ARBITRAGE EN VERTU DU RÈGLEMENT SUR LE PLAN DE GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS
(Décret 841-98 du 17 juin 1998)
(Loi sur le bâtiment, L.R.Q., c. B-1.1)
Organisme d’arbitrage autorisé par la Régie du bâtiment :
CENTRE D’ARBITRAGE COMMERCIAL (CCAC)
ENTRE : CONSTRUCTION JOLIVAR INC.
(ci-après « l’Entrepreneur »)
ET : LA GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS NEUFS DE L’APCHQ
(ci-après « l’Administrateur »)
ET : MARIE-PIER DION ET CHARLES JANECEK
(ci-après « Les Bénéficiaires »)
No dossier : S10-070401-NP
Arbitre : |
|
Me Albert Zoltowski |
|
|
|
Pour l’Entrepreneur : |
|
Monsieur Léo Ouellet |
|
|
|
Pour l’Administrateur : |
|
Me Luc Séguin |
|
|
|
Pour les Bénéficiaires : |
|
Madame Marie-Pier Dion |
|
|
|
Date de la décision : |
|
Le 22 mars 2011 |
Identification complète des parties
Arbitre : |
|
Me Albert Zoltowski 1010, de la Gauchetière Ouest Bureau 950 Montréal (Québec) H3B 2N2 |
|
|
|
Bénéficiaires : |
|
Madame Marie-Pier Dion et monsieur Charles Janecek […] Cowansville (Québec) […]
|
|
|
|
Entrepreneur : |
|
Construction Jolivar inc.. 1291, rue Bernier Saint-Jean-sur-Richelieu (Québec) J2W 1G5
À l’attention de monsieur Léo Ouellet, |
|
|
|
Administrateur : |
|
La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc.. 5930, boul. Louis-H.-Lafontaine Montréal (Québec) H1M 1S7
À l’attention de Me Luc Séguin |
Décision
L’arbitre a reçu son mandat du Centre Canadien d’Arbitrage Commercial (ci-après appelé le « CCAC ») le 18 mai 2010.
25 février 2010 : |
Inspection du bâtiment par l’Administrateur; |
|
|
12 mars 2010 : |
Décision de l’Administrateur; |
|
|
7 avril 2010 : |
Réception par le Centre Canadien d’Arbitrage Commercial de la demande d’arbitrage de l’Entrepreneur; |
|
|
18 mai 2010 : |
Nomination de l’arbitre; |
|
|
10 juin 2010 : |
Avis de l’arbitre aux parties fixant la date de l’audition préliminaire par voie téléphonique; |
|
|
15 juin 2010 : |
Audition par voie téléphonique; |
|
|
15 juin 2010 : |
Lettre de l’arbitre aux parties au sujet des décisions prises lors de l’audition préliminaire; |
|
|
26 octobre 2010 : |
Lettre de l’arbitre aux parties concernant la conférence téléphonique du 28 octobre 2010; |
|
|
28 octobre 2010 : |
Conférence téléphonique de l'arbitre avec les parties; |
|
|
2 novembre 2010 : |
Avis d’audition aux parties; |
|
|
8 décembre 2010 : |
Audition au Palais de justice de Cowansville; |
|
|
10 décembre 2010 : |
Lettre de l’arbitre aux parties; |
|
|
24 janvier 2010 : |
Réception par l’arbitre de la dernière argumentation écrite; |
DÉCISION
Introduction
[1] Les Bénéficiaires sont copropriétaires d’une résidence comprenant un sous-sol, un rez-de-chaussée et un premier étage située au […] à Cowansville, province de Québec (ci-après appelée le « bâtiment »).
[2] Le 5 octobre 2009, les Bénéficiaires écrivent une lettre adressée à l’Entrepreneur, dont la copie porte aussi le tampon de réception de l’Administrateur (pièce A-4), dénonçant un dégât d’eau causé par le débordement de leur toilette située au rez-de-chaussée du bâtiment survenu le 14 septembre 2009.
