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Canada                                                                  Centre canadien d’arbitrage commercial

Province de Québec                                               C.C.A.C.

No. S06-0204-NP

 

                                                                              9143-2195 Québec Inc.

                                                                              1516 rue Pamphile-Lemay

                                                                              Cap-Rouge (Québec)

                                                                              G1Y 3C2

                                                                              Représentant : M. Pierre Bonneau

                                                                              Procureur : Me Normand Gagnon

                                                                              Demanderesse

 

                                                                              c.

 

                                                                              La Garantie des Maîtres Bâtisseurs Inc.

                                                                              4970 Place de la Savane, bureau 101

                                                                              Montréal (Québec)

                                                                              H4P 1Z6

                                                                              Représentant : M. Jasmin Girard P.D.G.

                                                                              Défenderesse

 

 

 

 

 

SOMMAIRE DES ÉVÈNEMENTS ET DE L’OBJET DU LITIGE

La compagnie 9143-2195 Québec Inc. (ci-après la Demanderesse) a fait une demande d’adhésion le 23 novembre 2005 au plan de Garantie des Maîtres Bâtisseurs Inc. (ci-après la Défenderesse) pour obtenir une accréditation dans les sous-catégories :

            3031- Résidentiel - Bâtiment non détenu en copropriété divisé;

            3032- Condominium - Bâtiment détenu en copropriété divisé.

Le 26 janvier 2006, la Défenderesse avisait par lettre la Demanderesse que sa demande d’accréditation était refusée car ladite demande ne rencontrait pas ses critères de sélection.

Le 9 février 2006, le Procureur de la Demanderesse demandait des précisions sur « ses critères de sélection » alléguant :  « il nous est très difficile d’analyser et de conseiller notre cliente puisque vous omettez d’énumérer et de fournir le détail des critères applicables, de même que vous omettez de préciser en quoi notre cliente ne rencontre pas lesdits critères ».

Devant l’absence de réponse de la Défenderesse, le Procureur, dans une lettre adressée au Centre canadien d’arbitrage commercial (C.C.A.C.), contestait en ces termes ce refus :

« Vu l’absence de motifs réels pour un tel refus, le défaut de dénoncer les critères de sélection à notre cliente et de surcroît lequel ou lesquels n’auraient pas été rencontrés, nous considérons un tel refus comme illégal et contraire aux lois et règlements »;

et demandait l’arbitrage devant un arbitre accrédité auprès du C.C.A.C..

Le 3 mars 2006, les parties consentaient à ce que le sous-signé agisse à titre d’arbitre dans le présent dossier; et le 9 mars 2006, l’arbitre était saisi du dossier.

 

AUDITON

Les parties s’étant entendu pour que l’audition ait lieu le 21 mars 2006 sujet aux disponibilités du tribunal d’arbitrage, ce dernier leur a confirmé le 14 mars 2006 sa disponibilité et le lieu de l’audition au Palais de Justice de Québec.

Lors de son témoignage, le représentant de la Défenderesse dépose le formulaire de demande d’adhésion rempli par la Demanderesse. Pour ce qui est des critères de sélection comme tel, il indique qu'ils font partie intégrante du formulaire de demande d'adhésion. Un ensemble complet de tous les documents requis pour déposer une demande a été fourni à la Demanderesse.

Dans son témoignage, le représentant de la Demanderesse indique qu’il avait en premier lieu formulé une demande d’accréditation auprès de la Garantie Qualité Habitation (A.C.Q.), mais qu’à la suite de pourparlers et de plusieurs échanges téléphoniques avec des représentants de la Défenderesse, il avait arrêté ses démarches auprès de La Garantie Qualité Habitation, et fait une demande d’adhésion auprès de la Défenderesse sur le formulaire que cette dernière lui avait transmis.

Le représentant de la Défenderesse ne conteste pas ces affirmations à l’effet qu’il l’ait contacté à quelques reprises. Il confirme aussi qu’il n’y avait pas de frais d'adhésion à payer et que les documents nécessaires à la demande ont été transmis rapidement.

