ARBITRAGE EN VERTU DU RÈGLEMENT SUR LE PLAN DE GARANTIE DES
BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS
(Décret 841-98)
CANADA
PROVINCE DE QUÉBEC
Groupe d’arbitrage et de médiation sur mesure (GAMM)
Dossier no : GAMM : 2016-06-029
QH : 92540 / conciliation: 8488
JD : 1500-085
GODIN: 0002-173
ENTRE:
(ci-après les « Bénéficiaires »)
ET :
LE GROUPE AXXCO-ANGUS INC.
(ci-après l’« Entrepreneur »)
ET:
(ci-après l’« Administrateur »)
DEVANT L’ARBITRE : Me Jean Doyle
Pour les bénéficiaires : M. Stephen Gallant
Mme Kristina Chan
Pour l’entrepreneur : Me Alex Lévesque
M. Martin Côté
M. Sylvain Hébert
Pour l’administrateur de la Garantie : Me François-Olivier Godin
M. Michel Arès
AUDIENCE : 18 mai 2017
A-1 Notification d’une demande d’arbitrage;
A-2 Demande d’arbitrage;
A-3 Rapport de conciliation No 92540-10471 daté du 31 octobre 2016;
A-4 Rapport de conciliation supplémentaire No 92540-8488 daté du 27 novembre 2015;
A-5 Rapport de conciliation No 92540-8488 daté du 27 février 2015;
A-6 Courriel des bénéficiaires du 30 mai 2016 avec les pièces jointes;
A-7 Réclamation des bénéficiaires du 25 juillet 2016 et annexes.
A-8 Contrat préliminaire de vente et contrat de garantie obligatoire de condominium portant no 608801, daté du 21 et 22 décembre 2012.
A-9 Copie du TARION et cette pièce comprend les pages 2 à 9 sur 97 et la page 44 sur 299.
E-1 Schéma de l’unité des Bénéficiaires et des photos exprimant la prise de niveau des planchers, daté du 17 août 2016
1. Le mandat de l’arbitre fut confirmé par lettre du Groupe d’Arbitrage et de Médiation sur Mesure, en date du 17 novembre 2016 et faisait suite à une demande en ce sens de la part du Bénéficiaire, Monsieur Stephan Gallant, en date du 16 novembre 2016, tel qu’il appert de la pièce A-2;
2. La demande d’arbitrage fait suite à trois décisions de l’Administrateur de la garantie apparaissant en A-3, A-4 et A-5 du cahier de pièces de l’Administrateur et datées inversement des 27 février 2015, 27 novembre 2015 et 31 octobre
2016, alors que deux points sont soumis à l’arbitrage : point numéro 2 plancher : niveau, pour lequel les Bénéficiaires se déclarent insatisfaits, alors que l’Administrateur de la garantie a écrit, dans sa troisième décision, que les travaux correctifs effectués par l’Entrepreneur correspondent aux normes de l’industrie; numéro 3. relogement : remboursement.
3. Le soussigné, accompagné des intervenants mentionnés en titre des présentes, a eu le bénéfice de visiter l’unité d’habitation des Bénéficiaires et de constater de visu les déficiences affectant le revêtement de plancher à différents endroits.
4. Tous ont pu constater que les lattes de bois ondulaient, lorsqu’on y appliquait un poids ou une pression, à plusieurs endroits dans le logement.
5. Il était aisé de conclure que cette réaction du revêtement répondait à des dénivellations affectant la dalle de béton le supportant.
6. Au rapport de conciliation daté du 27 février 2015 (A-5), l’inspecteur de l’Administrateur de la garantie monsieur Michel Arès constatait :
« Les déflexions ponctuelles, du plancher en bois d’ingénierie, sous une charge, sont de o 1,58mm dans l’entrée de la chambre 2, o 3,52mm dans le salon sous la porte-patio, o 2,44mm dans la chambre 3 sous la fenêtre, o 3,16mm dans le walk-in et devant le garde-manger
• Décision
Considérant que la situation a l’aspect d’une malfaçon;
Considérant que la situation est connue et dénoncée depuis la prise de possession;
Considérant une prise de possession le 23 juin 2014 et une dénonciation le 11 décembre 2014;
Considérant que les déflexions ponctuelles s’apparentent à un sousplancher inégal avec des dénivelés;
Par conséquent, l’entrepreneur devra faire les vérifications nécessaires et les correctifs requis, selon les règles de l’art, et l’usage courant du marché. »
7. Dans son rapport de conciliation supplémentaire daté du 27 novembre 2015 (A-4), monsieur Arès note, à la page 4 de 10, que les corrections apportées par l’Entrepreneur, au niveau du plancher, suite à l’ordonnance apparaissant à la fin de ce rapport, a été amélioré et que dorénavant « les pentes rencontrent la tolérance du marché après la correction ».
