ARBITRAGE

ARBITRAGE

En vertu du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs (Décret 841-98 du 17 juin 1998)

 

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

 

Groupe d'arbitrage et de médiation sur mesure (GAMM)

 

Dossier n° :

GAMM            2013-15-011

Abritat             512549-1

 

Date : 24 avril 2015

 

 

DEVANT L'ARBITRE : JEAN MORISSETTE

 

 

 

SYNDICAT DES COPROPRIÉTAIRES LOT 3 977 437

 

Bénéficiaire

 

c.

 

GESTION MIKALIN LIMITÉE

 

Entrepreneur

 

Et

 

LA GARANTIE ABRITAT INC.

 

Administrateur

 

 

 

SENTENCE ARBITRALE

 

 

[1]        Le procureur de l'Entrepreneur présente une requête en irrecevabilité de la demande d'arbitrage du Bénéficiaire concernant la décision rendue par l'Administrateur en vertu du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs (L.R.Q. c. B-1.1, r.8) le 1er octobre 2013. Cette décision fait état que l'Administrateur du plan ne peut donner de suite à la plainte soumise par le Bénéficiaire, décrite comme un problème d'humidité à l'unité 1 dans un avis du 7 janvier 2013, puisque «Selon les constatations effectuées ainsi que les témoignages recueillis sur les lieux, l'administrateur n'est donc pas en mesure de statuer sur la responsabilité de l'entrepreneur relativement au point 1»;

[2]        Le 25 mars 2014, après une première journée d'audition, j'ai nommé un expert afin de déterminer la source de la présence d'un taux d'humidité élevé sur toute la surface des planchers, de la présence d'odeur dans l'unité d'habitation et des infiltrations d'eau dans le solarium et sous la terrasse de l'unité #1 du bâtiment résidentiel neuf sujet. Seul l'Administrateur était représenté par avocat lors de cette journée d'audition;

[3]        Dans le cours de cette première journée d'audition, les parties ont reconnu comme valide ma nomination et juridiction à rendre une décision sur la demande d'arbitrage formulée par le Bénéficiaire. Le cahier de pièces communiqué par l'Administrateur a alors été produit de consentement, sujet à une preuve contraire (pièces A-1 à A-17);

[4]        Le rapport de l'expert du tribunal du 24 septembre 2014 a été communiqué aux parties par messager le 1er octobre 2014;

[5]        La propriétaire de l'unité 1, Mme Sonia Mattioli, présidente du Bénéficiaire et sa représentante pour les fins de l'arbitrage, a introduit un recours en dommages contre l'Entrepreneur devant la Cour Supérieure du district de Terrebonne, à St-Jérôme, le dossier porte le numéro 700-17-011364-147. Les allégués de la requête en irrecevabilité exposent qu'à l'occasion du traitement du dossier de la Cour Supérieure, il est apparu que la demande d'arbitrage a été présentée hors des délais prescrits par le Règlement et qu'elle devrait être rejetée puisque prescrite;

[6]        Une conférence téléphonique en gestion de la présentation de la requête en irrecevabilité est intervenue et les avocats des parties ont communiqué leurs documents qu'ils déposeront en preuve avant son audition;

LES PIÈCES

[7]        Lors de la présentation de la requête en irrecevabilité, les pièces suivantes ont été produites de consentement :

RE-1 : Requête introductive d'instance dans le dossier # 700-17-011364-147;

>      RE-2 : Photographies, au nombre de cinq (5), produites en liasse;

>      RE-3 : Extrait de l'interrogatoire avant défense du 8 janvier 2015 de madame             Sonia Mattioli dans le dossier # 700-17-011364-147 (pages 4, 38 à 47);

>          RE-4 : Affidavit de Sonia Mattioli du 10 mars 2015;

>          RE-5 : Courriel de Sonia Mattioli du 6 septembre 2012 à monsieur Alain Leguerrier (pièce A-7 du cahier de l'Administrateur);

Ø   RB-1 Extrait de l'interrogatoire avant défense du 8 janvier 2015 de madame Sonia Mattioli dans le dossier # 700-17-011364-147 (pages 44 à 51);

PRÉLIMINAIRES

[8] Les parties, représentées par avocat, ont choisi de procéder en vertu de la preuve documentaire produite au dossier et n'ont pas fait entendre de témoin;

[9] Il appert du dossier que :

[a]        la date de réception du bâtiment pour déterminer de la période de garantie est le 13 octobre 2010;

[b]        la dénonciation du Bénéficiaire a été reçue par l'Administrateur le 9 janvier 2013;

[10] C'est en vertu des dispositions relatives à la période entre la 3ieme et la 5ieme année de la garantie que doit être statuée ma décision. Ces dispositions visant cette période de garantie pour un bâtiment résidentiel neuf détenu en copropriété se retrouvent aux paragraphes 4 et 5 de l'article 27 du Règlement. Ces textes de loi ayant fait l'objet de modifications le 1 er janvier 2015, se pose alors la question préliminaire de l'application ou non du texte de loi modifié pour décider de la requête en irrecevabilité;

[11] Effectivement, depuis le 1 er janvier 2015, le délai de dénonciation du vice caché doit être raisonnable alors qu'auparavant ce délai raisonnable ne pouvait excéder six (6) mois;

[12] Voici le texte de loi qui existait au moment de la décision de l'Administrateur le 1 er octobre 2013 :

« 27. La garantie d'un plan dans le cas de manquement de l'entrepreneur à ses obligations légales ou contractuelles après la réception de la partie privative ou des parties communes doit couvrir:

[...]

4° la réparation des vices cachés au sens de l'article 1726 ou de l'article 2103 du Code civil qui sont découverts dans les 3 ans suivant la réception et dénoncés, par écrit, à l'entrepreneur et à l'administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois  de la découverte des vices cachés au sens de l'article 1739 du Code civil;

5° la réparation des vices de conception, de construction ou de réalisation et des vices du sol, au sens de l'article 2118 du Code civil, qui apparaissent dans les 5 ans suivant la fin des travaux des parties communes ou, lorsqu'il n'y a pas de parties communes faisant partie du bâtiment, de la partie privative et dénoncés, par écrit, à l'entrepreneur et à l'administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte ou survenance du vice ou, en cas de vices ou de pertes graduelles, de leur première manifestation significative; »

(Les soulignés du soussigné)

[13]     Le texte de l'article 27 se lit maintenant ainsi :

« 27. La garantie d'un plan dans le cas de manquement de l'entrepreneur à ses obligations légales ou contractuelles après la réception de la partie privative ou des parties communes doit couvrir:

1° le parachèvement des travaux dénoncés, par écrit:

a)          par le bénéficiaire, au moment de la réception de la partie
privative ou, tant que le bénéficiaire n'a pas emménagé, dans les 3 jours qui suivent la réception;

b)          par le professionnel du bâtiment, au moment de la réception
des parties communes. Pour la mise en oeuvre de la garantie de parachèvement des travaux du bâtiment, le bénéficiaire transmet par écrit sa réclamation à l'entrepreneur et en transmet copie à l'administrateur dans un délai raisonnable suivant la date de fin des travaux convenue lors de la réception;

2° la réparation des vices et malfaçons apparents visés à l'article 2111 du Code civil et dénoncés, par écrit, au moment de la réception ou, tant que le bénéficiaire n'a pas emménagé, dans les 3 jours qui suivent la réception. Pour la mise en oeuvre de la garantie de réparation des vices et malfaçons apparents du bâtiment, le bénéficiaire transmet par écrit sa réclamation à l'entrepreneur et en transmet copie à l'administrateur dans un délai raisonnable suivant la date de fin des travaux convenue lors de la réception;

3° la réparation des malfaçons existantes et non apparentes au moment de la réception et découvertes dans l'année qui suit la réception, visées aux articles 2113 et 2120 du Code civil et dénoncées, par écrit, à l'entrepreneur et à l'administrateur dans un délai raisonnable de la découverte des malfaçons;

4° la réparation des vices cachés au sens de l'article 1726 ou de l'article 2103 du Code civil qui sont découverts dans les 3 ans suivant la réception et dénoncés, par écrit, à l'entrepreneur et à l'administrateur dans un délai raisonnable de la découverte des vices cachés au sens de l'article 1739 du Code civil;

5° la réparation des vices de conception, de construction ou de réalisation et des vices du sol, au sens de l'article 2118 du Code civil, qui apparaissent dans les 5 ans suivant la fin des travaux des parties communes ou, lorsqu'il n'y a pas de parties communes faisant partie du bâtiment, de la partie privative et dénoncés, par écrit, à l'entrepreneur et à l'administrateur dans un délai raisonnable de la découverte ou survenance du vice ou, en cas de vices ou de pertes graduelles, de leur première manifestation significative;

6° le relogement, le déménagement et l'entreposage des biens du bénéficiaire, lorsque, lors de travaux correctifs, le bâtiment n'est plus habitable;

7° la remise en état du bâtiment et la réparation des dommages matériels causés par les travaux correctifs. »

(Les soulignés du soussigné)

[14]        Les modifications apportées au Règlement par le Décret 156-2014 ont d'abord été adoptées par la Régie du bâtiment du Québec, puis, après étude et adaptation, approuvées par le législateur. L'article 54 du Décret publié à la Gazette officielle du Québec du 5 mars 2014, page 869, nous apprend que les modifications entrent en vigueur le 1 er janvier 2015;

