ARBITRAGE EN VERTU DU RÈGLEMENT SUR LE PLAN DE
GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS |
||
CANADA |
||
PROVINCE DE QUÉBEC |
||
|
||
Groupe d’arbitrage et de médiation sur mesure (GAMM) |
||
Dossier no : |
GAMM : 2009-13-002 |
|
APCHQ : 132155-1 (09-362SP) |
||
ENTRE : ÉLIANE HECHT GAERTNER (ci-après les « bénéficiaires »)
ET : LA GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS DE L’APCHQ INC. (ci-après l’« administrateur »)
ET : RÉSEAU VIVA INTERNATIONAL INC. (ci-après l’« entrepreneur »)
|
||
|
||
DEVANT L’ARBITRE : |
Me Johanne Despatis |
|
|
||
Pour la bénéficiaire : |
Mme Élaine Hecht Gaertner |
|
Pour l’administrateur : |
Me Stéphane Paquette |
|
Pour l’entrepreneur : |
M. Gabriel Gaertner
|
|
Date de l’audience : |
26 novembre 2009 |
|
Lieu de l’audience : |
Anjou |
|
Date de la sentence : |
23 décembre 2009 |
|
SENTENCE ARBITRALE
|
||
Adjudex inc.
0909-8342-GAMM
SA-8070
INTRODUCTION
[1] Madame Éliane Hecht Gaertner, la bénéficiaire, conteste en vertu de l’article 35 du Règlement sur le Plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs (décret 841-98), le Règlement, la décision suivante rendue le 30 juin 2009 par la Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc., l’administrateur :
11. Accumulation d’ocre ferreux
Les faits
La bénéficiaire dénonce la présence d’ocre ferreux à l’arrivée du tuyau d’évacuation du drain français.
L’inspection a permis d’observer la présence de fer un peu partout sur le terrain, tout comme nous avons constaté la présence de dépôts ferreux à l’arrivée de la conduite exutoire en contre bas du terrain, tout près du lac, conduite de laquelle l’eau s’échappait normalement, démontrant que le drain n’est pas colmaté.
Le représentant de l’entrepreneur, conjoint de la bénéficiaire, mentionne qu’il ne peut vendre son chalet, la couleur rouille apeurant les éventuels acheteurs.
Analyse et décision (point 11) :
On constate que le point 11 a été dénoncé par écrit dans la deuxième année de la garantie laquelle porte sur les vices cachés.
Or, l’administrateur est d’avis que ce point ne rencontre pas tous les critères du vice caché en ce sens que la situation dénoncée n’est pas cachée.
En effet, à la lumière des constatations faites sur les lieux, nous sommes d’avis qu’un bénéficiaire raisonnablement diligent aurait dû se rendre compte de la présence de déficiences puisque les dépôts ferreux sont présents de façon générale sur le terrain. Il était donc impossible de ne pas constater leur présence.
Par conséquent, l’administrateur doit rejeter la demande de réclamation du bénéficiaire à l’égard de ce point.
[2] La plaignante et l’entrepreneur sont conjoints depuis 30 ans. Ce lien conjugale a été relevé par le procureur de l’administrateur sans toutefois qu’on m’invite à en tirer quelque conclusion juridique décisive. Je m’en suis donc abstenue.
LES FAITS
[3] La bénéficiaire signe l’acte de réception de son chalet située à Chertsey le 12 janvier 2008. Il s’agit d’une nouvelle propriété construite par l’entrepreneur sur un terrain détenu en copropriété.
[4] En décembre 2008, elle dénonce auprès de ce dernier dans les termes suivants notamment un problème d’ocre ferreux :
J’ai acheté de la compagnie Réseau Viva International inc. un chalet […].
J’ai accepté de signer la déclaration de réception de mon chalet le 12 janvier 2008, sous réserve d’une liste de travaux à compléter.
Malgré mes demandes répétées, ces travaux n’ont toujours pas été complétés. De plus, depuis la réception de mon chalet un problème supplémentaire est apparu : de l’ocre ferreux s’accumule par endroit et laisse une odeur fort désagréable.
Par la présente, vous êtes mis en demeure de terminer ces travaux et corriger les imperfections dans les 15 (QUINZE) jours, faute de quoi, je devrais faire intervenir l’assurance garantie maisons neuves auprès de l’APCHQ.
[Caractères gras ajoutés]
[5] L’entrepreneur ne donnant pas suite, la bénéficiaire transmet la dénonciation qui précède en mars suivant à l’administrateur. Celui-ci confie l’affaire à madame Joanne Tremblay, inspectrice-conciliatrice à son emploi. Madame Tremblay procède à une première inspection le 26 mars 2009 et fait rapport le 6 avril suivant.
[6] Selon son rapport, madame Tremblay se dit incapable en raison des conditions climatiques de procéder à une observation de la situation dénoncée. Elle annonce alors qu’elle procédera une inspection supplémentaire lorsque le temps sera propice aux vérifications nécessaires; ce qu’elle fait en juin 2009; d’où la décision en litige.
[7] Madame Tremblay affirme avoir observé au cours de cette seconde visite la présence de ce qu’elle croit être de l’ocre ferreux partout sur le terrain. Il s’agit, explique madame Tremblay, d’une substance orangée causée par une bactérie présente dans le sol qui se développe au contact de l’air et de l’eau. Selon elle, la situation facilement visible partout sur le terrain devait donc être là au moment de la réception du bâtiment ; d’où sa conclusion à l’effet qu’il ne pouvait s’agir d’un vice caché.
