ARBITRAGE EN VERTU DU
RÈGLEMENT SUR LE PLAN DE GARANTIE
DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS (Décret 841-98)
CANADA
PROVINCE DE QUÉBEC
Groupe d’arbitrage et de médiation sur mesure (GAMM)
Dossier no : GAMM : 2016-16-021
QH : 68155 / 10441
ENTRE :
MICHÈLE COUTU
(ci-après appelé la « Bénéficiaire »)
ET
3858081 CANADA INC. /LES MAISONS DOMINUS
(ci-après l’« Entrepreneur »)
ET
LA GARANTIE HABITATION DU QUÉBEC INC.
(ci-après appelé l’« Administrateur »)
DEVANT L’ARBITRE : Me Karine Poulin
Pour l’Entrepreneur : Absent
Pour la Bénéficiaire : Madame Michèle Coutu
Pour l’Administrateur : Me François-Olivier Godin
Date d’audience : 20 mars 2017
Date de la sentence : 3 mai 2017
SENTENCE ARBITRALE
I
LE RECOURS
[1] La Bénéficiaire, Madame Michèle Coutu (ci-après la « Bénéficiaire »), conteste en vertu de l’article 19 du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs (ci-après le « Règlement ») la décision de l’Administrateur rendue le 1er novembre 2016 et rejetant sa réclamation comme suit :
Décision
Considérant la connaissance des joints de planche mal calfeutrés depuis mai 2012 (voir note B);
Considérant l’absence d’entretien du revêtement de bois usiné;
Considérant que l’article 6.7.3 du contrat de garantie obligatoire de maison neuve s’applique et dont voici l’extrait :
Les réparations rendues nécessaires par une faute du bénéficiaire tels l’entretien inadéquat, la mauvaise utilisation du bâtiment ainsi que celles qui résultent de suppressions, modifications ou ajouts réalisés par le bénéficiaire;
Par conséquent, La Garantie Qualité Habitation ne peut reconnaitre ce point dans le cadre de son mandat.
[2] Lors de l’audience, les parties ont reconnu la compétence de l’arbitre à trancher le différend qui les oppose. De plus, les parties ont accepté que la sentence puisse être rendue plus de trente (30) après la date de l’audience.
II
LES FAITS
[3] Le 4 janvier 2011, la Bénéficiaire et l’Entrepreneur, Les Maisons Dominus (3858081 Canada inc.) (ci-après appelé l’« Entrepreneur »), ont signé un contrat préliminaire de vente et contrat de garantie obligatoire de maison neuve pour la maison modèle située au [...] à Beloeil (ci-après appelée la « Propriété »).
[4] Le 1er juin 2011, la Bénéficiaire et l’Entrepreneur signent le formulaire d’inspection pré-réception. Cependant, malgré qu’elle signe ledit formulaire, la Bénéficiaire refuse de procéder à l’inspection de la Propriété puisqu’il s’agit d’une maison neuve. L’acte de vente est ensuite signé le 3 juin 2011.
[5] En mai 2012, la Bénéficiaire fait inspecter la Propriété par la firme Alain Corbeil Pro Inspection Inc. afin d’obtenir une opinion professionnelle indépendante sur l’état de sa Propriété. À cette époque, certaines déficiences sont identifiées et corrigées par l’Entrepreneur et portent principalement sur les joints de scellant mal faits. Aucune dénonciation n’est faite à l’Administrateur.
[6] Par la suite, le 19 mai 2016, la Bénéficiaire dénonce par écrit à l’Entrepreneur et à l’Administrateur l’existence de dommages au revêtement extérieur de même qu’aux joints entre les planches du parement extérieur.
[7] Faisant suite à l’inspection effectuée le 5 octobre 2016, l’Administrateur rend sa décision le 1er jour du mois de novembre 2016, attribuant les dommages dénoncés à l’entretien inadéquat de la Propriété.
[8] Le 11 novembre 2016, la Bénéficiaire conteste la décision de l’Administrateur.
[9] Le jour de l’audience, le Tribunal a visité la Propriété en cause afin d’y faire ses propres constatations.
III
LA PREUVE
Gestion de l’instance : Assignation d’un témoin et demande de remise de l’audience
[10] La Bénéficiaire affirme avoir convoqué Monsieur Tremblay, Entrepreneur, à titre de témoin. Or, il appert que ce dernier n’est pas présent. La Bénéficiaire demande des explications au Tribunal sur la raison de l’absence de son témoin.
[11] Le Tribunal informe la Bénéficiaire être sans nouvelle de ce dernier. De plus, l’arbitre soussignée explique à la Bénéficiaire que le présent Tribunal ne peut contraindre le témoin à se présenter puisque le Règlement ne lui octroie pas ce pouvoir.
[12] La Bénéficiaire est toutefois informée qu’elle peut requérir des Tribunaux de droit commun que le témoin soit contraint de se présenter à l’audience dans la mesure où le témoin a été valablement assigné. Si tel est le désir de la Bénéficiaire, l’audience du présent dossier devra être reportée à une date ultérieure.
[13] Préalablement à l’audience, la Bénéficiaire a communiqué à de nombreuses reprises avec le bureau de l’arbitre afin d’obtenir des conseils juridiques, ce qui lui fut refusé à chaque occasion vu l’impartialité dont le Tribunal doit faire preuve. La Bénéficiaire a été invitée par l’adjointe de l’arbitre à consulter un avocat à de nombreuses reprises, mais en vain.