[3] Selon cette lettre, l’incident est survenu lorsqu’un sous-traitant de la municipalité de Cowansville procédait au nettoyage des tuyaux pluviaux de la municipalité. Ensuite, le plombier mandaté par la ville a posé comme diagnostic que la ventilation interne ou individuelle est défectueuse. Selon cette lettre, le plombier a aussi dit aux Bénéficiaires « qu’il y avait une possibilité que les dégâts se reproduisent chaque fois qu’il y aurait des travaux de ce genre dans la rue » (extrait de la pièce A-4).
[4] Monsieur Michel Hamel, T.P. du Service d’inspection-conciliation de l’Administrateur, après avoir procédé à une inspection du bâtiment le 25 février 2010 rend une décision le 12 mars 2010. Dans cette dernière, il conclut que la situation observée sur place en rapport avec la réclamation des Bénéficiaires rencontre tous les critères du vice caché. Par conséquent, il accueille la demande de réclamation des Bénéficiaires. Sous la rubrique « Analyse et décision (point 1) - il écrit ce qui suit :
«L’Entrepreneur devra s’assurer que les éléments du bâtiment ayant été affectés par l’écoulement d’eau sont secs et ne présentent pas de moississure.
À la suite des travaux de plomberie, l’entrepreneur devra remettre les lieux dans leur état d’origine, tout en portant une attention particulière pour minimiser les différences de teintes et textures inévitables avec l'adjacent.»
Sa conclusion se lit comme suit:
[5] « POUR TOUS CES MOTIFS L’ADMINISTRATEUR :
ACCUEILLE la demande de réclamation des Bénéficiaires pour le point 1.
ORDONNE à l’entrepreneur d’effectuer les travaux correctifs requis en ce qui a trait au point 1, et ce, dans un délai de 30 jours suivant réception de la présente. »
[6] L’Entrepreneur porta cette décision en arbitrage auprès du CCAC.
[7] Lors de la conférence préparatoire par voie téléphonique du 15 juin 2010, l’Entrepreneur a annoncé son intention de faire témoigner un expert à l’audience. Ce dernier devait visiter le bâtiment des Bénéficiaires et soumettre son expertise et ses notes biographiques à l’arbitre (ci-après appelé le « tribunal arbitral ») ainsi qu’aux autres parties le ou avant le 1er septembre 2010.
[8] Le 1er septembre 2010, aucune expertise et notes biographiques de cet expert n’ont été ainsi communiquées. Lorsque le tribunal arbitral appela le représentant de l’Entrepreneur, monsieur Léo Ouellet pour s'informer du statut de cette expertise, monsieur Ouellet l’informa qu’il a décidé de ne pas faire témoigner un expert lors de l’audience. Monsieur Ouellet a également confirmé ceci lors de la conférence téléphonique du tribunal arbitral avec les parties tenue le 28 octobre 2010.
[9] L’audition sur la demande d’arbitrage de l’Entrepreneur se déroula le 8 décembre 2010 au Palais de justice de Cowansville.
Juridiction
[10] Aucune objection préliminaire à la constitution du tribunal arbitral ou à la tenue de l’audition n’a été soulevée, le tribunal arbitral a déclaré que juridiction lui est acquise.
Preuve de l’Entrepreneur
Témoin : Monsieur Sylvain Barrette
[11] Le premier témoin de l’Entrepreneur est monsieur Sylvain Barrette.
[12] Il est le copropriétaire de la Plomberie Mi-Syl inc. dont le ou les employé(s) ont installé la plomberie dans le bâtiment des Bénéficiaires.
[13] Il a sa carte de plombier depuis 1979. Il ne témoigne pas en qualité de témoin-expert.
[14] La pratique chez Plomberie Mi-Syl inc. est qu’une fois que l’installation de la plomberie dans un nouvel immeuble comme celui des Bénéficiaires est complétée, le témoin ou son associé font une inspection finale de cette installation.
[15] Il n’a pas personnellement fait cette inspection dans le cas du bâtiment des Bénéficiaires et pense que c’est son associé qui a dû la faire.
