En vertu du Règlement sur le plan de garantie
des bâtiments résidentiels neufs
(Décret 841-98 du 17 juin 1998)
Organisme d’arbitrage autorisé par la Régie du bâtiment :
Société pour la résolution des conflits inc. (SORECONI)
ENTRE SYNDICAT DE COPROPRIÉTÉ 902 BOUL. LAFORTUNE, L’ASSOMPTION
(ci-après « le Bénéficiaire »)
ET GESTION IMMOBILIÈRE RIVE-NORD INC.
(9134-4515 Québec inc.)
(ci-après « l’Entrepreneur »)
ET : LA GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS DE L’APCHQ
(ci-après « l’Administrateur »)
No dossier Garantie: 08-008 FL
No dossier SORECONI : 071227001
Arbitre : Guy Pelletier
Pour le Bénéficiaire : M. Jacques Tremblay, président
Mme Francine Benoît, secrétaire-trésorière
Pour l’Entrepreneur : M. Réjean Bédard
Pour l’Administrateur : Me François Laplante
Date d’audience : 10 juin 2008
Lieu d’audience : l’Assomption
Date de la décision: 3 juillet 2008
L’arbitre a reçu son mandat de SORECONI le 7 février 2008.
19 septembre 2005 : (P-5) : Date de l’avis de fin des travaux et déclaration de réception des parties communes;[1]
8 décembre 2005 : (P-1) : Mise en demeure de copropriétaires à l’Entrepreneur; 1
11 décembre 2005 : (P-2) : Mise en demeure de copropriétaires à l’Entrepreneur;1
13 février 2006 : (P-3) : Mise en demeure de copropriétaires à l’Entrepreneur; 1
17 février 2006 : (P-4) : Mise en demeure de copropriétaires à l’Entrepreneur; 1
21 février 2006 : (P-5) : Réception de l‘avis de fins des travaux et de la déclaration de réception des parties communes par le représentant du syndicat; 1
31 août 2007: (A-1) : Mise en demeure d’un copropriétaire à l’Entrepreneur; 2
21 septembre 2007: (A-2) : Mise en demeure du Bénéficiaire à l’Entrepreneur; 2
20 octobre 2007: (A-3) : Lettre de l’Entrepreneur au Bénéficiaire; 2
26 octobre 2007: (A-4) : Demande d’ouverture de dossier par le Bénéficiaire auprès de l’Administrateur; 2
22 novembre 2007 : (A-5) : Décision de l’Administrateur; 2
27 décembre 2007: (A-6) : Demande d’arbitrage du Bénéficiaire; 2
7 février 2008: Nomination de l’Arbitre;
6 mai 2008 : Avis de convocation transmis aux parties;
10 juin 2008 : Audition du dossier.
Introduction :
[1] La demande d’arbitrage porte sur une décision de l’Administrateur en date du 22 novembre 2007 qui rejette la plainte du Bénéficiaire invoquant la dénonciation tardive des problèmes et le fait qu’il n’ait pas reçu l’information par écrit :
[1.1] « Dans le cas présent, nous constatons qu’il s’est écoulé plus de six (6) mois entre la découverte ou la survenance des problèmes et la date à laquelle nous en avons été informés par écrit. Définitivement, ce délai ne peut être considéré comme raisonnable et par conséquent, La Garantie des maisons neuves de l’APCHQ ne peut donner suite à votre demande de réclamation. »
[2] À l’appui de sa demande d’arbitrage, le Bénéficiaire dépose séance tenante sept (7) documents identifiés P-1 à P-7 qui n’ont pas antérieurement été portés à la connaissance de l’Administrateur.
[3] Les pièces du cahier de l’Administrateur sont identifiées A-1 à A-6. Une pièce additionnelle (A-7) est déposée en cours de séance.
[4] Afin de circonscrire le dossier, les parties conviennent en cours de séance que la « liste des problèmes à régler au 21 septembre 2007 », identifiée comme étant la pièce A-2, constitue le document de référence faisant l’objet de la plainte du Bénéficiaire et de la décision de l’Administrateur.
