ARBITRAGE EN VERTU DU RÈGLEMENT SUR LE PLAN DE GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS
(Décret 841-98 du 17 juin 1998)
Organisme d’arbitrage autorisé par la Régie du bâtiment : SORECONI
ENTRE : CARL VAILLANCOURT
(ci-après le « Bénéficiaire »)
ET : LES HABITATIONS PROMAX INC.
(ci-après l’ « Entrepreneur »)
ET : LA GARANTIE DES MAÎTRES BÂTISSEURS
(ci-après l’ « Administrateur »)
No. dossier SORECONI : 080718002
No. bâtiment: U-507542
DÉCISION
Arbitre : Me Michel A. Jeanniot
Pour le Bénéficiaire : Monsieur Carl Vaillancourt
Pour l’Entrepreneur : Absent
Pour l’Administrateur : Me Marc Baillargeon
Date d’audience : 18 décembre 2008
Lieu d’audience : 1010, rue de la Gauchetière Ouest
Bureau 950
Montréal (Québec) H3B 2N2
Date de la sentence : 3 février 2009
Identification complètes des parties
Bénéficiaire : Monsieur Carl Vaillancourt
7964, Foucher
Montréal (Québec) H2R 2L1
Entrepreneur: Les Habitations Promax Inc. (absent)
3155, Joseph-Monnier
Terrebonne (Québec) J6X 4T2
Administrateur : La Garantie des Maîtres Bâtisseurs
a/s : Monsieur Jasmin Girard
4970, Place de la Savane
Bureau 301
Montréal (Québec) H4P 1Z6
Et son Procureur :
Me Marc Baillargeon
Décision
L’arbitre a reçu son mandat de SORECONI le 11 août 2009.
25 juin 2008 : Décision de l’administrateur;
20 juillet 2008 : Demande d’arbitrage du bénéficiaire;
11 août 2008 : Nomination de l’arbitre;
11 août 2008 : Lettre de l’arbitre aux parties les informant du processus à venir;
20 octobre 2008 : Lettre de l’arbitre fixant la séance d’arbitrage au 18 décembre 2008 au bureau de l’arbitre situé au 1010, rue de la Gauchetière Ouest, bureau 950, Montréal.
Valeur estimée de la réclamation:
[1] Dans la collégialité et d’un commun accord, il a été décidé que la valeur en litige (bien que difficilement quantifiable) se situe entre 7 001 et 15 000 $.
Objection préliminaire :
[2] Aucune objection préliminaire n’a été soulevée, l’arbitre constate que juridiction lui est acquise et l’audience est ouverte à 9h30 a.m. au bureau du soussigné situé au 1010, rue de la Gauchetière Ouest, bureau 950 à Montréal.
Ouverture de l’enquête :
[3] L’enquête débute par un exposé sommaire des parties qui, à tour de rôle, identifient dans les grandes lignes les problématiques qui seront abordées.
[4] Je rappelle que la demande d’arbitrage se limite à une décision unique de l’administrateur qui est datée du 25 juin 2008 et sous la plume de Monsieur Marco Caron, responsable technique.
[5] Il s’agit d’un immeuble détenu en copropriété et l’acte de transfert de l’immeuble et du bâtiment au bénéficiaire remonte au 10 juillet 2008.
[6] Il n’y a aucune expertise au dossier et les parties n’entendent faire témoigner aucun témoin expert.
[7] La demande d’arbitrage vise les points numéros 8, 9, 10, 14, et 30 d’une décision qui, à l’origine, en comptait 41.
[8] Afin de faciliter à la fois lecture, compréhension ainsi que repérage des différents points soulevés, les chapitres seront identifiés en fonction des points qu’ils adressent à la décision du 25 juin 2008.
Point numéro 8 - Entrée avant et arrière (logement du sous-sol) :
[9] L’administrateur a refusé de considérer ce poste de réclamation à l’intérieur de la couverture du plan de garantie prétextant qu’il s’agit d’une exclusion prévue à l’article 1.3.9 lequel stipule (entre autres) que les espaces à l’extérieur du bâtiment où se trouvent les unités résidentielles et tout ouvrage situé à l’extérieur du bâtiment sont exclus.
[10] Le bénéficiaire dépose au soutien de ses prétentions :
[10.1] copie d’une entente contractuelle (pièce B-2) laquelle établie clairement tout le moins, qu’il s’agit d’une obligation contractuelle;
[10.2] extrait de l’étape 5 (pièce B-3), i.e. la liste des travaux à être complétés qui précise que doivent être construits terrasse arrière et les murs en pavé uni ainsi que la construction des entrées avant et les murs en pavé uni avant;
[10.3] extrait des plans et devis qui confirment la présence de ses obligations ([10.1] et [10.2]) ainsi que leur composition;
[11] Le bénéficiaire nous a exhibé de plus copie de dix (10) épreuves photographiques (cotées de B.5.1 à B.5.10 inclusivement) lesquelles démontrent l’état des lieux et l’apparente nécessité de compléter la construction des murs et/ou murets de rétention.
