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TRIBUNAL D’ARBITRAGE

 

(constitué en vertu du règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs sous l’égide de la société pour la résolution des conflits inc. (soréconi), organisme d’arbitrage agréé par la régie du bâtiment du québec chargée d’administrer la Loi sur le bâtiment (l.r.q. c. b-1.1))

 

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

DISTRICT DE VALLEYFIELD

 

DOSSIER N° :   071115001

                            (38093-1 GQH)

 

MONTRÉAL, le 28 novembre 2008

 

 

 

ARBITRE : Me ROBERT MASSON, ing., arb.

 

 

 

syndicat de la copropriété du 25 et 27 maricourt

 

             Bénéficiaire - Demandeur

 

c.

HABITATIONS RAYMOND & ASSOCIÉS INC.

 

             Entrepreneur - Défenderesse

 

et

La Garantie HABITATION DU QUÉBEC INC.

 

             Administrateur de la garantie - Défenderesse

 

 

 

SENTENCE ARBITRALE

 

 

 

[1]             Le Tribunal d'arbitrage est saisi d'une demande d'arbitrage formulée en vertu de l'article 35 du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs (Règlement).

 

[2]             L’entrepreneur est le constructeur d’un bâtiment résidentiel à l’Île Perrot détenu en copropriété divise.

 

[3]             Alléguant que la construction comporte des malfaçons, et devant le refus de l’entrepreneur de les corriger, le bénéficiaire met en oeuvre le programme de garantie contractuelle fournie par l’entrepreneur : la «Garantie Qualité Habitation» administrée par La Garantie Habitation du Québec Inc. (La Garantie).

 

[4]             Non satisfait des décisions de l'administrateur de La Garantie, le bénéficiaire en demande l'arbitrage.  La demande d’arbitrage est faite le 15 novembre 2007 ; la procédure d’arbitrage débute le 10 décembre 2007 et une audience préliminaire est tenue par conférence téléphonique le 4 juillet 2008.

 

 

La demande d’arbitrage

 

[5]             La demande d’arbitrage porte sur le seul point de la décision de l'administrateur de la garantie consignée au rapport d'inspection du 5 octobre 2007 : niveau du plancher : béton.

 

[6]             Le bénéficiaire réclame la correction des malfaçons et le remboursement des frais d’expert.

 

[7]             Faute de preuve à cet égard, la valeur de la demande d’arbitrage est estimée par le soussigné à plus de 15,000 $.

 

 

Les faits

 

[8]             La preuve testimoniale et documentaire non contredite soumise lors de l’audience nous apprend ce qui suit.

 

[9]             Une réclamation dans les termes qui suivent, est adressée par Mark de Zoysa à l'entrepreneur le 10 mai 2007 ; elle est reçue par La Garantie le 30 juillet 2007 (A-3) :

 

"The cement that was poured during construction was not poured evenly and correctly.  This mistake has led to slanted floors in different areas of the condo that are not acceptable.  This problem was evident and clear shortly after moving in when furniture was delivered and not sitting straight on the floor."

 

[10]         Le formulaire inspection de fin des travaux et réception du bâtiment (A-5) est signé par Mark de Zoysa le 14 août 2006.  La date de fin des travaux y est établie au lendemain, le 15 août 2006.

 

[11]         Mark De Zoysa achète l'unité numéro 5 du 25 Maricourt le 8 ou le 11 septembre 2006 (les dates au contrat son contradictoires) par contrat passé et signé devant Me Jean-Guy Savard, notaire (A-6).  Il prend possession de l'immeuble et l'occupe à compter de cette date.

 

[12]         Une réclamation et demande d'ouverture du dossier auprès de La Garantie est faite par Mark de Zoysa le 10 juillet 2007 (onglet F).

 

[13]         L’inspecteur de La Garantie inspecte l'unité résidentielle le 3 octobre 2007 et rédige un rapport d’inspection concernant la réclamation.

 

[14]         Dans son rapport, l’inspecteur traite ainsi de la réclamation soumise :

 

"Le propriétaire nous mentionne avoir dénoncé que le béton du plancher n'est pas de niveau causant ainsi des dénivellations à plusieurs endroits au revêtement du parquet de bois.  La situation est connue depuis la prise de possession.

