ARBITRAGE EN VERTU DU RÈGLEMENT SUR LE PLAN DE GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS (Décret 841-98)
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CANADA |
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PROVINCE DE QUÉBEC |
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Groupe d’arbitrage et de médiation sur mesure (GAMM) |
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Dossier no : |
GAMM : 2012-11-003 |
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APCHQ : 180223-2 |
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DEVANT L’ARBITRE : |
Me Karine Poulin |
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Pour l’Entrepreneur : |
Monsieur Serge Demuy |
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Pour l’Administrateur : |
Me Stéphane Paquette |
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Pour le Bénéficiaire : |
Me Jean-Philippe Lemire, LEMIRE LEMIRE AVOCATS S.E.N.C. |
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Dates d’audience : |
22 et 23 novembre 2012 et 14 janvier 2013 |
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Date de réception des derniers documents : |
11 mars 2013 |
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Date de la sentence : |
22 avril 2013 |
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SENTENCE ARBITRALE
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I
LE RECOURS
[1] Dans un recours intenté le 21 février 2012, Pascal Vachon, le Bénéficiaire, conteste en vertu de l’article 19 du Règlement sur le Plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs (ci-après le «Règlement»), certains éléments de deux (2) décisions rendues par l’Administrateur. La «première», le 13 février et la «seconde» le 4 juillet, les deux en 2012. La décision rendue le 13 février 2012 par l’Administrateur est contestée dans ses éléments suivants:
Points 17 et 18 : absence de crépi sur la fondation et dénivellation sur le plancher au bas de l’escalier.
[2] Selon l’Administrateur, les points 17 et 18 étaient apparents au moment de la réception en ce sens qu’ils étaient décelables pour un acheteur raisonnablement diligent. Contrairement aux exigences de l’article 3.2 du contrat de garantie, ces éléments n’avaient pas été dénoncés par écrit au moment de la réception de sorte que la réclamation ne serait pas recevable.
[3] Également en litige dans la première décision, un certain nombre de points (#19 à 35) où l’Administrateur n’a pas identifié de malfaçons à l’inspection. Ces points sont identifiés comme suit :
19 : absence de lien continu à travers les poutrelles du rez-de-chaussée;
20 : absence de fourrure sous les poutrelles du rez-de-chaussée et de l’étage;
21 : absence de colle dans les étriers des poutrelles;
22 : poutrelle double rallongée à l’extrémité;
23 : courbure de certains murs extérieurs;
24 : absence de solin à la base des composantes de bois du mur porteur au sous-sol;
25 : colonne de bois supportant la poutre principale de la cage d’escalier;
26 : absence de cheminées de nettoyage;
27 : espace couvert à la base des murs extérieurs;
28 : absence de fourrures horizontales dans le bas des murs extérieurs;
29 : condensation et moisissure au bas des fenêtres;
30 : branchements de plomberie inadéquats;
31 : ventilation inadéquate;
32 : trappe menant à l’entretoit est trop petite et ne respecte pas les normes;
33 : poutrelles de plancher espacées de plus de 19 po plutôt que de 16 po;
34 : montants de 2X6 espacés de 24 po plutôt que de 16 po;
35 : installation inappropriée de certaines fermes de toit.
[4] Un certain nombre d’autres points de la décision 1 sont en litige parce que dénoncés tardivement, soit le 23 mars et le 4 mai 2010. Ce sont les suivants :
36 : porte-fenêtre mal ajustée;
37 : absence de gâche sur la porte d’entrée;
38 : portes et fenêtres fixées uniquement avec de l’uréthane giclé;
39 : irrégularité des soffites;
40 : fissures et joints de scellant manquants sur le carrelage céramique;
41 : anneaux de chrome du robinet de douche mal installés;
42 : espaces entre les lattes de plancher;
43 : élasticité anormale derrière le faux limon;
44 : hauteur inégale des contremarches;
45 : isolant apparent et sans protection;
46 : jonctions entre les feuilles d’isolant non scellées;
47 : absence de pare-vapeur sur la solive de rive;
48 : absence d’isolant par endroits sur la solive de rive;
49 : absence d’isolant sur le conduit d’évacuation de la sécheuse;
50 : aucun échangeur d’air n’a été installé;
51 : trous de clouage à obturer sur les plinthes et moulures;
52 : manque électricité pour l’éclairage au sous-sol;
53 : absence de chauffage au sous-sol;
54 : manque de finition sur l’escalier du sous-sol.
[5] L’Administrateur écrit dans sa décision :
«En ce qui a trait au délai de dénonciation, le contrat de garantie stipule que les malfaçons, les vices cachés ou les vices majeurs, selon le cas, doivent être dénoncés par écrit à l’entrepreneur et à l’administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder six (6) mois de leur découverte ou survenance ou, en cas de vices ou de pertes graduels (sic.), de leur première manifestation.»
[6] Les points 55 à 57 de la décision 1 sont aussi en litige, l’Administrateur ayant imputé au comportement normal des matériaux lors du séchage les problèmes dénoncés.
[7] L’article 4.2 du contrat de garantie stipule que les réparations rendues nécessaires par un comportement normal des matériaux, tels les fissures et les rétrécissements, sont exclus de la garantie et ce serait le cas ici à l’égard de ces points.
[8] Ces points sont les suivants :
55 : fissure sur le mur de fondation latéral gauche;
56 : fissures à la dalle de béton du sous-sol;
57 : fissures sur les murs et plafonds de gypse.
[9] L’Administrateur a également rejeté les réclamations suivantes qu’il a estimé porter sur des travaux qui ne font pas partie intégrante du bâtiment comme tel, le tout en invoquant l’article 4.9 du contrat de garantie.
[10] Ces réclamations concernent les points suivants :
58 : aménagement paysager;
59 : drainage du terrain vers le garage;
60 : structure du garage;
61 : aménagement du stationnement à terminer.
[11] Également, l’Administrateur a rejeté la réclamation relative au point 62, soit : perte de chaleur par endroits dans l’entretoit, au motif qu’il n’avait pas pu faire un lien entre la situation dénoncée et les travaux réalisés par l’Entrepreneur et estimé ne pas être en mesure de statuer sur la responsabilité de l’Entrepreneur relativement au point 62.
[12] Finalement, concernant la décision numéro 1, l’Administrateur a rejeté le point 64, soit : Demande de remboursement - rapport d’inspection du 8 février 2011, au motif qu’il n’a pas juridiction: la garantie couvrant le parachèvement, les malfaçons, les vices cachés et les vices majeurs.
[13] En conférence téléphonique le 25 mai 2012, et par la suite lors de l’audition, le Bénéficiaire s’est désisté de sa réclamation à l’égard des points suivants de la décision numéro 1, à savoir, les points 24, 26, 27, 28, 29, 32, 33, 35, 37, 49, 52, 53, 55, 56, 57, 58, 59 et 61 dont acte dans mes conclusions.
[14] La seconde décision a été rendue le 4 juillet 2012 et ses éléments 67, 68 et 70 sont en litige.
[15] Les points 67 et 68 sont les suivants :
67 et 68 : mauvaise installation du déclin de vinyle et pastilles de chrome qui ne sont pas appuyées contre la céramique
[16] Selon l’Administrateur, aucune malfaçon n’affectait ces éléments.
[17] Quant au point 70 de la décision numéro 2 : Raccordement du drain français à la fosse de retenue, celui-ci avait déjà été traité au point 7 d’une décision antérieure émise le 13 septembre 2010 dans le cadre d’un recours précédent.
[18] Selon l’Administrateur, des travaux de mise aux normes avaient à l’époque été proposés et acceptés, mais éventuellement une entente monétaire au montant de 1 250 $ avait été conclue, le recours en pratique retiré et une quittance signée.
[19] Concernant la décision numéro 2, l’Entrepreneur a déclaré lors d’une conférence téléphonique tenue le 10 juillet 2012, qu’il entendait lui-même porter en arbitrage tous les points de la décision du 4 juillet 2012 favorables au Bénéficiaire, sans toutefois donner suite par après. Ainsi, au moment d’entendre la cause, le Tribunal n’était saisi que des deux (2) demandes d’arbitrage faites par le Bénéficiaire.
[20] Bien que notifié de sa tenue, l’Entrepreneur ne s’est pas présenté la première journée d’audience. Suite à un appel de Me Paquette, l’Entrepreneur s’est présenté le lendemain 23 novembre 2012, mais pas le 14 janvier 2013, dernier jour d’audience.
[21] Finalement, le Bénéficiaire a déclaré à l’audience vouloir remettre en question certains points d’une décision de l’Administrateur rendue le 13 septembre 2010.
[22] Les dispositions du Règlement pertinentes à l’instance sont les suivantes :
1. Dans le présent règlement, à moins que le contexte n'indique un sens différent, on entend par:
[...]
«bâtiment»: le bâtiment lui-même, y compris les installations et les équipements nécessaires à son utilisation soit le puits artésien, les raccordements aux services municipaux ou gouvernementaux, la fosse septique et son champ d'épuration et le drain français;
[...]
10. La garantie d'un plan dans le cas de manquement de l'entrepreneur à ses obligations légales ou contractuelles après la réception du bâtiment doit couvrir:
1° le parachèvement des travaux relatifs au bâtiment et dénoncés, par écrit, au moment de la réception ou, tant que le bénéficiaire n'a pas emménagé, dans les 3 jours qui suivent la réception;
2° la réparation des vices et malfaçons apparents visés à l'article 2111 du Code civil et dénoncés, par écrit, au moment de la réception ou, tant que le bénéficiaire n'a pas emménagé, dans les 3 jours qui suivent la réception;
3° la réparation des malfaçons existantes et non apparentes au moment de la réception et découvertes dans l'année qui suit la réception, visées aux articles 2113 et 2120 du Code civil et dénoncées, par écrit, à l'entrepreneur et à l'administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte des malfaçons;
4° la réparation des vices cachés au sens de l'article 1726 ou de l'article 2103 du Code civil qui sont découverts dans les 3 ans suivant la réception du bâtiment et dénoncés, par écrit, à l'entrepreneur et à l'administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte des vices cachés au sens de l'article 1739 du Code civil;
[...]
12. Sont exclus de la garantie:
[...]
2° les réparations rendues nécessaires par un comportement normal des matériaux tels les fissures et les rétrécissements;
[...]
9° les espaces de stationnement et les locaux d'entreposage situés à l'extérieur du bâtiment où se trouvent les unités résidentielles et tout ouvragé
situé à l'extérieur du bâtiment tels les piscines extérieures, le terrassement, les trottoirs, les allées et le système de drainage des eaux de surface du terrain;
[...]
Toutefois, les exclusions visées aux paragraphes 2 et 5 ne s'appliquent pas si l'entrepreneur a fait défaut de se conformer aux règles de l'art ou à une norme en vigueur applicable au bâtiment.
18. La procédure suivante s'applique à toute réclamation fondée sur la garantie prévue à l'article 10:
[...]
5° dans les 20 jours qui suivent l'inspection, l'administrateur doit produire un rapport écrit et détaillé constatant le règlement du dossier ou l'absence de règlement et en transmettre copie, par poste recommandée, aux parties impliquées. En l'absence de règlement, l'administrateur statue sur la demande de réclamation et ordonne, le cas échéant, à l'entrepreneur de rembourser au bénéficiaire le coût des réparations conservatoires nécessaires et urgentes et de parachever ou corriger les travaux dans le délai qu'il indique, convenu avec le bénéficiaire;
[...]
22. L'arbitre doit statuer, s'il y a lieu, quant au quantum des frais raisonnables d'expertises pertinentes que l'administrateur doit rembourser au demandeur lorsque celui-ci a gain de cause total ou partiel.
116. Un arbitre statue conformément aux règles de droit; il fait aussi appel à l'équité lorsque les circonstances le justifient.
[23] Sont également pertinents les articles suivants du Code civil du Québec :
1378. Le contrat est un accord de volonté, par lequel une ou plusieurs personnes s'obligent envers une ou plusieurs autres à exécuter une prestation.
[...]
1425. Dans l'interprétation du contrat, on doit rechercher quelle a été la commune intention des parties plutôt que de s'arrêter au sens littéral des termes utilisés.
1426. On tient compte, dans l'interprétation du contrat, de sa nature, des circonstances dans lesquelles il a été conclu, de l'interprétation que les parties lui ont déjà donnée ou qu'il peut avoir reçue, ainsi que des usages.
1427. Les clauses s'interprètent les unes par les autres, en donnant à chacune le sens qui résulte de l'ensemble du contrat.
1431. Les clauses d'un contrat, même si elles sont énoncées en termes généraux, comprennent seulement ce sur quoi il paraît que les parties se sont proposé de contracter.»
II
LES FAITS
[24] Le Bénéficiaire, Pascal Vachon, ainsi que l’Entrepreneur, Serge Demuy, sont de bons amis depuis 2006.
[25] Le 11 novembre 2009, les Parties signent un contrat préliminaire et contrat de garantie pour la construction d’une propriété située au 1728, rue des Outardes à St-Lin-Laurentides (ci-après la «Propriété»). La date d’occupation est prévue pour le ou vers le 18 décembre 2009.
[26] Au cours de la construction, le Bénéficiaire se rend sur les lieux à de nombreuses reprises et prend quelque 450 photos.
[27] Le 20 décembre 2009, le Bénéficiaire, sa conjointe et leurs enfants sont, à toutes fins utiles, contraints de s’installer dans la Propriété puisqu’ils viennent de vendre leur autre maison. Or, la Propriété n’est pas encore prête avec pour résultat que le Bénéficiaire et sa famille s’installent dans un appartement temporaire dans l’attente que leur Propriété puisse être habitée.
[28] Le 20 janvier 2010, le Bénéficiaire et sa famille emménagent dans la Propriété, mais aucune réception formelle du bâtiment n’est faite, ni à cette date ni ultérieurement.