Le formulaire de demande d’adhésion a été signé le 22 novembre 2005 et reçu par la Défenderesse le lendemain, soit le 23 novembre.

Un ou une employée de la Défenderesse aurait donné vers le 15 décembre 2005 un avis verbal à la Demanderesse à l’effet que sa demande d’accréditation serait refusée. La lettre du 26 janvier 2006 confirmait ce refus.

Le représentant de la Défenderesse, dans le but d'expliquer au Tribunal d’arbitrage les critères de sélection qui doivent être rencontrés pour être accrédité, dépose l'ensemble des documents qui sont transmis à toute entreprise qui désire adhérer à leur plan de garantie.

Le procureur de la Demanderesse s’objecte au dépôt de ces documents parce que la Défenderesse n’en a jamais fait mention et selon lui, ces critères n’existent pas.

Le Tribunal arbitral prend acte de l’objection du Procureur mais ne la retient pas car cela viendrait à toute fin pratique priver la Défenderesse de son droit de se faire entendre et d’expliquer les raisons qui ont motivé son refus d’accréditation.

Pour le représentant de la Demanderesse, les critères de sélection sont clairement indiqués sur le formulaire de demande d’adhésion qui comporte trois parties :

La partie 1.0 intitulée « Adhésion d’un entrepreneur » reproduit l’ensemble des éléments des articles 78-79-81-82-83 de la section I du chapitre IV du règlement sur le Plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs adopté par la Régie du Bâtiment du Québec (R.B.Q.) en vertu de la Loi sur le bâtiment (ci-après le Règlement).

La partie 2.0 intitulée « Critères à respecter » reproduit quant à lui les articles 84 et 85 du règlement.

La partie 3.0 intitulée « Formulaire demande d’adhésion » en plus d’indiquer les catégories pour lesquelles le demandeur désire adhérer (3.1) comporte des demandes d’informations générales sur l’entrepreneur (3.2), des informations sur les propriétaires (3.3) et à l’élément 3.10 les signatures des demandeurs.

Le représentant de la Défenderesse dépose au Tribunal d’arbitrage les états financiers de l'entreprise produits en date du 12 janvier 2005 par une firme comptable.  Selon ces états financiers, la valeur réelle nette est de 1 000$.

Le représentant de la Défenderesse mentionne que pour le bilan personnel de M. Bonneau, lequel possède 10% des parts de l’entreprise, la valeur du matériel roulant a été ramenée à 50% de la valeur indiquée, soit 12 500$ au lieu de           25 000$, ce qui donne, avec un montant en banque de 2 700$, une valeur nette de15 200$ en date du 21 novembre 2005.

Quant au bilan personnel de l’autre actionnaire, M. Henri Gagnon qui a cosigné la demande d’adhésion et qui possédait à ce moment 90% des parts de l’entreprise, la valeur nette de son bilan personnel a été ramenée de 98 500$ à 3 000$ car la résidence qui composait la majeure partie de la valeur nette indiquée est inscrite au nom de l’épouse de M. Gagnon.

Un rapport du consommateur de la firme Équifax mentionne qu’il y a un jugement de faillite concernant M. Bonneau mais que la décision rendue est inconnue. Le représentant de la Défenderesse mentionne que sur le formulaire de demande d’adhésion dans la section 3.3, M. Bonneau n’avait pas fourni d’information à ce sujet et que la case à la question : « cet individu a-t-il déjà fait une faillite personnelle? Si oui, joindre le document de libération » aurait dû être cochée. Il attire l’attention sur le fait que le rapport d’Équifax n’indique aucune marge de crédit pour M. Bonneau.

En ce qui concerne l’actionnaire majoritaire, M. Henri Gagnon, le rapport mentionne qu’il détient des marges de crédit auprès de plusieurs institutions pour un total de 35 283$ et que 57%, soit 20 209$ sont utilisés en date du 15 décembre 2005.

Un plumitif civil concernant la compagnie 9115-5085 Québec Inc., dont M. Bonneau serait l’actionnaire principal, est également déposé par la Défenderesse et fait état de plusieurs requêtes en cour civile par différents demandeurs entre décembre 2002 et février 2005 tant contre ladite compagnie que contre M. Pierre Bonneau.