[15]        Le délai raisonnable édicté au Règlement actuel n'a plus à respecter le délai maintes fois examiné de 6 mois. Depuis le ler janvier 2015, le Règlement reprend le délai de dénonciation raisonnable du Code civil du Québec dans le cadre de la garantie de qualité (art. 1726 C.c.Q et ss) alors qu'auparavant, il déterminait un délai dans le temps;

[16]        Le Règlement est d'application immédiate selon l'avocate du Bénéficiaire alors que les avocats de l'Entrepreneur et de l'Administrateur plaident que ma décision doit plutôt considérer que le délai de rigueur de 6 mois est écoulé et le droit à la demande d'arbitrage prescrit. Je dois déterminer de cette question avant d'examiner la preuve soumise;

LE TEXTE DE LOI EN VIGUEUR

[17]        L'application immédiate du texte du Règlement en vigueur depuis le 1er janvier 2015 aurait comme effet d'appliquer rétroactivement ses dispositions à une situation préexistante. L'effet rétroactif d'une loi dans le temps est une question importante. L'Honorable juge de la Cour Suprême du Canada, Louis-Philippe Pigeon s'exprime ainsi dans son livre édité par l'Éditeur officiel du Québec en 1978 sur ce sujet :

« LA RÉTROACTIVITÉ

Autre principe d'interprétation, un des plus importants et aussi un des plus compliquées : c'est la présomption que la loi n'a pas d'effet rétroactif, à moins que le contraire ne soit exprimé ou à moins qu'il ne s'agisse simplement de procédure. Tout d'abord, au sujet de cette présomption, il faut faire une observation très importante. Ce n'est qu'une présomption quand on l'applique à l'interprétation d'une loi. Mais, à l'égard d'un règlement, ce n'est plus une présomption, c'est une restriction juridique. Par conséquent, tout pouvoir de faire des règlements doit être interprété de façon à comporter que le règlement doit être interprété de façon à comporter que le règlement ne peut pas avoir d'effet rétroactif. J'insiste sur ce point parce que j'ai été réellement étonnée de voir le nombre immense de règlements dans lesquels on trouve des dispositions par lesquelles on prétend donner l'effet rétroactif. Or, s'il y a une chose qui est certaine, c'est qu'à moins qu'un texte ne le permette expressément, celui qui a le pouvoir de faire un règlement ne peut pas rendre ce règlement rétroactif. En d'autres termes, ce qui vis-à-vis de la loi n'est qu'une présomption, vis-à-vis d'un règlement est une limitation, une restriction juridique et une restriction juridique dont la violation entraîne l'ultra-vires. Par conséquent, dans le domaine des règlements municipaux et pour tout autre règlement pour lequel une procédure spéciale de contestation est prévue, c'est une restriction dont la violation n'est pas couverte par l'expiration du délai de contestation. Comme exemple récent de l'application de ce principe, je citerai la décision de la Cour de l'Échiquier dans La Presse y. Procureur général du Canada, (1964) R.C. de l'É., 627. Il s'agit, en l'occurrence, d'un règlement fédéral mais le même principe est évidemment applicable au provincial. »[1]

[18]        Ce principe de présomption de non rétroactivité des lois est repris par le savant juriste Pierre-André Côté dans son livre concernant l'interprétation des lois.[2]

[19]        La Loi sur le bâtiment (L.R.Q. c. B1.1) institue la Régie du Bâtiment et lui délègue le pouvoir d'adopter des règlements. Ce pouvoir réglementaire est défini à l'article 185 de la Loi sur le bâtiment. La lecture de cet article et de la loi nous apprend qu'aucun pouvoir d'adoption avec effet rétroactif n'est dévolu à la Régie;

[20]        L'article 17 de la Loi sur les règlements (L.R.Q. c. R-18.1) édicte spécifiquement que l'entrée en vigueur d'un règlement est au 15ième jour de sa publication dans la Gazette officielle ou à la date ultérieure qu'indique le règlement. De plus, en vertu de l'article 18 pour qu'un règlement puisse avoir un effet à sa date de publication, le texte de loi doit le justifier. Voici ces articles :

« 17. Un règlement entre en vigueur le quinzième jour qui suit la date de sa publication à la Gazette officielle du Québec ou à une date ultérieure qu'indique le règlement ou la loi en vertu de laquelle le règlement est édicté ou approuvé.

18. Un règlement peut entrer en vigueur dès la date de sa publication à la Gazette officielle du Québec ou entre celle-ci et celle applicable en vertu de l'article 17, lorsque l'autorité qui l'a édicté ou approuvé est d'avis qu'un motif prévu par la loi en vertu de laquelle le règlement peut être édicté ou approuvé ou que l'un des motifs suivants le justifie:

1° l'urgence de la situation l'impose;

2° le règlement établit, modifie ou abroge des normes de nature fiscale.

Le motif justifiant une telle entrée en vigueur doit être publié avec le règlement. »

[21]     L'article 54 du Décret 156-2014 du 19 février 2014 est clair : les modifications adoptées par la régie du bâtiment et approuvées par le législateur entrent en vigueur le 1er janvier 2015. Il n'y a pas d'indication d'urgence et ce n'est sûrement pas une disposition de nature fiscale qui est en jeu. Peut-on conclure qu'il s'agisse d'une loi de procédure et que sa mise en vigueur puisse affecter les droits des parties? Est-il possible que l'examen de la décision de l'Administrateur du 1er octobre 2013 prenne en considération un autre texte de loi que celui qui s'appliquait à l'époque, je ne le crois pas et voici pourquoi :

[22]     La règle de non-rétroactivité d'une loi a été appliquée par la Cour Suprême du Canada dans la cause Martin c. Perrie[3]. Il est intéressant ici de reprendre des passages de ce jugement :

« 19. Ayant cité le passage ci-dessus du juge Williams dans l'arrêt Maxwell y. Murphy, précité, lord Brightman, auteur de l'arrêt du Conseil privé, poursuit, aux pp. 562 et 563:

[TRADUCTION] La Cour fédérale en l'espèce a fait sienne le raisonnement du juge Williams et a conclu comme suit:

À cause de l'omission des (demandeurs) d'intenter l'action dans le délai prévu, les (défendeurs) ont bénéficié d'un "droit acquis" conçu pour leur assurer l'immunité pour les actes accomplis dans l'exercice de leurs fonctions publiques. Ce droit est fort bien préservé par l'interprétation Act de 1967... Il nous semble donc que, dans le cas d'espèce, le délai imparti pour intenter l'action n'a pas été allongé par (la Loi de 1974). La Loi n'a pas d'effet rétroactif, ni aucune application à un droit d'action prescrit avant qu'elle n'entre en vigueur."

Leurs Seigneuries souscrivent entièrement à cette conclusion. Elles ne désirent ajouter que quelques observations.

On ne peut en toute sûreté décider, dans tous les cas, si une loi a un effet rétroactif en qualifiant la loi de loi de fond ou de loi de procédure ...

Leurs Seigneuries estiment que la démarche appropriée en matière d'interprétation de la Loi de 1974 ne consiste pas à décider quelle étiquette lui appliquer, de procédure ou autre, mais plutôt de voir si la loi, au cas où elle serait appliquée rétroactivement à un genre particulier d'affaires, porterait atteinte à des droits et à des obligations existants ...

De l'avis de leurs Seigneuries, un droit acquis d'invoquer la prescription, acquis après que la prescription extinctive a couru, est dans toute l'acception du terme un droit, même si c'est une loi de procédure qui le crée. C'est un droit qu'on ne saurait enlever en conférant à la loi un effet rétroactif, à moins qu'une telle interprétation ne soit inévitable.

20.   Plus loin, à la p. 563, lord Brightman écrit:

[TRADUCTION] L'examen, même le plus sommaire, de l'opinion contraire en montre toute l'injustice. Lorsque la prescription extinctive est acquise, le défendeur éventuel devrait pouvoir présumer qu'il n'a plus à craindre une demande maintenant caduque. Il devrait pouvoir se départir de ses documents, s'ils existent, et des notes concernant les témoignages de ses témoins qui ont été prises; mettre fin au mandat de son avocat, s'il en a retenu un, et ordonner ses affaires en prenant pour acquis qu'il n'encourt plus aucune responsabilité. C'est là la raison d'être de la défense de prescription.

21.   Notre Cour a déjà appliqué des principes similaires dans son arrêt Upper Canada College v. Smith (F.J.) (1921), 61 R.C.S. 413, de même la Cour d'appel de l'Ontario dans son arrêt Kearley v. Wiley, [1931] 3 D.L.R. 68.

22.   Dans l'arrêt Spooner Oils Ltd. y. Turner Valley Gas Conservation oard, [1933] R.C.S. 629, le juge en chef Duff écrivait à la p. 638:

[TRADUCTION] On ne doit pas interpréter une disposition législative de manière qu'elle porte atteinte aux droits acquis ou à "un statut actuel" (Main y. Stark, (1890) 15 App. Cas. 384, à la p. 388), à moins que son texte ne requière cette interprétation. Coke considère cette règle comme une "loi du Parlement" (2 Inst. 292), voulant sans doute dire par là que c'est une règle fondée sur la pratique parlementaire, la présomption sous-jacente étant que, lorsque le Parlement entend porter atteinte à de tels droits, à un tel statut, il fait connaître son intention expressément à moins, en tout les cas, que son intention ne soit parfaitement manifeste par déduction irrésistible.