[5] Les éléments de cette liste sont décrits comme suit :
[5.1] Point 1 : « Lumières d’urgence dans les parties communes en cas de panne d’électricité à faire vérifier car ne semblent pas fonctionner »;
[5.2] Point 2 : « Vérifier si la lumière (spotlight) supérieure qui doit éclairer le stationnement est en bon état car elle n’a jamais été allumée depuis la possession des lieux par les copropriétaires »;
[5.3] Point 3 : « Sonnerie d’avertissement pour indiquer aux visiteurs que la porte principale est débarrée »;
[5.4] Point 4 : « Faire ajuster par un expert la porte principale avant, afin qu’elle se referme et se barre automatiquement »;
[5.5] Point 5 : « Faire vérifier par un expert l’échangeur d’air dans les condos »;
[5.6] Point 6 : « Faire vérifier par un expert l’insonorisation entre les condos, en particulier dans le condo # 201 »;
[5.7] Point7 : « Refaire les murets de blocs de ciment dans le stationnement car déjà très penchés et vont s’effondrer d’ici l’an prochain et faire un escalier d’accès pour terrasse arrière »;
[5.8] Point 8 : « Corriger le problème d’écoulement d’eau venant des balcons arrières au 2e étage qui tombe sur les escaliers du bas et qui gèle l’hiver »;
[5.9] Point 9 : « Effectuer le problème d’électricité (chauffage) dans le condo # 202 par un expert, et peut-être ailleurs. Faire vérifier toutes les boîtes électriques »;
[5.10] Point 10 : « Vérifier l’isolation de l’entre-toit condos #301 & #302 et réparer le plafond de la 2e chambre au condo #301 endommagée par l’écoulement d’eau »;
[5.11] Point 11 : « Mettre la 2e couche de peinture dans le hall d’entrée et le garage qui n’a pas encore été effectuée.»
[6] Les parties conviennent également qu’aucun autre point ne pourra être ajouté à cette liste mais qu’il sera par ailleurs possible d’en soustraire.
[7] La séance est suspendue de 10h05 à 10h45 pour permettre à l’Administrateur d’examiner les nouvelles pièces déposées par le Bénéficiaire et faire certaines vérifications.
L’audition:
[8] L’Administrateur soumet que la décision qui a été rendue le 22 novembre 2007, l’a été à la lumière des documents connus à ce moment-là.
[9] Or, il appert que, dans certains documents déposés par le Bénéficiaire, il est fait mention qu’une copie de ceux-ci a été transmise à l’APCHQ.
[10] Démontrant son ouverture, l’Administrateur accepte comme probable qu’il ait reçu les documents P-1, P-2 et P-3 envoyés à l’Entrepreneur et portant la mention « c.c A.P.C.H.Q. », ce qui pourrait remettre en question sa décision sur certains points.
[11] À la lumière des documents déposés, la liste des problèmes à régler est revue point par point.
[11.1] Le Point 1 : « Lumières d’urgence dans les parties communes en cas de panne d’électricité à faire vérifier car ne semblent pas fonctionner »; est considéré comme étant réglé par le Bénéficiaire;
[11.2] Le Point 2 : « Vérifier si la lumière (spotlight) supérieure qui doit éclairer le stationnement est en bon état car elle n’a jamais été allumée depuis la possession des lieux par les copropriétaires »; est aussi considéré comme étant réglé par le Bénéficiaire;
[11.3] Le Point 9 : « Effectuer(sic) le problème d’électricité (chauffage) dans le condo # 202 par un expert, et peut-être ailleurs. Faire vérifier toutes les boîtes électriques » fait l’objet d’une demande de retrait de la liste de la part de l’Administrateur parce qu’il a déjà statué sur ce problème dans une décision antérieure le 12 novembre 2007. L’arbitrage n’ayant pas été demandé sur cette décision, il n’est plus possible de revenir sur ce point.
[11.4] Le Point 10 : « Vérifier l’isolation de l’entre-toit condos #301 & #302 et réparer le plafond de la 2e chambre au condo #301 endommagée par l’écoulement d’eau » a fait l’objet d’une entente entre le Bénéficiaire et l’Entrepreneur qui s’engage séance tenante à régler le problème. Le Bénéficiaire accepte d’en discuter les modalités hors séance.
[12] Ainsi les Points 1, 2, 9 et 10 sont retirés de la liste des problèmes faisant l’objet de la demande d’arbitrage.
[13] En conséquence, les Points 3, 4, 5, 6, 7, 8, 11 demeurent en litige.