[14] Bien que l’arbitre ait accepté de signer l’assignation à comparaître préparée par la Bénéficiaire, en aucun cas une opinion n’a été émise quant à la validité de ladite assignation ni quant au mode de signification de l’assignation et autres formalités.
[15] La Bénéficiaire soutient que son subpœna est valide et affirme au Tribunal qu’elle n’a pas à être avocate pour envoyer un subpœna. Elle affirme avoir transmis le subpœna par courrier recommandé au témoin et non, elle n’a pas avancé de frais au témoin : il est plus riche qu’elle et n’a pas besoin d’argent. Au surplus, il est à la retraite. La Bénéficiaire formule donc une demande de remise.
[16] Sans s’objecter à la demande de la Bénéficiaire mais afin d’éviter une remise inutile de l’audience, le procureur de l’Administrateur demande à la Bénéficiaire d’indiquer ce que le témoin dirait s’il était présent, indiquant que sa cliente accepterait peut-être de faire des admissions.
[17] Le Tribunal explique à la Bénéficiaire qu’une remise ne doit être envisagée que si le témoignage du témoin est nécessaire. Dans la mesure où l’Administrateur accepte de faire certaines admissions qui rendraient le témoignage du témoin inutile, il ne serait pas approprié d’octroyer une remise.
[18] Le Tribunal invite la Bénéficiaire à prendre connaissance du procès-verbal de la conférence préparatoire tenue avant l’audience afin de l’aider à cerner le fardeau qui lui incombe et d’identifier les éléments nécessaires pour avoir gain de cause.
[19] Mécontente de la tournure des événements et manifestement irritée, la Bénéficiaire refuse de se soumettre à la demande du Tribunal, d’où la nécessité de suspendre l’audience quelques minutes.
[20] Au retour, le Tribunal offre à la Bénéficiaire de suspendre ou même de procéder à une remise de l’audience afin qu’elle puisse consulter un avocat. La Bénéficiaire refuse, disant qu’elle n’a pas de temps à perdre et qu’elle n’a pas toute la journée.
[21] La Bénéficiaire indique au Tribunal et au procureur de l’Administrateur que, s’il était présent, le témoin aurait dit ceci :
Ø Les réparations rendues nécessaires sur la maison ne sont pas de sa faute (Bénéficiaire) parce qu’il y a eu un entretien adéquat, entre autres un colmatage de joints, que lui-même a commandé, fait par ses employés;
Ø Il n’y a pas eu de mauvaise utilisation du bâtiment, selon lui;
Ø Madame Coutu n’a pas modifié, supprimé ou ajouté des choses sur le bâtiment;
Ø Toutes les modifications faites sur le bâtiment ont été faites par ses employés.
[22] Afin de permettre la tenue de l’audience, l’Administrateur reconnaît que le témoignage de Monsieur Tremblay aurait été à cet effet. Il s’en remet au Tribunal quant à la force probante du témoignage notamment quant à l’entretien fait par la Bénéficiaire depuis 2012 et la suffisance de cet entretien. Quoi qu’il en soit, il indique que si le témoin avait signé une déclaration assermentée à cet effet, il n’aurait pas exigé la présence du témoin.
[23] Considérant les admissions de l’Administrateur, le Tribunal n’accorde pas la demande de remise formulée par la Bénéficiaire. Le Tribunal indique toutefois qu’il tient pour avéré qu’il s’agit là des propos que le témoin aurait tenu devant le Tribunal s’il était présent.
[24] Le Tribunal rappelle à la Bénéficiaire le fardeau de preuve qui lui incombe et s’assure qu’elle comprend bien ce qu’elle doit démontrer. Cette dernière affirme qu’elle a bien compris et qu’elle ne veut pas consulter un avocat. Le Tribunal assermente donc la Bénéficiaire.
Bénéficiaire
[25] Michèle Coutu, dentiste, témoigne lors de l’audience.
[26] La Bénéficiaire indique d’abord qu’elle n’est pas experte en bâtiment et qu’elle n’a pas convoqué d’expert en bâtiment. Néanmoins, elle base son témoignage sur l’expertise de l’inspecteur-conciliateur qui a rendu la décision qu’elle conteste.
[27] La Bénéficiaire réfère le Tribunal à l’article 6.7.3 du contrat de garantie traitant des exclusions. L’article se lit comme suit :
6.7 Exclusions de la garantie
(…)
6.7.3 Les réparations rendues nécessaires par une faute du Bénéficiaire tels l’entretien inadéquat, la mauvaise utilisation du bâtiment ainsi que celles qui résultent de suppressions, modifications ou ajouts réalisés par le Bénéficiaire.
[28] Elle affirme que le Règlement établit que le propriétaire doit effectuer un entretien adéquat de sa Propriété et doit en faire une utilisation adéquate. Pareillement, les travaux faits doivent être adéquats.
[29] Elle soutient que l’inspecteur-conciliateur lui reproche, à tort, d’avoir été fautive dans l’entretien de sa Propriété, d’en avoir fait un usage fautif et d’y avoir fait des ajouts, modifications ou suppressions de manière fautive.
[30] La Bénéficiaire souligne avoir fait appel à l’Entrepreneur en 2012 pour réparer ce qui devait l’être et que les travaux ont été faits parce que ceux-ci étaient nécessaires, basés sur l’évaluation indépendante obtenue d’Alain Corbeil Pro Inspection inc.
