüs

Monsieur Damien Rosa

Monsieur Jeffrey Bibaud 

 

Pour l’Administrateur :                                Me Jean-Raymond Paradis

                                                                       Monsieur Michel Labelle

 

Pour l’Entrepreneur :                                   Me Alexandre Normandin-Lussier  

Monsieur Jean-Paul Ferland

Madame Line Rigazio

 

Date de l’audience :                        22 mai 2013

                                  

Lieu de l’audience :                                     Palais de justice de Montréal

                                                                       1 est, rue Notre-Dame Salle 14.10

                                                                       Montréal, Qc.

 

Date de la décision:                                    3 juin  2013

 

Description des parties 

 

Bénéficiaire

 

SDC 1191, rue Panet

a/s Monsieur Damien Rosa

1191, rue Panet #402

Montréal, Qc.

H2L 2Y6

a/s Me Marie-Cécile Bodéüs
De Grandpré Joli-Coeur S.E.N.C.R.L.
2000, avenue McGill Collège
Bureau 1600
Montréal, Qc.

H3A 3H3

 

Entrepreneur

 

Les Terrasses Plessis Panet Inc.

a/s Monsieur Martin Sacksner

3500, avenue Atwater #6

Montréal, Qc.

H3H 2Y6

a/s Me Alexandre Normandin-Lussier

ME ANDRÉ NAULT, AVOCAT

355, rue des Récollets

Montréal, Qc.

H2Y 1V9

 

Administrateur

 

Me Jean-Raymond Paradis

Qualité Habitation

9200 est, boulevard Métropolitain

Montréal, Qc.

H1K 4L2

 


Pièces

 

L’Administrateur a produit :

 

A-1 Copie d’une lettre du CCAC en date du 4 juillet 2012 confirmant la réception d’une demande d’arbitrage le 30 juin 2012;

A-2 Copie du rapport du conciliateur daté du 15 mai 2012;

A-3 Formulaire Inspection-Préréception-Fin des travaux-Réception du bâtiment;

A-4 Rapport d’inspection d’Habitat Consult du 30 août 2011;

A-5 Rapport d’inspection visuelle sommaire de Archambault Inspections du 2 mai 2007;

A-6 Curriculum vitae de Michel Labelle.

 

Le Bénéficiaire a produit :

 

B-1 Lettre du 19 octobre 2012 quant aux points dont le différend est soumis à l’arbitrage;

B-2 Facture de Monsieur Jeffrey Bibaud.

 

L’Entrepreneur a produit :

 

E-1 Courriel de Line Rigazio du 21 septembre 2011.

 

 

Historique

 

L’immeuble est détenu en copropriété, situé au 1191 rue Panet à Montréal.

 

La date de la réception des parties communes est le 2 mai 2007.

 

Le 20 septembre 2011, le Bénéficiaire a envoyé une réclamation écrite, consistant en un rapport d’inspection des lieux.

 

Le 15 mai 2012, l’Administrateur rend sa décision, soumise au présent arbitrage.


 

 

MANDAT ET JURIDICTION

 

[1]       Le Tribunal est initialement saisi du dossier suite à une demande d’arbitrage par le Bénéficiaire, reçue par le Centre Canadien d’Arbitrage Commercial le 30 juin  2012, et par la nomination de l’arbitre soussigné en date du 4 juillet 2012. 

[2]       Aucune objection quant à la compétence du Tribunal n’a été soulevée par les parties et la juridiction du Tribunal est alors confirmée.

 

INTRODUCTION

 

[3]        Le Bénéficiaire a produit une demande d’arbitrage en vertu de l’Article 35 du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs (ci-après nommé le Règlement) :

Le bénéficiaire ou l'entrepreneur, insatisfait d'une décision de l'administrateur, doit, pour que la garantie s'applique, soumettre le différend à l'arbitrage dans les 30 jours de la réception par poste recommandée de la décision de l'administrateur à moins que le bénéficiaire et l'entrepreneur ne s'entendent pour soumettre, dans ce même délai, le différend à un médiateur choisi sur une liste dressée par le ministre du Travail afin de tenter d'en arriver à une entente. Dans ce cas, le délai pour soumettre le différend à l'arbitrage est de 30 jours à compter de la réception par poste recommandée de l'avis du médiateur constatant l'échec total ou partiel de la médiation.

 

[4]       La Cour d’appel du Québec, dans l’affaire La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ Inc. c. Maryse Desindes et Yvan Larochelle, et René Blanchet mise en cause[1] a jugé que ce Règlement était d’ordre public :

[11] Le Règlement est d’ordre public. Il pose les conditions applicables aux

personnes morales qui aspirent à administrer un plan de garantie. Il fixe les modalités et les limites du plan de garantie ainsi que, pour ses dispositions essentielles, le contenu du contrat de garantie souscrit par les bénéficiaires de la garantie, en l’occurrence, les intimés.

[12] L’appelante est autorisée par la Régie du bâtiment du Québec (la Régie) à agir comme administrateur d’un plan de garantie approuvé. Elle s’oblige, dès lors, à cautionner les obligations légales et contractuelles des entrepreneurs généraux qui adhèrent à son plan de garantie.

[13] Toutefois, cette obligation de caution n’est ni illimitée ni inconditionnelle. Elle

variera selon les circonstances factuelles […]


 

 

 

[5]        L’article 27 du Règlement donne les détails de la garantie dans le cas de manquement de l'entrepreneur à ses obligations légales ou contractuelles :

27.  La garantie d'un plan dans le cas de manquement de l'entrepreneur à ses obligations légales ou contractuelles après la réception de la partie privative ou des parties communes doit couvrir:

  1°    le parachèvement des travaux dénoncés, par écrit:

  a)      par le bénéficiaire, au moment de la réception de la partie privative ou, tant que le bénéficiaire n'a pas emménagé, dans les 3 jours qui suivent la réception ;

  b)      par le professionnel du bâtiment, au moment de la réception des parties communes ;

  2°    la réparation des vices et malfaçons apparents visés à l'article 2111 du Code civil et dénoncés, par écrit, au moment de la réception ou, tant que le bénéficiaire n'a pas emménagé, dans les 3 jours qui suivent la réception;

  3°    la réparation des malfaçons existantes et non apparentes au moment de la réception et découvertes dans l'année qui suit la réception, visées aux articles 2113 et 2120 du Code civil et dénoncées, par écrit, à l'entrepreneur et à l'administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte des malfaçons;

  4°    la réparation des vices cachés au sens de l'article 1726 ou de l'article 2103 du Code civil qui sont découverts dans les 3 ans suivant la réception et dénoncés, par écrit, à l'entrepreneur et à l'administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte des vices cachés au sens de l'article 1739 du Code civil;

  5°    la réparation des vices de conception, de construction ou de réalisation et des vices du sol, au sens de l'article 2118 du Code civil, qui apparaissent dans les 5 ans suivant la fin des travaux des parties communes ou, lorsqu'il n'y a pas de parties communes faisant partie du bâtiment, de la partie privative et dénoncés, par écrit, à l'entrepreneur et à l'administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte ou survenance du vice ou, en cas de vices ou de pertes graduelles, de leur première manifestation.

 

[6]       Par lettre datée du 19 octobre 2012 le Bénéficiaire a confirmé les points dont il demandait au Tribunal d’arbitrage de trancher les différends mais à l’audience, le Bénéficiaire a restreint le litige aux points suivants et s’est désisté des autres :

 

[6.1]       1. Mur de fondations : dégagement hors sol

[6.2]       5. Revêtement métallique :

Fascias et soffites (Solin Mural)

Solins (Corrosion)


 

[6.3]       6. Galeries, terrasses et escaliers

Paliers (Planches de Bois)

Escalier (Béton)

Fondations (Fissures)

[6.4]     7. Toiture

Rampes (Sécurité)

Membrane Élastomère (Plissements)

Solins (Évents de Plomberie) 

Solins (Salle Électrique)

[6.5]       8. Calfeutrage

Scellant (Joints de Calfeutrage Usés et(ou) Manquants)

[6.6]       9. Salle électrique 

Salle électrique (Murs)

Salle Électrique (Pare-Vapeur)

[7]       Tous ces points furent rejetés par l’Administrateur, entre autres, pour la raison que le Bénéficiaire en était dans la cinquième année de la couverture du Plan de garantie, et que dans la cinquième année, seulement les vices majeurs au sens de l’article 2118 du Code civil (C.c.q.) sont encore couverts par la garantie et les vices présents n’en sont aucunement.

[8]       Au début de l’audience le Tribunal a demandé aux parties quel était le statut de la réclamation du Bénéficiaire quant à Fondations (Fissures) (page 16 de la pièce A-4), qui était sous le point 6 dans le rapport d’expert d’Habitat Consult mais absent de la décision de l’Administrateur (page 14 de la pièce A-2) :

Il y a des fissures importantes sur les fondations des terrasses qui nécessiterait de procéder à des réparations.  Il est fort probable que les problèmes observés soient causés par des mouvements de sol suites aux cycles de gel et dégel et/ou par des tassements différentiels du sol […] Les fissures doivent aussi être réparées pour empêcher la migration de l’eau et l’humidité qui pourrait endommager d’avantage la masse du béton […]

[9]       L’Administrateur a admis n’avoir rendu aucune décision à ce sujet mais a ajouté, après consultation avec son conciliateur que sa décision est la même que celle rendue pour l’ensemble des sujets regroupés au point 6, soit que ce point n’est pas couvert en la cinquième année du plan de garantie, comme n’était pas un vice majeur au sens de 2118 C.c.q.

[10]    Le Bénéficiaire, n’étant pas d’accord, a déclaré être prêt à procéder sur la question des fondations/fissures sous le point 6, dont la décision de l’Administrateur est également soumise au présent arbitrage.


PLAIDOIRIES

[11]    Avant de passer point par point, le Tribunal fait part des plaidoiries des parties après que la preuve ait été présentée à l’audience, puisqu’elles permettent de situer le débat qui porte principalement sur ce qui est couvert ou non dans le présent dossier en la cinquième année du plan de garantie. 

[12]    Le Bénéficiaire soumet que les deux témoins, son témoin expert et l’Inspecteur de l’Administrateur, ont tous les deux fait part des déficiences de l’immeuble et de leurs conséquences.  La seule question en litige à trancher est de déterminer si ces déficiences peuvent être qualifiées de vices de construction au sens de l’article 2118 C.c.q. puisque la dénonciation a eu lieu alors que l’immeuble est dans la cinquième année de la garantie.