La défenderesse dépose au Tribunal arbitral un plumitif criminel et pénal concernant M. Bonneau pour différentes infractions qui seraient survenues dans les années 1999-2000-2001-2002.

Elle dépose également la télécopie d’un document qui a été transmise par M. Bonneau le 12 décembre 2005 confirmant que deux maisons sont en construction à cette date sur la rue Brière à Donnaconna. Les certifications d’implantation des deux constructions y sont joints de même qu’un certificat d’autorisation de réparation émise par la Ville de Donnaconna le 2 novembre 2005.

Le représentant de la Défenderesse termine son témoignage en indiquant que la décision de ne pas donner suite à la demande d’accréditation de la Demanderesse est justifiée pour les raisons suivantes :

1)     Capitalisation insuffisante pour une compagnie qui indique vouloir construire durant les douze (12) prochains mois vingt (20) maisons unifamiliales et dix (10) bâtiments multifamiliaux.

2)     La valeur nette de la compagnie 9143-2195 Québec Inc. était de 1 000$ le 12 janvier 2005 et rien ne laisse croire que cette valeur  s’était bonifiée en date du 22 novembre 2005.

3)     La valeur nette des actionnaires est inférieure à 20 000$ (15 200$ pour M. Bonneau et 3 000$ pour M. Gagnon).

4)     Les actionnaires et la compagnie ne pourraient atteindre le montant de cautionnement de 35 000$ exigé à l’article 84 du Règlement.

5)     Les travaux de construction de deux maisons avaient débuté alors que la compagnie n’avait pas été accréditée à un plan de garantie et sans avoir la licence requise de la R.B.Q.

6)     Les Demandeurs ne pouvaient ignorer les conditions requises.

7)     Aucun document n’indique que M. Bonneau a été libéré de sa faillite personnelle.

8)     Il manquait beaucoup d’informations.

Dans son plaidoyer, le Procureur de la Demanderesse Me Gagnon indique que la compagnie a maintenant 35 000$ en banque.

·  Que les contrats de construction sont exécutés depuis le début par les Constructions H.G.B. Inc. détenteur d’une licence de la R.B.Q.

·  Que M. Henri Gagnon auparavant actionnaire à 90% de la compagnie s’est retiré de celle-ci et que c’est M. Lucien Robert, présent à l’audition, qui est maintenant le principal actionnaire de la compagnie dans une proportion de 75%, M. Bonneau détenant l’autre 25%. Selon le témoignage de M. Robert, il aurait avancé près de 57 000$ à la compagnie depuis janvier 2006.

·  Que l’autre compagnie de M. Bonneau, soit 9115-5085 Québec Inc. a un actif actuel de 76 000$ et un capital de 100 000$ en date de ce jour.

Le Procureur de la Demanderesse termine son plaidoyer en alléguant que la Défenderesse en faisant son offre ou pollicitation envers son client pour qu’elle adhère à son plan de garantie, avait l’obligation de lui donner son accréditation car à partir du moment où son client acceptait les conditions pour adhérer au plan il s’agissait selon Me Gagnon d’un contrat d’adhésion.

À cet effet, Me Gagnon dépose au Tribunal arbitral divers documents émanant de la doctrine ou de la jurisprudence concernant les contrats d’adhésion.

 

 

DÉCISION ARBITRALE

Selon le Procureur de la Demanderesse, si la Défenderesse n’a pas fournit les critères de sélection tel que demandé dans la lettre du 9 février c’est parce que ces critères n’existaient pas. Le Tribunal arbitral ne partage pas cette opinion. Le document intitulé « Demande d’adhésion » déposé en preuve par la Défenderesse énumère les conditions à remplir pour adhérer au plan de garantie et obtenir une accréditation auprès de la Défenderesse. Ces conditions sont une reproduction presque conforme des articles 78 et suivants de la section I du chapitre IV du Règlement sur le plan de garantie. Nous reproduirons ci-après les plus importantes :

78. Pour adhérer à un plan de garantie et obtenir un certificat d'accréditation, une personne doit :

1.        remplir une demande d'adhésion sur la formule fournie par l'administrateur et la remettre à l'administrateur;

