TRIBUNAL D’ARBITRAGE

TRIBUNAL D’ARBITRAGE

Sous l’égide du

CENTRE CANADIEN D’ARBITRAGE COMMERCIAL

(CCAC)

Organisme d’arbitrage autorisé par la Régie du bâtiment

 

ARBITRAGE EN VERTU DU RÈGLEMENT SUR LE PLAN DE GARANTIE

DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS

(Décret 841-98 du 17 juin 1998)

______________________________________________________________________

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

Dossier CCAC no: S16-022901-NP

9266-4374 QUÉBEC INC.

(f/a/s Les Constructions Alyro)

c.

ALAIN PHANEUF

et

GARANTIE DE CONSTRUCTION RÉSIDENTIELLE (GCR)

 

                        _______________________________________________

 

DÉCISION ARBITRALE

                        _______________________________________________

 

 

Arbitre:                                                                                                    

Me Jean Philippe Ewart

 

Pour l’Administrateur :                                                                             

Me Pierre-Marc Boyer

Me Éric Provençal

 

Pour le Bénéficiaire:                                                                                        

M. Alain Phaneuf

 

 

Date de la décision :

11 juillet 2017

 

 

 

Identification des Parties

 

ADMINISTRATEUR :               

LA GARANTIE DE CONSTRUCTION RÉSIDENTIELLE

Attention: Me Pierre-Marc Boyer

contentieux de GCR

7171, rue Jean-Talon Est

Montréal (Québec) H1M 3N2

Administrateur » ou « GCR »)

 

 

ENTREPRENEUR :                                                                        

9266-4374 QUÉBEC INC.

(f/a/s Les Constructions Alyro)

 (« Entrepreneur »)

 

BÉNÉFICIAIRES :                                                                                 

ALAIN PHANEUF

LISANNE PHANEUF

SÉBASTIEN WILLE

[...]

Montréal (Québec) [...]

(collectivement « Bénéficiaire »)

 

 

Introduction

 

[1]        Le Tribunal est initialement saisi du présent dossier par demande d’arbitrage de l’Entrepreneur visant une décision de l’Administrateur datée du 3 février 2016   (no de dossier : 104413-01) (Pièce A-28) (« Décision Adm ») émise en application du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs (L.R.Q. c. B-1.1, r. 8) adopté en conformité de la Loi sur le bâtiment (L.R.Q. c. B-1.1) (le « Règlement »).

 

[2]        Une décision arbitrale pour mesures conservatoires d’urgence a été rendue par le Tribunal le 27 avril 2016.

 

[3]        Par la suite, le désistement de l’Entrepreneur à sa demande d’arbitrage a été confirmé au Tribunal en date du 15 juillet 2016. Le Tribunal a d’autre part été alors informé que l’Entrepreneur a confirmé son intention de déposer des procédures en conformité de la Loi sur la faillite et l’insolvabilité (L.R.C. (1985), ch. B-3).

 

[4]        Une demande de remboursement que le Bénéficiaire a qualifié de demande de remboursement d’acompte a été déposée par le Bénéficiaire et des objections déclinatoires ont été soulevées par l’Administrateur, sujets entre autres de la présente décision.

 

Litige aux présentes

 

[5]        En effet, suite au désistement de l’Entrepreneur, le litige qui demeure découle d’une part d’une demande du Bénéficiaire qu’il a qualifiée en cours d’instance de demande de remboursement d’acomptes (voir Pièce A-24 et Pièce B-27) et des objections alors soulevées par l’Administrateur, soit (i) une objection déclinatoire à la compétence du Tribunal sur cette demande de remboursement d’acompte se référant à l’art. 106 du Règlement et alléguant que puisque la décision de l’Administrateur au dossier n’adresse pas cette réclamation, le Tribunal n’a pas juridiction à ce sujet (« Objection compétence ») et (ii) subsidiairement, une objection déclinatoire quant à la mise en œuvre de la garantie des acomptes au Règlement (« Objection couverture ») (Objection de compétence et Objection couverture, collectivement, « Objections »).

 

[6]        Initialement, l’Entrepreneur avait confirmé que les seuls Points en arbitrage aux présentes étaient les Points : 1, 2, 3, 8, 13 à 16 inclusivement et 19 à 31 inclusivement (le tout d’ailleurs tel qu’indiqué à une correspondance de l’Administrateur du 11 mars 2016 (Pièce A-26 en liasse)).

 

 

Mandat et Juridiction

 

[7]        La nomination du soussigné est en date du 1er avril 2016. La juridiction du Tribunal aux présentes est sujette à l’Objection compétence.

 

[8]        Le Tribunal a pris ce dossier en délibéré le 19 septembre 2016, date de la transmission du dernier élément de preuve documentaire au dossier.

 

Déroulement de l’instance

 

Pièces

 

[9]       Les Pièces contenues au Cahier de l’Administrateur et dont référence sera faite aux présentes sont identifiées comme A-, avec sous-numérotation équivalente à l’onglet applicable au Cahier visé ou en continu suite à dépôt subséquent, les Pièces présentées par l’Entrepreneur comme P- et par le Bénéficiaire comme B-.  Aucune objection quant à véracité ou exactitude de la preuve documentaire n’a été soulevée.

 

 

 

Le Règlement

 

[10]      Le Tribunal s’appuie que le Règlement est d’ordre public et prévoit que toute disposition d’un plan de garantie (« Garantie » ou « Plan ») qui est inconciliable avec le Règlement est nulle[1].  Conséquemment, le Tribunal se réfère aux articles du Règlement lorsque requis sans rechercher la clause correspondante au contrat de garantie, s’il en est.

 

[11]      La décision arbitrale est finale et sans appel et lie les parties dès qu’elle est rendue[2]. Le Tribunal peut d’autre part faire appel à l’équité lorsque les circonstances le justifient[3].

 

Faits pertinents

 

[12]      Les Parties et l’Administrateur ont pourvu à dépôt auprès du Tribunal d’une trame documentaire importante.

 

Bénéficiaire et Bâtiment

[13]     Le bâtiment visé est composé de quatre (4) unités résidentielles avec adresses civiques respectives de [...] et [...] avenue Lebrun, Montréal, décrit par le Bénéficiaire comme quadruplex en rangée (le « Bâtiment ») et que ces unités, sauf le [...], ont des occupants lors des dates d’Instruction.

 

[14]     Les Bénéficiaires A. Phaneuf, L. Phaneuf et S. Wille sont, selon la preuve documentaire, propriétaires indivis du Bâtiment et ont initialement confirmé au Contrat de construction (défini ci-dessous - Pièce A-2) que M. Alain Phaneuf est mandaté pour agir pour les Bénéficiaires (pour aisance de texte, le « Bénéficiaire »).

 

Contrat

[15]     Les Parties sont intervenues à un contrat d’entreprise pour la construction du Bâtiment daté du 23 janvier 2015 (le Bénéficiaire étant déjà propriétaire du terrain) (Pièce A-2) (« Contrat de construction ») et à un contrat de garantie daté du 29 avril 2015 sur formulaire de l’Administrateur (Pièce A-1), dont copies reçues par l’Administrateur en juin 2015.

 

[16]     Le Contrat de construction prévoit que la réalisation des travaux se doit d’être conforme aux plans présentés. Sont déposés en preuve les plans et devis pour permis (C. Parent, T.A.) (Pièce A-20) et plans de structure (Telar, Génie-conseil en bâtiment, A. Gorji, ing.) (Pièce A-21).

 

[17]     Le Contrat de construction est pour un montant déterminé qui [‘…n’inclut pas les taxes et les extras …] (Pièce A-2 in fine).  Ce type de contrat peut être désigné lorsque l’on prend en considération l’approche conjointe des Parties lors de son exécution (au (i) prix des soumissions, plus (ii) 10% à une rubrique ‘Profit et Administration’ avant taxes), sous différentes appellations, notamment contrat « coûts plus honoraires », « contrat à coûts majorés » ou « cost plus ».  Pour les fins de sa décision en suivi de la jurisprudence majoritaire, le Tribunal retient l'expression « contrat à coûts majorés ».

 

[18]     La preuve démontre des déboursés par le Bénéficiaire à l’Entrepreneur en juin et juillet 2015.

 

[19]     D’autre part, la preuve démontre (Pièce B-27) des paiements par le Bénéficiaire sur différents éléments ou matériaux ou services dans le cadre du Contrat de construction dès avril 2015, en continu jusqu’en août 2015, à tout le moins.