[13]    Le Bénéficiaire cite un article de doctrine[2] citée ci-après et trois décisions :

[13.1]    l’affaire Assistance aux femmes de Montréal c. Les Habitations Alexandre Inc.[3] qui définit le concept de perte aux pages 25 à 27 (jugé : un fléchissement de certaines structures de bois qui a entraîné l’affaissement du plancher et des fissures sur des murs porteurs, est un vice de construction qui affecte la stabilité de l’immeuble et est un vice majeur sous l’article 2118 C.c.q.);

[13.2]    l’affaire Légaré c. Aménagements Pelletier[4], qui dit au paragraphe 32 que l’extension du concept de perte s’étend aussi à la perte potentielle et au défaut rendant l’ouvrage impropre à l’usage auquel on le destine (notre ajout : dans cette affaire, le témoin expert avait affirmé que l’immeuble pourrait s’écrouler d’ici trois à cinq ans);

[13.3]    et l’arrêt de la Cour d’appel dans Gestion GM Inc. et Guy Martin c. Construction Daniel Dumont & Fils et Général Accident [5], dans lequel un pare-vapeur mal étanche causait une glace qui était une menace (notre ajout : une quantité excessive d’air chaud s’échappait dans l’entretoit, qui provoquait la formation de glace sur le toit qui était un grave risque à l’édifice car elle pouvait entraîner l’accumulation d’eau sur le toit, eau qui risquait à son tour de déformer ou faire s’effondrer la structure, ou s’écouler à l’intérieur de l’immeuble).

[14]    Le Bénéficiaire ajoute que dans le présent cas, l’expert Bibaud a démontré que les conséquences potentielles et futures des déficiences, au niveau de(s)

[14.1]    structure de l’immeuble;

[14.2]    infiltrations d’eau à la toiture, fascia et balcon;

[14.3]    fissures au balcon, à la marche et à la fondation;

causaient de sérieux dommages.

[15]    L’Entrepreneur soumet que le Bénéficiaire n’a pas rempli le fardeau de preuve qui était le sien en vertu de l’article 2803 C.c.q., celui qui veut faire valoir un droit doit prouver les faits qui soutiennent sa prétention, il n’a pas prouvé que les déficiences étaient assez sérieuses ou graves pour mettre en péril l’immeuble ou le rendre impropre à sa destination.

[16]    Il ajoute qu’il n’y a aucune perte partielle ou totale et que la situation constatée par l’expert Bibaud après plus de 4 ans avait été causée par un défaut d’entretien par le Bénéficiaire. Il a demandé lors de l’audience au représentant du Bénéficiaire s’il avait un plan d’entretien et il n’a pas eu de réponse.

[17]    L’Administrateur se dit d’accord avec la jurisprudence soumise par le Bénéficiaire, mais ajoute qu’il faut regarder les faits à la base de ces décisions et elles ne s’appliquent pas au présent litige.

[18]    L’immeuble n’est pas parfait mais rien ne relève du vice de construction ou de conception et il n’y a eu aucune preuve à cet effet. Le seul élément dont on a parlé d’une possible effondrement est la salle électrique, et l’expert Bibaud a parlé de 10 à 15 ans - le plan de garantie ne couvre pas cette période.

[19]    Qui plus est, le Bénéficiaire a admis qu’il a constaté plusieurs vices allégués en 2009, tel les planches du balcon, le plissement de la membrane, les fissures dans les fondations, bien au delà du délai de dénonciation de 6 mois prévu à l’article 27 du Règlement.

DÉCISION

[20]    L’article 27 (5) du Règlement renvoie à l’article 2118 C.c.q. qui se lit comme suit :

2118. À moins qu'ils ne puissent se dégager de leur responsabilité, l'entrepreneur, l'architecte et l'ingénieur qui ont, selon le cas, dirigé ou surveillé les travaux, et le sous-entrepreneur pour les travaux qu'il a exécutés, sont solidairement tenus de la perte de l'ouvrage qui survient dans les cinq ans qui suivent la fin des travaux, que la perte résulte d'un vice de conception, de construction ou de réalisation de l'ouvrage, ou, encore, d'un vice du sol.

[21]    La date de réception des parties communes est le 2 mai 2007 (A-3) - le rapport d’inspection daté du 2 mai 2007 par un professionnel du bâtiment est produit en A-5.

[22]    Cette date du 2 mai 2007, date de la réception des parties communes, ne fait donc l’objet d’aucun différend.

[23]    Pendant la conférence préliminaire du 24 octobre 2012 et dans la décision intérimaire de la même date, le Tribunal a rappelé aux parties que l’Administrateur a soulevé la question du délai quant à la dénonciation et à la couverture des défauts et vices allégués.

[24]    Le Bénéficiaire est donc informé et conscient qu’en septembre 2011, lors du dépôt de sa réclamation auprès de l’Administrateur du plan de garantie, le plan de garantie était dans sa cinquième année de couverture et ne couvrait donc que les vices de conception, de construction ou de réalisation et des vices du sol, au sens de l'article 2118 du Code civil (article 27 (5) du Règlement).

[25]    Puisque le Bénéficiaire conteste le bien fondé de la décision de l’Administrateur, le fardeau de la preuve repose sur lui, en vertu de l’article 2803 du Code Civil : Celui qui veut faire valoir un droit doit prouver les faits qui soutiennent sa prétention. 

[26]    Dans l’affaire Filomena Stante et Antonio Carriero c. Les Constructions Oakwood Canada Inc. et La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ[6] l’arbitre écrit :

[36] Je tiens de plus à rappeler que dans le cas qui nous concerne, les Bénéficiaires sont en demande et tel quiconque porte une demande devant un Tribunal d’arbitrage, c’est la demande qui a le fardeau de preuve, qui a le fardeau de convaincre; sans que ce fardeau ne soit indu, ce sont les Bénéficiaires demandeurs qui ont l’obligation de démontrer le caractère déraisonnable de la Décision de l’Administrateur ou, subsidiairement, que les points qu’ils soulèvent sont recevables dans le cadre de l’application du contrat de garantie.

 

[27]    Ce que le Tribunal doit trancher, c'est le différend entre le Bénéficiaire et l'Administrateur quant à la couverture du plan de garantie.

[28]    Tous les vices ne sont pas des vices majeurs dans le sens commun du terme, et tous les vices majeurs dans le sens commun du terme ne sont pas des vices pouvant causer la perte totale ou partielle de l’immeuble au sens de l’article 2118 C.c.q.

[29]    Baudouin[7] définit ainsi la notion de perte :

2-272 - Vice - La notion de perte est intimement liée à celle de vice, en ce que le défaut reproché doit être un défaut sérieux qui compromette la solidité de l'ouvrage et entraîne le risque de le voir s'écrouler, s'affaisser, s'enfoncer ou tomber en tout ou en partie. Il n'est pas nécessaire que l'immeuble se soit effectivement complètement écroulé. Est suffisante une menace sérieuse et réelle d'effondrement, par exemple, lorsqu'il y a apparition de fissures ou de lézardes importantes, d'infiltration d'eau, etc. Les tribunaux ont d'ailleurs parfois du mal à séparer ce type de vice, de celui, moins grave, indicateur de simples malfaçons, même si celles-ci peuvent entraîner un trouble de jouissance très sérieux pour le propriétaire.

  2-273 - Extension - La jurisprudence a donné une interprétation large à la notion de perte en l'appréciant par rapport à la destination et à l'utilisation prospective de l'ouvrage. Constitue donc une perte, toute défectuosité grave qui entraîne un inconvénient sérieux et rend l'ouvrage impropre à sa destination. En d'autres termes, le défaut qui, en raison de sa gravité, limite substantiellement l'utilisation normale de l'ouvrage entraîne une perte qui autorise la mise en œuvre du régime.

 

[30]    Dans un arbitrage en vertu du présent Règlement, dans l’affaire Helena Kuzma et al. c. Groupe Immobilier Grilli et La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ[8], l’arbitre parle ainsi de la notion de perte :

[53] Demeurant constant avec mes décisions antérieures (ainsi que celles de mes collègues), j’accepte que la notion « perte » au sens de l’article 2118 C.c.Q. doit, tout comme la notion analogue de ce terme au sens de l’article 1688 C.c.B.-C., recevoir une interprétation large et s’étendre notamment à tout dommage sérieux subi par l’ouvrage immobilier. Nous savons que la jurisprudence récente a tempéré la notion de perte totale ou partie de l’édifice l’assimilant plutôt à celle d’inconvénients sérieux. Or, comme la dérogation au droit commun provient du souci de protéger le propriétaire à l’égard de travaux difficilement vérifiables et de la nécessité d’assurer au public une protection efficace, les tribunaux n’ont pas appliqué à la lettre l’article 1688 C.c.B.-C. et n’ont pas exigé que les vices produisent des effets radicaux. Ils ont au contraire reconnu que les termes « péri en tout ou en partie » ne sont pas limitatifs et comprennent les vices compromettant la solidité de l’édifice et les défectuosités graves qui entraînent des inconvénients sérieux.

 

Point 1. Mur de fondations : dégagement hors sol

[31]    La preuve du Bénéficiaire consiste principalement par le rapport d’expert et le témoignage de Monsieur Jeffrey Bibaud, technologue professionnel, reconnu comme témoin expert.

[32]    Dans son rapport (page 7), le témoin expert Bibaud écrit :

Le niveau du sol est trop élevé par rapport à la base des revêtements extérieurs en façade avant et sur le côté latéral gauche dans la cour arrière du bâtiment voisin […] Cette condition pourrait risquer d’occasionner des infiltrations d’eau et une dégradation des composantes situées à la base du mur en cas d’accumulation d’eau et(ou) de glace […]

[33]    Il cite l’article 9.15.4.3 du Code du Bâtiment à l’effet qu’il doit y avoir au moins 6’’ entre le dessus du mur de fondation et le sol fini :

Les murs de fondations extérieures doivent dépasser d’au moins 150 mm le niveau du sol fini.

[34]    En contre-interrogatoire, il affirme ne pas avoir constaté d’infiltration d’eau mais ajoute la norme est là et la norme n’a pas été respectée.

[35]    Le représentant de l’Entrepreneur témoigne à l’effet qu’il a été le gérant du projet et qu’il est entrepreneur général depuis 55 ans.

[36]    Il dit que quand l’immeuble a été construit, il n’y avait pas de trottoir, la Ville de Montréal les a construits par la suite, et qu’il y avait bel et bien un dégagement de 6 pouces- de même du côté latéral, c’était bien dégagé de 6 pouces, il ne peut expliquer cette dernière situation que par le fait que quelqu’un d’autre que lui a mis de la terre par la suite.

[37]    En contre-interrogatoire, il dit ne pas savoir quand la Ville de Montréal a construit les trottoirs.

[38]    L’Inspecteur de l’Administrateur dit qu’à l’avant, la pente ne favorise pas l’écoulement d’eau vers la fondation, alors que sur le côté c’est le terrain du voisin, qui peut avoir remblayé.

 

Décision point 1

[39]    Le Bénéficiaire n’a pas rempli son fardeau de preuve à l’effet que la déficience alléguée constitue un vice majeur au sens de l’article 2118 C.c.q., considérant entre autres l’affirmation suivante : l’expert produit par le Bénéficiaire écrit dans son rapport (page 7) :

En façade avant, le dégagement est plus faible qu’il devrait l’être mais il est peu probable que des dommages se manifestent (nos soulignés).