23.  La majorité en Cour d'appel a établi une distinction entre l'espèce et ces précédents parce que, dans ceux-ci le délai de prescription n'avait été qu'allongé ou réduit, alors qu'en l'espèce c'est son point de départ qui est modifié. Les motifs de la majorité disent, aux pp. 133 et 134:

[TRADUCTION] Dans les affaires précitées, la modification apportée à la prescription dont on était saisi ne faisait qu'allonger ou réduire le délai d'introduction de l'action, qui courait depuis la date où s'était produit l'accident. Le fait ou les faits sur lesquels les actions étaient fondées se rapportaient à des événements qui avaient déjà eu lieu et étaient connus ou auraient dû être connus au cours du délai de prescription alors prévu ...

En l'espèce, la demanderesse n'avait plus aucun droit à exercer dans le délai de prescription maintenant abrogé. Le fait sur lequel cette action se fonde est la découverte, le 16 novembre 1979, qu'un fil de suture non résorbable n'a pas été enlevé au cours de l'intervention chirurgicale qui a eu lieu en 1969, et l'action a été intentée dans l'année de la découverte de ce fait. Permettre à l'action de suivre son cours donc ne donnerait pas, à mon avis, un effet rétroactif à la nouvelle disposition de The Health Disciplines Act. Il est vrai que l'action se fonde sur une faute médicale ou une négligence remontant à 1969, mais une loi ne saurait être qualifiée de rétroactive simplement parce que certains fondements de l'action qu'elle autorise sont antérieurs à son adoption.

24.  Avec égards, je ne saurais en convenir. Cette distinction à elle seule ne suffit pas, à mon avis, à anéantir l'effet de l'ancien article qui avait déjà joué. En vertu de cet article "Aucun membre ... de l'Ordre n'est responsable ... à moins que l'action ne soit intentée dans l'année à partir de la date où les services professionnels dont on se plaint ont pris fin." Donc, le 15 mai 1970, le droit déclarait que l'appelant n'était pas responsable en cas d'action, pour négligence ou pour faute médicale, en raison de services professionnels rendus avant le 15 mai 1969 inclusivement.

25.  Je fais mien le passage suivant, à la p. 138, des motifs de l'opinion du juge Thorson, dissident en Cour d'appel:

[TRADUCTION] Quant aux services rendus en l'espèce, il s'agit de toute autre chose. Le droit d'action les concernant était prescrit bien avant le 14 juillet 1975 et le défendeur en l'espèce avait parfaitement le droit de présumer qu'il n'avait «plus à craindre une demande maintenant caduque" à leur égard. Le délai d'un an à partir de la date à laquelle les services ont été entièrement fournis s'étant écoulé, ce défendeur, comme tous les autres médecins en exercice qui ont fourni des services à une époque où l'ancienne loi était en vigueur, avait donc parfaitement le droit de présumer qu'il pouvait «se départir de ses documents» et «des notes concernant les témoignages» qui auraient pu être prises, et par ailleurs «ordonner ses affaires en prenant pour acquis qu'il n'encourt plus aucune responsabilité».

Son droit acquis par l'effet de la loi d'ordonner ses affaires selon cette prémisse est, à mon avis, l'argument le plus fort qu'on puisse opposer à toute interprétation de la nouvelle loi qui ne fait pas de cas ou considère de peu d'importance les conséquences que représente pour un médecin pratiquant se trouvant dans la situation du défendeur le fait d'ordonner ainsi ses affaires.

26. L'arrêt de la majorité en Cour d'appel ajoute, à la p. 135:

[TRADUCTION] Je ne vois rien dans la nouvelle disposition qui puisse limiter le droit d'action aux seules affaires qui n'avaient pas encore été prescrites par l'ancien article de The Medical Act, au moment de l'adoption du nouveau texte, soit la position prise par l'avocat des appelants. Si l'assemblée législative avait voulu une telle restriction, l'article, à mon avis, aurait été libellé en conséquence. »

[23]    En d'autres mots et j'abonde dans ce sens, le délai de dénonciation ne peut être interprété comme une règle de procédure ayant un effet immédiat, puisque celà aurait pour effet de priver une partie d'un moyen de défense qui lui était acquis, l'extinction de la demande d'arbitrage par prescription. Quelques autres décisions nous ont été soumises dans ce sens.[4]4

[24]    Je tiens à souligner que cet effet de non rétroactivité s'applique dans ce cas-ci puisque la décision de l'Administrateur sous examen a été rendue en vertu des dispositions d'avant les modifications du Règlement au 1er janvier 2015. Je ne me prononce pas sur les contrats de construction d'avant cette date qui n'ont pas été l'objet d'une décision de l'Administrateur avant le 1er janvier 2015.

LE DÉLAI DE DÉNONCIATION DU VICE

[25]    À la première question soulevée, je décide que l'effet du Règlement ne pouvant être rétroactif, je dois examiner l'irrecevabilité de la demande d'arbitrage en fonction du texte en vigueur à la date de cette décision. Ainsi la disposition de la dénonciation dans un délai raisonnable, ne pouvant excéder 6 mois s'applique en l'espèce;

[26]    Les principes afférents à cette disposition ont été maintes fois exprimés dans des décisions d'arbitrage ou par les tribunaux de droit commun. Le procureur de l'Entrepreneur a résumé ces divers principes de la façon suivante, jurisprudences à l'appui :

[a]        Le délai de 6 mois est de rigueur;

[b]        Il s'agit d'un délai de déchéance qui ne peut être ni suspendu ni prorogé;

[c]        Le pouvoir d'agir en équité de l'arbitre ne lui permet pas de passer outre à ce délai en le suspendant ou en le prorogeant;

[d]        L'ignorance du bénéficiaire ou sa bonne foi ne peuvent justifier qu'il soit passé outre à ce délai;

[e]        Il en est de même des représentations et des promesses de l'entrepreneur et même des travaux de correction qu'il aurait entrepris et/ou effectués;

[f]         Ce délai commence au moment où le bénéficiaire a connaissance d'un  problème même s'il n'en connaît pas la cause;

[g]        Dans ce délai, une dénonciation écrite doit être reçue de l'entrepreneur et de l'administrateur;

[h]        Il est impératif que cette dénonciation soit reçue par l'entrepreneur et par l'administrateur dans ce délai de 6 mois;

[27] Voici quelques citations des textes de jurisprudence soumis qui font état des principes résumés :

Syndicat de la copropriété Promenade de la Rive c. La  Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l'APCHQ Inc.

[23] La défenderesse, quant à elle, réfère aux dispositions du contrat de garantie, lequel reprend les dispositions du Règlement qui est d'ordre public. L'article 34 du Règlement, prévoit que le bénéficiaire doit dénoncer le défaut de construction constaté par écrit à l'entrepreneur et à l'administrateur et que cette dénonciation doit être faite dans un délai raisonnable de la découverte du défaut de construction, lequel ne peut excéder six mois de la découverte. De plus, lorsqu'il s'agit d'un vice de conception, de construction ou de sol, la garantie offerte vise les vices qui apparaissent dans les cinq ans suivant la fin des travaux (article 27) qui ici a été établie le 17 mai 2005.

[28] Sous la plume de la juge Rayle, la Cour d'appel signale également que le contrat de garantie est un contrat réglementé dont le contenu est imposé par le législateur, ce qui empêche le recours à des règles d'interprétation comme celles visées à l'article 1432 C.c.Q. relativement au contrat d'adhésion.

[36] Le Tribunal ne croit pas qu'il y ait lieu de commenter davantage sur les arguments respectifs des parties, puisqu'il considère que la preuve démontre l'absence de dénonciation en temps utile du vice majeur affectant certaines des unités du rez-de-chaussée de la copropriété administrée par la demanderesse, la privant par le fait même de la garantie établie à ce plan. [...][5]

Gilles Domaine & Jean-Claude Bellerive c. Construction Robert Garceau Inc. & la Garantie Qualité Habitation 2

« [...] [5] L'administrateur se refuse de donner suite au(x) demande(s) des bénéficiaires puisque :

[5.1] Selon l'Administrateur, les Bénéficiaires ont pris connaissance d'une situation au plus tôt en fin octobre, début novembre 2007, au plus tard au « printemps » 2008 et n'ont pas fait de réclamation écrite à l'Administrateur avant le 24 mai 2013. Conséquemment, il se serait passé un délai de plus de six (6) mois entre la découverte de la situation et la dénonciation;

[...]

[50] Le Tribunal est d'avis, tel que l'arbitre Ewart l'a exprimé récemment dans une autre affaire, que le délai maximum de six (6) mois prévu aux alinéas 3e, 4e et 5e respectivement de l'article 10 du Règlement est de rigueur et de déchéance et ne peux (sic) conséquemment être sujet à extension;

[...]

[55]   Une des conséquences de la déchéance, la perte ou forclusion du droit d'exercice d'un droit particulier, dans le cas des présentes quant à l'Administrateur, le droit des Bénéficiaires de requérir la couverture du plan de garantie, n'est pas sujet aux dispositions de suspension ou interruption de la prescription applicables dans certaines circonstances. Alors qu'un délai de prescription peut être suspendu et interrompu (article 2289 C.c.q. et s.), la solution contraire prévaut pour le délai de déchéance, qui éteint le droit dès que la période est expirée quoi qu'il arrive. Le titulaire du droit, de ce fait, ne peut même plus invoquer celui-ci par voie d'exception.