[12] En réplique, l’administrateur reconnaît qu’il puisse s’agir d’une obligation opposable à l’entrepreneur, mais que de son avis, il s’agit clairement d’une exclusion prévue à l’article 1.3.9.
[13] Ceci étant précisé et avant de pouvoir considérer qu’il s’agisse de travaux reliés à l’immeuble, il y a présomption favorable en faveur de l’administrateur à l’effet qu’il s’agisse d’un cas d’exclusion prévue à l’article 1.3.9, puisqu’il s’agit de toute évidence de travaux extérieurs à la coquille de l’immeuble.
[14] Le bénéficiaire tente de réfuter la position de l’administrateur et appuie son argumentaire sur une certaine jurisprudence qui découle de l’article 901 du Code Civil du Québec. Cette disposition législative prévoit que font partie intégrante d’un immeuble les meubles qui sont incorporés à l’immeuble et qui perdent leur individualité en assurant l’utilité de l’immeuble.
[15] Le bénéficiaire suggère (copie des épreuves photographiques B-5.1 à B-5.10 le démontre) que l’absence de ces murets cause une situation préjudiciable aux propriétaires résidants et que, à toute fin de pratique, l’immeuble ne serait pas complet sans eux.
[16] Le bénéficiaire fait de plus référence à cinq (5) décisions lesquelles établissent entre autres :
[16.1] un critère fondamental pour déterminer la nature mobilière ou immobilière d’un objet est le caractère essentiel de l’objet au maintien en bon état de l’immeuble[1];
[16.2] qu’un bien meuble, une fois uni à la bâtisse aux fins de son utilisation qui ultimement se confond avec la bâtisse, devient immeuble par nature[2];
[16.3] qu’il y a immobilisation par nature d’un bien meuble si celui-ci est indispensable à l’existence même de l’immeuble[3];
[16.4] est qualifié d’immeuble par nature un objet mobilier qui fait partie intégrante d’un bâtiment au point de perdre sa propre individualité[4];
[16.5] une fois incorporés à l’immeuble, les biens meubles perdent leur caractère mobilier et deviennent immeubles par nature tant que dure l’incorporation[5].
[17] Bien que je souscrive à ces courants jurisprudentiels, nous sommes en présence d’une situation factuelle qui se distingue puisqu’ici, il s’agit de travaux non encore faits.
[18] D’abord, je tiens à préciser que la Cour suprême a répétitivement statué qu’un bien meuble ne devient pas immeuble par nature ou par destination du seul fait qu’il soit indispensable à la destination du bâtiment où il est installé[6].
[19] Il est possible qu’une fois incorporé à l’immeuble, l’ouvrage puisse à ce point tel être fixé “à fer et à clous”, qu’il ne puisse être séparé de l’immeuble “sans briser l’un de l’autre” et/ou qu’à mesure de l’incorporation au sol il perde son individualité et devienne immeuble parce que confondu avec le bâtiment dont il devient partie intégrante, mais et pour le cas sous étude, je l’ignore. Aucune preuve à cet effet n’a été offerte, voire même suggéré.
[20] La preuve non contredite est à l’effet que les biens meubles ne sont pas encore incorporés à l’immeuble, il n’y a pas encore perte d’individualité. Bien que je sois sensible à la situation vécue par le bénéficiaire, il est prématuré pour moi de considérer des travaux extérieurs à venir immeubles par nature ou par destination. Je ne pourrai faire droit à ce poste de réclamation. À défaut de preuve à l’effet contraire, je me devrai de conclure que des murets à être réalisés en pourtour des patios, (qui sont des ouvrage à être situés à l’extérieur du bâtiment), et qui consiste, entre autres, à l’assemblage d’un muret constitué de bloc de bétons est un ouvrage spécifiquement exclus et ne peut être reconnu dans le cadre du mandat de l’administrateur.
[21] De tout évidence, il s’agit d’une mésentente contractuelle et bien que, je me dois de maintenir la décision de l’administrateur le tout est sans préjudice et sous toute réserve du droit du bénéficiaire de porter devant les tribunaux civils sa prétention ainsi que de rechercher les correctifs qu’il réclame, sujet bien entendu, aux règles de droit commun et de la prescription civile.
Point numéro 9 - Crépi :
[22] Au soutien de ce poste de réclamation, le bénéficiaire nous dépose un extrait de la page 4 des plans et devis (coté comme pièce B-8) lequel identifie clairement à la note « E » des plans (et en référence aux murs de fondation), « CRÉPI HORS SOL ».
[23] Le bénéficiaire nous démontre de plus que ce point a été reprit à l’étape 5 (pièce B-3) en sus de nous suggérer que, à maintes fois, de vive voix, l’entrepreneur s’est engagé à compléter ce volet de l’ouvrage.