[40]    Quant au côté gauche, l’expert écrit :

La situation est critique sur le côté gauche parce que le niveau du terrain remonte même au dessus du premier rang de brique.

[41]    Il témoigne que le risque qui pourrait (il emploie le conditionnel) arriver, même si un membrane protège l’immeuble, si il y a accumulation d’eau, l’eau pourrait (autre emploi du conditionnel) pénétrer si le solin était défectueux

[42]    Le Tribunal conclut de la preuve du Bénéficiaire que le problème à la façade avant est « peu probable » et que sur le côté latéral gauche, il n’est pas en présence d’une perte potentielle basée sur les faits tels que rencontrés dans la jurisprudence actuelle mais d’une perte hypothétique - il n’y a aucune preuve d’infiltration d’eau ou de solin défectueux, aucune preuve d’un vice majeur au sens de l’article 2118 C.c.q.

[43]    Le Tribunal ajoute pour motifs de sa décision quant au point 1, ceux exposés au point suivant aux paragraphes [51] à [63] de cette décision.

[44]    Pour ces raisons, le Bénéficiaire n’a pas démontré que la décision de l’Administrateur du plan de garantie était non fondée ou déraisonnable, le Tribunal se doit donc de maintenir la décision de l’Administrateur et de rejeter la réclamation du Bénéficiaire sur ce point.

 

5. Revêtement métallique : Fascia

 

[45]         Sous ce chapitre sont regroupés deux points.

 

i) Fascias et soffites (Solin Mural)

[46]    Dans son rapport (page 11), le témoin expert écrit (son témoignage à l’audience est au même effet) :

Fascias et soffites (Solin Mural) - Le recouvrement métallique sur le fascia en façade avant sous le parapet du toit comporte une pente déficiente qui pourrait favoriser des accumulations d’eau et causer des infiltrations d’eau sous les composantes en cas d’usure des joints de scellant aux jonctions. Normalement, le solin doit être assemblé de sorte à avoir une pente négative pour éloigner l’eau. […]

[47]    En contre-interrogatoire, il affirme ne pas avoir constaté de dommage, mais que c’est un risque additionnel.  Il admet que si le scellant est en bonne condition il n’y aura pas de danger, en ajoutant que l’eau ne doit pas rester trop longtemps en place.

[48]    Le président du Syndicat Bénéficiaire dit avoir acheté son unité en 2007, qu’il y a emménagé en 2008 et qu’il est administrateur du Bénéficiaire depuis 2011.

[49]    En 2012, il y a eu des fortes pluies et il est monté sur le toit - il a vu une accumulation d’eau sur le fascia.

[50]    Le représentant de l’Entrepreneur dit qu’il n’y a aucun danger car le tout est étanche.

 

 

Décision sur Fascias et soffites (Solin Mural)

[51]    Les motifs qui suivent s’appliquent aussi à plusieurs autres points dont le différend est soumis à l’arbitrage et porte sur des dommages pouvant être, selon le Bénéficiaire, causés par de l’eau dans le futur. Dans le présent litige, ni l’expert du Bénéficiaire, ni le représentant du Bénéficiaire qui habite l’immeuble, ni le représentant de l’Entrepreneur, ni l’Inspecteur de l’Administrateur, se sont faits dire qu’il y avait présence d’infiltration d’eau dans les lieux ou ont constaté de l’infiltration d’eau dans les lieux.  Il n’y a de trace de « pourriture » qu’au pied des murs de la « salle électrique », qui sera traitée plus loin (point 9).

[52]    Tel qu’il appert des décisions qui suivent, en présence d’infiltration d’eau, la jurisprudence a refusé d’accepter comme vice majeur au sens de 2118 C.c.q., des vices entraînant une infiltration d’eau qui n’entraînait pas la perte de l’immeuble, puisque l’infiltration d’eau en elle-même, n’est pas synonyme de perte.   

[53]    Le Bénéficiaire plaide, avec raison, que le mot perte à l’article 2118 C.c.q. doit recevoir une interprétation large et libérale; toutefois, il plaide aussi que cette interprétation doit couvrir également les déficiences qui n’ont pas entraîné d’infiltration d’eau sur des surfaces que rien n’a prouvé qu’elles n’étaient pas étanches - si la présence d’infiltration d’eau n’est pas en elle-même synonyme de perte au sens de l’article 2118 C.c.q., l’absence d’infiltration après quatre ans et trois mois l’est encore moins, à tout le moins, dans le présent dossier, vu la preuve.

[54]    La perte au sens de 2118 C.c.q. doit être prouvée, chaque cas étant, bien sûr, un cas d’espèce.

[55]    Voici trois décisions dans laquelle la présence d’infiltration d’eau ne fut pas jugée comme vice majeur au sens de l’article 2118 C.c.q.


[56]    Dans la décision arbitrale Syndicat de la Copropriété Les Jardins du Parc c. La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ[9], l’arbitre écrit :

[28] Pour sa part, l’expert Séguin écrit dans son rapport au sujet des points en question :

Des sections arrière de toiture ont une pente faible et ne peuvent être recouvertes uniquement de bardeaux d’asphalte. Une membrane autocollante a été posée sous le bardeau de ces sections de toiture mais elles ne remontent que de 12’’ sur le versant principal. De plus, la membrane de ces sections à faible pente et du versant principal : le bardeau fissure à cet endroit. Finalement, le type de bardeau utilisé sur les sections à pente faible est un bardeau pour pente courante (pente minimale 1 : 3 et plus) et non pour pente faible (pente minimale 1 :6). Cela contrevient au Code national du bâtiment (art. 9.26.3.1 et 9.26.8. CNB). […]

Il n’y a aucune membrane autocollante au bas des pentes arrière. Cela contrevient au Code national du bâtiment (art. 9.26.5.1 CNB) qui stipule que les débords de toit doivent être protégés par un revêtement de protection.

[29] Sans pouvoir l’affirmer, l’expert Séguin estime que l’absence de membrane aux endroits décrits pourrait expliquer les infiltrations d’eau observés. Il reconnait toutefois qu’il n’y a pas là risque de perte ni totale ni même partielle de l’ouvrage. Il réitère néanmoins que ces situations, qualifiées de contraires au Code national du bâtiment, réduiront la durée de vie du toit qui ne sera pas de 25 ans mais peut-être de 15 […]

[50] Comme on l’a vu plus haut, la jurisprudence n’exige pas qu’un édifice s'écroule pour qu'il y ait perte de l’ouvrage au sens du Code civil du Québec. La simple présence d'un danger sérieux susceptible d’entraîner une perte de l'ouvrage suffit pour ouvrir droit à cette garantie. En somme, on dira qu’il y a perte de l’ouvrage lorsqu’est démontrée la présence d’un vice d’une gravité propre à en affecter la solidité. Autrement dit, pour qu’une déficience soit qualifiée de grave ou sérieuse, selon l'article 2118, elle doit présenter une gravité susceptible de mettre en péril la solidité ou la stabilité de l'immeuble.

[51] En l’espèce, la preuve révèle que les problèmes observés n’ont pas entrainé de conséquences sérieuses. Messieurs Séguin et Fortin conviennent certes que les situations observées contreviennent aux normes de construction mais aucune d’elles n’est décrite comme susceptible de mettre en péril la solidité de l’ouvrage ou encore d’entrainer des troubles graves dans l’utilisation de l’immeuble.

[52] En somme, la preuve ne démontre pas que les problèmes en litige, qui manifestement n’ont pas amené la destruction de l’ouvrage, puissent non plus en compromettre dans sa solidité. Il est vrai que la durée de vie du toit sera possiblement réduite mais rien ne permet de voir là un problème affectant la solidité de cet ouvrage ou de le mettre en péril ou encore une situation pouvant entrainer des troubles graves dans l’utilisation de l’immeuble au sens de l’article 2118.

[53] Il en résulte que les défauts dénoncés ne peuvent pas malheureusement pour le bénéficiaire être qualifiés de vices de construction.

[57]    Dans l’affaire Syndicat de la copropriété du 1274 Gilford, Montréal et 153642 Canada Inc.[10] l’arbitre écrit :

[30] Afin de faire droit à la demande du Bénéficiaire, et avant toute discussion finale quant à la date de réception des parties communes, je dois de façon préliminaire me satisfaire qu’il s’agit d’un vice qui porte atteinte à l’intégralité ou à la structure du bâtiment et/ou qu’il puisse rendre le bâtiment impropre à l’usage auquel il est destiné (puisque la norme juridique générale impose un caractère « sérieux » ou     « important » du vice, un critère déterminant).

[31] Les décideurs qui m’ont précédé ont aussi accepté de considérer le vice suffisamment important, lorsqu’on est placé dans une situation de perte d’ouvrage et que le préjudice soit né et actuel, de manière immédiate. La notion de « perte » doit recevoir une interprétation large et s’étendre à tout dommage sérieux subi par l’ouvrage immobilier.

[32] Dans le cas qui nous concerne, je rappelle que c’est le Bénéficiaire qui est en demande, et sans que ce fardeau lui soit indu, c’est néanmoins ce dernier qui a le fardeau de me convaincre.

[33] Il n’y a pas eu de preuve que l’immeuble est devenu non sécuritaire en raison de vices ou encore qu’il y a danger d’écroulement de certaines parties.

[34] Il est plus que possible que si certains travaux de correctifs ne sont pas adressés, les façades extérieures périront de façon prématurée.

[35] J’accepte la position qu’une réfection de l’enveloppe extérieure a des conséquences, que ces conséquences sont possiblement lourdes et très coûteuses. L’inconvénient est que le coût ne constitue pas le seul élément pour qualifier un vice de majeur au sens de la doctrine et de la jurisprudence qui m’est connue. Il est vrai qu’une importante infiltration d’eau récurrente à cours ou moyen terme créera des problèmes importants de moisissure apte à rendre le bâtiment impropre à l’usage auquel il est destiné mais cette démonstration ne m’a pas été faite. […]

[58]    Dans la décision de la Cour du Québec Poliquin c. Léonide Morneau Construction Enr.[11], le Cour écrit :

[34] Il est indéniable que le sous-sol du demandeur subit des infiltrations d’eau importantes. La simple expérience de la vie nous apprend qu’il n’est pas normal qu’un solage neuf permette de telles infiltrations. […]

 

[36] Il est reconnu que les infiltrations d’eau peuvent être de nature à entraîner la perte, du moins partielle de l’immeuble, mais encore faut-il qu’une preuve de cette détérioration majeure soit faite. […]

 

[40] Comme le Tribunal conclut qu’il n’y a pas perte de l’immeuble, il n’y a pas lieu d’appliquer la présomption prévue à l’article 2118 C.c.Q.. […]

 

[59]    Voici trois décisions dans laquelle il y avait absence d’infiltration et dans laquelle le Bénéficiaire plaidait le vice majeur sous l’article 2118 C.c.q.

