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ARBITRAGE

En vertu du Règlement sur le plan de garantie

des bâtiments résidentiels neufs

(Décret 841-98 du 17 juin 1998)

 

Organisme d’arbitrage autorisé par la Régie du bâtiment :

Société pour la résolution des conflits inc. (SORECONI)

 

 

Entre

             

CHANTAL BRIEN

                                                                                                           

-et-

              FRANÇOIS FISICARO

             

Bénéficiaires

-et-

              PIERRE LÉGER CONSTRUCTION ENR.

 

                                                                                                             Entrepreneur

-et-

 

  LA GARANTIE DES BÂTIMENTS RÉSIDENTIELS

    NEUFS DE L’APCHQ INC.

 Administrateur de
 la garantie

 

No de dossier Plan de Garantie : 205515

No de dossier SORECONI :     080512001

 

 

SENTENCE ARBITRALE

 

 

 

Arbitre :                                                 Me Pierre Sébastien, c.r., Ad.E.

Représentante des bénéficiaires :            Me Lucie Marier

Représentant de l’entrepreneur : Me Martin Couillard

Représentant de l’administrateur :           Me Luc Séguin

Date de l’audience :                               22 avril 2009

Lieu de l’audience :                                358, rue Louis Jolliet, Châteauguay

Date de la décision :                               21  mai 2009

 

 


LA PROCÉDURE

 

 [1]      Il s’agit d’une réclamation soumise à l’arbitrage en vertu des dispositions de l’article 19 du Règlement sur le plan de garantie des bâtiments résidentiels neufs (c. B.-1.1, R.0.2) (« le Règlement »).

 

[2]       Les bénéficiaires contestent une décision rendue par l’administrateur de la garantie en date du 21 avril 2008 (pièce A-11) dans la mesure où celle-ci rejette un certain nombre de points qui faisaient l’objet de plaintes de leur part.

 

[3]       La décision, pièce A-11, a été suivie de deux décisions complémentaires, à savoir celle rendue le 22 mai 2008 ((pièce A-12) et celle du 11 février 2009 (pièce B-2), toutes deux favorables aux bénéficiaires.

 

[4]       Le 4 juillet 2008, l’arbitre recevait de SORECONI copie des décisions, pièces A-11 et A-12, et, le 17 juillet suivant, les procureurs de l’administrateur  lui communiquaient le cahier de pièces concernant ce dossier conformément aux dispositions de l’article 109 du Règlement.

           

[5]       Toutefois, avant que l’arbitre ne puisse convenir avec les parties d’une date pour l’arbitrage, il était avisé par le greffe de SORECONI que, suite à une seconde réclamation écrite logée par les bénéficiaires le 14 avril précédent, une nouvelle inspection par l’administrateur était prévue pour le 19 août 2008 et qu’il y avait lieu, dès lors, de suspendre le dossier.

 

[6]       En novembre, l’arbitre était avisé qu’une nouvelle décision avait été rendue par l’administrateur et, le 15 décembre 2008, il recevait, de fait, de l’avocate des bénéficiaires copie d’une décision rendue en date du 16 octobre 2008 (pièce B-1) concernant la réclamation écrite du 14 avril 2008.

 

[7]       Le 17 décembre 2008, l’arbitre fixait au 20 janvier suivant la date de l’arbitrage et en avisait les parties.

 

[8]       Le 18 décembre 2008, l’avocat de l’administrateur informait le tribunal qu’à sa connaissance ni l’entrepreneur ni les bénéficiaires n’avaient requis l’arbitrage sur la décision du 16 octobre, pièce B-1, et qu’il n’avait donc pas préparé le cahier de pièces additionnelles requis par le Règlement.

 

[9]       Après de nombreuses tentatives infructueuses pour fixer une date d’arbitrage, celui-ci devait finalement être fixé pour le 22 avril 2009 à la résidence des bénéficiaires, l’avocat de l’administrateur ayant préalablement confirmé à l’arbitre qu’à sa connaissance, la décision du 16 octobre, pièce B-1, n’avait pas été portée à l’arbitrage et qu’une troisième plainte avait au surplus été déposée par les bénéficiaires.

 

[10]     Au cours du mois de février 2009, l’administrateur rendait deux décisions complémentaires, à savoir celle du 11 février 2009 (pièce B-2) qui complétait la décision, pièce A-11, et une autre en date du 16 février 2009 (pièce B-3) qui, elle, complétait la décision, pièce B-1.

 

[11]     Enfin, le jour de l’audition même, l’avocate des bénéficiaires remettait à l’arbitre une décision additionnelle rendue par l’administrateur en date du 17 avril 2009 (pièce B-4), décision qui résultait d’une troisième réclamation écrite reçue des bénéficiaires le 17 décembre 2008.