 

Lors de notre inspection, la situation dénoncée n'est pas perceptible à l'œil.  Nous avons fait les vérifications à l'aide d'un niveau (24 pouces) sur l'ensemble du revêtement du parquet de bois.  Les différents écarts de dénivellation observés, notamment celles (sic) du milieu du corridor, du salon et en bordure de la porte patio, sont acceptables.

 

Pour ce qui est du béton coulé au plancher lors de la construction du bâtiment, lequel est un élément des parties communes, nous n'avons pas été en mesure de le vérifier.

 

Par conséquent, La Garantie Qualité Habitation n'a pas à statuer sur ce point dans le cadre de son mandat."

(Le soulignement est du Tribunal d'arbitrage)

 

[15]         L’entrepreneur et l’administrateur de la garantie contestent la demande d'arbitrage du bénéficiaire sur le fond même de cette réclamation.

 

 

Discussion

 

A)                La loi des parties

 

[16]         Le Plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs, mis en vigueur en vertu de la Loi sur le bâtiment, a été institué par le gouvernement du Québec afin de protéger les acheteurs et d'améliorer la qualité des constructions neuves.

 

[17]         Le Procureur général du Québec s'exprimait ainsi alors qu'il intervenait dans un débat concernant une sentence arbitrale rendue en vertu du Plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs où il avait été appelé :

 

"Les dispositions à caractère social de ce règlement visent principalement à remédier au déséquilibre existant entre le consommateur et les entrepreneurs lors de mésententes dans leurs relations contractuelles.  En empruntant un fonctionnement moins formaliste, moins onéreux et mieux spécialisé, le système d'arbitrage vient s'insérer dans une politique législative globale visant l'établissement d'un régime complet de protection du public dans le domaine de la construction résidentielle." [1]

 

[18]         Le contrat de garantie fourni par l’entrepreneur est un contrat du type contrat de cautionnement par lequel La Garantie Habitations du Québec Inc. garantit l’exécution des travaux convenus par un entrepreneur en construction.  Ce contrat est à la fois un cautionnement d’exécution, garantissant la complète exécution des travaux, et un cautionnement contre les malfaçons, garantissant la qualité des travaux exécutés.

 

[19]         Ce contrat de cautionnement est un contrat intervenu en marge d’un autre contrat, le contrat d’entreprise (le contrat de construction), et au bénéfice d’une tierce partie, le propriétaire, qui n’y intervient pas.

 

[20]         C’est un contrat conditionnel et limitatif en ce que la caution indique explicitement dans quelles conditions s’ouvriront les garanties qu’elle offre et quelles sont ces garanties.  On retrouve ces conditions à l'article 7 du Règlement :

 

“Un plan de garantie doit garantir l'exécution des obligations légales et contractuelles d'un entrepreneur dans la mesure et de la manière prévues [au Règlement].” (Le soulignement est du Tribunal d’arbitrage).

 

[21]         C’est aussi un contrat de cautionnement réglementé car toutes les clauses du contrat sont la reproduction intégrale, en faisant les adaptations nécessaires, d’extraits du Règlement qui impose cette intégralité.

 

[22]         À cet égard, il est utile de reproduire en partie l'article 27 du Règlement traitant de la garantie relative aux bâtiments détenus en copropriété divise :

 

"27.  La garantie d'un plan dans le cas de manquement de l'entrepreneur à ses obligations légales ou contractuelles après la réception de la partie privative ou des parties communes doit couvrir:

 

1° le parachèvement des travaux dénoncés par écrit

 

a) par le bénéficiaire, au moment de la réception de la partie privative ou, tant que le bénéficiaire n'a pas emménagé, dans les trois jours qui suivent la réception ;

 

b) par le professionnel du bâtiment, au moment de la réception des parties communes ;

 

2° la réparation des vices et malfaçons apparents visés à l'article 2111 du Code civil et dénoncés, par écrit, au moment de la réception ou, tant que le bénéficiaire n'a pas emménagé, dans les 3 jours qui suivent la réception ;

 

3° la réparation des malfaçons existantes et non apparentes au moment de la réception et découvertes dans l'année qui suit la réception, visées aux articles 2113 et 2120 du Code civil et dénoncées, par écrit, à l'entrepreneur et à l'administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte des malfaçons ;

(...)"