[8] De plus, ajoute madame Tremblay, le drain qui passe sous le chalet est raccordé à un exutoire, ce qui permet à l’eau, certes orangée, de s’écouler normalement. Selon madame Tremblay, cet exutoire rattaché au drain est facilement accessible. Aussi si le drain est bien entretenu, il ne présente aucun risque de colmatage imputable à l’ocre ferreux. En somme, selon elle, la présence d’ocre ferreux sur le terrain n’a causé aucun problème de colmatage, d’infiltration ou d’inondation et la présence d’un exutoire permet l’entretien du système et donc, la prévention de problème. Il n’y aurait conséquemment ni malfaçon ni vice caché.
[9] Après avoir expliqué les circonstances dans lesquelles elle a acheté le chalet, madame Gaertner affirme avoir ignoré au moment de la réception qu’il y avait présence d’ocre ferreux sur le terrain. Elle ajoute ne l’avoir appris qu’en octobre 2008 lorsqu’un acheteur potentiel de sa copropriété a refusé de poursuivre les pourparlers en raison de la présence d’ocre ferreux. C’est alors poursuit la bénéficiaire, qu’elle a dénoncé la situation à l’entrepreneur.
[10] Monsieur Gaertner corrobore le témoignage de la bénéficiaire. Il affirme ne pas avoir été familier avec l’ocre ferreux et en avoir appris l’existence au même moment que la bénéficiaire.
[11] Quant à la présence de l’exutoire, tant monsieur Gaertner que la bénéficiaire affirment que les travaux à cet endroit ne sont pas bien faits et n’ont pas été complétés de sorte qu’il y a risque que le drain se colmate. Aussi pour entretenir le drain, il serait utile d’y installer des cheminées en permettant un accès plus facile en outre de bien compléter les travaux au niveau de l’exutoire.
[12] En somme, madame Gaertner craint qu’éventuellement son drain soit obstrué par l’ocre ferreux et que des dommages surviennent à son chalet comme c’est le cas chez son voisin.
ANALYSE ET DÉCISION
[13] Le litige porte sur le point 11 de la décision de l’administrateur rendue le 30 juin 2009.
[14] Juridiquement, toute partie demanderesse a le fardeau de démontrer le bien-fondé de ses prétentions au moyen d’une preuve prépondérante. L’article 2804 du Code civil du Québec nous dit en quoi consiste la prépondérance de la preuve:
La preuve qui rend l’existence d’un fait plus probable que son inexistence est suffisante, à moins que la loi n’exige une preuve plus convaincante.
[15] Je dois donc décider du bien-fondé du présent recours suivant les obligations juridiques des parties et à la lumière de la preuve présentée.
[16] Ainsi, la bénéficiaire a le fardeau de démontrer de manière convaincante que ce dont elle se plaint est anormal et résulte d’une déficience dans les matériaux ou dans leur installation. Autrement dit, il lui incombe de démontrer en quoi précisément les situations dénoncées contrevenaient aux règles de l’art ou aux normes en vigueur dans le domaine de la construction.
[17] Le recours exercé invoque la présence d’un vice caché ou d’une malfaçon.
[18] Avec égards, l’examen de la preuve présentée démontre que même en prenant pour acquis que la situation n’aurait pas été apparente au moment de la réception, il reste que la bénéficiaire n’a présenté aucune preuve qui permettrait de retenir que la situation dont elle se plaint serait le fruit de quelque vice caché ou d’une malfaçon.
[19] Avec égards, l’appréhension de dommages futurs par la bénéficiaire n'est pas suffisante pour conclure à la présence d’un vice caché ou d’une malfaçon. Autrement dit, l’affirmation de la présence d’un danger ou de l’appréhension d’un problème éventuel ne sont pas la preuve d’un problème affectant réellement l’ouvrage.
[20] En l’espèce, aucune preuve n’a été présentée à l’effet que la présence d’ocre ferreux dans le sol aurait dans l’avenir les conséquences appréhendées par la bénéficiaire.
[21] La preuve entendue démontre plutôt de manière prépondérante que la seule présence d’ocre ferreux sur le terrain n’est pas susceptible de causer les problèmes appréhendés par la bénéficiaire, soit le colmatage du drain.
[22] En effet, le témoignage non contredit de madame Tremblay est à l’effet que le drain installé sur les lieux est conforme aux règles de l’art et qu’il est rattaché à un exutoire qui assure un drainage adéquat; bref, avec de l’entretien, les risques de colmatages sont à toutes fins pratiques inexistants. La matérialité de cette preuve n’a pas été contredite dans la mesure où dans les circonstances, la présence d’ocre ferreux sur le terrain est insuffisante pour obstruer le drain s’il est entretenu correctement. Aussi, bien que l’on ait suggéré que l’ajout de cheminées faciliterait cet entretien, il reste que la preuve n’a pas démontré en quoi leur absence constituerait un vice ou une malfaçon.
[23] Pour toutes ces raisons, le recours est rejeté.
[24] En conformité de l’article 123 du Règlement, je départage les coûts d’arbitrage selon les proportions suivantes : 90 % à être défrayés par l’administrateur et 10 % par la bénéficiaire.
|
|
|
__________________________________ Johanne Despatis, avocate Arbitre
|
Adjudex inc.
0909-8342-GAMM
SA-8070