 

[12]     Quant à cette dernière décision, pièce B-4, les bénéficiaires signalaient au tribunal par leur avocate qu’ils se réservaient le droit de contester les points qui n’étaient pas en leur faveur, le délai de 30 jours prescrit par l’article 19 du Règlement n’étant toujours pas écoulé.

 

[13]     Par ailleurs, l’avocat de l’administrateur et celui de l’entrepreneur soulevaient à titre d’objection préliminaire que l’arbitre n’était saisi d’aucune plainte relativement à la décision rendue par l’administrateur le 16 octobre 2008, pièce B-1, telle que complétée par la décision, pièce B-3, et qu’il n’avait pas, en conséquence, la compétence nécessaire pour entendre les plaintes des bénéficiaires à l’égard de cette décision.

 

 [14]    Devant cette situation et considérant l’importance de la question de droit ainsi soulevée, le tribunal choisissait d’entendre les parties sur l’objection préliminaire, de réserver sa décision quant à cette question et de ne  procéder que sur les plaintes régulièrement logées à l’encontre de la décision du 21 avril 2008, pièce A-11 (à laquelle se rattachent les décisions complémentaires A-12 et B-2).

 

 

L’OBJECTION PRÉLIMINAIRE

 

[15]     Il est reconnu par les parties et il appert du dossier transmis à l’arbitre par le greffe de SORECONI qu’aucune demande d’arbitrage autre que celle logée à l’encontre de la décision du 21 avril 2008, pièce A-11 (à laquelle se rattachent les décisions complémentaires A-12 et B-2), n’a été faite dans le délai de 30 jours prescrit par l’article 19 du Règlement.

 

[16]     L’avocat de l’administrateur plaide à bon droit que le Règlement est d’ordre public et qu’il exige, comme le rappelle d’ailleurs le formulaire accompagnant chacune des décisions de l’administrateur, qu’un bénéficiaire ou un entrepreneur soumette un différend dans les 30 jours de la réception d’une décision de l’administrateur, ceci sous peine de caducité.

 

[17]     L’avocat de l’entrepreneur abonde dans le même sens alors que l’avocate des bénéficiaires, s’appuyant sur le témoignage de son client et sur ses gestes, plaide qu’il faut considérer les plaintes logées contre les décisions du 16 octobre 2008, pièce B-1, et du 17 avril 2009, pièces B-4 dans le cadre de l’arbitrage régulièrement initié dans le cas du différend concernant la décision de l’administrateur du 21 avril 2008, pièce A-11, et qu’en toutes circonstances, l’article 116 du Règlement accorde à l’arbitre le pouvoir de statuer en faisant appel à l’équité lorsque les circonstances le justifient.

 

[18]     Chaque partie soulève le préjudice soit d’ordre administratif ou d’ordre économique qu’une décision qui les défavoriserait pourrait leur causer.

 

[19]     Sur le tout et après avoir pris en considération la jurisprudence tant arbitrale que judiciaire soumise par les parties, le tribunal en arrive à la conclusion que les bénéficiaires ont manqué à l’obligation que leur imposait le Règlement et qui leur était clairement rappelée dans le formulaire accompagnant chacune des décisions de l’administrateur dont celle du 16 octobre 2008, pièce B-1, de demander l’arbitrage pour signifier qu’ils en étaient insatisfaits.

 

[20]     Cette décision de l’administrateur procédait d’une seconde réclamation écrite formulée par les bénéficiaires le 14 avril 2008 et cette nouvelle réclamation constituait donc un recours différent du premier.

 

[21]     Suivant l’article 116 du Règlement, l’arbitre a l’obligation de statuer conformément aux règles de droit et les circonstances relatées ne le justifient pas de faire appel à l’équité pour absoudre les bénéficiaires de ne pas s’être plaint de la décision de l’administrateur du 16 octobre 2008, pièce B-1.

 

 

 

LE MÉRITE

 

[22]     Relativement à la décision de l’administrateur en date du 21 avril 2008 (pièce A-11), l’avocate des bénéficiaires confirmait le jour de l’audition que ses clients contestaient les décisions  de l’administrateur quant aux points 5, 6, 7, 8, 10, 11 et 13.

 

[23]     Les plaintes des bénéficiaires quant aux points 5, 6, 7 et 8 ont été rejetées par l’administrateur au motif que ces points n’avaient pas été dénoncés par écrit au moment de la réception contrairement aux exigences de l’article 3.2 du contrat de garantie.

