TRIBUNAL D’ARBITRAGE

Sous l’égide de

CENTRE CANADIEN D’ARBITRAGE COMMERCIAL (CCAC)

   Organisme d’arbitrage autorisé par la Régie du bâtiment.

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

CCAC : S21-110901                               ENTRE :

 

NANCY LAVALLÉE,

 

Et

 

PIERRE HURTUBISE,

 

Bénéficiaires

 

c.

 

HABITATIONS M.J.S. INC.,

 

Entrepreneur

 

ET

 

LA GARANTIE DE CONSTRUCTION RÉSIDENTIELLE (GCR),

 

      Administrateur

 

 

ARBITRAGE EN VERTU DU RÈGLEMENT SUR LE PLAN DE

GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS

(RLRQ Chapitre B-1.1, r.8)

 

 

DÉCISION ARBITRALE RENDUE LE 09 JANVIER 2023

 

YVES FOURNIER ARBITRE

                                                            DÉCISION

 

MANDAT ET COMPÉTENCE RATIO MATERIAE

 

[1] Le Tribunal fut saisi du présent dossier suite à une demande d’arbitrage formulée par l’Entrepreneur en date du 9 novembre 2021.  Le Centre Canadien d’Arbitrage Commercial (CCAC) nommait le soussigné à titre d’arbitre le 24 février 2022 afin de disposer du point en litige identifié par le conciliateur comme étant « plancher abîmé au rez-de-chaussée ».

 

[2] Les parties n’ont formulé aucune objection préliminaire.

 

RÉSUMÉ DES PRINCIPAUX FAITS

 

[3] Le 16 mars 2020, les parties signent un contrat d’entreprise (A-1) (formulaire APCHQ) pour l’achat d’un immeuble résidentiel de type unifamilial situé au [...], à St-Jérôme.  Le contrat de garantie (A-2) produit par la GCR date du 23 avril 2020.  L’avis de fin des travaux (A-3) signé par le représentant de l’Entrepreneur est daté du 26 novembre 2020, tout comme le formulaire d’inspection préréception (A-7).

 

[4] Lors de la visite de l’immeuble le 26 novembre 2020, pour les fins de compléter le formulaire d’inspection préréception, il est noté à la section revêtement de sol, au poste 3.1, qu’il y a une légère bosse au plancher face à la salle d’eau et à la chambre des maîtres.  Toutefois, les parties acceptent la réception du bâtiment sans réserve.

 

[5] Le 15 juillet 2021, les Bénéficiaires dénoncent par écrit à l’Entrepreneur 6 points dont le point 5, décrit ainsi :

 

« Dénivellation plancher bosses et trous un peu partout rez-de-chaussée. »

          (Sic)

 

[6] Cette dénonciation a fait l’objet par la suite d’une réclamation auprès de l’Administrateur, laquelle fut reçue le 9 août 2021.

 

[7] Le conciliateur, Maxime Dionne, dans sa décision du 13 octobre 2021, donnait raison aux bénéficiaires sur la base du paragraphe 3 de l’article 10 du Règlement sur le Plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs (1) en concluant dans ces termes :

 

« Or, l’analyse du dossier nous permet de constater que cette malfaçon non apparente a été découverte et dénoncée dans les délais prévus au Règlement..»

 

 

PREUVE DE L’ENTREPRENEUR

 

MAJORIK SÉGUIN

 

[8] Monsieur Majorik Séguin dirige les Habitations M.J.S. Inc. La compagnie s’exécute toujours avec les mêmes sous-traitants et elle œuvre dans le domaine de la construction depuis 2010.   La compagnie construit une vingtaine de maisons par année.  Monsieur Séguin était le chargé de projet pour la maison des Bénéficiaires. Il pouvait parfois passer sur les lieux deux (2) fois par jour mais il arrivait qu’il ne se présentait pas certains jours.

 

[9] Il expose qu’une fois les poutrelles mises en place aux 16 pouces les murs sont montés, suivi du toit et du bardeau.  Il commande toujours du contreplaqué 5/8 po embouveté.  Il explique dans un premier temps qu’une fois le contreplaqué 4 pieds x 8 pieds est livré, il est installé ‘’le jour même où le lendemain au plus tard’’.  Le plancher est laissé à l’air libre et il n’est pas recouvert jusqu’à ce que la toiture soit mise en place.  Une équipe de finition procède ultérieurement à la pose des lattes de bois franc.

 

[10] Monsieur Séguin discutant de la photo B-1, déposée par les bénéficiaires, où il est montré que le contreplaqué est déjà installé, fait remarquer la présence des nuages sur cette photo pour conclure :

 

          « À cette époque-là, il y avait eu beaucoup de pluie. »

 

[11] Traitant de la photo B-2, on constate que la toiture était installée, et d’ajouter :

 

« On peut voir qu’à certains endroits le plywood est noirci.  C’est normal, on travaille sur un chantier de construction, à l’extérieur il y a de la bouette, de la boue.  On passe le balai, quand on passe le balai ça s’étend. Je ne vois aucune dénivellation quant au plancher. »

 

[12] Selon monsieur Séguin, le bénéficiaire n’a jamais fait mention de dénivellation et d’ajouter :

 

« C’est seulement à la livraison que monsieur le client nous a montré deux points, où il y avait une certaine correction de plancher ou mouvement de plancher. »

     

[13] À la visite préréception, il a fait le tour de l’intérieur de la maison en vérifiant point par point les postes indiqués au formulaire d’inspection préréception pour confirmer ou pas s’il y avait des travaux à compléter ou des ajustements à faire. Il a donc noté ce point ciblé par le client tout en lui précisant :

 

« Il n’y avait rien à faire. Est-ce que c’est la fondation, le plywood, la poutrelle ? Je l’ai noté, on n’a pas voulu le cacher, le client a les clés, il peut aller dans sa maison en tout temps. »

 

[14] Le témoin reconnait avoir complété ce même formulaire (A-8). Au poste 3.1 qui traite du revêtement de planchers, il est noté :

 

« Légère bosse au plancher face à la salle d’eau et chambre des maîtres

 

[15] En présence du conciliateur le Bénéficiaire les a sensibilisés aux dénivellements à l’entrée, à la section en face de la salle d’eau et à la chambre des maîtres. Selon monsieur Séguin, la salle à manger n’a pas été ciblée en présence du conciliateur. Le Tribunal lui demande s’il en est certain. Il répondra : ‘’Pas mal’’. Il a noté ‘’aucune différence’’ quant aux dénivellations entre le moment où il a procédé à l’inspection préréception et la visite préalable des lieux au matin de l’audience.

 

[16] Questionné par le Tribunal, il indique curieusement :

 

« Les clients nous ont montrés plein de points, nous le problème où il y a une petite pente, comme moi je voyais et que j’ai notée, les autres endroits ils nous l’ont dit, mais moi je ne vois aucun problème (de dénivellement). »

 

[17] Le Tribunal le relance :

 

« Q. :  Pour vous, il n’y en a pas de dénivellations?

 

R. : Je ne dis pas qu’il n’y en a pas, est-ce que c’est acceptable ? Moi, je pense que oui. » 

 

CONTRE INTERROGATOIRE

 

[18] Questionné par Me Marc Baillargeon, le témoin atteste que c’est son menuisier qui a commandé le contreplaqué, contrairement à sa première version. Selon lui, le sous-traitant en pose du bois franc lui aurait mentionné qu’au matin de la pose des lattes, la Bénéficiaire, Nancy Lavallée, aurait accepté le sens dans lequel elles étaient posées.

 

[19] Il reconnaît à nouveau qu’« il y a eu beaucoup de pluie » durant la pose du contreplaqué et qu’elle fut faite sans intermittence, pour ensuite se rectifier en spécifiant qu’il y a eu notamment les vacances de la construction.

 

[20] Relativement aux photos produites montrant le plancher en contreplaqué, le Tribunal reprend un passage de son témoignage:

 

Q. : L’état du contreplaqué, c’est normal selon vous?

 

R. : Il est sale et on voit ici du soleil. Il n’est pas si sale que ça.

 

Q. : Selon vous c’est juste de la saleté, il n’y a pas de problématique, les cernes, tout ça?

 

R. :  Mais sil pleut, et les deux semaines de la construction, ben est-ce que ça peut noircir? Oui. Mais est-ce que c’est pu bon? Ça c’est une autre histoire. On ne voit pas de gondolement.

 

[21] Lors de l’inspection préréception, il a fait le tour, pièce par pièce, avec les Bénéficiaires et ils se sont rendus à l’extérieur pour vérifier le pourtour du bâtiment. C’est le Bénéficiaire qui a relevé le dénivellement à deux endroits ajoutant que le résultat du plancher est « plus qu’acceptable ». Suite à ce constat, il indiqua au Bénéficiaire qu’« il n’y a pas grand-chose à faire ».

 

[22] Interrogé par Daniel Hurtubise, monsieur Séguin évalue le temps de l’inspection à « une heure peut-être » et de se rétracter suite à une question du Tribunal en avouant « Je ne m’en rappelle pas ».

 

[23] Le Bénéficiaire proposa au témoin que c’est plutôt sa conjointe qui aurait indiqué au poseur de plancher en bois franc de poser les lattes dans le sens contraire de ce qu’il avait initié. Ce dernier aurait répondu que ‘’c’était un mythe’’ de vouloir les poser dans le sens proposé par la Bénéficiaire. Monsieur Séguin s’en est alors tenu à sa version que lui a rapportée son sous-traitant.

 

BENOIT MOREAU

 

[24] Benoit Moreau est un ingénieur civil et vice-président du Groupe Burex. Il fut reconnu comme témoin expert. Il a procédé à plus de 3000 expertises en bâtiment jusqu’à ce jour. Sa visite au domicile des Bénéficiaires est en date du 10 août 2022.

 

[25] Il avait deux volets à son mandat. Dans un premier temps il devait vérifier les données colligées par son collègue, Jacques Cadieux, technologue professionnel, lequel s’était rendu sur les lieux en date du 18 novembre 2021 ce qui donna suite au rapport daté du 26 avril 2022.  Jacques Cadieux devait vérifier la conformité de l’assemblage et si la construction du plancher avait été faite conformément aux règles de l’art et au Code national du bâtiment. 

 

[26] Le second volet consistait à vérifier les déformations et déterminer la cause la plus probable de celles-ci.  Au moment de sa visite les Bénéficiaires et le conciliateur, Maxime Dionne, étaient sur place. Les Bénéficiaires avait étiqueté les endroits où se situaient les déformations. Il a eu un accès très partiel à la structure du plancher du rez-de-chaussée par la salle mécanique.

 

[27] Au jour de l’audience et lors de son inspection initiale, il utilisa notamment un niveau de 4 pieds de long pour mesurer les dénivellations.

 

[28] La composition du plancher est constituée des lames bouvetées de merisier de 19 mm d’épaisseur par 80 mm de largeur (3/4 po X 3 ¼ po) de Barwood Pilon.  Le parquet est fixé à un support de revêtement de sol (sous-plancher), constitué d’un contreplaqué 5/8 po (15.5 mm) reposant sur des poutrelles de plancher en « I » qui sont espacées aux 16 pouces centre à centre.

 

[29]   Il rappelle que la décision du conciliateur s’appuyait sur l’article 9.30.3.2 du Code National du Bâtiment qui n’aurait pas été suivi par lEntrepreneur dû au fait que « le bois a été mis en place dans le sens des solives de la maison. » Selon l’ingénieur Moreau, cet article fut mal appliqué par le conciliateur.

 

[30] L’utilisation des panneaux de contreplaqué reposant sur des poutrelles de plancher qui sont espacées de 16 pouces centre à centre tel que demandé au plan de mise en œuvre de la structure répond aux exigences de l’article 9.23.15. 5.1 du CCQ 2010.  Il n’y a pas en l’espèce, un support de revêtement de sol en bois de construction qui se veut en d’autres termes de la « planche ».  De plus, selon le témoin, la construction du plancher est conforme au Guide du manufacturier.

 

[31] Le revêtement du plancher n’a pas un rôle structural selon l’ingénieur.  On pourrait utiliser un tapis, du vinyle ou tout revêtement semblable pour confirmer cette affirmation.

 

[32] Le Code ne va pas dans les détails en ce qui concerne les tolérances acceptables d’un plancher. On les retrouve dans les guides de performance et dans le Guide d’installation du manufacturier. En l’espèce, l’épaisseur du contreplaqué est conforme à ce dernier guide et au Code. 

 

[33] L’article 9.23.15.5.2 du CCQ 2010 autoriserait la réduction de l’épaisseur du sous-plancher en contreplaqué à 12,5 mm (1/2 po) d’épaisseur si les lames d’un parquet de bois bouveté de 19mm (3/4 po) d’épaisseur étaient mises en place perpendiculairement aux solives pour un espacement des solives ne dépassant pas 600 mm (24 po) de centre à centre. Dans le présent cas, les lames du parquet n’ont pas été disposées perpendiculairement. Afin de déterminer s’il y a une problématique, il faut regarder la situation dans des conditions normales.