2.        satisfaire aux conditions et aux critères financiers prescrits par la présente section;

3.        signer la convention d'adhésion fournie par l'administrateur et comportant les engagements énumérés à l'annexe II;

4.        détenir un cautionnement de 20 000$ contre la fraude, la malversation et le détournement de fonds;

5.        soumettre des états financiers complets vérifiés ou accompagnés d'un rapport de mission d'examen, rédigés par un comptable. Ces états devront être datés et signés par une personne en autorité. De plus, les états financiers ne doivent pas être datés de plus de 4 mois suivant la fin de l'année financière de l'entreprise;

6.        produire un attestation suivant laquelle les actionnaires dirigeants et répondants ont été libérés de toute faillite personnelle ou qu’ils n’ont pas été impliqués dans une faillite d’entreprise de construction depuis au moins 3 ans;

7.        produire le bilan personnel dûment rempli, daté et signé de chacun des dirigeants, actionnaires, répondants et associés;

8.        déclarer l'ensemble de ses engagements envers des tiers et des compagnies affiliées ou autres tels l'hypothèque légale et le cautionnement envers des tiers;

9.        produire une copie certifiée conforme de l'acte constitutif de son entreprise;

10.     verser les frais d'adhésion exigés par l'administrateur;

11.     produire une attestation suivant laquelle elle a demandé une licence d'entrepreneur auprès de la Régie.

80. L'administrateur délivre un certificat d'accréditation si les conditions prescrites par le présent  chapitre sont remplies.

 

Et l’article 84 qui énumère les conditions générales d’adhésion pour tous les bâtiments pour une entreprise travaillant partiellement ou exclusivement dans le domaine de la construction de bâtiments résidentiels depuis moins de quatre ans.

84. Cette entreprise doit :

1.        détenir un cautionnement d'une valeur minimum de 35 000$ sous l'une ou l'autre des formes suivantes :

a)       cautionnement personnel;

b)       lettre de garantie bancaire;

c)       garantie hypothécaire;

d)      cautionnement d'une tierce personne;

2.        respecter, lorsqu'il est possible de les calculer, les critères financiers suivants :

a)       ratio du fonds de roulement                                                    1,15;

b)       ratio d'endettement                                                                   80%;

c)       valeur nette (10% du chiffre d'affaires)                                 10%;

d)       bénéfice brut                                                                             18%;

e)       bénéfice net                                                                               5%.

Tous ces critères financiers doivent être calculés selon une moyenne des 3 dernières années.

L'administrateur peut exiger des états financiers intérimaires lorsqu'il a des raisons de croire que la solvabilité de l'entreprise est compromise.

Lorsqu'une entreprise possède des compagnies liées ou affiliées, l'administrateur peut exiger un bilan consolidé ou les états financiers de chacune des compagnies.

Dans la présente sous-section, les critères financiers ont le sens que leur donne le Dictionnaire de la comptabilité et de la gestion financière, L. Ménard et al., Institut Canadien des Comptables Agréés, Ordre des experts comptables - France, Institut des Réviseurs d'Entreprises - Belgique, 1994.

 

C’est à partir de ces éléments que la Défenderesse a fait l’analyse des documents et informations qui lui ont été transmis. Elle en est arrivée à la conclusion qu’elle ne pouvait donner suite à la demande d’accréditation pour les raisons qu’elle a précédemment énumérées.

Lors de son plaidoyer, Me Gagnon a allégué que la Défenderesse, à partir du moment où elle a reçu le document intitulé « Demande d’adhésion », se devait d’accréditer sa cliente. À son avis comme il y avait eu de la part de la Défenderesse une offre ou pollicitation pour que sa cliente adhère à son plan de garantie, sa cliente en signant et retournant le document le 23 novembre 2005, il y avait contrat d’adhésion ; son accréditation devenant une formalité.

Le Tribunal d’arbitral a soigneusement pris connaissance des documents déposés et diffère d’opinion à ce sujet.