[16] Il a fait la plomberie dans beaucoup de maisons appelées «Les Maisons Pommard» comme celle des Bénéficiaires.
[17] Il n’a pas de plans de la plomberie des Maisons Pommard. Selon lui, le Code national de plomberie du Canada (1995) ne l’exige pas. Il ajoute que c'est précisément cette version du code de plomberie qui s'applique au bâtiment.
[18] Il dépose comme pièce E-1 un croquis fait à la main de la plomberie du bâtiment des Bénéficiaires.
[19] Il déclare que l’article A-5.6.3.1)c) du Code de plomberie mentionné par le plombier de la ville de Cowansville dans son rapport ne devrait pas s’appliquer au système de ventilation de la plomberie du bâtiment (pièce A-5 en liasse).
[20] Selon lui, cette ventilation de la toilette des Bénéficiaires est faite par le système de ventilation du lavabo qu’il indique sur le croquis déposé comme pièce E-1.
[21] Selon lui, le débordement d’eau survenu en septembre 2009 de cette toilette a été causé par une pression excessive lors du nettoyage des égouts par la ville de Cowansville.
[22] Il déclare qu’il n’est pas à l’aise de référer aux articles précis du Code national de la plomberie applicable dans ce dossier. Il répète que selon lui, la ventilation de la plomberie de la toilette des Bénéficiaires était conforme à la loi. Il préfère laisser la tâche au second témoin, soit madame Laurence Schafroth de faire des références aux articles spécifiques de ce code.
Témoin : Madame Laurence Schafroth
[23] Le prochain témoin de l’Entrepreneur est madame Laurence Schafroth, inspecteure à la Régie du bâtiment du Québec.
[24] Le procureur de l’Administrateur s’objecte à ce qu'elle puisse être qualifiée de témoin-expert. Le tribunal arbitral décide de lui permettre de faire des références au Code national de la plomberie mais ne lui permet pas de donner son opinion quant aux questions reliées à la conformité ou la non-conformité de l’installation de la plomberie du bâtiment aux normes et aux règles de l’art qui la régissent, et plus particulièrement celles énoncées au Code national de la plomberie du Canada.
[25] Le témoin réfère aux articles 5.6.3(1) et 5.6.3(2) du Code national de la plomberie du Canada (1995) (avec les modifications applicables au Québec) et adoptés par le chapitre III du Code de construction. Ces articles sont mentionnés au rapport d'inspection du plombier de la ville de Cowansville auquel fait référence l'Administrateur dans sa décision.
[26] Lorsqu’elle tente de donner son opinion à propos du système de ventilation de plomberie de la toilette des Bénéficiaires et le sinistre survenu en septembre 2009 en référant aux articles précités du Code national de la plomberie du Canada (1995) précité - le procureur de l’Administrateur s’objecte à ce témoignage étant donné qu’elle n’a pas été reconnue comme un expert. Le tribunal maintient son objection.
[27] L'Entrepreneur met fin au témoignage de madame Shafroth
Preuve des Bénéficiaires
Témoin : Madame Marie-Pier Dion
[28] Madame Dion est co-Bénéficiaire. Elle a surveillé personnellement toutes les étapes de la construction de sa résidence. Elle allait voir les travaux de construction 3 ou 4 fois par jour.
[29] Elle a vu seulement un plombier qui faisait l’installation de la plomberie sur le chantier de construction pendant trois jours au total. Elle n’a vu aucun autre plombier et aucun autre représentant de Plomberie Mi-Syl inc. sur ce chantier.
[30] Elle décrit les circonstances entourant le débordement d’eau de sa toilette au rez-de-chaussée. Cette toilette a débordé lorsqu’un sous-traitant de la ville de Cowansville faisait le nettoyage des égouts de la ville. L’eau sortant de la toilette a débordé et elle a coulé à travers un trou du plancher jusqu'à la salle de bain située au sous-sol. Lorsque l’eau s'est arrêtée de sortir de la toilette, du vent a commencé à en sortir.