 

[34] Ainsi on ne doit pas mesurer en inclinant le niveau pour ainsi laisser passer la lumière comme cet exercice a été emprunté par monsieur Bossus.  Il soutient que cela amplifie le dénivellement. On ne peut exiger que l’ouvrage soit parfait.  Il existe donc des tolérances de construction.  Il faut considérer également que le bois peut bouger en fonction du taux d’humidité.  Il faut observer également dans quelles conditions l’installation est faite.

 

[35] Pour les céramiques, chacune des tuiles va être placée avec un niveau et les faibles erreurs sont corrigées avec la pose du ciment. Un second contreplaqué est posé pour s’assurer que ça ne bouge pas.

 

[36] Faisant référence au tableau Plywood Sanded, à la page 16 de son rapport du 11 octobre 2020, l’ingénieur Moreau soumet que l’épaisseur de contreplaqué, telle que mesurée par l’ingénieur Bossus est de 5/8 po d’épaisseur.  De fait, selon l’expert Moreau, il n’existe pas de panneaux ayant une épaisseur inférieure de quelques millimètres seulement à l’épaisseur de 5/8 po ou 15,875 mm. Selon le tableau une épaisseur de 15,5 mm se retrouve dans les limites prescrites.

 

[37] L’ampleur maximale des déformations qu’il a observées est de 5,7 mm, soit quelque peu inférieure à ¼ po.  Il a établi 6 zones à l’exception des surfaces de céramique.  Il a noté 8 déformations dans chacune de ces zones qu’il qualifie de « pires » déformations. Il a noté d’autres déformations lesquelles lui apparaissaient moins importantes sans pouvoir en dire le nombre car il ne « peut passer toute une journée à relever tous les endroits du plancher ».

 

[38] La tolérance pour la déformation à deux volets.  La première est de s’assurer qu’elle n’occasionne pas un danger. Il n’y a pas d’endroit où il y a risque de trébucher. Les hauteurs dans ces situations sont au-delà de ¼ po.  Dans un second temps, l’esthétisme n’a pas à être considéré pour le témoin. Monsieur Moreau s’exprime ainsi :

 

« Moi du moment qu’on voit les déformations, est-ce qu’il y a quelque chose qui a bougé dans le temps, qui devient majeur, des démarcations remarquées en fonction des saisons, quelque chose comme ça, si on voit facilement ces déformations, là on peut parler d’un problème esthétique dérangeant. Quant en rentrant, en cuisinant on ne remarque pas ce dommage-là, pour moi il n’y a pas de problème.

 

[39] L’expert appuie l’essence de son argumentation sur les dénivellations à partir du Guide de performance de l’APCHQ, lequel spécifie que les planchers ne devraient pas avoir de bosses ou de déflexions supérieures à ¼ (6 mm) à l’intérieur de toute mesure de 32 po (813 mm).  Il insiste pour dire que l’Ontario et la Colombie-Britannique notamment présentent dans leur guide de performance la même exigence, textes à l’appui.  Ce guide est le seul document qui délimite les tolérances.

 

[40]   Le Guide d’installation du manufacturier du plancher de bois franc énonce sous le titre « L’installation de la première rangée » :

 

« Avant la pose, assurez-vous donc du sens des solives et de l’orientation, perpendiculaire des premières lamelles posées.

 

[41] L’expert soutient qu’il s’agit uniquement d’une recommandation.

 

[42] Le Tribunal lui demande si le Guide d’installation du manufacturier n’est qu’une série de suggestions. Il répond :

 

« Il y a des choses qu’il va demander. »

 

[43]   Questionné à nouveau quant à savoir pourquoi il n’est pas indiqué « il est recommandé ‘’, car pour l’expert dans ce cas c’est une recommandation et non une obligation, l’expert rétorque :

 

« Que plus haut au Guide il est dit « vous devez vous assurer », ce qui diffère. C’est une recommandation et je suis d’accord à ce que ça puisse apporter une meilleure performance. »

 

[44] Et d’ajouter plus loin :

 

« On n’est pas tenu de suivre cette recommandation parce qu’il n’y aura aucun changement dans la performance des planchers. »

 

[45] Il défend que la cause la plus probable des déformations observées est reliée à une déformation des panneaux de contreplaqué formant le sous-plancher.  Cette déformation date vraisemblablement d’avant la mise en place des panneaux et du revêtement de plancher. Les déformations sont difficilement observables et ce n’est que l’aspect esthétique qui est en cause.  Les critères de performance pour un plancher neuf ont été bien suivis.

 

[46] Il conclut dans son rapport du 11 octobre 2022 :

 

« Ce faisant, nous sommes d’avis qu’il n’est pas nécessaire de recommencer entièrement l’ouvrage. »

 

[47] Questionné par le Tribunal il indique que la seule façon de voir si le contreplaqué a été endommagé serait de retirer les lamelles.  Au sujet des photos produites il fait état que les cernes sur le contreplaqué et l’élément de bois tout juste à côté ne s’apparentent pas.  Au surplus, le contreplaqué n’aurait pas subi une perte de capacité par la pluie, selon l’expert.

 

[48] Dans l’éventualité où le contreplaqué aurait été endommagé au point de produire une perte de capacité, on serait probablement devant un caractère graduel de ce dommage considérant que le bois n’a plus la résistance requise, et il précise :

 

« On pourrait s’attendre à ce qu’il y ait une déformation plus grande au fur et à mesure qu’on le sollicite : on n’a pas d’aggravation ». 

 

[49] Pour les planchers de céramique, il n’existe aucun dommage.  Le contreplaqué sous ces espaces est doublé.  De plus, ce plancher est rigide.  S’il y avait une perte de capacité il y aurait un effet immédiat sur la céramique.

 

[50] Monsieur Moreau fait état qu’il y a « certaines des dénivellations ont un espacement de 24 pouces » à l’intérieur desquelles on retrouve un dénivellement et non au 16 pouces, ce n’est conséquemment pas parce que le contreplaqué se déforme entre les deux appuis.  Il y a une autre cause à la déformation.  Les panneaux ayant 48 po de largeur il pourrait y avoir eu une légère déformation du contreplaqué laquelle est antérieure à la pose.  Elle n’est pas reliée à une perte de capacité.

 

[51] Si les lattes avaient été posées perpendiculairement, les déformations n’auraient pu être épousées, il y aurait eu un vide entre le contreplaqué et les lattes de finition.

 

CONTRE INTERROGATOIRE

 

[52] Me Marc Baillargeon requiert du témoin de développer sa conclusion de son rapport écrit (p.24).

 

[53] Monsieur Moreau avance que les dénivellations ne suivent pas les espacements des poutrelles, que le dénivellement n’a pas un caractère graduel, qu’il ne s’aggrave pas et qu’il n’est pas causé par la géométrie et la dimension de la structure.  Il ajoute que dans 10 ans le plancher ne se sera pas davantage dégradé.

 

[54]   La cause du problème « est la déformation du contreplaqué ».  Le fait que les déformations ne suivent pas la structure cela indique que ça prédate l’installation. Les dénivellations se retrouvent à l’extérieur de 24 po.

 

[55] Interrogé par le Tribunal, le témoin reconnait que les Bénéficiaires lui ont fait mention que les dénivellations avaient augmenté.

 

[56] L’expert Moreau indique que si on veut corriger les déformations compte tenu que le contreplaqué est déformé « c’est d’enlever le contreplaqué » mais pour lui ça ne nécessite pas le remplacement.

 

[57]   Curieusement il admettra pourtant que depuis que Jacques Cadieux a visité les lieux la situation s’est dégradée en termes de millimètres si on se place à l’époque de sa propre expertise. Puis, il se ravise à nouveau pour prôner que les mesures étaient identiques.

 

PREUVE DES BÉNÉFICIAIRES

 

STÉPHANE BOSSUS

 

[58] Monsieur Stéphane Bossus est ingénieur en bâtiment.  Il a procédé à plus de 6000 expertises en bâtiment à ce jour.  En matière de structure il a travaillé chez Héneault & Gosselin, chez P.F. St-Laurent Inc., il a sa propre entreprise en expertise de bâtiment depuis 1995.

 

[59] Sa visite pour expertiser le plancher du rez-de-chaussée prit place le 16 mai 2022 en présence des Bénéficiaires qui lui firent état du problème des dénivellements.

 

[60] Pour monsieur Bossus la règle de l’art qui prime lorsqu’il s’agit de comportements d’un matériau doit se retrouver dans le Guide d’installation du manufacturier.  Cela se justifie puisque le manufacturier d’un produit teste, expérimente son produit, suit son évolution, le modifie et le corrige.  Dès lors, ce guide est plus spécifique et davantage adapté au produit qu’un guide qui serait d’ordre général tel que le Code national du bâtiment qui peut être considéré comme un ingrédient dans ce qu’on appelle les règles de l’art.  Celui-ci est sujet à l’occasion à une certaine adaptation. Il s’en suit que lorsque les recommandations du manufacturier ne sont pas suivies il y a perte de la garantie.

 

[61] En ce qui a trait aux guides de performance, tout ce qui est issu d’associations d’entrepreneurs, l’expert Bossus les écarte.  Leurs tolérances quand on les compare avec le CNB sont davantage relâchées.  Ces tolérances ne sont soutenues notamment ni par le Manuel canadien d’ingénierie des fondations, ni par le CNB.

 

[62] Il n’existe pas de normes officielles au CNB qui peut soutenir qu’un plancher ne peut plier sur telle distance.  Conséquemment, il ne reste que la norme du fabricant.

 

[63] Les parties reconnaissent qu’il existe des dénivellations de plancher qui proviennent du platelage et non des lattes de bois franc et que les poutrelles ne sont pas en cause.

 

[64] En l’espèce, il s’agit de flexions ponctuelles qui suivent un certain alignement qui est parallèle aux poutrelles de plancher.

 

[65] La différence importante en ce qui a trait au platelage du plancher c’est son épaisseur, la nature des déformations, leur amplitude et la conformité ou non au Guide d’installation du manufacturier.

 

[66] Lors de sa visite du 16 mai 2022, il a constaté que le platelage du plancher du rez-de-chaussée est composé de contreplaqués d’une épaisseur de l’ordre de 15,5 mm (0,610 de pouce) telle que mesurée à l’aide d’un vernier électronique en trois (3) lieux (page 7 de son rapport du 12 juillet 2022).

 

[67] Le Guide d’installation du manufacturier, pour ce qui est des solives espacées au 16 pouces centre au centre, exige une épaisseur minimale de 16 millimètres :

 

 « Un contreplaqué CDX de 5/8 pouce (16 millimètres) s’utilise uniquement lorsque les solives sont à 16 pouces (40,6 cm) de distance. »

 

[68] L’ingénieur Bossus s’est adressé au fabricant du plancher TECO lequel est en cause dans le présent dossier.  Il y a un numéro estampillé sur le platelage par cette compagnie. Le numéro fait référence au moulin 444.  Le fabricant West Fraser Ltd., indique dans un document de deux pages produit lors de l’audience qu’il ne fabriquait pas de contreplaqué de 16 mm en date de la construction mais plutôt un contreplaqué de 15.5 mm.  Monsieur Bossus conclut :

 

  « Il est beaucoup plus probable, pour ne pas dire une certitude que le platelage du plancher a une épaisseur de 15 mm. »

 

[69] Il souligne que le Guide d’installation du manufacturier indique :

 

« Avant d’installer votre plancher de bois franc, vous devez vous assurer d’avoir le sous-plancher adéquat en contreplaqué ou en panneaux à copeaux orientés.  L’épaisseur et le choix du matériau pour le sous-plancher sont déterminés par la largeur entre les solives.  L’utilisation de panneaux de particules n’est pas recommandée.

 

Si la distance entre les solives est de 12 po (30.5 cm) ou de 15 po (40.6 cm) utilisez :

(….).

 

[70] Inévitablement, le contreplaqué en place déroge aux normes du manufacturier, conclut le témoin. D’emblée la garantie s’éteint.

 

[71] Relativement à sa visite des lieux du 22 mai 2022, l’expert Bossus précise qu’il a ‘’balayé le plancher dans toutes les pièces.  Il a constaté environ 150 endroits où apparaissent des dénivellements d’où son constat d’un « patern généralisé », c’est-à-dire d’un secteur à un autre il retrouvait le même comportement du plancher.  Le taux d’humidité dans le bâtiment n’est pas en cause et les lamelles de bois franc ne sont pas causales.

 

[72]   Ses mesures furent prises à l’aide d’un long et d’un petit niveau.  Pour le niveau de 4 pieds, le mieux que l’on peut constater en l’utilisant c’est un claquement et on ne peut mesurer les ondulations entre les solives.  Le petit niveau, déposé entre deux poutrelles de plancher permet de constater le déplacement de la bulle entre les inclinaisons des poutrelles.

 

[73] La conclusion la plus probable de ces dénivellements repose sur le fait que le platelage s’est déformé entre les poutrelles.  Il faut nécessairement conclure que les poutrelles étaient en place au moment de la déformation. Aussi, ce serait un ‘’curieux hasard’’ qu’un contreplaqué soit installé alors que les déformations suivaient les poutrelles.