 

Dénonciations et Avis

[20]     Il semble que dès l’été 2015 il y ait des questions qui se soulèvent quant à la construction, tel qu’en fait foi un avis technique du 28 juin 2015 adressé au Bénéficiaire, suite à inspection du 15 juin 2015, et qui indique diverses non-conformités de travaux de structure (Telar, Génie-conseil en bâtiment, A. Gorji, ing.(« Telar »)) en date du 28 juin 2015 (Pièce B-22), inter alia, à titre illustratif et non exhaustif, non-conformité (aux plans de construction ou au Code de construction du Québec) des poutres de charpente, des murs de fondation, des linteaux, du manque de connexion entre les poutres et colonnes, de la direction contraire des fermes de toit, (…).

 

[21]     Le 2 août 2015, le Bénéficiaire adresse à l’Entrepreneur une correspondance qui détaille plusieurs des éléments, vices et malfaçons soulevés par l’état du Bâtiment avec éléments de mise en demeure, entre autres, si l’Entrepreneur ne pourvoit pas à effectuer le début des travaux de brique (au 5 août 2015), le Bénéficiaire se devra de rechercher des sociétés autres afin de faire effectuer ces travaux aux frais de l’Entrepreneur (Pièce A-7, voir aussi Pièce B-4). Cette correspondance sera transmise à l’Administrateur en date du 16 novembre 2015.

 

[22]     Le Bénéficiaire avise l’Entrepreneur par correspondance du 9 septembre 2015 du paiement à différents sous-traitants en fonction des sommes alors encore dues à être versées en conformité du Contrat (Pièce B-5).

 

[23]     Cette correspondance est caractéristique de l’ensemble de ce dossier alors qu’on y lit :

 

  « … les murs avant et arrière qui devaient être de 10 pieds et demi en béton armé selon nos plans et sont maintenant en restants de bois comme des sandwichs mal isolés ».

 

On y fait référence à des défauts au mur mitoyen au-dessous des cours anglaises, aux plafonds des demi sous-sol, aux trous dans le béton sous le plancher non réparé, à l’isolation non adéquate, au revêtement extérieur qui ne respecte pas les plans et on y retrouve cet énoncé du Bénéficiaire :

 

  « … vous m’avez laissé un chantier encore sur le rough, pas d’eau, pas d’électricité, pas de gypse, pas de briques, pas d’escaliers, pas nettoyé, des trous, du Tyvex et des contours de fenêtres mal installés, les cours anglaises [sic] pas isolées, du recouvrement trop épais et j’en passe… ».

 

[24]     En date du 14 septembre 2015, la Ville de Montréal émet un avis relativement à la conformité du projet (Pièce B-14) quant aux exigences du règlement d’urbanisme de l’arrondissement et au Code de construction du Québec (« Avis VdeM14SEP »).

 

[25]     L’Avis VdeM14SEP a requis que le Bénéficiaire obtienne un certificat de localisation d’un arpenteur-géomètre dans le cours de la construction (soit le 28 septembre 2015) qui indique (Pièces B-15 et B-16) des empiètements sur des lots voisins, non-propriété du Bénéficiaire, par surplomb tant à l’arrière qu’à l’avant du Bâtiment et de même à l’avant également, un surplomb par voie d’un escalier (dans ce dernier cas, sur une profondeur de plus de 7 pieds).

 

[26]     Par avis en date du 20 octobre 2015 (Pièces A-17; B-17), la Ville de Montréal indique au Bénéficiaire (« Avis VdeM20OCT ») que le mur mitoyen n’a pas été construit en conformité du règlement de construction de la Ville de Montréal (Règlement no 11-018) et conséquemment des exigences du Code de construction (du Québec).

 

[27]     De plus, l’Avis VdeM20OCT indique qu’un escalier en façade se devra d’être relocalisé et qu’il ne doit y avoir aucune sortie mécanique ou de plomberie traversant les murs mitoyens qui se doivent d’être murs coupe-feu; la preuve non contredite indique que le Bénéficiaire avait avisé l’Entrepreneur le 17 octobre 2015 que suite à une inspection par Ville de Montréal, une sortie d’eau (Pièce      A-14) sur le côté nord-ouest sortait chez le voisin et que ce positionnement était inacceptable et se devrait d’être modifié.

 

[28]     Le Bénéficiaire pourvoit à une première réclamation par voie de mise en demeure adressée à l’Entrepreneur en date du 27 octobre 2015 avec copie à l’Administrateur (« 1ère Dénonciation OCT15 »); il y réclame le parachèvement des travaux du Bâtiment. L’Administrateur caractérise cette réclamation de dénonciation par correspondance à L’Entrepreneur datée du 19 novembre 2015. (Pièce A-10 en liasse).

 

[29]     Le Bénéficiaire pourvoit à un formulaire de réclamation (sur document pré-imprimé de l’Administrateur) en date du 16 novembre 2015 où il indique que l’Entrepreneur a abandonné le chantier de construction du Bâtiment depuis le 29 juillet 2015 et il souligne alors un pourcentage de réalisation de 69% seulement.  Le Tribunal comprend en revue de d’autres éléments de la preuve documentaire que ce pourcentage est établi par la Société Canadienne d’Hypothèque et de Logement (SCHL) et est lié à des déboursés progressifs attenants au prêt obtenu par le Bénéficiaire pour les fins de la construction du Bâtiment.

 

[30]     Ce formulaire indique que le Bénéficiaire a retenu à cette date un montant de 31 097,76 $ sur le solde du prix du contrat avec l’Entrepreneur.

 

[31]     Le Bénéficiaire indique d’autre part à ce formulaire qu’il n’y a pas eu d’inspection pré-réception mais alors et quoique le Bâtiment n’était pas terminé, il n’a eu d’autre choix que d’aller y habiter (ndlr : dans un (1) des quatre (4) appartements) le 1er septembre 2015.

 

[32]     Cette 1ère Dénonciation OCT15 identifie des dérogations aux Plans pourvus par le Bénéficiaire et déposés en support du permis de construction émis par les autorités municipales et fournis à l’Entrepreneur, fait mention de l’Avis VdeM20OCT (Pièce B-17) sous « non-conformité du mur mitoyen » (incluant sa constitution comme mur coupe-feu tel que requis et l’utilisation inappropriée de fers angles à ce mur, contraire au règlement municipal ainsi qu’au Code de la construction dans les circonstances).

 

[33]     Le Tribunal comprend qu’il y a utilisation de fers angles nonobstant l’objection initiale du sous-traitant de l’Entrepreneur (qui a d’ailleurs requis que l’Entrepreneur lui signe un document de confirmation que l’Entrepreneur était celui qui requérait la mise en place de ceux-ci).  Ceci n’est qu’une courte illustration d’un nombre important de dérogations ou ‘erreurs’ de construction de l’Entrepreneur selon le Bénéficiaire qui réfère aux plans de construction ainsi qu’à l’intervention d’un ingénieur afin de rendre le Bâtiment sécuritaire et qui a d’ailleurs requis le recours à divers sous-traitants afin de réparer et de pourvoir à travaux correctifs sur les travaux initialement effectués par l’Entrepreneur.

 

[34]     Il faut aussi noter que la Ville de Montréal requiert (22 mars 2016) une attestation d’ingénieur afin de confirmer l’intégrité structurale et la conformité des travaux correctifs (Pièce B-19) suite aux travaux correctifs à la structure requis par ses avis.

 

[35]     Il y a continuité des difficultés, entre autres tel que souligné par une correspondance du Bénéficiaire à l’Entrepreneur en date du 11 novembre 2015, avec copie, inter alia, à l’Administrateur, indiquant un problème assez majeur d’une fuite et infiltration d’eau au plafond du logement ([...] Lebrun).  La Décision Adm s’y adresse (Point 20) et ordonne des travaux correctifs, y compris dégarnissage et décontamination avant remise en état des lieux.

 

[36]     C’est d’ailleurs cette infiltration d’eau et ce Point 20, contesté à sa demande d’arbitrage par l’Entrepreneur, qui amènera le Tribunal à émettre des mesures conservatoires d’urgence suite à une enquête et audition le 26 avril 2016 et décision arbitrale le 27 avril 2016.

 

[37]     L’Administrateur est déjà avisé en octobre 2015 de différentes difficultés, vices et malfaçons relatifs au Bâtiment, incluant de l’Avis VdeM20OCT souligné à la 1ère Dénonciation, et par la suite en novembre et décembre 2015.