[31] Elle a alerté monsieur Hugues Bourret, technicien au Service en génie de la ville de Cowansville. Le nettoyage des égouts a été arrêté. Monsieur Bourret a pris des photos.
[32] La ville a mandaté un plombier, monsieur Thibodeau, pour faire une inspection, ce qu’il fit le lendemain.
[33] Les travaux de nettoyage des égouts de la ville étaient effectués sur la rue où se trouve la résidence des Bénéficiaires, à quelque cinq maisons plus loin. Sur les 19 maisons qui se trouvent sur cette rue, aucune autre n’avait été affectée par ces travaux de nettoyage.
[34] Elle a parlé avec monsieur Frédérick Côté du Groupe Deslandes qui était le sous-traitant responsable du nettoyage des égouts. Monsieur Côté lui a déclaré qu’il ne comprenait pas pourquoi les quatre maisons qui séparaient la sienne du site des travaux de nettoyage n’ont subi aucun dégât malgré le fait qu’elles étaient soumises à la même pression d’eau lors de ces travaux.
[35] Elle décrit les dégâts plus amplement. L’eau qui est sortie de sa toilette a coulé sur le plancher et ensuite elle a coulé sur le plafond de la salle de bain du sous-sol. Elle pense que l’eau a également coulé sur les murs.
Preuve de l’Administrateur
Témoin : Monsieur Alain Thibodeau
[36] Ce que le tribunal arbitral retient du témoignage de monsieur Thibodeau est ceci :
[37] Monsieur Thibodeau est membre des Maîtres mécaniciens en tuyauterie et membre du CMMTQ. Il possède une carte de compagnon.
[38] À la demande non contestée du procureur de l’Administrateur, le tribunal arbitral l’a reconnu comme un témoin-expert.
[39] Il explique que la ville de Cowansville l’appelle, et ce depuis 10 ans, chaque fois qu’il y a un sinistre qui implique la plomberie.
[40] Lors de son inspection du bâtiment des Bénéficiaires après le sinistre, il a constaté un problème avec le système de ventilation de la plomberie dans le bâtiment.
[41] Selon lui, les dispositions du Code national de la plomberie 2005 sont semblables à celles du Code national de la plomberie du Canada 1995 (tel que modifié en 2002 ou 2003).
[42] Il fait référence entre autres aux articles 2.5.4.4 (pièce A-14), 2.5.4.2 (pièce A-15), 2.5.5.5 (pièce A-16), 2.5.4.1 et 2.5.4.2 (pièce A-17) du Code de la plomberie - Canada (2005) (intégrant les modifications du Québec).
[43] Selon la compréhension du tribunal arbitral de son témoignage, le tuyau d’évacuation de la toilette au rez-de-chaussée du bâtiment est mal ventilé.
[44] Cette ventilation aurait dû être faite par un des deux systèmes suivants pour être conforme aux normes du Code de la plomberie: le premier pourrait être un prolongement de la colonne de chute (c’est-à-dire le tuyau d’évacuation d’eau usée vertical qui traverse un ou plusieurs étages et qui comprend toute déviation) - lequel agirait comme un « évent mouillé ». Le deuxième système conforme aux normes serait celui utilisant un tuyau de ventilation d’équilibrage. Cette deuxième solution est requise lorsque le branchement entre la toilette et la colonne de chute excède 3 mètres, selon les exigences du Code de la plomberie. Dans le cas de la toilette au rez-de-chaussée chez les Bénéficiaires, ce branchement mesure quelque 5.48 mètres (18 pieds).
Commentaire - arguments écrits
[45] À la fin de l’audience, le tribunal arbitral a permis aux parties de soumettre leurs arguments et autorités par écrit. Toutes les parties les ont soumis. La dernière plaidoirie écrite, soit celle des Bénéficiaires est datée du 23 janvier 2011et elle a été reçue le lendemain par le tribunal arbitral.
