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ARBITRAGE En vertu du Règlement
sur le plan de garantie |
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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Groupe d’arbitrage et de médiation sur mesure (GAMM) |
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Dossier no : |
18425-1 |
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2006-11-001 |
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Date : |
12 septembre 2006 |
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DEVANT L’ARBITRE : |
JEAN MORISSETTE |
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GÉRALD CHAREST MICHÈLE MARTIN |
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Bénéficiaires |
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Et |
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SABICO CONSTRUCTION INC. |
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Entrepreneur |
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Et |
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LA GARANTIE QUALITÉ HABITATION |
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Administrateur |
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SENTENCE ARBITRALE |
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[1] Le point 8 du rapport du 20 janvier 2006 (Pièce A-8), Plancher de bois franc pré-vernis, est porté en arbitrage par les bénéficiaires (Pièce A-1).
[2] Cette décision du conciliateur, Michel Labelle, fait suite à une première décision du 25 mai 2005 (Pièce A-7) qui mentionne, inter alia :
« En vertu du texte de garantie, l’entrepreneur devra compléter les travaux ci-dessous mentionnés aux points 8 et 9 dans un délai de trente (30) jours consécutifs suivant la réception du présent rapport. Le délai précité exclu (sic) s’il y a lieu, les congés fériés chômés.
8. PLANCHER DE BOIS FRANC PRÉ VERNIS
Les bénéficiaires nous mentionnent avoir observé depuis les derniers mois :
- présence de taches ou marques à la surface du bois à maints endroits et ce, au premier plancher et à l’étage;
fendillement aux lattes à maints endroits et ce, aux deux planchers;
Lors de notre inspection, nous avons constaté ces taches ou marques, et ces fendillements sur la surface du revêtement de bois franc aux deux planchers.
Par conséquent, l’entrepreneur devra faire les vérifications nécessaires et les correctifs requis, selon les règles de l’art et l’usage courant du marché. »
(Les soulignés sont du soussigné.)
[3] Au début de l’audition, les parties ont accepté et admis que le tribunal d’arbitrage est dûment formé et que j’ai compétence pour décider de la présente affaire.
[4] Il n’y a aucune requête préliminaire.
[5] Le cahier des pièces A-1 à A-8 présenté par l’administrateur est examiné par les parties et est déposé en preuve suivant l’admission des parties.
[6] Nous avons effectué une visite des lieux, de tous les appartements qui ont un revêtement de bois de cerisier brésilien (Jatoba, Tavern ¾ et Jatoba Select ¾).
[7] J’ai constaté des marques qui palissent (blanchissent) la couleur naturelle du bois et quelques planches fendillées.
[8] Je constate que je dois porter attention pour voir ces marques et prendre connaissance de la situation soumise à l’arbitrage car les taches sont difficiles à voir et très peu de planches sont fendillées.
[9] Les bénéficiaires ne font que ces reproches (taches blanchâtres et fendillement) aux planchers et rien d’autre.
[10] Les témoins ont été assermentés avant de rendre leur témoignage.
[11] M. Gérald Charest témoigne des faits suivants : Au moment de l’achat du revêtement de plancher, on lui a expliqué qu’il y avait deux qualités de bois : Select et Tavern. La moindre qualité est le Tavern sur lequel il remarquera la présence de nœuds et des planches plus courtes.
[12] Il a choisi la qualité Tavern parce que l’aspect rustique donné par des planches plus courtes et la présence de nœuds lui convenait. Par contre, il a fait aussi l’achat de 12 boîtes de catégorie Select qui ont été posées au 1er étage, dans la salle à dîner et la dînette. Les plus belles planches restantes dans l’entier dots acquis ont alors été choisies pour le salon. Une petite quantité a été retournée et créditée.
[13] Les factures d’achat du 28 novembre 2003 et du 9 décembre 2003 montrent effectivement des achats de 180 p.c. x 4,75$ (Select) et 1 160 p.c. x 3,75$ (Tavern) (Pièce A-9).
[14] M. Charest, pour les bénéficiaires, reproche au vendeur et à l’entrepreneur de ne pas l’avoir avisé que le bois de moindre qualité lui amènerait une « défectuosité » qu’un bois « Select » ne lui aurait pas apporté.
[15] Ce reproche est fait en considérant la qualité de la construction érigée. S’il avait su, il n’aurait pas choisi ce bois mais plutôt un revêtement de meilleure qualité.
[16] Le grade « Tavern » lui apparaissait plus beau avec des marques de nœud. De toute façon, le plancher de dînette est de qualité « Select » et les problèmes soulevés sont aussi présents dans cet espace de vie que dans les autres.