[29] Au fil des jours et des mois qui suivent, le Bénéficiaire note certaines anomalies qu’il communique à l’Entrepreneur pour qu’il les corrige en tout ou en partie suivant les cas. Les deux s’entendent, mais la communication entre eux se dégrade puis est définitivement rompue en mai 2010. Il n’y a plus aucune collaboration après cette date.
[30] Ainsi, le 8 mai 2010, Me Parker, à l’époque procureur du Bénéficiaire, met vainement en demeure l’Entrepreneur de compléter certains travaux. Une copie de cette lettre est reçue par l’Administrateur le 3 juin 2010.
[31] Devant l’absence de développement dans le dossier, le 6 juillet 2010 l’Administrateur décide de procéder à une inspection de la Propriété. Une décision est rendue le 13 septembre 2010. C’est cette décision qui situe la date de réception du bâtiment au 3 juin 2010. Cette décision n’est contestée par personne.
[32] Suivant la décision du 6 juillet 2010, l’Administrateur tente de faire exécuter les points reconnus par l’Entrepreneur, sans succès. En conséquence, l’Administrateur se voit obligé de faire procéder lui-même à des travaux.
[33] C’est au cours de ces travaux qui ont lieu à compter de la mi-novembre 2010 que le Bénéficiaire se fait dire qu’il y aurait plusieurs anomalies dans la Propriété et qu’il décide de retenir les services de Monsieur Paquin, inspecteur en bâtiment.
[34] Monsieur Paquin visite la Propriété le 8 février 2011 et son rapport porte la même date.
[35] Il y révèle avoir découvert de nombreuses anomalies mises en lumière de cette façon. Vu ce rapport, une mise en demeure est adressée à l’Entrepreneur par le Bénéficiaire le 16 mars 2011. Une copie de celle-ci et du rapport de Monsieur Paquin sont transmis à l’Administrateur le 23 mars 2011.
[36] Une autre mise en demeure visant d’autres anomalies est envoyée à l’Entrepreneur le 3 mai 2011, et une copie est reçue par l’Administrateur le lendemain.
[37] Agissant sur la foi de ces mises en demeure, l’Administrateur procède à une inspection le 15 septembre 2011 qui mène à la décision numéro 1 rendue le 13 février 2012. L’arbitrage est demandé le 21 février 2012.
[38] En conférence téléphonique subséquemment à ma nomination, le procureur du Bénéficiaire fait valoir que la décision du 13 février 2012 omettait de se prononcer sur certaines
réclamations ce qui explique qu’une décision supplémentaire (la décision numéro 2) est rendue le 4 juillet 2012, également portée en arbitrage et entendue concurremment avec la première.
[39] Fait à noter, le 25 septembre 2012, Pascal Vachon, le Bénéficiaire, rachète la part que Josée Laroche possédait jusqu’alors avec lui dans la Propriété. Celle-ci lui cède à la même occasion ses droits dans le présent recours, d’où le fait qu’il est depuis le seul Bénéficiaire en l’instance.
III
PREUVE
[40] Les éléments des deux (2) demandes d’arbitrage dont il s’agit ici totalisent près de 50 points ayant nécessité trois (3) journées d’audience et la présentation d’une preuve volumineuse.
[41] Pour faciliter la lecture et la compréhension, la présente sentence présente d’abord à grands traits les témoignages entendus au sujet de la trame de fond et du déroulement des événements. Je traiterai plus loin, dans la section intitulée Analyse et décision, de la preuve présentée à l’égard des points en litige.
[42] Le Bénéficiaire, Monsieur Pascal Vachon, est ferblantier-couvreur. Il connaît le principal dirigeant de Construction S.D. et fils inc., Serge Demuy, et son épouse pour les avoir fréquentés. Ils sont de bons amis et souhaitent habiter près l’un de l’autre.
[43] Lors d’une rencontre amicale en novembre 2009 au restaurant Jardin des fruits à St-Esprit, ils discutent de la possibilité pour Monsieur Demuy de construire une maison pour Monsieur Vachon. À l’époque, Monsieur Vachon qui n’a aucun plan entreprend d’en magasiner un par internet sur la recommandation de l’Entrepreneur. Il se procure ainsi un dessin de Maisons Drummond (modèle W2788, pièce B-1) qu’il présente le 7 novembre à Serge Demuy.
[44] Les deux conviennent que ce sera cette maison qui sera construite avec certaines modifications au niveau de la superficie et l’ajout d’un garage, le tout pour un coût d’environ 15 000 $ de plus que celui suggéré sur le dessin de Maisons Drummond.
[45] Cela dit, ils ne signent pas de contrat tout de suite, car le Bénéficiaire doit d’abord se trouver un terrain.
[46] Deux jours plus tard, les Parties signent un document intitulé : Contrat préliminaire et contrat de garantie pour la construction de la Propriété au coût de 171 930,13 $. La date d’occupation prévue se situe le ou vers le 18 décembre 2009, soit à peine cinq (5) semaines plus tard.
[47] À ce sujet, Monsieur Vachon affirme ne pas avoir su qu’une construction de ce genre ne pouvait se faire aussi rapidement et que lorsqu’il avait demandé à Monsieur Demuy s’il pourrait emménager autour du 18 décembre 2009, celui-ci lui avait répondu par l’affirmative.
[48] Le ou vers le 11 novembre 2009, un document déposé sous la cote A-13 est rempli par l’Entrepreneur en présence du Bénéficiaire. Ce document non signé, mais reconnu par le Bénéficiaire et l’Entrepreneur comme partie de leur entente énumère certaines restrictions, inclusions ou exclusions au contrat, notamment le fait que l’escalier menant à l’étage sera situé entre 2 murs et le fait que l’Entrepreneur ne peinture pas, ne teint pas et ne vernit pas.
[49] Selon le Bénéficiaire, la réalisation de cet escalier était déjà problématique au tout début. Il voulait que cet escalier soit ouvert d’un côté et il avait prévenu l’Entrepreneur que s’il ne construisait pas ainsi, il ne l’accepterait pas. Cela dit, bien qu’ils n’aient pas résolu la question, les parties ont été de l’avant avec le projet.
[50] Un terrain est choisi et la construction débute donc rapidement. D’abord par le défrichage puis ensuite le creusage et le coulage des fondations. À ce moment, l’Entrepreneur n’a toujours en mains qu’un plan préliminaire. En effet, le Bénéficiaire n’a pas acheté le plan de Maisons Drummond, mais a plutôt confié l’esquisse à un tiers référé par Serge Demuy censé être en mesure de dessiner le plan avec les modifications prévues.
[51] Le 23 novembre, le coffrage pour le bâtiment principal est terminé. Le 1er décembre, celui du garage est fait ainsi que le plancher du rez-de-chaussée de la maison et quelques murs
sont montés. L’acte d’achat du terrain acquis de Gestion Gilles Laurence ltée a lieu le 26 novembre 2009 (pièce A-1).
[52] Dans l’intervalle, le Bénéficiaire vend sa maison qu’il occupe et doit la libérer le 20 décembre. Or, à cette date, contrairement à ce qui avait été prévu, la Propriété n’a ni électricité ni chauffage et n’est pas prête pour être livrée. Le sous-sol et le garage qui devaient être prêts à recevoir les meubles ne le sont pas non plus.
[53] Le Bénéficiaire et sa conjointe qui ont quand même tenté de s’y installer avisent l’Entrepreneur qu’ils ne peuvent pas y rester dans ces conditions. Ils décident néanmoins de laisser certains meubles dans le sous-sol avec un chauffage d’appoint au propane et ils s’installent dans un petit appartement temporaire qu’ils louent en attendant que la Propriété soit prête.
[54] L’électricité est raccordée vers la fin décembre et le 20 janvier 2010, le Bénéficiaire et sa famille peuvent enfin emménager. Même si tout n’est pas terminé, ils ne s’inquiètent pas, car l’Entrepreneur continue les travaux entrepris. Aucun acte formel de réception du bâtiment n’est fait ni à cette date ni ultérieurement.
[55] En cours de construction, le Bénéficiaire se rend régulièrement sur les lieux, presque tous les jours même. Il prend une multitude de photos, en fait quelque 450 photos. Il explique au Tribunal que c’est la première fois qu’il se fait construire une maison neuve et qu’il veut se confectionner un album souvenir.
[56] Selon l’abondante preuve présentée, les plans éventuellement réalisés et remis à l’Entrepreneur n’ont pas été suivis, et ce, notamment en raison des demandes de modification du Bénéficiaire en cours de route.
[57] Ainsi, reconnaît Monsieur Vachon, le dessinateur s’est trompé au niveau de la maçonnerie et il a demandé à l’Entrepreneur de se conformer à ses instructions plutôt qu’aux plans.
[58] Des modifications ont aussi été apportées à la salle de bain des maîtres; à la salle d’eau du rez-de-chaussée; à la porte d’entrée principale; aux dimensions du garde-robe de l’entrée et aux fenêtres avant.
[59] De même, les plans prévoient un sous-sol fini. L’entente non écrite des Parties était que seules la salle de bain et les entrées pour la laveuse et la sécheuse seraient faites, le reste étant reporté à plus tard.
[60] En ce qui concerne l’escalier menant à l’étage, le plan prévoyait un escalier ouvert, comme demandé, avec un poteau de soutien au bas. Or, le Bénéficiaire n’a jamais choisi le type de poteau qu’il voulait de sorte que l’Entrepreneur n’en a pas posé, et cela, selon le Bénéficiaire, sans que les deux n’en aient jamais discuté.
[61] C’est d’ailleurs cette question de l’escalier qui a causé la rupture entre les parties en mai 2010, l’Entrepreneur insistant pour construire un escalier entre deux (2) murs alors que le Bénéficiaire insistait pour avoir un escalier ouvert. Le Bénéficiaire ajoute avoir personnellement assisté l’Entrepreneur dans la construction de cet escalier menant à l’étage, notamment pour la taille du bois aux dimensions requises. Le Bénéficiaire a également fait certaines autres tâches mineures afin d’aider l’Entrepreneur, son ami à l’époque.
[62] Au fil des jours et des mois qui suivent la prise de possession de la Propriété, le Bénéficiaire note certaines anomalies qu’il signale à l’Entrepreneur.
[63] Sans pouvoir préciser de date, le Bénéficiaire affirme que l’Entrepreneur a éventuellement quitté le chantier sans avoir terminé les travaux. Le Bénéficiaire produit une liste de travaux à effectuer, un document daté du 10 mars 2010 (document A-14). Cette liste comporte de nombreuses ratures qui selon le Bénéficiaire reflètent les éléments que l’Entrepreneur a éventuellement complétés.
[64] Après la rupture entre le Bénéficiaire et l’Entrepreneur, deux (2) lettres sont envoyées à ce dernier par Me Parker, à l’époque procureur du Bénéficiaire. La première date du 8 mai 2010
et une autre peu après. L’Entrepreneur est alors mis en demeure de parachever certains travaux. Une copie de ces lettres est acheminée à l’Administrateur le 3 juin 2010 (pièce B-2 en liasse).
[65] Ces lettres mentionnent les travaux non terminés ou mal effectués ou encore à corriger, notamment :
Ø Installation du balcon arrière;
Ø Installation de la rampe et main courante (extérieur : balcon arrière, intérieur : escalier menant à l’étage et escalier menant au sous-sol);
Ø Verser et niveler de la roche dans l’entrée réservée aux véhicules;
Ø Fixer les tuyaux de la plomberie dans les murs (très problématique);
Ø Réparer la toilette de la salle d’eau au sous-sol;
Ø Installer une poignée manquante (vanité);
Ø Procéder aux travaux de nettoyage de la brique en façade;
Ø Procéder au remplissage de mortier au niveau du seuil de porte avant;
Ø Douche du sous-sol est défectueuse;
Ø Pompe submersible n’est pas raccordée au drain extérieur (URGENT);
Ø Filage électrique non conforme à la réglementation;
Ø Poutre du plancher non conforme;
Ø Poutres de plancher du sous-sol n’ont fixé adéquatement (sic).
[66] Ces lettres restent sans effet de sorte que l’Administrateur procède à une inspection le 6 juillet 2010 et rend une décision le 13 septembre 2010 qui n’est l’objet d’aucune demande d’arbitrage. Suivant cette décision, l’Administrateur tente vainement de faire exécuter par l’Entrepreneur les points reconnus, avec pour conséquence que l’Administrateur se voit obligé de faire procéder lui-même à certains travaux.
[67] C’est au cours de ces travaux qui ont lieu à compter de la mi-novembre 2010 que le Bénéficiaire Pascal Vachon se fait dire par au moins 3 entrepreneurs indépendants que la Propriété présente plusieurs anomalies qu’il n’avait pas réalisées. Il décide alors de retenir les services de Monsieur Martin Paquin, inspecteur en bâtiment.
[68] Monsieur Paquin visite les lieux le 8 février 2011. Son rapport, qui porte la même date, révèle de nombreuses anomalies de sorte qu’une nouvelle mise en demeure est adressée à l’Entrepreneur le 16 mars 2011 et une copie de celle-ci ainsi que du rapport de Monsieur Paquin sont transmis à l’Administrateur le 23 du même mois.
[69] Le 3 mai 2012, le Bénéficiaire présente à Monsieur Paquin les photos qu’il a prises pendant la construction et celui-ci en déduit que d’autres anomalies affligent la Propriété. Ainsi, une autre mise en demeure est donc envoyée à l’Entrepreneur le 3 mai 2011, dont une copie est reçue par l’Administrateur le lendemain.
[70] L’Administrateur procède éventuellement à une inspection le 15 septembre 2011 suivie d’une décision le 13 février 2012 (la décision numéro 1); d’où le présent arbitrage.
Martin Paquin
[71] Martin Paquin est inspecteur en bâtiment et travaille pour Inspect immeuble inc. Ingénieur de formation, il n’appartient pas à l’Ordre des ingénieurs du Québec.