[56]   En résumé, la dénonciation prévue à l'article 10 du Règlement se doit d'être par écrit, est impérative et essentielle, le délai de six mois prévue au même article emporte et est un délai de déchéance, et si ce délai n'est pas respecté, le droit des Bénéficiaires à la couverture du plan de garantie visé et au droit à l'arbitrage qui peut en découler sont respectivement éteints, forclos et ne peuvent être exercés;

[...]

[58] Le Tribunal comprend qu'il ne s'agit pas ici de plaider sa propre turpitude mais, l'ignorance du délai de six (6) mois prévus aux articles 3.2, 3.3 et/ou 3.4 du contrat de garantie et/ou de l'article 10 du Règlement ainsi que la bonne foi des parties ne constituent pas des éléments en droit qui habilitent le décideur à faire fi d'un délai de déchéance. Tout motif, quel qu'il soit, (si noble soit-il) ne peut reposer sur un fondement juridique puisque même si la preuve révèle qu'il pouvait s'agir de l'erreur ou de la négligence d'un tiers mandataire et/ou conseiller, il s'agit ici d'un délai de déchéance; sitôt le calendrier constaté, l'arbitre est dans l'impossibilité d'agir; [...] »[6]6

Valérie Hamelin c. Groupe Sylvain Farand Inc. & la Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l'APCHQ Inc.

« [...] 11 mars 2014: Tenue de la Conférence préparatoire par téléphone.

L'Administrateur formule une objection préliminaire en exception déclinatoire pour tardivité de la réclamation de la Bénéficiaire en vertu de la Garantie.

L'objection étant fondée sur le fait que le délai de dénonciation des malfaçons, des vices cachés ou des vices majeurs excède le délai raisonnable de six (6) mois de leur découverte ou survenance ou, en cas de vices ou de pertes graduels, de leur première manifestation.

[...]

[43] Le Tribunal arbitral étant tenu de trancher le litige conformément au droit et à la jurisprudence qui sont applicables. Il doit tenir compte des dispositions pertinentes du Règlement qui le prévoient et de la jurisprudence arbitrale majoritaire et constante depuis plusieurs années qui reconnaît que le Règlement et le Contrat de garantie des maisons neuves exigent que la dénonciation écrite soit faite à l'Entrepreneur et à l'Administrateur dans un délai raisonnable qui ne peut excéder six (6) mois de la découverte du vice ou de la malfaçon, pour décider du sort de la Requête de l'Administrateur;

[44]  Le silence de la Bénéficiaire entre octobre 2011, époque où elle découvre de nouveau des espacements entre les planches des planchers de sa résidence, et février 2013 lui est fatal puisque sa Demande de réclamation écrite relativement aux problèmes des planchers de sa résidence est soumise à l'Administrateur dans un délai qui excède six (6) mois de sa découverte;

[45]   Comme le délai raisonnable de six (6) mois établi par le législateur est un délai de déchéance, qui ne s'interrompt pas, qui ne se suspend pas et qui ne se proroge pas et ce, même pour des motifs d'équité, la Bénéficiaire est déchue de son droit de recours à l'égard des problèmes des planchers de sa résidence dans le cadre de la Garantie. Son droit est éteint dès que la période est expirée tel que le souligne Me Ewart dans une décision arbitrale de mai 2008;

[46]   La Bénéficiaire n'a pas respecté ce délai de rigueur et elle est malheureusement victime de sa propre inaction; [...] » [7]7

Jessica Gattas & Viviane Aboud c. Groupe Construction Royale Inc. & la Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l'APCHQ Inc.

« [...] [68] Dans la présente instance, les Bénéficiaires sont en demande et ce sont eux qui ont le fardeau de convaincre le Tribunal qu'ils ont dénoncé les malfaçons faisant partie des points 11 à 14, 16 à 18, 22 à 30, 41 et 42 à l'Entrepreneur et l'Administrateur dans les délais prescrits par l'article 10.3 du Règlement;

[...]

I. QUELS SONT LES DÉLAIS APPLICABLES POUR DÉNONCER DES MALFAÇONS APRÈS LA RÉCEPTION DE LA MAISON?

[...]

[104] Les Bénéficiaires étaient tenus en vertu de l'article 10.3 du Règlement d'aviser par écrit l'Entrepreneur et l'Administrateur « dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte des malfaçons ». Par conséquent, les Bénéficiaires auraient dû dénoncer les malfaçons au plus tard en octobre 2011, ce qu'ils n'ont pas fait.

[...]

[110] L'article 10.3 lu conjointement avec l'article 18.1 du Règlement impose 2 obligations légales impératives au bénéficiaire en faisant valoir son droit à la couverture du plan de garantie, à savoir l'obligation de dénoncer « par écrit, à l'entrepreneur et à l'administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte des malfaçons » à défaut de quoi la prescription ne sera pas interrompue.

[...1

[114]   Dans la présente affaire, le défaut de la part des Bénéficiaires d'aviser par écrit l'Entrepreneur et l'Administrateur « dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte des malfaçons » s'avère fatal;

[115]   Le fait qu'il ait fallu 10 mois aux Bénéficiaires pour dénoncer par écrit les malfaçons, n'aurait aucun effet sur la déchéance des Bénéficiaires d'exercer leur droit de chercher à obtenir une couverture dans le cadre du plan de garantie, en ce qu'un avis écrit fourni à l'Entrepreneur et à l'Administrateur au-delà des délais prescrits par l'article 10.3 du Règlement, entraîne immédiatement la déchéance des droits des Bénéficiaires aux termes du plan de garantie.

[...]

[117]   Il est tout aussi indispensable que le bénéficiaire dénonce par écrit les déficiences à l'entrepreneur et à l'administrateur. Bien que le bénéficiaire ne naît (sic) pas tenu de dénoncer les déficiences simultanément à l'entrepreneur et à l'administrateur, le bénéficiaire est néanmoins tenu de dénoncer par écrit les déficiences à l'entrepreneur et à l'administrateur dans les délais prescrits par l'article 10 du Règlement.

[118]   Ainsi, dans les cas où les bénéficiaires ont donné un avis à l'entrepreneur dans les délais requis et à l'administrateur au-delà des délais fixés par l'article 10 du Règlement; 9 mois et 25 mois après la découverte des vices cachés, dans de tels cas, les bénéficiaires se sont vu refuser par le Tribunal d'arbitrage, le droit de la couverture dans le cadre du plan de garantie.

[...]

[122] Les Bénéficiaires n'ont pas fait valoir qu'il leur était impossible de dénoncer par écrit à l'Entrepreneur et à l'Administrateur les malfaçons dans les 6 mois qui suivent cette découverte. Cependant, même si un tel argument avait été soumis, le Tribunal ne peut étendre les délais au-delà des 6 mois prévus par le législateur à l'article 10.3 du Règlement.

[…]

[127]      Quelles étaient les intentions du législateur de légiférer l'article 116 du Règlement? De toute évidence, un Tribunal doit statuer conformément aux règles de droit en vigueur. Ces règles de droit comprennent l'application de dispositions (contenues dans le Règlement et le Contrat de garantie qui pourraient mener au déni des droits d'une partie, comme c'est le cas dans la situation présente.

[128]      II est un fait établi, que l'avis écrit des Bénéficiaires à l'Entrepreneur et à l'Administrateur a été fait 10 mois après la découverte des malfaçons. L'avis écrit de 21 février 2012 a excédé de 4 mois, l'avis de 6 mois qui auraient été requis de donner à la suite de la découverte des malfaçons.

[129]      Le délai prescrit par l'article 10.3 du Règlement est clair. Comment le Tribunal dans la présente instance peut appliquer la règle de droit, en vertu de laquelle les Bénéficiaires sont exclus de la couverture dans le cadre du plan de garantie et dans le même temps faire prévaloir de sa discrétion et être équitable ou juste pour eux en permettant leur demande?

[130]      De toute évidence, l'application stricte de l'article 10.3 du Règlement va à l'encontre de la notion d'autoriser la demande des Bénéficiaires sous l'apparence de l'équité ou de la justice. Cela ne signifie pas qu'un Tribunal ne pourrait jamais être équitable ou juste lorsqu'il décide des demandes présentées pour arbitrage.

[131]      Au contraire, l'article 116 permet à un Tribunal d'exercer son pouvoir discrétionnaire équitable à condition que les circonstances le justifient. Toutefois, dans les circonstances actuelles, le Tribunal ne peut interpréter l'article 116, afin de lui permettre d'utiliser les principes d'équité ou de justice et d'ignorer l'application stricte de l'article 10.3 du Règlement et ainsi de facto étendre les délais requis pour donner un avis écrit de 6 à 10 mois suivants la date de réception de la maison.

[132]      Le Tribunal n'a pas le pouvoir discrétionnaire de prolonger les délais prévus à l'article 10.3 du Règlement, en ce que l'article 18 du Règlement dans le cadre de l'application de la prescription met un terme au droit des Bénéficiaires, étant donné que les droits des Bénéficiaires n'ont pas été préservés et exercés dans les délais prescrits.

[133]      Le Tribunal peut exercer son pouvoir discrétionnaire uniquement lorsque des droits existent. Toutefois, les droits qui ont été éteints par effet de la loi n'existent plus et, par conséquent, ces droits ne peuvent donc être ravivés par le pouvoir discrétionnaire équitable du Tribunal.