[31] Madame Coutu soutient donc que les réparations et travaux faits sur sa Propriété, si inadéquats, ne relèvent pas de sa responsabilité. Aucun élément n’a été modifié, ajouté ou supprimé par elle-même. Tous les travaux effectués l’ont été par l’Entrepreneur et ses employés, lesquels sont des professionnels du bâtiment.
[32] Elle termine en indiquant que sa Propriété ne devrait pas être en si mauvais état et que ce n’est pas de sa faute si tel est le cas.
[33] Contre-interrogée par le procureur de l’Administrateur, Madame Coutu reconnaît sa signature à l’acte de vente de même qu’au formulaire de pré-réception. Elle confirme avoir acheté la maison modèle. En date du 3 juin 2011, les travaux étaient complétés, bien que l’Entrepreneur devait mettre du sable polymère dans les joints du parement extérieur.
[34] Elle confirme avoir retenu les services d’un expert en 2012, afin d’avoir une opinion indépendante, à la suite de quoi les travaux nécessaires de réfection des joints ont été faits par l’Entrepreneur. Depuis, elle n’a pas retouché à la Propriété. Elle dit qu’elle avait la plus belle maison du quartier.
[35] Elle est informée par des voisins que ceux-ci ont subi des infiltrations d’eau. Pas elle.
[36] Par la suite, des voisins lui disent avoir remarqué que le parement extérieur de sa Propriété semble affecté. Elle note alors que de l’eau semble s’infiltrer dans les planches du revêtement extérieur et dans les joints.
[37] La Bénéficiaire affirme cependant que l’eau n’entre pas à l’intérieur de la Propriété.
[38] Toujours en contre-interrogatoire, la Bénéficiaire confirme avoir fait une réclamation en mai 2016, soit juste avant la fin de la garantie, à la suite d’une réflexion personnelle visant à déterminer si elle devait ou non prendre un recours.
[39] Elle affirme que la Propriété était « parfaite » la première année et demie suivant les réparations faites en 2012. Par la suite, à l’automne 2013 ou à l’été 2014, l’état du parement commence à se dégrader. Elle indique que le colmatage de 2012 a retardé le problème mais qu’il ne l’a pas réglé. En été 2015, la Propriété est décrite comme « pas très belle ». En somme, elle confirme qu’entre l’automne 2013 et le printemps 2016, la Propriété se dégrade rapidement.
[40] Enfin, la Bénéficiaire confirme qu’elle n’a pas communiqué avec l’Administrateur en 2012 lorsqu’elle contacte l’Entrepreneur. Elle dit qu’elle pensait alors que les réparations étaient suffisantes.
Administrateur
[41] Monsieur Michel Arès, inspecteur-conciliateur, témoigne en preuve principale pour l’Administrateur.
[42] Monsieur Arès est l’auteur de la décision rendue le 1er novembre 2016 qui fait aujourd’hui l’objet d’une contestation par la Bénéficiaire.
[43] Lors de la visite du 5 octobre 2016, les commentaires de la Bénéficiaire ont été recueillis. Elle dénonce principalement la décoloration du revêtement extérieur. Il s’agit de revêtement de type Saint-Laurent. Elle lui remet également une copie d’un rapport préparé par la firme Alain Corbeil Pro Inspection inc. et daté du 25 mai 2012.
[44] Monsieur Arès reconnaît avoir été informé, au moment de sa visite, que c’est l’Entrepreneur qui a réalisé les travaux en 2012 et sur lesquels la Bénéficiaire a témoigné.
[45] Monsieur Arès constate que le mur latéral (sud) est beaucoup plus décoloré que les autres murs. Il s’agit du mur qui fait face au Soleil. Il note un espace de 10 mm sous le dernier rang du déclin ce qui permet une ventilation et un drainage des eaux derrière le revêtement. Il prend note de la présence d’un cache joint métallique derrière les joints des planches.
[46] Par ailleurs, il observe que le scellant entre les planches de revêtement est très détérioré et que les joints sont gonflés par l’eau et ouverts par endroit. Pareillement, les moulures au pourtour des fenêtres sont gonflées d’eau. Il note aussi la présence de deux (2) bris d’impact au mur latéral de la maison.
[47] Par contre, le mur de façade semble en bon état comparativement au mur latéral. Il note peu de gonflement des joints et aucune décoloration du revêtement.
[48] Quant au mur arrière, il souligne le manque de protection aux moulures et au balcon. Les moulures autour de la porte patio sont noircies par endroit et manquent de peinture. Le balcon, quant à lui, n’est pas peinturé.
[49] Il rappelle la nécessité de procéder à une inspection visuelle de la propriété, deux (2) fois par année, de même que la nécessité de faire des retouches si requis par l’état des matériaux.
[50] L’inspecteur-conciliateur rappelle au Tribunal qu’un professionnel a informé la Bénéficiaire que les joints devaient être entretenus en 2012, et lui-même en octobre 2016. Pourtant, il note que les joints sont toujours défectueux au jour de l’audience.
[51] Répondant à l’argument voulant qu’il ait reproché à la Bénéficiaire d’avoir fait une mauvaise utilisation de sa Propriété ou encore, d’avoir fait des ajouts, retraits ou modifications, il explique avoir cité un extrait du contrat de garantie, soit l’article 6.7.3, et qu’en l’espèce, la raison du refus est le manque d’entretien. Il n’est pas question ici d’une utilisation fautive du bâtiment, ni d’ajouts, suppressions ou modifications faits par la Bénéficiaire.