 

Selon l’article 1379 du code civil :

« Le contrat est d’adhésion lorsque les stipulations essentielles qu’il comporte ont été imposées par l’une des parties ou rédigées par elle, pour son compte ou suivant ses instructions et qu’elles ne pouvaient être librement discutées.

Tout contrat qui n’est pas d’adhésion est de gré à gré ».

Dans les extraits du livre sur « Les obligations » du professeur Pierre-Gabriel Jobin écrit en collaboration avec la professeure Nathalie Vézina que Me Gagnon a soumis au Tribunal d'arbitrage les auteurs aux pages 84 et 85 posent la question suivante : " Le contrat réglementé est-il un contrat d'adhésion? Dans ce type de contrat, les stipulations ne sont pas imposées par l'une des parties, mais par le législateur ou le gouvernement, c'est-à-dire par une loi ou un règlement. La jurisprudence ajoutent-ils est divisé sur cette question : plusieurs décisions ont fait du contrat réglementé un contrat d'adhésion, d'autres, pas. Ils continuent en ces termes : En principe, à notre avis, le contrat réglementé ne correspond pas à la nouvelle définition légale du contrat d'adhésion parce que les stipulations essentielles n'ont pas été imposées par une partie, ni rédigées par elle pour son compte ou suivant ses instructions selon les termes de l'article 1379 du code civil. Et ils ajoutent « d’ailleurs le besoin de protéger la partie faible disparaît justement du fait que l’État a dicté les termes de la convention pour la protéger ». Et ils continuent : « on voit cependant que lorsque l’État est à la fois rédacteur de la convention et partie à celle-ci, il est parfaitement concevable que le contrat en soit un d’adhésion avec toutes les conséquences qui en découlent : exceptionnellement, le contrat réglementé devient alors un contrat d’adhésion ».

Les auteurs parlent de la partie faible. Qui est  la partie faible dans le Règlement sur le plan de garantie? Selon l'esprit du Règlement, la partie faible que le législateur veut protéger c’est le consommateur qu’il dénomme « bénéficiaire ».

L’article 6 du règlement s'énonce comme suit : 

« Toute personne qui désire devenir un entrepreneur en bâtiments résidentiels neufs visés à l’article 2 doit adhérer conformément aux dispositions de la section I du chapitre IV à un plan qui garantit l’exécution des obligations légales et contractuelles prévues à l’article 7 et résultant d’un contrat conclu avec le bénéficiaire ».

En ce qui concerne l’offre ou pollicitation qui a été faite par la Défenderesse, le Tribunal arbitral diffère également d’opinion avec le Procureur de la Demanderesse quant aux suites directes en découlant.

Toujours en référence aux extraits du livre sur « Les obligations », les auteurs Jobin et Vézina parlent de l’offre et de l’acceptation (pages 252-253). Selon eux, « l’échange des consentements se fait en général au moyen d’une double opération ». Dans un premier temps, une des parties fait une offre de contracter, c’est-à-dire se déclare prête à s’obliger sur certaines choses et à certaines conditions. Dans un deuxième temps, l’autre partie décide d’accepter l’offre et son acceptation suffit un principe à former le contrat et à lier les parties. La rencontre des deux volontés sur les éléments essentiels donne donc naissance au contrat sauf naturellement dans l’hypothèse où la loi exige un élément supplémentaire à sa validité comme par exemple le respect de certaines formalités.

Les auteurs Jobin et Vézina donnent la définition suivante de l’offre : « l’offre ou pollicitation est un acte extériorisé et unilatéral de volonté comprenant tous les éléments essentiels du futur contrat émanant de la personne qui prend l’initiative du contrat, acte qui en détermine le contenu ou qui représente à l’approbation de l’autre le dernier élément essentiel à celui-ci. La négociation d’un contrat peut en effet se faire en plusieurs étapes et comporter une séries d’offres et de contre offres. Dans ce cas, l’offre qui permet la conclusion de l’engagement est celle qui la dernière dans le temps contient le dernier élément essentiel à être accepté purement et simplement par le pollicité ».