[72] À l’origine de son mandat, le Bénéficiaire lui a remis une liste (pièce A-17) censée faire état de la condition du bâtiment au 18 janvier 2011 sur la foi des observations du Bénéficiaire. Il a par la suite procédé à une inspection sans s’en tenir à l’énumération qu’avait dressée son client. Il n’a donc pas à l’époque colligé point par point les éléments relevés par le Bénéficiaire.
[73] Cela dit, Monsieur Paquin se souvient de choses qu’avait relevées le Bénéficiaire lui-même. Parmi celles-ci : bruits des tuyaux; porte-patio mal ajustée; conduits du ventilateur dans la salle d’eau; isolation des solives au pied de l’escalier du sous-sol; réparation des poutrelles; absence d’électricité et de chauffage au sous-sol; prise de la salle de bain branchée sur l’éclairage; portes et fenêtres dans l’uréthane; absence d’échangeur d’air; brique sale; courbure du vinyle extérieur; calfeutrage; fissures au mur de fondation; élévation du garage; terrassement et aménagement extérieur.
[74] Il a également vu les photos qu’avait prises le Bénéficiaire, notamment de la cage d’escalier; du pourtour des fenêtres et du colombage des murs extérieurs aux 24 pouces, centre à centre.
[75] Selon lui, Monsieur Vachon était particulièrement inquiet de la plomberie et des bruits; du vinyle et de la brique extérieure et de l’absence d’isolation au sous-sol.
Entrepreneur
[76] Serge Demuy est menuisier de métier et principal dirigeant de Construction S.D. et fils inc. Il corrobore la version du Bénéficiaire quant aux circonstances de leur rencontre en 2006 et des conversations qui ont conduit à leur accord de 2009 pour la construction de la Propriété.
[77] Quand Monsieur Demuy rencontre le Bénéficiaire en 2009 au restaurant, ce dernier hésitait entre s’acheter une maison usagée et s’en faire construire une neuve.
[78] Lorsque le Bénéficiaire trouve un dessin de maison qui lui plaît, ils le regardent ensemble et en estiment le coût. À l’époque, la maison usagée que le Bénéficiaire envisageait d'acheter coûtait 200 000 $. En établissant le prix d’une construction neuve, ils se sont dit qu’entre amis, ils pourraient s’aider.
[79] Selon ce témoin, la date de livraison de la construction stipulée au contrat préliminaire, soit vers le 18 décembre 2009, n’était pas une date véridique, mais plutôt une mention destinée à permettre au Bénéficiaire d’obtenir son financement. Comme ils étaient amis, ce n’était pas grave.
[80] Le contrat en question incluait la construction même de la maison, mais pas la peinture, ni le terrassement, ni la finition du sous-sol sauf pour une salle de bain et les entrées de laveuse et de sécheuse. Également, un escalier menant à l’étage élevé entre deux (2) murs. Toujours selon ce témoin, le contrat ne comprenait pas le garage, ni l’excavation, ni le défrichage du terrain.
[81] Toutefois, comme le Bénéficiaire travaillait et n’avait pas le temps d’excaver ni de défricher, il l’a fait pour lui. Ils ont même commencé à défricher avant que le Bénéficiaire ne soit propriétaire du terrain, selon les instructions de ce dernier.
[82] Monsieur Demuy témoigne que la construction de la maison a dû se faire rush parce que le Bénéficiaire vendait son autre maison.
[83] Ils ont ainsi commencé la construction avant d’avoir obtenu les permis de la ville puisque Monsieur Demuy connaissait quelqu’un à la ville qui l’avait assuré qu’il pouvait commencer et
que ce n’était pas un problème. De la sorte, la construction a commencé avant qu’on lui ait fourni des plans et devis.
[84] Il décrit ensuite l’ordre dans lequel la construction a eu lieu.
[85] Selon lui, St-Lin manque souvent d’électricité, d’où la nécessité de raccorder dès le départ le drain français qui ceinture la maison à une pompe submersible de manière à éviter des infiltrations d’eau. Dans ce cas-ci, la dalle du sous-sol s’avère être plus haute que le niveau de la rue et la maison construite sur un sol sablonneux d’un côté, et rocheux de l’autre. Alors que le drain français est généralement connecté directement à la pompe submersible, ici on l’a connecté non pas à la pompe, mais à un tuyau de 4 pouces qui descend graduellement vers le fossé, voisin de la rue. Selon lui, le raccord du drain à la pompe submersible n’était pas nécessaire.
[86] Monsieur Demuy affirme avoir fait plusieurs travaux en surplus de ce qui avait été prévu, dont certains ont fait l’objet d’une facturation séparée et d’autres pas. Il ajoute que le Bénéficiaire et lui-même ne s’entendaient pas toujours sur les prix de ces additions. Comme le Bénéficiaire n’était pas toujours sur place lors de pareils travaux additionnels, ils avaient convenu de s’arranger ensemble plus tard à ce sujet.
[87] L’Entrepreneur confirme que le Bénéficiaire a participé assez activement à la construction. Par exemple, il a fait la ventilation de la salle de bain de l’étage parce qu’il n’aimait pas la façon dont l’Entrepreneur le faisait. Le Bénéficiaire a également posé tout le calfeutrage partout pour la même raison. Également, parce qu’il n’aimait pas les plinthes électriques choisies par Monsieur Demuy, il a aidé Monsieur Demuy à les remplacer par des convectairs. Il a également lui-même installé le filage pour le téléphone, le système d’alarme et internet. Il a également participé à l’érection de certains murs pesants.
[88] Quant aux têtes-de-clou visibles dans les moulures, Monsieur Demuy soutient que c’est au peintre qu’il revenait de boucher ces trous et non à lui et que la peinture ne faisait pas partie de ses engagements.
[89] Il corrobore le témoignage de Monsieur Vachon en ce qui a trait aux modifications aux plans (brique, division salle de bain, dimension garde-robe, etc.).
[90] Monsieur Demuy déclare aussi que la distributrice à eau du Bénéficiaire installée près de la porte-patio (dans la cuisine) avait coulé et endommagé le plancher qui avait levé à cet endroit. Il affirme l’avoir en conséquence changé, sans frais, sur une surface d’environ 4 pouces sur 10 ou 12 pouces.
[91] Quant au gros œuvre du bâtiment, il affirme avoir commencé la construction à partir du seul plan préliminaire (pièce A-16) et alors qu’il n’avait pas reçu les plans et devis finaux (pièce B-4). Selon lui, il était rendu à poser les fermes du toit lorsqu’il a finalement reçu les plans. Il confirme aussi avoir fait la semelle à partir du plan préliminaire.
[92] En ce qui concerne le garage, il insiste pour dire que le garage n’était pas inclus et que la demande est venue par la suite. Il maintien sa version même lorsque confronté au bon de commande 09924 de Matériaux Kott (pièce B-6) lequel porte le tampon : Reçu le 27 nov. 2009 et la mention dans la section Ferme de toit : Maison + garage / +850 (garage) Tel que plan #2 / + 2580(maison) tel que plan #1. Selon lui, ce document n’est pas une facture, mais plutôt un état de compte mensuel, ce qui expliquerait tout au plus qu’à la date indiquée, Matériaux Kott avait reçu une commande de matériaux pour la maison et pour le garage. En effet, il ajoute faire ses commandes par téléphone auprès de Kott qui lui adressait un seul état de compte par mois.
[93] En ce qui concerne l’escalier, il soutient que c’est Monsieur Vachon qui a taillé les marches dans le garage et qu’il lui a même laissé ses outils pour qu’il termine. Selon lui, Monsieur Vachon voulait un escalier rond, mais l’espace disponible ne le permettait pas. Il ajoute également que Monsieur Vachon ne voulait pas d’un escalier situé entre deux (2) murs, mais plutôt ouvert. Après maints arguments, dit-il, et après avoir expliqué qu’il n’était pas capable de faire un tel escalier, il aurait finalement accepté d’enlever le mur sans cependant amender le contrat ni le plan. Ils étaient des amis, dit-il.
[94] Lorsqu’on lui demande quel est l’élément culminant ayant mené à la fin des relations entre lui et le Bénéficiaire, il mentionne le fait que le Bénéficiaire lui aurait demandé des barreaux en fer forgé pour l’escalier menant à l’étage, ce qu’il aurait refusé.
Par après, le Bénéficiaire lui a téléphoné le 10 mars 2010, pour lui dire qu’il avait une liste à lui remettre (pièce A-14). C’est, dit Monsieur Demuy, son épouse qui y est allée. Elle a pris la lettre, mais refusé de signer un récépissé. Il s’agit de la liste qui indique des déficiences à corriger. Le Bénéficiaire aurait dit à Monsieur Demuy que s’il complétait cela, il serait content et lui remettrait son chèque.
[95] Une fois ces travaux terminés, dit-il, le Bénéficiaire était content et ils se sont rencontrés à la résidence de l’Entrepreneur pendant environ 2 heures, tout allait bien. Toutefois, le Bénéficiaire a appelé sa banque à qui il a demandé de retenir le dernier versement.
Administrateur
[96] Monsieur Frédérick Garcia a une formation d’architecte sans toutefois appartenir à l’Ordre des architectes. Il est inspecteur-conciliateur pour l’Administrateur depuis 3 ans. C’est lui qui a traité ce dossier qui s’est avéré très difficile vu l’émotivité des parties.
[97] Sa première visite du site faisait suite aux mises en demeure reçues au bureau de l’Administrateur le 3 juin 2010. L’Entrepreneur est alors absent et aucun plan ne lui est remis.
[98] Ce jour-là, Monsieur Vachon lui raconte ce qu’il qualifie d’aventure de construction et ils font ensemble la tournée de la maison. Monsieur Vachon est très émotif et soutient que tous les travaux ont été mal faits et qu’en outre des points qui figurent à sa liste (pièce A-3), il y avait plusieurs autres problèmes qui n’y apparaissaient pas.
[99] Le témoin affirme avoir alors immédiatement informé le Bénéficiaire qu’il devait sans délai dénoncer par écrit ces éléments à l’Entrepreneur et à l’Administrateur afin de préserver ses droits.
[100] Il se souvient, à titre d’exemple, que le Bénéficiaire lui avait notamment mentionné les éléments suivants : fenêtres non fixées correctement et qui tiennent uniquement dans l’uréthane; les colombages des murs installés aux 24 pouces; le problème de l’escalier; l’absence d’échangeur d’air; l’irrégularité des soffites; la gâche de porte manquante; l’élasticité du faux limon; le problème de toilette et de tuyauterie; les solives rafistolées; le manque de calfeutrage; l’absence du balcon arrière; des fissures aux murs de fondation; des problèmes avec le revêtement de vinyle; la prise de courant extérieure; la maçonnerie sale; un seuil de porte avec brique en soldat; l’absence de moulures à certains endroits; les têtes de clous visibles dans les moulures et finalement, un robinet de la douche qui n’adhérait pas à la céramique. Monsieur Garcia énumère ces points de mémoire et sans consulter de document.
[101] Ce témoin ajoute que Monsieur Vachon lui avait expliqué avoir participé à la construction parce que les travaux avançaient trop lentement. Monsieur Garcia affirme qu’il lui était apparu évident des propos de Monsieur Vachon, que celui-ci avait pris une grande part dans la construction de l’escalier.
[102] Après sa visite, Monsieur Garcia a parlé à Monsieur Demuy, l’Entrepreneur. Ce dernier qui lui a paru crédible lui a confirmé que le Bénéficiaire avait participé à plusieurs des travaux, notamment ceux relatifs à l’escalier. Il a même dit à Monsieur Garcia qu’il était en présence d’une autoconstruction. Au terme de leur conversation, Monsieur Demuy s’est engagé à lui télécopier certains documents, ce qu’il n’a jamais fait.
[103] Concernant le problème de la pompe submersible, Monsieur Garcia nous dit qu’au départ, le problème dénoncé était que celle-ci n’était pas rattachée au drain extérieur, mais que lors de sa visite, le Bénéficiaire lui avait expliqué autre chose. Monsieur Garcia ajoute n’avoir appris qu’au moment de l’audience que l’eau était censée s’écouler naturellement dans le drain extérieur de sorte qu’il n’aurait pas été nécessaire de la diriger dans la maison pour ensuite l’évacuer dès lors que celle-ci s’écoulait déjà naturellement vers le fossé.
[104] Par ailleurs, lorsqu’interrogé sur la façon dont il a départagé les responsabilités de chacun eu égard au contrat, Monsieur Garcia répond qu’en ce qui le concerne, lorsqu’un entrepreneur ne s’implique pas, il a un préjugé favorable aux bénéficiaires.
[105] Dans le cas présent, Monsieur Garcia affirme avoir été sympathique au Bénéficiaire, un peu trop, dira-t-il. Selon lui, certaines réclamations du Bénéficiaire ont été accordées, faute par l’Entrepreneur d’avoir donné son point de vue.
[106] Sa première décision est rendue le 13 septembre 2010 et elle n’est pas portée en arbitrage. Cette décision arrête la date de réception au 3 juin 2010.
[107] Les deux (2) autres dénonciations du Bénéficiaire au printemps 2011 donnent lieu à sa deuxième visite des lieux. Monsieur Vachon et sa conjointe de l’époque sont présents, mais pas l’Entrepreneur. Puisque le rapport préparé par Monsieur Paquin pour le compte du Bénéficiaire ne faisait aucune mention des plans et devis, lui-même n’en a pas demandé de copie.
[108] Toutefois, dit-il, lors de sa seconde visite, le discours du Bénéficiaire avait changé, celui-ci lui affirmant ne pas avoir participé à la construction.
[109] Devant ce changement de cap, Monsieur Garcia dit avoir été inquiet et douté de la franchise de Monsieur Vachon, qui en plus affirmait qu’il y avait pour 150 000 $ de travaux à compléter alors que le coût total de la construction était légèrement supérieur à 150 000 $. Il se rappelle s’être alors fait la réflexion suivante que ça ne se pouvait pas qu’il y ait pour 150 000 $ de travaux à faire dans cette maison qui au total en valait à peu près 150 000 $!