(Les soulignements sont du Tribunal d'arbitrage).

 

[23]         Enfin, le Tribunal d’arbitrage est d’opinion que l'économie générale du Règlement et les buts visés par le législateur, tel que l'exprime plus haut le Procureur général du Québec, l’inscrivent au type des lois de la protection du consommateur.  Il est d’ordre public et on ne peut y déroger.  À preuve, les articles suivants du Règlement :

 

“3      Tout plan de garantie auquel s’applique le présent règlement doit être conforme aux normes et critères qui sont établis et être approuvé par la Régie [du bâtiment du Québec].

 

4       Aucune modification ne peut être apportée à un plan approuvé à moins qu’elle ne soit conforme aux normes et critères établis par le présent règlement.

 

5       Toute disposition d’un plan de garantie qui est incompatible avec le présent règlement est nulle.

...

 

19.1  Le non-respect d'un délai de recours ou de mise en oeuvre de la garantie par le bénéficiaire ne peut lui être opposé lorsque l'entrepreneur ou l'administrateur manque à ses obligations... à moins que ces derniers ne démontrent que ce manquement n'a eu aucune incidence sur le non-respect du délai ou que le délai de recours ou de mise en oeuvre de la garantie ne soit échu depuis plus d'un an.

...

 

105   Une entente [suivant la médiation] ne peut déroger aux prescriptions du présent règlement.

...

 

138   Le bénéficiaire n'est tenu à l'exécution de ses obligations prévues au contrat conclu avec l'entrepreneur qu'à compter du moment où il est en possession d'un double du contrat de garantie dûment signé.

 

139   Toute clause d’un contrat de garantie qui est inconciliable avec le présent règlement est nulle.

 

140   Un bénéficiaire ne peut, par convention particulière, renoncer aux droits que lui confère le présent règlement.”

 

[24]         L'article 6.1 de la Loi sur la protection du consommateur (L.R.Q., c. P-40.1) confirme aussi cette classification :

 

"6.1      Le présent titre, le titre II relatif aux pratiques de commerce, les articles 264 à 267 et 277 à 290 du titre IV, le chapitre I du titre V et les paragraphes c, k et r de l'article 350 s'appliquent également à la vente, à la location ou à la construction d'un immeuble…"

 

[25]         Et l'article 1384 du Code civil du Québec en fait, à certaines conditions, un contrat de consommation :

 

"1384.  Le contrat de consommation est le contrat dont le champ d'application est délimité par les lois relatives à la protection du consommateur, par lequel l'une des parties, étant une personne physique, le consommateur, acquiert, loue, emprunte ou se procure de toute autre manière, à des fins personnelles, familiales ou domestiques, des biens ou des services auprès de l'autre partie, laquelle offre de tels biens ou services dans le cadre d'une entreprise qu'elle exploite."

 

[26]         Pour résumer.  La garantie offerte par l’entrepreneur et administrée par La Garantie Habitation du Québec Inc. dans le cadre du Règlement sur le plan de Garantie des bâtiments résidentiels neufs est un contrat de cautionnement réglementé.  C'est aussi un contrat s’inscrivant au titre des lois de la protection du consommateur et, à certaines conditions, un contrat de consommation.  Enfin, c'est un contrat d’ordre public.

 

[27]         C'est en gardant à l'esprit toutes ces considérations et en s'appuyant sur les textes de loi que le Tribunal d'arbitrage analyse les questions qui lui sont soumises.

 

 

B)        Analyse

 

[28]         D'entrée, le Tribunal estime nécessaire de noter la situation qui suit.

 

[29]         La demande d'arbitrage est faite par Mark De Zoysa "on behalf of the Syndicat de Copropriété de 25 & 27 Maricourt", dont monsieur De Zoysa est le président.  L'identité du demandeur apparaît clairement sur le formulaire de demande d'arbitrage.

 

[30]         Mais l'identité du demandeur n'est pas du tout la même tout au long des événements menant à la demande d'arbitrage.  La réclamation du 10 mai 2007 est signée par Mark De Zoysa, Buyer/Owner et fait référence "to the floors at 25 Maricourt #5 in Ile Perrot".  Le formulaire inspection de fin des travaux et réception du bâtiment est rempli sous la section «B» : bâtiment détenu en copropriété divise (partie privative).  Et le formulaire de réclamation (onglet F), signé par Mark De Zoysa, identifie le propriétaire : monsieur De Zoysa du 25, Maricourt #5.