[60]    Dans l’affaire Syndicat de la Copropriété Carrefour Renaissance 3410 et 4032802 Canada Inc. et Association provinciale des constructions d’habitations du Québec Inc. (APCHQ)[12], dans laquelle il n’y avait aucune infiltration d’eau, l’arbitre écrit

[11] Malheureusement pour le Bénéficiaire, même s’il existe des malfaçons

relativement au drainage des toits-terrasses, la preuve ne démontre pas que la situation est susceptible d’entraîner une « perte d’ouvrage ». En effet, aucune infiltration d’eau n’a été constatée à l’intérieur de la Propriété (Pièce B-5) et le Tribunal d’arbitrage n’est pas convaincu qu’il y en aura dans le futur par rapport à la durée prévue de vie utile de la couverture. Selon la preuve, il est tout à fait possible, voir probable, qu’il n’y ait pas de réduction de la durée de vie utile de la toiture. Or, selon la jurisprudence, même si la situation observée contrevient aux normes de construction, comme en l’espèce, il n’y a « perte d’ouvrage » que lorsque le vice est d’une gravité propre à affecter la solidité ou à limiter substantiellement l’utilisation de la Propriété […]

 

[61]    Dans l’affaire Marie-Josée Fillion et al. et 9140-8310 Québec Inc. et La Garantie Qualité Habitation Inc.[13], l’arbitre écrit :

[17] Pour résoudre le présent litige, l’arbitre n’a pas à classer les désordres

dénoncés par les Bénéficiaires en manquement au Code national du bâtiment, ou

en malfaçon, ou en vices cachés, etc…Le tribunal d’arbitrage doit statuer à savoir si

les désordres mis en preuve peuvent causer la perte de l’immeuble ou le rendre

impropre à sa destination.

[18] L’arbitre soussigné, après avoir écouté la preuve et lu avec attention toute la jurisprudence qui lui a été soumise par les parties, ne peut se résoudre à considérer que des manquements plus ou moins importants au chapitre plomberie du Code de construction puisse causer la perte de l’immeuble ou le rendre impropre à sa destination, d’autant plus qu’aucune preuve d’infiltration d’eau, d’humidité excessive ou d’obstruction des drains n’a été faite.

[19] Il est clair selon la jurisprudence qu’il n’est pas nécessaire que la perte appréhendée ait lieu à l’intérieur des 5 années de la garantie, mais il faut que les désordres dénoncés aient une survenance probable et prévisible.

[20] Dans le présent litige, la survenance probable et prévisible de la perte de l’immeuble n’est pas soutenue par des indices tels l’humidité excessive, l’infiltration d’eau ou l’obstruction partielle ou totale des drains.

[21] Par ailleurs, comme le dit Me Jeanniot dans « Syndicat de la copropriété du 1274 Gilford, Mtl et 153642 Canada Inc. » le coût des travaux de réparation ne peut à lui seul servir à qualifier un désordre de vice majeur de construction.

« L’inconvénient est que le coût ne constitue pas le seul élément

pour qualifier un vice majeur au sens de la doctrine et de la jurisprudence qui m’est connue. »

[22] L’arbitre soussigné estime donc que les désordres dénoncés par les Bénéficiaires ne peuvent être considérés comme des vices de construction au sens du paragraphe 5 de l’article 10 du règlement sur le plan de garantie (ajout du soussigné - l’article 10 est l’équivalent de l’article 27 pour les maisons unifamiliales)

[62]    Dans l’affaire Louise Joly et al. c. Construction Casavia Inc. et La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ[14], l’arbitre écrit :

[46] En l’espèce, il n’a pas été établi que le Bénéficiaire, malgré les craintes appréhendées, se trouvait dans la situation inévitable qu’il serait victime éventuellement d’un problème d’infiltration d’eau d’autant plus qu’il n’y a eu aucune manifestation de désordres dans les six années suivant la fin des travaux. […]

 

[49] Suivant mon appréciation des faits, de la preuve versée au dossier et présentée à l’audition et du droit applicable, je suis d’avis que la situation décrite par le Bénéficiaire peut être inquiétante et nécessiter un entretien régulier mais ne constitue pas un vice d’une gravité telle qu’il puisse être considéré comme étant un vice de construction ou un vice de sol couvert par l’article 10 du règlement.

 

[63]    Considérant l’absence d’infiltration d’eau, d’humidité excessive, de moisissure, de pourriture, d’accumulation de glace sur une partie non étanche, la seule présence d’une pente négative ne peut pas être qualifiée en droit de vice majeur entraînant la perte totale ou partielle au sens de l’article 2118 C.c.q. et de l’article 27 (5) du Règlement qui y réfère, à tout le moins, pas selon la preuve au présent dossier. 

[64]    Pour toutes ces raisons, la déficience alléguée par le Bénéficiaire n’est pas couverte par la plan de garantie en la cinquième année du plan, la décision de l’Administrateur doit donc être maintenue et la réclamation du Bénéficiaire doit être rejetée sur ce point.

 

ii) Solins (Corrosion)

[65]    Dans son rapport (page 24), le témoin expert écrit (son témoignage à l’audience est au même effet) :

Solins (Corrosion) - Il y a des traces de corrosion recouvrant les solins métalliques.  Il faudrait donc prévoir de repeindre les solins métalliques.  Les joints entre les solins métalliques doivent être maintenus étanches […]

 

Décision sur Solins (Corrosion)

[66]    La preuve du Bénéficiaire est à l’effet qu’il faut prévoir repeindre les solins métalliques et s’assurer que les joints de ces solins soient maintenus étanches, et non, comme c’était son fardeau de preuve, que la corrosion aurait entraîné la perte des solins métalliques suite à un vice majeur, et qu’ils ne seraient plus étanches.

[67]    Le Bénéficiaire ne s’est donc pas déchargé de son fardeau de preuve qu’il s’agissait ici d’un vice majeur au sens de 2118 C.c.q.  Le Tribunal rejette donc la réclamation du Bénéficiaire sous ce point et maintient la décision de l’Administrateur.

 

6. Galeries, terrasses et escaliers

 

[68]         Sous ce chapitre sont regroupés trois points.

 

i) Paliers (Planches de Bois)

[69]         Dans son rapport (page 13), le témoin expert Bibaud écrit :

Paliers (Planches de Bois) - […] gondolées et détachées du support du balcon situé au 3e étage […]

[70]    Dans son témoignage, l’expert Bibaud dit que la pente n’est pas suffisante pour laisser l’eau s’écouler - l’accumulation d’humidité a entraîné un gonflement des planches.

[71]    En contre-interrogatoire, il admet qu’il y a une très légère pente. Il y avait un enduit de protection, protection bonne pour trois ans au maximum.

[72]    Le président du Syndicat Bénéficiaire dit avoir lui-même poncé et repeint au pinceau les balcons en 2009, ce qui était dans le délai normal d’entretien des balcons construits en 2007.

[73]    Après la pluie, on constate une accumulation d’eau, qui cause corrosion et rouille.  Les planches du balcon sont tellement gonflées qu’il y a déjà trébuché, c’est aussi dangereux pour les enfants qui y jouent.  Si quelqu’un s’y blesse, on en tiendra le Syndicat Bénéficiaire comme responsable.

[74]    Le représentant de l’Entrepreneur dit qu’il a vérifié et il y a bien une pente.  Il dit n’y avoir jamais vu ben de l’eau, il manque de la peinture, il ne sait pas ce qui s’est passé, mais il dit que cela n’a pas été peint à l’origine, qu’il fallait y mettre un scellant ou de la teinture après 1 an ou deux, il ne fallait pas que ce soit posé au rouleau mais au pinceau.

[75]    En contre-interrogatoire, il ne peut expliquer la cause du problème.  Peut-être, selon lui, il n’y a pas eu d’entretien, mais il ne le sait pas pourquoi les planches sont écaillées comme cela.

[76]    Quant on lui rappelle que les planches ont été peintes en 2009, il répond- je ne sais pas quel genre de scellant, c’est pas normal.

[77]    L’Inspecteur de l’Administrateur dit qu’il a appris à l’audience que le Bénéficiaire avait poncé et mis du vernis sur ces planches, cela a donc été modifié par le Bénéficiaire, qui aurait dû dénoncer la situation des planches à l’Administrateur avant d’y apporter des modifications.

[78]    Sans référer nommément à l’article 29 du Règlement, il parle en fait de l’exclusion de la garantie à cet article qui se lit comme suit :

3°    les réparations rendues nécessaires par une faute du bénéficiaire tels l'entretien inadéquat, la mauvaise utilisation du bâtiment ainsi que celles qui résultent de suppressions, modifications ou ajouts réalisés par le bénéficiaire;

[79]    En contre-interrogatoire, il dit que s’il était allé dans la première année de la garantie, il aurait sorti son niveau, mais il n’en avait aucun avec lui, étant dans la cinquième année.  Était-ce bien peinturé? Il est là seulement pour se prononcer sur la garantie (vice majeur ou non), et non sur l’explication de l’état actuel des planches quatre ans après la construction.

 

Décision Paliers (Planches de bois)

[80]    Le Tribunal doit rendre décision selon la preuve.  Le Bénéficiaire a témoigné à l’effet qu’il a lui-même poncé et vernis ces planches en 2009.  Il n’a pas fait appel à une entreprise spécialisée.  En bout de ligne, deux ans après avoir poncé et vernis ces planches, il se plaint qu’elles gondolent, qu’elles sont dangereuses pour les enfants.

[81]    Le Tribunal ne peut arriver à la conclusion, vu la preuve, qu’il s’agit d’un vice de construction ou de conception de l’Entrepreneur.

[82]    Dans l’affaire André Desvarieux et al. c. Scaltec Construction Inc. et La Garantie Habition du Québec[15], l’arbitre écrit :

Point n° 1 : Moisissure dans la chambre froide

[10] Selon le conciliateur, une nouvelle finition a été ajoutée à la chambre froide par les Vendeurs. Cette affirmation n’a pas été réfutée par les Bénéficiaires. En conséquence, selon la prépondérance de la preuve, le problème de la moisissure dans la chambre froide ne tombe pas sous la protection du Règlement du fait que l’Administrateur n’est pas responsable de la qualité des travaux réalisés par les acheteurs (en l’occurrence, les Vendeurs) après la vente par l’Entrepreneur.

[11] De plus, même si la chambre froide n’avait subi aucune modification de la part des Vendeurs, la seule garantie qui demeure en vigueur après la troisième année de la prise de possession est celle pour le vice de construction au sens de l’article 2118 du Code civil du Québec (« C.c.Q. »). Il faudrait alors que le vice en question entraîne ou entraînera la perte partielle ou totale de l’immeuble. Aucune preuve n’a été administrée en ce sens.

[12] La demande de révision du Point 1 est rejetée.

[83]    Vu la preuve, vu la jurisprudence, vu le Règlement, vu le fait que le Bénéficiaire a poncé et vernis les planches dont il se plaint aujourd’hui de leur gondolement, vu le fait qu’il y a une pente sur ce balcon, même légère, le Tribunal considère que la décision de l’Administrateur n’est pas déraisonnable et rejette la réclamation du Bénéficiaire.