 

Interventions de l’Administrateur

[38]     La preuve démontre qu’une première rencontre avait été prévue au 16 décembre 2015 avec le conciliateur J. Dubuc de l’Administrateur; aucun représentant de l’Entrepreneur ne s’est présenté, alors entre autre que le Bénéficiaire avait d’ailleurs avisé de nouveau par courriel le jour précédent (15 décembre 2015)   Mme Karoline Bilodeau, la présidente (et seule actionnaire et administrateur) de l’Entrepreneur, afin d’assurer une représentation de l’Entrepreneur lors de la rencontre.

 

[39]     Le Tribunal comprend que lors de cette visite du conciliateur en décembre 2015 (à laquelle tel que mentionné il n’y a aucun représentant de l’Entrepreneur), il y a conciliation et entente avec le Bénéficiaire que celui-ci fera procéder à une inspection avec rapport de l’état du Bâtiment, ce qui amènera le Bénéficiaire à une mise en demeure subséquente datée du 6 janvier 2016 avec copie à l’Administrateur par transmission du 7 janvier 2016.

 

[40]     Le Tribunal a pris connaissance, entre autre, du rapport d’inspection mandaté par le Bénéficiaire (Les Services Inspec-Thor Inc.; auteur : S. Bergeron, inspecteur en bâtiment certifié, en date du 16 décembre 2015 - Pièce A-29)         (« Rapport Bergeron ») que le Tribunal comprend de la preuve documentaire a été transmis à l’Administrateur en date du 7 janvier 2016 [4].

 

[41]     Le Tribunal comprend que c’est du Rapport Bergeron que le Bénéficiaire, à la demande de l’Administrateur, pourvoit à l’énumération d’éléments spécifiques de cette mise en demeure qui est reflétée comme Points à la Décision Adm et identifiée comme réclamation du 6 janvier 2016 auprès de l’Administrateur     (« 2e Dénonciation JAN16 »).

 

[42]     Le Tribunal note le commentaire au Rapport Bergeron (p.15) quant à une recommandation de consultation auprès d’un ingénieur en structure pour plancher/plafond et murs porteurs.

 

Décision Adm

[43]     L’Administrateur fait parvenir à l’Entrepreneur un avis de réclamation (avis de 15 jours) en date du 11 janvier 2016 en suivi de ce qu’il caractérise de lettre de dénonciation en référence à la mise en demeure (2e Dénonciation JAN16) du Bénéficiaire à l’Entrepreneur datée du 6 janvier 2016.

 

[44]     La Décision Adm fixe une date de réception du Bâtiment au 6 janvier 2016. Le Tribunal considère qu’il n’est pas requis pour les fins des présentes que le Tribunal statue plus avant sur la détermination de la réception du Bâtiment mais pourvoira ci-dessous à des commentaires quant à cette détermination par l’Administrateur.

 

[45]     La Décision Adm accueille la réclamation du Bénéficiaire quant à une grande majorité de Points, ne rejetant celle-ci que pour les Points 33 à 35 qui visent respectivement la propriété de tiers (entre autres, voisin de gauche et voisin arrière) sous le couvert et analyse d’une exclusion de garantie selon l’Administrateur de l’article 12(9) du Règlement.

 

[46]     Le Tribunal note la soumission du Bénéficiaire du 13 mai 2016 (cotée par le Tribunal Pièce B-47) où celui-ci requiert que soient soumis à l’arbitrage ces points 34 et 35, soit d’une part une demande de remboursement de 300 $ d’une échelle brisée, propriété d’un tiers et remboursée par le Bénéficiaire, de même qu’une réparation de la clôture de voisinage que le sous-traitant en maçonnerie de l’Entrepreneur a endommagé.

 

Déconfiture de l’Entrepreneur

[47]     La preuve documentaire indique que le Bénéficiaire avise à plusieurs reprises qu’il fait des paiements personnels à différents sous-traitants dans le cadre du Contrat de construction, incluant, par exemple, l’avis envoyé à l’Administrateur le 16 novembre 2015 de correspondances et avis de paiement à tiers adressés à l’Entrepreneur les 11 et 13 novembre précédents (Pièce A-6).

 

[48]     Le Bénéficiaire est avisé en avril 2016 d’hypothèques légales placées sur sa propriété, soit de 38 900 $ (9207-2289 Québec Inc. - f/a/s Balex Construction) et de 29 751 $ (de M.C.M.E.L. Inc. (« MCMEL »)).  Copies d’un avis d’hypothèque légale (de M.C.M.E.L. Inc. daté du 17 février 2016) (Pièce B-43) et respectivement d’un préavis d’exercice d’un droit hypothécaire pour fins de vente sous contrôle de justice (de Balex Construction daté du 5 avril 2016) (Pièce B-25) ont été déposés au dossier du Tribunal.

 

[49]     Le Tribunal est informé que l’Entrepreneur a pourvu à des procédures en vertu de la Loi sur la faillite et l’insolvabilité (L.R.C. (1985), ch. B-3), qu’il a été procédé à la nomination d’un syndic, et que l’Administrateur a déposé un formulaire de preuve de réclamation non garantie au montant de 56 916,21$ calculé à la date du 13 juillet 2016.

 

Prétentions des Parties et Objections

 

Débats et contestations des réclamations - preuve documentaire

[50]     Jusqu’à son désistement, l’Entrepreneur s’opposait sous sa demande d’arbitrage à différents Points de la Décision Adm, incluant quant à des montants alors réclamés par le Bénéficiaire dans un cadre de portions de travaux visés inter alia à tout le moins selon l’Entrepreneur partiellement effectués et/ou qui se devaient de lui être payés (tenant compte des déboursés déjà effectués par le Bénéficiaire).

 

[51]     L’Entrepreneur dépose des tableaux (en date du 28 avril 2016) en support de ses prétentions de contestation de la demande du Bénéficiaire avec corrélations aux Pièces P-1 à P-16 et intitulés ‘‘Résumé de Contestation de remboursement’ et ‘Contestation de remboursement’ [que le Tribunal a coté P-17.1 et P-17.2 respectivement dans l’ordre] ainsi qu’un tableau de l’Entrepreneur de même date [que le Tribunal a côté sous P-17.3] intitulé ‘Inventaire des pièces justificatives - Défense remboursement’ et à la colonne ‘Explication’ des notes explicatives (collectivement quelquefois, la « Contestation E »).

 

[52]     Dans le cadre de ses représentations avant désistement de l’Entrepreneur, tel que précédemment mentionné, le Bénéficiaire a initialement indiqué au formulaire de réclamation du 16 novembre 2015 qu’il a retenu à cette date un montant de 31 097,76 $ sur le solde du prix du Contrat de construction.

 

[53]     Le Bénéficiaire appuie cette approche de retenue par la remise d’un tableau à l’Administrateur. Référence est au document Pièce B-13 identifiant initialement par le Bénéficiaire un montant à payer à l’Entrepreneur (35 235$) alors que sous la Pièce A-24 il identifie un montant allégué versé en trop à l’Entrepreneur   

            (de 46 580$).

 

[54]     Le Tribunal a reçu du Bénéficiaire un tableau récapitulatif à jour en date du 18 août 2016 du contenu initial de la Pièce B-13 (le « Tableau35 »)[5] ainsi que des notes de ce dernier [que le Tribunal cote sous Pièce B-48 en liasse] quant à la différence entre les montants précités, le tout en suivi d’une Ordonnance émise par le Tribunal en conférence de gestion d’instance du 17 août 2016.

 

[55]     En suivi de l’Ordonnance précitée, le procureur de l’Administrateur confirme le 16 septembre 2016 ne pas avoir de commentaires à faire sur le contenu du Tableau35.

 

[56]     Dans le cadre des différents postes de réclamation et des montants autrement payés par le Bénéficiaire (ou allégués à être payés) à des tiers et allégués encourus en conformité du Contrat de construction ou au nom, pour le compte ou à la demande de l’Entrepreneur, le Tribunal note une description très détaillée du Bénéficiaire transmise au Greffe du Tribunal et aux Parties le 13 mai 2016 intitulée « Preuve documentaire additionnelle des Bénéficiaires (Enquête et audition prévue les 25 et 26 mai 2016) » (Pièce B-47).