 

[31]         Le quiproquo de la situation provient du fait que le copropriétaire De Zoysa est aussi le président du syndicat des copropriétaires.  Tous les faits démontrent que la réclamation est faite par et pour le copropriétaire De Zoysa.  Ce n'est qu'au moment de la demande d'arbitrage qu'apparaît le nom du syndicat des copropriétaires.

 

[32]         Le Tribunal d'arbitrage note à cet égard que monsieur de Zoysa confond son rôle à titre personnel avec celui de président du Syndicat de la copropriété du 25 et 27 Maricourt.  Tout comme il confond également parties communes et parties privatives.  La preuve documentaire et la preuve à l'audience en attestent abondamment.

 

[33]         Dans ces conditions, il ne faut pas se surprendre que lors de la visite d'inspection, l'inspecteur de La Garantie ait traité la demande comme en étant une émanant d'un copropriétaire, pour une partie privative, et non d'un syndicat, pour les parties communes.

 

[34]         L'article 19 du Règlement édicte que :

 

"Le bénéficiaire..., insatisfait d'une décision de l'administrateur, doit, pour que la garantie s'applique, soumettre le différend à l'arbitrage..."

 

[35]         Il est clair de ce qui précède que la réclamation a été initiée par Mark De Zoysa à l'égard de sa partie privative.  C'est aussi à l'égard de sa propriété qu'une décision a été rendue par l'administrateur de la garantie.  Insatisfait, c'est lui, le bénéficiaire de la garantie, qui eut dû faire la demande d'arbitrage ; et non le syndicat des copropriétaires.

 

[36]         D'ailleurs, contre interrogé par le procureur de l'administrateur de La Garantie, monsieur De Zoysa admet s'être satisfait de la constatation du problème décrit plus loin et n'avoir pas soumis le cas à une réunion du conseil d'administration du Syndicat des copropriétaires.

 

[37]         À ce seul titre, la demande d'arbitrage est irrégulière et doit échouer.

 

[38]         Le Tribunal d'arbitrage estime cependant devoir poursuivre l'analyse mais uniquement afin de ne pas déconsidérer l'image de la justice et afin de vider la question.

 

[39]         À l'audience, monsieur De Zoysa indique avoir réalisé que les planchers de bois franc n'étaient pas de niveau, qu'ils penchaient vers la pièce centrale ou, dans cette dernière, vers le centre de la pièce, peu de temps après avoir pris possession de l'immeuble, lorsque les meubles ont été livrés et qu'il a constaté la difficulté de les installer à niveau :

 

"This problem was evident and clear shortly after moving in when furniture was delivered and not sitting straight on the floor."

 

[40]         Le procureur de l'administrateur de la garantie fait remarquer au Tribunal d'arbitrage que la prise de possession a eu lieu le 8 ou le 11 septembre 2006 et que la réclamation du bénéficiaire qui date du 10 mai 2007 à l'entrepreneur et du 30 juillet 2007 à l'administrateur de la garantie est tardive parce que faite beaucoup plus de 6 mois après la découverte de la malfaçon alléguée.

 

[41]         Le Tribunal d'arbitrage est aussi d'opinion que le délai qu'a mis le bénéficiaire pour dénoncer la situation excède largement le délai de 6 mois imposé par l'article 27 du Règlement (voir plus haut).  À cet égard, la demande d'arbitrage devrait également échouer.

 

[42]         Lors de l'audience, le bénéficiaire choisit d'administrer sa preuve par l'interrogatoire de représentants de l'entrepreneur : Sophie Campeau, adjointe administrative et Alain Bourdeau, surveillant de projet ;  par le témoignage de l'inspecteur de La Garantie Michel Labelle ; puis par le témoignage de Pierre Baudet, inspecteur en bâtiment.