Argumentation
[46] Les arguments écrits des parties peuvent se résumer comme suit:
Prétentions de l'Entrepreneur
[47] L'Entrepreneur dénonce le caractère irrégulier d'une partie de la preuve de l'Administrateur, notamment les références du témoin-expert Thibodeau à la version 2005 du Code national de plomberie, avec les modifications du Québec (ci-après appelée « Code de plomberie (2005) »). La compréhension du tribunal arbitral de son argument est que le Code de plomberie (2005) est entré en vigueur au Québec le 1er juillet 2008, soit postérieurement à la réception du bâtiment qui a eu lieu le 22 mai 2008, date à laquelle le prétendu vice caché de la plomberie de la toilette (soit une ventilation déficiente) existait déjà.
[48] L' Entrepreneur ajoute qu'étant donné que cette preuve de l'Administrateur faisait référence au Code de plomberie (2005) il appuiera ses propres arguments sur le même code.
[49] Ses arguments se détaillent comme suit:
a) Le WC (toilette) est raccordé sur un « branchement d'évacuation » et non une « colonne de chute ».
b) L'ensemble des « appareils sanitaires » de ce « branchement d'évacuation », est correctement ventilé au moyen d'une « ventilation secondaire » par le lavabo, d'une « ventilation interne » pour « l'appareil sanitaire » raccordé en aval du lavabo, soit le WC (toilette).
c) À l'appui du point b), l'Entrepreneur joint en annexe un rapport de trois pages avec des croquis du système de la ventilation de la toilette du rez-de-chaussée.
d). Il soumet qu'il ne peut s'agir d'un branchement avec une « déviation » nécessitant une « ventilation d'équilibrage » selon le témoignage de l'expert de l'Administrateur. À l'appui du point d), il annexe un document explicatif intitulé « Mise en contexte » de 4 pages contenant d'innombrables références aux dispositions du Code de plomberie (2005) et plusieurs commentaires. Ceci est accompagné d'une trentaine de pages tirées du Code de plomberie - Canada 2005 avec des définitions des termes techniques, des schémas et des notes explicatives.
[50] L'Entrepreneur soumet que l'incident du refoulement de la toilette s'est déroulé au même moment que les travaux de nettoyage des tuyaux de la ville. Il note que tous les « appareils sanitaires » (tels que définis au Code de plomberie (2005)) du sous-sol n'ont pas fait l'objet de refoulements et cela parce qu'ils sont tous protégés par des « clapets anti-retour », dispositifs prévus lors des refoulements.
[51] En résumant ce qui précède, Il conclut comme suit:
« En résumé, fonction de l'argumentation formulée et des détails fournis et expliqués, l'installation de plomberie ne peut être considérée non conforme ni être prise en cause comme responsable du refoulement d'eaux usées du WC (toilette) du R. C.. »
Prétentions de l'Administrateur
[52] Essentiellement, la prétention de l'Administrateur est que la toilette du rez-de-chaussée manque une « ventilation d'équilibrage » qui devrait être raccordée immédiatement au-dessus de la déviation de 18 pieds entre la toilette et la colonne de chute sur le côté gauche du croquis déposé par l'Entrepreneur comme pièce E-1, dont l'absence constitue un vice caché.
[53] A. Il l'explique de façon détaillée comme suit: les deux tuyaux verticaux qui apparaissent sur le croquis de l'Entrepreneur produit sous la cote E-1, sont deux « colonnes de chute »; celle qui est la plus à gauche sur le croquis coté pièce E-1 étant une « colonne de chute primaire » et celle apparaissant sur le côté droit du croquis étant une « colonne de chute secondaire » (Tous les mots en italiques sont des termes définis dans le Code de plomberie (2005) et le Code de plomberie (1995).)