[52] Comme la garantie a débuté le 3 juin 2011, la dénonciation faite le 19 mai 2016 a été faite dans la cinquième (5e) année de la garantie. À ce titre, pour être couverte, la dénonciation doit être en lien avec un vice majeur pouvant causer la perte totale ou partielle du bâtiment. Il doit s’agir d’un vice de construction pouvant mettre en péril la structure du bâtiment.
[53] Considérant qu’aucune ouverture n’a été faite permettant de voir l’état de la structure sous le revêtement, et devant l’absence de signes d’atteinte de celle-ci, l’Administrateur considère que la structure n’est pas atteinte et qu’il n’y a pas ici de vice de construction.
[54] Contre-interrogé par la Bénéficiaire, Monsieur Arès admet que le revêtement n’a pas besoin d’être repeint régulièrement.
[55] Il réitère son affirmation selon laquelle il n’a pu constater d’atteinte, existante ou potentielle, à la structure puisqu’aucune ouverture n’a été faite. Il note la présence d’écoulement coloré au bas du revêtement, mais sans plus.
[56] Interrogé sur l’efficacité de l’aération et du drainage, il confirme qu’il y a un drainage puisque l’eau s’écoule. Il admet qu’il est possible que l’espace au bas du déclin ne soit pas partout le même puisque le crépit n’est pas uniforme mais à l’endroit où il a pris sa mesure, il a noté un espace de 10 mm.
[57] À savoir si une aération ou un drainage non adéquat favorise les infiltrations d’eau, il répond que Beloeil n’est pas une région qui requiert une protection pare-pluie. Il précise que le Code national du bâtiment prévoit des normes à cet effet pour les régions côtières.
[58] Il confirme ensuite que l’utilisation d’un cache-joint métallique aurait été préférable car il requiert moins d’entretien que l’utilisation de scellant. Néanmoins, la pose d’un scellant entre les planches de revêtement est une méthode permise par le fabricant.
[59] En ré-interrogatoire, il précise que le papier pare-intempéries qui est appliqué sur le bâtiment le protège contre les infiltrations d’eau. Il ajoute que le revêtement extérieur constitue le second plan de protection du bâtiment et n’est pas conçu pour protéger le bâtiment des intempéries. Il est normal que l’eau pénètre derrière le revêtement. L’important est de s’assurer qu’une ventilation adéquate existe et que le drainage des eaux est efficace.
[60] Il admet toutefois qu’en l’instance, il ne peut nier qu’il doit y avoir beaucoup d’humidité entre le revêtement et le pare-intempéries puisque tous les joints sont ouverts.
IV
PLAIDOIRIES
Bénéficiaire
[61] La Bénéficiaire soumet que le refus de Monsieur Arès d’appliquer la garantie est mal fondé puisqu’il admet que l’utilisation de cache-joints métalliques est une meilleure méthode. Il s’agit, selon elle, d’un vice de conception ou de réalisation puisque c’est la technique qui aurait dû être privilégiée et appliquée par l’Entrepreneur.
[62] Elle soutient également que Monsieur Arès a admis qu’il y ait une atteinte potentielle de la structure de sa Propriété, et ce, même s’il n’y a aucune preuve à l’appui.
[63] Elle ajoute que Monsieur Arès a reconnu que tous les joints sont ouverts et nécessitent des réparations et qu’il a aussi admis que le revêtement ne nécessite pas de peinture.
[64] Elle termine en invitant le Tribunal à conclure qu’elle est victime d’un vice de conception, de construction ou de réalisation.
Administrateur
[65] De son côté, Me Godin soumet au Tribunal que la décision rendue par l’Administrateur le 1er novembre 2016 doit être maintenue.
[66] Il soutient que la Bénéficiaire a connaissance du problème depuis 2012, bien qu’elle croie que le problème avait été réglé. Par la suite, elle omet de faire un entretien régulier, tel que recommandé, pendant quatre (4) ans. Il en découle malheureusement que la négligence de la Bénéficiaire est à l’origine du refus de l’Administrateur.
[67] Au surplus, il ajoute que dès 2013 et au mieux à l’été 2014, la Bénéficiaire savait que les travaux effectués à l’été 2012 n’avaient pas réglé la situation. Or, cette dernière a omis de dénoncer la situation à l’Entrepreneur et à l’Administrateur dans les six (6) mois de sa connaissance. N’eût été de cette négligence, la garantie aurait reconnu le problème à titre de vice caché si la dénonciation avait été faite en bonne et due forme dans la période de trois (3) ans suivant la réception.
[68] Quant au choix de l’Entrepreneur d’utiliser un scellant plutôt que des cache-joints métalliques, cette technique est acceptable quoiqu’elle ne soit pas la meilleure.
[69] Il rappelle qu’il n’existe aucune preuve démontrant que la structure du bâtiment soit atteinte, même s’il est indéniable que le revêtement est clairement affecté et que sa durée de vie utile est abrégée.
[70] Puisque le revêtement extérieur n’a pas pour fonction de protéger le bâtiment des intempéries et que celle-ci relève plutôt de la membrane pare-intempéries, en l’absence de preuve que celle-ci est absente, mal installée ou détériorée, le Tribunal ne peut conclure à la présence d’un vice de construction.