[110] Monsieur Garcia conclut en disant avoir informé verbalement Monsieur Vachon à cette occasion que toutes les réclamations ne seraient pas couvertes, vu sa tardiveté à les dénoncer, ce à quoi ce dernier aurait répliqué que ce n’était pas grave et que le rapport pourrait renforcer la procédure civile entreprise contre l’Entrepreneur.
IV
PLAIDOIRIES
Bénéficiaires
[111] En plaidoirie, le procureur résume brièvement les motifs de refus de l’Administrateur, soit : que les malfaçons énoncées aux points 17 et 18 étaient apparentes, qu’aucune malfaçon n’a été notée par l’Administrateur relativement aux points 19 à 35, que la dénonciation a été faite hors délai quant aux points 36 à 54, et enfin, l’exclusion de la garantie en ce qui concerne les points 58 à 61.
[112] En ce qui a trait aux points 17 et 18, le procureur soutient que la réception établie au 3 juin 2010 n’a jamais eu lieu et que ces points devraient être accueillis.
[113] Il dépose, au soutien de sa position, la décision Proulx c. Construction Stéphane Bédard inc.1 Selon cette décision, l’absence de réception due à la faute de l’Entrepreneur ne devrait occasionner pour le Bénéficiaire aucun préjudice. Il plaide que c’est ici le cas et en demande l’application.
[114] De plus, soulevant les contradictions entre le témoignage de l’Entrepreneur et le témoin Monsieur Chef quant au garage, il propose au Tribunal que l’Entrepreneur n’est pas crédible et que son témoignage doit être rejeté. De plus, le point 17 n’est pas conforme aux plans. (pièce B-4, page A-03) Enfin, il soutient qu’en équité, le Tribunal devrait faire droit à ces réclamations.
[115] Quant aux points 19 à 35, il souligne la non-conformité aux plans et devis des points 19, 20, 22 et 34 ajoutant que l’Entrepreneur à l’obligation de se conformer à ses obligations contractuelles.
[116] Il dépose, au soutien de sa position, la décision Marc Melanson et Sonia Gatineau c. Les entreprises Réjean Goyette inc.2 En acceptant de travailler avec des plans, dit-il, l’Entrepreneur se devait de les respecter. Le témoignage de Monsieur Demuy a été clair à l’effet qu’il a travaillé
1 Carmen Proulx et Pierre Proulx c. La garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc. et Construction Stéphane Bédard inc., 2006 CanLII 60451 (QC OAGBRN), Me Johanne Despatis, arbitre.
2 Marc Melanson et Sonia Gatineau c. Les entreprises Réjean Goyette inc. et La garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc., 2006 CanLII 60501 (QC OAGBRN), Claude Dupuis, arbitre.
avec les plans. Pour le Bénéficiaire, il n’est pas nécessaire que les plans soient signés pour lier les parties.
[117] De plus, il attire l’attention du Tribunal sur le point 23 ayant trait à la courbure de certains murs extérieurs. Le témoignage de Monsieur Paquin à cet égard est clair : cette courbure est anormale et constitue une malfaçon nous indique-t-il.
[118] Relativement aux points 36 à 54, il souligne que les principales préoccupations de Monsieur Vachon étaient, au moment de consulter Monsieur Paquin, de nature principalement esthétique (par exemple, le vinyle extérieur et les bruits de la tuyauterie). Bien que Monsieur Vachon voyait des choses et prenait des notes, celui-ci n’a pas de connaissance particulière en la matière de sorte que c’est avec le rapport de Monsieur Paquin que la découverte a véritablement lieu. Or, celui-ci est daté du 8 février 2011 et les vices et malfaçons sont dénoncées à l’Administrateur les 16 mars et 3 mai 2011. La dénonciation n’est donc pas tardive.
[119] Monsieur Vachon, il est vrai, a aidé par moment l’Entrepreneur, mais il n’était pas son assistant. Il n’a effectué aucune réparation et n’a pas participé à la construction et encore moins pris des décisions.
[120] En ce qui concerne le point 54, soit le manque de finition de l’escalier du sous-sol, il plaide que non seulement la finition est manquante, mais qu’au surplus, les travaux ne sont pas complétés.
[121] Quant au garage, il serait, selon le Bénéficiaire, non visé par l’exclusion prévue à l’article 4.9 du contrat de garantie (art. 12 du Règlement).
[122] La véritable question en l’espèce consiste à se demander si un garage équivaut à un espace de stationnement ou à un local d’entreposage. Me Lemire suggère qu’un local d’entreposage serait un cabanon par exemple.
[123] Le procureur soutient que le garage fait partie du contrat et qu’il serait trop restrictif de l’exclure parce qu’il est détaché du bâtiment principal. «Quand ça marche comme un canard parle comme un canard et que ça ressemble à un canard, c’est un canard !» nous dit-il.
[124] Quant au point 62 relatif à la perte de chaleur dans l’entretoit, selon lui, l’Administrateur n’a pas statué sur ce point. Se référant au témoignage de Monsieur Paquin, il s’agirait simplement d’ajouter de la laine minérale pour régler le problème. Il demande au Tribunal d’accueillir ce point.
[125] Enfin, le point 70, pour sa part, qui concerne le raccordement du drain français à la fosse de retenue, n’est pas l’équivalent du point 7 de la décision du 6 juillet 2010. Pour le Bénéficiaire, Monsieur Paquin est plus crédible que Monsieur Garcia et ce point peut se régler facilement.
[126] Vu le manque de collaboration et le comportement de l’Entrepreneur, et considérant que l’Administrateur a rendu des décisions plus favorables aux Bénéficiaires, vu les circonstances, Me Lemire invoque l’article 116 du Règlement et demande au Tribunal de statuer en équité et d’accueillir toutes et chacune des réclamations du Bénéficiaire.
Administrateur
[127] Comme premier argument, le procureur de l’Administrateur souligne que la réception du bâtiment a été fixée au 3 juin 2010 dans le cadre de la décision du 6 juillet 2010. Cette décision n’ayant pas été portée en arbitrage, par conséquent, il y a chose jugée et le Tribunal n’a pas compétence pour statuer sur cet élément.
[128] Quant aux plans et devis produits, ceux-ci ne sont pas signés par l’Entrepreneur, ont été réalisés après la signature du contrat de construction et ainsi, ils n’en font pas partie et doivent être mis de côté pour les fins du présent recours.
[129] Ainsi, et de façon préalable, ce que le Tribunal doit décider c’est de savoir si, dans les circonstances du présent dossier, les plans font partie des obligations de l’Entrepreneur au moment de signer le contrat avec le Bénéficiaire.
[130] Il souligne que le témoignage de Monsieur Vachon a été clair sur les circonstances ayant entourées la conclusion du contrat. L’absence des plans et devis au moment de signer le contrat indique que ceux-ci ne peuvent en faire partie. Seuls le document déposé sous A-13 et les modifications manuscrites faites sur le dessin de Maisons Drummond font foi du contenu du
contrat. Le prix a d’ailleurs été établi à partir du prix suggéré par Maisons Drummond en effectuant les ajustements qui tiennent compte des modifications demandées. Ces modifications comprennent notamment l’ajout d’un garage et des agrandissements.
[131] Par ailleurs, les parties admettent ne pas avoir suivi les plans et devis à plusieurs égards.
[132] Dans les circonstances actuelles, on ne peut se fier ni au contrat préliminaire ni aux plans et devis pour déterminer la teneur du contrat. Donc, soutient-il, on doit s’en remettre essentiellement à la preuve testimoniale entendue et décider des points en litige en se rapportant aux règles de l’art et aux normes en usage pour déterminer si la construction est conforme ou non.
[133] Ainsi, et relativement aux points 19 à 35, les points rejetés l’ont été à bon droit puisque conformes aux règles de l’art.
[134] D’ailleurs, et plus particulièrement en relation avec les points 19, 20, 21, 25 et 34, il n’y a aucune preuve qu’il y ait eu contravention aux règles de l’art. Il n’y a rien dans les règles de l’art qui exige la présence de fourrure ou de lien continu. Les Bénéficiaires n’ont démontré aucune déflexion du plafond, aucune ondulation, aucun impact et aucun dommage. Par conséquent, ces points ne peuvent être retenus. L’immeuble est étanche et solide, il n’y a aucune infiltration d’eau ou d’air. Plusieurs plaintes sur lesquelles le Tribunal doit se pencher sont objectivement sans conséquence sur l’immeuble.
[135] Me Paquette s’est dit surpris d’avoir investi autant de temps et d’argent pour des éléments sans impact sur le bâtiment et il soutient que le Tribunal doit en tenir compte dans sa décision.
[136] Quant aux points 36 à 54, le refus de l’Administrateur est basé sur le fait que ces éléments ont été dénoncés hors délai. Ces éléments, pour la plupart, avaient été portés à l’attention de Monsieur Garcia lors de sa visite du 6 juillet 2010. Dès ce moment, Monsieur Garcia a informé le Bénéficiaire qu’il devait dénoncer les problèmes par écrit à l’Administrateur
et refaire le processus. Or, ce n’est qu’après avoir reçu le rapport du 8 février 2011 de Monsieur Paquin que le Bénéficiaire a dénoncé les éléments déjà connus le 6 juillet 2010.
[137] Il s’agit entre autres des éléments suivants : les fenêtres, le colombage de 24 pouces, le soffite et la gâche de porte.
[138] De plus, lors de la visite du 6 juillet 2010, le Bénéficiaire a remis une liste (pièce A- 17) à Monsieur Garcia qui fait état des malfaçons connues à cette date.
[139] Pour l’Administrateur, le Tribunal doit tenir compte de cet élément, mais également de la pièce A-14 qui est une lettre datée du 11 mars 2010 par laquelle l’Entrepreneur s’engage à effectuer certaines réparations ou corrections. La crédibilité des témoins doit être évaluée notamment en comparant les témoignages aux écrits concomitants aux événements.
[140] Pour l’Administrateur, la différence entre les demandes du Bénéficiaire au moment de ces événements et celles devant l’arbitre est révélatrice de l’ampleur du différend qui oppose les parties en l’instance.
[141] Quant à la fosse de retenue, il souligne que lors de l’inspection par Monsieur Paquin, celui-ci n’a pas considéré le fait que le drain extérieur puisse être connecté directement sur la fosse extérieure. Dans le dossier actuel, la Propriété est surélevée par rapport au niveau de la rue et bien qu’il ne soit pas habituel d’avoir un drain qui se déverse dans le fossé, l’installation ne contrevient pas aux normes en vigueur et elle est même souhaitable puisqu’elle éloigne l’eau du bâtiment.
[142] Il n’y a eu aucune infiltration d’eau et il n’est pas nécessaire de raccorder le drain pour pomper l’eau en cas de blocage. Rien dans les normes ou règles de l’art n’exige d’avoir un système de «backup». S’il y a toujours moyen d’envisager mieux, l’obligation de l’Entrepreneur est de construire une maison conforme aux normes en vigueur et aux règles de l’art.
[143] De plus, ce problème a été traité au point 7 de la décision du 13 septembre 2010 et une quittance rédigée de façon claire a été signée entre les parties à cet égard. Cette demande doit donc être rejetée.
[144] Quant au point 60 qui traite de la structure du garage, celui-ci a été refusé à bon droit.
[145] En effet, la garantie ne couvre pas les garages non attachés au bâtiment principal en vertu de l’exclusion prévue à l’article 12 du Règlement.
[146] Le procureur du Bénéficiaire soutient que le garage n’est ni un stationnement ni un local d’entreposage. Certes, admet-il, mais il faut comprendre l’exclusion prévue à l’article 12 du Règlement, laquelle disposition n’est pas exhaustive, à la lumière de l’article 1 du même Règlement qui contient, lui, une liste exhaustive d’inclusions.
[147] Ainsi, en vertu de l’article 1 du Règlement, la garantie couvre «le bâtiment lui-même, y compris les installations et les équipements nécessaires à son utilisation soit le puits artésien, les raccordements aux services municipaux ou gouvernementaux, la fosse septique et son champ d’épuration et le drain français.» Par conséquent, le garage détaché de la maison n’est pas couvert par la garantie.
[148] Par ailleurs, Me Paquette dépose à l’appui de sa position les décisions Brisson c. Construction Norjo3 ainsi que Waddel c. Les constructions Jacques Laporte inc.4
[149] Enfin, Me Paquette souligne que plusieurs travaux ont été effectués par le Bénéficiaire et conclu à l’effet que ces travaux sont exclus de la garantie et dépose la décision Gidal Construction inc. c. Lazaris5 à cet effet.
3 Céline Demers Brisson et Pierre Brisson c. 9141-1074 Québec inc. (Construction Norjo) et La garantie des maisons neuves de l’APCHQ inc., 22 août 2008, CCAC, Me Michel A. Jeanniot, arbitre.
4 Alexis Waddel et Marie-Ève Dubois c. Les constructions Jacques Laporte inc. et La garantie habitation du Québec inc., 2009 CanLII 82191 (QC OAGBRN) Me Jean Morissette, arbitre.
5 Gidal construction inc. c. Penelope Lazaris et Naoum Bourkas et La garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc., 18 février 2010, CCAC, Me Albert Zoltowski, arbitre.
V
ANALYSE ET DÉCISION
[150] Le Tribunal est saisi de près de 50 points et la preuve versée est volumineuse, mais sans toutefois toujours être pertinente aux questions à trancher. Cette section se limite à la preuve technique pertinente aux éléments en litige.