 

[74] Il poursuit en affirmant que lorsqu’on tient compte de l’ensemble des paramètres, à savoir : les photos prises au moment de la construction et le témoignage des Bénéficiaires, on peut soutenir qu’il y a eu un dommage qui s’est présenté assez tôt lequel a affecté le contreplaqué.  Il a constaté qu’il y avait présence de moisissure sur les photos déposées et il y a noircissement extrêmement prononcé sur presque l’ensemble du platelage du plancher. De toute évidence, il y a un important dommage d’eau.  Même si pour l’expert de l’entrepreneur le dommage origine avant la pose, il demeure qu’un dommage demeure un dommage’’ même en conservant l’hypothèse de la partie adverse.

 

[75] Il pointe par la suite le Guide d’installation du manufacturier (page 1), où il est écrit :

 

« Une fois l’inspection et les rectifications terminées le sous-plancher se présentera comme une surface plane dépourvue de dénivellation.  Rappelons qu’un plancher de bois franc ne corrigera pas les défauts prononcés ou apparents d’un sous-plancher.  Il est donc essentiel de s’assurer du bon état de ce sous-plancher avant d’entreprendre toute procédure d’installation du plancher de bois-franc. »                 

                                                     (Je souligne)

 

[76] Les dénivellations sont généralisées et elles se situent entre 1/8 de po et tout près de ¼ po.  Il précise qu’il a mesuré les dénivellations sur une distance de 16 pouces et non pas sur 25, 32, 36 ou 40 pouces. Il insiste, les mesures notées dans son rapport ont toutes été prises entre les arches des poutrelles.

 

[77] Il reprend la norme du Guide de performance de l’APCHQ, soulignée par l’expert Moreau, laquelle indique :

 

« Les planchers ne devraient pas avoir de bosses ou déflexions supérieure à ¼ de pouces (6 mm) à l’intérieur de toute mesure de 32 pouces (813 mm). »

 

[78] Le témoin fait ressortir que dans le présent cas l’espacement est de 16 pouces. Aussi, les lattes de bois franc ont été posées dans le même sens que les poutrelles. ‘’Ce n’est peut-être pas un hasard’’, car autrement on aurait eu des lattes en suspension.  En marchant, celles-ci auraient fléchi.  La pose non perpendiculaire des lattes permettait d’épouser les déformations.  Pourtant le Guide du manufacturier enseigne qu’il y a lieu de « s’assurer » du sens des poutrelles et de l’orientation perpendiculaire des premières lamelles posées.

 

[79] L’expert Bossus note qu’en conclusion de son rapport (p.15) Jacques Cadieux T.P. écrit :

 

« …toutes les situations observées s’expliquant et se retrouvant à l’intérieur des limites acceptables tolérées par les exigences réglementaires du Code de construction en vigueur, tout en respectant les recommandations du fabricant du parquet. »

 

Ce qui n’est pas le cas selon monsieur Bossus.

 

[80] Il rappelle finalement cette conclusion du rapport Moreau, où il est écrit :

 

« Les déformations ne sont qu’esthétiques et son difficilement observables. »

 

 

CONTRE-INTERROGATOIRE

 

[81] Pour le Guide de performance de l’APCHQ, le témoin n’en tient pas compte car ce qui est donné comme seuil de tolérance c’est plus élastique et c’est beaucoup moins que ce que livre la littérature, à savoir le CNB, le Code de construction du Québec, etc. Le fait que des associations des autres provinces ou d’un état américain édictent les mêmes règles, il n’en demeure pas moins qu’elles sont issues d’un même groupe qui partage les mêmes intérêts.  Il est préférable d’avoir un groupe d’experts indépendants qui élaborent les règles en matière de construction. Dans le Code national du bâtiment, il n’existe pas de normes établissant les seuils de tolérance.  Le Guide de performance ne représente pas une norme émanant de la Régie du Bâtiment du Québec ou du gouvernement du Canada.  Pour l’expert, le Guide d’installation du manufacturier constitue la règle première de référence en l’espèce.

 

DANIEL HURTUBISE

 

[82] Le Bénéficiaire Daniel Hurtubise affirme qu’il se sont passés plus de 28 jours entre la pose du contreplaqué et celle de la toiture.  À l’appui, il présente une première photo datée du 15 juillet 2020 (photographies produites en annexe du rapport Bossus et prises par le bénéficiaire, page 32) montrant la pose du contreplaqué terminée. La photo du 12 août 2020 confirme que le toit n’était pas encore installé. Durant les deux semaines de la construction à l’été 2020 il a « plu à siaux tous les jours.  L’Entrepreneur n’a d’aucune façon protégé le contreplaqué même après les semaines de la construction où il pleuvait encore beaucoup.  De toute évidence, le contreplaqué a été sérieusement endommagé et affaibli.

 

[83] Les Bénéficiaires se rendaient tous les jours sur le chantier jusqu’à ce que l’Entrepreneur leur interdise l’accès.  Ils ont réussi à obtenir une clé d’une tierce partie par la suite.  Considérant que le terrain leur appartenait, ils se sentaient en droit de se rendre sur les lieux. Ayant dans le passé acheté deux propriétés qu’ils ont habitées et qu’ils ont suivi au jour le jour la construction, ils avaient pu visualiser à chacune des occasions que la pose du bois franc était toujours perpendiculaire aux poutrelles. À une seconde occasion, alors qu’une bonne partie du bois franc était installé, ils se sont adressés au sous-traitant quant au sens de la pose des lattes de bois franc.  Ce dernier leur indiqua à nouveau que c’était un mythe de devoir poser les lattes dans le sens contraire des poutrelles.

 

[84] Dans le texto transmis le 1er juin 2021 à l’Entrepreneur, monsieur Hurtubise indiquait :

« Bon matin. Merci pour la poignée de porte, mais reste à voir pour le plancher bois franc (valons à plusieurs place, craquement et kit de réparation »

     (Sic)

 

[85] En réponse, l’Entrepreneur rétorquait le même jour par texto:

 

« Pour le plancher n’y a pas grand-chose à faire pour ça. C’est en dessous du plancher de bois. » 

                                                  (Sic)

 

[86] Monsieur Hurtubise conclut que l’Entrepreneur était au fait que la problématique prenait place sous les lattes de bois franc.

 

 

CONTRE-INTERROGATOIRE

 

[87] La première fois qu’il constata les dénivellations telles que dénoncées le 15 juillet 2021 ce fut le 26 novembre 2020 (A-4).

 

[88] Questionné par le Tribunal, il assure que la problématique du dénivellement a évolué au fil du temps et qu’il se retrouve avec un plancher qui n’est plus garanti par le fabricant considérant que l’Entrepreneur n’a pas respecté les directives du Guide d’installation du fabricant.

 

[89] Il affirme que le fournisseur du contreplaqué, RONA Dagenais, entrepose son produit.  L’Entrepreneur n’a pris aucune précaution pour le protéger une fois celui-ci posé et ce, pendant presqu’un mois alors qu’il a plu abondamment.

 

 

PREUVE DE L’ADMINISTRATEUR

 

MAXIME DIONNE

 

[90] Monsieur Dionne est technologue professionnel et agit comme conciliateur pour la GCR depuis juin 2021.  Il est diplômé du Cégep de Jonquière en mécanique du bâtiment. Il exerce dans le domaine de la construction depuis 30 ans.

 

[91] Lors de sa visite à la maison des Bénéficiaires, il a constaté des dénivellations.  En entrant, il pouvait remarquer sur le palier une dénivellation dans le sens linéaire.  D’autres dénivellations ont pu être constatées, notamment à l’entrée de sa chambre et entre l’ilot de la cuisine et le frigo.  En marchant, il pouvait remarquer les bosses.  C’est uniquement au niveau du plancher de bois qu’il a pu noter les dénivellations.  Au niveau de la céramique, rien n’a été remarqué.

 

[92] Les photos prises lors de sa visite sont incorporées à son rapport (p.9). Les photos ne se limitent pas à toutes les dénivellations qu’il a pu constater. Quant à lui le problème s’est aggravé dans le temps puisqu’il y avait davantage de dénivellations comparativement aux 2 endroits nommés au formulaire d’inspection préréception.

 

[93] Son analyse l’a dirigé à considérer qu’il s’agissait d’une malfaçon non apparente.  Il n’a considéré ni le CNB et ni le Guide d’installation du fabricant pour rendre sa décision.  Il a également constaté lors de sa visite que le platelage était altéré par le passage de l’eau en certains endroits. 

 

[94] Si le Tribunal donnait raison aux Bénéficiaires, il faudrait retirer les lattes de bois franc et le contreplaqué pour finalement refaire à neuf.

 

[95] Qui plus est, il faudrait placer les lattes de bois franc de façon perpendiculaire aux solives pour permettre aux bénéficiaires de maintenir leur garantie.

 

[96] Il a procédé à quatre visites du bâtiment.  Il a constaté au matin de l’audience une dégradation du plancher de façon générale mais plus particulièrement aux endroits qu’il avait précédemment retenus, ajoutant :

 

« D’autres bosses sont apparues dans l’air ouverte qui ont été également constatées par monsieur Bossus. C’est pas des bosses que j’avais constatées. »

 

[97] Les deux légères bosses constatées par les Bénéficiaires et l’Entrepreneur le 26 novembre 2021 ne suffisaient pas pour ces derniers de les qualifier de malfaçon. L’apparition subséquente de d’autres dénivellations à plusieurs endroits, probablement causées par le contreplaqué, selon lui, a permis d’établir qu’il s’agissait de malfaçon apparente.

 

CONTRE-INTERROGATOIRE

 

[98] Questionné par Me Julien Bergeron, curieusement monsieur Dionne soutient que le contreplaqué équivaut à du bois de construction contrairement à l’affirmation de l’ingénieur Benoit Moreau.

 

[99] Il s’est présenté au domicile des Bénéficiaires à quatre reprises, à savoir le 9 septembre 2021, lors de son inspection; le 10 août 2022 lors de l’inspection de Benoit Moreau; le 11 octobre 2022, lors de l’expertise de Benoit Moreau et le 18 novembre 2022 au jour de l’audience.  Au fil de ses visites, il a remarqué :

 

                                « Une aggravation des bosses et des trous. »

 

ARGUMENTATION

 

ENTREPRENEUR

 

[100] le procureur de l’Entrepreneur fait valoir qu’au moment de l’installation le contreplaqué ne montrait aucun signe de défectuosités ou d’imperfections soutien le procureur. La photo B-1 montre un contreplaqué impeccable. La photo B-2 affiche un contreplaqué sale considérant qu’il y avait eu de la pluie suivie par les va-et-vient des ouvriers de l’extérieur à l’intérieur du bâtiment alors que le sol était boueux.  Les photos B-1 et B-2 ne semblent affectées d’aucune moisissure et le contreplaqué n’est aucunement affaibli par l’eau.

 

[101] Pour monsieur Séguin, le noircissement sur le contreplaqué ne provient pas de pluies à répétition qui compromettraient sa solidité ou la performance du matériau. Lors de l’inspection préréception le Bénéficiaire n’a émis qu’une seule réserve, soit « deux bosses ».

 

[102] Il commente que la décision du conciliateur prenait assise que sur le fait que :

 

« Le bois a été mis dans le sens des solives de la maison.  Cette disposition contrevient au Code National du Bâtiment article 9.30.3.2. »                          (Sic)

 

[103] L’expert des Bénéficiaires ne s’attaque d’aucune façon à la ratio decidendi de la décision.  D’aucune façon la preuve des Bénéficiaires repose sur le Code de construction.  Pour monsieur Bossus, tout son raisonnement il le tire à partir du Guide d’installation du fabricant qui pour lui est la seule référence valable.

 

[104] Quant à l’expert Moreau, l’article 9.30.3.2.1 du CCQ 2010 demande que les lattes d’un parquet ne soient pas orientés parallèlement aux éléments d’un support de revêtement de sol lorsque ce support de revêtement de sol est constitué de bois de construction.   lumber subflooring » selon la version anglaise du CCQ 2010). Qui plus est, l’assemblage en place actuellement répond aux exigences de l’article 9.23.15.5.1 du CCQ 2010.  Comme le contreplaqué n’est pas assimilé à du bois de construction il n’y a pas lieu pour lui que les lattes soient placées perpendiculairement.

 

[105] Monsieur Bossus a avancé que le contreplaqué s’était détérioré et qu’il s’agissait d’un considérant important justifiant les dénivellations du plancher qui suivent le positionnement des poutrelles.

 

[106] Monsieur Moreau, de son côté, rejette cette avenue parce qu’il y aurait eu un déchaussement des lattes de bois. Si on analyse la céramique, celle-ci reste intacte alors qu’il s’agit probablement du matériau le plus fragile en termes de revêtements de plancher.   De plus, rien ne laisse présumer qu’il puisse y avoir un mouvement quelconque de la structure.  Si le contreplaqué s’était érodé, il y aurait eu une panoplie de problèmes d’ordre structural, ce qui n’est pas le cas.

 

[107] Pour l’expert Moreau, il y a eu certes une déformation du contreplaqué lors de son entreposage sur un contrepoids placé au milieu du contreplaqué puisque les prises de mesure s’étalaient sur une longueur de 24 pouces.  De son côté, monsieur Bossus n’a pris aucune mesure au matin de l’audience.  Personne ne peut dire que les solives étaient à l’endroit d’où les mesures étaient prises par l’expert Bossus. 