 

[57]     Finalement, le Bénéficiaire s’appuie sur un tableau qu’il a intitulé dès sa première composition de ‘Demande de remboursement d’acompte’ (Pièce B-27) - et on remarque aussi l’Objet du courriel (du 17 février 2016) à la Pièce A-24 intitulé ‘Réclamation remboursement d’acompte’.  Il sera d’intérêt de tenir en mémoire ce courriel lors de l’analyse de la Pièce B-46, courriel de l’Administrateur (du 17 février 2016) en réponse à la Pièce A-24.

[58]     Le Tribunal a pris en considération pour les fins des présentes la Pièce B-27 principalement sous sa dernière mise à jour déposée au dossier, soit en date du 9 août 2016 (« Demande R/Bén »)

 

[59]     Il y a eu diverses versions du quantum de la demande de remboursement et du calcul des montants pouvant être dus à l’Entrepreneur et retenus par le Bénéficiaire [inter alia les versions de la Pièce B-13, le montant indiqué au formulaire de la Pièce A-3 en liasse, les versions de la Pièce A-24 et de la Pièce B-27, les informations sous la Pièce B-6 et le Tableau35 (Pièce B-48)] mais il suffit pour nos fins de retenir le montant de 60 617,12$ pourvu à la Demande R/Bén.

 

[60]     Il faut noter qu’il n’y a pas de différences substantives ou de nouveaux postes de réclamation entre la Demande R/Bén et ses versions précédentes (dont la première version est déposée au dossier préalablement au dépôt de la Contestation E) mais principalement une augmentation de montants sur des postes existants.

 

Analyse et Motifs relatifs aux Objections

 

[61]     Il y a une certaine confusion dans les représentations à l’Instruction entre les concepts :

 

ú     de remboursement d’acomptes versés tel que décrit à l’article 9 du Règlement,

 

ú     d’une somme encore due qu’un Bénéficiaire doit faire retenir dans le cas d'intervention de l'Administrateur pour parachever ou corriger des travaux en vue du paiement final des travaux qui seront exécutés par celui-ci, tel que décrit à l’article 11 du Règlement,

 

ú     du calcul d’une somme qui serait encore due à l’Entrepreneur ou au contraire due au Bénéficiaire, alors que le Bénéficiaire soustrait dans ses calculs :

(i)  les sommes alléguées payées par le Bénéficiaire ou à payer à des tiers, et

(ii) (a) 10% de ces sommes avant taxes, à titre de prix majoré pour profit et administration de l’Entrepreneur et (b) les taxes applicables

qu’il considère avoir droit de soustraire au Contrat de construction pour la prise en charge des travaux.

 

[62]      Le Tribunal s’y adresse ci-dessous, mais préalablement on se doit de régler certaines questions soulevées dans le cadre du déroulement de l’instance.

 

[63]     L’Administrateur et le Bénéficiaire ont déposé chacun des Notes et Autorités (« N&A ») dans le cadre de l’Instruction du 17 août 2016, ce que le Tribunal apprécie.

 

Objection couverture

Remboursement d’acompte ou parachèvement de travaux?

[64]     Pour que l’on considère une question de remboursement d’acomptes aux fins de couverture de la Garantie, il faut se situer avant la réception du Bâtiment.

 

[65]     Le Tribunal considère qu’il n’est pas requis pour les fins des présentes de statuer plus avant sur la détermination de la réception du Bâtiment à la Décision Adm mais se doit de souligner qu’une réception en conformité inter alia de l’article 8 du Règlement[6] requiert que le Bâtiment soit en état de servir à l’usage auquel on le destine et que la preuve démontre que le Bâtiment n’était pas en état à cette date et que la Décision Adm n’adresse aucunement cet élément.

 

[66]     L’Administrateur, s’adressant à la demande du Bénéficiaire visant la Demande R/Bén dont on se rappelle l’intitulé de ‘Demande de remboursement d’acompte’, plaide (i) que le remboursement d’acomptes et le parachèvement des travaux sont des solutions alternatives et non cumulatives et (ii) que le choix entre ces modes de règlement appartient à l’Administrateur.

 

[67]     Le Tribunal est d’avis que l’Administrateur a effectivement raison sur cet aspect de plaidoirie de solutions alternatives et que le choix appartient à l’Administrateur; la jurisprudence le confirme d’ailleurs[7].

 

[68]     Cette plaidoirie vise entre autres l’interprétation de l’article 9 du Règlement.  Toutefois, l’article 9 vise la garantie du Plan dans le cas de manquement de l'entrepreneur à ses obligations légales ou contractuelles avant la réception du bâtiment alors que la Décision Adm fixe une réception le 6 janvier 2016,

 

[69]     Mais il s’agit selon le Tribunal, dans les circonstances de ce dossier, d’un certain sophisme. Que ce soit avant réception ou par la suite que l’on recherche le concept approprié, dans les deux situations le Règlement s’adresse à un parachèvement de travaux, quoique suite à réception on requiert impérativement une dénonciation écrite des travaux requis, ce qui n’est pas prévu dans une situation pré-réception; l’approche de la Décision Adm et la confirmation subséquente de l’Administrateur relativement au paiement de sous-traitants par le Bénéficiaire a placé cette affaire dans un contexte plutôt particulier.

 

[70]     Une brève note afin d’adresser ce qui a été relevé dans le cadre des conférences de gestion.  Malgré le libellé du Bénéficiaire, le Tribunal n’a pas préalablement aux présentes caractérisé la Demande R/Bén de demande de remboursement d’acompte ou autrement.  Ce que l’Administrateur identifie sous ses N&A comme une demande de facto de remboursement d’acompte n’emporte pas pour le Tribunal une caractérisation juridique de remboursement d’acompte au sens du Règlement.

 

[71]     D’autre part, cette Demande R/Bén peut sembler être uniquement déposée en cours d’instance mais le Tribunal considère, dans les circonstances particulières de ce dossier, que cette demande prend sa source dès la 1ère Dénonciation OCT15 et que la Demande R/Bén n’est que le calcul de celle-ci.

 

[72]     On peut aussi considérer la Demande R/Bén, si c’était requis, comme une demande d’arbitrage par le Bénéficiaire à ce titre ce qui n’enfreint pas, dans nos circonstances particulières, le délai pour ce faire au Règlement, délai de procédure et non de rigueur, tenant compte inter alia de l’article 19.1 du Règlement avec référence à un non-respect des stipulations de l’article 17 du Règlement dans les circonstances sous étude (ou si requis, et ce n’est pas inféré, subsidiairement, comme une demande reconventionnelle du Bénéficiaire; si le Tribunal, tribunal statutaire et administratif, n’est pas lié par le Code de procédure civile[8], il peut certes s’en inspirer et s’appuierait alors inter alia sur les dispositions de l’art. 172 C.p.c. qui prévoient que nonobstant désistement de la demande principale le tribunal reste saisi de la demande reconventionnelle[9]).

 

[73]     On note la position claire de la Cour d’appel qui confirme dans l’affaire Desindes le pouvoir d’un arbitre sous le Règlement d’ordonner un parachèvement de travaux malgré une demande formulée de remboursement d’acompte, ou l’inverse[10] .

 

[74]     Malgré que le Bénéficiaire questionne la détermination d’une réception du Bâtiment fixée par la Décision Adm, entre autres dès le formulaire du 16 novembre 2015 où il indique :

 

« La maison est loin d’être finie. […] La maison n’est pas terminée, l’inspection préréception sera demandé à la fin des travaux. »

 

ou sous ses N&A alors qu’il indique que c’est l’Administrateur qui a décidé d’une date de réception :

 

 « … sans qu’il y est eu [sic] l’inspection préréception obligatoire et alors que la maison était loin d’être finie… ».

 

le Tribunal retient sous les énoncés du Bénéficiaire à ses N&A les admissions où il confirme ne pas contester que le choix d’un mode de règlement appartienne à l’Administrateur et que les circonstances sont, tel que le recherche l’Administrateur, une demande de parachèvement de travaux, alors qu’il écrit :

 

« …j’ai bien utilisé ces termes [ndlr : demande de remboursement d’acompte], mais ce que je demandais réellement c’est la possibilité d’obtenir de l’aide supplémentaire de GCR pour prendre en charge le parachèvement des travaux … ».