[14] Considérant la décision de l’Administrateur à l’effet « qu’il s’est écoulé plus de six (6) mois entre la découverte ou la survenance des problèmes et la date à laquelle nous en avons été informés par écrit » il y a lieu d’établir les articles du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs devant guider l’analyse de cette décision de l’Administrateur :
1. Dans le présent règlement, à moins que le contexte n'indique un sens différent, on entend par:
…
bénéficiaire»: une personne physique ou morale, une société, une association, un organisme sans but lucratif ou une coopérative qui conclut avec un entrepreneur un contrat pour la vente ou la construction d'un bâtiment résidentiel neuf et, dans le cas des parties communes d'un bâtiment détenu en copropriété divise, le syndicat de copropriétaires;
25 …
«fin des travaux des parties communes»: la date à laquelle tous les travaux de l'entrepreneur convenus par écrit avec le bénéficiaire et relatifs aux parties communes sont exécutés et le bâtiment est en état de servir conformément à l'usage auquel on le destine;
…
«réception des parties communes»: l'acte par lequel un professionnel du bâtiment choisi par le syndicat de copropriétaires déclare la date de la fin des travaux des parties communes. Cette déclaration s'effectue à la suite de la réception d'un avis de fin des travaux expédié par l'entrepreneur à chaque bénéficiaire connu et au syndicat de copropriétaires.
(article en vigueur avant l’entrée en vigueur du décret 39-2006);
27. La garantie d'un plan dans le cas de manquement de l'entrepreneur à ses obligations légales ou contractuelles après la réception de la partie privative ou des parties communes doit couvrir:
1° le parachèvement des travaux dénoncés, par écrit:
a) par le bénéficiaire, au moment de la réception de la partie privative ou, tant que le bénéficiaire n'a pas emménagé, dans les 3 jours qui suivent la réception ;
b) par le professionnel du bâtiment, au moment de la réception des parties communes ;
2° la réparation des vices et malfaçons apparents visés à l'article 2111 du Code civil et dénoncés, par écrit, au moment de la réception ou, tant que le bénéficiaire n'a pas emménagé, dans les 3 jours qui suivent la réception;
3° la réparation des malfaçons existantes et non apparentes au moment de la réception et découvertes dans l'année qui suit la réception, visées aux articles 2113 et 2120 du Code civil et dénoncées, par écrit, à l'entrepreneur et à l'administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte des malfaçons;
4° la réparation des vices cachés au sens de l'article 1726 ou de l'article 2103 du Code civil qui sont découverts dans les 3 ans suivant la réception et dénoncés, par écrit, à l'entrepreneur et à l'administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte des vices cachés au sens de l'article 1739 du Code civil;
5° la réparation des vices de conception, de construction ou de réalisation et des vices du sol, au sens de l'article 2118 du Code civil, qui apparaissent dans les 5 ans suivant la fin des travaux des parties communes ou, lorsqu'il n'y a pas de parties communes faisant partie du bâtiment, de la partie privative et dénoncés, par écrit, à l'entrepreneur et à l'administrateur dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder 6 mois de la découverte ou survenance du vice ou, en cas de vices ou de pertes graduelles, de leur première manifestation.
(Les soulignements sont de l’arbitre)
[15] Il a été mis en preuve (pièce P-5) que le professionnel a déclaré la réception des parties communes du bâtiment le 19 septembre 2005 et que le représentant du syndicat, l’Entrepreneur dans ce cas-ci, déclare avoir reçu l’avis de fins des travaux des parties communes et une copie de la déclaration de réception des parties communes du bâtiment le 21 février 2006.
[16] Cependant, considérant que le promoteur-entrepreneur représentait le syndicat le 21 février 2006, comme en fait foi sa signature sur l’avis de fin de travaux des parties communes, il y a lieu de considérer aussi l’article 1081 du Code civil du Québec, quant à la diligence du syndicat à dénoncer :
[16.1] Le défaut de diligence que peut opposer le défendeur à l'action fondée sur un vice caché s'apprécie, à l'égard du syndicat ou d'un copropriétaire, à compter du jour de l'élection d'un nouveau conseil d'administration, après la perte de contrôle du promoteur sur le syndicat.
[17] En effet, il est plus qu’improbable que le promoteur qui contrôle le syndicat dénonce à l’Administrateur les problèmes relatifs aux parties communes qu’il n’a pas réglés lui-même.