 

ii) Escalier (Béton)

[84]         Dans son rapport (page 17), le témoin expert écrit :

Escalier (Béton) - Il y a une fissure sur la surface de l’escalier en béton à la jonction du mur de fondation et de la colonne de soutien.  Cela résulte du à l’absence de joints de construction aux jonctions des divers matériaux comportant des points de stress. Les joints de construction sont nécessaires aux endroits où il y a un changement de la nature du substrat pour palier aux mouvements prévisibles du remblai. Il faudrait donc ajouter des joints de construction avec des traits de scie et reconditionner les surfaces pour corriger les dommages.

[85]    L’expert Bibaud confirme à l’audience que même s’il a écrit « sur la surface », c’est du béton fracturé de part à en part.  Il réitère l’absence de joints de construction nécessaires à cet endroit, et la fracturation causée par les mouvements de gel et dégel. Le rapport contient deux photos de cette marche.

[86]    En contre-interrogatoire, l’expert Bibaud dit que l’obligation d’y avoir des joints de construction vient de la règle de l’art.

[87]    L’Inspecteur de l’Administrateur a rejeté la réclamation quant à la marche facturée parce que (1) ce n’est pas un vice de construction et (2) la marche n’a pas été coulée en même temps que les fondations.

 

Décision Escalier (Béton)

[88]    L’interprétation restrictive de l’Administrateur sur ce point n’est pas en accord avec celle des tribunaux.  Dans l’affaire Syndicat de Copropriété Le Glendale et Le Groupe Arméca Inc. et La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ[16], l’arbitre écrit

[24] La notion de perte de l’ouvrage doit recevoir une interprétation large et libérale [General Signal Ltd. c. Allied Canada Inc., EYB 1994-64526 (C.A.)]. La Cour d’appel, citant l’auteure Thérèse Rousseau-Houle, écrit :

 

« L’article 1688 (notre ajout : prédécesseur de l’actuel 2118 C.c.q.) ne vise pas uniquement les édifices, mais tous les travaux de construction immobiliers qui ont été exécutés en vertu d’un contrat d’entreprise. […] Les installations immobilières, accessoires de la construction principale, peuvent également être qualifiées de gros ouvrages assimilables à des édifices. Les immeubles par destination, tels que les ascenseurs et les systèmes de chauffage central, lorsqu’ils sont incorporés à l’ouvrage de construction sont couverts par la garantie quinquennale pourvu que leur mise en œuvre implique leur imbrication dans la construction elle-même. » (Nos soulignements)

 

[25] Dans cette affaire, la Cour d’appel était appelée à déterminer si un réservoir d’entreposage d’alun liquide constituait un « édifice » au sens de l’article 1688 C.c.B.c. Elle affirme aussi :

 

« Une interprétation limitative du terme « édifice » empêcherait cette disposition de réaliser les objectifs ultimes qu’elle poursuit, soit d’assurer la solidité et la qualité des ouvrages importants et d’assurer la sécurité du public. » (Nos soulignements)

 

[89]    La marche fait donc partie de l’immeuble, elle est essentielle pour les occupants de l’immeuble, et qu’elle soit fracturée de part en part après quatre ans démontre la présence d’un vice de construction qui a entraîné sa perte.

[90]    Quant à la règle de l’art, elle fait partie du contrat d’entreprise, cautionné par l’Administrateur.

[91]    Dans l’affaire Promutuel Lévisienne-Orléans, société mutuelle d'assurances générales c. Service de techniciens en électricité du Québec, STEQ inc.[17] la Cour supérieure fait sienne l’affirmation suivante :

[130] À ce sujet, le professeur Jacques Deslauriers[18] écrit :

« […] Le respect des règles de l'art est de l'essence même du contrat d'entreprise, même si le contrat n'y réfère pas. Cette obligation est imposée par la loi et revêt un caractère d'ordre public. »

[92]    La preuve démontre qu’il y a eu ici vice de construction au sens de l’article 2118 C.c.q et ce point est bel et bien couvert par l’Administrateur.  Le Tribunal doit donc renverser la décision de l’Administrateur et accueillir la réclamation du Bénéficiaire sur ce point.

 

iii) Fondations (Fissures)

[93]         Dans son rapport (page 16), l’expert écrit :

Fondations (Fissures) Il y a des fissures importantes sur les fondations des terrasses qui nécessiterait de procéder à des réparations.  Il est fort probable que les problèmes observés soit causé par des mouvements de sol suites aux cycles de gel et dégel et/ou par des tassements différentiels du sol […] Les fissures doivent aussi être réparées pour empêcher la migration de l’eau et l’humidité qui pourrait endommager d’avantage la masse du béton […]

[94]    En contre-interrogatoire, l’expert Bibaud affirme à mon avis, tout indique que ce sont des fissures de retrait.

[95]    L’expert Bibaud a répété, sans hésitation et avec certitude, que ces fissures étaient bien des fissures de retrait, que c’est la cause de l’origine, que ces fissures se forment peu de temps après la coulée, ça se produit rapidement après. 

[96]    Il ajoute, la cause à mon avis, la cause irréfutable, c’est du retrait.

[97]    Le Bénéficiaire dit avoir remarqué ces fissures à partir de la fin 2008, minimum vers 2009.

[98]    L’Inspecteur de l’Administrateur témoigne à l’effet qu’il retient ce que l’expert Bibaud a dit : c’est une fissure de retrait et si c’est du retrait, c’est sans problème pour la structure.  De plus, il n’y a pas de bombement du mur alors que de l’autre côté c’est un stationnement.

[99]    L’expert Bibaud a aussi dit qu’il ne voyait pas de poussée majeure.

 

Décision Fondations (Fissures)

[100] L’article 29  du Règlement exclut nommément du plan de garantie, les fissures de retrait :

29.  Sont exclus de la garantie: […]

2°    les réparations rendues nécessaires par un comportement normal des matériaux tels les fissures et les rétrécissements;

 

[101] De plus, le Bénéficiaire dit avoir remarqué ces fissures à partir de la fin 2008, minimum vers 2009, donc des années avant d’en avoir informé l’Administrateur, alors que le délai de dénonciation prévu au Règlement est au maximum de six mois (voir article 27 (3), (4) et (5)) et l’état du droit à cet effet est clair[19] : le délai de six mois prévu à l’article 27 du Règlement est un délai de rigueur et de déchéance.

[102] Baudouin explique les conséquences d’un délai de déchéance[20]

Dans le cas des délais de déchéance, la créance est absolument éteinte après l'expiration du temps fixé.  Le tribunal est alors tenu de suppléer d'office au moyen en résultant (art. 2878 C.c.).  Dans ces cas donc, ce n'est plus seulement l'action en justice qui est éteinte, mais bien le droit lui-même.

[103] L’exclusion prévue au Règlement et le délai de déchéance mis à part, le Tribunal rappelle aussi accessoirement un principe établi il y a près d’un siècle par l’arrêt de la Cour suprême du Canada, Megantic c. Mignault[21], à l’effet qu’un Bénéficiaire ne peut laisser aller un vice mineur pour qu’il devienne vice majeur dans le futur - il s’agissait ici d’un barrage (le texte n’est qu’en anglais, la traduction n’étant pas faite à l’époque) :

I do not, however, think that, even if this article (notre ajout : 1688 C.c.b.c.) applies, the owner of the work, having taken possession and control, and finding a slight defect which, if neglected, might lead to the destruction of the whole work, could deliberately stand by and allow the work to go to ruin, trusting to the fact that the contractors are good for all damages, as was the attitude of the defendant’s mayor in this case.  The owners in possession would be bound to take proper care of their property and to take all proper steps to prevent its destruction, and damages resulting from failure to do so would not be damages naturally flowing from the small defect, which could have been remedied at little expense when it first developed.

[104] Vu la preuve qu’il s’agit de fissures de retrait et qu’il n’y a pas de bombement, vu le Règlement, le Tribunal rejette la réclamation du Bénéficiaire sur ce point et maintient la décision de l’Administrateur, ces fissures de retrait n’étant pas des vices majeurs au sens de 2118 C.c.q.

 

7. Toiture

 

[105]      Sous ce chapitre sont regroupés quatre points.

 

i) Rampes Sécurité

[106]      Dans son rapport (page 19), l’expert Bibaud écrit :

Rampes (Sécurité) La conception des rampes n’est pas très sécuritaire pour protéger les occupants […] hauteur des rampes trop basses […] espacement trop large entre les balustres des rampes de la terrasse et à la jonction de l’escalier […] espacement entre les barreaux […] la présence d’une barrière (porte) comporte un risque […] s’exposer à des risques de chute près des parapets.

[107] L’expert Bibaud témoigne que pour les terrasses communes il y a violation d’une norme au Code du Bâtiment du Québec, section 9.8.8.

[108] En contre-interrogatoire, il admet que la hauteur peut être plus basse si l’usage de la terrasse est pour un logement, mais s’il y a plusieurs logements, il n’y a pas d’exception (il cite les articles 9.8.8.2 et 9.8.8.4 du Code).

[109] Le président du Syndicat Bénéficiaire dit que cette terrasse est à usage privatif pour l’unité 401 où il habite, donc pour un seul logement. Toutefois, l’accès n’est pas verrouillé et toute personne peut y accéder facilement.

[110] Il s’agit donc d’une terrasse pour un logement.

[111] Le représentant de l’Entrepreneur dit spontanément à la vue des photos de la terrasse

[111.1] que ça a été modifié,

[111.2] il ne construit jamais une terrasse comme cela,

[111.3] que nous autres on ne construit pas comme cela, sa terrasse avait bien 42 pouces,

[111.4] la terrasse qu’il a construite avait une forme en L en 2007 alors qu’elle est maintenant de forme carré;

ce témoignage est jugé crédible.

[112] Le Bénéficiaire, qui a emménagé en 2008, ne peut confirmer ce fait, toutefois, on lui a déjà dit que les balustrades sont tombées à un moment donné. Quelqu’un a donc reconstruit quelque chose.

[113] Pour l’Inspecteur de l’Administrateur, la terrasse ne semblait pas d’origine.  Si la hauteur n’est pas réglementaire, c’était de la malfaçon couverte seulement au cours de la première année de la garantie, mais ce n’est plus couvert après 4 ans et demi.

 

Décision Rampes (Sécurité)

[114] L’article 9.8.8.2 du Code du Bâtiment, en effet, débute par « sous réserves des paragraphes 2) à 4), les garde-corps […] doivent avoir une hauteur d’au moins 1070 mm , (notre ajout : 1070 mm /25.4 : 42 pouces) et le paragraphe 2) est à l’effet que les garde-corps des terrasses doivent avoir une hauteur minimum de 900 mm quand la terrasse ne dessert qu’un seul logement.

[115] Dans le présent litige, la preuve démontre que la terrasse est à usage restreint pour une seule unité. Toutefois, l’expert Bibaud dénonce d’autres déficiences sous l’article 9.8 que la seule hauteur des garde-corps et en annexe, le Code du Bâtiment parle bien du danger pour les enfants quand l’espacement est trop large.