[…]

[138]  Dans la présente affaire, la règle de droit obligeant les Bénéficiaires de donner leur avis écrit dans un délai qui ne dépasserait pas les 6 mois de la découverte des malfaçons et tout manquement à cette obligation, ne peut être remplacé par l'application de principes d'équité ou de justice qui conduirait le Tribunal à permettre la demande formulée par les Bénéficiaires.

[139]  Face à un délai de déchéance qui lui impose d'adhérer strictement à l'article 10.3 du Règlement, le Tribunal ne peut exercer son pouvoir discrétionnaire en équité pour permettre aux Bénéficiaires de chercher à obtenir une couverture dans le cadre du plan de garantie, quand ils n'ont pas respecté les conditions strictes de dénonciation énoncées à l'article 10.3 du Règlement. En février 2012, les Bénéficiaires n'avaient plus aucun droit de protection en vertu de plan de garantie, car ces droits ont été éteints par prescription. [...] »[8]

Julie Ouellette & Sylvain Chartrand c. 9143-5834 Québec Inc. & La Garantie Abritat Inc.

« [...] [27] Quant au Point 5, ce n'est pas la question de prouver malfaçon qui fait débat; en effet, la prépondérance de preuve démontre malfaçon. Mais l'Administrateur a toutefois statué que c'est sous cause d'absence de dénonciation écrite en conformité avec le Règlement qu'il statue ne pouvoir donner suite à cette réclamation; c'est ce qui est contesté par les Bénéficiaires, alléguant qu'il y a eu erreur d'interprétation ou d'inscription de la part de la représentante de l'Entrepreneur qui rédigeait la Déclaration de réception, et que celle-ci aurait dû inscrire balcon « arrière » et non « avant » sous un des items du formulaire de déclaration.

[…]

[30] Les auteurs considèrent cet avis de dénonciation — qui pour les fins de malfaçons apparentes à la réception prend forme des éléments identifiés à une liste pour fins de parachèvement ou correctifs de la Déclaration de réception — assujetti aux dispositions de l'art. 1595 C.c.Q. qui requiert que l'avis soit par écrit, et la jurisprudence et la doctrine, contrairement à certains autres cas de demandes extra judiciaires, considèrent que cet avis se doit d'être par écrit, est impératif et de nature essentielle;

[31] Le Tribunal souligne diverses décisions récentes rendues par le soussigné de même que sous la plume de différents arbitres qui sous-tendent selon leurs circonstances la nature impérative et essentielle de l'avis de dénonciation. [...] »[9]

Hélène Parent c. Construction Yvon Loiselle Inc. & La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l'APCHQ Inc.

[10] D'emblée, le procureur de la Bénéficiaire souligne que l'Administrateur n'a pas rejeté la demande de réclamation, mais a plutôt refusé de donner suite à la demande en raison de sa non-recevabilité parce que hors délai. À cet égard, si je devais accueillir la demande d'arbitrage de la Bénéficiaire, le dossier devrait être retourné à l'Administrateur pour qu'il statue sur le bien-fondé de celle-ci.

[19]     Ainsi, ce que doit dénoncer un bénéficiaire, c'est le défaut de construction conformément à l'article 18(1) du Règlement. Ce défaut de construction doit être dénoncé dans un délai raisonnable de sa découverte, lequel délai ne peut excéder six (6) mois, afin de bénéficier de la protection du Règlement;

[20]     La jurisprudence en la matière est claire. Le délai de dénonciation de six (6) mois est de rigueur et de déchéance et il n'est pas permis de recourir à l'équité dans ces circonstances. Pour appuyer ses propos, le procureur attire l'attention du Tribunal sur deux (2) décisions portant sur la question du délai de dénonciation de six (6) mois, soit les affaires Moustaine & El-Houma c. Brunelle entrepreneur inc. et Bélisle c. Les habitations Gauvin-Hogue inc.

[21]     Dans l'affaire Moustaine & El-Houma c. Brunelle entrepreneur inc., Me Ewart fait une revue exhaustive de la jurisprudence en matière de délai et conclu comme suit :

[36] En résumé, la dénonciation prévue à l'article 10 du Règlement se doit d'être par écrit, est impérative et essentielle, le délai de six mois prévu au même article emporte et est un délai de déchéance, et si ce délai n'est pas respecté, le droit des Bénéficiaires à la couverture du plan de garantie visé et à le droit à l'arbitrage qui peut en découler sont respectivement éteints, forclos et ne peuvent être exercés.

[22]   Quant à la décision Bélisle c. Les habitations Gauvin-Hogue inc., Me Despatis s'exprime ainsi au sujet du délai de dénonciation de six (6) mois :

[...] force est de constater, après analyse du Règlement qui est clair et impératif sur ces questions et de toute la jurisprudence applicable à des affaires impliquant le respect des dits délais, qu'il s'agit de délais formels qu'il n'est tout simplement pas possible d'ignorer ou de contourner en invoquant l'équité. [...]

[23]   D'abondant, il ajoute qu'il s'agit là du courant jurisprudentiel arbitral majoritaire.

[...]

[39] L'article 10 du Règlement aux paragraphes 3, 4 et 5 traite de trois (3) situations susceptibles de se présenter et qui sont couvertes, sous réserve de certaines limites, par le plan de garantie. Il s'agit de la malfaçon existante, mais non apparente au moment de la réception, du vice caché et du vice de construction. Ces paragraphes précisent que le délai de dénonciation de chacune de ces situations, soit la malfaçon, le vice caché ou le vice de construction, est d'au plus six (6) mois suivants la découverte.

[...]

[45] La jurisprudence est constante à l'effet que c'est la connaissance de l'existence d'un problème qui déclenche l'obligation de dénonciation. Prétendre que la Bénéficiaire devait connaître la nature du vice, i.e. procéder à toutes les analyses et expertises requises pour confirmer la nature du vice affectant sa propriété avant de la dénoncer à l'Entrepreneur avec copie à l'Administrateur serait lui imposer un trop lourd fardeau;

[...]

[47] Par conséquent, j'estime que ce que devait dénoncer la Bénéficiaire à l'Entrepreneur avec copie à l'Administrateur c'est l'existence d'un problème, quel qu'il soit. [...] »[10]

Ekram Bessadok & Anis Farhat c. Garantie Qualité Habitation & Groupe Axxco Inc.

« [...] [41] La raison d'être de dispositions exigeant, sous peine d'irrecevabilité, que la dénonciation d'un vice soit faite à l'intérieur d'un délai ferme, est notamment de permettre à l'administrateur qui s'est engagé à cautionner certaines obligations de l'entrepreneur, de prévenir une dégradation plus grande du bien affecté en lui fournissant l'occasion de corriger rapidement s'il le désire.

[42]   De même, le fait, comme c'est arrivé ici, qu'un entrepreneur reconnaisse à un moment donné auprès d'un bénéficiaire qu'il y a possiblement problème et convienne d'effectuer de plus amples vérifications ou encore de s'en occuper, ne dispense pas le bénéficiaire de son obligation en vertu du Règlement d'en notifier directement l'administrateur, et ce à l'intérieur du délai stipulé de six mois, dans la mesure où tant qu'ils ne sont pas réglés, ces problèmes risquent de conduire à une réclamation auprès de l'administrateur.

[43]   Le Règlement est clair et ne souffre pas d'exception à ce sujet : un avis, écrit, dénonçant la situation doit être donné à l'entrepreneur, mais aussi à l'administrateur dans le délai imparti. Or, en l'espèce, il ne l'a pas été. [...] »[11]

Abdelkrim Rerhaye & Nawal El Alami c. Construction Médiane Inc. & La Garantie Habitation du Québec Inc.

« [...] [10] À ce moment, soit en 2006 ou en 2007, les Bénéficiaires sont encore dans leurs délais pour se prévaloir de la protection du contrat de garantie de trois (3) ans par rapport à un vice caché. Le Bénéficiaire est sans doute de bonne foi. Il attendait que l'Entrepreneur agisse par rapport à ce problème. Si, à partir de ce moment ou d'un délai normal d'attente, le Bénéficiaire avait envoyé un avis écrit dans les six (6) mois suivants, il aurait été dans ses délais, selon nous. Cependant, il a attendu environ deux (2) ans plus tard, soit 5 mai 2009, avant d'envoyer un avis écrit à l'Entrepreneur et à l'Administrateur.

[11] Malgré la bonne foi évidente du Bénéficiaire et malgré l'opportunité qui lui a été donnée par le Tribunal d'arbitrage d'expliquer ou de justifier le passage de cette longue période avant d'envoyer un avis écrit selon les formalités requises, aucune explication satisfaisante n'a été donnée de sa part. Le Bénéficiaire a expliqué qu'il croyait que la protection en vertu de la garantie était uniforme et avait une durée de cinq (5) ans et qu'il suffisait, pour protéger ses droits, d'envoyer une dénonciation écrite à l'Administrateur avant l'expiration d'une période de cinq (5) ans de la réception du bâtiment. [...] »[12]12

Chantal Daigneault & Peter Jones c. Les Constructions Yves Brunette Inc. & La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l'APCHQ Inc.

« [...] [37] Les Bénéficiaires prétendent qu'ils ont dénoncé verbalement les problèmes du revêtement à l'Entrepreneur depuis juillet 2006. Ils se sont fiés aux promesses verbales de l'Entrepreneur à l'effet que les réparations seraient effectuées et c'est seulement quand ces promesses n'ont pas été tenues qu'ils ont envoyé la mise en demeure du 23 mai 2008 suivie d'une deuxième mise en demeure du 10 juin 2008. Ils précisent qu'ils sont toujours été de bonne foi et se sentent des victimes de pratiques douteuses de l'Entrepreneur.