[18] Il faut donc s’en remettre à la définition du règlement en ce qui concerne le « bénéficiaire » pour établir le début de la garantie et de la réception des travaux. Or, selon le témoignage non contredit de Mme Francine Benoît, secrétaire-trésorière du syndicat, les copropriétaires ont pris le contrôle du syndicat le 21 avril 2006, devenant ainsi le « bénéficiaire » des parties communes.
[19] La fin des travaux des parties communes, qui doit être convenue par écrit avec le Bénéficiaire, ne peut donc avoir lieu avec cette date soit le 21 avril 2006. Il en est de même de la réception des parties communes. Ainsi, au plus tôt, la fin du délai de six (6) mois pour dénoncer les problèmes relatifs aux parties communes, par le Bénéficiaire s’établit six mois après la prise de contrôle du syndicat par les copropriétaires soit au plus tard le 21 octobre 2006.
[20] Pour déterminer si la prescription est acquise, il y a lieu d’examiner chacun des points en fonction des pièces déposées par les parties :
[20.1] Les Points 3, 4, 5 et 6 ont été dénoncés par des copropriétaires et non par le Bénéficiaire, entre le 8 décembre 2005 et le 31 août 2007 à savoir :
[20.1.1] Le point 3 : « Sonnerie d’avertissement pour indiquer aux visiteurs que la porte principale est débarrée » a été dénoncé à l’Entrepreneur le 8 décembre 2005 (P-1), le 11 décembre 2005 (P-2), le 13 février 2006 (P-3) et copies ont été transmises par écrit à l’A.P.C.H.Q.
[20.1.2] Le Point 4 : « Faire ajuster par un expert la porte principale avant, afin qu’elle se referme et se barre automatiquement » a été dénoncé à l’Entrepreneur le 8 décembre 2005 (P-1), le 11 décembre 2005 (P-2) et copies ont été transmises par écrit à l’A.P.C.H.Q.
[20.1.3] Le Point 4 a aussi été dénoncé à l’Entrepreneur le 17 février 2006 (P-4 ), la preuve n’indiquant pas qu’une copie ait été transmise à l’Administrateur.
[20.1.4] Le Point 5 : « Faire vérifier par un expert l’échangeur d’air dans les condos » a été dénoncé à l’Entrepreneur le 11 décembre 2005 (P-2) et copie a été transmise par écrit à l’A.P.C.H.Q
[20.1.5] Le Point 5 a aussi été dénoncé à l’Entrepreneur le 17 février 2006 (P-4 ), la preuve n’indiquant pas que copie a été transmis à l’Administrateur.
[20.1.6] Le point 6 : « Faire vérifier par un expert l’insonorisation entre les condos, en particulier dans le condo # 201 » a été dénoncé par un copropriétaire à l’Entrepreneur, pour la première fois, le 31 août 2007 (A-1). Il n’est pas mentionné sur ce document que l’Administrateur est en copie.
[20.1.7] Les Points 3, 4 et 5 dénoncés avant la réception des travaux des parties communes et la prise de contrôle du syndicat par le Bénéficiaire, n’apparaissent pas dans le rapport d’inspection de l’architecte qui ne contient d’ailleurs aucune annotation concernant des malfaçons à corriger ou des travaux à compléter sur la liste préétablie des éléments à vérifier. (P-5)
[20.2] Les Points 7, 8 et 11 ont été dénoncés à l’Entrepreneur par le Bénéficiaire les 14 décembre 2006 et 21 septembre 2007 à savoir :
[20.2.1] Le Point7 : « Refaire les murets de blocs de ciment dans le stationnement car déjà très penchés et vont s’effondrer d’ici l’an prochain, et faire un escalier d’accès pour terrasse arrière » a fait l’objet d’une mise en demeure par le Bénéficiaire à l’Entrepreneur le 21 septembre 2007 (A-2).
[20.2.2] Étant donné que ce point contient deux problèmes distincts, les parties ont convenu de le subdiviser en deux points, soit 7-A et 7-B.
[20.2.3] Concernant les murets en blocs, identifiés comme étant le Point 7-A, le Bénéficiaire argumente qu’il s’agit d’un problème qui se manifeste graduellement depuis le premier hiver et que depuis l’hiver 2007 l’inclinaison est très forte.