 

[43]         Il ressort de cette preuve que lors de la construction une inspection visuelle de la dalle de béton a été faite par P. Guyon, le menuisier de l'entrepreneur, avant le début de l'installation du parquet de bois ; qu'une dénivellation aurait alors été constatée mais que celle-ci était acceptable car, disent les premiers témoins, le type de parquet posé en est un à double encollage qui exige que la dalle de béton soit droite pour garantir la qualité du travail.  Si le niveau de la dalle de béton n'avait pas été acceptable, le sous-traitant en plancher aurait refusé de commencer la pose.  D'ailleurs, la facture E-1 démontre qu'un produit de nivellement a été utilisé pour aplanir les imperfections.

 

[44]         L'inspecteur de La Garantie relate que lors de son inspection il a constaté de légères déflexions du plancher vers le centre, par niveau, et qu'il a jugé que, basé sur les règles de l'industrie, ces dénivellations sont acceptables.  En fait, fait-il valoir, le plus grand écart de dénivellation se situe au pied de la porte patio qui donne sur le balcon.

 

[45]         Pierre Baudet, de la firme Inspection Pierre Beaudet, est inspecteur en bâtiment, membre de l'Association des inspecteurs en bâtiment du Québec.  Il explique qu'il n'est ni architecte ni ingénieur et que son rôle consiste à effectuer une inspection visuelle du site, du type préachat, et à remarquer les déficiences qu'il constate mais sans les commenter.  S'il dénote une anomalie, il pourra la valider à l'aide d'instruments appropriés mais dans tous les cas, il suggérera au client de faire appel à un expert pour en connaître les causes et les moyens appropriés de correction.  Son témoignage est à l'effet que, parce que ce n'est pas de sa compétence, il ne sait pas si la déflexion du plancher près de la porte patio est due au poids du balcon extérieur installé en porte-à-faux ; qu'il ne sait pas s'il s'agit d'un problème de structure ; et qu'il ne sait pas si le problème en est un relié à la pose du revêtement de bois franc ou si la cause est reliée à la dalle de béton, si problème il y a.  Son opinion est que s'il ne s'agit ni d'un problème de structure ni d'un écart problématique du nivellement du plancher, il s'agit d'un problème d'esthétisme.  La Tribunal d'arbitrage signale que les questions d'esthétismes sont exclues de la garantie.

 

[46]         Olivier Rigal est agent immobilier.  Ami et ancien collègue de travail du bénéficiaire, il l'a assisté dans ses démarches de recherche d'une propriété.  Contre interrogé, il ressort de son témoignage que l'immeuble acheté est un "beau condo" ; un très bon achat par rapport aux critères de l'acheteur et à son budget ; et qu'il n'a pas perdu de sa valeur.

 

[47]         Le bénéficiaire témoigne aussi.  Il ne sait pas si le problème en est un de structure ou de revêtement de sol.  Il n'a pas recouru à un expert car trop onéreux.  Il s'est plutôt satisfait de la constatation d'un problème et en demande la correction.  Car il craint cependant qu'en cas de revente, le problème du plancher ne cause une baisse du prix de vente.  Le Tribunal d'arbitrage est d'opinion que cette crainte est purement hypothétique.

 

[48]         La visite des lieux avant l'audience a permis à l'arbitre soussigné d'examiner le parquet et de constater la situation.  Les inspecteurs Pierre Beaudet et Michel Labelle ont tour à tour manié du niveau pour faire la démonstration de l'existence de dénivellations.  À cette occasion, les meubles du salon ont tous été déplacés pour permettre une démonstration complète, dans tous les sens de la pièce.  Le mesurage fait perpendiculairement à la porte patio, à partir de celle-ci, démontre une certaine dénivellation qui s'estompe à mesure que l'on s'éloigne de la porte patio.  Mesuré dans l'autre sens, du fond du corridor vers la porte patio, on constate quelques ondulations du plancher, à peine perceptibles au niveau, imperceptibles à l'œil, jusqu'à plus ou moins 4 pieds de la porte patio alors que la dénivellation devient plus perceptible au niveau mais encore imperceptible à l'œil nu.  Le coup d'œil général n'est pas inesthétique.

 

[49]         Lors du déplacement des meubles dans la pièce, l'arbitre n'a pas constaté que ceux-ci étaient bancals ou le devenaient au hasard des déplacements.  Le propriétaire a omis de faire une démonstration à cet égard.