B. En référant principalement aux définitions de « colonne de chute » (article 1.4.1.2 du Code de plomberie - Canada (2005) et article 1.3.2 du Code national de la plomberie (1995)) (ci-après appelé « Code de plomberie (1995), de « colonne de ventilation primaire » (article 2.5.4.1 du Code de plomberie - (2005) et l'article 5.4.1.1) du Code de plomberie - (1995), ainsi qu'à celle de « déviation d'allure horizontale », (article 2.5.4.4 du Code de plomberie (2005) et article 5.4.4 du Code de plomberie (1995) - il conclut que l'absence du tuyau de ventilation d'équilibrage pour déviation qui doit être raccordé à la partie verticale immédiatement au-dessus de la déviation de 18 pieds entre la toilette et la colonne de chute primaire, constitue une non-conformité aux normes et règles de l'art prévues au Code de plomberie (1995) ainsi qu'à celui de (2005) et, constitue un vice caché.
Prétentions des Bénéficiaires
[54] Les Bénéficiaires contestent le témoignage de monsieur Sylvain Barrette à l'effet que son associé a fait une inspection finale des travaux de plomberie dans leur bâtiment. Madame Dion ne l'a jamais rencontré lors de ses visites quotidiennes au chantier lors de la construction de sa résidence et de l'installation de la plomberie. Ils contestent donc l'argument de l'Entrepreneur à l'effet que l'installation de la plomberie est conforme car, selon eux, cette plomberie n'a jamais été sujette à une inspection finale par un représentant de la plomberie Mi-Syl inc.
[55] Selon eux, les documents faisant partie de l'argumentation écrite de l'Entrepreneur pourraient être considérés comme une expertise. Cependant cette expertise a été présentée tardivement c'est-à-dire à l'étape de l'argumentation écrite plutôt qu'à l'audience, à l'étape de la preuve de l'Entrepreneur.
Analyse et décision
[56] Considérant que l'Entrepreneur a initié la procédure d'arbitrage dans ce dossier, c'est à lui que revient le fardeau de prouver au tribunal arbitral de façon convaincante qu'il devrait modifier la décision de l'Administrateur.
[57] Le tribunal arbitral accepte l'argument de l'Entrepreneur à l'effet que le système de ventilation de la plomberie de la toilette au rez-de-chaussée du bâtiment des Bénéficiaires lors de l'incident survenu le 14 septembre 2009 devait être conforme aux normes et aux règles de l'art prévalant lors de la réception du bâtiment soit le 22 mai 2008. Cette réception est démontrée par la déclaration de réception du bâtiment faisant partie de la pièce A-2 dans le cahier des pièces de l'Administrateur. Ces normes et ces règles de l'art sont celles prévues par le Code national de plomberie du Canada (1995) avec ses modifications pour le Québec, faisant partie du chapitre III - Plomberie - du Code de construction.
[58] Cet argument est fondé sur un principe connu et énoncé par les auteurs Jean-Louis Beaudoin et Patrice Deslauriers dans leur ouvrage fondamental et bien connu, intitulé «La responsabilité civile» et qui se lit comme suit:
«La référence à la notion des «règles de l'art» oblige ainsi les tribunaux à se rapporter à celles qui prévalaient au moment de la réalisation de l'ouvrage, donc de l'exécution du contrat, par opposition à celles présentes lors de la découverte du vice ou de l'institution des procédures. Les juges ont donc la tâche, parfois difficile, de retourner à l'époque de la construction de l'ouvrage et d'étudier les techniques alors en vigueur pour déterminer la faute.»[1]
[59] Il est donc surprenant que dans son argumentation écrite, l'Entrepreneur fait référence uniquement aux normes et aux règles de l'art prévues par les articles du Code de plomberie (2005). Il la justifie par le fait que l'Administrateur a aussi invoqué les dispositions du Code de plomberie (2005) à l'audience, à l'étape de sa preuve. Ceci est surprenant car le fardeau de la preuve pesait sur l'Entrepreneur plutôt que sur l'Administrateur. Le tribunal arbitral a rappelé à l'Entrepreneur que ce fardeau de preuve lui incombait lors de l'audience préliminaire par voie téléphonique et au début de l'audition au mérite.
