Centre Canadien d’Arbitrage Commercial (CCAC)

Organisme d’arbitrage autorisé par la Régie du Bâtiment du Québec conformément au Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs (c. B-1.1, r. 0.2)

 

 

 

CANADA

PROVINCE DE QUÉBEC

 

 

DOSSIER N°:           S10-240901-NP

 

DATE                         :           19 décembre 2011

 

 


ARBITRE       :           Me PIERRE BOULANGER

 

 

 


SYNDICAT DE COPROPRIÉTÉ DU 670 MONTÉE MASSON, MASCOUCHE,

 

Bénéficiaire

 

c.

 

DÉVELOPPEMENT MAGMA INC.,

 

Entrepreneur

 

et

 

LA GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS DE L’APCHQ INC.,

 

Administrateur de la garantie

 

 

 


DÉCISION ARBITRALE

 

 

 


[1]        Le syndicat de copropriété du 670 Montée Masson à Mascouche a requis un arbitrage en relation avec la décision de l’administrateur daté du 2 septembre 2010. L’arbitrage ne porte que sur le point # 3 de la décision, soit le revêtement du déclin (planche de Canexel) du mur latéral droit et du mur arrière du bâtiment.

 

[2]        Statuant sur ce point, l’inspecteur-conciliateur Marc-André Savage, a rejeté la réclamation du syndicat car il n’a vu aucune déformation significative pouvant découler d’une installation inadéquate. Il a ajouté que l’installation du déclin sur les bâtiments du 670 et du 690 Montée Masson est différente de ceux des bâtiments voisins, selon ce que lui a rapporté l’entrepreneur.


 

 

[3]        Je note que, pour les bâtiments des 674, 676, 684 et 686 Montée Masson, le même Marc-André Savage avait rendu des décisions à l’effet contraire, c’est-à-dire qu’il y avait un manque de fond de clouage, les planches de revêtement (Canexel) étaient agrafées au lieu d’être clouées, qu’il y avait des ondulations importantes et un mauvais alignement des planches à plusieurs endroits, bref, que la situation rencontrait tous les critères du vice caché. Ces décisions-là ont fait l’objet de demandes d’arbitrage de la part de l’entrepreneur, demandes dont le soussigné a été saisi. Elles ont toutefois fait l’objet de règlements hors Cour.

 

[4]        Dans le présent cas, contrairement aux bâtiments des 674, 676, 684 et 686 Montée Masson, l’inspecteur-conciliateur Savage, qui s’est aussi basé sur le critère de gravité du vice caché, donne raison à l’entrepreneur.

 

[5]        Je retiens que le critère de gravité du vice caché est effectivement celui à appliquer dans le présent cas. Les parties s’entendent maintenant là-dessus. En effet, la date de réception présumée des travaux des parties communes a été déclarée comme étant le 1er mai 2008 par décision arbitrale rendue le 15 mars 2010 par l’arbitre Guy Pelletier. L’avis de réclamation du syndicat concernant le revêtement Canexel, daté du 22 septembre 2009, a été reçu par l’administrateur le 29 janvier 2010, soit durant la deuxième année de garantie.

 

[6]        Cet avis de réclamation du syndicat, daté du 22 septembre 2009, mentionne laconiquement; « Nous venons de découvrir que le CanExel n’a pas été installer selon les normes et spécifications de la compagnie ce qui entraîne la perte de la garantie » (sic) .

 

[7]        Cette « découverte » par le syndicat du 670 Montée Masson est reliée à une lettre du 9 septembre 2009 du manufacturier Canexel, la firme Louisiana Pacific Canada, écrite par son représentant promotionnel, monsieur Jonathan Poirier, lettre produite sous la cote A-6. Cette lettre concerne toutefois un bâtiment voisin, le 680 Montée Masson, où le revêtement s’était gondolé et avait rétréci de façon anormale. Dans cette lettre, Jonathan Poirier affirmait qu’il ne pouvait accepter de respecter la garantie du manufacturier pour le matériel parce que le problème relevait de l’installation sur le bâtiment. En effet, le fond de clouage (fourrures flottantes) était insuffisant d’une part et, d’autre part, les agrafes d’un pouce utilisées pour fixer les planches de Canexel (communément appelées agrafes à vinyle) n’étaient pas adéquates car il aurait fallu des clous permettant une pénétration minimale de un pouce et quart dans le bois solide.