 

[50]         Le fardeau de la preuve, celui de démonter clairement le problème allégué, appartient au demandeur.  Il faut ici faire l'hypothèse que le demandeur aurait été le copropriétaire de Zoysa.  Ce dernier a omis de faire toutes les démonstrations nécessaires et de présenter toutes les preuves pour convaincre le Tribunal d'arbitrage du bien fondé de la réclamation et l'erreur dans la décision de l'administrateur de la garantie.

 

[51]         Pour tous les motifs exprimés ci-avant, le Tribunal d'arbitrage aurait été d'opinion de rejeter la demande d'arbitrage du propriétaire et de maintenir la décision de l'administrateur de la garantie consignée au rapport d'inspection du 5 octobre 2007.

 

[52]         Reste finalement à traiter de la dalle de béton.

 

[53]         Aucune preuve n'est apportée à cet égard, mais il est de connaissance judiciaire qu'en matière de copropriété indivise, la dalle de béton des planchers d'un immeuble fait partie de la structure du bâtiment et, partant, des parties communes qui sont la propriété du syndicat des copropriétaires.  À cet égard, si problème il y avait, la réclamation et, en corollaire, la demande d'arbitrage devait émaner du syndicat.

 

[54]         La preuve démontre qu'en raison du coût jugé prohibitif de toute expertise reliée à cette question, monsieur De Zoysa a choisi de ne pas soumettre le cas au conseil d'administration du Syndicat des copropriétaires.

 

[55]         Pour la même raison, aucune preuve à l'égard d'un quelconque vice de construction relié à la dalle de plancher n'a été faite.  Monsieur De Zoysa s'étant satisfait du constat et de l'énonciation d'un problème et de l'avoir rapporté.

 

[56]         Le fait de rapporter ce que l'on croit pouvoir constituer un problème n'est pas suffisant et ne vient pas bonifier une preuve inexistante.  En cette matière, le fardeau de la preuve reposait sur les épaules du bénéficiaire.  Le Tribunal d'arbitrage doit constater l'absence de toute preuve à cet égard  Mais toute cette question n'est que virtuelle, le syndicat des copropriétaires n'étant pas représenté à l'audience.

 

 

C)        Frais d’expert et frais d’arbitrage

 

i)          Frais d'expert

 

[57]         Le bénéficiaire réclame le remboursement des frais d’expert mais aucune preuve n'est faite à cet égard.  La demande n'est en conséquence pas considérée.

 

ii)         Frais d'arbitrage

 

[58]         Quant aux frais d’arbitrage, l’article 123 du Règlement édicte que :

 

“Les coûts de l'arbitrage sont partagés à parts égales entre l'administrateur et l'entrepreneur lorsque ce dernier est le demandeur.

 

Lorsque le demandeur est le bénéficiaire, ces coûts sont à la charge de l’administrateur à moins que le bénéficiaire n’obtienne gain de cause sur aucun des aspects de sa réclamation, auquel cas l’arbitre départage ces coûts.”

 

[59]         Le Tribunal d'arbitrage n'identifie aucun manquement à la décision de l'administrateur de la garantie qui aurait pu inciter le bénéficiaire à présenter la présente demande d'arbitrage et il n'existe aucun motif qui justifierait le Tribunal d'arbitrage à partager les coûts.  Le Tribunal d'arbitrage est d'opinion que les frais de l’arbitrage doivent en conséquence être entièrement supportés par le bénéficiaire.

 

 

 

PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL D’ARBITRAGE :

 

 

[60]         REJETTE la demande d'arbitrage du bénéficiaire.

 

[61]         LE TOUT avec les frais de l’arbitrage à la charge du bénéficiaire, le Syndicat de la copropriété du 25 et 27 Maricourt, conformément au Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs.

 

 

(S) Robert Masson

Me ROBERT MASSON, ing., arb.

 

 

Pour le bénéficiaire : Mark De Zoysa, son président ;

 

Pour l'entrepreneur : Sophie Campeau, adjointe administrative ;

 

Pour l'administrateur de la garantie : Me Avelino De Andrade ;

 

Date d'audience : 11 novembre 2008



[1]     Les Habitations Sylvain Ménard Inc. c. Gilles Lebire, es qualités d'arbitre, et al., 500-17-034723-075 (C.S.), Mémoire de l'intervenant Le Procureur général du Québec, p. 5.