[20.2.4] L’absence d’escalier d’accès à la terrasse arrière, identifié comme étant le Point 7-B, avait aussi fait l’objet d’une mise en demeure par des copropriétaires par lettre recommandée à l’Entrepreneur le 17 février 2006 (P-4).
[20.2.5] Le Point 8 : « Corriger le problème d’écoulement d’eau venant des balcons arrières au 2e étage qui tombe sur les escaliers du bas et qui gèle l’hiver » avait aussi été dénoncé par des copropriétaires à l’Entrepreneur le 17 février 2006 (P-4) comme le point précédent.
[20.2.6] Le Point 11 : « Mettre la 2e couche de peinture dans le hall d’entrée et le garage qui n’a pas encore été effectuée » fait partie de la liste des problèmes à régler contenus dans la mise en demeure du Bénéficiaire en date du 21 septembre 2007 (A-2); en ce qui concerne le hall d’entrée, le problème avait aussi été dénoncé sous une autre formulation, à l’Entrepreneur le 11 décembre 2005 (P-2) soit, « les murs du hall d’entrée sont très mal lavés… »
[21] Ces points et tous les autres ont été dénoncés par écrit par le Bénéficiaire à l’Administrateur le 26 octobre 2007 lors de la demande d’ouverture du dossier.
Analyse :
[22] Suite à l’examen de la preuve, il appert que les deux exigences prévues à l’article 27 du règlement n’ont pas été rencontrées pour tous les points en litige soit :
[22.1] Le Bénéficiaire a pris plus de 18 mois après avoir pris le contrôle du syndicat des copropriétaires pour dénoncer les problèmes
[22.2] et en transmettre copie par écrit à l’Administrateur.
[23] Est-ce que l’arbitre peut, selon les circonstances modifier ou atténuer les exigences requises à l’article 27 du règlement?
[24] À cet effet, après examen de la jurisprudence et, particulièrement, celle déposée en cours de séance3, l’arbitre partage l’avis majoritaire à l’effet que le délai de six (6) mois est un délai de déchéance et que la dénonciation par écrit de l’information à l’administrateur était impérative et essentielle pour la couverture de la garantie.
[25] L’absence de connaissance des procédures par défaut de lire son contrat de garantie n’excuse pas un bénéficiaire qui n’aurait pas respecté les exigences réglementaires.
[26] L’arbitre ne peut donc pas modifier le délai de six (6 mois) ni atténuer l’exigence relative à la dénonciation par écrit à l’Administrateur.
[27] Est-ce que le non-respect de ces seules exigences entraîne automatiquement la perte des droits du Bénéficiaire à la couverture du plan de garantie?
[28] Examinons les articles 137 et 138 du règlement :
[28.1] 137. L'entrepreneur doit remettre au bénéficiaire un double du contrat de garantie dûment signé et en transmettre une copie à l'administrateur ;
[28.2] 138. Le bénéficiaire n'est tenu à l'exécution de ses obligations prévues au contrat conclu avec l'entrepreneur qu'à compter du moment où il est en possession d'un double du contrat de garantie dûment signé.
[29] À partir la preuve déposée, il y a lieu de se demander s’il existe un contrat de garantie liant les parties :
[29.1] Le cahier des pièces de l’Administrateur ne contient aucun contrat de garantie, qu’il aurait dû avoir reçu en vertu de l’article 137, ni aucun autre document relatif à la garantie de ce bâtiment.
[29.2] L’Entrepreneur n’a déposé aucun contrat de garanti signé, qu’il aurait dû remettre au Bénéficiaire et à l’Administrateur.
[29.3] Dans sa réponse à la mise en demeure du Bénéficiaire en date 21 septembre 2007 (A-3), l’Entrepreneur a démontré sa méconnaisse des clauses d’un contrat de garantie, amplifiant ainsi le doute quant à l’existence d’un tel contrat :
[29.3.1] « j’ai téléphoné à (sic) APCHQ pour savoir quelle position prendre devant cette mise en demeure car j’avais reparlé à M. Tremblay qui maintenait tous les points de votre mise en demeure »,
[29.3.2] « On me conseil (sic) alors de vous dire de continuer cette démarche auprès de l’APCHQ et par la suite je me conformerai à la décision de leur conciliateur ."