8. Cependant, quant au deuxième point relatif aux déflexions dans le plancher, elles sont toujours présentes et, en conséquence, l’inspecteur conclut que :
« Considérant que malgré l’intervention de l’entrepreneur, la situation est toujours la même sauf une amélioration devant la fenêtre de la chambre
3;
Considérant que les déflexions ponctuelles s’apparentent à un sousplancher inégal avec des dénivelés;
Considérant que l’entrepreneur n’a pas donné le résultat attendu;
Par conséquent, l’entrepreneur devra faire les vérifications nécessaires et les correctifs requis, selon les règles de l’art, et l’usage courant du marché. »
9. A la note A de ce rapport apparaissant en A-3, on peut lire ce qui suit de la part des Bénéficiaires:
« Il y a eu des travaux majeurs de la part d’Axxco au début juin 2016. Le résultat est concluant dans certaines parties de la maison, mais il y a encore des déflexions qui sont présentes (L’entrée jusqu’au milieu de la chambre 2, le passage en face de la salle de bain des invités, l’entrée de la chambre 1 et le walk-in). Il n’y a eu personne qui est venu à la fin des travaux pour voir si le tout était conforme. Nous attendons toujours une réponse sur ce, de la part d’Axxco.
10. La décision de l’Administrateur de la garantie se base sur les constatations suivantes du conciliateur :
Lors de notre visite, nous avons fait les observations suivantes :
➢ Le plancher est de belle apparence et ne craque pas lorsque l’on marche.
➢ Dans la chambre #2, il y a une légère déflexion à 90po de la porte. Sous le niveau, il y a un espace de 1.22mm et lorsqu’il y a un poids, il y a un espace de 1.76mm.
➢ Dans la chambre #2 à 108 po de la porte, il n’y a pas d’espace sous le niveau et lorsqu’il y a un poids, il y a un espace de 1.22mm.
11. Le conciliateur décide par la suite comme suit :
• Décision
Considérant qu’il n’y a pas de craquement et que les joints des planches sont droits et de belle apparence;
Considérant que les pentes et les déflexions sont légères;
Considérant que les travaux correctifs ont été faits selon les règles de l’art et ont donnés résultants;
Par conséquent, La Garantie Qualité Habitation ne peut reconnaître ce point dans le cadre de son mandat. »
12. Monsieur Stephen Gallant, le Bénéficiaire, a été le premier témoin entendu. Le témoin n’a pas beaucoup de commentaires supplémentaires à ajouter à ceux dont il avait fait part au tribunal et à tous les intervenants, lors de la visite de son unité d’habitation.
13. Ses réponses aux questions des procureurs de l’Entrepreneur et de l’Administrateur sont plus détaillées en ce qui a trait au déroulement des événements, quant à sa constatation de la problématique du niveau du plancher à différents endroits, ainsi que des dénivellations que l’Entrepreneur a tenté de corriger, comme nous le verrons, à la mesure de ses moyens.
14. Interrogé par le procureur de l’Entrepreneur, le témoin rappelle qu’il y a toujours eu des déflexions dans la chambre no 2, ce qu’il qualifie de « gondolement », malgré les travaux correctifs effectués par l’Entrepreneur.
15. Il y a de ces « gondolements » dans le passage face à la salle de bain des invités et dans l’entrée de la chambre no 1, entre autres.
16. Le témoin ajoute que la chambre no 1 est la chambre des maîtres, la chambre no 2 est la chambre du bébé, alors que la chambre no 3 est la chambre de leur autre enfant.
17. Le témoin considère qu’aux endroits où il y a « gondolement » c’est, selon sa compréhension, qu’il y a un creux dans la dalle de béton sous-jacente.