La Défenderesse a fait à la Demanderesse une offre de « Demande d’adhésion » qui comporte plusieurs conditions que l’entrepreneur doit rencontrer pour être invité à signer la convention d’adhésion comportant les engagements de l’entrepreneur. Les conditions que l’entrepreneur doit rencontrer sont dictées par le Législateur qui a laissé à l’administrateur du plan, en l’occurrence la Défenderesse, le soin d’évaluer si l’entrepreneur qui fait une demande d’adhésion les remplit de façon satisfaisante.

La loi sur le bâtiment et en particulier le règlement sur la qualification professionnelle des entrepreneurs en construction prévoit que nul ne peut exercer les fonctions d'entrepreneur en construction s'il ne détient la licence appropriée.  Pour les bâtiments résidentiels, il s'agit des sous-catégories 3031-3032.

Pour obtenir une licence, une personne physique doit démontrer à la suite d'examens ou de tout autre moyen que la Régie du bâtiment juge approprié, qu'elle possède les connaissances et l'expérience requise dans la gestion d'une entreprise en construction et dans l'exécution de travaux de construction de façon à avoir la confiance du public.

Depuis janvier 1999, pour devenir entrepreneur en bâtiments résidentiels neufs, il faut adhérer à un plan qui garantit l'exécution des obligations légales et contractuelles de l'entrepreneur (article 6 du Règlement sur le plan de garantie).

Pour obtenir une accréditation, l'entrepreneur doit s'adresser à un administrateur de plan de garantie autorisé par la Régie du bâtiment (article 41 du règlement).  L'administrateur du plan de garantie est substitué à la Régie du bâtiment pour évaluer la solvabilité de l'entrepreneur.

Les conditions prévues aux articles 78 et suivantes du Règlement doivent être remplies par l'entrepreneur pour qu'il obtienne le certificat d'accréditation qui prend effet à la date où la Régie délivre la licence appropriée.

Le sixième alinéa de l'article 78 du Règlement sur la plan de garantie prévoit que le requérant doit produire une attestation suivant laquelle les actionnaires dirigeants et répondants ont été libérés de toute faillite personnelle ou qu'ils n'ont pas été impliqués dans une faillite d'entreprise de construction depuis au moins 3 ans.

Dans le cas de M. Bonneau, une telle attestation de libération n'a pas été produite.

L'article 84 du Règlement prévoit que l'entreprise doit :

1) Détenir un cautionnement d'une valeur minimum de 35 000$ sous l'une ou l'autre des formes suivantes :

a)     cautionnement personnel

b)     lettre de garantie bancaire

c)      garantie  hypothécaire

d)     cautionnement d'une tierce personne.

Un tel cautionnement n'a pas été fourni. Les états financiers de la Demanderesse et les bilans personnels des deux actionnaires sont de nature à laisser croire qu'ils leur seraient difficile de réunir les garanties requises.

Selon les propos de Me Gagnon, la formule "Demande d'adhésion" une fois remplie, signée et retournée par le requérant à l'administrateur oblige ce dernier à émettre presque automatiquement une accréditation car le plan de garantie devient un contrat d'adhésion. Avec tout le respect que le Tribunal arbitral a envers le Procureur, il  ne peut souscrire à une telle interprétation.

Dans un premier temps, le Tribunal arbitral est d’avis que le plan de garantie répond en tout point à la définition du contrat  réglementé tel que défini par les auteurs Jobin et Vézina. 

En second lieu, il ne voit pas comment l’administrateur d’un plan de garantie pourrait remplir adéquatement le mandat qui lui est confié par la Régie du bâtiment s’il devait accréditer un entrepreneur avant même d’en vérifier la solvabilité. C’est seulement après analyse des documents prescrits qu’il peut juger si l’entrepreneur rencontre les conditions dictées par le législateur et lui accorder une accréditation.

 

Pour tous ces motifs et après analyse de l'ensemble de la preuve et des documents déposés :

Le Tribunal arbitral : Rejette l'appel

et

Maintient la décision rendue par la Garantie des Maîtres Bâtisseurs de ne pas accréditer la compagnie 9143-2195 Inc. à son plan de garantie.

 

 

Québec, le 4 avril 2006

 

 

L’Arbitre

 

 

 

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Claude Desmeules, ing.