[71] Pour réussir dans son recours, la Bénéficiaire devait démontrer sinon une atteinte à la structure du bâtiment, au moins une atteinte ou une détérioration de la membrane pare-intempéries. En l’espèce, aucune preuve de cette nature n’a été faite.
[72] Il ajoute que le Tribunal ne peut, en l’absence de preuve, conclure que d’autres éléments structuraux pourraient peut-être être atteints.
[73] L’Administrateur demande donc au Tribunal de maintenir sa décision et de rejeter la demande de la Bénéficiaire.
Réplique
[74] En réplique, la Bénéficiaire soutient que la jurisprudence[1] soumise par Me Godin diffère de son cas puisque la réclamation des bénéficiaires avait été faite hors délai.
[75] Elle ajoute que Me Godin n’est pas un expert en bâtiment et qu’il ne peut affirmer que la problématique en l’instance constitue un vice caché et non un vice de construction.
[76] Par ailleurs, elle affirme qu’elle n’a pas à prouver l’existence réelle d’une atteinte au bâtiment. Elle n’a qu’à prouver l’atteinte potentielle pour réussir dans son recours. Ici, il peut y avoir une atteinte à la structure comme il se peut qu’il n’y ait aucune atteinte, d’où la preuve de la potentialité de réalisation du risque.
[77] En l’espèce, l’ensemble des joints sont ouverts et l’Entrepreneur a utilisé du scellant plutôt que des cache-joints métalliques. Cela suffit pour conclure qu’elle s’est déchargée de son fardeau de preuve.
Supplique
[78] Me Godin rappelle que pour que la garantie contre les vices de construction s’applique, le vice doit avoir été découvert dans les cinq (5) ans suivant la fin des travaux et avoir été dénoncé dans les six (6) mois de sa découverte, portant ainsi le délai maximal de dénonciation à cinq (5) ans et six (6) mois.
[79] Par ailleurs, il indique, au bénéfice de la Bénéficiaire, qu’à titre d’avocat, il représente la position de sa cliente, l’Administrateur, et qu’il n’a pas à être personnellement expert en bâtiment pour faire valoir des arguments portant sur la qualification du vice auprès du Tribunal.
[80] Il ajoute que la décision de l’Administrateur découle de l’absence de preuve d’atteinte réelle ou potentielle à la structure du bâtiment. Il soumet qu’on ne peut pénaliser l’Administrateur de ne pas avoir fait d’ouvertures sur le bâtiment.
[81] À ce titre, il appartenait à la Bénéficiaire de faire la preuve de l’atteinte réelle ou potentielle, selon la balance des probabilités et que le Règlement prévoit que les frais d’expert peuvent être remboursés, sur ordonnance du Tribunal, si l’expertise a éclairé le Tribunal.
Frais de l’arbitrage
[82] Quant aux frais du présent arbitrage, l’Administrateur s’en remet à la discrétion du Tribunal.
V
ANALYSE ET DÉCISION
[83] Le Tribunal doit rendre sa décision à la lumière du droit applicable.
[84] Le présent dossier soulève la question de l’existence ou non d’un vice de construction.
[85] En l’espèce, le Tribunal s’est déplacé sur les lieux afin de faire ses propres constats le jour de l’audition, à la suite de quoi l’audience a débuté.
[86] Cependant, avant de procéder à l’analyse au mérite du dossier, il incombe au Tribunal d’établir les circonstances entourant l’audience et le contexte dans lequel la présente décision est rendue.
Contextualisation
[87] D’entrée de jeu, le Tribunal souligne les difficultés apparentes de la Bénéficiaire à comprendre non seulement les règles de procédure mais également, et surtout, le fardeau de preuve qui lui incombe ainsi que le rôle de l’arbitre. Cette difficulté apparaît dès la conférence préparatoire tenue le 12 janvier 2017 et, conséquemment, le Tribunal lui fournit plusieurs explications, tel qu’il appert d’un extrait du procès-verbal de ladite conférence téléphonique :
(…)
Ø Le Tribunal informe la Bénéficiaire des règles de preuve de base ainsi que du fardeau de la preuve qui lui incombe, soit celui de convaincre le Tribunal selon la balance des probabilités que la décision de l’Administrateur est erronée;
Ø La Bénéficiaire confirme sa demande d’arbitrage, soit qu’elle demande la réfection complète du revêtement extérieur. Elle allègue avoir bien entretenu sa propriété et que partant, la décision de l’Administrateur est erronée;
Ø Le Tribunal précise à la Bénéficiaire qu’il ne lui suffit pas de démontrer le bon entretien de sa propriété pour avoir gain de cause. Elle doit également démontrer que le revêtement est affecté d’un vice suffisamment grave, selon les critères prévus à la loi et au Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs pour justifier une intervention du Tribunal et l’ordonnance recherchée, soit la réfection complète du revêtement extérieur;
(…)
Ø Le Tribunal explique à la Bénéficiaire la différence entre un témoin ordinaire, lequel ne peut témoigner que sur les faits dont il a personnellement connaissance, et le témoin expert, seul autorisé à émettre une opinion
(…)
Ø La Bénéficiaire indique avoir un rapport d’expertise daté du 25 mai 2012, lequel aurait été corroboré par l’Entrepreneur;
Ø La Bénéficiaire est informée que l’expert doit être présent avec son curriculum vitæ et que son rapport doit avoir été déposé selon les règles de communication de la preuve. En somme, la règle du « tout ou rien » s’applique, soit que l’expert ne peut témoigner sans avoir déposé au préalable son rapport et qu’un rapport ne peut être déposé sans que l’expert ne soit présent pour témoigner à l’audience. La Bénéficiaire est également informée que la qualité d’expert du témoin doit être reconnu (sic) par le Tribunal afin qu’il puisse émettre une opinion;
(…)
[88] Le Tribunal a de plus indiqué à la Bénéficiaire de consulter les décisions rendues concernant les propriétés voisines, dont plusieurs ont été rendues par l’arbitre soussignée, bien que cela ne soit pas consigné au procès-verbal.