 

[108] Les dénivellations étant peu perceptibles de sorte que lors de la visite des lieux au jour de l’audience des rubans avaient été placés préalablement au plancher pour indiquer où elles se situaient. 

 

[109] L’utilisation d’une lampe de poche par l’expert Bossus ne sert qu’à amplifier et/ou laisser voir où se situent les dénivellations.

 

[110] La mesure du contreplaqué établi par le fabricant peut fluctuer en fonction du système de mesurage métrique versus le système anglais.  Monsieur Bossus a reconnu que l’on peut accorder une marge d’erreur de 1mm.  En bout de piste, le contreplaqué installé se stationne dans les normes acceptables.  Un cerne d’eau ne fait pas la preuve qu’il y a une attaque quant à l’intégrité du matériau.

 

[111] Monsieur Moreau a indiqué que le Guide d’installation du fabricant n’est pas la norme à suivre et il ne constitue pas en soi les règles de l’art parce que la latte de bois franc n’est pas un élément structural.  Le bois n’étant pas parfait, le bois étant vivant, nécessairement il peut y avoir des dénivelés ici et là.

 

[112] Finalement il est plaidé que monsieur Moreau a départagé le Guide de tolérance du Québec et le Guide d’installation du fabriquant en rapportant que la même norme ou dénivellation de plancher se retrouve en Ontario ou en Colombie-Britannique, lesquels sont des « guides conçus par les entrepreneurs et faits pour les entrepreneurs, » selon le procureur.

 

[113] Advenant que le Tribunal conclut qu’il y a malfaçon, on doit retenir que l’entrepreneur a le libre choix quant à la méthode de correction.

 

ADMINISTRATEUR

 

[114] Deux experts en viennent à la conclusion qu’il y a déformation et qu’il y a une problématique existante.

 

[115] Il est rappelé que monsieur Bossus a évoqué trois dérogations majeures qui l’ont amené à conclure à la malfaçon : l’épaisseur du contreplaqué, les lamelles posées sur un contreplaqué déformé et le sens des lamelles posées en contravention à l’exigence du fabricant et ce, malgré, l’intervention verbale de madame Nancy Lavallée auprès du sous-traitant.

 

[116] Que le dénivellement ait été causé par la pluie ou l’entreposage du fabricant ou du fournisseur, dans les deux cas l’Entrepreneur doit en assumer la responsabilité et les conséquences.

 

[117] Relativement au Guide de performance de l’APCHQ, la jurisprudence est partagée quant à lui attribuer un endossement.

 

[118] Pour l’Administrateur, le Guide d’installation du fabricant doit être retenu d’avantage que le Guide de performance de l’APCHQ.

 

[119] Contrairement aux prétentions de l’Entrepreneur, la preuve a révélé clairement que monsieur Bossus s’était servi de trois (3) niveaux, un niveau laser auto nivelant, un niveau de quatre pieds et de huit (8) pouces.

 

[120] La situation actuelle va-t-elle se dégrader? Même monsieur Dionne a témoigné à l’effet qu’il avait constaté une certaine évolution.

 

[121] L’Administrateur opine que l’arbitre se doit de déterminer la méthode corrective dans le présent dossier s’il ne donne pas raison à l’Entrepreneur.

 

 

BÉNÉFICIAIRE

 

[122] Monsieur Daniel Hurtubise atteste que monsieur Bossus a utilisé deux niveaux, un de quatre pieds et celui de 8 pouces puisqu’il était sur place lors de son inspection et au surplus certaines photos de son rapport le démontrent.

 

[123] Il s’attendait à recevoir une maison construite selon les règles de l’art ayant payé au-delà de $400,00.00 uniquement pour le bâtiment dont le contrat fut signé en mars 2020.

 

[124] Le plancher s’est beaucoup détérioré notamment aux alentours de l’ilot.  Aux endroits où il y a davantage de circulation, le plancher a vu les dénivellements s’additionner.

 

[125] Si au départ il n’y avait que deux bosses et que plusieurs mois plus tard il y en a en très grand nombre on doit conclure qu’il existe un problème   Les autocollants ou rubans (tape) posés sur le plancher au matin de la visite préalable à l’audience relèvent uniquement de son idée et non de monsieur Bossus.  Il les a apposés avant son arrivée.

 

[126] Il a mesuré le plancher et au centre il y a une solive et à partir de celle-ci il a été en mesure d’identifier les poutrelles qui sont au 16 pouces.  Les dénivellements sont tous en fonction d’un espace de 16 pouces.

 

[127] Quant au Bénéficiaire il est évident que la céramique n’a pas craqué puisqu’ils ont doublé ultérieurement le contreplaqué, ils l’ont collée et ils ont posé un mortier.

 

[128] Le Guide d’installation du fabricant doit être respecté. Le Bénéficiaire questionne ainsi : ‘’ Pourquoi la garantie n’opère plus en cas de non-respect des directives?’’ La réponse est évidente selon lui. Il soumet qu’il y a un risque de probabilité élevé que le matériau ne donne pas le rendement qu’on est en droit de s’attendre.

 

[129] Il rappelle que tous s’accordent pour dire qu’il y a problème sous le plancher en bois franc.  Monsieur Séguin nous avait dit « ça va se replacer, c’est peut-être un problème d’humidité ». Ce n’est pas le cas et il y a une aggravation certaine avec le temps.

 

VALEUR EN LITIGE

 

[130] L’Entrepreneur a estimé que la valeur en litige était de $50,000.00.  Le 15 mars 2022, Laurianne Juvigny pour l’Administrateur, indiquait que le conciliateur évaluait à « environ 2,700$ » la valeur du litige.

 

[131]   Au jour de l’audience, l’expert des Bénéficiaires, Stéphane Bossus, indiquait au soussigné en présence du conciliateur et du procureur de l’Administrateur, Me Marc Baillargeon, qu’il estimait les travaux à entreprendre dans l’éventualité où le Tribunal rejetterait l’appel de l’entrepreneur à environ $65,000.00.

 

[132] Le Tribunal estime que cette dernière évaluation est davantage conforme à la réalité, considérant les travaux du retrait des lattes de bois franc, du contreplaqué dans un contexte où il faudra tenir compte de plusieurs travaux accessoires, de la reconstitution du plancher, du retrait des plinthes, de la peinture, de l’entreposage et j’en passe.

 

ANALYSE ET DÉCISION

 

[133] Puisque l’Entrepreneur conteste le bien-fondé de la décision de l’Administrateur, le fardeau de preuve repose sur ses épaules.  L’article 2803 du Code civil du Québec énonce :

 

                     « Celui qui veut faire valoir un droit doit prouver les faits qui  

                           soutiennent sa prétention. »

 

[134] La Cour d’appel énonçait dans Boiler Inspection and Insurance Company of Canada c. Moody Industries Inc. : (2)

 

[57] La première juge a attentivement examiné les divers éléments de preuve, à la fois de nature profane et technique, pour déterminer  où se situe la vérité.  Cette vérité demeure relative plutôt qu’absolue, sans avoir à atteindre un niveau de certitude, puisque s’applique la norme de la prépondérance de preuve fondée sur la probabilité (art. 2804 C.c.Q.), soit celle qui rend l’existence d’un fait plus probable que son inexistence, laquelle excède la simple possibilité.

 

Lorsque la preuve offerte de part et d’autre est contradictoire, le juge ne doit pas s’empresser de faire succomber celui sur qui reposait la charge de la preuve mais il doit chercher d’abord à découvrir où se situe la vérité en passant au crible tous les éléments de conviction qui lui ont été fournis et c’est seulement lorsque cet examen s’avère infructueux qu’il doit décider en fonction de la charge de la preuve. (3)

 

[135] L’arbitre doit souvent agir en pesant les probabilités.  Rien ne peut être mathématiquement prouvé.  La décision arbitrale doit être rendue judiciairement et par conséquent en conformité aux règles de preuve généralement admises devant les tribunaux.  Le Règlement étant d’ordre public, l’arbitre ne peut décider par complaisance ou par le fait que la preuve présentée par l’une des parties se veut sympathique.

 

OBLIGATION DE RÉSULTAT

 

[136] L’Entrepreneur a une obligation de résultat (4). S’il n’est pas un expert dans un domaine donné il doit recommander à son client de consulter un spécialiste en la matière en lui indiquant l’utilité et la nécessité de recourir à ce dernier (5).

 

[137] Étant tenu à l’obligation du résultat, l’entrepreneur est tenu non seulement d’accomplir un ouvrage, mais aussi à fournir un résultat précis.  L’absence de ce résultat fait présumer la faute de l’entrepreneur. Pour engager la responsabilité de ce dernier, le client n’a pas à faire la preuve d’une faute (6). Il lui suffit de démontrer le résultat obtenu.

 

[138] Contrairement au débiteur d’une obligation de moyens, l’entrepreneur tenu à une obligation de résultat ne peut s’exonérer en prétendant avoir pris toutes les précautions raisonnables.  L’alinéa 2 de l’article 2100 du C.c.Q prévoit expressément que seule la force majeure peut être une cause d’exonération de responsabilité (7).

 

[139] L’arrêt de la Cour d’appel dans P. Talbot Inc. c. Entreprises Mirgil Inc. (8) en traite dans ces termes :

 

[52] Pour sa part, celle-ci affirme qu’il faut appliquer le second alinéa de l’article 2100 C.c.Q. Elle prétend que les termes du contrat du 26 mai 1995 révèlent clairement que la Compagnie s’est assujettie à une obligation de résultat.

 

L’entrepreneur et le prestataire de services sont tenus d’agir au mieux des intérêts de leur client, avec prudence et diligence.  Ils sont aussi tenus, suivant la nature de l’ouvrage à réaliser ou du service à fourni, d’agir conformément aux usages et règles de leur art, et de s’assurer, le cas échéant, que l’ouvrage réalisé ou le service fourni est conforme au contrat.

                                                               (Je souligne)

 

MALFAÇON

 

[140] La décision du conciliateur prend assise sur l’article 9.30.3.2 du Code National du Bâtiment ayant soutenu que le bois a été mis dans le sens des solives.

 

[141] Le juge François Tôth de la Cour supérieure a ainsi interprété l’article 2120 du Code civil du Québec, tout comme il a ainsi défini les malfaçons dans la décision Construction Turco Inc. c. Kanwal (9) :

 

« 83. Pendant le délai d’un an de l’article 2120 C.c.Q, l’entrepreneur est débiteur d’une obligation de garantie.  Le client n’a qu’à prouver l’existence ou la découverte d’une malfaçon pour que l’entrepreneur soit responsable.

 

84. Après l’expiration de ce délai …

 

85. L’inexécution contractuelle peut avoir deux sources :  ou bien l’entrepreneur n’a pas respecté le contrat, les plans ou les devis ou bien l’entrepreneur n’a pas respecté les règles de l’art ou les normes de la construction. »

 

[142] La garantie offerte contre les malfaçons permet d’assurer au propriétaire que l’ouvrage est conforme au contrat et aux règles de l’art qui sont intégrées par simple renvoi au contrat.

 

[143] Madame Thérèse Rousseau-Houle, autrefois juge à la Cour d’appel, écrivait dans son ouvrage, Les contrats de construction en droit public et privé (10) :

 

Certaines normes présentent la nature juridique d’un règlement administratif.  Tel est le Code national du bâtiment lorsqu’il est adopté comme règlement … Le défaut de s’y conformer constitue automatiquement l’entrepreneur en faute …

 

Si les règles de l’art sont celles qui assurent la perfection de l’ouvrage, elles visent aussi à assurer au propriétaire une exécution complète et totale de l’ouvrage.

 

[144] Mon collègue, Me Robert Masson, apporta la définition suivante de la notion de « malfaçon » dans l’affaire Cordeiro et Construction Simon Cousineau Inc. et Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ Inc. (11)

 

« MALFAÇON » défectuosité ou défaut dans un ouvrage de construction imputable à l’ignorance, à la négligence ou à la malveillance, occasionné par un manquement à l’ensemble des renseignements qui régissent un métier ou aux normes applicables à un ouvrage, auxquelles l’entrepreneur est tenu, et qui assurent la perfection de l’ouvrage et une exécution complète et totale de l’ouvrage pour qu’il convienne à l’usage auquel il est destiné.

    (Je souligne)

 

[145] Le Tribunal se permet de rapporter les propos de Me Tihor Holländer : (12)

 

[145] Comme la perfection absolue n’est pas de ce monde, la règle d’art entre en jeu.  La défenderesse n’a pas établi l’écart acceptable réel à l’installation des bardeaux dans la noue de la toiture.

 

[146] Cependant, il y a une distinction entre une exécution de haute qualité et finitions irréprochables qui tombe dans le champ d’application de la règle d’art et l’exécution liée aux l’installation des bardeaux dans la noue de la toiture dans le cas présent, que ne peuvent en aucun cas être considérés par le Tribunal comme entrant dans le champ d’application des règles d’art.