[151] Comme il ressort de la preuve générale résumée plus tôt, les versions du Bénéficiaire et de l’Entrepreneur sont, somme toute, semblables à plusieurs égards. Ainsi, les deux s’entendent pour dire que l’Entrepreneur a convenu au début novembre 2009 de construire la Propriété à partir d’un dessin de Maisons Drummond; que le contrat préliminaire intervenu est incomplet et ne reflète pas la totalité de l’entente intervenue; que d’autres ententes écrites et verbales se sont ajoutées au contrat préliminaire et finalement que les plans éventuellement réalisés n’ont pas nécessairement été suivis.
[152] Les parties divergent sur la présence ou non d’un garage dans le contrat initial; sur le type d’escalier intérieur prévu et sur la responsabilité de chacun dans la construction de cet escalier. Les parties ne s’entendent pas non plus sur la part de travail effectué par le Bénéficiaire dans la maison, non plus que sur la date prévue de sa livraison.
[153] Dans le présent dossier, le Tribunal doit répondre à une question préalable relative au contenu du contrat.
[154] Les dispositions pertinentes du Code civil du Québec sont reproduites ci-dessus.
[155] À la lumière des dispositions applicables, le Tribunal conclut qu’il convient essentiellement de donner au contrat le véritable sens de ce que les parties ont voulu, en tenant compte du contexte dans lequel il a été conclu et de l’interprétation que les parties lui ont donné.
[156] Le procureur du Bénéficiaire plaide que les plans et devis font partie du contrat intervenu entre les parties et que lorsque l’Entrepreneur accepte de travailler avec des plans, il doit les respecter6.
6 Marc Melanson et Sonia Gatineau c. Les entreprises Réjean Goyette inc. et La garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc., 2006 CanLII 60501 (QC OAGBRN), Claude Dupuis, arbitre.
[157] Le procureur de l’Administrateur soutient, au contraire, que puisque les plans et devis ne sont pas signés par l’Entrepreneur et qu’ils ont été réalisés après la signature du contrat de construction, ceux-ci ne font pas partie du contrat.
[158] Conformément à la loi, un contrat comprend certes tous les éléments sur lesquels les parties se sont entendues, mais il ne s’étend qu’aux éléments sur lesquels les parties se sont effectivement entendues.
[159] À la conclusion du contrat préliminaire, tout ce que les parties avaient en leur possession était un dessin de Maisons Drummond présentant une photo de maison vue de face et une coupe transversale de celle-ci montrant la dimension des pièces et les divisions du rez-de-chaussée et de l’étage. Une fiche technique était également présente suggérant un barème de coût de la construction.
[160] À ce croquis, les parties ont ajouté au bas, à la main, un garage détaché du bâtiment. Selon la preuve, elles ont alors ajusté le prix de vente afin de tenir compte de cet ajout.
[161] Le Bénéficiaire plaide que le garage est inclus dans le contrat alors que l’Entrepreneur plaide qu’il n’en fait pas partie.
[162] De l’avis du Tribunal, le garage fait partie du contrat. En effet, celui-ci apparaît clairement sur le croquis et personne n’a remis en question le fait que le dessin du garage s’y trouve depuis le tout début. Aucune preuve n’a été apportée pour démontrer qu’il s’agirait d’un ajout fait après la signature du contrat de construction. D’ailleurs, le Tribunal ne retient pas le témoignage de Monsieur Demuy à cet égard et préfère la version du Bénéficiaire, corroborée par celle d’un témoin indépendant au litige dont le témoignage n’a pas été résumé vu les conclusions que tire le Tribunal. Reste au Tribunal à décider si le garage est couvert ou non par la garantie, ce que le Tribunal fait dans la section réservée aux points 58 à 61.
[163] Ainsi, au moment d’établir un prix, tout ce que l’Entrepreneur a en sa possession, est un dessin et une fiche technique. Il n’a aucune idée précise de ce que les plans et devis contiendront, mais il sait au moins que la construction à venir et ses plans et devis devront à tout
le moins se conformer à la législation en vigueur, notamment le Code national du bâtiment, et être réalisée selon les règles de l’art.
[164] Puisque les plans et devis éventuellement réalisés, mais jamais signés par l’Entrepreneur sont subséquents au contrat, on ne peut les imposer à celui-ci, d’autant qu’ils prévoient des standards supérieurs à ceux prévus par la loi et les règles de l’art. La preuve est que l’Entrepreneur n’a pas, au moment de signer le contrat préliminaire, consenti à exécuter cette construction suivant des standards supérieurs ni à un prix qui aurait reflété pareil dépassement.
[165] Par conséquent, les plans et devis ne faisant pas partie du contrat, les critères d’analyse de la conformité pertinents à l’espèce, seront les normes résultant du Code national du bâtiment ainsi que les règles de l’art.
Analyse des points en litige
[166] Cette décision soulève la question de la date de réception et de la réception même. Il y a lieu d’en décider maintenant vu sa portée.
Décision numéro 1 :
Points 17 et 18 : absence de crépi sur la fondation et dénivellation sur le plancher au bas de l’escalier
[167] L’Administrateur a rejeté cette réclamation au motif que ces éléments étaient apparents au moment de la réception et qu’ils n’ont pas été dénoncés par écrit à cette occasion.
[168] On sait que dans une décision rendue le 13 septembre 2010 et jamais contestée, l’Administrateur situe la réception au 3 juin 2010.
[169] Lors de la visite des lieux ayant mené à la décision dont appel, le Bénéficiaire a montré au Tribunal une petite encoche (une petite bosse entre 2 planches) au bas de l’escalier. Il a également montré l’absence de crépi sur la fondation.
[170] En ce qui concerne l’absence de crépi sur la fondation, le Bénéficiaire devait me convaincre que cet élément n’était pas apparent au moment de la réception.
[171] Monsieur Garcia a témoigné disant qu’il n’y avait aucune exigence en la matière au Code national du bâtiment. Pour sa part, Monsieur Paquin confirme que le Code national du bâtiment ne contient effectivement pas une telle exigence, mais que c’est tout de même préférable. Il ajoute que le crépi était d’ailleurs présent aux plans et devis.
[172] Aucun des deux (2) témoins n’a informé le Tribunal des règles de l’art en la matière.
[173] Le procureur du Bénéficiaire soutient que la décision de l’Administrateur qui établit au 3 juin 2010 la réception doit être écartée. Il invoque, au soutien de sa position, la sentence Proulx c. Construction Stéphane Bédard inc.7 Il plaide que selon cette décision, quand la réception ne peut avoir lieu par la faute de l’Entrepreneur, le Bénéficiaire ne doit pas en être préjudicié et que ce serait le cas ici. Enfin, il ajoute qu’en équité, le Tribunal devrait de toute façon faire droit à cette réclamation.
[174] Selon le procureur de l’Administrateur, le Bénéficiaire cherche à remettre en question la date de réception en alléguant que par la faute de l’Entrepreneur les parties n’auraient pas procédé à la réception au moyen du formulaire prescrit. Or, plaide-t-il, il arrive des cas où la réception formelle ne peut avoir lieu de sorte qu’il y a lieu de déterminer cette date autrement afin d’assurer aux bénéficiaires la protection qu’accorde le Règlement.
[175] Le Plan de garantie, plaide le procureur, offre deux (2) types de garantie, une avant réception et qui couvre le retard de livraison et le parachèvement des travaux; et l’autre après réception, qui couvre les malfaçons non apparentes, les vices cachés et les vices de construction.
[176] Dans le présent cas, le Bénéficiaire, avance le procureur, demande la garantie après réception. Cela étant, il incombait à l’Administrateur dès lors qu’il était informé qu’il n’y avait pas eu d’avis formel de fin des travaux et ni réception formelle du bâtiment, de quand même protéger le Bénéficiaire et à cette fin de déterminer la date de réception. Or, l’Administrateur a
7 Carmen Proulx et Pierre Proulx c. La garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc. et Construction Stéphane Bédard inc., 2006 CanLII 60451 (QC OAGBRN), Me Johanne Despatis, arbitre.
déterminé, en équité, que la date de réception serait celle où il a reçu du procureur du Bénéficiaire la liste des déficiences, soit le 3 juin 2010.
[177] Me Paquette fait valoir que cette question est décidée par l’Administrateur dans le cadre de la décision rendue le 13 septembre 2010 et qu’elle n’a pas été portée en arbitrage. Par conséquent, selon lui, le présent Tribunal n’a pas compétence pour statuer sur la question de la date de réception.
[178] Comme le révèle le dossier, la décision du 13 septembre 2010 établit la date de réception au 3 juin 2010. Elle n’a pas été portée en appel, a force de chose jugée et lie le Tribunal et les Parties. La réception du bâtiment est donc réputée avoir eu lieu le 3 juin 2010.
[179] Toutefois, le Tribunal a à décider si l’absence de crépi sur la fondation, ainsi était apparent au moment de la réception de même que la dénivellation au plancher au bas de l’escalier.
[180] En ce qui concerne l’absence de crépi, aucune preuve n’a été apportée selon laquelle l’absence de crépi sur les fondations n’était pas visible lors de la réception le 3 juin 2010.
[181] De plus, bien que le Bénéficiaire ait pu ignorer, lors de la visite du 6 juillet 2010, que l’Administrateur déterminerait une date de réception pour les fins de la garantie, celui-ci a bénéficié des services d’un procureur indépendant qui a envoyé deux (2) mises en demeure à l’Entrepreneur en mai 2010 avec copie à l’Administrateur le 3 juin 2010.
[182] Également, le Bénéficiaire habitait la maison depuis le 20 janvier 2010, soit depuis cinq mois et demi (5 1/2) lorsque la première visite a eu lieu.
[183] Lors de cette visite, le Bénéficiaire a mentionné à Monsieur Garcia plusieurs éléments problématiques outre ceux dénoncés par écrit. L’absence de crépi ne s’y trouvait pas. Par ailleurs, selon le témoignage non contredit de Monsieur Garcia, le Bénéficiaire a été dûment informé le 6 juillet 2010 qu’il devait se dépêcher à faire ses réclamations par écrit afin de protéger ses droits.
[184] Finalement, l’Administrateur a fait preuve d’équité en décidant que la réception avait eu lieu le 3 juin 2010 plutôt que le 20 janvier 2010, date du début d’occupation de la Propriété par le Bénéficiaire et sa famille, ou encore, depuis la date de la première ou de la seconde mise en demeure en mai 2010.
[185] Dans les circonstances, le Tribunal estime que le Bénéficiaire n’a pas été diligent en attendant près de 8 mois après la mise en garde de Monsieur Garcia indiquant qu’il devait se dépêcher à dénoncer les problèmes par écrit. Par conséquent, l’affaire Proulx8 n’est pas applicable en l’espèce. De plus, le Tribunal estime qu’il ne peut, en l’espèce, se prévaloir de son pouvoir de statuer en équité et rejette cette réclamation du Bénéficiaire.
[186] Quant à la dénivellation sur le plancher, au bas de l’escalier, le Bénéficiaire a témoigné s’en être aperçu lui-même. Il ne précise toutefois pas à quel moment il s’en est aperçu et aucun témoignage n’est venu établir à quelle date ou à quelle période la découverte avait eu lieu.
[187] Pour Monsieur Garcia, il indique dans son rapport que ce point était apparent lors de la réception. Toutefois, lors de son témoignage, il ajoute qu’il ne s’agit pas d’une malfaçon puisque la dénivellation est de moins de 3 millimètres. Personne ne s’est opposé à cette preuve.
[188] Monsieur Paquin, pour sa part, considère que l’installation a été mal faite et qu’à tout événement, ladite dénivellation n’est pas apparente. Il ajoute que lors d’une inspection préachat, il ne se met pas à genou pour inspecter les propriétés. S’il avait lui-même procédé à une telle inspection dans la Propriété, il ne l’aurait pas vue.
[189] En somme, pour l’un, il ne s’agit ni d’une malfaçon, et encore moins d’une malfaçon non apparente alors que pour l’autre, il s’agit clairement d’une malfaçon non apparente.
[190] Sur cette question, le Tribunal, considérant la décision de l’Administrateur voulant que ce point fût apparent au moment de la réception, considérant le témoignage de Monsieur Garcia à l’effet qu’il ne s’agit pas d’une malfaçon et celui de Monsieur Paquin à l’effet contraire, et
8 Carmen Proulx et Pierre Proulx c. La garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc. et Construction Stéphane Bédard inc., op. cit. note 1.
considérant les observations faites sur place, estime que la preuve prépondérante démontre qu’il ne s’agit pas d’une malfaçon et rejette la réclamation du Bénéficiaire à cet égard.
Points 19, 20, 21, 22, 23, 25, 30, 31 et 34 :
[191] En ce qui concerne ces points, l’administrateur a considéré qu’il ne s’agissait pas de malfaçon. Par conséquent, il rejette ces réclamations du Bénéficiaire.
Point 19 : absence de lien continu à travers les poutrelles du rez-de-chaussée
Point 20 : absence de fourrure sous les poutrelles du rez-de-chaussée et de l’étage
[192] Les points 19 et 20 sont intimement liés de sorte que le Tribunal en dispose ensemble.
[193] Selon le témoignage de M. Paquin, le lien continu est nécessaire pour supporter la partie la plus faible des poutrelles. Quant à la fourrure de bois, elle sert de stabilisateur et est nécessaire en raison des mouvements normaux des matériaux. Il indique que le placoplâtre n’est pas un élément structurel et qu’il n’a aucune résistance.
[194] Par ailleurs, lorsqu’on lui demande si les règles de l’art exigent un lien continu ainsi que la fourrure de bois, Monsieur Paquin répond que le Code national du bâtiment constitue un minimum et que ce n’est pas parce que le Code ne l’exige pas que le fabricant, lui, ne l’exige pas.
[195] Quant à Monsieur Garcia, il indique que le Code national du bâtiment n’exige pas la présence de lien continu ni de fourrure de bois. À sa connaissance, il ne s’agit pas non plus d’une règle de l’art. Pour lui, c’est au charpentier, un professionnel, de décider du mode d’assemblage. Dans le cas actuel, le plan prévoyait des poutrelles ajourées, mais celles-ci ont été remplacées par des poutrelles en «i». Quant au lien continu, il affirme que le placoplâtre peut servir de lien continu.