18. L’Administrateur de la garantie a fait entendre comme premier témoin monsieur Michel Arès, technologue professionnel et inspecteur-conciliateur pour l’Administrateur de la garantie.
19. Monsieur Arès, au début de son témoignage, reprend les grands thèmes de son rapport du 27 février 2015 produit en A-5 dans le cahier de pièces de l’Administrateur.
20. Les trois items problématiques, qui sont repris dans les rapports subséquents et dans la présente demande d’arbitrage, sont les malfaçons quant au niveau du plancher et à la déflexion ou dépression dans la dalle de béton causant, comme conséquence, un certain flottement à quelques endroits du plancher de l’unité d’habitation et le remboursement de frais de relogement.
21. Le témoin mentionne au tribunal que les deux problèmes de plancher devaient être considérés comme des malfaçons et que, compte tenu tant de la dénivellation que de l’importance des déflexions, il se devait de conclure à l’obligation, par l’Entrepreneur, de procéder à la correction de ces deux malfaçons.
22. L’Entrepreneur s’est conformé à la directive de l’Administrateur de la garantie et a effectué le redressement de la dalle de béton, corrigeant ainsi de façon importante l’inclinaison du plancher, de la porte patio vers l’entrée principale de l’appartement.
23. Puis, suite à une nouvelle dénonciation d’insatisfaction de la part des
Bénéficiaires, l’Administrateur de la garantie a dû procéder à une nouvelle inspection et un rapport fut produit par monsieur Arès le 27 novembre 2015, ledit rapport, étant produit en pièce A-4.
24. Cette nouvelle dénonciation porte sur les mêmes points qu’à la première en ce qui a trait à une problématique du plancher un peu partout dans l’appartement.
25. Monsieur Arès démontre, grâce à une photo apparaissant en page 6 sur 10 de son rapport, qu’il y a une déflexion apparente du plancher au coin avant droit du salon. Cette déflexion aurait une profondeur de 5.32 mm.
26. Pour arriver à cette affirmation, monsieur Arès informe le tribunal qu’il appuyait son poing sur le plancher qui s’affaissait alors sous le niveau qui y était déposé.
27. En conclusion, monsieur Arès considère que tous les travaux n’ont pas été complétés, bien que, selon lui, le niveau du plancher serait maintenant conforme aux tolérances du marché mais pas le point 2 en ce qui a trait aux dépressions qui ont pu être détectées à de nouveaux endroits.
28. De telles déflexions peuvent aller jusqu’à 1/8 de pouce à différents endroits.
29. La décision de l’Administrateur de la garantie requiert de l’Entrepreneur que de nouveaux travaux soient effectués, au plus tard le 30 janvier 2016.
30. Un troisième rapport est produit en A-3, daté du 31 octobre 2016 : celui-ci, faisant l’objet de la présente demande d’arbitrage, porte encore sur le niveau et les déflexions au plancher. En plus, les Bénéficiaires demandent maintenant le remboursement des frais de relogement que leur ont occasionné les travaux importants au plancher.
31. Ce rapport confirme que le niveau du plancher respecte les tolérances.
L’inspecteur considère que les pentes et déflexions sont maintenant légères et que considérant que « les travaux correctifs ont été faits selon les règles de l’art et ont donné résultat » il ne peut reconnaître ce point de dénonciation.
32. Cependant, lorsqu’on compare avec son premier rapport en A-5 daté du 27 février 2015, comme d’ailleurs nous le fait remarquer madame Chan, la chambre no 2 accusait à un endroit une flèche de 1,58 mm alors que maintenant elle accuse une flèche de 1,76 mm à un endroit et 1,22 mm à un autre endroit!
33. L’entrée du walk in accusait, au rapport A-5, une flèche de 3,16 mm alors qu’elle accuse maintenant une flèche de 2,98 mm.
34. Quant à la chambre no 1 qui n’était pas discutée dans le rapport no 5, certains endroits dans cette chambre accusent une déflexion de 2,98 mm et un de 3,52 mm.