[29.4] Quant à lui, le Bénéficiaire a témoigné à l’effet qu’il ne connaissait pas la définition d’un vice caché. À la suggestion de l’arbitre qui a proposé de vérifier cette donnée dans son contrat de garantie, le Bénéficiaire n’a pas été en mesure de confirmer qu’il était en possession de ce document, s’interrogeant même sur l’existence et la forme de ce document.
[29.4.1] « C’est quoi le contrat de garantie? »
[29.4.2] « A quoi ça ressemble? »
[29.5] Le Bénéficiaire a témoigné à l’effet qu’il ne savait pas quelles démarches suivre pour conserver ses droits.
DÉCISION :
[30] Avec respect, la jurisprudence déposée par le procureur de l’Administrateur en regard des obligations du Bénéficiaire de respecter le délai de dénonciation de six (6) mois et la transmission par écrit de l’information à l’administrateur, met en preuve l’existence d’un Contrat préliminaire et d’un Contrat de garantie.
[31] En l’espèce, il n’a pas été établi que le Bénéficiaire a reçu « un double du contrat de garantie dûment signé » même si des copropriétaires ont mis l’A.P.C.H.Q. en copie de leurs mises en demeure les 8 décembre 2005 (P-1), 11 décembre 2005 (P-2) et 13 février 2006 (P-3). On peut d’ailleurs noter la confusion qui existe chez les copropriétaires, le Bénéficiaire et l’Entrepreneur, ceux-ci ne pouvant identifier les intervenants et leurs responsabilités soit l’APCHQ, l’association des entrepreneurs et la Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ Inc., la garantie. Il y a lieu d’ailleurs de rappeler l’ouverture d’esprit de l’Administrateur sur ce point.
[32] L’arbitre doit statuer « conformément aux règles de droit; il fait aussi appel à l’équité lorsque les circonstances le justifient.»
[33] À titre d’arbitre désigné, le soussigné est autorisé par la Régie à trancher tout différend découlant des plans de garantie. La décision doit prendre appui sur le texte du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs.
[34]
Suivant mon
appréciation des faits, de la preuve versée au dossier et présentée à
l’audition, de la faible crédibilité du témoignage de l’Entrepreneur et
du droit applicable, je suis d’avis que le Bénéficiaire ne pouvait raisonnablement pas
répondre aux exigences d’un contrat de garantie dont l’existence n’a pas été
prouvée.
[35] Il y a donc lieu d’appliquer l’article 138 du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs à savoir que :
[35.1] 138. Le bénéficiaire n'est tenu à l'exécution de ses obligations prévues au contrat conclu avec l'entrepreneur qu'à compter du moment où il est en possession d'un double du contrat de garantie dûment signé. »
[36] Par conséquent, l’arbitre n'a pas à disposer de la question du respect, par le Bénéficiaire, de l’obligation de transmettre l’information à l’administrateur par écrit dans le délai requis puisque, dans les circonstances particulières du cas présent, l’article 27 ne trouve pas application.
[37] En vertu de l’article 123 du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs et vu que le Bénéficiaire a obtenu gain de cause, les frais d’arbitrage sont à la charge de l’Administrateur;
[37.1] 123. Les coûts de l'arbitrage sont partagés à parts égales entre l'administrateur et l'entrepreneur lorsque ce dernier est le demandeur.
Lorsque le demandeur est le bénéficiaire, ces coûts sont à la charge de l'administrateur à moins que le bénéficiaire n'obtienne gain de cause sur aucun des aspects de sa réclamation, auquel cas l'arbitre départage ces coûts.
POUR CES MOTIFS LE TRIBUNAL D’ARBITRAGE :
[38] CONSTATE L’ENTENTE entre le Bénéficiaire et l’Entrepreneur sur le Point 10;
[39] CONSTATE LE RETRAIT des Points 1, 2 et 9 de la demande d’arbitrage;
[40] ANNULE la décision de l’Administrateur sur les Points 3, 4, 5, 6, 7, 8 et 11;
[41] RETOURNE à l’Administrateur, la plainte du Bénéficiaire pour qu’elle soit traitée et qu’une décision au fond soit rendue sur les Points 3, 4, 5, 6, 7, 8 et 11 apparaissant à la « liste des problèmes à régler au 21 septembre 2007 », identifiée comme étant la pièce A-2;
[42] CONDAMNE l’Administrateur à payer les frais d’arbitrage.
Guy Pelletier
Architecte et arbitre
Laval, ce 3 juillet 2008