[196] Certes, indique-t-il, lorsqu’on construit, on essaie de faire la meilleure construction possible. Toutefois, une construction de moindre qualité n’est pas nécessairement une
construction incorrecte. En l’espèce, il n’a vu aucune déflexion du plafond, aucune ondulation, aucun impact et aucun dommage lié à l’absence de fourrure de bois dans la maison.
[197] Des témoignages des parties, le Tribunal retient que le Code national du bâtiment n’exige pas la présence de lien continu ni de fourrure de bois. Il ne s’agit pas non plus d’une règle de l’art.
[198] Par conséquent, le Tribunal rejette ces réclamations du Bénéficiaire.
21 : absence de colle dans les étriers des poutrelles
[199] Lors de son témoignage, Monsieur Paquin a expliqué que la colle est nécessaire pour éviter des bruits au niveau du plancher. Selon son témoignage non contredit, les règles de l’art prévoient que la colle est requise. Elle l’est également selon le plan du fabricant. Par ailleurs, dans son rapport, il indique que Malheureusement, puisque le montage structurel est complété, il est maintenant impossible d’en ajouter.
[200] Monsieur Garcia, pour sa part, indique que ces informations n’étaient pas disponibles au moment de son inspection. Par ailleurs, il indique que la colle n’est pas requise en vertu du Code national du bâtiment.
[201] De la preuve entendue, le Tribunal retient que si la colle n’est pas requise par le Code national du bâtiment, elle l’est en vertu des règles de l’art. Cependant, tel qu’admis par Monsieur Paquin, il est trop tard pour ajouter de la colle et si le Tribunal acceptait cette réclamation, la sentence, sur ce point, serait non exécutable.
[202] Par conséquent, le Tribunal rejette ce point.
Point 22 : poutrelle double rallongée à l’extrémité
[203] Il s’agit de deux (2) poutrelles mises bout à bout plutôt que d’une seule poutrelle pleine longueur dans le haut de la descente d’escalier menant au sous-sol.
[204] Selon le témoignage de Monsieur Paquin, la poutrelle doit être doublée. Ici, elle est doublée, mais l’une d’elles est rallongée, ce qui porte atteinte à la solidité structurelle. Il explique qu’il est très inhabituel de jointer sur une distance de 42 pouces.
[205] Il ajoute qu’en l’espèce, il s’agit d’une malfaçon qui n’a produit aucune manifestation à ce jour. Cette même situation, dans une maison construite il y a 20 ans, ne l’inquiéterait pas puisque le temps aurait fait son œuvre et aurait démontré la solidité de la structure. Ici, son inquiétude vient du fait que nous sommes en présence d’une construction neuve.
[206] Monsieur Garcia, pour sa part, indique que lors de son inspection, il a seulement vu une photo et il n’a pas vu le joint sur la photo. Cependant, à l’audience, il explique que la poutrelle est doublée. Même si elle est jointée, elle l’est près d’un poteau et dans un endroit où il n’y a pas une charge importante. De plus, il indique qu’il n’y a aucune manifestation de cette malfaçon.
[207] Par ailleurs, selon lui, ce n’est pas tout que de parler des règles de l’art et du Code national du bâtiment. Il faut également considérer la compétence des charpentiers qui peuvent faire et proposer des choses qui fonctionnent compte tenu de leur expérience et que même un ingénieur ne pourrait pas proposer.
[208] Enfin, il confirmera qu’il y a apparence de malfaçon, mais qu’il n’est nullement inquiet puisque le jointage a eu lieu près du poteau.
[209] Le Tribunal souligne qu’il n’est pas saisi d’une question portant sur l’opportunité d’effectuer la réparation ni sur les conséquences de cette réparation, mais bien de la question de déterminer si nous sommes en présence, ou non, d’une malfaçon.
[210] Devant la preuve administrée et particulièrement l’admission de l’Administrateur, le Tribunal se doit de conclure que nous sommes en présence d’une malfaçon qui doit, selon le Règlement, être corrigée et le Tribunal accueille donc la réclamation du Bénéficiaire quant à ce point.
Point 23 : courbure de certains murs extérieurs
[211] Le Bénéficiaire se plaint que le vinyle extérieur présente des courbures.
[212] Selon le témoignage de Monsieur Paquin, nous sommes en présence d’une cage d’escalier continue en hauteur d’environ 17 pieds. À son avis, la courbure s’explique par le manque de blocage au niveau des poutrelles qui sont juxtaposées en hauteur et qui font un effet de charnière. Le type d’assemblage serait en cause.
[213] Il base son opinion et son hypothèse sur les photos que lui présente le Bénéficiaire. Pour être certain, il faudrait ouvrir le mur. Il admet qu’il s’agit d’une déduction et non d’une certitude. Pour lui, le manque de blocage est la cause probable de la courbure, laquelle apparaît graduellement et pourrait s’aggraver. Il ne peut toutefois affirmer qu’il s’agit là d’une malfaçon.
[214] Également, il ne peut indiquer au Tribunal quelles sont les règles de l’art en la matière, non plus que les normes prévues au Code national du bâtiment. Toutefois, le Code national du bâtiment est un minimum réitère-t-il et les règles de l’art, c’est souvent du gros bon sens.
[215] Quant à son rapport, il indique :
«Nous avons remarqué une courbure de certains murs extérieur (sic). Cela témoigne généralement d’un mouvement causé par le séchage d’un poteau. Cela n’affecte aucunement la solidité structurelle du mur.»
[216] Monsieur Garcia, pour sa part, indique que la courbure est présente depuis le début. Il estime qu’une courbure de ce degré n’a pas la gravité d’une malfaçon et il ne peut dire si la courbure aura des conséquences.
[217] Le Tribunal, après avoir entendu la preuve de part et d’autre, conclut que nous ne sommes pas en présence d’une malfaçon, et rejette la demande du Bénéficiaire à cet égard.
Point 25 : colonne de bois supportant la poutre principale de la cage d’escalier
[218] Les plans et devis prévoyaient un poteau en acier pour supporter la poutre principale de la cage d’escalier.
[219] Dans son témoignage, Monsieur Paquin indique que la correction appropriée serait l’ajout d’une poutre d’acier, une solution peu dispendieuse. Il témoigne à l’effet qu’il est
incapable de dire avec certitude si la capacité portante est affectée du fait de l’absence de ce poteau et il ne peut dire si le reste de la construction a compensé pour cette absence. La seule certitude est que c’est prévu aux plans.
[220] Dans son rapport, il indique :
«Nous avons la présence d’une colonne de bois supportant la poutre principale de la cage d’escalier. Le bois est un matériau pouvant être affecté par la dilatation thermique. Les mouvements causés par cette dilatation est (sic) à risque d’entraîner des dommages à la structure de l’immeuble. Afin d’assurer une meilleure stabilité et solidité à long terme, veuillez mandater un expert en charpente afin de faire la pose d’une colonne métallique à cet endroit.»
[221] Pour Monsieur Garcia qui n’a pas eu le bénéfice des plans lors de son inspection, cette information est nouvelle. Eût-il eu les plans qu’il aurait peut-être statué différemment. Par ailleurs, il ajoute qu’il n’y a aucune preuve que la capacité portante est affectée du fait de l’absence de ce poteau. De plus, il est clair que les plans n’ont pas été suivis et il s’en remet, une fois de plus, à la compétence des charpentiers. Il ajoute également que le Bénéficiaire a participé à la construction.
[222] Le Tribunal, après avoir entendu la preuve, constate qu’aucune preuve n’a été faite quant aux exigences du Code national du bâtiment ni quant aux règles de l’art.
[223] Bien que la réparation requise soit peu coûteuse, il ne s’agit pas là d’un critère d’appréciation dont le Tribunal doit tenir compte.
[224] En l’instance, aucune preuve n’a été faite démontrant une contravention aux règles de l’art ou au Code national du bâtiment.
[225] Par conséquent, le Tribunal rejette la réclamation du Bénéficiaire sur ce point.
[226] Par ailleurs, le Tribunal met en garde l’Administrateur de s’en remettre aux compétences des ouvriers dans le cadre de son analyse d’un dossier, la mission même du Plan de garantie étant de prémunir les bénéficiaires contre les malfaçons, vices cachés et vices majeurs causés, notamment, par le manque de compétence de certains ouvriers.
Point 30 : branchements de plomberie inadéquats
[227] Le Bénéficiaire se plaint d’un mauvais branchement de la plomberie au sous-sol.
[228] Selon le témoignage de Monsieur Paquin, 3 arrivées d’eau arrivent à moins de 12 pouces l’une de l’autre et le branchement sanitaire est installé à un angle de 90 degrés. De plus, les tuyaux bougent. Selon ledit témoignage, un tel branchement est inadéquat et comporte un risque de blocage, de congestion et de mauvais écoulement. Il indique au Tribunal que cette installation n’est pas conforme aux règles de l’art.
[229] Monsieur Garcia, pour sa part, indique avoir mal compris la réclamation et admet qu’il s’agit d’une malfaçon.
[230] Le Tribunal, vu le témoignage non contredit de Monsieur Paquin et l’admission de Monsieur Garcia, accueille la réclamation du Bénéficiaire sur ce point.
31 : ventilation inadéquate
[231] Le Bénéficiaire se plaint de bruits en provenance des tuyaux.
[232] Monsieur Paquin témoigne à l’effet qu’il y aurait du tirage d’air à travers le siphon et qu’il s’agit d’une malfaçon.
[233] Monsieur Garcia, pour sa part, indique revenir sur sa décision.
[234] Par conséquent, le Tribunal accueille la réclamation du Bénéficiaire à cet égard.
Point 34 : montants de 2X6 espacés de 24 po plutôt que de 16 po
[235] Monsieur Garcia témoigne disant que le Code national du bâtiment permet que les 2x6 soient espacés aux 24 pouces plutôt qu’aux 16 pouces dans le cas d’un bâtiment à 1 étage superposé et aucune exigence municipale ne vient modifier cette exigence.
[236] Monsieur Paquin, pour sa part, réitère que le Code national du bâtiment constitue un minimum. Les plans approuvés par un architecte prévoient un espacement aux 16 pouces et l’Entrepreneur ne pouvait déroger à cette exigence.
[237] Aucun des deux (2) témoins n’a fait la preuve des règles de l’art.
[238] Le témoignage de Monsieur Garcia, non contredit quant aux exigences légales prévues au Code national du bâtiment, suffit à convaincre le Tribunal que dans les circonstances particulières de ce dossier, il n’y a pas de malfaçon et par conséquent, le Tribunal rejette la réclamation du Bénéficiaire à cet égard.
Points 36, 38, 39 à 48, 50, 51 et 54
[239] Les points ci-haut mentionnés ont été refusés par l’Administrateur pour avoir été dénoncés par écrit à l’administrateur plus de six (6) mois après leur découverte. Dans les faits, ces points ont été dénoncés par écrit à l’administrateur en date du 23 mars et du 4 mai 2011.
[240] En audience, Monsieur Garcia a indiqué que lors de sa visite du 6 juillet 2010, le Bénéficiaire lui a parlé de ces problèmes.
[241] Quant aux points 42 et 44 plus précisément (espace entre les lattes du plancher et hauteur inégale des contremarches), la situation aurait été vue avant même la prise de possession de la Propriété par le Bénéficiaire.
[242] Monsieur Garcia affirme avoir dit au Bénéficiaire de tout dénoncer par écrit à l’Administrateur et à l’Entrepreneur dans les plus brefs délais pour éviter de perdre des droits. Personne n’est venu contredire cette affirmation.
[243] Toutefois, pour ce qui est des points 45, 46, 47 et 48, le rapport d’inspection de Monsieur Garcia indique que ces points ont été révélés dans le rapport d’inspection de Monsieur Paquin daté du 8 février 2011.
Point 36 : porte-fenêtre mal ajustée
Point 38 : portes et fenêtres fixées uniquement avec de l’uréthane giclé
[244] Devant le Tribunal, Monsieur Vachon indique qu’il a vu de quelle façon l’installation de la porte et des fenêtres a été faite. Il aurait, selon son témoignage, souligné à l’Entrepreneur que cela lui semblait anormal et que celui-ci lui aurait dit que c’est comme ça qu’on fait ça. Dans les circonstances, il n’en a plus reparlé. Il a toutefois pris des photos.
Point 39 : irrégularité des soffites
Point 40 : fissures et joints de scellant manquants sur le carrelage céramique
Point 41 : anneaux de chrome du robinet de douche mal installés
[245] Dans son témoignage, le Bénéficiaire admet avoir découvert lui-même le point 40. Par contre, pour le point 39, il soutient que ce serait Monsieur Paquin qui l’aurait découvert. Il soutient la même chose au sujet du point 41 tout en soutenant du même coup avoir lui-même installé le caulking à cet endroit.
Point 42 : espaces entre les lattes de plancher
[246] Le Bénéficiaire affirme que c’est Monsieur Paquin qui a découvert le point 42. Par ailleurs, il admet que c’est lui qui a informé Monsieur Paquin du fait que le plancher craque à cet endroit. De plus, il aurait indiqué à Monsieur Paquin qu’il n’y a jamais eu de dégât d’eau à cet endroit et qu’il s’agissait du plancher original.
[247] L’Entrepreneur, pour sa part, témoigne avoir remplacé le plancher à cet endroit en raison d’un dégât d’eau.
Point 43 : élasticité anormale derrière le faux limon
[248] Selon le témoignage du Bénéficiaire, cet élément a été découvert par Monsieur Paquin lors de sa visite du 8 février 2011.
[249] Monsieur Paquin témoigne qu’au jour de sa visite, le 8 février 2011, il a constaté un espace entre le mur et le faux limon. Il explique qu’il pouvait facilement faire décoller le mur du limon avec une légère pression de la main sur le placoplâtre.