[116] D’un autre côté, la preuve présentée a convaincu le Tribunal que la terrasse, dont les déficiences sont alléguées par le Bénéficiaire, n’est plus la terrasse tel que construite à l’origine par l’Entrepreneur.  Qui plus est, l’article 29 (3) du Règlement exclut de la garantie les réparations qui résultent de modifications ou d’ajouts réalisés par le Bénéficiaire, et la preuve est à l’effet que la terrasse actuelle a été modifiée. 

[117] Vu la preuve, vu le Règlement, le Tribunal rejette la réclamation du Bénéficiaire et maintient la décision de l’Administrateur sur ce point.

 

ii) Membrane Élastomère (Plissements)

[118]      Dans son rapport (page 23), l’expert Bibaud écrit :

Membrane Élastomère (Plissements) La membrane d’étanchiété de finition granulée ne semble pas parfaitement bien adhérée partout à la sous couche élastomère puisqu’il y a des plissements apparents.  En effet, nous pouvons observer des poches d’air et(ou) des ondulations entre les deux couches visibles sur les surfaces.  Cela pourrait possiblement résulter d’une mauvaise technique de soudure lors de l’installation entre les deux couches.  Cela pourra favoriser une usure prématurée du système d’étanchéité de la toiture.  Nous ignorons si des dommages sont présents puisqu’il s’agit d’une inspection visuelle. Notre inspection est basée sur une seule visite du bâtiment, elle est générale et sommaire mais non exhaustive.   Pour le déterminer, il faudrait avoir recours à une inspection plus approfondie sur le sujet et effectuer les réparations nécessaires.

[119] L’expert Bibaud témoigne qu’un espace d’air se créée, et à long terme dans le cycle de chaleur il peut avoir une risque de décollement et de perforation de la membrane. Cela affecte la durée de vie, quoique pour l’instant, il n’a pas vu d’infiltration d’eau.

[120] En contre-interrogatoire, à la question si le plissement était visible à l’origine, il répond oui, c’était visible à l’installation.

[121] A part cette déficience, il n’a pas observé de conséquences ou d’infiltration.

[122] Le président du Syndicat Bénéficiaire dit qu’en 2012, le gondolement sur le toit a augmenté depuis les photos prises en 2011. Il affirme avoir vu ces plissements depuis 2009.

[123] L’Inspecteur de l’Administrateur dit qu’il ne sait pas pourquoi il y a des plissements mais dans la cinquième année de la garantie il ne peut considérer cela comme un vice majeur.  De plus, rien n’indique que le toit ne sera pas étanche pendant 25 ans.

 

Décision Plissements

[124] Pour les raisons déjà exposées ci-haut aux paragraphes [51] à [63], le Tribunal considère que le Bénéficiaire n’a pas rempli son fardeau de preuve qui était le sien de montrer en quoi le plissement était un vice majeur au sens de l’article 2118 C.c.q., il doit donc maintenir la décision de l’Administrateur sur ce point et rejeter la demande du Bénéficiaire.

[125] Le Tribunal ajoute que même s’il y avait eu présence d’un vice majeur au sens de 2118 C.c.q., ce qui n’est pas le cas, le délai de deux ans entre le moment où le Bénéficiaire avait vu le plissement et sa dénonciation à l’Administrateur rendait son recours irrecevable, puisque le délai de dénonciation de six mois à la caution (l’Administrateur) prévu à l’article 27 (3), (4) et (5) du Règlement est un délai de déchéance.

 

iii) Solin - Évents de Plomberie

[126]      Dans son rapport (page 25), l’expert Bibaud écrit :

Solins (Évents de Plomberie).  Les solins métalliques utilisés autour des conduits d’évents de plomberie ne sont pas conçus pour une toiture multicouche. Les joints de soudures comportent des endroits à risques pour des infiltrations d’eau sous les composantes […] Il faudrait donc vérifier cela de plus près et procéder à des travaux correctifs en conséquence.

[127] L’expert Bibaud témoigne à l’effet que le joint a été agrafé et que c’est plus vulnérable aux infiltrations d’eau.  Il considère qu’on aurait dû procéder autrement.  Il n’a pas vu d’infiltration.

[128] En contre-interrogatoire, il ajoute qu’il sait, par son expérience, qu’il y a un risque d’infiltration par les joints mais il n’a pas constaté d’infiltration et on le lui a pas rapporté d’infiltration.

[129] L’Inspecteur de l’Administrateur dit avoir demandé s’il y avait des infiltrations d’eau et il n’y en avait aucune.

 

Décision - Évents de Plomberie

[130] Pour les raisons déjà exposées ci-haut aux paragraphes [51] à [63], le Tribunal considère que le Bénéficiaire n’a pas rempli son fardeau de preuve qui était le sien de montrer en quoi ce point était un vice majeur au sens de l’article 2118 C.c.q., il doit donc maintenir la décision de l’Administrateur sur ce point et rejeter la demande du Bénéficiaire.

 

iv) Solins- Salle Électrique

[131]      Dans son rapport (page 25), l’expert Bibaud écrit :

Solins (Salle Électrique). Il n’y a pas de solin métallique à la jonction du toit de la salle électrique et du mur extérieur […] Cela pourrait comporter un risque potentiel pour des infiltrations d’eau bien que la jonction soit tout de même protégée par le balcon […]

[132] L’expert Bibaud ajoute qu’on ne voit pas de solin, normalement il devrait y en avoir un, il pourrait y avoir une coulisse d’eau, cela pourrait arriver.

[133] En contre-interrogatoire il ajoute qu’il n’a pas vu de solin mais il est possible qu’il soit là.  Il n’a pas constaté d’infiltration.

[134] Il ajoute qu’il est possible que le joint soit scellé même sans solin.

[135] L’Inspecteur de l’Administrateur dit que le Bénéficiaire n’avait pas la clé de la salle électrique et n’a pas été en mesure de vérifier, n’y ayant pas accès.

 

Décision Solins - Salle électrique

[136] Vu la preuve, et pour les raisons déjà exposées ci-haut aux paragraphes [51] à [63], le Tribunal considère que le Bénéficiaire n’a pas rempli son fardeau de preuve qui était le sien de montrer en quoi l’absence de solin à cet endroit, à supposer qu’il soit absent, était un vice majeur au sens de l’article 2118 C.c.q., il doit donc maintenir la décision de l’Administrateur sur ce point et rejeter la demande du Bénéficiaire


8. Calfeutrage

[137]      Dans son rapport (page 21), l’expert Bibaud écrit :

Scellant (Joints de Calfeutrage Usés et(ou) Manquants). - Les joints de scellement sont détériorés et (ou) absents à plusieurs endroits (portes, fenêtres, balcons, conduits de climatiseurs, etc.) […] Nous ignorons si des dommages sont présents sous les composantes suite à l’usure des joints puisqu’il s’agit d’une inspection visuelle. […]

[138] Il ajoute qu’il y a usure normale pour un immeuble de cet âge, mais certains joints sont absents depuis le début.

[139] En contre-interrogatoire, il admet que les joints absents depuis le début devait être visible depuis le début - visible? J’imagine que cela a été visible.  Quant aux dommages causés par la déficience, il n’en a pas vu.

[140] L’Inspecteur de l’Administrateur dit que, dans la première année, le plan couvre la malfaçon, mais pas dans la cinquième.  Il y a aussi une obligation d’entretien de la part du Bénéficiaire.

 

Décision Calfeutrage

[141] Il n’y a aucune preuve que la situation actuelle soit un vice majeur sous l’article 2118 C.c.q.  Pour cette raison, le Tribunal maintient la décision de l’Administrateur et rejette la demande du Bénéficiaire.

 

9. Salle électrique 

 

[142] Sous ce chapitre sont regroupés deux points et la décision à leur égard se retrouve après l’exposé de ces deux points.

 

i) Salle Électrique (Murs)

[143]  Dans son rapport (page 18), l’expert Bibaud écrit :

Salle électrique (Murs) Les lisses basses des colombages en bois des murs extérieurs de la salle électrique sont appuyées directement sur la dalle de béton.  Cela expose ainsi les éléments en bois en contact avec l’eau et l’humidité puisqu’il n’y a pas de dégagement. Le bois est endommagé et noirci au pourtour des murs ce qui nécessiterait de procéder à des travaux correctifs.  Le remplacement de la lisse basse sur une basse en béton surmontée d’environ 4’’ à 6’’ serait à prévoir.

[144] L’expert témoigne à l’effet qu’il faudrait un muret de béton, qu’il y a dommage à la charpente et à la structure des murs extérieurs.

[145] En contre-interrogatoire, il affirme que le risque de détérioration se limite au autour de la salle électrique, la pourriture affecte la structure, à un moment donné la toiture pourrait d’effondrer, l’usure est prématurée pour un bâtiment de cet âge là - la durée de vie totale est évaluée à 10 à 15 ans avant que la toiture s’effondre.

[146] Au sujet de cette salle électrique, le représentant de l’Entrepreneur dit qu’Hydro Québec a demandé de mettre une remise qu’on met n’importe où à terre, il dit qu’il faut que ce soit chauffé (à la demande d’Hydro), mais c’est au Bénéficiaire à décider s’il veut y mettre le chauffage ou non.  Il n’y a dans cette remise que les compteurs d’Hydro Québec.  La taille de cette salle est de 4’ par 6’.  Son seul but est de mettre les compteurs à l’abri.

[147] Hydro Québec dit que les compteurs doivent être à l’abri. Cela doit être normalement tempéré - l’hiver, on peut chauffer même si on n’occupe pas les lieux.

[148] Il dit qu’en fait ce n’est pas une salle électrique, plutôt un abri. Il n’y a pas de charpente, il n’y a pas de structure, c’est juste une boîte accotée au bâtiment.

[149] L’Inspecteur de l’Administrateur n’a pas eu accès à cette salle, le représentant du Bénéficiaire n’ayant pas la clé le jour de l’inspection. Il ne sait même pas si la salle a une chaufferette.

[150] En contre-interrogatoire, il dit que on peut dire que c’est une malfaçon de mettre du bois sur du béton, on ne fait jamais ça. Toutefois, il ajoute que cette malfaçon n’est pas un vice majeur car c’est accoté sur du parement de briques, c’est dehors, même si cela tombait ce n’est pas habité, ce n’est pas une salle électrique mais un abri fermé pour des compteurs électriques. Si cela s’écroulait et qu’Hydro exigeait qu’on le refasse, les gens pourraient de toutes façons continuer à habiter à l’immeuble, cela n’a donc rien à voir avec l’habitabilité de l’immeuble.

[151] Le Bénéficiaire dit qu’il y a une chaufferette mais ne peut pas confirmer si elle fonctionne.