[24] Il ne me sera pas nécessaire de me prononcer sur la fiabilité de cette déclaration extrajudiciaire, étant amplement satisfait que les plans et devis prévoient cette obligation et qu’elle a été subséquemment validement dénoncée à la liste des travaux qui ne sont pas exclus par l’article 12.9 du Règlement[7]. Je me devrai donc de donner suite à ce poste de réclamation du bénéficiaire, un point qui aurait du être reconnu par l’administrateur dans le cadre de son mandat.
Point numéro 10 - Gouttière :
[25] Séance tenante, le procureur de l’administrateur, après avoir pris connaissance de certains documents qui lui furent exhibés par le bénéficiaire lors d’une suspension d’audience, s’engage et accepte de débourser en faveur du bénéficiaire, la somme toute incluse (taxes incluses) de 950 $.
Point numéro 14 - Assiette de rétention :
[26] À la suite d’une seconde suspension, le procureur de l’administrateur déclare s’engager à effectuer la pose d’une assiette de rétention et au besoin les travaux d’installation de cette assiette de rétention.
[27] En fonction de cet engagement, le bénéficiaire retire sa demande d’arbitrage quant au point numéro 14. Je n’aurai donc pas à me prononcer quant à ce poste de réclamation.
Point numéro 30 - Scellant entre le balcon et le mur :
[28] L’administrateur refuse de considérer ce point dans le cadre du plan de garantie et il appuie son refus à deux motifs.
[28.1] un premier motif se retrouve à sa décision du 25 juin 2008 à l’effet que ce balcon a été réalisé en conformité avec les règles de l’art et qu’il ne juge utile quelque intervention;
[28.2] lors de l’enquête et audition au mérite, le procureur de l’administrateur soulève de plus qu’il s’agit d’une situation de parachèvement de travaux, une situation pré-existante mais qui n’a pas fait de dénonciation écrite, i.e. ce grief est absent de la liste des travaux à compléter (absent de l’étape 5 pièce B-3).
[29] Je rappelle ici que le bénéficiaire est en demande, qu’à cet effet c’est ce dernier qui a le fardeau de convaincre que la décision de l’administrateur est mal fondé en faits et/ou en droit.
[30] L’administrateur, au sein de sa décision, suggère que ce point ne pourrait être recevable du simple fait que les travaux, tels que réalisés sont conformes aux règles de l’art. La position de l’administrateur étant dévoilée, une démonstration aurait dû être faite par le bénéficiaire quant au besoin et/ou à la nécessité de ce joint. À tout le moins, on aurait dû me suggérer qu’il existe une règle contraire ou différente de celle acceptée par l’administrateur.
[31] Aucune telle démonstration ne m’a été faite.
[32] D’ailleurs, la seule existence d’une malfaçon qui appert au moment de la réception ou encore, l’inachèvement des travaux observable au moment de la réception, ne sont pas suffisants pour donner ouverture à un recours en faveur de l’administrateur. En effet, il faut que cette situation ait été dénoncée par écrit au moment même de la réception du bâtiment (ou dans les trois jours qui suivent si le bénéficiaire n’avait pas encore déménagé). Absent de l’étape 5 et à défaut de toute démonstration à l’effet contraire, je ne peux retenir ce point opposable à l’administrateur.
Jugé :
[33] Pour l’ensemble des motifs ci-haut repris, je me dois de :
[33.1] rejeter la demande d’arbitrage du bénéficiaire quant aux points numéros 8 et 30 de la décision de l’administrateur;
[33.2] accepter et maintenir la demande d’arbitrage (et de considérer dans le cadre du plan de garantie) la position du bénéficiaire quant au point numéro 9;
[33.3] prendre acte de l’engagement de l’administrateur vis-à-vis des points numéros 10 et 14.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL D’ARBITRAGE :
PREND ACTE de l’engagement de l’administrateur vis-à-vis des points numéros 10 et 14;
REJETTE la demande d’arbitrage du bénéficiaire quant aux points numéros 8 et 30 de la décision de l’administrateur;
ACCEPTE ET MAINTIENT la demande d’arbitrage et CONSIDÈRE dans le cadre du plan de garantie la position du bénéficiaire quant au point numéro 9;
LE TOUT avec frais à être assumés par l’Administrateur.
Montréal, le 3 février 2009
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ME MICHEL A. JEANNIOT
Arbitre / SORECONI
[1] Galipeau c. Labelle, [1983] C.S. 350 .
[2] Aliments Monte Carlo Inc. (Syndic de), [1989] R.D.I. 836 .
[3] Nadeau c. Rousseau, 44 B.R. 545 .
[4] Valco Métal (1979) Ltée c. Poissant, Richard et Associés, [1990] R.J.Q. 2881 .
[5] Agnico-Eagle Mines Ltd. c. Sous-Ministre du Revenu, [1977] R.D.F.Q. 136 .
[6] St-Laurent (Cité de) c. Commission hydroélectrique de Québec, [1978] 2 R.C.S. 529 ; Aluminium du Canada Ltée c. Melocheville (Corp. Mun. du village de), [1973] R.C.S. 792 .
[7] Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs, R.Q. c. B-1.1., r. 0.2.