 

 

RÈGLES DE L’ART

 

[146] Me France Desjardins, dans l’affaire Nancy Audette et Daniel Savignac c. Construction Louis-Seize et Associés et la Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ Inc., (13) rapportait ainsi la définition des vices et malfaçons et des règles de l’art :

 

[44] Pour bien cerner ces notions, le Tribunal réfère aux définitions fournies, à titre de guide, dans une brochure publiée par la Régie du bâtiment du Québec. Cet organisme est chargé, en vertu de la Loi sur le bâtiment, de l’application du Règlement :

 

Vices ou malfaçons : Travail mal fait ou mal exécuté compte tenu des normes qui lui sont applicables.  Ces normes se trouvent dans les conditions contractuelles et les règles de l’art (voir ci-dessus la notion de « règles de l’art »).  Ces défauts d’exécution se distinguent des vices cachés et des vices de conception, de construction ou de réalisation par leur degré de gravité : il s’agit de défauts mineurs.

Règles de l’art : Ensemble des techniques et pratiques de construction reconnues approuvées ou sanctionnées.  Ces règles ont un caractère évolutif car les méthodes de construction, les équipements et les matériaux disponibles évoluent constamment.

Elles trouvent notamment leurs sources dans les documents suivants :

 

Les instructions ou guide fournis par les fabricants d’équipements ou de matériaux entrant dans la construction des immeubles;

Les normes ou standards publiés par les organismes de normalisation;

Les lois ou règlements contenant des prescriptions obligatoires relativement à l’ouvrage à construire;

Les publications scientifiques ou techniques utilisées à des fins d’enseignements des professions ou des métiers, ou servant à la diffusion du savoir le plus récent. »

 

[147] Le juge Gérald Bossé de la Cour du Québec décrivait ainsi les sources des règles de l’art dans l’affaire Bordeleau c. Thomassin (14) :

 

« 10 … Dès que le propriétaire a établi la présence d’une non-conformité de certains travaux aux stipulations contractuelles ou aux « règles de l’art », qu’elles soient celles suivies généralement en construction ou qu’elles découlent d’une règlementation énonçant des règles minimales de construction comme le Code national du Bâtiment, les personnes tenues à la garantie doivent répondre de ces malfaçons à moins de prouver que, dans les circonstances précises de l’espèce, la garantie ne trouve pas application. »

 

PORTÉE DU GUIDE D’INSTALLATION DU FABRICANT

 

[148] L’Entrepreneur a soumis que l’article 9.30.3.2 du CCQ 2010 ne s’applique pas considérant que le support du revêtement de sol est constitué de contreplaqué 5/8 (15.5mm).  Au contraire, il soutient que l’assemblage répond aux exigences de l’article 9.23.15.5.1 du CCQ 2010.

 

[149] À l’audience, l’expert Benoit Moreau a prétendu que le revêtement de plancher avait été posé conformément au Guide d’installation du fabricant.  Curieusement dans son rapport écrit du 11 octobre 2022, il reconnait le contraire (p.17) :

 

« Dans le guide du fabricant du revêtement de plancher, il est mentionné que les lattes de ce dernier doivent être orientées perpendiculairement aux solives. »

 

[150] Monsieur Moreau a prétendu que le Guide d’installation du fabricant n’émettait que des recommandations que l’Entrepreneur n’était pas obligé de suivre.  Le texte dans son entièreté va plutôt dans le sens contraire.  Les directives sont impératives : les mots « doit », « éliminer », « égaliser », « doivent », « s’assurer », « il est essentiel » et j’en passe, le confirment. Il est écrit également en introduction :

 

« Suivant les directives de ce Guide d’installation …   Ce Guide d’installation décrit les exigences minimales »

Avant la pose, assurez-vous donc du sens des solives et de     l’orientation perpendiculaires des premières lamelles posées. »

                                                            (Je souligne)

 

[151] Le Tribunal ne peut passer sous silence l’étendue de la garantie du produit quand celle-ci édicte :

 

« La présente garantie ne s’applique pas aux dommages causés par le transport, l’entreposage, l’installation ou toute autre cause qui ne relève pas de l’objet même de la garantie telle que décrite ci-dessus. »

 

[152] L’exigence de l’orientation perpendiculaire des lattes de, bois franc en fonction des solives se veut une norme plus restrictive et plus spécifique en l’espèce et elle aurait dû être respectée.  On ne peut conclure qu’il s’agit d’un « mythe » comme l’a prétendu le sous-traitant et force est de conclure que ni l’Entrepreneur ni le poseur n’ont pris connaissance du Guide d’installation du fabricant. Il est indéniable que l’Entrepreneur a omis une règle primaire de l’art.

 

[153] Finalement, comment comprendre que le technologue, Jacques Cadieux, s’est permis de conclure dans son rapport du 26 avril 2022 que toutes les situations observées respectaient les recommandations du fabricant du parquet (p.15) et que son rapport fut validé par l’ingénieur Benoit Moreau.

 

LA PORTÉE DU TÉMOIGNAGE D’UN EXPERT

 

[154] Mon collègue, Me Roland-Yves Gagné, dans l’affaire Habitations Signature Brossard Inc. c. Syndicat du 6100 rue de Lusa et Raymond Chabot Adm. Provisoire Inc. ès qualité d’administrateur provisoire du plan de garantie de la Garantie Abritat Inc. (15), discute ainsi de la portée du témoignage d’un expert et auquel souscrit le soussigné:

 

« [114] Le soussigné n’est pas lié par l’opinion de l’expert de l’entrepreneur :

[114.1] en vertu de l’arrêt de la Cour suprême dans Roberge c. Bolduc (16).

Le juge, cependant, reste l’arbitre final et n’est pas lié par le témoignage des experts. Comme l’écrit Jean-Paul Landry, dans son article « De la preuve par expert : la jurisprudence » (1980), 40 R. du B. 652, à la p. 656 :

Si l’expert agissant comme témoin doit éclairer le jury ou la cour, il ne les lie cependant pas. C’est avec insistance que les juges reviennent là-dessus.

 

[114.2] en vertu de l’arrêt de la Cour suprême dans Shawinigan Engineering Co. c. Naud (17), le témoignage de l’expert est apprécié de la même façon que celui du témoin ordinaire quant à sa valeur probante :

 

[…] la loi ne fait aucune distinction entre les professionnels et les autres témoins. Leurs témoignages doivent être appréciés comme les autres, et le tribunal est tenu de les examiner et de les peser comme toute autre preuve faite dans la cause […]

 

[114.3] en vertu, entre autres, des arrêts de la cour d’appel Premier Tech ltée c. Dollo (18) et Fournier c. Lamonde (19) l’expert est produit pour ses connaissances techniques, et non pour éclairer le Tribunal comme expert juridique.

 

[155] Il est d’un intérêt certain de citer le professeur, Me Patrice Garant, dans son écrit « La preuve devant les tribunaux administratifs et quasi judiciaires » (20)

 

« Quoi qu’il en soit, la jurisprudence est à l’effet qu’il est normal pour un tribunal administratif de puiser dans sa propre expérience ou son expertise (23).  Dans le célèbre arrêt du Conseil privé John East Iron Works, lord Simmonds considère comme normal que les membres de tribunaux quasi judiciaires : (…) se servent de l’expérience et des connaissances acquises extrajudiciairement pour résoudre les problèmes (…) (24)

 

La Cour suprême du Canada a été appelée à se prononcer sur cette pratique dans une affaire importante impliquant la Régie des services publics.  Celle-ci avait émis une ordonnance en se basant sur sa propre expérience.  La Cour suprême, infirmant la décision de la Cour d’appel, donne raison à la Régie en ces termes :

 

(…) en l’absence de preuve que la Régie trouve satisfaisante, elle est justifiée de faire une déduction pour l’aménagement des services (…), basée sur sa propre expérience des questions de ce genre, une expérience qui est en fait considérable.

 

Je suis d’avis qu’en conférant cette juridiction arbitrale à la Régie, la Législature a reconnu la qualité d’expert, la compétence et l’expérience particulière des membres qui la composent et voulu l’utilisation, la mise en œuvre de ces qualifications spéciales dans l’exercice de cette juridiction arbitrale.

 

(…) les arbitres ont droit de faire leur propre opinion et ne sont requis d’accepter aucun des chiffres mentionnés dans la preuve faite devant elle (…) (25)

 

[156] Bref, c’est l’arbitre qui apprécie l’opportunité des mesures d’instructions ainsi que la valeur des preuves soumises. Mais son pouvoir n’est pas arbitraire, la procédure administrative contentieuse est inquisitoire et non inquisitoriale.

 

L’ORIGINE DU DÉNIVELLEMENT

[157] Lexpert Moreau reconnait que la cause la plus probable des déformations observées est reliée à une déformation des panneaux de contreplaqué formant le sous plancher. L’expert Bossus adhère à cette probabilité tout en ajoutant d’autres considérants.

[158] L’expert Moreau ne croit pas qu’il y ait une perte de capacité du contreplaqué et qu’elle origine d’une exposition à l’eau et que celle-ci serait la cause des déformations.

[159]   Son résonnement se résume dans le passage suivant :

« Puisque, selon toute vraisemblance, les déformations étaient présentes au moment de la pose du revêtement de plancher, lequel a épousé les déformations des panneaux de contreplaqué, nous croyons que la cause la plus probable de des déformations est une déformation des panneaux prédatant leur installation sur la structure du bâtiment.  En effet, les déformations que nous avons observées ont une largeur n’étant pas compatible avec l’espacement entre les solives.  Une perte de capacité des panneaux de contreplaqué ou encore une déformation à long terme de ces derniers, une fois mis en place sur la structure du plancher, n’explique donc pas les vallons qui ont des largeurs de 24 à 35 po. Toutefois, lors de l’entreposage des panneaux de contreplaqué, ces derniers peuvent s’être déformés s’ils ont été exposés à des charges importantes ou à une forte humidité, alors qu’ils étaient entreposés.  En effet, il n’est pas rare que le support utilisé pour les piles de panneaux de contreplaqué soit espacé aux 24 po. soit la moitié de la largeur des panneaux. »

                                     (Je souligne)

 

[160]   Il est quand même particulier que le rapport de l’expert Moreau présente 12 photos traitant de la céramique tandis que 3 photos ciblent le plancher en bois franc. Qui plus est, alors qu’il parle de vallons d’une largeur de 24 à 35 pouces les 3 photos montrent une distance de 2, 3 et 4 lattes de largeur, lesquelles mesurent 3 ¼ pouces de largeur. On est loin de son assertion avancée.  Je me permets d’ajouter que sa démonstration lors de la visite préalable, ne ciblait que trois endroits.  Aucune mesure n'identifiait les largeurs de 24 à 35 pouces ou quel qu’autre largeur.  Celles-ci n’ont jamais été mesurées et visuellement le Tribunal ne peut souscrire à ces « mesures » alors prises. Comment comprendre cette ou ces mesures de 35 pouces alors qu’il base l’origine de la déformation par le support utilisé pour les piles de panneaux.

[161] Sur cette vraisemblance de l’expert de l’entrepreneur, il y a lieu de l’éprouver.

[162] Premièrement, aucun témoin potentiel du côté de l’Entrepreneur et, je parle ici du poseur de lattes de bois ou des poseurs (comme le démontre une photo) du contreplaqué ou même de monsieur Majorik Séguin, n’est venu légitimer la théorie de cet expert.

[163] Deuxièmement, la seconde hypothèse de ce même expert qui avance dans son rapport (p.17) ne peut être retenue par le soussigné. Le Tribunal la reprend :

« En effet, ce n’est pas rare que le support utilisé pour les piles de panneaux de contreplaqué soit espacé aux 24 pouces soit la moitié de la largeur des panneaux. »

 

[164] De fait, l’Entrepreneur avait amplement le temps d’en faire la preuve en assignant un préposé du manufacturier ou du fournisseur pour corroborer cette hypothèse.

[165] Troisièmement, de cette même hypothèse traitant de ce dénivellement du contreplaqué à 24 pouces, positionné directement ou carrément au centre de celui-ci engendrait une situation qui n’est pas supportée dans la présente réalité.  Dans un premier temps, les contreplaqués étant juxtaposés, les dénivellations se retrouveraient forcément à des distances de 48 pouces et non au 24 pouces.  Ainsi, les mesures de 24 à 35 pouces ne peuvent embrasser cet état de fait.

[166] Finalement, si tel était le cas, comment comprendre que du côté du fournisseur, de l’Entrepreneur ou d’un sous-traitant (contreplaqué, bois franc), aucun d’eux n’a constaté ce fait puisque comme l’affirme l’expert Moreau; « il n’est pas rare » que pareille situation se produise.

[167] Au surplus, le Guide d’installation du fabricant de plancher de bois franc de type « Solide PG » indique :

« Une fois l’inspection et les rectifications terminées, le sous-plancher se présentera comme une surface plane dépourvue de dénivellation.  Rappelons qu’un plancher de bois franc ne corrigera pas les défauts prononcés ou apparents d’un sous-plancher.  Il est donc essentiel de s’assurer du bon état de ce sous-plancher avant d’entreprendre toute procédure d’installation du plancher de bois franc. »

     (Je souligne)

[168] De toute évidence, l’hypothèse soutenue par l’Entrepreneur confirme le non-respect d’une exigence importante du manufacturier, d’autant qu’aucun témoin n’a témoigné sur ce point alors qu’il(s) aurai(en)t pu.