[89] Pour permettre à la Bénéficiaire de faire valoir ses droits correctement, le Tribunal lui fait la suggestion suivante :
(…)
Ø Pour l’aider à préparer son dossier, le Tribunal suggère à la Bénéficiaire de consulter un avocat afin de préparer l’audition, précisant que le rôle du Tribunal n’en est pas un d’enquête mais plutôt que le Tribunal reçoit la preuve soumise et l’analyse à la lumière du droit et des autorités déposées à l’audience. Cette suggestion est répétée à au moins trois (3) reprises au cours de la conférence préparatoire;
(…)
[90] Au jour de l’audience, celle-ci confirme ne pas avoir consulté d’avocat.
[91] Lors de la visite des lieux, le Tribunal demande à la Bénéficiaire si des ouvertures ont été faites. Elle affirme que non. Le Tribunal réitère que le fardeau de preuve lui incombe et qu’elle doit démontrer une atteinte à la structure, réelle ou potentielle, et qu’une preuve est nécessaire, faute de quoi la Bénéficiaire sera déçue de la décision. La Bénéficiaire indique, bien qu’elle n’était pas sous serment, qu’elle ne sera pas déçue parce qu’elle a bien entretenu sa maison et que la garantie n’aura d’autre choix que de reconnaître son argument et de couvrir le coût du remplacement du revêtement.
[92] Le Tribunal ajoute également que c’est avec beaucoup de difficulté qu’il a obtenu la collaboration de la Bénéficiaire, tant lors de la conférence préparatoire qu’au moment de l’audience. L’arrogance de la Bénéficiaire, qui se positionne en victime et clame haut et fort l’injustice, rend d’autant plus difficile le bon déroulement de l’audience. L’extrait suivant, issu du procès-verbal de la conférence préparatoire du 12 janvier précédent suffit pour appuyer les propos ci-devant :
(…)
Ø La Bénéficiaire est informée que le Tribunal ne paiera pas pour qu’elle assigne son expert, ni pour la préparation d’une nouvelle expertise; [à noter ici que la Bénéficiaire demandait au Tribunal s’il (le Tribunal) paierait pour les frais de son expert]
Ø Cette dernière indique qu’elle n’assignera pas l’expert, ni ne produira son rapport d’expertise;
Ø La Bénéficiaire indique au Tribunal que la conférence préparatoire est enregistrée et qu’elle estime que le Tribunal tente de lui clouer le bec. Celle-ci est informée qu’il s’agit d’une conférence préparatoire et non de l’audition (sic) de la cause et qu’elle aura le loisir de rendre témoignage le moment venu. Le Tribunal rappelle les objectifs de la conférence, en précisant qu’elle est au seul bénéfice de la Bénéficiaire;
(…)
[93] Lorsque requise de le faire, la Bénéficiaire refuse de consulter, avec le Tribunal, les extraits du procès-verbal auquel il la réfère afin de lui fournir, une fois de plus, les explications nécessaires à sa compréhension du déroulement de l’instance, de son fardeau de preuve, de la preuve qui doit être faite pour avoir gain de cause, etc.
[94] Comme mentionné précédemment, le témoin de la Bénéficiaire, Monsieur Tremblay, ne s’est pas présenté à l’audience, malgré son assignation.
[95] Des admissions étant peut-être possible de la part de l’Administrateur, le Tribunal a enjoint la Bénéficiaire de divulguer le contenu dudit témoignage. Celle-ci a refusé, préférant obtenir une remise et voir comment elle pourrait obtenir la présence du témoin.
[96] L’attitude de la Bénéficiaire, qui manifeste un manque de respect tant envers l’arbitre qu’envers le processus, est telle que l’arbitre doit suspendre l’audience quelques minutes afin que la Bénéficiaire décide si elle entend obtempérer ou non aux demandes du Tribunal, dans les paramètres précis que l’arbitre lui a fournis.
[97] Lors de la reprise de l’audience, le Tribunal lui a de nouveau offert de consulter un avocat, suggestion qui fut déclinée. La Bénéficiaire a toutefois accepté d’indiquer ce que son témoin serait venu dire, l’Administrateur a fait les admissions décrites plus haut et l’audience a pu débuter, la demande de remise ayant été rejetée.
[98] Le Tribunal estime avoir fourni à la Bénéficiaire toutes les explications nécessaires afin de lui permettre de faire valoir ses droits correctement. De plus, le Tribunal est convaincu d’avoir octroyé à la Bénéficiaire toutes les chances possibles. La Bénéficiaire ayant pu être entendue et avoir eu l’opportunité de soumettre toutes les preuves qu’elle estimait nécessaire aux fins de s’acquitter de son fardeau, le Tribunal rend la présente décision.