 

[24]     L’article 3.2 du contrat de garantie se lit comme suit :

 

3.2 Vice et malfaçon : La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc. réparera les vices et malfaçons apparents visés à l’article 2111 du Code civil du Québec et dénoncés, par écrit, au moment de la réception ou, tant que le bénéficiaire n’a pas emménagé, dans les trois (3) jours qui suivent la réception;

 

La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc. réparera les malfaçons existantes et non apparentes au moment de la réception et découvertes dans l’année qui suit la réception, malfaçons qui sont visées aux articles 2113 et 2120 du Code civil du Québec et qui sont dénoncées, par écrit, à l’entrepreneur et à La Garantie des bâtiments résidentiels neufs de l’APCHQ inc. dans un délai raisonnable, lequel ne peut excéder six (6) mois de la découverte des malfaçons.

 

[25]     L’administrateur prétend que la date de réception devrait être celle du contrat de vente (pièce A-3) passé devant le notaire Alain Durand le16 août 2007 et que les vices et malfaçons dont on se plaint n’ont donc pas été dénoncés en temps utile.

 

[26]     Les bénéficiaires, de leur côté, plaident que l’inspection conjointe du bâtiment à partir de la liste préétablie d’éléments à vérifier fournie par l’administrateur n’a pas été faite et qu’en conséquence, le non-respect d’un délai de recours ne peut être reproché aux bénéficiaires aux termes de l’article 19.1 du Règlement.

 

[27]     Les bénéficiaires ont produit, à cet égard, comme pièce B-5 une lettre du notaire Durand qui confirme qu’à la date de la vente, cette inspection conjointe du bâtiment avec liste préétablie n’avait pas encore été faite et il n’y a aucune preuve devant l’arbitre à l’effet qu’une telle liste ait été établie.

 

[28]     En conséquence, l’arbitre rejette le motif de non-dénonciation écrite formulé par l’administrateur quant aux points 5, 6, 7 et 8.

 

[29]     Par ailleurs, la visite des lieux et les témoignages entendus, notamment en ce qui concerne le point 7 (soffites et fascias différents), ont convaincus l’arbitre qu’il s’agissait dans tous ces cas de malfaçons devant être corrigées.

 

[30]     La plainte quant au point 10 a été rejetée pour absence de malfaçons.

 

[31] Après visite des lieux et après avoir entendu les témoignages tant du bénéficiaire Fisicaro que de l’inspecteur Lalancette et de l’entrepreneur Léger, l’arbitre conclut comme l’administrateur de la garantie à l’absence de malfaçons quant au point 10 et rejette la réclamation à cet égard.

 

[32]     La plainte quant au point 11 concernant le nivellement du terrain a été rejetée par l’administrateur au motif que les travaux de terrassement sont exclus de la garantie suivant l’article 4.2 du contrat de garantie et de l’article 12, neuvième paragraphe du Règlement, ce à quoi l’arbitre se rallie pour rejeter la réclamation.

 

[33]     Enfin, en ce qui concerne la plainte quant au point 13 relative à l’installation par le bénéficiaire Fisicaro d’un four micro-ondes, l’arbitre conclut comme l’administrateur à l’effet que le contrat de garantie ne couvre pas ce type de réclamation et, comme lui, la rejette.

 

           

POUR CES RAISONS, LE TRIBUNAL ARBITRAL :

 

 

ACCUEILLE l’objection préliminaire de l’administrateur de la garantie et celle de l’entrepreneur à l’effet que la décision de l’administrateur en date du 16 octobre 2008, pièce B-1, et du 17 avril 2009, pièces B-4 et déclare caduques les plaintes des bénéficiaires à cet égard;

 

ACCORDE aux bénéficiaires, si ce n’est déjà fait, un délai additionnel de 30 jours à compter de la date de la présente décision arbitrale pour soumettre à l’arbitrage tout différend concernant la décision de l’administrateur en date du 17 avril 2009 (pièce B-4);

 

ACCUEILLE les plaintes des bénéficiaires quant aux points 5 à 8 de la décision de l’administrateur en date du 21 avril 2008 (pièce A-11);

 

REJETTE les plaintes des bénéficiaires quant aux points 10, 11 et 13 de la décision de l’administrateur en date du 21 avril 2008 (pièce A-11);

 

CONDAMNE l’entrepreneur et, à son défaut, l’administrateur de la garantie à parachever ou corriger les défauts de construction dénoncés et explicités aux points 5 à 8 de la décision de l’administrateur en date du 21 avril 2008 (pièce A-11);

 

CONDAMNE l’administrateur de la garantie à rembourser aux bénéficiaires les coûts de l’arbitrage.

 

 

 

 

Signé à  Montréal, ce 21ème jour de mai 2009,

 

 

 

 

 

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 Le bâtonnier Pierre Sébastien, c.r., Ad.E.