35. M. Arès explique au tribunal comment, avec de tels chiffres, il en est arrivé à une conclusion différente, soit, dans le cas de sa décision A-5 de forcer l’Entrepreneur à faire des travaux importants alors que, dans sa décision A-3, il considère que les mêmes planchers, avec les mêmes déflexions, respectent les tolérances du marché.
36. Monsieur Arès affirme avoir raffiné sa méthode de calcul de la façon suivante :
- Lors du 1er rapport, en A-5, il prenait sa mesure à partir de la base de son niveau et appuyant avec son poing sur le revêtement de plancher à l’endroit désigné par les Bénéficiaires il mesurait et retenait alors la flèche représentée par cette déflexion.
- Dans son plus récent rapport, en A-3, il prenait plutôt la flèche à partir de la déflexion déjà existante, dans le revêtement de plancher, sous la face inférieure du niveau. Il exerçait alors une pression sur ce revêtement et mesurait alors la différence entre la flèche maximale sous pression et la flèche déjà présente, avant cette pression, qui existait sous la face inférieure du niveau.
- De là, une différence notoire entre la mesure totale de chacune des flèches dans le plus ancien rapport, alors que les flèches représentent les chiffres beaucoup plus modestes dans le plus récent rapport.
37. Cette nouvelle méthode pour prendre les mesures est beaucoup plus permissive.
Lorsqu’on revient à la première méthode de calcul des flèches totales, à partir du niveau du revêtement, les déflexions sont toujours aussi importantes. Il semble qu’elles se soient cependant possiblement déplacées, suite aux travaux de nivellement effectués par l’Entrepreneur suite aux premier et deuxième rapports (A-5 et A-4).
38. Tout compte fait, bien qu’il comprenne parfaitement l’explication donnée par monsieur Arès, le tribunal est porté à considérer, comme il a été loisible de le constater lors de la visite de l’unité d’habitation, que le revêtement de plancher obéit toujours à des déflexions aussi notables, à plusieurs endroits où la dalle accuse des flèches toujours aussi importantes.
39. Monsieur Arès reconnaît, en réponse à des questions présentées par les Bénéficiaires, qu’il y a toujours un mouvement dans le plancher mais que ce mouvement est, d’une certaine façon, normal, puisqu’il s’agit d’un mouvement d’un plancher flottant dit « engineering », qui a toujours un certain « flou » lorsqu’on marche dessus puisqu’il s’agit, somme toute, d’un plancher non collé.
40. Monsieur Arès, en conclusion et en réponse à l’interrogatoire du procureur de l’Entrepreneur, considère que, si des mesures prises et présentées dans son troisième rapport, l’avaient été lors de sa première visite et de son premier rapport en A-5, il n’aurait jamais requis de l’Entrepreneur de corriger les déflexions telles qu’il les représente maintenant.
41. L’Entrepreneur, monsieur Martin Côté, président d’Axxco-Angus, fait part au tribunal de sa longue expérience dans tous les métiers de la construction, à titre de bâtisseur et de gestionnaire.
42. Suite à une plainte du Bénéficiaire, il s’est rendu chez lui pour constater, qu’effectivement, le plancher dans l’unité d’habitation affectait un dénivelé, tel que cela méritait une intervention avec un sous-traitant.
43. Par la suite, l’Administrateur de la garantie dépêcha sur les lieux, après dénonciation des Bénéficiaires, monsieur Michel Arès, inspecteur pour Qualité Habitation, qui conclut que le niveau du plancher accusait une malfaçon telle que l’Entrepreneur devait la corriger.
44. Quant aux déflexions affectant le plancher, la même conclusion s’imposait.
45. Suite à des travaux correctifs importants effectués par l’Entrepreneur, l’Administrateur de la garantie produisit un nouveau rapport le 27 novembre 2015, produit en A-4, et concluait alors que le niveau du plancher respectait les normes établies par le Guide de performance de l’APCHQ mais, par ailleurs, que :
« Considérant les déflexions ponctuelles s’apparentant à un sousplancher inégal avec des dénivelés, l’Entrepreneur devra faire les vérifications nécessaires et les correctifs . . . »
46. Une nouvelle intervention de la part de l’Entrepreneur amena le plancher, selon l’Administrateur de la garantie, à considérer que . . . « les pentes et les déflexions sont légères. »
47. En conséquence, l’Administrateur de la garantie détermina que tous les correctifs requis au plancher de l’unité d’habitation avaient suffi à le rendre acceptable selon les normes de l’industrie.