 

[75]     Le Tribunal est plus que satisfait que cet énoncé n’est pas a postériori des réclamations et dénonciations du Bénéficiaire, alors qu’il souligne à diverses reprises à la preuve documentaire tel que souligné précédemment par le Tribunal à la 2e Dénonciation JAN16, que dès la 1ère Dénonciation OCT15, il écrit :

 

« La présente est pour vous informer que je vous réclame le parachèvement des travaux de notre maison … ». 

 

[76]     Conséquemment, et ceci concorde avec les positions prises respectivement par le Bénéficiaire et l’Administrateur, on s’adresse à un parachèvement de travaux.

 

Demande de remboursement - Paiements à des tiers

[77]     La Décision Adm n’adresse que la 2e Dénonciation JAN16, qu’elle reprend verbatim dans ses énumérations spécifiques, mais soulignant que cette dénonciation est « … une liste complète des travaux à parachever et à corriger » dressée par le Bénéficiaire.

 

[78]     Toutefois, sous ses N&A, le Bénéficiaire plaide que la 2e Dénonciation JAN16 emporte plus, soit en extrait de celle-ci, le texte suivant qui précède immédiatement cette énumération spécifique :

 « De terminer notre maison … pour que nous puissions ensuite procéder à l’inspection préréception de cette maison. Vous devrez entre autres : »

 

et il ajoute d’ailleurs en dernier point de cette énumération :

« Et finalement, planifier l’inspection préréception GCR obligatoire en votre présence pour voir les derniers correctifs à apporter avec vous. »

(nos soulignés)

 

[79]     Le Tribunal est en accord avec ce constat du Bénéficiaire; le Bénéficiaire s’adresse sous ses dénonciations à une situation préalable à réception et cette énumération de la 2e Dénonciation JAN16 n’est pas la totalité de ses réclamations.

 

[80]     D’une part, force est de constater que la Décision Adm ne fait pas référence à la dénonciation initiale, la 1ère Dénonciation OCT15, ni au formulaire de réclamation précité (du 18 novembre 2015).

 

[81]     Mais la preuve démontre que l’Administrateur est à tout le moins depuis les 11 et 16 novembre 2015 avisé de paiements à des tiers (Pièce A-6 en liasse) et même sous le formulaire de réclamation (Pièce A-3) « … plusieurs fournisseurs qui tentent de se faire payer par nous. » et qu’il ne s’y adresse pas sous la Décision Adm (datée du 3 février 2016). Il s’y adressera 14 jours plus tard, le 17 février suivant (Pièce B-46) ce que le Tribunal analyse en plus de détails ci-dessous.

 

Objection compétence

[82]     Qu’en est-il de la compétence du Tribunal alors que l’Administrateur avance que la Décision Adm n’adresse pas cette réclamation que constituerait la Demande R/Bén, et donc selon l’Administrateur que le Tribunal n’a pas juridiction à ce sujet.

 

[83]     Le Tribunal est d’avis que l’Administrateur se devait de statuer, non seulement sur la base restrictive qu’il a adressée, mais sur l’ensemble des 1ère Dénonciation OCT15 et 2e Dénonciation JAN16, incluant cette question de paiements à des tiers par le Bénéficiaire, paiements dont l’Administrateur était clairement informé à la date de la Décision Adm.

 

[84]     Quoique non plaidée, le Tribunal note la position prise par Me Despatis dans l’affaire Asselin précitée :

 

« Le règlement ne prévoit pas le remboursement à un bénéficiaire des frais engagés pour le parachèvement d'une résidence, en cas de défaut de l'entrepreneur, si le bénéficiaire y a procédé de sa propre initiative et sans que l'administrateur ait été mis au courant. Il prévoit plutôt que, à la suite d'une dénonciation de la situation par le bénéficiaire, l'administrateur a le choix de parachever les travaux ou de lui rembourser les acomptes versés. »

 

[85]     Toutefois, dans nos circonstances, l’Administrateur connaissait la situation tel que souligné précédemment.

 

[86]     Le Tribunal considère que pour l’Administrateur de décider de ne pas statuer, incluant dans le cadre d’une décision de l’Administrateur, est en soi une décision de l’Administrateur au sens du Règlement[11].

 

[87]     Et même si la question n’était pas soulevée par une dénonciation, ce qui n’est pas inféré, le Tribunal confirmerait juridiction. Notre Cour supérieure y porte attention, entre autres dans l’arrêt Habitations Sylvain Ménard inc.[12] sous lequel Madame la juge Sévigny conclut que l’arbitre n’a pas excédé sa compétence en se prononçant sur une question qui n’était pas spécifiquement énoncée à une dénonciation.

 

[88]      Le Tribunal souligne subsidiairement les commentaires de Madame la juge Monast dans la cause La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc. c. Dupuis[13] (où l’administrateur recherche une révision judiciaire pour excès de juridiction) et commente quant à l’article 116 du Règlement :

 

                            « [46]          C’est le cas, notamment, lorsque l’application littérale des dispositions du règlement ne permettent pas de remédier à une situation donnée ou lorsque les circonstances font en sorte que l’interprétation stricte du règlement est susceptible d’entraîner un déni de justice parce qu’elle ne permet pas d’en appliquer l’esprit et d’assurer la protection des droits des parties »

[…]

                            « [76]          Il doit interpréter les dispositions du Règlement et les appliquer au cas qui lui est soumis. Il peut cependant faire appel aux règles d’équité lorsque les circonstances le justifient. Cela signifie qu’il peut suppléer au silence du règlement ou l’interpréter de manière plus favorable à une partie »

 

 

 

Analyse et Motifs

 

Introduction

[89]     Le Contrat de construction est un contrat d’entreprise au sens de l’article 2098 du Code civil du Québec (« C.c.Q. »).

 

[90]     Tant le dossier méticuleux de preuve documentaire déposé par le Bénéficiaire que le Cahier de l’Administrateur comportent un nombre important de pièces, et cet ensemble, incluant la Contestation E de l’Entrepreneur et ses pièces de support (incluant les pièces justificatrices de facturation respectives), assure au Tribunal une compréhension factuelle et chronologique du dossier appropriée pour les conclusions et décision aux présentes.

 

[91]     Sous la preuve documentaire soumise par les Parties, celles-ci confirment respectivement et donc aveux judiciaires :

ú  Le montant du Contrat est initialement de 502 206,22$

ú  Le montant du Contrat est principalement basé sur les soumissions obtenues, majoré d’un montant équivalent à dix pourcent (10%) de ces soumissions avant taxes (sous intitulé ‘Profit et Administration’), et des taxes applicables.

ú  Les déboursés versés par le Bénéficiaire à l’Entrepreneur sont d’un montant total de 326 142.67$.

 

[92]     Afin de déterminer le montant pouvant être dû découlant des montants qui demeurent contestés entre les Parties, le Tribunal pourvoit à une analyse de la preuve documentaire :

(i)  des Pièces P-1 à P-16 et de la revue des tableaux, commentaires et  notes déposés aux Pièces P-17.1, P-17.2 et P-17.3

(ii) la Pièce B-27 (mise à jour du 9 août 2016) et un ensemble de faits et prétentions à diverses Pièces,

(iii)  le Tableau35, et 

(iii) les admissions respectives des Parties qui en découlent.

 

[93]     D’autre part, le Tribunal s’appuie inter alia sur les principes suivants dans le cadre de cette détermination.

 

Responsabilité de l’Entrepreneur pour ses sous-traitants

[94]     L’Entrepreneur sous divers items tente de se soustraire à sa responsabilité en soutenant que la seule responsabilité d’un impair, déficience ou omission aux travaux fut celle d’un de ses sous-traitants ou que sa seule responsabilité se limite au montant de la soumission d’un sous-traitant sur laquelle il a basé son prix au Contrat de construction.  Dans chaque tel cas, ceci est tout à fait incorrect; l’Entrepreneur demeure responsable envers son client, le Bénéficiaire, tel que stipulé à l’article 2101 C.c.Q. qui se lit :      

2101. À moins que le contrat n’ait été conclu en considération de ses qualités personnelles ou que cela ne soit incompatible avec la nature même du contrat, l’entrepreneur ou le prestataire de services peut s’adjoindre un tiers pour l’exécuter ; il conserve néanmoins la direction et la responsabilité de l’exécution.