[38] L'Administrateur plaide que le comportement de l'Entrepreneur (la réparation par le sous-traitant à l'automne 2006, la visite de monsieur Brunette à l'automne 2006 et la deuxième visite de l'employé de l'Entrepreneur, Martin, (au printemps 2008) pourrait être interprété comme une reconnaissance de sa responsabilité mais cette reconnaissance ne suspend pas, n'interrompt pas et ne prolonge pas le délai de six mois requis par le Règlement qui est d'ordre public.

[...]

[46]       Selon la preuve soumise, le tribunal estime que dès juillet 2006, les Bénéficiaires avaient un soupçon suffisant de la gravité et de l'étendue des problèmes liés au revêtement de vinyle sur les façades arrière et latérale gauche de leur résidence pour qu'ils appellent l'Entrepreneur et lui demandent de procéder aux réparations nécessaires.

[47]       Leur soupçon était suffisant pour marquer la date de leur découverte du vice, laquelle correspond au début du délai de six mois pour les fins de la dénonciation écrite à l'Entrepreneur et à l'Administrateur même si à cette date, soit en juillet 2006, ils n'avaient pas encore une bonne connaissance de toute la gravité et de toute l'étendue des problèmes précités. Ils n'ont acquis cette connaissance que beaucoup plus tard, soit lors de l'inspection par l'ingénieur Guertin en mars 2009;

[48]       Le tribunal vient donc à la conclusion que le délai de dénonciation a commencé à courir en juillet 2006. Il s'ensuit qu'une dénonciation écrite à l'Entrepreneur et à l'Administrateur aurait dû leur être envoyé au plus tard à l'expiration du délai de six mois, soit en janvier 2007 pour que ces défauts de construction soient couverts par la garantie selon les exigences du Règlement et du contrat de garantie.Avant de continuer son analyse, le tribunal doit se demander est-ce que la dénonciation verbale de juillet 2006 peut remplacer une dénonciation écrite aux termes du paragraphe 4 de l'article 10 du Règlement cité au paragraphe 42 ci-haut?

[44]       Selon le tribunal, ce paragraphe prévoit clairement que la dénonciation doit être par écrit et une dénonciation verbale ne suffit pas.

[45]       Le tribunal doit maintenant se pencher sur les prétentions des parties décrites sous la deuxième rubrique mentionnée ci-haut aux paragraphes 37 et 38.

[46]       Est-ce que la première promesse de l'Entrepreneur aux Bénéficiaires d'effectuer la réparation lors de la dénonciation de juillet 2006, suivie de la réparation partielle et inadéquate en octobre/ novembre 2006 par un sous-traitant de l'Entrepreneur en ensuite la promesse verbale de l'Entrepreneur en novembre 2006 de poursuivre les réparations ont eu comme effet de suspendre, interrompre ou prolonger le délai de six mois qui a débuté en juillet 2006 et qui s'est terminé le 23 mai 2008?

[47]       Pour pouvoir considérer les paroles ou les gestes de l'Entrepreneur comme une cause de suspension, d'interruption, ou de prolongement du délai de six (6) mois, le tribunal doit s'appuyer sur une règle de droit. Lorsque les circonstances le justifient, le tribunal peut faire aussi appel à l'équité.

[48]       Malgré la sympathie du tribunal envers les Bénéficiaires qui se sont fait berner par les promesses malhonnêtes de l'Entrepreneur, le tribunal ne retrouve pas de circonstances appropriées pour qu'il puisse faire appel à l'équité. [...] »[13]

Esmaeilzadeh Danesh c. Solico Inc. & La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de I'APCHQ Inc.

« [...] [65] Consequently, the denunciations to the Manager by the Beneficairy of the problems which are the subject of his application for arbitration were made outside the six month delay provided under the applicable provisions of section 10 of the Regulation and this delay is a delay of forfeiture, which this Court does not have the discretion of extending and which causes foreclosure of the Beneficiay's rights. [...] »[14]14

[28] Me Johanne Despatie, le 28 janvier 2010 rendait une décision arbitrale qui permet de comprendre que le plan réglementaire de garantie créé par le législateur est plus restreint et se distingue de la garantie de qualité du Code civil du Québec :

La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l'APCHQ Inc. c. Maryse Desinder & Yvan Larochelle & René Blanchet

« [...] [32] Le Plan énonce et encadre les obligations respectives de l'entrepreneur et de l'administrateur envers le bénéficiaire. C'est donc en vertu de Plan qu'il me revient de déterminer les droits et obligations de chacun. En l'espèce, les manquements reprochés visent des parties communes d'une copropriété.

[...]

[34]       Ainsi, selon cette disposition, l'administrateur assume à l'égard du bénéficiaire les obligations légales ou contractuelles de l'entrepreneur si celui-ci n'y satisfait pas et ce, à l'intérieur des limites définies au Plan.

[35]       En effet, le Plan délimite l'étendue de la couverture relative aux parties communes d'une copropriété après leur réception. Cette couverture est ramenée à quatre circonstances.

[36]       La première vise le parachèvement des travaux et les malfaçons apparentes qui concernent ces parties communes et qui sont dénoncés au moment de leur réception.

[37]       La seconde vise les malfaçons cachées originant des parties communes, i.e. à celles résultant d'une déficience d'un des matériaux ou de l'exécution des travaux de construction, en autant que ces malfaçons cachées aient été découvertes dans l'année suivant la date de réception des parties communes et aient été dénoncées dans un délai raisonnable ne pouvant excéder six mois.

[38]       La troisième concerne les vices cachés, i.e. ceux qui rendent le bien impropre à l'usage auquel on le destine ou qui diminuent tellement son utilité que l'acheteur ne l'aurait pas acheté, ou n'aurait pas donné si haut prix, s'il les avait connus (article 1726 du Code civil du Québec), en autant que ces vices soient découverts dans les trois ans suivant la réception et dénoncés en conformité du Plan dans un délai raisonnable n'excédant pas six mois de leur découverte.

[39]       Finalement, la quatrième couvre les vices de construction affectant les parties communes dès lors qu'on les découvre dans les cinq ans suivant la date de fin des travaux et qu'ils sont dénoncés en conformité du Plan.

[40] C'est donc là l'étendue de la protection offerte par le Plan relativement aux parties communes d'une copropriété après leur réception. Ainsi, communément, en outre de la garantie applicable au moment de la réception des parties communes, le Plan comporte trois garanties dont la durée respective est de un an (pour les malfaçons non apparentes), trois ans (pour les vices cachés) et de cinq ans (pour les vices de construction). En substance, malfaçons, vice caché et vice de construction sont des notions voisines qui se distinguent entre elle essentiellement par leur gravité relative. [...] »[15]

[29] Les diverses causes soumises par l'avocate du Bénéficiaire ne sont pas applicables puisque rendues en vertu des principes de dénonciation des dispositions du Code civil du Québec et de la garantie de qualité qui oblige l'acheteur à dénoncer à son vendeur, dans un délai raisonnable, le vice caché qu'il a découvert.

Claude Joyal Inc. c. CNH Canada LTD. & Axa Assurances Inc.

« [...] [25] Les articles 1738 et 1739 C.c.Q. stipulent que cette dénonciation doit être écrite et que, dans le cas d'un vice de titre, elle doit préciser la nature du droit ou de la prétention du tiers, alors que dans le cas d'un vice de qualité, elle doit décrire le vice. Cette condition de forme ne semble cependant pas impérative, la jurisprudence ayant parfois validé une dénonciation uniquement verbale (Pierre-Gabriel JOBIN, avec la collaboration de Michelle CUMYN, La vente, 3e éd. Cowansville, Éditions Yvon Biais, 2007, par. 168).

[...]

[27] La finalité de la dénonciation est ainsi décrite par le professeur Jobin :

167- Préavis. Droit du vendeur de remédier à son défaut —

La raison d'être de ce préavis est de permettre au vendeur de vérifier s'il s'agit bien d'un vice couvert par la garantie, de constater les dommages causés le cas échéant et, s'il y a lieu, d'effectuer la réparation ou le remplacement du bien à un coût inférieur à celui d'un tiers engagé par l'acheteur. [...]

[30] En d'autres mots, la dénonciation constitue une condition de mise en oeuvre de la garantie, hormis en certaines circonstances, notamment en cas d'urgence, de négation de responsabilité du vendeur au fait du vice, [...]

[...]

[35] Considérant que les dispositions relatives à la garantie légale de qualité et du droit de propriété ont été adoptées principalement afin de protéger l'acheteur — ces dispositions étant inspirées de la Loi sur la protection du consommateur, L.R.Q., c. P-40.1, et de la Convention des Nations Unies sur les contrats de vente internationale de marchandises (« Convention de Vienne ») — je suis d'avis que les conséquences du défaut de dénonciation dans un délai raisonnable doivent correspondre à un préjudice réel pour le vendeur, et non à un simple préjudice de droit, afin de pouvoir justifier l'irrecevabilité du recours intenté par l'acheteur.

[...]

[37] En somme, l'appréciation des conséquences d'un défaut de dénonciation ne peut que relever du juge qui entendra la preuve. En revanche, cela pourrait avoir une incidence sur le poids de la preuve qui sera présentée de part et d'autre (Promutuel, par. 21).