[169] Ceci dit, le Tribunal adhère sans réserve à l’argumentaire de l’expert Stéphane Bossus qui le résume ainsi dans son rapport (p.25) :

L’étude documentaire effectuée pour fin de préparation du présent rapport d’expertise tout comme la déclaration de nos mandants nous indique que le platelage de bois du plancher du rez-de-chaussée a été laissé exposer aux intempéries pendant près de quatre (4) ans semaines sans protection.  Ce n’est qu’après ce laps de temps que la toiture de l’immeuble fut construite.  Les traces d’eau constatées sur la sous-face du platelage du plancher sont compatibles avec ces faits.  De plus, « les déformations dudit plancher ont été constatées le jour même de la prise de possession de l’immeuble » par nos mandats, tel que ceux-ci nous l’ont déclaré.

 

Tenant compte de ce qui précède, il nous apparaît donc probable que le platelage du plancher s’est vu déformé en raison d’une exposition excessive aux intempéries.  Malgré ces déformations, les lattes de plancher de bois franc ont été posées sur le platelage et celles-ci ont manifestement épousé les déformations de celui-ci, tel que nous l’avons constaté au jour de notre visite. »

 

[170] La preuve photographique apportée par le bénéficiaire identifie sans contredit et non contredite une période de 28 jours avant que la toiture ait été mise en place (annexe 3 du rapport Bossus).

[171] Tant l’Entrepreneur que le Bénéficiaire ont témoigné qu’il avait beaucoup plu pendant cette période de 28 jours et ce, sans qu’aucune protection n’ait été apportée au plancher de contreplaqué déjà installé.  La recherche métrologique révèle que plusieurs journées se sont soldées par des précipitations au-dessus de 10mm, notamment 11,2mm, 10,2mm, 11,7mm, 30,9mm, 35mm, 12mm., et ce sans rapporter toutes les précipitations, journée après journée.

[172] L’état du contreplaqué une fois le toit installé est certes minimalement questionnable et se situe dans un état qui laisse davantage que des interrogations tel que le démontrent les photos B-1 à B-5 tout comme les quatre photos de droite à la page 1 et de l’annexe 3 du rapport Bossus.

[173] On peut également noter à la photo B-1 qu’en périphérie des lots des 2’’ X 4’’ et des panneaux de revêtements reposant sur le contreplaqué celui-ci est imprégné d’eau.

[174] Les règles d’usage et de l’art exigent que les panneaux de contreplaqué doivent être stockés à plat, dans un local sain, en piles mortes dégagés des sols humides.  On doit admettre que le contreplaqué peut subir des déformations compte tenu des mauvaises conditions de stockage.  Le contact de courte durée avec l’eau n’altèrera en aucun cas la performance du collage à la pluie, ou les performances techniques du matériau, ou sa résistance.  Sur une longue période d’exposition les performances seront certes discriminées. Sur une période de plusieurs semaines entre la pose du contreplaqué et du toit, en période de fortes pluies, le matériau subira des déformations ou une perte de résistance. 

.[176] Notre collègue, Jean Morissette, abordait ainsi la responsabilité de l’entrepreneur en présence d’eau pendant le chantier de construction :

« [18] Je tiens ici à souligner que la présence d’humidité excessive pourrait être aussi de la responsabilité de l’entrepreneur qui n’aurait pas mis en service le système de climatisation et un échangeur d’air en temps opportun et de la présence d’eau pendant le chantier de construction. » (26)

 

[177] Pour le soussigné, l’Entrepreneur se devait de s’informer des précisions métrologiques. Il aurait dû alors recouvrir le plancher minimalement pendant les deux semaines de vacances de la construction et ce jusqu’à la pose du toit. Précaution vaudrait mieux.

[178] Il y a lieu d’indiquer que  lors de l’audience l’expert Moreau a estimé avoir pris environ 60 mesures de dénivellement tandis que l’expert Bossus les évaluait aux alentours de 150 ajoutant qu’il a ratissé (‘’balayé’’) les pièces.

[179] Benoit Moreau assurait lors de son témoignage que dans l’éventualité où le contreplaqué aurait été endommagé au point de produire une perte de capacité, on serait probablement devant un caractère graduel de ce dommage considérant que le bois n’a plus la résistance requise.  On pourrait alors s’attendre à ce qu’il y ait une déformation plus grande au fur et à mesure qu’on le sollicite et de prétendre que dans le présent cas « on n’a pas d’aggravation ».

[180] Cette assertion n’est pas supportée par la preuve, bien au contraire.  Le bénéficiaire Daniel Hurtubise, le conciliateur Maxime Dionne qui s’est présenté à quatre (4) reprises ont constaté une augmentation des dénivellements.  Monsieur Hurtubise précisait que cette problématique s’exacerbait particulièrement aux endroits les plus empruntés par les occupants.  L’expert Stéphane Bossus a distingué une certaine accentuation entre ses deux visites.  Ces témoignages cristallisent le caractère graduel de la détérioration du plancher. Quant à monsieur Moreau le Tribunal lui a fait remarquer qu’il n’était pas sur les lieux lors de la livraison du bâtiment. Pour le Tribunal il ne s’agit que spéculation quant à ce dernier.

 

PRÉJUDICE ESTHÉTIQUE

 

[181] L’expert Benoit Moreau a soutenu qu’un préjudice esthétique ne pouvait être considéré comme une malfaçon après avoir soutenu que les déformations n’étaient qu’esthétiques (p. 23 de son rapport).

[182] Me Roland-Yves Gagné dans l’affaire S. Tremblay c. 9032-3411 Québec Inc. et la Garantie Abritat (27) rappelle qu’une malfaçon peut aussi être pour un préjudice esthétique :

(108) La bénéficiaire plaide qu’elle a payé près de $300,000 pour sa maison et qu’elle n’a pas à subir ce qui est aussi affreux.

(109) La bénéficiaire plaide qu’elle a droit au revêtement conforme à ce à quoi elle a payé.

(110) Des « problèmes esthétiques » peuvent équivaloir à de la malfaçon, comme c’est ici le cas.

 

[183] Dans la décision Rousseau et Leblanc c. Développement Immobilier Titan Inc. et la Garantie Qualité Habitation Inc. (28), Me Karine Poulin écrit :

« [98] Par ailleurs, si certains décideurs ont pu considérer comme étant exclu du Règlement le préjudice esthétique, le présent Tribunal d’arbitrage n’est pas de cet avis.  Le fait que le préjudice soit uniquement ou principalement esthétique aura certainement un impact sur la décision qui sera rendue quant au remède approprié.  L’équité pourra alors entrer en jeu quant à savoir si le remplacement doit être ordonné; ou si, au contraire il existe une solution alternative acceptable pour remédier à la situation. »

 

[184] Certains collègues dont Me Joffrey Edwards ont soutenu qu’un préjudice esthétique ne sera couvert par le Règlement que dans l’optique où le préjudice résulte d’un travail mal fait ou d’une dérogation aux obligations contractuelles de l’entrepreneur. (29)

« [79] En sommaire, dans une réclamation de préjudice ou problématique esthétique, il est requis qu’il y ait malfaçon, soit (i) quant à un travail fait avec des matériaux déficients ou d’un travail mal fait ou mal exécuté, compte tenu des normes qui lui sont applicables ou (ii) un travail fait ou des matériaux utilisés en contravention de stipulations contractuelles spécifiques. »

 

[185] Le Tribunal partage également le passage suivant dans l’affaire Rousseau et Développement Immobilier Titan Inc. et Garantie Qualité Habitation Inc.(30) et pour lequel il ne peut qu’adhérer :  

« (10) …Sur les lieux, les bénéficiaires attirent notre attention sur la décoloration de la brique même que sur la perte de texture par rapport à la brique d’origine.  De plus, ils pointent des lignes horizontales à plusieurs endroits sur la brique.  Enfin, les bénéficiaires montrent au Tribunal la différence de coloration entre les briques grises d’origine et celles qui sont présentes au moment de l’audience.

 

[89] Ce que l’Entrepreneur demande c’est de forcer les Bénéficiaires à recevoir un produit autre que ce qu’ils ont acheté. Or, en vertu de l’article 15.61 C.c.Q., les Bénéficiaires ne peuvent être contraints de recevoir autre chose que ce qui leur est dû.

 

[94] Le procureur de l’Administrateur soutien que le problème dénoncé relève de l’esthétique uniquement et qu’en conséquence, il est exclu du Règlement. Il ajoute que la performance des briques n’est pas en cause et qu’il serait inapproprié d’ordonner la réfection complète d’un mûr sain pour une question d’esthétique. À l’appui de ses prétentions, il dépose plusieurs décisions.

 

[95] Avec égards, le Tribunal est en désaccord avec cette position. D’une part, la décision du tribunal est à l’effet que l’Entrepreneur a manqué à son obligation contractuelle, ce qui en soit règle la question. D’autre part, même si le Tribunal avait déclaré que l’ouvrage est atteint d’une malfaçon, les faits du présent dossier diffère de ceux rapportés dans les décisions déposées en ce qu’aucun correctif adéquat permettant de remédier complétement à la situation n’a été proposé en l’espèce.

 

[96] Pour sa part, Me Jean Doyle, arbitre conclut que « le Règlement ne prévoit donc pas que la mise en œuvre de la garantie contre une malfaçon soit subordonnée à la présence de conséquences matérielles observées (31) » Ainsi, il importe peu qu’il n’y ait aucune conséquence matérielle. Que les briques soient aussi durables ou pas n’est pas un critère. Il est clair qu’ici, c’est le prix et l’ampleur des travaux qui est en cause. Quoiqu’il en soit, cela n’appartient pas aux Bénéficiaires.

 

[97] Le Tribunal rappelle que le Règlement est d’ordre public et qu’il a été adopté dans un objectif de protection du consommateur. Il doit donc s’interpréter en faveur des Bénéficiaires.

                                                           (Je souligne)

 

[186] Il est intéressant de citer les auteurs Rodrigue et Edwards quant à la démonstration de l’usage du bâtiment :

 

« De même, contrairement au vice interdit aux termes de la garantie de qualité du vendeur énoncée par l’article 1726 C.c.Q., il ne parait pas nécessaire que la malfaçon entraîne une diminution de l’usage de l’immeuble. » (32)

 

VARIATIONS DES ESPACEMENTS AU NIVEAU DES DÉNIVELLÉS

 

[187] D’une part l’expert de l’Entrepreneur soumet qu’il a noté des déformations du plancher dans le corridor atteignant une différence de hauteur maximum de 5,7mm (7/32po) entre le vallon et les crêtes.

[188] Quant à l’espacement entre les deux (2) crêtes de part et d’autre d’un vallon il se situe à 24 pouces approximativement entre les solives du plancher qui est de 16 po de centre à centre. Au surplus les crêtes de ces déformations ne sont pas situées vis-à-vis les solives selon ses observations.

[189] L’ingénieur Moreau rapporte :

(Je souligne)

 

[190] Curieusement, comme le soussigné l’a souligné plus haut, les trois photos prises pour le plancher en bois franc ne supportent pas les deux dernières prises de mesure.

[192] Qui plus est, aucune mesure sur une distance de 16 pouces n’a été prise ou n’a été constatée, comme si la réalité exprimée par l’avancé du rapport Bossus n’existait pas dans les faits.

[193] Monsieur Moreau termine en signalant que :

L’ampleur maximale des déformations que nous avons observées est de 5,7 mm, soit légèrement inférieure à ¼ po.

                    Et

 

Selon le « Guide de performance de l’APCHQ’’, les planchers ne devraient pas avoir de bosses ou de déflexions supérieures à ¼ po (6mm) à l’intérieur de toute mesure de 32 po.

 

Les déformations observées sur les planchers se situent donc toutes à l’intérieur des limites prescrites par les différents guides de performance disponibles.

 

Ainsi, il appert que les déformations ne sont qu’esthétiques seulement, ne constituent pas un risque pour les usagers et ne découlent pas d’une insuffisance structurale.

     (Je souligne)

[194] L’expert Bossus rapporte le constat suivant :

11. À la foulée de nos pas, nous constations que le plancher couvert de bois franc dans les pièces du rez-de-chaussée démontre des signes de gondolement.  Les zones exposant des contrebats, soit celles concaves, sont localisées principalement entre les poutrelles du plancher.

 

 

15. Le plancher démontre une flexion atteignant tout près de ¼ de pouces sur à peine 2 pieds linéaires tels que mesurés auprès du nez des marches donnant accès au palier de l’entrée principale.

 

16. Pour conséquence, nous constatons que le nez des marches démontre un décrochement vertical de sa surface supérieure par rapport à celle des lattes attenantes.

 

17. Cette déformation se poursuit tout au long du « corridor » formé entre ses poutrelles de plancher, et ce, en direction du mur arrière de l’immeuble.

 

18. Une déformation tout aussi importante est constatée sur la surface du plancher du rez-de-chaussée dans le secteur localisé à la devanture de la salle d’eau. Une déformation tout aussi 18importante est constatée sur la. Le plancher est aussi incliné dans ladite salle d’eau.

 

19. Nous constatons que dans le salon, le plancher démontre aussi une déformation importante, soit de plus 1/8e de pouce sur à peine 2 pieds linéaires.