 

ii) Salle Électrique (Pare-Vapeur)

[152] Dans son rapport (page 30), l’expert Bibaud écrit :

Salle Électrique (Pare-Vapeur) Il ne semble pas y avoir de pare-vapeur entre le revêtement de finition et l’isolation du toit dans la salle électrique.  Normalement, il devrait y avoir un pare-vapeur afin de réduire la diffusion de l’humidité pour prévenir les risques de condensation et de formation de glace sur les composantes du toit lorsque la pièce est chauffée. L’installation d’un pare-vapeur doit être considéré pour prévenir les risques de problèmes.

[153] En contre-interrogatoire, il dit qu’il est possible que le pare-vapeur soit là mais il ne l’a pas vu.  Il a vu un isolant mais ne sait pas si c’est chauffé.  Il admet que si c’est jamais chauffé, il n’y a pas de problème de pare-vapeur.


Décision sur le point 9

[154] Le Tribunal est appelé à trancher la question à savoir si cette « salle électrique » objet du présent litige, de 4 pieds par 6 pieds, qui n’abrite que les compteurs électriques, dont on dénonce la pourriture à la base des murs et le défaut du pare-vapeur, est couverte par le Plan de garantie ou non.

[155] Même si le représentant de l’Entrepreneur et l’Inspecteur de l’Administrateur ont dit que cette « salle électrique » était accotée au mur, la décision de l’Administrateur objet du litige n’a pas abordé la question à savoir si cette « salle électrique », qu’Hydro-Québec appelle un abri permanent, tombait sur une exclusion du plan de garantie comme étant extérieure au bâtiment (article 29 (9) du Règlement), pour cette raison, le Tribunal  considérera cette salle électrique comme faisant partie du bâtiment.

[156] Il s’agit d’une partie essentielle du bâtiment, puisque l’Entrepreneur admet qu’Hydro-Québec a une norme (les normes d’Hydro Québec sont sur leur site web) exigeant la pose d’un abri permanent de ces compteurs extérieurs de l’immeuble.

[157] La norme, en effet, parle d’un abri permanent qui protège les appareils contre les intempéries, la condensation, les éclaboussures et les poussières excessives (et l’air salin, mais le soussigné n’a aucune preuve que ce soit applicable rue Panet à Montréal).

[158] Il est évident que cette « salle électrique », ou abri permanent, n’a pas été construite selon les règles de l’art - l’Inspecteur de l’Administrateur admet - on peut dire que c’est une malfaçon de mettre du bois sur du béton, on ne fait jamais ça.

[159] Surtout, il y a aujourd’hui preuve de pourriture à la base des murs.

[160] Beauchamp et Mondoux[22], cités par le Bénéficiaire, écrivent (p. 21) :

Le client sera protégé contre l’effondrement ou la dégradation de l’ouvrage.  La notion de perte s’appréciera en rapport avec le résultat mais aussi suivant la destination et l’utilisation prévue de l’ouvrage.  La perte sera toute défectuosité grave qui entraîne un inconvénient sérieux et rend l’ouvrage impropre à sa destination.  Malgré qu’il n’y ait pas de risque immédiat, si les vices de construction sont susceptibles de compromettre la durée et la conservation de l’immeuble, la présomption s’appliquera.

[161]  Dans la décision arbitrale Syndicat du 3411 au 3417 Avenue des Érables c. Devex et La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ[23], l’arbitre écrit :

[14] Les parties sont de plus unanimes à l’effet que ce constat est une malfaçon, et/ou que ce constat est un vice caché, tout le litige résulte à savoir s’il s’agit ou non d’un vice majeur, puisque plus de trois (3) ans se sont écoulés depuis la réception des parties communes.

[15] Afin de faire droit à la demande des Bénéficiaires, je dois me satisfaire qu’il s’agit d’un vice qui porte atteinte à l’intégralité ou à la structure du bâtiment et/ou qu’il puisse rendre le bâtiment impropre à l’usage auquel il est destiné puisque la norme juridique générale impose un caractère « sérieux » ou « important » du vice, un critère déterminant.

[16] Les décideurs qui m’ont précédés ont aussi accepté de considérer le vice suffisamment important, lorsqu’on est placé dans une situation où il y a perte de l’ouvrage et que le préjudice soit né et actuel, de manière immédiate. La notion de   « perte » doit recevoir une interprétation large et s’étendre à tout dommage sérieux subis par l’ouvrage immobilier [L’Assurance Mutuelle des Fabriques de Montréal c. Lorancon Inc. et al, C.S.Q. : 500-22-106949-053, sous la plume de l’Honorable Christian M. Tramblay, J.C.Q].

[17] Dans le cas qui nous concerne, je rappelle que les Bénéficiaires sont en demande et que ces derniers ont le fardeau de me convaincre.

[18] Il n’y a pas eu de preuve que l’immeuble est devenu non sécuritaire en raison de vices ou encore qu’il y a danger d’écroulement de certaines parties.

[19­] Les parties ont, de plus et de consentement et dans la collégialité, évalué que l’ensemble des correctifs utiles et nécessaires à corriger la situation, sont d’approximativement dix à onze mille dollars (10,000.00$ @ 11,000.00$), avant taxes et frais d’expertise. De toute évidence, considérant la valeur de l’ensemble immobilier, le travail à corriger n’est pas majeur. Ceci n’est pas une fin de non-recevoir aux qualificatifs du vice recherché. S’il est vrai qu’en certaines instances, le travail à corriger est possiblement majeur, mais qu’il ne s’agit pas d’un vice majeur, puisque de jurisprudence constante, on ne peut confondre travaux majeurs avec vices majeurs, je suggère que le contraire est tout aussi vrai. Travaux et/ou correctifs qui pourraient ne pas être (considérant l’ensemble de la valeur immobilière) considérés majeurs, ne disqualifient pas le vice pour autant. […]

[162] Enfin, dans l’affaire Syndicat de copropriété 3667346 c. Habitations Trigone 2000 Inc. et La Garantie Habitation du Québec[24], l’arbitre écrit :

 

[91] Cette notion de « perte de l’ouvrage » a déjà été interprétée par les auteurs et la jurisprudence. Selon cette interprétation la « perte de l’ouvrage » ne nécessite pas que tout le bâtiment doit s’écrouler.

 

[92] Selon les auteurs Rodrigue et Edward [Chapitre intitulé La responsabilité légale pour la perte de l’ouvrage et la garantie légale contre les malfaçons, Me Sylvie Rodrigue et Me Jeffrey Edwards, La construction au Québec : Perspectives juridiques, Wilson & Lafleur 1/998, p. 434]:

« Pour se prévaloir de l’article 2118 C.c.Q., il n’est pas nécessaire d’établir ni le fait que l’ouvrage a péri ni le moment auquel il va s’écrouler. Il suffit de démontrer la présence des inconvénients ou d’un danger sérieux qui pourrait entraîner une perte de l’ouvrage, c’est-à-dire une perte potentielle. »

Voir aussi à cet effet les auteurs Beaudoin et Deslaurier. [La responsabilité civile, 7e Édition, volume 2, Jean-Louis Beaudoin et Patrice Deslauriers, par. 2-274].

[93] De plus, selon les mêmes auteurs, l’expression « perte de l’ouvrage » englobe aussi une perte partielle du bâtiment en autant qu’il s’agisse d’une partie importante de ce dernier. Voici ce qu’ils écrivent à ce sujet [Me Sylvie Rodrigue et Me Jeffrey Edwards, cité au paragraphe [92]]:

« Une simple perte partielle est suffisante lorsqu’il y a menace d’effondrement ou de fléchissement de certaines parties essentielles de l’ouvrage, ou encore de ses composantes essentielles. »

[94] Selon la preuve devant moi, la dégradation importante du plafond, des murs et du plancher de la salle électrique constitue un inconvénient ou un danger sérieux qui comme on a vu plus tôt, constitue une perte potentielle de la salle électrique. De plus, selon mon appréciation, cette salle électrique où se trouvent les disjoncteurs pour les parties privatives ainsi que pour la partie commune du bâtiment de six unités de condominium, constitue une partie essentielle du bâtiment.

 

[95] Il s’ensuit que cette dégradation de la salle électrique peut être considérée comme une « perte de l’ouvrage » immobilier au sens de l’article 2118 C.c.Q.

 

[163] Vu la preuve, vu l’interprétation du mot perte au sens de l’article 2118 C.c.q, vu les décisions mentionnées ci-haut, le Tribunal doit donc conclure que cette dégradation de ce qui est appelée salle électrique dans le présent litige est « perte de l’ouvrage » immobilier au sens de l’article 2118 C.c.Q. et accueillir la réclamation du Bénéficiaire quant au point Salle Électrique (Murs).

[164] Le Tribunal n’a eu aucune preuve que l’abri permanent devait être chauffé et n’a aucune preuve que, dans les faits, l’abri est ici chauffé, malgré la présence sur place d’une chaufferette. La présence du pare-vapeur n’étant pas nécessaire si l’abri n’est pas chauffé, et la situation actuelle, selon la preuve, ne résultant en aucun dommage qui cause la « perte de l’ouvrage », la réclamation du Bénéficiaire au sujet du pare-vapeur n’est pas accueillie.

 

Recours civils

[165] Le Tribunal d’arbitrage soussigné rappelle que son rôle est de trancher les différends concernant la garantie, et que le Bénéficiaire conserve ses recours civils contre toute personne autre que l’Administrateur, à supposer qu’il ait un recours fondé et sans que cette réserve ne puisse être interprétée dans un sens ou dans l’autre.


FRAIS

[166] L’article 37 du Règlement stipule : 

Les coûts de l'arbitrage sont partagés à parts égales entre l'administrateur et l'entrepreneur lorsque ce dernier est le demandeur.

Lorsque le demandeur est le bénéficiaire, ces coûts sont à la charge de l'administrateur à moins que le bénéficiaire n'obtienne gain de cause sur aucun des aspects de sa réclamation, auquel cas l'arbitre départage ces coûts.

 

[167] Le Bénéficiaire ayant eu gain de cause sur une partie de sa réclamation, les frais d’arbitrage seront à la charge de l’Administrateur du Plan de Garantie, sous réserve de ce qui suit pour les frais d’expert.

 

FRAIS D’EXPERT

[168] L’article 38 du Règlement stipule : 

L'arbitre doit statuer, s'il y a lieu, quant au quantum des frais raisonnables d'expertises pertinentes que l'administrateur doit rembourser au demandeur lorsque celui-ci a gain de cause total ou partiel.

 

[169] Le Bénéficiaire a produit après l’audience, donc sans la présence du témoin impliqué, la facture de son témoin expert, intitulée Frais pour témoin expert à la cour dans le dossier d’arbitrage tenu le 22 mai 2013, sous B-2, au montant de $880.00.

[170] Cette facture couvre non seulement les honoraires de l’expert, mais aussi ses frais de déplacement, de stationnement et de repas dont la somme a été selon toute évidence arrondie (se terminant par un 0).