48. La présente demande d’arbitrage fait suite à cette décision de l’Administrateur de la garantie datée du 31 octobre 2016 et produit au dossier du tribunal en A-3.
49. Le témoin a requis un rapport d’expert qui a conclu que la problématique du plancher, dans l’unité d’habitation des Bénéficiaires, résultait d’un défaut dans la structure même du bâtiment, dont les axes verticaux n’étaient pas au niveau.
50. Dans ces circonstances, le témoin considère qu’il a pris toutes les mesures correctives à sa disposition pour rendre le plancher, selon lui, tolérable.
51. Effectivement, selon monsieur Côté, pour réussir à rendre le plancher parfait, il aurait fallu défaire la structure, ce qui revient à dire : défaire le bâtiment.
52. En fait, à la question : si on pouvait améliorer sans défaire la structure, l’Entrepreneur répond qu’il a choisi de faire des travaux correctifs pour entrer dans les tolérances.
53. Tout en se disant très capable de vivre dans un appartement affecté de défauts évidents qu’il est aisé de constater, il reconnaît que les Bénéficiaires, quant à eux, peuvent éprouver certaines difficultés à accepter de vivre au seuil de la tolérance.
54. Mais, considérant que les travaux requis, pour approcher, sinon atteindre, la perfection, seraient démesurés, il faut convenir que la situation actuelle entre à l’intérieur des balises du Guide de performance de l’APCHQ et que la situation est vivable.
55. À une autre question, le témoin affirme que la situation peut encore être améliorée si les dépressions font l’objet de travaux correctifs effectués ponctuellement et minutieusement.
56. Le témoin manifeste son accord avec tous les intervenants à l’effet qu’il y a encore des mouvements dans le revêtement de plancher, à différents endroits, et que cela dépend de déflexions dans la dalle de béton sous-jacente.
57. Cependant, les mesures prises le 17 août 2016 correspondent aux tolérances du
Guide de Performance de l’APCHQ, tel que conclu par la suite par l’inspecteur de l’Administrateur de la garantie, lors de sa visite des lieux le 18 octobre 2016.
58. En réponse au contre-interrogatoire du procureur de l’Administrateur de la garantie, monsieur Côté affirme qu’il a dû arriver au constat que tout ce qui était possible avait été accompli, sans pour cela démolir l’unité sinon le bâtiment en entier et qu’Axxco était allé aussi loin que possible, dans les circonstances.
59. Le béton auto nivelant corrige, dans une bonne proportion, le niveau, mais peut laisser certaines déflexions résiduelles.
60. Le témoin ajoute que le plancher flottant est, selon sa propre définition,
« flottant ».
61. Mais, posons-nous la question : Est-ce qu’un plancher flottant doit présenter un mouvement aisément perceptible à l’œil nu? Ou s’il n’est censé présenter qu’un mouvement imperceptible sous le poids infligé par le passage d’une personne?
62. Monsieur et madame Gallant affirment ne pas chercher la perfection, mais recherchent strictement un plancher qu’on ne sent pas plier lorsqu’on se déplace.
63. Selon eux, la situation actuelle ne correspond pas aux usages du marché et est en deçà du seuil de tolérance de tout propriétaire/occupant d’une unité d’habitation neuve.
64. Les procureurs de l’Administrateur et de l’Entrepreneur font valoir au Tribunal que, tel qu’il appert du témoignage de monsieur Côté, représentant de l’Entrepreneur Axxco-Angus, que l’Entrepreneur a fait tout ce qu’il pouvait, dans les circonstances, pour corriger le niveau du plancher de l’unité d’habitation à l’intérieur de délais respectables et, en toute bonne foi, à l’intérieur des tolérances du marché, tel qu’appuyé d’ailleurs en cela par l’inspecteur conciliateur de l’Administrateur de la garantie.
65. Selon leurs commentaires, requérir de l’Entrepreneur qu’il fasse d’autres travaux correctifs pour satisfaire les Bénéficiaires relèverait d’une exigence d’atteindre la perfection, ce qui, dans les circonstances, non seulement s’avère impossible, mais requerrait d’autres travaux, d’une ampleur démesurée.