 

20. Dans la cuisine nous constatons des faits similaires, à savoir une déformation de type concave au plancher. Dans la salle de manger, nous constatons de nouveau, des flexions du plancher.

 

21. Dans la chambre avant droit du niveau du rez-de-chaussée, nous constatons une flexion de la partie centrale du plancher. De plus, le plancher se troue de façon générale incliné du coin avant droit de la pièce vers la porte intérieure, soit vers son coin arrière gauche.

 

22. Le plancher démontre aussi un contrebas significatif auprès du seuil de sa porte d’entrée de cette pièce.

 

23. Dans la chambre à coucher principale, nous constatons des faits similaires, à savoir des zones circonscrites entre les poutrelles de planchers là où ledit plancher se trouve incurvé vers le bas, à savoir que celui-ci démontre des signes de gondolements.

 

24. Il est donc constaté que les zones dites en contrebas du plancher sont circonscrites entre les poutrelles de plancher.

 

26. Nous mesurons des décrochements verticaux variant de 1/8e de pouces à tout près ¼ de pouce.

 

27. Tenant compte de ce qui précède, le soussigné est d’opinion que les déformations des platelages des planchers, tout comme des surfaces de finitions superposées composées de lattes de bois franc, dénotent une situation anormale.

 

28. Effectivement, l’ensemble des déformations s’aligne entre les poutrelles du plancher sous-jacentes. Ces déformations sont excessives.

 

29.Considérant la présence de tâches d’eau sur la sous-face du platelage du plancher, de l’étude des documents photographiques prélevés par nos mandants lors de la construction lesquels témoignent d’accumulation d’eau sur le contreplaqué en cause, de la durée d’exposition du contreplaqué aux intempéries et des pluies s’étant abattues à ce moment, le soussigné est d’opinion que la cause la plus probable des déformations du platelage résulte d’un mouillage excessif de celui-ci.

                                                  (Je souligne et renforcie certains passages)

 

[195] Aucune preuve n’a établi qu’il existait un ou des espaces significatifs qui n’offraient pas de dénivellements.  Les derniers varient entre 1/8 de po et tout près du quart de pouce.  L’Entrepreneur soutient qu’aucune mesure n’atteint le ¼ de pouce tel que l’exige le Guide de performance de l’APCHQ.

[196] Il faut être prudent dans l’application les barèmes de l’APCHQ tel que le confirme la décision Habitations Signatures Inc. c. Folco et Garantie des Bâtiments Résidentiels neufs de l’APCHQ. (33)

[37] Ces deux (2) experts s’entendent sur le fait que le Guide de performance de l’APCHQ mentionne certains barèmes quant à ce qui peut, selon les circonstances, être acceptables dans l’industrie relativement à la dénivellation d’un plancher.  Selon ces règles, le plancher serait à priori acceptable.  Mais à leur avis, en appliquant ces mêmes barèmes, il y a également un aspect subjectif prenant en compte l’aspect esthétique du plancher pour chaque cas d’espèce.  Soulignons qu’à tout évènement, ces barèmes peuvent guider le Tribunal d’arbitrage lors de son appréciation du caractère acceptable des normes mais ne lient pas le Tribunal d’arbitrage saisi d’une question du caractère acceptable des travaux ou des normes déterminantes de l’industrie.

                                                           (Je souligne)

 

[197] Me Jacinthe Savoie empruntait la même direction dans sa décision William Alliance Inc. c. Myre et Savoie et GCR. : (34)

« Guide de performance.

 

[31.6] pour accueillir la réclamation des Bénéficiaires, l’Administrateur se base uniquement sur le Guide de performance de même que sur une recommandation du manufacturier. 

 

[31.7] l’Entrepreneur soumet, tel que confirmé par son expert, que les tolérances mentionnées au Guide de performance ne peuvent, à celles seules, permettre de déterminer si des travaux ont été bien exécutés ou non;

 

[31.8] le Tribunal n’est en aucun temps lié par lesdites tolérances puisque le Guide de performance n’a pas force de loi. »

 

[198] Finalement, un passage de la décision Sotramont Bois-Franc Inc. c. Mai Linch Duong et Simon et GCR (35) signée par Albert Zoltowski mérite d’être rapporté :

100. Revenons maintenant au Guide de performance de l’APCHQ. Lors de son témoignage, Monsieur Beaudry a reconnu que ce guide est publié par une association d’entreprises de construction du Québec.  Il s’agit de l’Association Provinciale des Constructeurs d’Habitations du Québec Inc. qui est devenue en 2014 l’Association des professionnels de la construction de l’habitation du Québec. Il a reconnu que les règles de tolérance publiées dans ce guide ne constituent pas des normes objectives.  Il a même ajouté qu’il ne suivait pas ce guide.

 

101. Monsieur Pitre, le conciliateur, bien qu’il n’ait pas témoigné à titre d’expert, possède néanmoins une expérience de quelques 3 000 dossiers en inspection de conciliation. Il a témoigné qu’il n’existe aucune norme quant à la concavité, ou « cupping » comme il l’a appelé, des planchers de bois.

 

102. Pour ces raisons, le Tribunal est d’avis que la norme de tolérance de 2 mm publiée dans le Guide de performance de l’APCHQ ne constitue pas une norme ou une règle de l’art objective qui serait suffisante pour les fins de la présente cause. Les 3 autres documents soumis par M. Beaudry ne décrivent pas clairement cette règle de l’art.

 

[199] L’expert Benoit Moreau lors de la visite des lieux au matin de l’audition insistait pour que l’on regarde à une distance de 2 mètres ajoutant « je veux qu’on les (dénivellations) regarde sans reflet » exigeant de fermer les rideaux de la cuisine ou en indiquant « avec cet angle on ne les voit pas ».

[200] Pour le Tribunal, rien n’interdit ou n’empêche de regarder un plancher sous des angles différents.  Il faut regarder l’ouvrage dans son entier pour apprécier la situation ou le résultat et décider si le construit est conforme aux règles de l’art.

[201] Lors d’une vente éventuelle, l’acheteur et/ou son inspecteur ne s’arrêteront pas à 2 mètres de distance lors de la visite des lieux ou ne regarderont pas le plancher sous un seul angle ou dans un espace où il n’y a pas de reflets.  La situation actuelle analysée déboucherait probablement sur une moins-value. Évidement chaque cas en est un cas d’espèce.  Ce n’est certes pas parce qu’un guide de performance établit un seuil particulier de dénivellement qu’il faille nécessairement s’en remettre à celui-ci.

[202] Il existe une différence entre un seuil de tolérance et l’addition de plusieurs écarts se rapprochant à une certaine norme qui pris de façon isolée pour chacun d’eux serait acceptable, mais dont le cumul d’une somme respectable d’écarts appelle à identifier cet ensemble forcément comme une malfaçon.

[203]   En l’espèce, même en faisant fi de ce dernier aphorisme, le soussigné est d’avis que la mesure du dénivellement pratiquement de ¼ de pouce doit être considérée comme une malfaçon car « ces déformations sont excessives », comme l’expert Bossus indiquait.

[204] Dans l’hypothèse où il fallait ignorer mes conclusions précédentes sur plusieurs points donnant lieu au rejet de l’appel, il est intéressant de reprendre les propos de l’honorable Jeffrey Edwards, alors arbitre, qui concluait ainsi dans le dossier Habitations Signature Inc. c. Folco et Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ. (34)

[36] Lors de l’audition, de nouvelles mesures ont été prises par Messieurs Deschênes (pour l’Administrateur) et Gagné (pour l’Entrepreneur). Celles-ci semblaient démontrer une dénivellation du plancher, bien qu’elle soit moins importante que celle soulevée par Monsieur Deschênes lors de son inspection. Pour l’Administrateur, la dénivellation est toujours acceptable principalement en raison de l’aspect esthétique générale du plancher.

[37] Ces deux (2) experts s’entendent sur le fait que le Guide de performance de l’APCHQ mentionne certains barèmes quant à ce qui peut, selon les circonstances être acceptable dans l’industrie relativement à la dénivellation d’un plancher. Selon ces règles, le plancher serait à priori acceptable. Mais à leur avis, en appliquant ces mêmes barèmes, il y a également un aspect subjectif prenant en compte l’aspect esthétique du plancher pour chaque cas d’espèce. Soulignons, qu’à tout évènement, ces barèmes peuvent guider le Tribunal d’arbitrage lors de son appréciation du caractère acceptable des normes mais ne lient pas le Tribunal d’arbitrage saisi d’une question du caractère acceptable des travaux ou des normes déterminantes de l’industries.

 

[38] Monsieur Gagné considère que le plancher est acceptable et Monsieur Deschênes est d’avis contraire.

 

[39] L’Administrateur et les Bénéficiaires demandent à ce que le plancher de la cuisine soit complètement refait. À cet égard, dans sa décision (Pièce A-13), l’Administrateur a ordonné notamment à l’Entrepreneur de; […]

 

[40] Considérant la preuve contradictoire relativement au caractère acceptable de la dénivellation du plancher, le Tribunal d’arbitrage considère que l’Entrepreneur ne s’est pas déchargé de son fardeau de prouver que la dénivellation du plancher est acceptable en        l’espèce. En tant que requérant dans la demande d’arbitrage, fardeau lui appartenait.

 

LES CONSIDÉRANTS

 

[205] Pour le soussigné, les éléments suivants me permettent de conclure qu’il y a malfaçon :

  1. Le non-respect des directives du fabricant dans la pose d’un plancher de bois franc.

 

  1. La carence ou l’absence de précaution quant au contreplaqué, tant dans sa vérification préliminaire, qu’en temps de pluies importantes et avant la pose du plancher de bois franc.

 

  1. La très forte probabilité de la perte de résistance du contreplaqué au fil du temps. La preuve prépondérante établissant que les dénivellements se retrouvent à l’intérieur des solives espacées aux 16 pouces. Et qu’au surplus même en retenant les mesures avancées par l’expert Moreau l’addition de celles-ci à celles identifiées par l’expert Bossus démontrent qu’il y a malfaçon.

 

  1. L’aspect esthétique ne peut être passé sous silence ou être évacué.

 

  1. L’hypothèse de la déformation du contreplaqué au 24 pouces ne peuvent être retenue puisqu’elle ne résiste pas à l’analyse, notamment par l’absence de corroboration sur certains éléments. L’affirmation qu’il n’y a eu une absence de dégradation au fil du temps n’est supportée par aucune preuve et j’en passe.

 

  1. La proposition apportée par l’expert Stéphane Bossus est validée par le bénéficiaire et le conciliateur et par certains points (pluies abondantes), contreplaqué abimé etc.). Au surplus, les dénivellations se retrouvent à 90% pourcent à l’intérieur des poutrelles.

 

  1. Le Tribunal est convaincu qu’il est plus probable qu’improbable que la situation se dégrade davantage.

 

  1. Finalement, l’épaisseur du contreplaqué n’a pas rencontré l’épaisseur requise par le manufacturier.

[206] La décision tient compte des articles 2803 et 2804 du C.c.Q. :

« 2803. Celui qui veut faire valoir un droit doit prouver les faits qui soutiennent sa prétention […]

 

2804. La preuve qui rend l’existence d’un fait plus probable que son inexistence est suffisante, à moins que la loi n’exige une preuve plus convaincante. »

 

MÉTHODE CORRECTIVE

[207] L’Administrateur a invité le Tribunal à déterminer les travaux à exécuter dans l’éventualité ou l’appel serait rejeté afin d’éviter toute problématique d’accomplissement.

[208] En 2011, notre Cour d’appel confirme à nouveau en 2011 ce principe dans l’affaire Rae (35) alors que l’arbitre Me Despatis souscrit aux propos de Me Morissette sous l’affaire Ménard (36) et ajoute :

(116) … L’administrateur a l’autorité … de statuer sur les travaux que doit faire l’entrepreneur assujetti au Plan.

 

(117) Cet énoncé, avec égards, ne contredit pas celui de l’argument de l’administrateur voulant que l’entrepreneur ait le libre choix des méthodes correctives, […] En cela le choix des travaux et méthodes d’exécution, renvoie à des réalités distinctes, la première désignant l’objet à faire et la seconde la façon d’y arriver.

 

(118) De nier en l’espèce à l’administrateur cette faculté … à ordonner tels ou tels travaux correctifs. Ce serait là une interprétation absurde de la législation et contraire à l’esprit du plan.

 

(119) Il est de commune renommée qu’une sentence arbitrale à l’instar de tout jugement doit être exécutable. … Cela signifie que si l’administrateur peut suivant le plan indiquer les travaux à faire, l’arbitre susceptible de réviser la décision de l’administrateur peut donc également le faire lorsque l’administrateur ne l’a pas fait en conformité du Plan (37).

    (Je souligne)

 

[209]   Le Tribunal endosse la recommandation du procureur de l’Administrateur quant à définir une méthode corrective et de reprendre la proposition de l’expert Stéphane Bossus détaillée aux pages 24 et 25 de son rapport. L’Entrepreneur devra suivre toutes et chacune des étapes ici énumérées :

 

Dans le cas présent, soit d’une installation déficiente des lamelles de bois franc composant les finitions du plancher du niveau du rez-de-chaussée de l’immeuble, il sera nécessaire de procéder à l’arrachement complet dudit plancher de bois franc et de son substrat de pose, à savoir le platelage du plancher.

