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TRIBUNAL D’ARBITRAGE
Sous l’égide du
CENTRE CANADIEN D’ARBITRAGE COMMERCIAL
(CCAC)
Organisme d’arbitrage autorisé par la Régie du bâtiment
ARBITRAGE EN VERTU DU RÈGLEMENT SUR LE PLAN DE GARANTIE
DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS
(Décret 841-98 du 17 juin 1998)
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CANADA
Dossier no: S16-020201-NP
LES CONSTRUCTIONS JEAN BRUNET INC.
Entrepreneur
c.
JULIE GAGNÉ
Bénéficiaire
et
La Garantie Abritat inc.
administrateur
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DÉCISION ARBITRALE INTERLOCUTOIRE
Gestion de l’instance
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Arbitre: Me Jean Philippe Ewart
Pour l’Entrepreneur : Me Rock Séguin
rock séguin avocat
Pour la Bénéficiaire: Me Sylvain Lauzon
bbp avocats
Pour l’Administrateur : Me Julie Dorion
Me Nicolas Gosselin
bcf avocats d’affaires
Date de la Décision: 23 juin 2016
Litige et Déroulement de l’instance
[1] Le Tribunal est saisi du dossier par nomination du soussigné en date du 4 février 2016 suite à la demande d'arbitrage de l’Entrepreneur du 2 février 2016.
[2] Le litige visé par la présente demande d’arbitrage découle d’une décision de l’Administrateur datée du 11 janvier 2016 (« Décision Adm ») (dossier no 300609-1; Anne Delage, inspectrice conciliatrice) émise en application du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs (L.R.Q. c. B-1.1, r.02) (le « Règlement ») adopté en conformité de la Loi sur le bâtiment (L.R.Q. c. B-1.1) (la « Loi »), et dont l’Entrepreneur a requis arbitrage visant une propriété située à Saint-Zotique, Québec (le « Bâtiment ») dont la Bénéficiaire est propriétaire.
Chronologie
[3] Les dates principales dans cette affaire et plus particulièrement les dates et éléments procéduraux relatifs à la détermination et ordonnances prévues à la présente décision arbitrale interlocutoire sont:
2011.04.27 Contrat préliminaire - Julie Gagné et Alain Prégent (Pièce A-1).
2011.08.19 Réception (sans réserve) (Pièce A-2).
2015.02.20 Dénonciation par le procureur de la Bénéficiaire (Pièce A-4).
2015.06.10 Rapport d’expertise Bénéficiaire (étude géotechnique) de Géostar Inc. sous signature des auteurs Benoît Charlebois, ing. et J.-F. Lavallée, chargé de projet (le « Rapport géotechnique Charlebois ») (Pièce A-5).
2015.06.25/26 Transmission par les procureurs de la Bénéficiaire à l’Entrepreneur et à l’Administrateur du Rapport géotechnique Charlebois et d’une soumission de travaux correctifs par Alerte Fissure Inc. sous proposition et devis technique (Pièce A-6) qui illustre en détail les travaux correctifs recommandés.
2015.07.02 Réception par l’Administrateur de mise en demeure, réclamations et dénonciations par les procureurs de la Bénéficiaire des 20 février et 25 juin 2015.
2016.01.11 Décision de l’Administrateur ordonnant à l’Entrepreneur des travaux correctifs.
2016.02.02 Demande d’arbitrage de l’Entrepreneur par son procureur (Me Marie-Pierre Charland, Barrette & Associés).
2016.02.04 Nomination de l’Arbitre (Pièce A-9).
2016.02.09 Demande d’arbitrage par procureurs de l’Entrepreneur (Me Rock Séguin); confirmation subséquente de substitution de procureurs.
2016.04.01 Conférence préparatoire et Ordonnance de gestion d’instance du Tribunal.
2016.04.12 Conférence préparatoire et Ordonnances de gestion d’instance du Tribunal.
2016.05.02 Ordonnance de gestion d’instance du Tribunal.
2016.05.03 Lettre de Me Séguin soulignant désaccord avec l’Ordonnance de gestion d’instance du 2 mai 2016 et confirmation de demande auprès de Fondasol (Mohamad Hosseini, président) pour contre-expertise géotechnique de mandat et Alexandre Leblanc à Substructur Experts-Conseils.