[17] Il conteste l’objectivité de M. Eric Auclair car il est le vendeur du revêtement du plancher et il ne peut être neutre.
[18] Selon lui, le plancher, qui a des taches et des planches fendillées, affecte la qualité globale de la maison.
[19] Le contre-interrogatoire nous apprendra que la prise de possession de la construction, (Pièce A-4), a eu lieu le 2 février 2004.
[20] Les premières taches et fendillements de lattes de bois ont été constatés par le bénéficiaire au court de l’ été 2004.
[21] Il s’agit d’un problème qui est devenu de plus en plus visible et il lui est impossible de déterminer quand exactement le problème a commencé à apparaître comme un vice sujet à une demande de réparation formelle.
[22] Ce n’est qu’au moment de la progression des taches et des fendillements que le problème est apparu de plus en plus important. Sur le sujet d’une dénonciation tardive, je conclus que ce problème a été dénoncé dans les délais car l’apparition devient évidente en octobre 2004.
[23] M. Charest nous dit avoir toujours été présent lors de chaque étape de la construction.
[24] Il n’a pas constaté de problème lors de la pose du revêtement des planchers. Les meilleures et plus belles planches ont été choisies pour les planchers de la dînette et de la salle à manger.
[25] Il reproche de ne pas avoir été informé du comportement du bois et que s’il avait su qu’il y aurait des taches de résine qui apparaîtraient, il n’aurait pas choisi ce bois.
[26] Il y a un système de contrôle des taux d’humidité et les fenêtres ne sont ouvertes que de manière exceptionnelle.
[27] Madame Michèle Martine, pour sa part, confirme que lorsque l’on a parlé de la qualité Select/Tavern, il n’a été question que de la longueur de planche et de la présence de nœud, rien d’autre.
[28] M. Pierre Aubin est le président de l’entrepreneur et témoigne que la maison est de grande qualité et sa construction exemplaire pour le prix payé.
[29] Le contrat (Pièce A-2) prévoit du merisier verni à 3,25$ le pied carré, plancher le plus économique comme revêtement de plancher. Arrivé à l’étape de la pose, M. Charest choisit un autre revêtement de plancher et modifie le merisier pour du cerisier brésilien. Nous sommes alors dans un cadre fixe d’un budget donné et ce choix appartient aux bénéficiaires.
[30] J’ai compris dans le rapport A-7, point 8, du 25 mai 2005, que je dois faire des vérifications et les correctifs si nécessaire. Il s’agit d’un revêtement de plancher exotique, d’une couleur autre que le merisier verni. J’ai fait mes vérifications et parce que j’en viens à la conclusion qu’il s’agit d’un phénomène naturel normal, je n’ai pas corrigé un problème qui n’en est pas un.
[31] Le témoin Éric Auclair est entrepreneur général de profession. Dans le cas sous étude, il a vendu et fourni le revêtement de plancher.
[32] Il dit ne pas se souvenir spécifiquement de ce qu’il a représenté à M. Charest et il ne se souvient pas que Mme Martine soit présente au moment de la vente. Il est certain d’avoir informé les bénéficiaires du comportement d’un bois exotique.
[33] Dans ses explications d’usage et qu’il donne de manière régulière et à chaque vente, il parle de :
- la couleur qui varie beaucoup avec le vieillissement de ce bois exotique;
- la différence de Tavern/Select est expliquée : le Tavern est le grade le plus bas; machinage de la planche peut être déficient; décoloration importante (cœur de l’arbre de couleur pâle) entre les planches d’un même lot, présence de nœuds, trous d’insectes, résine qui amène une décoloration, longueur des planches plus courte;
- l’essence de bois Jatoba est toujours sur le marché. L’approvisionnement est maintenant plus difficile mais il se fait des ventes de ce revêtement de plancher;
[34] Monsieur Michel Labelle est le rédacteur de la décision du 25 mai 2005. Selon lui, le point 8 de ce document parle de lui-même.
[35] Le 31 août 2005 il a une discussion avec M. Charest et il l’informe que l’entrepreneur, après ses vérifications diligentes, choisit de ne pas faire de travaux car les taches et le fendillement sont normaux vu sa rusticité et l’essence exotique choisie.
[36] À l’occasion de l’inspection du 22 décembre 2005, il a pris le taux d’humidité qui est de 52% et il y a de la condensation au bas des fenêtres.
[37] Les taches constatées lors de sa première visite lui ont fait conclure à un défaut. Il dépose alors des photos (Pièce A-10) prises lors de sa première visite qui montrent que ces taches étaient plus apparentes qu’aujourd’hui.