[60] Pour pouvoir référer aux normes et aux règles de l'art en matière de ventilation de la plomberie mentionnées au Code de plomberie (2005), il aurait fallu que l'Entrepreneur prouve dans un premier temps qu'elles prévalaient également avant la mise en vigueur du Code de plomberie (2005), soit avant le 1er juillet 2008 et notamment le 22 mai 2008 (date de réception du bâtiment), et dans un deuxième temps, que la ventilation de la plomberie de la toilette au rez-de-chaussée du bâtiment des Bénéficiaires était conforme à ces normes.
[61] L'Entrepreneur n'a pas réussi à convaincre le tribunal arbitral, ni à l'audience à l'étape de la présentation de sa preuve ni dans son argumentation écrite, sur le premier point. Quant au deuxième point, sa preuve, qui aurait dû être faite par un témoin expert lors de l'audience, ne l'a pas été et sa tentative de la présenter dans son argumentation écrite ne peut être acceptée par le tribunal arbitral.
[62] Pour ces raisons, le tribunal arbitral doit rejeter la demande d'arbitrage de l'Entrepreneur.
[63] Malgré le fait que les motifs invoqués ci-haut sont suffisants pour rejeter la demande d'arbitrage de l'Entrepreneur, le tribunal arbitral désire toutefois souligner que, dans l'hypothèse où l'Entrepreneur aurait réussi à faire la preuve de la conformité du système de ventilation de plomberie de la toilette du bâtiment des Bénéficiaires aux normes de plomberie prévalant en mai 2008, pour convaincre le tribunal d'accueillir sa demande d'arbitrage, il aurait fallu qu'il démontre, par une preuve convaincante la raison pour laquelle un système de ventilation de plomberie conforme à ces normes a permis le débordement d'eau de la toilette en septembre 2008. Cette preuve additionnelle de la part de l'Entrepreneur serait requise à la lumière de la preuve des Bénéficiaires à l'effet qu'aucune des autres maisons situées sur la même rue que leur bâtiment, et plus particulièrement qu'aucune des quatre maisons situées entre le site du déroulement des travaux de nettoyage par le sous-traitant de la ville et l'emplacement du bâtiment, n'avait été affectée par ces travaux.
Conclusions supplémentaires
[64] La Loi sur le bâtiment[2] ainsi que le Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs[3] (« le Règlement ») ne contiennent pas de clauses privatives complètes. L'arbitre a compétence exclusive, sa décision lie les parties et elle est finale et sans appel.
[65] L'article 116 du Règlement prévoit qu'un arbitre statue conformément aux règles de droit; il fait aussi appel à l'équité lorsque les circonstances le justifient.
[66] Aux termes de l'article 123 du même Règlement, les coûts de l'arbitrage sont partagés à part égale entre l'Administrateur et l'Entrepreneur lorsque ce dernier est le demandeur. À l'étape de la présente procédure d'arbitrage - le demandeur est l'Entrepreneur.
POUR CES MOTIFS, LE TRIBUNAL ARBITRAL :
REJETTE la demande d'arbitrage de l'Entrepreneur;
CONFIRME la décision de l'Administrateur du 12 mars 2010 (dossier de l'Administrateur no 140287-2), écrite par monsieur Michel Hamel, T.P.
ORDONNE à l'Entrepreneur de se conformer à cette décision de l'Administrateur en faisant tous les travaux correctifs y mentionnés le ou avant le 30 avril 2011, à défaut de quoi ces travaux correctifs seront pris en charge par l'Administrateur et devront être complétés par ce dernier le ou avant le 31 mai 2011;
DÉCLARE que les frais d'arbitrage seront partagés également entre l'Entrepreneur et l'Administrateur.
|
|
Montréal, le 22 mars 2011 |
|
|
|
|
|
Me ALBERT ZOLTOWSKI Arbitre / CCAC |
[1] La responsabilité civile, Jean-Louis Beaudoin et Patrice Deslauriers, 7e édition, Les Éditions Yvon Blais inc., 2007, Volume II, paragraphe 2-241, page 232.
[2] Loi sur le bâtiment, L.R.Q., Chapitre B-1.1
[3] Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs, R.Q.C. B-1.1, r. 0.2.