 

[8]        Suite à cette « découverte » dont il est question ci-haut, le syndicat du 670 Montée Masson a fait faire une vérification par la firme Louisiana Pacific Canada sur son propre bâtiment. Cette fois, c’est le représentant Brian Derouin qui s’est rendu sur place, le 17 février 2011.


 

 

[9]        Je retiens notamment du témoignage de Brian Derouin que, dans l’ensemble, la situation de gondolement des planches de Canexel est tolérable pour ce bâtiment. Je comprends que la situation est différente de celle que son collègue Jonathan Poirier avait observée sur le bâtiment du 680 Montée Masson.

 

[10]     Dans la lettre de la firme de Louisiana Pacific Canada datée du 21 février 2011 concernant le bâtiment du 670 (pièce B-1), on peut notamment lire :

 

 

                 « Comme pour faire suite à votre rapport de plainte en égard au parement Canexel installé sur l’immeuble indiqué ci-haut, nous avons procédé à l’inspection dudit immeuble le 17 février 2011.

 

                   Nous vous avisons par la présente que notre produit soit le Canexel ne semble pas être en cause et nous avons constaté que l’installation du revêtement n’a pas été complétée adéquatement :

 

·            Sur une grande partie du bâtiment, les joints ne sont pas alignés avec les fourrures (fourrures flottantes);

 

·            Fixation du parement à l’aide d’agrafe - pratique interdite;

 

·            Fixation en surface à plusieurs endroits;

 

·            Au niveau du balcon arrière, le parement est en contact direct avec le ciment et le haut et le bas du parement est calfeutré, ce qui ne permet pas une bonne circulation d’air;

 

·            Présence d’humidité excessive (moisissure, glace et saleté) qui affecte la finition du parement. Ceci est causé par une mauvaise installation du système de ventilation;

 

·            Pour ces raisons, nous ne pouvons donner suite à votre demande puisqu’il ne s’agit pas d’une défaillance du produit mais plutôt d’un manque de rigueur d’application des politiques de notre guide d’installation;    »

 

 

Cette lettre est signée par Bianca Chiasson, adjointe aux réclamations.


 

 

[11]     Les affirmations contenues dans cette lettre doivent être nuancées à la lumière de la preuve faite devant moi. Tout d’abord, contrairement à ce qui est écrit dans la lettre de la firme Louisiana Pacific Canada concernant le 680 Montée Masson (pièce A-6), il n’est pas précisé, ici, que le gondolement est anormal. De fait, Brian Derouin a considéré que la situation est tolérable.

 

[12]     Je retiens aussi que Marc-André Savage, qui a pu comparer les bâtiments concernés les uns avec les autres, a témoigné que le gondolement est plus sérieux sur les autres bâtiments où il a rendu des décisions à l’avantage des syndicats.

 

[13]     Le témoignage de Pierre Bonneville, représentant de l’entrepreneur, technologue en architecture, que j’ai reconnu témoin expert, est au même effet, tout comme celui, bien entendu, de Benoit Monette, vice-président de l’entrepreneur.

 

[14]     Benoit Monette a aussi expliqué que le bâtiment du 670, tout comme celui du 690 qui lui fait face, ont été construits avant les autres et que la construction est légèrement différente : il y a, sur toute la surface des quatre murs, des panneaux de copeaux de bois qui servent de fond de clouage pour les planches de Canexel. Il ne saurait donc être question de « fourrures flottantes » comme pour les autres bâtiments. Je peux toutefois mettre cette affirmation en doute pour le mur arrière vu les observations faites par Brian Derouin, photographies à l’appui (pièce B-5, page 12). Toutefois, à cause de la présence des portes-patios à l’arrière, l’étendue de la surface murale de Canexel est plus restreinte, de sorte que le gondolement, s’il en est, est encore moins évident que pour le mur latéral.