 

Pour ce faire, les quarts-de-rond, tout comme les plinthes de finitions, devront être retirés. D’autres finitions devront être retirées tel le garde-corps de l’escalier de l’entrée avant.

 

Un nouveau platelage d’épaisseur conforme à la norme du manufacturier devra être vissé et collé en place sur le dessus de la semelle supérieure des poutrelles du plancher.

 

L’entrepreneur devra s’assurer que le platelage est posé de façon planaire et qu’aucun décrochement vertical des joints ne se présente au niveau des joints entre les panneaux bouvetés. Un ponçage des panneaux devra être réalisé de façon à égaliser la surface.

 

Puis, de nouvelles lamelles de bois franc de même qualité et de même essence devront être posées, le tout tel que le dicte le guide du manufacturier. Dans ce cas, les lamelles de bois franc devront être posées de façon perpendiculaire aux poutrelles sous-jacentes.

 

Lors de la pose, il sera nécessaire de créer un motif, soit une dispersion des planches de façon telle à ce que leurs arrêtes en about, ne soient pas situées à moins de six (6) pouces les unes des autres. Ce décalage est requis pour assurer l’esthétique du plancher tout comme sa stabilité.

 

Avant la pose des lamelles, il sera aussi nécessaire de prélever des taux d’humidité réelle à même le bois composant le platelage du plancher. Des lectures hygrométriques, à savoir la prise de taux d’humidité réelle dans les lamelles, devront aussi être réalisées avant l’installation de celles-ci. L’écart entre les deux matériaux ne devra pas excéder 4%. De plus, humidité relative à l’intérieur des pièces devra être circonscrite entre 35% et 50% tout au plus lors de la pose du revêtement du plancher de bois franc.

 

Chaque boîte contenant les lamelles devra être entreposée un minimum de 48 heures dans chacune des pièces où celles-ci sont destinées à être installées de façon à ce qu’elles s’ajustent à l’hygrométrie ambiante de la pièce.

 

Le guide d’installation du manufacturier devra être suivi.

 

Le coût de ces travaux doit être déterminé par des entrepreneurs licenciés fournisseurs et installateurs de planchers de bois franc.

 

Au terme de ces travaux, les finitions ayant été démantelées devront être construites puis, toutes les surfaces continues ayant été altérées par les travaux devront être peintes d’une couche de base de deux (2) couches de finition.

 

[210] L’Entrepreneur devra permettre aux Bénéficiaires de suivre l’évolution des travaux en présence d’un consultant si désiré.

[211] Comme le soussigné l’écrivait dans la décision Les Entreprises Réjean Goyette Inc. c Patricia Sayasen et Éric Mondou et la Garantie de Construction Résidentielle (GCR) : (38)

 

[160] […] Ce qui importe, c’est que la réalisation des réparations soit conforme aux règles de l’art et des lois et qu’elles puissent permettre de remédier complètement et définitivement à la situation.

 

LES FRAIS

[212] L’article 123 du Règlement débute ainsi :

 

123. Les coûts de l’arbitrage sont partagés à parts égales entre l’administrateur et l’entrepreneur lorsque ce dernier est demandeur. […]

 

Seul l’organisme d’arbitrage est habilité à dresser les comptes des coûts de l’arbitrage en vue de leur paiement.

 

[213] Le Tribunal d’arbitrage conclut que les coûts de l’arbitrage, selon le compte dressé par l’Organisme d’arbitrage CCAC en vertu de l’article 123, seront partagés à parts égales entre l’Administrateur et l’Entrepreneur car ce dernier est le demandeur, avec les intérêts au taux légal majoré de l’indemnité additionnelle prévue à l’article 1619 du Code civil du Québec à compter de la date de la facturation émise par l’organisme d’arbitrage, après un délai de grâce de 30 jours.

 

 

FRAIS D’EXPERTISE

 

[214] L’article 124 du Règlement stipule :

 

124. L’arbitre doit statuer, s’il y a lieu, quant au quantum des frais raisonnables d’expertises pertinentes que l’administrateur doit rembourser au demandeur lorsque celui-ci a gain de cause total ou partiel.

 

Il doit aussi statuer, s’il y a lieu, quant au quantum des frais raisonnables d’expertises pertinentes que l’administrateur et l’entrepreneur solidairement doivent rembourser au bénéficiaire même lorsque ce dernier n’est pas le demandeur.

 

 

[214] Les Bénéficiaires ayant eu gain de cause, le Tribunal conclut que leurs coûts des frais d’expertises (1724.63$ et 2874.38$ = 4599.01$), totalisant 4599.01$, lesquels nont pas été contestés, seront partagés à parts égales entre l’Administrateur et l’Entrepreneur, avec les intérêts au taux légal majoré de l’indemnité additionnelle prévue à l’article 1619 du Code civil du Québec à compter de la date du présent jugement, après un délai de grâce de 30 jours.

 

PAR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL D’ARBITRAGE :

 

 

REJETTE la demande d’arbitrage de l’Entrepreneur;

 

MAINTIENT la décision de l’Administrateur;

 

ORDONNE à l’Entrepreneur d’effectuer les travaux correctifs, tel que décrits au titre MÉTHODE CORRECTIVE du présent jugement;

 

ORDONNE à l’Entrepreneur de s’exécuter à compter du 1er février 2023 en conformité aux règles de l’art et de son obligation de résultat lui permettant de planifier les travaux à exécuter tout en permettant ainsi aux Bénéficiaires de se relocaliser d’ici cette date;

 

ORDONNE à l’Entrepreneur de finaliser tous les travaux exigés au plus tard le 31 mars 2023, le délai étant de rigueur;

 

ORDONNE qu’à défaut par l’Entrepreneur de respecter cette ordonnance, l’Administrateur devra, comme caution, immédiatement prendre en charge des travaux correctifs décrits plus haut en conformité avec cette ordonnance, en appliquant les règles de l’art et l’obligation de résultat, aux frais et dépens de l’Entrepreneur sans autre avis ni délai;

 

ORDONNE à l’Entrepreneur et à l’Administrateur de payer dans un délai de trente (30) jours la somme de 4,599.01$ en parts égales entre eux, avec les intérêts au taux légal majoré de l’indemnité additionnelle prévue à l’article 1619 C.c.Q. à compter de la date du présent jugement et ce, après un délai de carence de 30 jours;

 

RÉSERVE aux Bénéficiaires tous les recours civils pour les inconvénients et déboursés découlant de l’exécution des travaux à entreprendre;

 

 

 

 

 

 

ORDONNE que les coûts d’arbitrage soient payés en parts égales, moitié par l’Administrateur moitié par l’Entrepreneur, avec les intérêts au taux légal majoré de l’indemnité additionnelle prévue à l’article 1619 du Code civil du Québec à la date de facturation par le CCAC après un délai de carence de 30 jours.

 

 

 

 

 

Yves   Fournier

_________________________ 

Yves   Fournier

Arbitre

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

RÉFÉRENCES

 

(1)                   RLRQ, Chapitre B-1.1, r.8

(2)                    2006 QCCA 881

(3)                   Dumais C. Farrugia, (1985) R.D.J. 223 (C.A.) p. 228, Juge Monet

(4)                   É. DUNBERRY, La Responsabilité des professionnels, La Construction au Québec : perspectives juridiques, Montréal, Wilson & Lafleur Ltée, 1998, p. 459 et ss.

(5)                   EBC Inc. c. Matane (Ville de), J.E. 2014-2010, confirmée en appel

(6)                   Dion c. Les Formes F. Cardin et Fils Ltée, AZ-50085350 (2001) (C.Q.)

(7)                   Guardian du Canada c. Rimouski (Ville de) AZ-50491080

(8)                   P. Talbot Inc. c. Entreprises Mirgil Inc., (2004-03-11), J.E. 2004-709 (C.A.)

(9)                   2010 QCCS 3410 (Can LII)

(10)               Montréal, Wilson & Lafleur / Sorej p. 236

(11)               060305001, GAMM 090471, 29/06/2006

(12)               Jocelyne Gélinas c. Habitations Consultant H.L. et la Garantie des Bâtiments Résidentiels Neufs de l’APCHQ, CCAC : S12-022801-NP, 3 avril 2013

(13)               CCAC S12-103002-NP, 5 avril 2013

(14)               Bordeleau c. Thomassin, 2002 Can LII 34288 (QC C.Q.)

 

(15)               Habitations Signature Brossard Inc.  CCAC S17-091901-NP, 30 août 2018, Me Roland-Yves Gagné, arbitre

(16)               Roberge c. Bolduc, 1991 1 RCS 374

(17)               Shawinigan Engineering Co c. Naud, 1929 R.C.S., 341, p.343

(18)               Premier Tech Ltée c. Dollo, 2015 QCCA 1159, paragraphe [109], qui renvoie à : Jean-Claude Royer, La preuve civile, 4e éd. Par Jean-Claude Royer et Sophie Lavallée, Cowansville, Éditions Yvon Blais, 2008, no 982, p. 872. Les auteurs réfèrent aux arrêts suivants : Moisan c. Simard, B.E. 2008BE-450 (C.A.,) 2008 QCCA 505 : Sainte-Anne-de-Beaupré (Ville de) c. Hamel, J.E. 2007-660 (C.A.) 2007 QCCA 371; Wightman et al. c. Widdrington (Succession de), J.E. 2007-754 (C.A.) 2007; 2630-3602 Québec Inc. c. Thrifty Canada Inc., J.E. 2003-853 (C.A.); Plamondon c. R., [1991] R.J.Q. 2447, 2453 (C.A.); Morris c. R. [1983] 2 R.C.S. 190, 193. Renvoi [20] : Services Sani-Marchand Inc. c. Montréal-Nord (Ville), 1992 CanLII 3842 (QCCA), Renvoi [21] J.-C. Royer, supra. Note 19, no 466 et 475, p. 326 et 337

(19)               Fournier c. Lamonde, 2004 RDI 267, paragraphe [21]

(20)               Me Patrice Garant, Cahier de droit, Faculté de droit de l’Université Laval, (1980) 21 C.de D. 825, p. 847

(21)               Canadian National Railways Company v. Bell Telephone Company of Canada et al. [1939] R.C.S. 308, p. 317: Cité de Ste-Foy v. Société Immobilière Enic Inc. [1967] R.C.S. 121: Germain Inc. c. Ministère de la Voirie et al. [1974] C.A. 184, p. 187: Ministère de la Justice c. Twentieth Century Holdings, CA. Mtl no. 11,281, 4 nov. 1971 : Walter Securities Ltd c. Commissions des valeurs mobilières du Québec, [1976] C.P. 261, p. 263, P.G. du Québec et al c. Restaurants et Motels Châtelaine International Ltée et al. [1977] C.A. 454, p. 459

(22)               [1949] A.C. 134. P. 151, traduit et cité par la Cour d’appel de la Nouvelle-Ecosse in Tomko c. Nova Scotia Labour Relations Board, (1975) 9 N.S.R. (2d) 277, p. 298. Dans le même sens : Maslej c. M.M.I., [1977] 1 C.F. 194 : Syndicat international des marins canadiens v Compagnie des chemins de fer nationaux du Canada, [1976] 2 C.F. 369

(23)               Cité de Ste-Foy v. La Société Immobilière Enric Inc., supra, pp. 126-127

(24)               Lebrun & Ngamga c. 9224-8926 Québec Inc. et la Garantie Abritat Inc., GAMM, 2014-16-013 (14-280 MC), 2015-05-08

(25)               CCAC S15-011101-NP, 22-11-2016

(26)               10 mai 2015, GAMM, 2013-16-007

(27)               MV et al. C. Construction Raymond et Fils Inc. et Raymond Chabot administrateur provisoire, CCAC S17-061301-NP, 17-12-2018

(28)               2015-05-16, GAMM, 2013-16-007, Me Karine Poulin, Arbitre

(29)               Dematri Karamalis et E. Vallionatos c. Développement immobilier Titan Inc. et Garantie Habitation du Québec Inc., GAMM, 15-08-2014, Me Jean Doyle

(30)               Sylvie RODRIQUE et Jeffrey EDWARDS, la responsabilité légale pour la partie de l’ouvrage et la garantie légale contre les malfaçons, Montréal, Wilson & Lafleur, 1998, p. 409, aux pages 453 et 454

(31)                 GAMM, 2007-09-007, 10 janvier 2008

(32)                 CCAC, S19-041801-NP, 20-11-2019

(33)                 SORECONI : 182401001, 08-30-2019

(34)                 GAMM, 046100, 07-09-2008 et 13 185-29-1

(35)                 Construction Réal Landry Inc. c. Rae, 2011 QCCA 1851

(36)                 Ménard c. Les Entreprises Christian Dionne et Fils Inc. et La Garantie des maisons neuves de l’APCHQ Inc., SA, 3 juillet 2006, Jean Morissette, Arbitre

(37)                 Rae et Nutter et La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ c. Construction Réal Landru Inc., Me Johanne Despatis, arbitre, 10 juin 2008; GAMM, 2007-09-013

(38)                 Les Entreprises Réjean Goyette c. Sayasen et Mondou et GCR, SORECONI 182811001, 22-10-2019