Point 44 : hauteur inégale des contremarches
[250] L’Entrepreneur a témoigné à l’effet que c’est Monsieur Vachon qui coupait les marches dans le garage et qu’il lui aurait même laissé ses outils pour qu’il termine le travail entrepris.
[251] Le Bénéficiaire indique que c’est Monsieur Paquin qui aurait découvert ce point. Il ajoute qu’il n’a pas construit l’escalier et qu’il n’était présent que pour passer les outils et faire quelques coupes avec l’Entrepreneur uniquement.
Point 45 : isolant apparent et sans protection
Point 46 : jonctions entre les feuilles d’isolant non scellées
Point 47 : absence de pare-vapeur sur la solive de rive
Point 48 : absence d’isolant par endroits sur la solive de rive
Point 50 : aucun échangeur d’air n’a été installé
[252] Quant aux points 45, 46, 47, 48 et 50, le Bénéficiaire indique que c’est Monsieur Paquin qui les a découverts.
[253] Monsieur Paquin, pour sa part, témoigne que c’est le Bénéficiaire qui lui a parlé des points 48 et 50.
Point 51 : trous de clouage à obturer sur les plinthes et moulures
Point 54 : manque de finition sur l’escalier du sous-sol
[254] En ce qui concerne les points 51 et 54, le Bénéficiaire admet que c’est lui qui les a découverts et ajoute que le bois pour les marches descendant au sous-sol a été livré, mais non installé.
[255] Le procureur du Bénéficiaire, pour sa part, soutient que s’il est vrai que le Bénéficiaire a vu certains problèmes ci-haut énoncés et affectant sa Propriété le ou avant le 6 juillet 2010, il n’avait toutefois pas les connaissances requises pour affirmer avec certitude que le travail était mal fait.
[256] Selon lui, c’est avec la visite et le rapport de Monsieur Paquin du 8 février 2011 que les problèmes ont été véritablement découverts et la dénonciation a donc été faite dans le délai.
[257] Pour le procureur de l’Administrateur, ces faits ont été communiqués à l’inspecteur-conciliateur dès le 6 juillet 2010 et dénoncés quelque huit (8) mois plus tard. Cette dénonciation est donc hors délai et non recevable dans le cadre du présent recours. De plus, et quant au point
44, les travaux effectués par le Bénéficiaire sont exclus en vertu du Règlement. Il dépose devant le Tribunal la décision Gidal construction9.
[258] Après avoir analysé la preuve, le Tribunal note que tous les éléments mentionnés ci-haut sont connus du Bénéficiaire depuis au moins le 6 juillet 2010, à l’exception des points 45, 46 et 47. Cette situation inquiétait suffisamment le Bénéficiaire pour qu’il en parle à l’inspecteur-conciliateur le 6 juillet 2010. Le témoignage de Monsieur Garcia est précis sur ce point et non contredit.
[259] De plus, la liste remise par le Bénéficiaire à Monsieur Paquin le 8 février 2011 reflétant l’état de la maison au 18 janvier 2011 (pièce A-17) indique une multitude de problèmes connus par le Bénéficiaire à cette date dont notamment les points 36, 40, 42, 43, 44, 48 et 50. Le Bénéficiaire ne peut donc prétendre devant le Tribunal que ces problèmes ont été découverts par Monsieur Paquin.
[260] Quant au point 44, le Tribunal retient également, en plus du témoignage de Monsieur Garcia, le témoignage de l’Entrepreneur, qui outre ses propos concernant l’inclusion ou non du garage au contrat de construction, est apparu, contrairement à celui du Bénéficiaire, comme crédible et non exagéré. Le Tribunal est donc convaincu, selon la preuve prépondérante, que le Bénéficiaire a pris une part active dans la construction de l’escalier.
[261] Vu la preuve et la mise en garde faite par l’Administrateur au Bénéficiaire le 6 juillet 2010 et vu l’inaction du Bénéficiaire avant que ne se soit écoulé 8 mois depuis la mise en garde de l’Administrateur, le Tribunal ne peut se prévaloir de son pouvoir de statuer en équité et rejette ces réclamations du Bénéficiaire sauf à l’égard des points 45, 46 et 47 lesquels sont accueillis et ordonne à l’Administrateur de statuer sur ces points.
9 Gidal construction inc. c. Penelope Lazaris et Naoum Bourkas et La garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ, op cit. note 5.
Point 60 : structure du garage
[262] Selon l’Administrateur, la situation dénoncée porte sur des travaux qui ne font pas partie intégrante du bâtiment comme tel et exclus du Plan de garantie en vertu de l’article 4.9 du contrat de garantie (art. 12 du Règlement).
[263] Selon le Bénéficiaire, le garage n’est pas visé par l’exclusion prévue à l’article 4.9 du contrat de garantie.
[264] En effet, selon le procureur, cette disposition vise les espaces de stationnement et les locaux d’entreposage qui sont extérieurs au bâtiment. Elle viserait également les piscines, le terrassement et les trottoirs.
[265] La véritable question en l’espèce consiste, dit-il, à se demander si un garage équivaut à un espace de stationnement ou à un local d’entreposage. Me Lemire suggère qu’un local d’entreposage serait un cabanon par exemple.
[266] Pour Me Lemire, le garage fait partie du contrat et il serait trop restrictif de dire que parce qu’il est détaché du bâtiment principal que celui-ci serait exclu. «Quand ça marche comme un canard parle comme un canard et que ça ressemble à un canard, c’est un canard !»
[267] L’Administrateur, pour sa part, maintient que le point 60 a été refusé à bon droit. En effet, plaide-t-il, celui-ci est exclu en vertu de l’article 12 du Règlement. Il concède que le garage n’est ni un stationnement ni un local d’entreposage. Toutefois, il soutient que l’exclusion prévue à l’article 12 du Règlement doit être lue en conjonction avec l’article 1 du même Règlement qui traite des inclusions.
[268] Ainsi, en vertu de l’article 1 du Règlement, la garantie couvre le bâtiment lui-même, y compris les installations et les équipements nécessaires à son utilisation soit le puits artésien, les raccordements aux services municipaux ou gouvernementaux, la fosse septique et son champ d’épuration et le drain français.
[269] L’article 12, pour sa part, énonce que sont exclus les espaces de stationnement et les locaux d'entreposage situés à l'extérieur du bâtiment où se trouvent les unités résidentielles et tout ouvrage situé
à l'extérieur du bâtiment tels les piscines extérieures, le terrassement, les trottoirs, les allées et le système de drainage des eaux de surface du terrain
[270] Par ailleurs, Me Paquette dépose à l’appui de sa position les décisions Brisson c. Construction Norjo10 ainsi que Waddel c. Les constructions Jacques Laporte inc.11 Il dépose également Le règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs commentés.12
[271] Sur cette question, le Tribunal constate que le Règlement, en son article 1, prévoit spécifiquement et nommément les items qui sont couverts par la garantie. La disposition utilise le terme soit plutôt que dont ou notamment ou par exemple. La conjonction soit limite la portée du Règlement à ce qui est spécifiquement énoncé à cet article et uniquement ces éléments.
[272] L’article 12 du Règlement, pour sa part, traite des exclusions.
10 Céline Demers Brisson et Pierre Brisson c. 9141-1074 Québec inc. (Construction Norjo) et La garantie des maisons neuves de l’APCHQ inc., op cit. note 3.
11 Alexis Waddel et Marie-Ève Dubois c. Les constructions Jacques Laporte inc. et La garantie habitation du Québec inc., op cit. note 4.
12 Gilles DOYON et Serge CROCHETIÈRE, Le règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs commentés, Cowansville : Les Éditions Yvon Blais inc, 1999.
12. Sont exclus de la garantie:
[...]
2° les réparations rendues nécessaires par un comportement normal des matériaux tels les fissures et les rétrécissements;
[...]
9° les espaces de stationnement et les locaux d'entreposage situés à l'extérieur du bâtiment où se trouvent les unités résidentielles et tout ouvrage situé à l'extérieur du bâtiment tels les piscines extérieures, le terrassement, les trottoirs, les allées et le système de drainage des eaux de surface du terrain;
[...]
Toutefois, les exclusions visées aux paragraphes 2 et 5 ne s'appliquent pas si l'entrepreneur a fait défaut de se conformer aux règles de l'art ou à une norme en vigueur applicable au bâtiment.
[273] Le texte de l’article 12 ne contient aucune conjonction qui vient limiter la portée des exclusions. Par ailleurs, le verbatim de cet article englobe un large éventail de possibilités de situations potentiellement non couvertes.
[274] À ce titre, le Tribunal souscrit aux propos de l’arbitre Jean Morissette :
«Seul le bâtiment et ses équipements nécessaires à son utilisation prévue au certificat de parachèvement doivent être couverts par le plan de garantie selon l’article 10 du règlement. Les items des points 26, 27, 28, 29 et 39 de la demande d’arbitrage ne sont pas des éléments du bâtiment et ne sont pas nécessaires à son utilisation. De plus, ces éléments du contrat de construction sont spécifiquement exclus du Plan de Garantie (art. 12(9))»
[275] Pareillement, le Tribunal fait siens les propos des auteurs Doyon et Crochetière qui résument bien la situation :
«Article 1
Définition exclusive
Par ailleurs, cette définition stipule bien le bâtiment lui-même en y ajoutant des éléments spécifiquement énumérés. En outre, elle utilise le terme soit et non notamment pour désigner les éléments qui doivent être inclus à la définition.
À cet égard, la règle de droit inclusio unius est exclusio alterius (la mention de l’un équivaut à l’exclusion de l’autre) devrait trouver application. Cette règle d’interprétation énonce que la mention expresse d’un ou plusieurs éléments particuliers, dans un texte, fait présumer l’intention d’écarter les autres.
Interprétation spécifique
Par voie de conséquence, il faut conclure que seul le bâti qui abrite le ou les logements, ainsi que les seuls installations et équipements qui sont énumérés à la définition, doivent être pris en considération pour fins d’administration de la garantie réglementaire.
[...]13
13 Gilles DOYON et Serge CROCHETIÈRE, op cit. notr 12, p. 4 et 5.
[276] Sur l’article 9, ils indiquent :
II- Exclusions de la garantie
[...]
Paragraphe 9
En harmonie avec la définition de bâtiment prévue à l’article 1 du Règlement et sous réserves des installations et équipements expressément désignés à cette définition, la présente disposition vient nommément exclure de la garantie tout ouvrage, aménagement ou système situé à l’extérieur du périmètre du bâtiment.14»
14 Id., p. 66.
[277] Le Tribunal, après analyse des dispositions législatives pertinentes et des autorités soumises, constate que le garage détaché de la maison ne fait pas partie du bâtiment lui-même. De plus, il n’est pas nécessaire à l’utilisation du bâtiment.
[278] Par ailleurs, si le garage n’est ni un local d’entreposage et ni un stationnement, il se qualifie certainement d’ouvrage situé à l’extérieur du bâtiment. La conjonction tel n’est clairement pas limitative et inclus, de l’avis du Tribunal, le garage détaché du bâtiment.
[279] Par conséquent, le Tribunal rejette la réclamation du Bénéficiaire à cet égard.
Point 62 : perte de chaleur par endroits dans l’entretoit
[280] Le rapport de Monsieur Paquin du 8 février 2011 indique que l’isolant aurait été déplacé, occasionnant des pertes de chaleur.
[281] L’Administrateur considère que l’inspection n’a pas permis de faire un lien entre la situation dénoncée au point 62 et les travaux réalisés par l’entrepreneur. En effet, l’Administrateur indique que selon les constatations effectuées ainsi que les témoignages recueillis sur les lieux, l’administrateur n’est donc pas en mesure de statuer sur la responsabilité de l’entrepreneur relativement au point 62 et il rejette la réclamation du Bénéficiaire.
[282] Aucune preuve particulière n’a été administrée sur ce point.
[283] Me Lemire indique au Tribunal que l’Administrateur avait l’obligation de statuer sur ce point et qu’il ne l’a pas fait. Par conséquent, il demande au Tribunal d’accueillir la réclamation du Bénéficiaire et d’ordonner que soit installée de la laine minérale comme l’a suggéré Monsieur Paquin lors de la visite des lieux.
[284] Me Paquette n’a fait aucune représentation sur ce point.
[285] Le Tribunal constate que l’Administrateur n’a pas statué sur ce point en contravention de l’article 18 (5) du Règlement. Par ailleurs, le Tribunal d’arbitrage siégeant en appel d’une décision de l’Administrateur n’a pas le pouvoir de se substituer à l’Administrateur pour rendre une décision qui relève de sa prérogative.
[286] Par conséquent, le Tribunal accueille la réclamation du Bénéficiaire sur ce point et ordonne à l’Administrateur de statuer sur cette demande.
Point 64 : Demande de remboursement - rapport d’inspection du 8 février 2011
[287] Concernant le point 64, l’Administrateur indique : nous sommes en présence d’une demande pour laquelle l’administrateur n’a pas juridiction, la garantie couvrant le parachèvement, les malfaçons, les vices cachés et les vices majeurs. Par conséquent, l’Administrateur rejette la réclamation.
[288] Après étude du Règlement, rien dans celui-ci ne permet à l’Administrateur de donner suite à une demande de remboursement d’un rapport d’inspection. C’est l’arbitre qui a juridiction en la matière et c’est à l’arbitre que le Bénéficiaire devait faire cette demande en vertu de l’article 22 du Règlement.
[289] Or, en début d’audience, l’arbitre soussignée et les parties ont tenu une conférence préparatoire afin d’assurer le bon déroulement de l’audience. L’arbitre soussignée a précisément indiqué aux parties qu’elle souhaitait les entendre sur les frais. Cependant, aucune des parties n’a fait quelque représentation que ce soit à ce sujet.