66. L’Administrateur de la garantie soumet à l’attention du tribunal une décision de maître Jeffrey Edwards, alors arbitre, maintenant juge à la Cour du Québec, alors
qu’il décidait que des défectuosités ponctuelles (gaps) dans le revêtement de plancher :
Kulwant Singh Minhas and Surjit Kaur Parmar and 9096-2556 Québec Inc. (Nader Constructions) and La Garantie des Batiments résidentiels neufs de l’APCHQ Inc., February 13, 2008, #035616, Me Jeffrey Edwards, arbitrator, par [19] :
«The Arbitration Tribunal accepts the position of the Plan Manager that in these rooms the situation is acceptable and in accordance of the rules of the trade, while not examples of the finest work in the relevant sector. »
67. Cette décision représente l’exemple parfait d’une citation qui émet un principe général que nous ne pouvons pas réfuter. Mais encore faut-il que le dossier, présentement à l’étude, soit conforme à la réalité de la preuve dans le dossier cité en exemple.
68. Or, lors de la visite des lieux, il est apparu évident que des flèches existaient dans la dalle de béton et qu’à différents endroits, identifiés par les Bénéficiaires, le revêtement de plancher obéissait d’une façon telle qu’il était aisé de le constater au simple regard.
69. Loin du tribunal l’idée d’exiger de l’Entrepreneur, comme de toute entreprise de construction, d’atteindre la perfection.
70. Cependant, bien que monsieur Arès, inspecteur conciliateur pour Qualité Habitation, considère que les dépressions ou déflexions actuelles dans le revêtement de plancher sont à l’intérieur des tolérances, le tribunal reste perplexe devant son changement de procédure pour calculer des dépressions. Sans cette nouvelle méthode, il l’aurait été amené à la même conclusion, lors de sa décision du 31 octobre 2016, que lors de ses décisions antérieures des 27 novembre 2015 et 27 février 2015.
71. Effectivement, le tribunal ne peut que constater que les déflexions ont la même importance, si on reprend la procédure de calcul utilisée lors des deux premières décisions et que c’est cette nouvelle méthode qui permet à Monsieur Arès de rejeter la demande de travaux correctifs de la part des Bénéficiaires.
72. Bien que monsieur Arès manifeste que ce changement de méthode ou de
procédure n’avait pour but que de raffiner sa façon de considérer les déflexions, force est d’arriver à la conclusion que les déflexions, ayant cependant varié d’endroits, ont toujours la même importance, depuis la première dénonciation à l’Administrateur.
73. Considérant d’autre part, que l’Entrepreneur, lors de son témoignage, a témoigné à l’effet qu’il y avait encore des dénivelés et qu’il y avait, quant aux dépressions, « moyen d’intervenir sur ces dépressions minutieusement et ponctuellement ».
74. Le tribunal, à défaut de preuve contradictoire, en vient à la conclusion que le niveau du plancher de l’unité d’habitation a atteint, dans les circonstances, compte tenu de l’environnement particulier de cet immeuble, une qualité acceptable et aucune correction ne sera exigée, sur ce point, à l’Entrepreneur.
75. Cependant, considérant ce qui précède, le tribunal MAINTIENT la demande d’arbitrage sur ce point et ORDONNE à l’Entrepreneur d’intervenir minutieusement et ponctuellement aux endroits désignés par les Bénéficiaires afin de corriger, à ces endroits, au niveau de la dalle de béton, les dépressions, dans le revêtement de plancher, et éviter que celui-ci plie ou obéisse lorsqu’on y appose un poids.
76. Les Bénéficiaires font valoir au tribunal que lors des travaux majeurs effectués pour niveler la dalle de béton, il était impossible pour les Bénéficiaires et leurs enfants de vivre dans leur appartement et, qu’en conséquence, ils ont dû se loger ailleurs, temporairement, et encourir, en conséquence, certains frais qui sont soumis au tribunal à concurrence d’un montant de 551,57$, admis par l’Administrateur de la garantie et l’Entrepreneur.
77. Le tribunal n’a aucune hésitation à croire que ces déboursés étaient nécessaires pendant la période des travaux effectués par l’Entrepreneur.