Objet de la Décision et Faits Pertinents
[4] Bien que les Parties à l’instance soient maîtres de leur dossier, il appartient au Tribunal de veiller au bon déroulement de l’instance pour en assurer la saine gestion. Dans les circonstances, la présente décision par le Tribunal s’impose.
[5] Le procureur de l’Entrepreneur a initialement avisé lors d’une conférence préparatoire le 1er avril 2016 de l’intention de l’Entrepreneur de déposer contre-expertise au dossier.
[6] Le Tribunal a requis de l’Entrepreneur, suite à une conférence préparatoire tenue le 12 avril 2016, par Ordonnance émise ce même 12 avril 2016, de recevoir, le ou avant le 22 avril 2016, 16 h, délai établi de consentement, confirmation motivée de la (ou les) firme(s) choisie(s) par l’Entrepreneur pour contre-expertise, des paramètres du mandat donné ainsi que du délai prévu pour dépôt du ou des rapport(s) conséquent(s).
[7] Le Tribunal avait alors noté par écrit le délai déjà écoulé de connaissance par l’Entrepreneur du Rapport géotechnique Charlebois (pièce A-6) depuis plus de neuf (9) mois, soit au moins le ou vers le 25 juin 2015 date de transmission du rapport à L’Entrepreneur par les procureurs de la Bénéficiaire, et connaissance de ce rapport par son procureur au dossier (à tout le moins depuis le 9 février 2016, date de substitution de procureurs de l’Entrepreneur).
[8] Aucune confirmation ou autre avis quelconque au sujet d’une contre-expertise par l’Entrepreneur au présent dossier n’avait été reçue lors de l’émission de
l’Ordonnance subséquente du Tribunal le 2 mai 2016, nonobstant l’Ordonnance du 12 avril 2016 et nonobstant un rappel de courtoisie par le Greffe au même effet le 29 avril 2016.
[9] Dans les circonstances, le Tribunal prend donc note à l’Ordonnance du 2 mai 2106 qu’il n’y aura pas dépôt de contre-expertise par l’Entrepreneur en absence d’une réponse quelconque de l’Entrepreneur ou de son procureur et du non-respect de l’Ordonnance à cet effet, et avise le Greffe de fixer une conférence de gestion, par appel téléphonique, afin alors (i) d’identifier le contenu de toute preuve documentaire additionnelle à celle déjà au dossier qu’une Partie désire déposer (qui se doit d’être déposée et transmise selon Ordonnance en vigueur), et (ii) fixer enquête et audition au présent dossier, les procureurs ayant été requis précédemment d’identifier les témoins à comparaître et l’objet de leur témoignage, le temps estimé pour enquête et audition, et de pouvoir confirmer disponibilité - sauf absences sous motifs soumis pour considération du Tribunal - des témoins et procureurs respectifs quant aux dates à soumettre.
[10] Le 3 mai 2016, Me Séguin, le procureur de l’Entrepreneur, écrit au Tribunal :
« […]
Nous sommes désolés de na pas avoir pu vous répondre avant ce jour, mais :
a) une erreur d’indexation du dossier s’est produite;
b) le soussigné était à l’extérieur, pris dans un autre dossier;
[…]
Par la présente, nous confirmons que nous avons formulé une demande, à l’attention de M. Mohamad Hosseini, de la firme Fondasol, pour lequel nous attendons sa confirmation pour connaître quand il pourra procéder à la visite des lieux et rendre son rapport de contre-expertise. »
Au surplus, nous avons retenu les services de l’ingénieur en structure, M. Alexandre Leblanc, de la firme Substructur Expert-Conseil, pour également procéder à une contre-expertise pour le dossier mentionné en rubrique. »
[11] Le Tribunal ne considère pas opportun à ce stade de commenter plus avant les erreurs d’indexation de dossier avancées par le procureur de l’Entrepreneur.
[12] Le Tribunal se doit toutefois de constater que, dans le cadre d’une revue administrative de disponibilité par le Greffe du CCAC, (i) la firme Fondasol, le 20 juin 2016, par voie de son président, M. Mohamad Hosseini (celui-là même qui est d’ailleurs identifié spécifiquement par Me Séguin à sa correspondance du 3 mai 2016 dont extrait aux présentes), et (ii) la firme Substructur Expert-Conseil, le 23 juin 2016, par voie de M. Alexandre Leblanc (celui-là même qui est d’ailleurs identifié spécifiquement par Me Séguin à sa correspondance du 3 mai 2016 dont extrait aux présentes), ont confirmé au Greffe, dans chaque cas respectivement, ne pas avoir été retenu pour agir sous un quelconque mandat dans le cadre, dans les circonstances ou pour les fins décrites aux présentes pour fins d’une expertise et rapport, ou contre-expertise, ou autrement.