[...]

[46] Finalement, je rappelle que lorsque le vendeur connaissait ou était présumé connaître le vice, la dénonciation peut être faite tardivement (art. 1739, 2e al. C.c.Q.). Il s'ensuit que l'action en justice pourra alors constituer à la fois une dénonciation suffisante et une mise en demeure (art. 1596 C.c.Q.; Denys-Claude Lamontagne, Droit de la vente, 3e éd., Cowansville, Éditions Yvon Biais, 2005, par. 239).

[...]

[54]    C'est pourquoi il est bien établi que la demande extrajudiciaire par laquelle un créancier met l'un des débiteurs solidaires en demeure vaut à l'égard des autres (art. 1599 C.c.Q.).

[55]    Je ne vois pas pourquoi il en irait autrement en matière de dénonciation. C'est d'ailleurs la position que prône le professeur Jobin, supra, p. 224 :

[...] quand le vendeur antérieur et le vendeur immédiat sont solidairement tenus à la garantie : alors, comme pour une mise en demeure (article 1599), le préavis donné à l'un des débiteurs produit ses effets sur le codébiteur solidaire, qui ne peut pas se plaindre de ne pas avoir reçu de préavis [...] »[16]

Guy Brière courtier d'assurance Inc. & Claudette Campeau & Guy Brière c. Yvan  Riendeau & Louise Garon & Claude Turgeon

« [...] [14] Relativement à l'exigence d'une dénonciation écrite prévue à l'article C.c.Q., la juge décide que l'esprit de la loi a été respecté et que la dénonciation verbale a permis à M. Brière, s'il le souhaitait, d'examiner l'existence et la gravité du vice puis de le réparer. [...] »[17]

Guy Poirier & Line Cardin c. Armando Martucelli

« [...] Le 3 avril 1986, les appelants se portent acquéreurs d'une maison appartenant à l'intimé. Ce dernier est un constructeur professionnel qui a lui-même bâti la maison neuf ans auparavant.

[...]

La simple dénégation par le vendeur de toute responsabilité ne saurait permettre de conclure que les appelants devaient agir en justice dès le 17 juillet 1986. [...] En raison de ses connaissances professionnelles, le vendeur était légalement présumé connaître les défauts majeurs dont les premiers signes venaient d'être découverts par les acheteurs.

[...]

Les délais encourus par la nécessité de recourir à des experts et à des travaux d'excavation ne peuvent être imputés aux seuls appelants qui ont agi avec une célérité raisonnable.

[...]

Il serait injuste d'exiger de l'acheteur qu'il réagisse lors de la première manifestation des vices dont il ne peut encore soupçonner la gravité et l'étendue.

Aucun préjudice n'a été causé à l'intimé par ce délai de huit mois entre la mise en demeure et le dépôt de l'action en diminution de prix. [...]»[18]

Armand Trottier & Thérèse Juneau c. Alain Mathieu

« [...] [31] D'une part, le délai de quelques jours entre la découverte de l'état des fondations et sa dénonciation à monsieur Mathieu est tout ce qu'il y a de plus raisonnable. D'autre part, puisque monsieur Mathieu est non seulement le vendeur mais également le constructeur de cette maison, il fait partie des vendeurs professionnels qui ne peuvent se plaindre d'une dénonciation tardive en vertu du deuxième paragraphe de l'article 1739 du Code civil du Québec. [...] »[19]

[30]     L'article 34 (1) du Règlement est formel. Pour interrompre la prescription, le Bénéficiaire devait dénoncer le défaut par écrit à l'Entrepreneur et à l'Administrateur dans le délai de 6 mois de la connaissance du vice;

[31]     Aucune autre preuve que les pièces produites par les parties n'est ici à considérer puisqu'aucun témoignage n'a été entendu sur cette question du respect de ce délai. Voici ce que les documents produits en preuve démontrent :

·                 Pièce RE-4 : Dans son affidavit du 10 mars 2015, madame Mattioli précise que :

i)          le revêtement de plancher de son unité a commencé à relever en novembre 2011;

ii)         elle en a informé l'Entrepreneur;

iii)        elle a communiqué à l'Entrepreneur la lettre du fabricant du revêtement de plancher du 12 décembre 2011, pièce A-5;

·                 Pièce A-5: Dans la lettre du fabricant du revêtement, la cause du déséquilibre dans l'humidité présente au niveau de l'épaisseur du bois est relié à plusieurs facteurs dont l'humidité trop élevée du sous-plancher et le sous-sol extrêmement humide;

·                 Pièces RE-3 et RB-1: Madame Mattioli s'exprime ainsi aux questions de Me Coursol lors de son interrogatoire avant défense du 8 janvier 2015 :

Page 38, lignes 4 à 25 et page 45, lignes 1 et 2 :

« [...] Q. Le plancher a été refait, la finition a été refaite, les murs ont été repeints, tout est refait, ça paraît plus qu'il y a eu une problématique en novembre 2011?

R. Exact.

Q.  Il se passe quoi après?

R.  Mais là, au mois de novembre, au début novembre...

Q. Tout de suite là en novembre?

R.  Ah oui, ç'a été vraiment rapide, les planchers ont commencé à se déclouer, fait que ça faisait pow! Pow! Pow! C'était vraiment un bruit infernal, on dirait que c'est comme si...

Q.  Quand vous dites que les planchers se déclouaient, c'est du plancher comment que vous avez?

R.  Du plancher de bois franc.

Q.  Avec, j'imagine, un sous-plancher?

R.  Oui, avec un sous-plancher.

Q.  Un sous-plancher de plywood, ces choses-là, c'est ce qu'on entendait se tordre et se déclouer?

R.  Oui, puis il a levé tellement qu'il s'est « expansionné ». Q. On va comprendre, peu importe le mot. Il a pris de l'expansion.

[...1

Page 42, lignes 8 à 25 et page 43, lignes 1 et 2 :

Q.  Donc, je comprends qu'au mois de novembre, novembre ou décembre mais au mois de novembre 2011, on voyait déjà des vagues sur le plancher de bois franc?

R.  Oui.

Q.  Partout où il y avait du plancher de bois franc ou si c'était localisé à des endroits particuliers?

R.  Partout.

Q.   Je le sais pas si c'était si pire que ça, vous allez me le dire. J'ai par exemple à la photo P-6 (8) carrément une planche qui est relevée. Quand vous dites que ç'a craqué, ça cassait, est-ce qu'il y en a eu de ça au mois de novembre 2011 de remarqué?

R.    Ça, ça s'est fait un petit peu plus tard, c'est avec le temps, c'est peut-être six mois plus tard que ç'a... En fait, ça va être a printemps que là ç'a commencé. Parce que l'hiver, qu'est-ce qui arrive, c'est que ça diminue et puis là, au dégel, là, ça recommence à rebomber.

[...]

Page 43, lignes 7 à 22 :

R. Au mois de novembre, c'est ça, c'était toutes les vagues sur le plancher et puis où il y a la cuisine, ça avait remonté puis ç'a fait casser aussi la céramique.

Q.   Je pense qu'on l'a sur une photographie.

R.    Oui, une des premières.

Q.   Si je me trompe pas, j'ai vu ça tantôt. Je vous la montre, c'est la photo P-6 (6), on voit une... je sais pas si ç'a cassé ou si ç'a été enlevé?

R.    Ç'a été cassé.

Q.   L'endroit où il y a plus de céramique, c'est ça qui aurait cassé par la pression exercée, si je comprends?

R.    Tout à fait parce que le plancher, il cherchait à vouloir « s'expandre » puis là, la céramique, elle, c'est pas... c'est rigide, donc elle a cassé.

[...1

Page 44, lignes 11 à 21 :

R. Pas aussi... Il y en avait un peu mais pas une aussi grande dénivellation.

Q.   Quand vous dites « il y en avait un peu », est-ce qu'elle était perceptible la dénivellation?

R.    Oui, j'ai dû enlever ma porte de mon garde-robe parce que j'étais plus capable d'ouvrir la porte.

Q. C'est quand, ça, au mois de novembre, en 2011?

R.  Oui

Q.   Même en 2011, vous avez été obligée de prendre des mesures comme enlever la porte du garde-robe parce qu'elle passait pas?

[...1

Page 46, lignes 19 à 23 :

Je comprends que l'odeur c'est peut-être pas le plancher mais « craque, soulève, ondule » ça, c'est ce que vous remarquiez que le plancher faisait depuis le mois de novembre 2011?

R.   Oui

[-.]

Page 49, lignes 14 à 25 et page 50, lignes 1 à 12 :

Q.     Il y a sur cette lettre-là le sceau de l'APCHQ. Est-ce que vous avez transmis une lettre au même effet à l'APCHQ?

ME MARILYNE RACICOT

Quand vous dites « au même effet », vous parlez du plancher?

ME CLAUDE COURSOL

Oui, toujours au plancher,

R.     À ce moment-là, non, parce que Gestion Mikalin voulait pas que j'envoie rien à Abritat parce que pour leur nom, pur pas que ça leur donne un mauvais nom à Abritat, et puis pour ce fait-là, c'est pour ça que je passais toujours par eux autres. Et là, c'est quand ça se dégradait qu'il dit : « Bien là... » Non, même pas, ils m'ont jamais suggéré de leur écrire.