 

Entrepreneur - Obligation de résultat au Contrat de construction

[95]     Dans un cadre d’activité de construction, et encore plus lorsqu’il s’agit d’un contrat avec plans et devis, on peut identifier l’obligation de résultat et le fardeau de preuve correspondant comme :

 

« Obligation de résultat - […] celui qui accepte de faire un travail précis, comme construire[14] […] selon certaines spécifications, est responsable s’il n’atteint pas le résultat promis. Sur le plan de la preuve, l’absence de résultat fait présumer la faute du débiteur […] Elle place sur ses épaules le fardeau de démontrer que l’inexécution provient d’une cause qui ne lui est pas imputable.»[15]

 

[96]     Les auteurs Edwards et Ignacz dans La responsabilité de l’entrepreneur et du sous-entrepreneur[16], analysant les termes de l’art. 2100 C.c.Q. (que le Tribunal note est d’ordre public de protection[17]) soulignent l’obligation de résultat de l’Entrepreneur dans un cadre de contrat d’entreprise et confirment son fardeau de preuve s’il cherche à s’exonérer:

 

« Le deuxième alinéa de l’article 2100 C.c.Q., au chapitre du contrat d’entreprise ou de service, énonce maintenant formellement le principe général selon lequel l’entrepreneur ne peut, lorsqu’il est tenu à une obligation de résultat, se dégager de sa responsabilité qu’en prouvant la force majeure. »

 

et concluent d’autre part :

 

« Dans le même sens, l’entrepreneur est tenu de livrer un ouvrage conforme aux plans et devis.  De même, il répond envers le client de la faute du professionnel qu’il a engagé pour l’assister dans l’exécution de ses obligations.  Au demeurant, il doit compléter les travaux entrepris, même s’il réalise qu’il va subir une perte en ce faisant. »                                                                              

(nos soulignés)

 

Obligation de se renseigner de l’Entrepreneur

[97]     L’Entrepreneur plaide qu’il était dans l’impossibilité de connaître un élément requis pour déterminer une étendue de travaux, mais reconnaît, à certains postes, que des travaux ont été nécessaires.  En plus de cette admission (et de sa responsabilité aux actes ou omissions de ses sous-traitants précitée), cette question ne relève pas de travaux qui n’étaient pas ‘prévisibles’ au sens de 2107 al.2 C.c.Q. qui visent des modifications et ajouts par rapport au devis initial[18] (dans nos circonstances ce ne sont pas des ajouts et modifications apportés en cours d’exécution du projet initial); d’ailleurs, ce concept de travaux non prévisibles s’applique dans un cadre contractuel autre que celui applicable au Contrat de construction.

 

Obligations de renseignement, information et conseil - de l’Entrepreneur à son client

[98]     Non seulement l’Entrepreneur se doit d’être responsable de ses sous-traitants, tant lors de l’exécution du Contrat de construction que lors de la fixation du prix (qu’il a basé sur les soumissions des sous-traitants) mais l’Entrepreneur a une obligation de renseignement, d’information envers son client (tant préalablement à la signature du contrat les liant que lors de l’exécution subséquente des travaux[19]) que l’on retrouve entre autres sous l’article 2102 C.c.Q., tel que reconnu avec constance par nos tribunaux [20] :

 

« 2102. L’entrepreneur ou le prestataire de services est tenu, avant la conclusion du contrat, de fournir au client, dans la mesure où les circonstances le permettent, toute information utile relativement à la nature de la tâche qu’il s’engage à effectuer ainsi qu’aux biens et au temps nécessaires à cette fin. »

 

[99]     L’Entrepreneur, dans le cadre d’un contrat d’entreprise, a de plus une obligation de conseil, distincte de l’obligation d’information[21].

 

Frais d’hypothèque légale - non couverture

[100]   L’Administrateur plaide que « les frais et difficultés occasionnés au Bénéficiaire par l’inscription d’hypothèques légales de la construction ne sont pas couvertes par le régime du plan de garantie ».  Le Tribunal est en accord avec cet énoncé de l’Administrateur.

 

[101]   L’Administrateur soumet l’affaire Construction Tradition[22] en support de sa plaidoirie mais le Tribunal ne tire pas sa conclusion précitée du ratio de ce jugement, certains éléments factuels étant manquants afin de s’en appuyer de manière conclusive pour nos fins.

 

Calcul des montants

 

[102]   Les modifications au Contrat de construction, soit des retraits ou ajouts, sont en partie confirmées par les Parties sous la preuve documentaire (soit les Pièces     B-27, P-4 à P-7 incl. et la contestation E) pour un montant total de 28 579,55$.

 

[103]   Il n’est pas nécessaire pour un calcul du montant qui se peut être dû au Bénéficiaire, s’il en est, sous la Demande B/Bén d’identifier les items ou montants que l’Entrepreneur plaide (à la Contestation E) ne pas devoir être déduits du Contrat de construction (tel qu’autrement allégué par le Bénéficiaire) qui se doivent de demeurer toutefois déduits - mais pour fins d’information quant à la Contestation E et la détermination de montants contestés par l’Entrepreneur qui seront confirmés et déduits de la Demande R/Bén, le Tribunal désire identifier certains des motifs sous-jacents :

 

[103.1]           Travaux en sous-œuvre Laporte et Duquette (2 832,36$*) où l’Entrepreneur plaide qu’il lui était impossible de connaître une profondeur de semelle de fondation (*montant à B-27 différent, mais inférieur);

 

[103.2]            Pompe submersible (232,70$); quoique compris dans une soumission d’un sous-traitant, le Bénéficiaire a été requis de pourvoir à l’achat ;

 

[103.3]           Location scie à béton (179,79$);

 

[103.4]           Plomberie Mécanique P.V.E. visant des drains de toit           (2 232,37$); l’argument de l’Entrepreneur qu’il avait des employés sur le site ou qu’il n’a pas été avisé n’est pas concluant; la preuve ne démontre pas que ces employés étaient habilités à ce type de travail et ce n’est pas la responsabilité du Bénéficiaire d’aviser l’Entrepreneur d’une condition de chantier (malgré que le Bénéficiaire l’ait fait, sans obligation mais de bonne foi, à de nombreuses reprises); de plus, le Tribunal tient  compte de sa décision au présent dossier sur mesures conservatoires;

 

[103.5]           Honoraires de visite Ingénieur (Telar) (1 724,63$) ; l’Entrepreneur en est responsable, entre autre par la demande expresse de Ville de Montréal en suivi des Avis VdeM14Sep et Avis VdeM20OCT et les vices dénoncés à l’avis technique de Telar du 28 juin 2015 et la recommandation du Rapport Bergeron à ce sujet ;

 

[103.6]           Laporte et Duquette inc. - responsabilité de l’Entrepreneur pour le montant réclamé par le Bénéficiaire de 4 177,67$ (lignes 152 et 167 de B-27);

 

[103.7]           Réparation gypse (Laniel) (1 700$). L’argument de l’Entrepreneur n’est pas retenu ;

 

[103.8]           Rev-O construction - isolation (4 402,44$) ; l’Entrepreneur n’a pas convaincu en argument sous la Contestation E ;

 

[103.9]           Appro-Serv Inc. (632,36$). L’Entrepreneur admet à la Contestation E ne plus être présent sur le chantier depuis près de 3 mois de la date de facturation visée de novembre 2015 ; par cette admission, ce coût déboursé lui est clairement imputable ;

 

[103.10]         Balex Construction - L’Entrepreneur requiert de déduire de la réclamation du Bénéficiaire un montant de 2 334$ plus taxes; toutefois, tenant compte que (i) la Pièce P-15 ne convainc pas, entre autre alors que l’on n’y retrouve aucune indication afin d’identifier la qualité des interlocuteurs, et (ii) l’utilisation de fers angles résulte d’un ordre de l’Entrepreneur, nonobstant l’objection initiale à ce titre du sous-traitant de l’Entrepreneur, alors que le règlement municipal applicable (et les Avis VdeM14SEP et Avis VdeM20OCT) sont explicites, il est clair que l’Entrepreneur est responsable de ce vice de conception qu’il impose et du vice de construction qui en résulte, et conséquemment cette déduction est refusée ;

 

[103.11]         Escalier extérieur MCMEL - Nonobstant les montants indiqués à la Contestation E, l’Entrepreneur est responsable du montant confirmé de 28 513,80$ (Pièce P-16) ~ et des frais et intérêts afférents à l’avis d’hypothèque légale, ce que le Tribunal comprend être un montant net de  2 089,60$ que le Tribunal attribue dans son ensemble à ces frais car les dates respectives de la confirmation des différents montants sont très rapprochées (31 841,08 payé par le Bénéficiaire quant à cette hypothèque selon la preuve non contredite, moins [-] le montant identifié à cet avis avant intérêts et frais de 29 751,48$) [nota : l’Administrateur ne peut être tenu responsable des frais et intérêts] ;

 

[103.12]         Le Tribunal a aussi considéré que certains éléments de minimis sous des rubriques telles isolation, regard de douche, ciment, ventilateurs, et al. (qui ne requièrent pas d’analyse détaillée mais dont la détermination découle des principes et informations identifiés autrement aux présentes) se doivent de demeurer nonobstant la Contestation E.