Décision
[99] La demande de la Bénéficiaire vise à obtenir de l’Entrepreneur et de l’Administrateur, qui en est la caution le cas échéant, la réparation des dommages observés sur sa Propriété. Pour ce faire, la Bénéficiaire doit établir la faute de l’Entrepreneur, les dommages subis ainsi que le lien entre la faute et les dommages[2]. À ce régime contractuel général se superpose le Règlement, qui est d’ordre public.
[100] En l’espèce, la Bénéficiaire demande que soit honorée la garantie rattachée à sa Propriété et qui couvre, à différents degrés, les vices et malfaçons. L’article 10 du Règlement stipule ce qui suit :
10. La garantie d’un plan dans le cas de manquement de l’entrepreneur à ses obligations légales ou contractuelles après la réception du bâtiment doit couvrir:
1° le parachèvement des travaux relatifs au bâtiment et dénoncés, par écrit, au moment de la réception ou, tant que le bénéficiaire n’a pas emménagé, dans les 3 jours qui suivent la réception;
2° la réparation des vices et malfaçons apparents visés à l’article 2111 du Code civil et dénoncés, par écrit, au moment de la réception ou, tant que le bénéficiaire n’a pas emménagé, dans les 3 jours qui suivent la réception;
3° la réparation des malfaçons existantes et non apparentes au moment de la réception et découvertes dans l’année qui suit la réception, visées aux articles 2113 et 2120 du Code civil et dénoncées, par écrit, à l’entrepreneur et à l’administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte des malfaçons;
4° la réparation des vices cachés au sens de l’article 1726 ou de l’article 2103 du Code civil qui sont découverts dans les 3 ans suivant la réception du bâtiment et dénoncés, par écrit, à l’entrepreneur et à l’administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte des vices cachés au sens de l’article 1739 du Code civil;
5° la réparation des vices de conception, de construction ou de réalisation et des vices du sol, au sens de l’article 2118 du Code civil, qui apparaissent dans les 5 ans suivant la fin des travaux et dénoncés, par écrit, à l’entrepreneur et à l’administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte ou survenance du vice ou, en cas de vices ou de pertes graduelles, de leur première manifestation. (nos soulignements)
[101] La réclamation de la Bénéficiaire en mai 2016 se situant dans la 5e année de garantie, celle-ci doit impérativement être en lien avec un vice de conception, de construction ou de réalisation ou encore, un vice du sol, conformément au 5e paragraphe de l’article 10.
[102] L’article 2118 du Code civil du Québec, pour sa part, énonce ce qui suit :
2118. À moins qu’ils ne puissent se dégager de leur responsabilité, l’entrepreneur, l’architecte et l’ingénieur qui ont, selon le cas, dirigé ou surveillé les travaux, et le sous-entrepreneur pour les travaux qu’il a exécutés, sont solidairement tenus de la perte de l’ouvrage qui survient dans les cinq ans qui suivent la fin des travaux, que la perte résulte d’un vice de conception, de construction ou de réalisation de l’ouvrage, ou, encore, d’un vice du sol.
[103] En l’espèce, la Bénéficiaire devait démontrer[3], selon la balance des probabilités[4], la faute de l’Entrepreneur, soit l’existence d’un vice au sens de l’article 10(5) du Règlement et de l’article 2118 du Code civil du Québec, le dommage et le lien de causalité entre la faute et le dommage. Autrement dit, la Bénéficiaire doit démontrer que les dommages subis découlent d’un vice de construction.
[104] En l’espèce, le Tribunal a été à même de constater les dommages sur la Propriété de la Bénéficiaire et cet élément n’est d’ailleurs pas litigieux.
[105] Quant à la faute, soit l’existence d’un vice de construction, il s’agit d’un élément sur lequel les parties ne s’entendent pas.
[106] Pour l’Administrateur, les dommages observés découlent de vices cachés au sens de l’article 10(4) du Règlement, lesquels ne sont plus couverts puisque la réclamation a été faite plus de trois (3) ans suivant la réception.
[107] Pour la Bénéficiaire, il s’agit d’un vice majeur au sens de l’article 10(5) du Règlement et de l’article 2118 du Code civil du Québec.
[108] Comme le fardeau de convaincre le Tribunal appartient à la Bénéficiaire, elle devait faire la preuve de ses prétentions.
[109] Le Tribunal retient de la preuve les éléments suivants :
a) La Bénéficiaire a signé le formulaire de réception le ou vers le 1er juin 2011;
b) Les travaux sur la Propriété étaient terminés au moment de la signature de l’acte de vente le 3 juin 2011 et, prenant pour acquis que la fin des travaux est survenue à cette date, la garantie pour les vices de construction expirait le 3 juin 2016;
c) Une inspection professionnelle a eu lieu le 25 mai 2012 et des travaux aux joints ont été faits à l’été 2012 par l’Entrepreneur;
d) En mai 2012, l’Administrateur n’a pas été informé de la situation;
e) Dès l’automne 2013 la Bénéficiaire note des déficiences au revêtement et comprend que les travaux effectués l’été précédent n’ont pas réglé la situation;
f) Suivant ce constat, elle ne fait rien et choisit d’attendre au printemps 2016 pour décider si elle prend un recours ou non, soit juste avant la fin de la garantie;
g) Elle aura donc pris plus de six (6) mois pour dénoncer la situation par écrit à l’Entrepreneur et à l’Administrateur depuis sa découverte à l’automne 2013;
h) Aucune preuve n’a été faite qui tende à démontrer que la structure du bâtiment est atteinte, pas plus que l’atteinte ou la détérioration de la membrane pare-intempéries, son inexistence ou sa mauvaise installation;
i) S’il est vrai que Monsieur Arès admet qu’il doit y avoir un haut taux d’humidité derrière le revêtement pour qu’il soit dans cet état, rien ni personne n’est venu établir la cause et le risque d’atteinte, même potentiel, de la structure;
j) Finalement, Monsieur Arès affirme sous serment n’avoir vu aucun élément qui lui laisse croire que la structure du bâtiment puisse potentiellement être atteinte.