[290] Par conséquent, le Tribunal rejette cette demande du Bénéficiaire.
Décision numéro 2 :
Point 67 et 68 : Mauvaise installation du déclin de vinyle et pastilles de chrome qui ne sont pas appuyés contre la céramique
[291] En ce qui concerne les points 67 et 68, l’Administrateur indique ne pas avoir été en mesure d’identifier quelque malfaçon que ce soit relativement aux situations dénoncées par le Bénéficiaire.
[292] D’emblée, il appert qu’une erreur cléricale se soit glissée. Le point 68 est identique au point 41 dont le Tribunal a disposé ci-dessus. Par conséquent, les mêmes conclusions s’imposent.
[293] Quant au point 67, la dénonciation couvre à la fois le déclin de vinyle installé sur la maison que celui installé sur le garage.
[294] Le garage n’étant pas couvert par la garantie, le Tribunal n’a dons pas à disposer du présent point à l’égard du garage.
[295] En ce qui concerne la maison, la décision de l’Administrateur indique que les courbures dénoncées ont été découvertes par Monsieur Paquin lors de sa visite du 8 février 2011.
[296] Lors de son témoignage, le Bénéficiaire a indiqué qu’il a vu les courbures sur la maison à la fin 2010 alors que les entrepreneurs envoyés par l’Administrateur pour effectuer des travaux les lui ont fait remarquer. Par ailleurs, c’est le rapport de Monsieur Paquin qui lui a dit que cela constituait une malfaçon. Il trouvait que c’était inesthétique, mais ignorait que c’était une malfaçon.
[297] Dans son rapport, Monsieur Paquin indique que le déclin n’a pas été posé selon les règles de l’art.
[298] Devant la preuve offerte, le Tribunal estime que la preuve est prépondérante selon laquelle il s’agit d’une malfaçon et par conséquent, accueille la réclamation du Bénéficiaire sur ce point.
Point 70 : Raccordement du drain français à la fosse de retenue - traité au point 7 de la décision émise le 13 septembre 2010 dans le cadre de la plainte 1
[299] L’Administrateur rejette ce point au motif qu’une transaction serait intervenue entre les parties et pour laquelle l’Administrateur a déjà versé une compensation de 1 250 $ le 17 janvier 2012.
[300] En effet, selon l’Administrateur, ce point a fait l’objet d’une réclamation, laquelle a été acceptée par l’Administrateur dans sa décision du 13 septembre 2010. Toutefois, à la suite de la décision émise par l’Administrateur, des travaux de mise aux normes ont été proposés au Bénéficiaire afin de corriger l’installation déficiente. Or, au moment des travaux, le Bénéficiaire a cependant convenu d’une entente monétaire au montant de 1 250 $ afin de gérer lui-même ces travaux et une quittance a été signée le 9 février 2012.
[301] La question devant le Tribunal est celle de savoir si la nouvelle réclamation du Bénéficiaire est couverte par la quittance.
[302] La réclamation du Bénéficiaire du 3 juin 2010 est la suivante : La pompe submersible n’est pas raccordée au drain extérieur (URGENT) (pièce B-2).
[303] Toutefois, comme résumée par l’Administrateur dans sa décision du 13 septembre 2010, elle se lit comme suit :
«7. Pompe submersible n’est pas raccordée au drain extérieur
Le bénéficiaire dénonce que la pompe submersible se déverse dans la pompe de la fosse septique.»
[304] La réclamation du Bénéficiaire du 23 mars 2011 eu égard à la pompe submersible et qui fait suite au rapport de Monsieur Paquin du 8 février 2011 se lit comme suit :
«Expertise recommandée
La présence d’un drain français ne peut être confirmer grâce à une vérification visuelle. Cependant, ce que nous pouvons observer lors d’une inspection est l’embout généralement situé dans la fosse de retenue. Cet embout canalise l’eau recueilli par le drain français et la dirige à l’intérieur de la fosse. Ensuite, la pompe expulse l’eau à l’extérieur. En ce qui concerne ce bâtiment, la
présence de l’embout n’a pas été observée dans la fosse de retenue. L’ensemble de l’installation de la fosse de retenue ne rencontre pas les normes en vigueur et présente plusieurs irrégularités pour la plupart étant majeur. Un plombier qualifié doit être consulté pour vérifier la conformité de cette installation et afin d’apporter tous les correctifs nécessaires. (sic)» (pièce A-5)
[305] En plaidoirie, Me Lemire indique que la réclamation au point 70 est constituée du passage de la pièce A-5 récité ci-dessus ainsi que du point 3 d)i) de la pièce A-6, soit : l’ensemble de l’installation de la fosse de retenue n’est pas conforme aux normes en vigueur et présente plusieurs irrégularités.
[306] Pour sa part, la quittance se lit ainsi :
«[...]
ATTENDU QUE les Bénéficiaires et l’Administrateur ont convenu de disposer de la réclamation des Bénéficiaires relative au point 7 de la Décision, libellé «Pompe submersible n’est pas raccordée au drain extérieur» (ci-après la «Réclamation»), par le versement d’une somme d’argent, tel que plus amplement détaillé ci-après (sic.);
À CES CAUSES, APRÈS DISCUSSION ET NÉGOCIATION, LES BÉNÉFICIAIRES CONVIENNENT ET ACCEPTENT CE QUI SUIT :
[...]
En considération de ce qui précède, les Bénéficiaires donnent à l’Administrateur une quittance complète et finale à l’égard de toute demande reliée directement ou indirectement à la Réclamation;
[...]»
[307] Pour le Bénéficiaire, le point 70 de la décision sous arbitrage n’est pas l’équivalent du point 7 de la décision du 6 juillet 2010. Pour le Bénéficiaire, le point 7 de la décision du 13 septembre 2010 visait le raccordement de la pompe submersible à la fosse de retenue des eaux usées (fosse septique), alors que la réclamation faisant l’objet du point 70 vise le raccordement de la pompe submersible au drain français.
[308] Lorsqu’on lui demande s’il a été informé du fait que le drain français est mécaniquement relié au fossé, il confirme que oui. Il ajoute l’avoir dit à l’expert qui, à son tour, lui aurait répondu que c’était correct, pourvu que le drain français soit raccordé à la fosse de retenue.
[309] Monsieur Paquin, pour sa part, indique que le point 7 de la décision du 13 septembre 2010 visait l’évacuation des eaux usées à l’extérieur de la maison.
[310] Il explique que la maison est entourée d’un drain français. Les eaux de pluie captées dans le drain français s’évacuent naturellement, par gravité, vers le fossé, vu le raccordement à l’aide d’un tuyau de 4 pouces. Advenant que le drain soit bouché par de la boue, de la glace ou d'autres substances, l’installation actuelle ne permettra pas le déversement dans la fosse de retenue, faute d’être raccordée à celle-ci.
[311] En contre-interrogatoire, Monsieur Paquin indique qu’au moment de son inspection, il ignorait que le drain français était raccordé au fossé. Lorsqu’on lui demande en quoi la fosse de retenue n'est pas conforme aux normes en vigueur, il dit que c’est parce qu’elle ne reçoit aucune eau. Il dit ignorer les dispositions du Code national du bâtiment qui sont applicables en l’espèce.
[312] De plus, il ignore si le raccordement à la fosse de retenue est nécessaire lorsque le drain se déverse directement, par gravité, dans le fossé. Il ignore également quel Code national du bâtiment s’applique! Il se peut, dit-il, que le Code n’ait aucune exigence de raccorder le drain français à la fosse de retenue dans ces cas-là. Par ailleurs, il rappelle que le Code national du bâtiment contient des exigences minimales. Il veut à tout prix éviter qu’en cas de blocage du drain, qu’il y ait une pression hydrostatique sur la maison.
[313] L’Entrepreneur explique au Tribunal qu’à St-Lin, les manques d’électricité sont fréquents d’où la nécessité de raccorder dès le départ le drain français à la pompe submersible de manière à éviter des infiltrations d’eau.
[314] Dans le cas actuel, la dalle du sous-sol de la maison s’avère être plus haute que le niveau de la rue. Alors que le drain français est généralement connecté directement à la pompe submersible, ici, elle est connectée non pas à la pompe, mais à un tuyau de 4 pouces qui descend
graduellement vers le fossé, voisin de la rue. Selon lui, le raccord du drain à la pompe submersible n’était pas nécessaire.
[315] Monsieur Garcia, pour sa part, explique que lors de sa première visite, le Bénéficiaire avait dénoncé que la pompe submersible n’était pas raccordée au drain extérieur, mais que dans les faits, c’est d’une toute autre chose qu’il lui a parlé. De plus, suivant le témoignage de Monsieur Demuy, il constate que la maison est surélevée et que le raccordement au fossé est plus qu’adéquat vu l’écoulement naturel des eaux. Il affirme qu’il n’y a aucune exigence municipale ni aucun Code qui prévoit la nécessité d’un drain français. Il ajoute qu’il ne comprend toujours pas la nature de la plainte du Bénéficiaire. Enfin, il conclut en disant que ce point n’aurait jamais dû être accordé.
[316] Me Paquette, procureur de l’Administrateur, plaide que le problème a été dénoncé par Me Parker, alors procureur du Bénéficiaire, et qu’il s’agit du point 7 de la décision du 13 septembre 2010. Une lecture attentive du libellé de la dénonciation contenue au rapport d’expertise déposé sous la cote A-5 («présence d’embout non observée dans fosse de retenue») et de la quittance signée par les parties vise nécessairement le drain extérieur. La quittance, selon lui, est rédigée de façon claire.
[317] De plus, il souligne que lors de l’inspection par Monsieur Paquin, celui-ci n’a pas considéré le fait que le drain extérieur puisse être connecté directement sur la fosse extérieure. Dans le dossier actuel, la Propriété est surélevée par rapport au niveau de la rue et bien qu’il ne soit pas habituel d’avoir un drain qui se déverse dans le fossé, l’installation ne contrevient pas à la norme et elle est même souhaitable puisqu’elle éloigne l’eau du bâtiment.
[318] À ce jour, il n’y a eu aucune infiltration d’eau et il n’est pas nécessaire de raccorder le drain pour pomper l’eau en cas de blocage. Rien n’exige d’avoir un système de «backup». S’il y a toujours moyen d’envisager mieux, l’obligation de l’Entrepreneur est de construire une maison conforme aux normes et aux règles de l’art.
[319] Le premier constat que le Tribunal fait est que le libellé des deux (2) réclamations est semblable : Pompe submersible n’est pas raccordée au drain extérieur pour la première
réclamation et Raccordement du drain français à la fosse de retenue pour la deuxième. Le drain extérieur étant le drain français et la fosse de retenue étant le trou dans lequel la pompe submersible baigne.
[320] Donc, à première vue, le Bénéficiaire semble réclamer de nouveau le raccordement du drain français à la pompe submersible ou vice versa.
[321] Toutefois, le Tribunal ne peut s’en tenir au seul libellé de la réclamation. Le Tribunal observe que le problème dénoncé par le Bénéficiaire dans la lettre du 8 mai 2010 et ayant mené à la décision du 13 septembre 2010 et celui rapporté dans la décision du 13 septembre 2010 n’est pas au même effet.
[322] Il apparaît clair au Tribunal que c’est la dénonciation du Bénéficiaire qui doit prévaloir et non celle rapportée et comprise par l’inspecteur-conciliateur. D’ailleurs, dans son témoignage, Monsieur Garcia nous dira ne pas trop avoir compris la dénonciation du Bénéficiaire.
[323] Le Tribunal prend toutefois note de l’indication suivante comprise dans la dénonciation du 23 mars 2012 soit; l’ensemble de l’installation de la fosse de retenue ne rencontre pas les normes en vigueur et présente plusieurs irrégularités pour la plupart étant majeures. Le Tribunal ne peut ignorer cette partie de la réclamation.
[324] Par conséquent, le Tribunal conclut que la réclamation décrite au point 70 de la décision du 4 juillet 2012 et la réclamation du Bénéficiaire décrite au point 7 de la décision du 13 septembre 2010 ne sont pas exactement les mêmes. Par conséquent, le Tribunal accueille la réclamation du Bénéficiaire sur ce point et ordonne à l’Administrateur de statuer sur la conformité de l’ensemble de l’installation de la fosse de retenue, à l’exclusion du raccordement de la fosse de retenue au drain français.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL D’ARBITRAGE :
ACCUEILLE en partie la demande d’arbitrage du Bénéficiaire;
ORDONNE à l’Entrepreneur d’effectuer les travaux correctifs quant aux points 22, 30, 31 et 67 conformément au Code national du bâtiment et aux règles de l’art d’ici trente (30) jours ou dans tout autre délai dont les parties pourront convenir;
À DÉFAUT par l’Entrepreneur de corriger la situation dans le délai susdit, ORDONNE à l’Administrateur de procéder aux travaux correctifs nécessaires en conformité avec le Règlement;
ORDONNE à l’Administrateur de statuer sur les points 45, 46, 47 et 62 d’ici trente (30) jours;
ORDONNE à l’Administrateur de statuer sur le point 70 portant sur la conformité de l’ensemble de l’installation de la fosse de retenue, à l’exclusion du raccordement de la fosse de retenue au drain français d’ici trente (30) jours;
REJETTE la réclamation du Bénéficiaire portant sur les points 17, 18, 19, 20, 21, 23, 25, 34, 36, 38 à 44, 48, 50, 51, 54, 60, 64 et 68;
DONNE ACTE aux parties du désistement du Bénéficiaire à l’égard des points suivants : 24, 26, 27, 28, 29, 32, 33, 35, 37, 49, 52, 53, 55, 56, 57, 58, 59 et 61;
ORDONNE que le coût du présent arbitrage soit défrayé par l’Administrateur conformément à l’article 123 du Règlement.
Montréal, ce 22 avril 2013
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__________________________________ Me Karine Poulin, arbitre
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Karine Poulin avocate inc.
G1115-5
S/A 106