[171] L’article 38 du Règlement parle du quantum des frais raisonnables d'expertises pertinentes à être remboursés. La présence du témoin expert a été utile pour permettre au Bénéficiaire d’exposer sa réclamation, qui a été retenue en partie.

[172] Le Tribunal, dans son évaluation sous l’article 38 du Règlement pour les frais de déplacement, de stationnement et de repas demandés par le témoin expert au Bénéficiaire, vu la somme arrondie, prend en considération, les indemnités prévues par les différentes règlements en vigueur au Québec en la matière.

[173] La facture du témoin expert est adressée au Bénéficiaire qui l’a mandaté. Le Tribunal arbitral soussigné ne s’immisce pas dans les relations contractuelles entre le témoin expert et le Bénéficiaire et rien ne doit être interprété à cet effet dans la présente décision. L’article 38 parle des frais raisonnables d’expertises pertinentes à être remboursés par l’Administrateur et non, des frais à être payés par le Bénéficiaire qui a mandaté l’expert en vertu d’un mandat donné.

[174] Pour les motifs ci-haut exprimés, vu l’article 38 du Règlement, vu la preuve, vu la décision finale à laquelle il en est arrivé, le Tribunal fixe à 870.00$ plus les taxes le quantum des frais raisonnables d’expertises pertinentes à être remboursés par l’Admininistrateur.

 

PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL D’ARBITRAGE

ACCUEILLE en partie la demande du Bénéficiaire;

MODIFIE en partie la décision de l’Administrateur du 15 mai 2012;

ORDONNE à l’Entrepreneur dans un délai de 30 jours de la signature de ce jugement, en conformité avec les règles de l’art, et À défaut par l’Entrepreneur d’effectuer lesdits travaux dans ledit délai, ORDONNE à l’Administrateur d’effectuer les travaux dans les trente (30) jours suivants dans le même délai,

-       d’effectuer tous les travaux correctifs quant aux points suivant selon les détails au rapport de l’expert Bibaud (pièce A-4) :

Point 6 ii) Escalier (Béton)

Point 9 i) Salle électrique (Murs)

REJETTE la demande du Bénéficiaire quant aux autres points et MAINTIENT la décision de l’Administrateur du 15 mai 2012 quant à tous les autres points et RÉSERVE le droit du Bénéficiaire, à supposer qu’il ait un recours fondé, de porter devant les tribunaux de droit commun, sa prétention quant aux autres points ainsi que de rechercher les correctifs qu’il réclame contre toute personne autre que l’Administrateur, sujet aux règles de droit commun et de la prescription civile;

ORDONNE à l'Administrateur du Plan de Garantie à payer les frais d'arbitrage encourus dans le présent dossier, sous réserves des frais d’expert prévus au paragraphe suivant;

ORDONNE à l’Administrateur du Plan de Garantie de payer au Bénéficiaire la somme de 870.00$ plus les taxes applicables à titre de frais d’experts.

                                                                       Montréal, le 3 juin 2013

 

__________________________

Me ROLAND-YVES GAGNÉ

Arbitre / CCAC

Procureurs :

Me Marie-Cécile Bodéüs
De Grandpré Joli-Coeur S.E.N.C.R.L.
Pour le Bénéficiaire

 

Me Alexandre Normandin-Lussier

ME ANDRÉ NAULT, AVOCAT

Pour l’Entrepreneur

 

Me Jean-Raymond Paradis

Qualité Habitation

Pour l’Administrateur

 

 

Jurisprudence et doctrine citées :

 

La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ Inc. c. Maryse Desindes et Yvan Larochelle, et René Blanchet mise en cause AZ-50285725 , 15 décembre 2004.

 

François Beauchamp et Hélène Mondoux, « Les droits et les obligations des parties », dans Contrats, sûretés et publicité des droits, Collection de droit 2011-2012, École du Barreau du Québec, vol. 6, 2011

 

Assistance aux femmes de Montréal c. Les Habitations Alexandre Inc. 2008 QCCS 5204 , Hon. Michèle Monast, j.c.s.

 

Légaré c. Aménagements Pelletier Cour du Québec, REBJ 2002-33734, Hon. R. Peter Bradley, j.c.q.

 

Gestion GM Inc. et Guy Martin c. Construction Daniel Dumont & Fils et Général Accident, REJB 1997-00644 .

 

Filomena Stante et Antonio Carriero c. Les Constructions Oakwood Canada Inc. et La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ SORECONI 09010602, 6 mai 2009, Me Michel A. Jeanniot, arbitre.

 

Baudouin La responsabilité civile, vol II, Cowansville, Éditions Yvon Blais,  7e édition, 2007, p. 256 et seq.

 

Helena Kuzma et al. c. Groupe Immobilier Grilli et La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ, SORECONI  071207001, 30 mai 2008, Me Michel A. Jeanniot, arbitre.

 

Syndicat de la Copropriété Les Jardins du Parc c. La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ, GAMM 2009-09-0003 28 janvier 2010, Me Johanne Despatis, arbitre.

 

Marie-Josée Fillion et al. et 9140-8310 Québec Inc. et La Garantie Qualité Habitation Inc. SORECONI 111609004, 24 janvier 2012, Alcide Fournier, arbitre.

 

Syndicat de la copropriété du 1274 Gilford, Montréal et 153642 Canada Inc. SORECONI 070505001, 14 mars 2008, Me Michel A. Jeanniot, arbitre.

 

Louise Joly et al. c. Construction Casavia Inc. et La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ, SORECONI, 071108001, 17 septembre 2008, Guy Pelletier, arbitre.

 

Poliquin c. Léonide Morneau Construction Enr., #620-22-000076-025, Cour du Québec, 9 février 2005, Hon. Richard Laflamme, j.c.q..

 

Syndicat de la Copropriété Carrefour Renaissance 3410 et 4032802 Canada Inc. et Association provinciale des constructions d’habitations du Québec Inc. (APCHQ) GAMM, 2010-19-007, 15 août 2012, Me Jeffrey Edwards, arbitre

 

André Desvarieux et al. c. Scaltec Construction Inc. et La Garantie Habition du Québec, GAMM, 2009-12-002, 14 août 2009, Me Jeffrey Edwards, arbitre.

 

Syndicat de Copropriété Le Glendale et Le Groupe Arméca Inc. et La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ, GAMM, 2008-12-004, 16 juin 2008, Me Jeffrey Edwards, arbitre.

 

General Signal Ltd. c. Allied Canada Inc., EYB 1994-64526 (C.A.).

 

Promutuel Lévisienne-Orléans, société mutuelle d'assurances générales c. Service de techniciens en électricité du Québec, STEQ inc. 2010 QCCS 1608 , 27 avril 2010 (Jean-François Émond, j.c.s.).

 

Megantic c. Mignault,1928 RCS 389.

 

Construction J.R.L. (1977) Ltée c. Zurich Compagnie d’assurances, J.E. 91-824 (C.A.).

 

Commission de la construction du Québec c. Construction Verbois Inc., J.E. 97-2080 (C.S.).

 

Syndicat du 3411 au 3417 Avenue des Érables c. Devex et La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ SORECONI 061220001, 13 juin 2007, Me Michel A. Jeanniot, arbitre.

 

Syndicat de copropriété 3667346 c. Habitations Trigone 2000 Inc. et La Garantie Habitation du Québec CCAC, S12-021301-NP, 6 août 2012, Me Albert Zoltowski, arbitre.

 

L’Assurance Mutuelle des Fabriques de Montréal c. Lorancon Inc. et al, C.S.Q. : 500-22-106949-053, Hon. Christian M. Tramblay, J.C.Q.

 

J. Rodrigue et J. Edwards, « La responsabilité légale pour la perte de l’ouvrage et la garantie légale contre les malfaçons », La construction au Québec : perspectives juridiques, Wilson & Lafleur, 1998, p. 434.

 

Lue et non citée :

 

SDC Jardins de Grenoble (3 683 432) et 9232-6941 Québec Inc. (Habitation Classique) et la Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ, CCAC, S11-120903-NP, 23 novembre 2012, Me Michel A. Jeanniot, arbitre (normes de sécurité).

 

Paul Bordeleau Syndicat de Copropriété c. Saint-Luc Habitation Inc. et La Garantie des immeubles résidentiels de l’APCHQ CCAC 03-1204/ML, 27 septembre 2004, Me Jeffrey Edwards, arbitre.

 

 



[1] AZ-50285725 , 15 décembre 2004.

[2] François Beauchamp et Hélène Mondoux, « Les droits et les obligations des parties », dans Contrats, sûretés et publicité des droits, Collection de droit 2011-2012, École du Barreau du Québec, vol. 6, 2011.

[3] 2008 QCCS 5204 , Hon. Michèle Monast, j.c.s.

[4] Cour du Québec, REBJ 2002-33734, Hon. R. Peter Bradley, j.c.q.

[5] REJB 1997-00644 .

[6] SORECONI 09010602, 6 mai 2009, Me Michel A. Jeanniot, arbitre.

[7] La responsabilité civile, vol II, Cowansville, Éditions Yvon Blais,  7e édition, 2007, p. 256 et seq.

[8] SORECONI  071207001, 30 mai 2008, Me Michel A. Jeanniot, arbitre.

[9] GAMM 2009-09-0003 28 janvier 2010, Me Johanne Despatis, arbitre.

[10] SORECONI 070505001, 14 mars 2008, Me Michel A. Jeanniot, arbitre.

[11] #620-22-000076-025, Cour du Québec, 9 février 2005, Hon. Richard Laflamme, j.c.q.

[12] GAMM, 2010-19-007, 15 août 2012, Me Jeffrey Edwards, arbitre.

[13] SORECONI 111609004, 24 janvier 2012, Alcide Fournier, arbitre.

[14] SORECONI, 071108001, 17 septembre 2008, Guy Pelletier, arbitre.

[15] GAMM, 2009-12-002, 14 août 2009, Me Jeffrey Edwards, arbitre.

[16] GAMM, 2008-12-004, 16 juin 2008, Me Jeffrey Edwards.

[17] 2010 QCCS 1608 , 27 avril 2010 (Jean-François Émond, j.c.s.).

[18] Jacques Deslauriers, Vente, louage, contrat d'entreprise ou de service, Montréal, Wilson & Lafleur ltée, 2005, p. 596 et 597.

[19] Abderrahim Moustaine et al. c. Brunelle Entrepreneur Inc. et La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de L’APCHQ SORECONI 070424001, 9 mai 2008, Me Jean Philippe Ewart, arbitre.

[20] La prescription civile, 7e édition, 2007, Éditions Yvon Blais, Cowansville, p. 1219, I-1447.

[21] 1928 3 D.L.R. 389.

[22] François Beaucham et Hélène Mondoux, « Les droits et les obligations des parties », dans Contrats, sûretés et publicité des droits, Collection de droit 2011-2012, École du Barreau du Québec, vol. 6, 2011.

[23] SORECONI 061220001, 13 juin 2007, Me Michel A. Jeanniot, arbitre.

[24] CCAC, S12-021301-NP, 6 août 2012, Me Albert Zoltowski, arbitre.