 

[15]     Bref, dans l’ensemble, la preuve est convergente à l’effet qu’il n’y a pas de manifestation d’un problème ayant la gravité d’un vice caché en autant que le revêtement de Canexel est concerné. Les témoignages de messieurs Derouin, Savage, Bonneville et Monette à l’effet qu’il n’y a pas de gondolement au-delà du seuil de tolérance n’ont nullement été contredits.

 

[16]     Il me reste à traiter de quelques autres problèmes soulevés dans la lettre de Louisiana Pacific Canada du 21 février 2011 (pièce B-1).

 

[17]     Cette lettre mentionne notamment que la fixation du parement à l’aide d’agrafes est une pratique interdite. Il faut ici nuancer. Je retiens du témoignage de Brian Derouin que si les agrafes sont maintenant interdites, elles étaient tolérées auparavant. De fait, dans un bulletin émis en mars 2008 par la firme Louisiana Pacific Canada (pièce A-5), on peut lire :

 

 

                 « Nails recommended for installation of our exterior coverings can be substituted by staples or other type of fasteners with equivalent or superior holding power » .

 


 

[18]     Il demeure que les agrafes utilisées sont un peu courtes. Sur les lieux, j’ai personnellement retiré une agrafe du mur arrière. Mesurée en présence de tous, elle s’est avérée être d’une longueur de un pouce. Les instructions d’installation du manufacturier (pièce B-4) demandent une pénétration minimale de un pouce et quart. Si on considère que l’épaisseur du revêtement Canexel est de sept seizième de pouces, la pénétration serait légèrement supérieure à un demi-pouce, ce qui ne rencontre pas les spécifications du manufacturier. Toutefois, il ne m’a pas été démontré que cette situation rencontre les critères de gravité d’un vice caché.

 

[19]     Enfin, les autres problèmes soulevés dans la lettre de Louisiana Pacific Canada du 21 février 2011 (pièce B-1) ne rencontrent pas non plus les critères de gravité du vice caché. Les planches de Canexel sont en contact avec les planchers de ciment des balcons à l’arrière mais il ne m’a pas été démontré qu’il y a un grave problème de circulation d’air derrière le parement de Canexcel. On m’a bien montré quelques coulisses de saletés mais elles se situent surtout près des sorties d’air et elles sont facilement lavables.

 

[20]     Bref, dans l’ensemble, la preuve faite devant moi, ne peut me permettre de renverser la décision de l’inspecteur-conciliateur Marc-André Savage rendue le 2 septembre 2010.

 

[21]     Un dernier mot au sujet des frais de l’arbitrage. Vu les circonstances particulières de cette affaire, dont il a été question plus haut, il m’apparaît adéquat de les faire supporter entièrement par l’administrateur.

 

 

POUR CES MOTIFS, L’ARBITRE SOUSSIGNÉ :

 

[22]     REJETTE la demande d’arbitrage du bénéficiaire.

 

[23]     MAINTIENT la décision de l’administrateur datée du 2 septembre 2010.

 

[24]     Vu les articles 116 et 123 du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs et vu les circonstances particulières en l’espèce, DÉCLARE que les frais de l’arbitrage sont entièrement payables par l’administrateur.

 

                                                                                                                                            

                                                                                  Me PIERRE BOULANGER

                                                                                  Arbitre

 

Mme France Beauchamp

Mme Lorraine Caron

Pour le bénéficiaire

 

Me Sonia Beauchamp

Pour l’entrepreneur

 

Me Élie Sawaya

Pour l’administrateur de la garantie

 

DATE D’AUDITION :      29 août 2011