 

[104]   D’autre part, l’Entrepreneur, sous la Contestation E, admet et confirme ne pas contester plus avant un montant total de 21 349,63$ des points autrement avancés par le Bénéficiaire à la Demande R/Bén.

 

[105]   Le Tribunal analyse d’autre part la Demande R/Bén, tenant compte (i) des motifs soulevés par l’Entrepreneur à la Contestation E, et (ii) des représentations de l’Administrateur quant à la couverture de la Garantie, ce qui résulte en le rejet de certains des items avancés par le Bénéficiaire, soit :

 

[105.1]           Escalier intérieur : l’Entrepreneur fait référence à des courriels des 3NOV14 et 12AOU15 et le Tribunal constate admission du Bénéficiaire à une montant maximum assumé par l’Entrepreneur de 6 000$ (plus taxes 6 222,83$) (et sans plus et non une déduction de 10 117,80$, donc à distraire un montant de 3 894,97$);

[105.2]           Peinture (lignes 110 et 136); il appert de la preuve non-contredite que seule la couche d’apprêt était comprise au Contrat de construction et que le montant est de 2 943,36$ taxes comprises (Pièce P-11) et que ce paiement n’est pas contesté. Le Bénéficiaire ne s’est pas déchargé de son fardeau de preuve subséquent quant à sa réclamation de     5 487,04$;

 

[105.3]           Électricien N. Faucher Maxime Moisan; il y a admission de l’Entrepreneur à la Contestation E pour un montant de          8 642,81$ (7 500$ + taxes) réduit toutefois d’un crédit qui apparaît à la Pièce P-12 (plinthes) de 1 291,81$, pour un total net de 7 351$ à ce poste accordé au Bénéficiaire alors qu’il réclame 9 026,44$ (donc à distraire 1 675,44$);

 

[105.4]           Construction Olivier Cloutier inc. - plomberie (ligne 117, B-27); La facturation sous la Pièce P-13 fait référence à des ‘travaux non compris dans la soumission initiale’, avec descriptions détaillées sauf quant à un montant de 2 610$ en solde du contrat initial; ce n’est que par consentement que l’on peut imposer à l’Entrepreneur des extras dans ces circonstances en ajout du Contrat de construction, et celui-ci n’accepte que 446,34$ (avant taxes) d’ajout (courriel P-13 en liasse); conséquemment la réclamation du Bénéficiaire à ce poste est réduite à 3 169,49$ (taxes incl.);

 

[105.5]           Raccordement - Hydro Québec (ligne 147); le Bénéficiaire ne s’est pas déchargé de son fardeau de preuve et le Tribunal prend note, subsidiairement, que la documentation de         N. Faucher, électricien n’en fait aucune mention (Pièce P-12, détaillée quant à d’autres sujets);

 

[105.6]           Escalier extérieur MCMEL - Le Bénéficiaire réclame           31 841,08$ (dernier item de B-27) auquel doit être ajouté un dépôt de 3 000$ payé par celui-ci (chèque 043 du Bénéficiaire).

 

[105.6.1]    Le Tribunal comprend que :

 

ú  la facture totale de MCMEL est de 35 751,48$ (courriel Pièce B-42), montant identifié en date du 22 février 2016,

ú  le Contrat de construction est pour un montant de     28 513,80$, confirmé par MCMEL et l’Entrepreneur (Pièces P-16 et B-42),

 

ú  deux (2) dépôts de 3 000$ chacun ont été versés à MCMEL, par l’Entrepreneur pour l’un et par le Bénéficiaire pour l’autre,

 

ú  l’avis d’hypothèque légale de MCMEL adressé au Bénéficiaire et à l’Entrepreneur (Pièce B-43) identifie en date du 19 février 2016 un montant de créance due de 29 751,48$, avant intérêts et frais d’avis.

 

[105.6.2]   Conséquemment, le Bénéficiaire est responsable selon le créancier MCMEL d’un montant de 7 237,68$ (soit le montant de 31 841,08$ qu’il a payé moins [-] le montant confirmé dû par l’Entrepreneur de 28 513,80$) dont on doit soustraire le dépôt de 3 000$ qu’il a versé pour un montant net de 4 237,68$, et ne peut d’autre part réclamer de la Garantie le montant de 2 089,60$ identifié au paragraphe précédent (sans que le Tribunal ne commente sur la créance que peut avoir le Bénéficiaire contre l’Entrepreneur hors du champ de couverture de la Garantie).

 

[105.7]           Quant à la réclamation pour paiement sous le préavis d’exercice de 9207-2289 Québec Inc. (f/a/s Balex construction) (Pièce B-43/H), la facturation visée de 38 900,64$ (datée du 20 octobre 2015, Pièce B-6) est de même montant en principal que sous le préavis d’exercice. Le Bénéficiaire a versé un montant de 39 617,76$ (Pièce B-27), soit incluant un montant identifié au préavis de 469,05$ pour frais d’inscription et du différentiel (39 617,76$ moins [-] 39 369,69$) et un autre montant de 248,07$ dont la preuve n’indique pas la nature; le Tribunal considère que les frais dont l’Administrateur ne peut être tenu responsable à ce poste sont de 717,12$.

 

Conséquemment, et tenant compte de la confirmation et engagement de l’Administrateur analysé ci-dessous, le Tribunal reconnaît (du montant réclamé de 60 617,12$) un montant net de 27 729,09$ qui peut être réclamé de l’Administrateur sous la Demande R/Bén (ayant déduit les montants précités, incluant les frais de 2 089,60$, re : MCMEL et 717,12$, re : Balex).

 

[106]      D’autre part, la preuve démontre que le montant autrement retenu sur le Contrat de construction tel que décrit au Tableau35 a été versé sur différents paiements aux tiers tel qu’indiqué et est pris en considération par le Tribunal dans l’analyse de la Demande R/Bén et du montant net payable au Bénéficiaire.

 

[107]      C’est à juste titre et pour les raisons évoquées que l’Administrateur a rejeté les Points 34 et 35 de la Décision Adm.

 

Confirmation et Engagement de l’Administrateur

[108]   La preuve démontre que l’Administrateur a confirmé au Bénéficiaire qu’il peut pourvoir à payer les sous-traitants et à régler les hypothèques légales qui peuvent grever le Bâtiment.  C’est en suivi et réponse au courriel du Bénéficiaire à l’Administrateur sous la Pièce A-24 déposée au Cahier de l’Administrateur (alors que cette réponse de l’Administrateur, par l’auteur de la Décision Adm, du même jour et dans la même trame de courriels que A-24, ne se retrouve pas au Cahier de l’Administrateur) que l’Administrateur écrit (Pièce B-46 qui sera déposée uniquement par le Bénéficiaire lors de l’Instruction d’août 2016):

 

« Pas de problème à ce que l’institution financière ou vous-même payez les sous-traitants qui n’ont pas été payés par Alyro à même les sommes que vous retenez en ce moment.  Je vous dirais même que c’est une priorité.  De notre côté (GCR), nous allons vous demander de nous remettre ce qui restera une fois que vous aurez réglé les hypothèques légales et les factures impayées par Alyro.  S’il n’en reste plus une fois tout cela réglé, ce n’est pas grave.  Si Alyro refuse ou néglige de donner suite à ma décision, GCR paiera pour l’exécution des travaux.

 

Cependant, gardez toutes vos preuves, qu’il s’agisse de versements faits par vous ou par l’institution financière.

 

J’espère avoir répondu clairement à vos questions. » 

(Pièce B-46 - courriel de Jocelyn Dubuc (auteur de la Décision Adm) du 17 février 2016).