En fait, c'est ça ils voulaient toujours que je passe par eux autres pour éviter d'avoir un mauvais nom chez Abritat. Donc, c'est pour ça que j'ai toujours passé, toujours avec leurs bonnes paroles, à leur bonne foi, c'est pour ça que j'écoutais qu'est-ce qu'ils me disaient. »[20]20

(Les soulignés du soussigné)

·         Pièce RE-5 Courriel du 6 septembre 2012 de Madame Mattioli au représentant de l'Entrepreneur dans lequel son auteur fait état de sa connaissance d'un problème d'humidité;

·         Pièce RE-2 Ces photographies servent à confirmer que le problème du plancher, en novembre 2011, est grave puisque l'expansion du revêtement de bois est visible et a fait éclater de la tuile appuyée sur le revêtement de bois;

[32]       Il est évident que madame Mattioli, propriétaire de l'unité 1, présidente du syndicat Bénéficiaire et responsable de l'arbitrage connaissait l'importance et la gravité du problème d'expansion du revêtement de plancher en novembre 2011. Le passage de son interrogatoire avant défense, pièce RB-1, de ne pas avoir avisé l'Administrateur à la demande de l'Entrepreneur pour lui éviter que son dossier soit entaché, ne suffit pas à couvrir sa dénonciation tardive de plus de treize mois. Surtout que l'affidavit du 10 mars 2015, pièce RE-4, ne détaille aucunement les agissements ou propos de l'Entrepreneur qui aurait empêché le Bénéficiaire d'agir;

[33]       Je tiens aussi à souligner que diverses réparations effectuées par l'Entrepreneur au système d'évacuation des eaux usées et la remise en état des lieux au début de l'automne 2011 avaient été effectuées (inondation causée par le bris de tuyau extérieur d'amener d'eau et refoulements d'égout répétitifs causés par une contre­pente dans la tuyauterie d'évacuation). Ces travaux importants de raccordement de la tuyauterie d'égout située dans la dalle de béton, le remplacement du revêtement de plancher, «la finition a été refaite, les murs repeints, tout est refait, ça parait plus qu'il y a eu une problématique en novembre 2011» devaient alerter sa propriétaire, présidente et représentante du Bénéficiaire de la présence d'un pvice devant être dénoncé à l'Administrateur, ce qui n'a pas été fait en temps utile;

[34]       Le fait qu'un entrepreneur reconnaisse qu'il y a ou non un problème, fasse des travaux et discute de la possible implication du fournisseur de matériaux ou d'un sous-entrepreneur ne dispense pas le Bénéficiaire de son obligation d'en aviser l'Administrateur puisqu'il est alors possible et probable qu'une réclamation en vertu du plan de garantie se formalise. L'Administrateur qui pourra alors être obligé en vertu du Règlement d'agir et effectuer des réparations pour corriger le vice se doit d'être informé de la situation et prévenir une plus grande dégradation du bien s'il le choisit. Ce choix lui appartient et ne peut être écarté sans que le risque de l'extinction du recours par l'écoulement du délai de 6 mois de l'Article 34 du Règlement d'octobre 2013 s'applique;

[35]       Aucune explication ou justification ne m'a été présentée autre que des discussions de préservation de la réputation de l'Entrepreneur, sans précision sur le contenu de ces discussions qui auraient convaincu le Bénéficiaire de reporter sa dénonciation 13 mois après sa connaissance du vice. Aucune impossibilité d'agir du Bénéficiaire n'est ici présentée en preuve;

[36]       Tout comme le souligne l'arbitre Hollander dans la décision précitée «. ..le tribunal ne peut exercer son pouvoir discrétionnaire [art.116] en équité pour permettre au Bénéficiaire de chercher à obtenir une couverture dans le cadre du plan de garantie, quand ils n'ont pas respecté les conditions strictes de dénonciation ... En février 2012, les Bénéficiaires n'avaient plus aucun droit de protection en vertu du plan de garantie, car ces droits ont été éteints par prescription»;

[37]       Dans ces circonstances, je ferai droit à la requête du procureur de l'Entrepreneur, alors que les frais de l'arbitrage seront payables par l'Administrateur conformément à l'article 123 du Règlement;

[38]       Une conférence téléphonique sera fixée dans les prochains jours pour la gestion des autres points en arbitrage;

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL :

ACCUEILLE la requête en irrecevabilité et REJETTE la demande d'arbitrage du Bénéficiaire du 3 novembre 2013 concernant un problème d'humidité à l'unité 1 apparaissant au point 1 dans la décision de l'Administrateur du 1er octobre 2013 à son dossier numéro 512549-1 puisqu'éteint par prescription;

LE TOUT au frais de l'Administrateur.

JEAN MORISSETTE, arbitre

Me MARILYNE RACICOT Pour le Bénéficiaire

Me CLAUDE COURSOL Pour l'Entrepreneur

Me NANCY NANTEL Pour l'Administrateur

Date(s) d'audience : 25 mars 2014 et 1er avril 2015



[1] PIGEON, Louis-Philippe, Rédaction et interprétation des lois, Québec, Éditeur officiel du Québec, 1er trimestre 1978, p. 57.

[2] P.A. CÔTÉ, Interprétation des lois, Ed. Thémis, 695 pages

[3] (1986) 1 R.C.S. p. 41

[4] Lamarche c. Marceau, 2005 CRTFP 153 (Canil) M.A. c. Ministère de l'éducation (2006) CanLII 74085

[5] Syndicat de copropriété Promenade de la Rive c. La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l'APCHQ Inc., Cour Supérieure, 200-17-015633-118, 21 août 2014, l'Honorable Alicia Soldevila, J.C.S. (2014) QCCS 6396

[6] Gilles Domaine & Jean-Claude Bellerive c. Construction Robert Garceau Inc. & la Garantie Qualité Habitation, CCAC, S13-091201-NP, 18 juillet 2014, Me Michel A. Jeanniot, arbitre

[7] Valérie Hamelin c. Groupe Sylvain Farand Inc. & La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l'APCHQ Inc. CCAC, S13-121002-NP, 26 avril 2014, Me Jean-Robert LeBlanc, arbitre.

[8] Jessica Gattas & Viviane Aboud c. Groupe de Construction Royale Inc. & la Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l'APCHQ Inc., Soreconi 22 avril 2014, Me Tibor Hollânder, arbitre.

[9] Julie Ouellette & Sylvain Chartrand c. 9143-5834 Québec Inc. & La Garantie Abritat Inc., CCAC, S13-040802-NP, 30 juillet 2013, Me Jean Philippe Ewart, arbitre.

[10] Hélène Parent c. Construction Yvon Loiselle Inc. & La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l'APCHQ Inc., GAMM 2012-11-007, 23 juillet 2012, Me Karine Poulin, arbitre

[11] Ekram Bessadok & Anis Farhat c. Garantie Qualité Habitation & Groupe Axxco Inc., GAMM 2010-12­003, 31 janvier 2011, Me Johanne Despatis, arbitre.

[12] Abdelkrim Rerhaye & Nawal El Alami c. Construction Médiane Inc. & la Garantie Habitation du Québec Inc., GAMM 2009-19-005, 11 mai 2010, Me Jeffrey Edwards, arbitre.

[13] Chantal Daigneault & Peter Jones c. Les constructions Yves Brunette Inc. & La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l'APCHQ, CCAC : S09-260101-NP, 29 juin 2009, Me Albert Zoltowski, abitre.

[14] Esmaeilzadeh Danesh v. Solico Inc. & La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l'APCHQ Inc., SORECONI : 070821001, 5 mai 2008, Me Jean Philippe Ewart, arbitre.

[15] Syndicat de la copropriété les Jardins du Parc & La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l'APCHQ Inc., GAMM : 2009-09-003, 28 janvier 2010, Me Johanne Despatis, arbitre.

[16] Claude Joyal Inc. c. CNH Canada Ltd & Axa Assurances Inc. Cour d’appel, 500-09-022502-124 (500-17-061489-103), 21 mars 2014, les Honorables Pierre J. Dalphond, J.C.A., Julie Dutil, J.C.A., Marie-France Bich, J.C.A., 2014 QCCA 588

[17] Guy Brière courtier d'assurance Inc. & Claudette Campeau & Guy Brière c. Yvan Riendeau & Louise Garon & Claudette Turgeon, Cour d'appel, 500-09-023239-130 (505-17-004116-093), 25 septembre 2014, les Honorables Atlan R. Hilton, J.C.A., Geneviève Marcotte, J.C.A., Jean-François Émond, J.C.A., 2014 QCCA 1809.

[18] Guy Poirier & Line Cardin c. Armando Martucelli, Cour d'appel, 500-09-001067-909 (500-05-001856¬879), 26 mai 1995, les Honorables Pierre A. Michaud, J.C.Q., Morris J. Fish, J.C.A., Thérèse Rousseau-Houle, J.C.A.

[19] Armand Trottier & Thérèse Juneau c. Alain Mahtieu, Cour du Québec, 540-32-012909-030, 23 février 2004, l'Honorable Richard Landry, J.C.Q.

[20] Sonia Mattioli, Sonia Mattioli, ès qualité, tutrice légale de Jacob Synott, Aliscia Synott & Élona Synott c. Geston Mickalin Ltée, Cour supérieure, 700-17-011364-147, 8 janvier 2015, interrogatoire avant défense, déposition de madame Sonia Mattioli, pièces RE-3 et RB-1.