[13] Le Tribunal agissant à titre de tribunal statutaire en conformité du Règlement, n’est pas tenu par les prescriptions du Code de procédure civile (« Ncpc »), mais dans les circonstances s’en inspire afin d’assurer une saine gestion, et plus particulièrement note les dispositions de l’article 158 Ncpc, qui prévoit :
« À tout moment de l’instance, le Tribunal peut, à titre de mesures de gestion, prendre, d’office ou sur demande, … :
1o prendre des mesures propre à simplifier ou à accélérer la procédure et à abréger l’instruction, en se prononçant sur l’opportunité […] de fixer les modalités et le délai de communication des pièces et des autres éléments de preuve entre les parties …
2o évaluer l’objet et la pertinence de l’expertise, qu’elle soit commune ou non, … et fixer un délai pour la remise du rapport; si les parties n’ont pu convenir d’une expertise commune, apprécier le bien-fondé de leur motifs et imposer, le cas échéant, l’expertise commune, …
[…]. » (nos soulignés)
[16] Dans le cadre d’un arbitrage consensuel, l’article 633 Ncpc est d’effet similaire lorsque l’arbitre peut requérir communication dans un délai imparti.
[15] Le Tribunal avait déjà d’autre part souligné au sommaire de la conférence préparatoire du 12 avril dernier, et de nouveau lors des Ordonnances des 12 avril et 2 mai 2016, la perspective du Règlement - qui est d’ordre public - quant aux délais, et noté aux Parties le pouvoir unilatéral du Tribunal de fixer enquête et audition dans un court délai, soit suite à un délai de cinq (5) jours d’un avis pour ce faire, tel que prévu à l’article du Règlement qui se lit :
« 118. L’arbitre donne aux parties intéressées et à l’administrateur ou à leurs représentants un avis écrit d’au moins 5 jours de la date, de l’heure et du lieu de l’audience et, le cas échéant, un avis de la date où il procédera à l’inspection des biens ou à la visite des lieux. »
D. 841-98, a. 118.
[16] Notons aussi l’article 248 Ncpc sous lequel, dans le cas visé aux présentes, la communication de pièce est prévue dans les 30 jours qui suivent l’ordonnance d’inscription ou la fixation de la date d’instruction, à moins que le Tribunal n’ait fixé un autre délai. Notons que le Tribunal considère que l’Ordonnance d’inscription est en date du 2 mai dernier, il y certes plus de 30 jours déjà.
[17] Mais encore plus précis, et d’application dans les circonstances d’un arbitrage en conformité du Règlement, le Tribunal est d’avis que ces prescriptions s’appliquent avec une certaine fermeté tenant compte entre autre de l’intention du législateur d’autoriser le Tribunal à agir de façon péremptoire, sous un règlement d’ordre public, à fixer instruction au fonds.
[18] Le Tribunal considère que l’Entrepreneur a négligé ou s’est refusé, par action et omission, de respecter les ordonnances du Tribunal, et que ce soit quant au droits respectifs des autres partie ou intervenant au présent arbitrage et d’éviter une continuité de délais additionnels à l’instruction, il est maintenant approprié - afin entre autre de ne pas déconsidérer plus avant l’administration de la justice - et s’il en est de faire appel à l’équité en conformité de l’article 116 du Règlement, de considérer caduque et forclos, à toutes fins que de droit, la possibilité pour l’Entrepreneur de pourvoir à contre-expertise au présent dossier.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL D’ARBITRAGE :
[] ORDONNE ET CONFIRME que la possibilité pour l’Entrepreneur de pourvoir à contre-expertise est caduque et forclos.
[] ORDONNE que l’instruction pour enquête et audition est fixée aux 18 et 19 juillet 2016, à 09h30, en un lieu qui sera préalablement communiqué par le Greffe.
Frais à suivre.
DATE: 23 juin 2016
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Me Jean Philippe Ewart,
Arbitre