 

[109]   La chronologie du dossier est d’importance particulière dans les circonstances. L’Administrateur est informé de la situation et des éléments de réclamation dès la 1ère Dénonciation OCT15 (datée du 27 octobre 2015) de par le contenu de celle-ci et des dates des avis, incluant les problématiques soulevées par les Avis VdeM14SEP et Avis VdeM20OCT

 

[110]   De plus, en certaines circonstances une décision de l’Administrateur au sens du Règlement peut se retrouver dans des documents autres ou dans des actions subséquentes de l’administrateur, tel que sous la situation à l’arrêt de notre Cour d’appel dans l’affaire Desindes (précitée)[23], qui visait une décision de l’administrateur contenue à une lettre de celui-ci postérieure au ‘Rapport d’inspection’ (et cet élément n’est pas contesté sous aucune des instances).

 

 

 

Conclusions

 

[111]   Pour l’ensemble des motifs ci-haut repris, le Tribunal ordonne à l’Administrateur de rembourser un montant de 22 709,09$ au Bénéficiaire.

 

[112]   Le rôle du Tribunal n’est pas de déterminer la responsabilité de l’Entrepreneur qui peut découler d’autres lois et hors la compétence du Tribunal, mais bien d’agir quant à un différend portant sur une décision de l'Administrateur concernant une réclamation s’il y a manquement de l'Entrepreneur à ses obligations légales ou contractuelles, et donc de déterminer si l’Administrateur a alors correctement considéré une réclamation dans le cadre de la Garantie.

 

[113]   Le Tribunal rappelle la décision de la Cour supérieure dans l’affaire Garantie d'habitation du Québec c. Jeanniot [24] :

 

[63] Il est clair des dispositions de la Loi et du Règlement que la garantie réglementaire ne remplace pas le régime légal de responsabilité de l'entrepreneur prévu au Code civil du Québec. Il est clair également que la garantie prévue à la Loi et au Règlement ne couvre pas l'ensemble des droits que possède un bénéficiaire, notamment en vertu des dispositions du Code civil du Québec et que les recours civils sont toujours disponibles aux parties au contrat.

 

[114]   La présente décision arbitrale est donc sans préjudice et sous toutes réserves du droit du Bénéficiaire (ou de l’Administrateur dans les circonstances devant le syndic tel qu’il a entre autre pourvu sous la preuve de réclamation déposée) de porter devant les tribunaux de droit commun leurs prétentions et réclamations ainsi que de rechercher les correctifs ou dommages qu’ils peuvent réclamer, sujet bien entendu aux règles de droit commun et de la prescription civile.

 

[115]   Le Tribunal, considérant l’article 123 du Règlement, est d’avis que les frais de l'arbitrage se doivent d'être à la charge de l'Administrateur.

 

 

POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL D’ARBITRAGE :

 

[116]   MAINTIENT la décision de l’Administrateur quant au rejet des Points 34 et 35;

 

[117]   ORDONNE à l’Administrateur de payer un montant de 22 709,09$ au Bénéficiaire.

 

[118]  ORDONNE que l'Administrateur assume les coûts du présent arbitrage.

 

[119]   RÉSERVE à l’Administrateur ses droits à être indemnisé par l’Entrepreneur (ou ses ayants-droit) en vertu de l’Annexe II du Règlement et de la Convention d’adhésion prévue à l’article 78 du Règlement.

 

 

 

 

 

Me Jean Philippe Ewart

Arbitre



[1] Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs (L.R.Q. c. B-1.1, r. 8), article 5.

 

[2] Idem, articles 20 et 120 du Règlement.

 

[3] Idem, article 116 du Règlement.

[4] Quoique le Bénéficiaire déclare n’avoir transmis copie papier que le 22 janvier 2016, la preuve documentaire démontre un envoi à l’Administrateur [Objet : Fwd : Rapport d’inspection] ce 7 janvier.

[5] Le Bénéficiaire avise lors du dépôt au dossier que ce Tableau35 a « … personnellement remis en format papier à M. Jocelyn Dubuc T.P. conciliateur pour l’administrateur le ou vers le 22 janvier 2016 au moment de l’inspection de notre maison et non le 6 janvier 2016 ».

[6] ‘’ « réception du bâtiment »: l'acte par lequel le bénéficiaire déclare accepter le bâtiment qui est en état de servir à l'usage auquel on le destine et qui indique, le cas échéant, les travaux à parachever ou à corriger.’’ Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs (L.R.Q. c. B-1.1, r. 8), art. 8

 

[7]  Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ c. Desindes et al, 2004 CanLII 47872 (QC C.A.); voir aussi Asselin Martin et Construction Stéphane Bédard inc. (O.A.G.B.R.N., 2009-01-28), SOQUIJ AZ-50555229, Me Johanne Despatis, GAMM, paragr. 83.

[8]Skelling c. Québec (Procureur général) 2006 QCCA 148, par.10 et Packard c Olivier 2012 QCCA 28.

 

[9] « 172.  Le défendeur peut, dans sa défense, se porter demandeur reconventionnel pour faire valoir, contre le demandeur, une réclamation qui résulte de la même source que la demande principale ou qui est connexe à celle-ci. Le tribunal reste saisi de la demande reconventionnelle, malgré un désistement de la demande principale. » Code de procédure civile (L.R.Q. ch. C25.01) article 172.

 

[10] Op. cit. Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ c. Desindes et al, para. 32 et 34.

[11] Frève et al c. Les constructions Levasseur inc. et La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc., AZ-51117075, Me Roland-Yves Gagné, (CCAC) (2014.06.04); Desrochers c. Sotramont Québec inc., 2010 CanLII 36091 ; Matheos-Erimos c. Construction D’Astous Ltée. et La Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ AZ50557084.

 

[12] Habitations Sylvain Ménard inc. c. LeBire 2008 QCCS 2686

 

[13] La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc. c. Dupuis, M. Monast, J. (C.S.) 505-17-002506-055, 2007.10.26, para 46, pp. 13 et 14 et para 76, pp. 18 et 19.

[14] Art. 2098 C.c.Q; Voir aussi: 2911663 Canada inc. c. A.C. Line Info inc., J.E. 2004-811 (C.A.), REJB 2004-60090 et Gagnon c. Bisson inc., J.E. 2004-671 (C.S.), REJB 2004-54512.

 

[15] BAUDOUIN et DESLAURIERS, La responsabilité civile, Éd. Yvon Blais, 2007, 7e éd., para. 1-1251.

 

[16] IGNACZ, Marianne et EDWARDS, Jeffrey, La responsabilité de l’entrepreneur et du sous-entrepreneur dans le cadre de La construction au Québec : perspectives juridiques - sous la direction de KOTT, Olivier F. et ROY, Claudine, Wilson & Lafleur Ltée, Montréal, 1998, p. 542.

 

[17] Développement Tanaka inc. c. Corporation d’hébergement du Québec, 2009 QCCS 3659

     (appel rejeté).

 

[18] Blasteck International inc. c. 2412-4117 Québec inc., 2007 QCCA 1152, para. 32 ; voir aussi Gaudet c. Judand ltée, 2014 QCCA 183, para. 5.

 

[19] A.C. Line Info Inc. c. 2911663 Canada Inc., AZ-50103715, J.E. 2002-232 (C.S.); voir aussi Sperandio c. 3095-9571 Québec inc. (Construction Melcon), AZ-50319394 (C.S.).

 

[20] Voir décision charnière sur cette question Banque de Montréal c. Bail Ltée [1992] 2 R.C.S. 554 ainsi que le jugement de notre Cour d’appel dans ABB inc. c. Domtar inc. 2005 QCCA 733 confirmé par la Cour Suprême [2007] 3 S.C.R. 461 sous la plume de Hon. Gonthier, J. Cette obligation s’applique autant à des grands chantiers (sujet de l’arrêt) mais aussi‘’…contrat de petite envergure, pour la construction d’une maison unifamiliale par exemple …’’ p. 592.

 

[21] Remax de l’Estuaire inc. c. Lauzier, AZ-98031333, J.E. 98-1689 (C.Q.). Voir aussi KARIM, V., « La règle de la bonne foi prévue dans l’article 1375 du Code civil du Québec : sa portée et les sanctions qui en découlent » (2000) 41 C. de D. 433, pp. 435 et ss.

 

[22] Construction Tradition Inc. c Lachance 2003 Canlii 16533 (QC CQ).

[23] Supra, note 7, 2004 CanLII 47872 (QC C.A.), 15 décembre 2004. Voir aussi Supra, note 11, Frève et al c. Les constructions Levasseur inc. et La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc.,

 

[24] 2009 QCCS 909 (Hon. Johanne Mainville, J.C.S.).