[38] L’examen attentif de ces photos et de l’espace précis photographié au salon montre que les taches style léopard étaient beaucoup plus apparentes que maintenant. Les taches de résine sont plus pâle que le grain du bois et donnent cet effet léopard.
[39] En déplaçant le tapis du salon, l’endroit précis de la photo A-10, il montre qu’effectivement les taches léopard se fondent de plus en plus dans la couleur du bois.
[40] À la suite de ses diverses visites sur les lieux : 21 avril 2005, 9 septembre 2005 (dégât d’eau), 26 octobre 2005 et 22 décembre 2005, il a constaté les changements dans l’aspect de ce bois exotique qu’il ne connaissait pas.
[41] Il est aussi constaté, en soulevant le tapis de la salle à dîner, qui a toujours été en place, du changement de la couleur du bois. Le bois rougit, fonce et change avec le temps de façon marquée lorsqu’il vieillit à la lumière naturelle ou sous le soleil.
[42] Ce qui semble être un défaut dans le matériau de revêtement du bois, lui apparaît alors comme l’évolution naturelle d’un bois exotique qu’il ne connaissait pas, ce qui l’amène à sa décision du 20 janvier 2006 et sa conclusion qu’il n’y a pas de vice et/ou malfaçon.
DISCUSSION
[43] Que M. Labelle prenne ou non en considération les grades Select ou Tavern dans les conclusions de son rapport du 20 janvier 2006 ne me semble pas important dans les faits de la présente affaire. Selon les constatations que j’ai faites sur les lieux, autant le plancher constitué d’un bois de qualité Select (dînette et salon) montre les tâches et le fendillement que le plancher constitué de planches de qualité Tavern ( salle de télé du 2ième).
[44] Selon toute probabilité, j’estime que les bénéficiaires n’étaient pas entièrement informés et avisés du comportement de ce bois exotique. Le vendeur, M. Éric Auclair, ne peut confirmer ses représentations alors que M. Charest et Mme Martine se souviennent spécifiquement de cette conversation. Pourtant le devoir d’information et un bris des obligations d’un vendeur d’un bien ne sont pas sujets au contrat de Garantie intervenu entre les parties, pièce A-3. Cette carence dans le devoir d’information du vendeur ou de l’entrepreneur n’est pas de ma juridiction et je ne me prononcerai pas sur ce sujet.
[45] La décision du 25 mai 2005 de l’Administrateur se distingue de l’affaire dans la cause Josée Ménard et Paul Mahoney c. Les Entreprises Christian Dionne et fils inc. et La Garantie des Maisons neuves de l’APCHQ inc. [1]
[46] Dans la cause Dionne, la décision de l’APCHQ avait été rendue depuis 610 jours. De plus l’Entrepreneur avait renoncé à ses droits par un désistement de son avis d’arbitrage sans aucune réserve. Enfin, le conciliateur de l’APCHQ avait spécifiquement décrit les travaux à être exécutés ce qui n’est pas le cas sous étude. Ici, au rapport de M. Labelle du 25 mai, pièce A-7, il rend la décision ci-avant reproduite qui laisse à l’entrepreneur de ‘’faire les vérifications nécessaires et les correctifs requis, selon les règles de l’art et l’usage courant du marché.’’ L’Administrateur rend une décision qui n’en est pas une. Tout en disant qu’il y a un problème, il laisse l’opportunité à l’Entrepreneur de ne rien faire si, après vérification, il s’avère qu’il n’y a pas de correctif selon l’usage du marché et les règles de l’art.
[47] Je comprends que l’entrepreneur n’ait pas fait de travaux puisque après ses vérifications et son enquête il en vient à la conclusion que l’on est en présence d’un comportement normal d’un bois exotique, provenant du Brésil et qui réagit énormément à la lumière. Selon lui, la règle de l’art a été respectée et il n’y a aucun correctif à apporter.
[48] A-t-il eu raison de ne pas faire de travaux correctifs ?
[49] Le contrat de garantie établit les cas couverts en cas de manquement aux obligations de l’entrepreneur. L’article 6.4.2 se lit ainsi :
« 6.4.2.1. La parachèvement des travaux relatifs au bâtiment et dénoncés par écrit au moment de la réception ou, tant que le bénéficiaire n’a pas emménagé dans les trois jours qui suivent la réception.
6.4.2.2. La réparation des vices et malfaçons apparents visés à l’article 2111 du Code civil et dénoncés par écrit au moment de la réception ou tant que le bénéficiaire n’a pas emménagé, dans les trois jours qui suivent la réception.