[110] Le Tribunal est d’avis que le revêtement est en mauvais état. Par contre, le Tribunal ne peut conclure qu’un vice de construction soit à l’origine des dommages observés.
[111] L’atteinte potentielle à laquelle réfère la Bénéficiaire dans son témoignage ne repose sur aucun élément factuel et relève de la pure spéculation. Madame Coutu a soutenu que Monsieur Arès avait admis qu’il y avait une atteinte potentielle à la structure, même en l’absence de preuve. Le Tribunal ne peut retenir cette affirmation non supportée par la preuve entendue.
[112] La Bénéficiaire a aussi soutenu que Monsieur Arès avait confirmé que le revêtement ne nécessite aucune peinture. Encore une fois, cette affirmation n’est pas supportée par la preuve.
[113] Enfin, la Bénéficiaire a invité le Tribunal à conclure en sa faveur notamment en raison du fait que l’Entrepreneur n’a pas utilisé de cache-joints métalliques. Or, la preuve démontre que cette méthode est acceptable bien que non optimale et, au surplus, rien ne démontre que cela constitue un vice de construction.
[114] La preuve démontre, au contraire, que les dommages observés ne découlent pas d’un vice de construction. Par conséquent, la demande de la Bénéficiaire doit être rejetée, celle-ci ne s’étant pas déchargée de son fardeau de preuve.
[115] Le Tribunal précise qu’aux motifs ci-dessus exprimés s’ajoute le fait que la réclamation de la Bénéficiaire a été faite hors délai. Même si la décision de l’Administrateur n’est pas aussi claire qu’on eut pu le souhaiter, il s’agit là d’une raison supplémentaire justifiant le rejet de la demande.
[116] Nous sommes en présence d’un cas typique d’absence de preuve au soutien des prétentions de la Bénéficiaire et le Tribunal ne peut rien pour elle.
[117] S’il est vrai que le Tribunal peut juger en équité en vertu des pouvoirs que lui confère l’article 116 du Règlement, il ne saurait être question de recourir à l’équité pour pallier au manque de preuve.
[118] Le Tribunal précise que la preuve de l’entretien ou non de la Propriété par la Bénéficiaire, lequel élément constitue un motif d’exclusion de la garantie, n’est pas pertinente tant et aussi longtemps que la présence d’un vice de construction n’est pas constatée. En somme, le Tribunal doit d’abord être convaincu de l’existence d’un vice de construction avant de se demander s’il existe des motifs, prévus au contrat de garantie et au Règlement, qui justifieraient d’exclure certaines réparations de la garantie. En l’absence d’une preuve démontrant un vice de construction, la Bénéficiaire ne peut avoir gain de cause en démontrant qu’aucun motif d’exclusion ne s’applique.
[119] En terminant, le Tribunal souligne que le sort du présent dossier aurait pu être fort différent si une preuve suffisante avait été faite. Le Tribunal trouve dommage que la Bénéficiaire n’ait pas suivi ses recommandations, mais le Tribunal ne peut rien de plus.
[120] Le Tribunal connaît la situation qui prévaut dans le développement [...] à Beloeil pour avoir rendu plusieurs décisions à ce jour, certaines accueillant les demandes et d’autres les refusant. Quoi qu’il en soit, le Tribunal n’a pas de connaissance d’office en cette matière et une preuve probante doit être administrée dans chacun des dossiers[5].
Frais
[121] Quant aux frais, l’article 123 du Règlement prévoit que le Tribunal doit départager les frais de l’arbitrage entre l’Administrateur et le Bénéficiaire lorsque ce dernier n’a gain de cause sur aucun point. En l’espèce, tel est le cas.
[122] Néanmoins, le Tribunal estime que si la décision de l’Administrateur avait été mieux rédigée et avait indiquée clairement que la demande ne pouvait être considérée en raison, d’une part, de la dénonciation tardive et, d’autre part, en raison de l’absence de preuve d’un vice de construction, la Bénéficiaire aurait peut-être mieux orienté sa preuve.
[123] Dans les circonstances, le Tribunal estime juste et approprié de faire supporter l’entièreté des frais du présent arbitrage à l’Administrateur.
EN CONSÉQUENCE, LE TRIBUNAL D’ARBITRAGE :
REJETTE la demande d’arbitrage du Bénéficiaire;
CONDAMNE l’Administrateur à payer la totalité des frais du présent arbitrage.
Montréal, ce 3 mai 2017
Me Karine Poulin
[1] Renée Savard et Michel Gaudreau c. 3858081/Les maisons Dominus et La garantie habitation du Québec inc., GAMM 2016-16-003, 12 août 2016, Me Howie Clavier, arbitre.
[2] Code civil du Québec, CCQ 1991, art. 1458 (ci-après « C.c.Q. »).
[3] C.c.Q., art. 2803.
[4] C.c.Q., art. 2804.
[5] C.c.Q., art. 2808.