78. Cependant, considérant la couverture de la garantie, tel que manifestée au paragraphe 6.4.1.3 du contrat de garantie :
« Le relogement, le déménagement et l’entreposage des biens du bénéficiaire « ne sont garantis) que dans les cas suivants :
6.4.1.3.1 : lorsque le bénéficiaire ne peut prendre réception du bâtiment à la date convenue avec l’Entrepreneur à moins que les acomptes ne soient remboursés
6.4.1.3.2 : lorsque le bénéficiaire ne peut prendre réception du bâtiment à la date convenue avec l’Entrepreneur afin de permettre à Qualité Habitation de parachever le bâtiment. »
79. Il y a évidemment, ici, absence de garantie pour les frais de relogement pendant les travaux effectués par l’Entrepreneur.
80. Tel que déjà décidé également par Me Michel A. Jeanniot dans Syndicat des copropriétaires Place de la Falaise 556 et Memora Construction Inc. et la
Garantie des Bâtiments résidentiels neufs de L’APCHQ :
« Le Plan de garantie et subsidiairement le Règlement prévoient l’obligation de l’Administrateur à intervenir en cas de manquement de l’Entrepreneur à lui-même intervenir à ses obligations légales ou contractuelles pour la relocalisation, le déménagement et l’entreposage des biens des Bénéficiaires, avant réception prévue et/ou dans des circonstances où le Bénéficiaire ne peut prendre possession du bâtiment à la date convenue pour et entre autres causes imputables à l’Entrepreneur;
Nulle part au Règlement, ni à la jurisprudence qui en découle n’y a-t-il mention directement et/ou indirectement d’autres possibles circonstances au cours desquelles un plan de garantie autorisé par la Régie du Bâtiment du Québec doit considérer le remboursement de quelque coût (réel, raisonnable, engagé) pour le déménagement, relogement et/ou entreposage; »
81. Dans une autre sentence arbitrale de l’arbitre Me Jean Morissette dans Jimmy Bureau et Martine Contant et Le Groupe Plainum Construction 2001 Inc. et La
Garantie des Bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ Inc. :
« Les articles 9 et 10 du Règlement sont clairs et ne comportent aucune ambiguïté. Je n’ai d’autre choix que de constater que les frais de relogement, entreposage et déménagement ne sont payables que pour des événements visés à l’article 9 qui se produisent avant la réception du bâtiment. »
82. Par conséquent, au vu des articles pertinents au contrat de garantie et l’article 26,3o du Règlement sur le Plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs et des décisions d’autres arbitres cités plus haut, le tribunal n’a d’autre choix que de REJETER cette demande des Bénéficiaires et MAINTENIR sur ce point des frais de relogement, la décision de l’Administrateur de la garantie.
POUR CES MOTIFS LE TRIBUNAL :
ACCUEILLE la demande des Bénéficiaires quant aux travaux correctifs à effectuer par l’Entrepreneur aux dépressions dans la dalle de béton affectant le recouvrement de plancher et ORDONNE à l’Entrepreneur d’effectuer ces dits travaux correctifs de façon minutieuse et ponctuelle dans les soixante (60) jours de la réception de la présente décision.
REJETTE la demande d’arbitrage des Bénéficiaires quant aux frais de relogement et MAINTIENT sur ce point la décision de l’Administrateur de la garantie.
CONDAMNE l’Administrateur de la garantie à payer tous les frais d’arbitrage conformément à l’article 123 du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs.
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Jean Doyle, avocat
Arbitre
JD-1500-085 - GAMM
Kulwant Singh Minhas and Surjit Kaur Parmar and 9096-2556 Québec Inc. (Nader Constructions) and La Garantie des Batiments résidentiels neufs de l’APCHQ Inc., February 13, 2008, #035616, Me Jeffrey Edwards, arbitrator
Jimmy Bureau et Martine Contant et Le Groupe Platinum Construction 2001 Inc. et La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ Inc, no 09261, 12 juillet 2006, M. Jean Morissette, arbitre
Syndicat des copropriétaires Place de la Falaise 556 et Memora Construction Inc. et La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ, 070309002, 080918002, 090505001, 090527001 et 090924001, Me Michel A. Jeanniot, arbitre