6.4.2.3. La réparation des malfaçons existantes et non apparentes au moment de la réception et découvertes dans l’année qui suit la réception visées aux articles 2113 et 2120 du Code civil et dénoncées par écrit à l’entrepreneur et à l’administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder six (6) mois de la découverte des malfaçons.
6.4.2.4. La réparation des vices cachés au sens de l’article 1726 ou de l’article 2103 du Code civil qui sont découverts dans les trois (3) ans suivant la réception et dénoncés par écrit à l’entrepreneur et à l’administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder six (6) mois de la découverte des vices cachés au sens de l’article 1739 du Code civil du Québec.
6.4.2.5. La réparation des vices de conception, de construction ou de réalisation et des vices du sol, au sens de l’article 2118 du Code civil, qui apparaissent dans les cinq (5) ans suivant la fin des travaux du bâtiment et dénoncés, par écrit, à l’entrepreneur et à l’administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte ou survenance du vice ou, en cas de vices ou de pertes graduelles, de leur première manifestation.
Le défaut de se conformer aux règles de l’art ou à une norme en vigueur applicable au bâtiment notamment celles contenues au code national du bâtiment du Canada au code Canadien de l’électricité et au code de plomberie constitue une malfaçon sauf s’il ne porte pas atteinte ou n’est pas de nature à porter atteinte à la qualité, à la sécurité ou à l’utilisation du bâtiment. »
[50] La réception du bâtiment intervient le 2 février 2004, pièce A-4, et l’évolution du problème est constatée en octobre 2004 et dénoncée les 11 janvier 2005 et 28 février 2005, pièce A-5 et A-6.
[51] Il ne s’agit pas d’une malfaçon car aucune preuve de travaux mal exécutés ne m’a été faite. Les planchers sont solides et les bénéficiaires n’ont aucune plainte formulée en regard de leur usage ou d’une diminution d’usage. Aucune preuve d’un défaut dans l’ouvrage ne m’a été faite qui me laisse croire à une atteinte à la qualité, la sécurité ou à l’utilisation du bâtiment.
[52] Un vice caché doit être tel qu’il atteint à la qualité, à la sécurité ou à l’utilisation de l’ouvrage. Puisque aucune preuve ne m’a été faite sur l’usage ou la sécurité, seule reste la question d’un vice qui atteint à la qualité de la construction.
[53] Comme je l’ai déjà mentionné, le défaut d’information reproché ici n’est pas un argument à considérer dans le cadre d’une demande faite en vertu du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs ( L.R.Q., c. B-1.1, a. 185)
[54] Le problème de tache dans le bois, décoloration, coloration et le peu de fendillement constaté n’a pas la gravité de l’article 1726 et 2103 du Code civil du Québec requis. Il s’agit d’une situation évolutive qui est normale avec le bois choisi par les bénéficiaires pour revêtement de plancher.
[55] Je conclus qu’il n’y a pas de vice caché ni de malfaçon. Le revêtement de plancher est bien posé et ce qui est constaté avec le temps est l’effet du vieillissement normal de ce bois exotique.
[56] De plus, advenant qu’une ordonnance de changer le revêtement de plancher soit prononcée, l’Entrepreneur devrait utiliser ce même bois exotique. La preuve non contredite et les constatations faites montrent qu’il s’agit d’un vieillissement et une coloration naturelle. Ainsi, la même situation se répèterait.
[57] Finalement, aucune preuve que ce soit ne m’a été présentée qui me permettrait de conclure qu’il s’agit d’un cas visé à l’article 6.4.2.5 du contrat de garantie.
[58] Pour ces motifs :
[59] REJETTE la demande d’arbitrage des bénéficiaires;
[60] En ce qui concerne les frais, ils sont à l’entière charge de l’Administrateur conformément au Règlement et parce que la décision du 25 mai 2005 a laissé croire aux bénéficiaires que ce qu’il croyait être un problème serait réparé alors qu’il n’en est rien.
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__________________________________ Me Jean Morissette, arbitre |
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Gérald Charest |
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Michèle Martine |
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Bénéficiaires |
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Pierre Aubin |
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Sabico Construction |
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Pour l’entrepreneur |
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Me Avelino De Andrade |
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Pour l’administrateur |
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Date(s) d’audience : |
8 août 2006 |
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[1] Josée Ménard et Paul Mahoney c. Les Entreprises Christian Dionne et fils inc. et La Garantie des Maisons neuves de l’APCHQ inc. 24 janvier 2006, Jean Morissette, arbitre. 04-357 LS